Empl. trans. "Vaincre"

-

Au passif : Car .C. et .XXVII. contrees Diverses furent aoultrees Des Persens et mis a treü. (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 258).

Rem. Aussi CUVELIER, Chans. Guescl. C., c.1380-1385, var. du v.2391.
 

A. -

"Outrance, excès"

1.

[Dans les choses, dans le comportement]

a)

[Dans les choses] : Mal sus mal si n'est pas santé, Trop sus trop si est grant oultrage (RÉGN., F.A., 1432-c.1465, 172).

b)

[Dans le comportement] : ...Dangiers orguilleusement Respont et despiteusement Tout premiers que celle requeste N'est bonne, belle, ne honneste, Eins est outrages et folie ; Et dit que moult bien emploiie Seroit une trés grant vergoingne A celui qui point ne ressoingne Si haute joie a demander Com celle qu'il devroit garder (MACH., D. verg., a.1340, 40). Aucuns homs sara que sa fame Se gettera en un diffame Par sa folie et son outrage, Dont elle ara honte et damage, Ou d'un amant sa bien amée Qui porra estre diffamée Par la maniere devant dite Que j'ay en sousposant descrite. (MACH., D. Aler., a.1349, 388). Sire, j'ay vesqui longue espace En orgueil, en oultrage, en ire Dissoluement com le pire Du monde et plus desnaturé. (Mir. parr., 1356, 41). Li don d'amour ne vont que par outrage, Dames en ont le jugement ouvert. (FROISS., Ball. B., c.1362-1377, 22). Et fruis est tels, on en puet bien parler, Qui trop en prent, il fait un grant outrage (FROISS., Ball. B., c.1362-1377, 31). Quant je m'avise et je devis Comment outrages et folie Me misent en merancolie Que dou don de Nature perdre, Pensees me viennent aherdre, Qui me font sainnier a mervelles (FROISS., Joli buiss. F., 1373, 50). Souvent vit joune homme en desroy, Et péche trop plus par oultrage Quant n'a famme par mariage, Et fait plus d'inconveniens Qu'un autres homs (Mir. ste Bauth., c.1376, 82). Et povons assez demonstrer que ce abstinences soit contre nature vegetative, parce que il ne reçoit pas deübment son nourrissement. Secondement, c'est contre nature sensitive, parce que il ne prent nulle delectacion. Tiercement, c'est contre nature intellectuele, car naturel entendement si enseingne de nourrir le corps souffisament, sanz outrage. (Songe verg. S., t.2, 1378, 223). Estat, de soy, est bon, quer il est dit de stabilité ou estableté ou fermeté. Maiz quant oultrage se joint et se marie a estat, tres mauvaise lignee s'ensuit (GERS., Annonc., a.1400, 237). Si te respons que la folie des mendres hommes est fondee sur l'outraige des plus grans et que les pechiez et desordonnances descendent des greigneurs aux plus petiz. (CHART., Q. inv., 1422, 37). Maiz tous iceulx qui ont les corps Purgiez d'umeurs moult secz et fors, Vivans sans paour hors tristesce, Garniz de joie et hardiesce, Voulans aussi, de bon courage, Fouir excez et grant oultrage Tant en mengier qu'en traveillier Qu'en reposer et en veillier, Pevent avoir grant asseurance En temps de boce ou pestillence. (LA HAYE, P. peste, 1426, 60). Et, pour mieulx garder de l'outrage, Doit aviser tout homme sage De quoy sourdra prouchainement Le venimeux encombrement, Qui pluseurs cuers destraint et serre Ou sourt de l'air ou desoubz terre (LA HAYE, P. peste, 1426, 78). LE DUC DE FLORENCE. Faire luy debvons reverance, Car moult nous aime, bien le sçay. Pour ce, briefmant je descendray, Et a pied l'yray saluer. Descendat de equo. LE ROY DE CARTAIGE. Il ne vous failloit remuer Pour ce faire, c'est grant oultraige. (Myst. st Adr. P., c.1450-1485, 49). "Et quelle chere, dit le mary, vous a fait vostre hoste ? Par Dieu, il est bon compaignon. - Bon compaignon ! dit elle ; il n'y a rien d'oultraige . Je ne m'en saroie loer que tout a point..." (C.N.N., c.1456-1467, 410). ...a yceulx cinq [le duc] alla racompter les parolles de messire Henry ; et (...) dirent qu'il estoit bon de luy donner rencontre, non obstant qu'il ne seoit pas a deux d'un ostel estre souffert d'entrer en celuy dangier, mes l'outraige de l'un pooit bien donner couverture a ung aultre de faire samblable. (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 137).

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À (grand) outrage. "À l'excès, démesurément" : Tres fol est a grant outrage Qui celui qui fist l'ouvrage Dieu Veult comprendre en sa casee. (GUILL. DIGULL., Pèler. âme S., c.1355-1358, 355). ...car c'est raison qu'ilz mengussent d'une tire, sans seoir a oultrage, et a une alaine, sans reposer sur leur viande ou arrester ou acouster sur la table (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 135). ...j'ay bu A outrage. (Myst. st Clément Metz D., p.1439, 406).

Rem. Renart contref. R.L., 1328-1342, gloss. ; Chev. papegau C.V., c.1400-1500, 75/61.

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En outrage. "À l'excès, démesurément"

Rem. Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], gloss.

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Par outrage. "En donnant dans l'excès, la démesure" : Vous li avez escript [au roi] paroles Qui sont rudes, nices et foles, Et mauvaisement contruvées, Que mar fussent elles pensées. Vous l'avez appellé de gage, Sans nulle cause, par outrage ; Si que vous vous en desdirez, Et devant chascun li direz Qu'il est preudons, justes, loiaus, Et qu'onques ne fu desloiaus, Et qu'en li nul mal ne savez (MACH., P. Alex., p.1369, 242). Le follarge en un seul moment Pert mesure et gouvernement, Follargement despent le sien Par oultrage et ne retient rien. (THOMAS MAILLET, Prov. Alain H., c.1375-1400, 84). Je vous pardoins le mort du senescal sauvage Qui vous eut escarny et feru par outrage (Jourd. Blaye alex. M., a.1455, 220).

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Sans outrage. "Sans excès" : Il tenoit grans convives joyeux et senz outraige (Gir. Ross. H., c.1334, 188).

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Faire outrage. "Donner dans l'excès" : ...s'il est vrais amis Et en l'amoureus servage Vuet mettre vie et usage De cuer, com loyaus sougis, Folour feroit et oultrage De plus voloir ; ce m'est vis. (MACH., Les lays, 1377, 385). [Dans l'amabilité] Ha ! sire, dist Lyonnel, vous faictes oultraige, qui estes descendu pour ung garçon que je suy ! (Percef. I, R., t.1, c.1450 [c.1340], 341).

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Faire outrage envers qqn : [Dans l'honneur qui est fait] Chier sire, vous faictes oultraige envers nous car il semble que vous faciez pour nous autant que se le roy Alexandre y fust descendu. (Percef. I, R., t.2, c.1450 [c.1340], 698).

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Faire outrage de + inf. "Commettre les plus grands excès en..." : Gens de mestiers, de tous ouvrages, Y vi de boire faire oultrages (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 74).

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Faire des outrages. "Faire des excès" : GLOUTONNIE. ...Se tu savoies bien les gas, Les outrages et le lagan Que de viandes fas par an... (GUILL. DIGULL., Pèler. vie hum. S., c.1330-1331, 321). Je me suis eslevee ou eslevé et ay eu orgueil des grans despens que j'ay aucune foiz faiz, ou des grans outraiges et superfluitez, comme de viandes grandes et outrageuses, comme a donner grans mengiers et belles chambres, assembler grans compaignies, donner joyaulx aux dames et aux seigneurs et a leurs officiers ou menestrez pour estre alosez d'eulx, et pour dire de moy que je fusses noble et vaillant et large. (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 24).

2.

[Dans l'initiative, dans l'audace] "Témérité, présomption" : Coment osa il onquez tel outraige penser D'aller tous seulz a l'ost a princhez assambler ? (Hugues Capet Lab., c.1358, 132). Il avoit là un amiraut, Qui estoit venus à l'assaut. Il dist au roy : "Viens-tu conquerre Nostre païs et nostre terre ? Je te moustreray ta folie, Ton outrage et ta cornardie." Lors donna au roy tel colée, D'une fort lance bien ferrée, Qu'il le fist reculer IIJ. pas. Li roy li dist : "Tu ne scez pas Encor comment m'espée taille..." (MACH., P. Alex., p.1369, 71). ... cil Flament s'aventiroient follement et outrageusement... si en avoit souvent des mors et des bleciés par leur outrage (FROISS., Chron. R., IX, c.1375-1400, 195). Et i fu mors lor chapitainne Clais Denneqin et, de sesse mille honmes que il estoient, il n'en escapa onques mille, que tout ne fuissent mort et ocis et abatu l'un sus l'autre, car il ne dagnierent fuir. Et la fu ocis li Borgnes de Robertsart par son oultrage, car il s'avança trop follement en la cace. (FROISS., Chron. D., p.1400, 179). ...en hault courage Point n'appartient orgueil, n'oultrage (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 35). ..."ton outraige Te fera une foys mourir !" (Fr. arch. B., c.1468-1480, 33).

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Par son (fol) outrage. "En montrant une folle témérité" : ...le roy d'Ausay l'a demandee a femme, mais elle ne s'i est pas voulu assentir, pour ce que autrefoiz avoit esté mariez. Lequel roy d'Ausay en a eu tel despit qu'il a deffiee la damoiselle et son pays, et y est entrez a force, et banniere desploiee, faisant guerre de sang et de feu, par son oultraige, sans cause et sans raison, et l'a assegiee, lui et ses gens, en la ville et chastel de Lucembourc, et a juré que jamais ne s'en partira jusques a ce qu'il l'aura prise. (ARRAS, c.1392-1393, 150). Par foy, dist Gieffroy, je lui apporte [au géant] le patiz qu'il a prins par son fol oultraige sur les gens de la terre de monseigneur mon pere, en la pointe du fer de ma lance ; car, jamais, tant comme je vive, autre patiz n'en aura, et deusse mourir en la peine. (ARRAS, c.1392-1393, 240).

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Mots d'outrage. "Paroles téméraires, présomptueuses" : Porrus envoya ses messages A Alixandre et mos d'oultrages Luy manda, com jadis fist Daire, Mais il ne s'en effroya guaire (CHR. PIZ., M.F., IV, 1400-1403, 51).

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"Acte téméraire" : ... : ilz avoient esté en conseil ensamble et en collacion, à savoir comment ilz se maintenroient et se ilz tenroient la ville ou nom. Les aucuns s'accordoient ad ce que ilz le tenissent, mais la plus sainne partie le debatoient et disoient que de tenir et là demourer, ilz feroient folie et outraige, car ilz seroient enclos de tous costez, et ilz estoient trop loncgs de leurs fors et, s'ilz estoient assiegiez, il n'estoit pas apparant qui les pourroit secourir (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 167).

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[Avec une valeur positive] "Acte de bravoure" : Là fist messires Guillaumes de Felleton une grant apertise d'armes et un grant oultrage ; car il descendi de la montagne, la lance abaissie, en esperonnant le coursier, et s'en vint ferir entre les Espagnols (FROISS., Chron. L., VII, c.1375-1400, 23).

3.

[Dans la façon de se tenir, dans l'habillement] "Outrance, extravagance" : ...s'il y a aucun homme ou femme qui voye faire a aultre quelque oultrage ou desordonnance en habit ou abillement, tantost les autres le suivent et dient il fault faire comme les aultres. Mais ilz dient voir : il fault que un oultrageux suive un aultre. (CHR. PIZ., Trois vertus W.H., c.1405, 158).

B. -

P. méton. "Ce qui est outrancier (faute, violence ou offense)"

1.

"Faute grave, acte inadmissible" : ...en tel maniere en ouvra Que la teste li dessevra [à l'oiseau] Tantost en l'eure de son corps (...) Et le geta sans nul respit Jus a la terre par despit. Dont tuit cil qui ce fait veïrent A merveilles s'en esbahirent, Et moult le damage peserent. Si ot de telz qui en parlerent, Nom pas qu'il eüst fait outrage, Mais en regretant le damage. (MACH., D. Aler., a.1349, 358). Mais qui son forfait continue Et dou parfaire s'esvertue Jusqu'a tant qu'il vient au derrien, Et a ce point ne trueve rien Fors que son dueil et son damage, Se lors recongnoist son outrage, Il vient trop tart au repentir. Guillaume, sachiez sans mentir, Qu'ensement avez vous ouvré. (MACH., J. R. Nav., 1349, 267). Rois, or saches certeinnement Que Daniel communement Aoure son dieu a genous Trois fois le jour. Chascuns de nous Le scet, l'a veü, l'a prouvé, Et tantost li avons trouvé, Et nous t'en portons tesmognage De ce despit, de cest outrage, Qu'a ta loy nulle riens n'aconte, Et si vous fait despit et honte. (MACH., C. ami, 1357, 39). Amis, ne fai pas tel outrage Com de brisier ton mariage, Car vraiement, qui y enchiet, Dieus s'en couresse et l'en meschiet. (MACH., C. ami, 1357, 128). [Le roi] Perceval, vous savez comment Florimont de gage m'apelle, Qui est mervilleuse nouvelle Et pleinne de moult grant desroy, C'uns chevaliers appelle un roy. Il mesprent si villeinnement Et si tres orguilleusement, Que c'est la rien qui plus m'anoie, Comment que confortez en soie. De riens ne li croist vasselages, Eins est folie et grans outrages De mettre en tel lettre s'estude. Il est moult pleins d'ingratitude, Qu'il ne recongnoit les biensfais Que par maintes fois li ay fais. (MACH., P. Alex., p.1369, 234). ...on avoit fait un trop grant outrage, quant on avoit occis le baillieu dou conte faissant son office (FROISS., Chron. R., IX, c.1375-1400, 179). ... il li ocirent son baillieu. Encores de rechief, il leur pardonna cel outrage pour eulx tenir en paix (FROISS., Chron. R., IX, c.1375-1400, 223). Tuer le cuide, mais cellui Prie qu'il ait merci de lui Et dist "qu'il est de son lignage, Si seroit de l'occire oultrage." (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 79). ...et avoit esté cest outrage à l'occasion d'aucuns pages qui (...) empeschoient lesdiz escoliers à entrer en ladicte eglise (BAYE, I, 1400-1410, 94). Ainsy fut la loy establie Que toute ame eust peine et misere Qui se joindroit a char ordie Par l'oultrage du premier pere. (MARTIN LE FRANC, Champion dames D., t.5, 1440-1442, 51). Freres et sereurs qui estes saillis des corps qui ont porté cellui qui par son grant oultraige s'est de tous poins perdu, que devendrez vous ? (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 119). SECOND SERGENT. Sans plus de langaige, Puisqu'avez commis tel oultraige, Le deable vous chantera messe. (LA VIGNE, S.M., 1496, 532).

2.

"Violence"

a)

"Violence faite à qqn, à ses biens (pouvant aller jusqu'au crime), tort grave causé à qqn, violence" : Tant dura la guerre et l'outrage Entre les dux de hault parage Qu'ovec grant gent de sa contree Ceste cité a Dieu donnee Vint li dux Estorge assegier (Tomb. Chartr. Trois contes S., c.1337-1339, 75). ...Et maint païs destruit en furent, Dont encor les traces en durent ; Et des prises et des outrages Et des occisions sauvages De barons et de chevaliers, De clers, de bourgois, d'escuiers, Et de la povre gent menue Qui morte y fu et confondue, De rois, de duz, de bers, de contes Seroit lons a dire li contes. (MACH., J. R. Nav., 1349, 144). Quant cil d'Athennes eurent mort Androgeüs, si grant remort En ot Minos, li rois de Crete, Que par voie sage et discrete, Par force d'armes et de guerre Fist essillier toute leur terre ; Et les mist tous pour cest outrage Minos en si mortel servage, Que tous les ans li envoioient Un homme ; mais il sortissoient, Et cils seur qui li sors chëoit, Trop mortelment li meschëoit ; Car li rois Minos devourer Le faisoit la, sans demourer, Par un moustre trop mervilleus, Trop felon et trop perilleus. (MACH., J. R. Nav., 1349, 230). Eins me devés tenir en vo servage Comme vo serf qu'avez pris et acquis, Qui ne vous quiert villenie n'outrage. (MACH., L. dames, 1377, 208). ...la bature et navrure faite au frere dudit maire de Rungy, et la force par eulx faite aus portes d'icelle eglise, et, en après, les oultraiges par eulx ou aucun d'eulx fais et commis en l'ostel d'icellui curé, qui est le propre presbitaire de la cure, en desrompant son mesnaige (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 246). Ilz appellerent a justice ceulx qui les avoient degettez par oultrage (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 135). ...par tresgrant outrage la main lui avoit esté hostee. (WAUQUELIN, Manequine C.T., a.1448, 145). Si nous escripvez quelle intencion avez d'en fere reparacion des dommages et outrages subis en y procedant de maniere que doyons estre contens (Lettres Louis XI, C., t.1, 1438-1461, 20). S. NICOLAS. Dieu eternel, trois en ung vueil Une voulenté par essence Qui en divine prescience Congnois les cueurs et les couraiges, Tu vois de Sathan les oultrages Qu'il a pourchassés contre moy Pour cuider destruire la loy. (...) Et Sathan, pour me faire injure, A rendu le crestien parjure. (Mir. st Nic. juif, c.1480-1500, 135).

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[À propos de la Passion du Christ] : MISÉRICORDE. (...) Le roi haut d'umain lignage (Et) mis a mort par leur outrage... (GUILL. DIGULL., Pèler. vie hum. S., c.1330-1331, 415). ...quant par memoire recors Comment soustenis grant oultrage En croiz (Mir. st Alexis, 1382, 322). Or varrey je piteux desroys En grans esfroiz, Quant ceste injustice et oultracge J'adnunciarey en mort visacge A celle saige Doulce virge, piteuse mere. (Pass. Auv., 1477, 180). Je ne puis plus souffrir l'ostrage Qu'on a fait a Jhesus mon filz ; Donc pour advertir les Juïfz Je veulx temeures [l. tenievres ?] estre en terre, Et que division soit en pierre. (Pass. Auv., 1477, 224).

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Faire des outrages. "Commettre des violences" : ...lesquelz [gens d'armes] firent en ladicte ville pluiseurs outrages et tuerent et dommagerent pluiseurs des habitans d'icelle ville (FAUQ., I, 1417-1420, 166). ...et s'il advient que je me treuve en bataille où le Turcq soit, et je le puisse congnoistre, je feray mon pooir d'aborder à sa personne, pour vengier Dieu et saincte Eglise des grans outrages qu'il a fais (ESCOUCHY, Chron. B., t.2, a.1465, 207).

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Faire (un) outrage (à qqn). "Faire violence à qqn, causer le plus grand tort à qqn" : Es hommes firent moult oultrage Et es femmes mainte laidure (Tomb. Chartr. Trois contes S., c.1337-1339, 109). Par foy, sire, ce dist Gieffroy, je vien d'oïr celle male gent, qui font grans plaiz et grans riotes pour vostre avoir, et ont grans estris li uns vers l'autre, mais li affaires ira autrement qu'il ne esperent, et si soiez tout sceür, car, a l'aide de Dieu, je vous feray delivrer vostre avoïr et faire amende envers vous de l'oultrage qu'il vous ont fait. (Bérinus, I, c.1350-1370, 89). Hostes, vous faites grant oultrage, qui mon compaignon formenez si villainement (Bérinus, II, c.1350-1370, 91). Deffens nous des vilains desrois De Julien (...), Qui nous veult faire tel oultrage Que destruire nous veult trestouz. (Mir. emp. Julien, 1351, 192). Sire roy, je suiz cy envoiez devers vous de par Anthoine et Regnault de Lusegnen, son frere, pour vous monstrer la faulte et l'oultrage que vous faictes et avez fait a ma damoiselle de Lucembourc ; dont ilz vous mandent se vous lui voulez restablir ses dommages et lui admender raisonnablement l'injure et la vilennie que vous avez faicte a elle, a ses gens et a son pays, vous ferez ce que vous devez. (ARRAS, c.1392-1393, 158). Ce fut celluy qui, pour vengier l'outraige fait sur la personne du duc Jehan, son pere, et sa mort, soustint la gherre seize ans contre le Roy Charles de France, le septiesme de ce nom (LA MARCHE, Mém., I, c.1470, 89). Toy mesmes deshonneur te faitz En deffaisant ton propre ouvraige, Que tu deffectz quant tu m'infectz En faisant aux humains oultraige. (Cene dieux, c.1492, 131).

-

Faire mortel outrage à qqn. "Tuer qqn" : Ung sien nepveu luy fist mortel oultraige. (SAINT-GELAIS, Séj. honn. D., c.1490-1495, 221).

b)

"Violence faite à une femme, viol" : BERTHE. Sire, je vous pri humblement (...) Que ne me faciez tel oultrage Que vous m'ostez mon pucelage. Ains que vous me faciez annui, Sire, vous diray qui je sui... (Mir. Berthe, c.1373, 234). Jaçoit qu'il advertit Theseus de l'infortune qui estoit aadvenue à son filz, si ne l'en garda il pas, car la mere, par ung despit de l'outrage que Theseus fist à Philomene, sa seur, lui trencha la teste et le lui fist menger. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 23 r°).

c)

"Violence, cruauté qui est en qqn" : L'andemain, devant son mari Vint li pueples a cuer mari Et li doi prestre plein d'outrage, D'inique pensee et de rage, Pour mettre Susanne a la mort Sans conscience et sans remort. (MACH., C. ami, 1357, 8). Mais, quant il trebuchent en fraudes, baras et decepcions et vont par diverses voies de mauvaistié et detrenchent leur cuer par mauvaises pensees, tantost nostre Seigneur leur envoie sur eulz l'orgueil des Romains ou l'outrage des Alemans ou aucun autre tourment, et demeure la main de nostre Seigneur estendue sur eulz jusques a tant qu'il retournent a Dieu par aucune penitence. (FOUL., Policrat., IV, 1372, 80). ...les rebellions et desobeissances par lui faites et commises contre lesdiz roys de France et d'Engleterre, pilleries, roberies et depredacions que faites a par sa force et oultrage, sanz cause et raison, contre le roy nostre sire et ses subgets (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 206). O tu, roy plain de grant oultrage, Qui tant as fait de sanc espendre ! (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 209). Car, ou verité ou rayson qui sont fondemens de la loy divine leur faillent, ilz recourent au glaive et a la fureur, et se aident dez instrumens de l'outrage humain. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 126). Les dames s'escrierent moult douloureusement quant elles veirent l'outrage de ces yvrongnes Centaures. Herculés et Jason coururent lors querir leurs armes et furent adoubez. Si tirerent aprés les yvrongnes qui s'en aloient tout tumbant par les champs, et tant les sieuvirent qu'ilz les rataindirent en une place verte. (LEFÈVRE (R.), Hist. Jason P., c.1460, 129).

d)

[À propos des choses] "Mal, tourment causé par qqc." : Amis tres dous, tu t'en iras, Dont moult te desconforteras ; Mais mon fin cuer en porteras Et mon ymage En quoy tu te conforteras Et ou tu te deliteras, Quant de desir pressez seras, Qui maint outrage Fait aus amans et mainte rage, Si que ja pour païs sauvage, N'ossi pour estrange langage N'oublieras Venus qui tous maus assouage Ne moy qui t'aim de vray corage, Et souvent ton secret message M'envoieras. (MACH., F. am., c.1361, 223). SAINCT MARTIN. Malladie fait grant oultraige A ce povre(z) homme(z) que voyez. (LA VIGNE, S.M., 1496, 464).

3.

"Offense, injure, outrage" : Mais la mortel rage Et les meschiés qu'ay Viennent de l'outrage Que je commensai, Quant onques penser osay N'avoir regart À ma dame, que Diex gart. (MACH., Les lays, 1377, 376). Et pour Dieu, pardonnez moy, car je fay grant oultraige de l'enquerre [d'où vous venez], mais le grant desir de le savoir me fait faire cel oultraige. Sire chevaliers, fait la dame, cy n'a point d'oultrage, mais vous muet de grant courtoisie et de grant honneur. (ARRAS, c.1392-1393, 7).

-

Dire outrage à qqn : Li roys fist un commandement, Qu'on amenast isnellement En sa presence le vallet, Qui po savoit et po valet, De dire outrage et villenie Au conte de Triple en Surie, Qui fils dou roy de Chypre estoit, Et telement le despitoit. (MACH., P. Alex., p.1369, 258).

-

Penser outrage : Cent rimes ay mis dedens ceste rime, Qui bien les conte. Prises les ay en vostre biauté qui me Tient sans dormir dou soir jusques a prime. Mais en mil ans n'en diroie la disme. Toute seurmonte. Chascuns le dit, li duc, li roy, li conte. Or vueille Dieu que ja si ne m'ahonte Qu'en li servant pense outrage ne honte, Car c'est la lime Qui les biautez lime, desteint et donte. Cils qui la voit aus autres riens n'aconte, Mais ce qu'adès croist, embelist et monte Tous maus reprime. (MACH., F. am., c.1361, 180). Cuer, corps, pouoir, desir, vie et usage En vous servir, douce dame, mis ay, Pour ce que tant avés plaisant et sage Cuer, corps, pouoir, desir, vie et usage ; Mais c'iert toudis, sans penser nul oultrage, Car certeins sui que bien emploieray. Cuer, corps, pouoir, desir, vie et usage En vous servir, douce dame, mis ay. (MACH., L. dames, 1377, 89).

-

L'outrage de qqn. "L'offense, la honte subie par qqn" : Et ne retourne jamais vers moy jusques ad ce qu'il ara deffait tout ce que par ton oultrage il t'a fait ! [D'une mère à sa fille, abandonnée par son séducteur] (C.N.N., c.1456-1467, 69).
 

I. -

Empl. trans.

A. -

"Faire violence à qqn, faire du tort à qqn (ou à une communauté, un pays...)" : ...et au commencement d'icelle [tresve], lesdiz Bourguignons firent de grans oultrages et dommages aux pays et subgetz du roy estans à l'entour desdiz Bourguignons ; dont aucune reparacion ne fut faicte par iceulx Bourguignons : laquelle chose demoura en grant esclande de veoir le vassal ainsi oultrager les pays et subgetz de son souverain seigneur. (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 314). Et de ce non content, icellui Meslon se print au corps dudit Regnart et s'efforça en tant qu'il peut de le vouloir oultrager, mais pour ce qu'il avoit aidé audit Beraut en la compaignie des autres assistans, ledit suppliant aida audit Regnart affin de garder que ledit Meslon, qui estoit fort esmeu et comme tout furieux et enragé, ne l'occist (Doc. Poitou G., t.10, 1463, 425). ...je vueil que (...) vous informez de ceulx qui firent l'assemblée et emoction derreniere, qu'ilz voulurent oultrager Giles Milon (Lettres Louis XI, V., t.5, 1472-1475, 254). Lequel, voyant que ledit Fauconnier avoit encore ledit penart en sa main, pour les oultraiger, et qu'il se relevoit, frappa d'un baston de boys qu'il avoit sur la teste dudit Fauconnier, et le retumba dudit coupt et autres qu'il luy bailla sur les jambes et aillieurs. (Doc. Poitou G., t.12, 1475-1483, 141). LE SECOND. Iray je querir ma hallebarde Car j'ay grant peur qu'il nous oultraige ? LE TIERS. Il te part d'ung maulvais couraige De t'armer contre ton seigneur. (Rapp., c.1480, 61). ...mais davantaige battent les povres gens et oultraigent et contraignent d'aller cercher pain, vin et vivres dehors (COMM., II, 1489-1491, 216). ...ce vous prenez tant soit peu de noize a eulx, ilz sont gens pour oultrager tant que vous estez. (Jehan de Paris W., 1494-1495, 62). Je croy bien qu'il ne regardoit que pour l'affere du siege du roy Philippe, et l'omme ne penseroit empiece que son filz le voulsit oultrager et que, s'il y eust pensé ou en eust esté adverti, ledit Neptanebus avoit bien science de soy en garder. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 60 r°). Le fait dudit Galyot est peu de chose par deçà, car la pluspart des gens qu'il avoit ont esté thuez les ungs, et les autres se sont venuz rendre, et encores il y a qu'il en a esté prins vingt chevaulx devant Valenciennes. Et a esté luy mesmes depuis peu de temps fort oultraigé, rebouté et rechassé dedens la ville et fort blecé. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 373).

Rem. Doc.XIVe s. (IGLF) ds TLF.

B. -

"Offenser gravement qqn" : Faictes y diligence, car pour riens ne vouldroye qu'il fust oultragé du duc de Milan (Lettres Ch. VIII, P., t.4, 1495, 204).

Rem. Myst. Viel test. R., t.5, c.1450, 47662.

II. -

Empl. pronom. "Donner dans l'excès (ou se déconsidérer ?)" : ...de quoy, comme volage, Il se oultragea (ANTITUS, Poés. P., c.1500, 17).
 

[D'une pers.] "Excessif, immodéré, outrecuidant" : Soustenez moy, papelars ypocrites, Mes appostatz, dissimuleurs, faulsaires, Mes pertinax servans aux contredictes, Mes cabuseurs, mes pipeurs ordinaires, Mes barateurs, mes oultrageurs haussaires, Mes delateurs, mes oppresseurs iniques, Mes incertains, fains et probleumatiques, Mes detracteurs, mes felons néx a noise, Mes stuprateurs, mes enervez patiques, Mes inconstans, a cop comment qu'il voise. (ANTITUS, Poés. P., c.1500, 12).

Rem. GUILL. LE DOYEN (éd. 1493, Par compaignons entrepreneurs Qui se voulurent faire outrageurs) ds GD V, 668a.

-

[D'un animal] "Dont le comportement est excessif, immodéré"

Rem. Doc. 1460 (charretiers de chevaulx ont acoustumé estre fiers et oultrageurs) ds GD V, 668a.

-

[D'un comportement] "Excessif" : ...les mengers oultrageurs et la vie delicative des grans seigneurs (MÉZIÈRES, Epistre lamentable C.P., 1397, 139).
 

A. -

[Correspond à outrage A (idée d'excès)]

1.

"Excessivement, démesurément, extraordinairement"

-

[En quantité] : Et donques puisque touz les effetz que nous voions peuent estre faiz et toutes apparences salveez pour mettre en lieu de ce une petite operacion, ce est a savoir le mouvement journal de la terre qui est tres petite ou resgart du ciel, sans multeplier tant de operacions si diverses et si outrageusement grandes, il s'ensuit que Dieu et nature les avroient pour nient faites et ordenees ; et ce est inconvenient, comme dit est. (ORESME, C.M., c.1377, 536).

-

[En intensité] : Au secunt, je respon comme dit est que toute la multitude peut bien repeller ceste violence se elle est grevee outrageusement et sans ses demerites. (ORESME, Pol. Arist. M., c.1372-1374, 204). ...il fut sy tresparfaictement [totalement] et oultrageusement courroucié que il ne sçavoit tenir nullement maintien. (Percef. I, R., t.2, c.1450 [c.1340], 759).

-

[En qualité] : Devers occident ot assise Une chaiere d'autre guise : Riche estoit oultrageusement (CHR. PIZ., Chem. estude P., 1402-1403, 103).

2.

"Excessivement dans l'initiative, dans l'audace, témérairement" : ... cil Flament s'aventiroient follement et outrageusement... si en avoit souvent des mors et des bleciés par leur outrage (FROISS., Chron. R., IX, c.1375-1400, 195).

B. -

[Correspond à outrage B (idée de violence ou d'offense)]

1.

"Violemment" : ...et non content de ce, s'efforça de rechief frapper icellui Berault, et de fait l'eust tué ou oultrageusement blessié, se n'eussent esté les dessusdiz (...) lesqueulx se mistrent au devant (Doc. Poitou G., t.10, 1463, 424).

2.

"D'une manière injurieuse, insolente" : ...haïneus et losengier s'avancent de parler outrageusement et sans cause (FROISS., Chron. R., X, c.1375-1400, 128). Messire Guillaume de Vierville, chevalier, a asseuré Guillaume Taupin et Thomas de Condey, auxquelx la Court a defendu qu'il ne parlent outrageusement ne ne meffacent audit chevalier, à peinne de grosses et arbitraires peinnes. le (BAYE, I, 1400-1410, 128). Et se j'ay voué trop oultrageusement pour l'onneur du gentil prince, je prie a Amours et a Beaulté d'amie qu'ilz me vueillent excuser. (Percef. I, R., t.2, c.1450 [c.1340], 704).
 

A. -

[Correspond à outrage A (idée d'excès)]

1.

"Excessif, démesuré" : ...attendre ne puis que requise Soie, ains convient que je requiére, Tant m'est et oultrageuse et fiére Ceste amour qui si me demaine (Mir. abbeesse, 1340, 69). ...a fin que tu ne cuides pas que je veuille faire bataille outrageuse avec ces gens ci (FOUL., Policrat. B., V, 1372, 362). "...Et se aucun vouldra dire Hiesucrist appreuva les grans disners et les festes quant il fu en personne, sa mere et ses disciples, aux noces d'architriclin ; a ce je respons", dist la royne, "que mon Pere appreuva les dictes noces et convient. Quel merveille ! car il ne fu pas oultrageux quant ou millieu du disner le vin y failly..." (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.2, c.1386-1389, 317). ...c'est assavoir de la vaiselle oultrageuse, superflueuse et non neccessaire, dont les buffez et droisseurs royaulx ont este bien chargiez (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.2, c.1386-1389, 318). Je me suis eslevee ou eslevé et ay eu orgueil des grans despens que j'ay aucune foiz faiz, ou des grans outraiges et superfluitez, comme de viandes grandes et outrageuses, comme a donner grans mengiers et belles chambres, assembler grans compaignies, donner joyaulx aux dames et aux seigneurs et a leurs officiers ou menestrez pour estre alosez d'eulx, et pour dire de moy que je fusses noble et vaillant et large. (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 24). Le tiers remede est considerer au vif et par soy la povreté de Nostre Dame et de Nostre Seigneur, et son humilité et la gloire presente et bonne renommee. Par le contraire on maudit tous outrageux estaz tant es roynes comme es roys. (GERS., Annonc., a.1400, 239). Et souvent meismes se font pendre Et destruire, par leur despendre Oultrageux (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 75). ...l'outrageuse chierté qu'ilz ont mise es vivres et ouvraiges leur a creu l'avoir que par chascun jour ilz recueillent et amassent (CHART., Q. inv., 1422, 34). Mon seigneur, ma tresredoubtee dame que veez cy vous a reffusé, doubtant que ne voulsissiez faire un tresgrant et excessif appareil et une grant feste et solempnité outraigeuse, mais je l'ay asseuree que non ferez. (LA SALE, J.S., 1456, 288). Ne touchés a rien qui soit mien, Vos manieres sont outrageuses (Dorib., p.1480, 252).

-

[D'une chose concr.] "Démesuré, énorme" : De la faire sommes contant, La bombarde spacieuse, Sans delay et incontinent, Qui gectera pierre outrageuse. (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 197).

-

[D'une pers.] "Qui tombe dans l'excès" : Et desicome j'ai une si bone gardeyne qe me garde en ma maladie si tresdoucement et mes plaies envolupez si tres a poynt et si tresbien, qe trop serroit outrageous si jeo ne feusse pacient (HENRI LANC., Seyntz medicines A., 1354, 233). ...ce conte [de] Guerles vint à sa terre et seignourie, joenne homme et de grant voulenté pour bien despendre, et ne pensoit point à quelle fin ses besoingnes pourroient traire fors que à sa plaisance accomplir ; et sievoit joustes, tournois, festes, reviaulx et longs voyaiges à grant renommée et à grant frait. Et despendoit tous les ans IIII. foiz plus qu'il n'avoit de revenue, empruntoit aux Lombars à tous lez, car il estoit en dons larges et oultrageux, et se endebta tellement que il ne se povoit aydier de chose nulle qu'il euist, et tant que ses proïsmes en furent grandement courroucié, en l'en blamerent (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 144). Car je vous pourroye bien tant chargier que vous avriez cause de moy tenir pour outrageux, et que mon conseil vous donroit charge et si grant nombre de faix et si greveux que vous desepereriez de trop grant ferdel, pour ce qu'il vous sembleroit que vous ne le pourriez tout porter ne acomplir (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 116). ...mais quant a vous, abbé, nous vous prions que de voz grans appareilz de viandes vous deportez, car sans faulte vous en avez esté outraigeux et n'en voulons plus. (LA SALE, J.S., 1456, 253).

2.

[D'une pers., de son comportement] "Excessif dans l'initiative, dans l'audace, téméraire" : ...moy, fiens, ordure et nient, Oultrageuse fole enragée, De valeur acomparagée Me sui a l'umble vierge mére (Mir. mère pape, c.1355, 369). En telz honneurs n'a fors que doubte, Oultrageux orgueilz et desrois. (Mir. parr., 1356, 4). Si que d'illueques nous levames Et dessoubz [le cerisier] ombroier alasmes Et sur l'erbe vert nous seÿmes (...) ; Mais sur mon giron s'enclina La belle qui douceur fine a ; Et, quant elle y fu enclinee, Ma joie fu renouvelee : Si ne sai pas s'elle y dormi, Mais un po sommilla sur mi. Mes secretaires qui fu la Se mist en estant et ala Cueillir une verde fueillette Et la mist dessus sa bouchette Et me dist : "Baisiés ceste fueille !" Adonc Amour, veuille ou ne veuille, Me fist en riant abaissier Pour ceste fueillette baisier ; Mais je n'i osoie touchier, Comment que l'eüsse moult chier. Lors Desirs le me commandoit, Qu'a nulle riens plus ne tendoit, Et disoit que je me hastaisse Et que la fueillette baisasse. Mais cilz tira la fueille a li, Dont j'eus le viaire pali, Car un petit fu paoureus ; Par force du mal amoureus Non pourquant a sa douce bouche Fis lors une amoureuse touche, Quar je y touchai un petiot. Certes, onques plus fait n'i ot, Mais un petit me repenti Pour ce que, quant elle senti Mon outrage et mon hardement, Elle me dist moult doucement : "Amis, moult estes outrageus ! Ne savés vous nulz autres jeus ?" Mais la belle prist a sourrire De sa tresbelle bouche au dire (MACH., Voir, 1364, 240). Et croy que les merveilles qui sont par universel terre et monde sont les plus vrayes, comme les choses dictes faees, comme de pluseurs autres. Doncques la creature ne se doit pas pener par oultrageuse presumpcion que les jugemens et fais de Dieu vueille comprendre en son entendement, mais y penser et soy esmerveillier ; et, en soy esmerveillant, considerer comme il saiche doubter et glorifier Cellui qui si celeement juge. (ARRAS, c.1392-1393, 2). ...et ne se pooient taire a parler de ceste contesse de Montfort, de la hardie et outrageuse emprise que elle avoit fait. (FROISS., Chron. D., p.1400, 517). Et estoit en ceste tempeste le plus auctorisé, qui plus hardiement se boutoit en la besoigne, pour ce que le peril avoit esté si grant par la temerité et oultrageuse entreprise de venir devant Paris par lesdis Armighas, que celx qui plus besoignoient et plus avoient honneur. (BAYE, II, 1411-1417, 86). Certes quant ilz t'ont sentu approcher, quelque oultrageux ne terribles qu'ilz fussent, fouyr leur a mieulx valu que une mauvaise attente. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 299).

-

Estre outrageux de + inf. "Être assez téméraire pour" : Le conte, qui s'estoit indignez grandement de ce que Camdos avoit but devant luy, ne vouloit boire, mais dist à l'escuier qui tenoit la couppe par maniere d'errederie : "Va et se dy à ton maistre Camdos qu'il boive." - "Pour quoy", dist l'escuier, "y yroi-ge ? Il a but ; buvez puisque on le vous offre, et, se vous ne buvez, par saint George, je le vous jetteray parmy le visaige." Le conte, quant il oy ceste parolle, doubta que l'escuier ne fesist sa testée, car il estoit bien oultragieux de cela faire. (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 21).

-

Empl. subst. "Celui qui est téméraire" : Et se tenoit a la porte Cambrisienne, et la estoit trop fort heriiés et pressés d'auquns fos outrageus et outrequidiés, qui voloient issir et euls aler perdre. (FROISS., Chron. D., p.1400, 384). Dont endementiers qu'il ala et vint, Genuinus Mecius, prince des Tuscullains, le requist a bataille corps a corps ; si fust Genuinus desconfit, ainsi que souvent est advenu aux oultrageux (LA SALE, Sale D., 1451, 117).

-

[Avec une valeur positive] "De grande bravoure" : Il est bon, jeune, guerroyer [l. jeune guerroyer], Tresdiligent et coraigeux, Et a bataillier oultraigeux, Moult prudent et de beau maintien. (Myst. st Adr. P., c.1450-1485, 56).

Rem. Renart contref. R.L., 1328-1342, gloss. (oultrageux, "hardi, téméraire").

3.

[Dans la façon de se tenir, dans l'habillement] "Extravagant" : ...ne souffrist que homme de sa courtt, tant fust noble ou poissant, portast trop cours habiz, ne trop oultrageuses pollaines (CHR. PIZ., Faits meurs Ch. V, S., I, 1404, 82).

-

Empl. subst. "Celui qui est extravagant" : ...s'il y a aucun homme ou femme qui voye faire a aultre quelque oultrage ou desordonnance en habit ou abillement, tantost les autres le suivent et dient il fault faire comme les aultres. Mais ilz dient voir : il fault que un oultrageux suive un aultre. (CHR. PIZ., Trois vertus W.H., c.1405, 158).

B. -

[Correspond à outrage B (idée de faute, de violence ou d'offense)]

1.

[D'une pers., de son coeur] "Qui commet des fautes, des péchés" : Sire, tout le cueur m'amolie Quant bien a mes pechiers je pens ; De trestout mon cueur me repans Quant j'ay esté cy outraigeuse. (Pass. Semur D.M., c.1420 [1488], 162). Mon dolant cuer outrageux (Prières saints R., t.2, c.1500, 176).

-

[D'une chose] "Qui est inadmissible" : De très outraigeus fais vostre corps s'avisoit D'aller tuer ce roy en son pavillon droit (Hugues Capet L., c.1358, 76). ...par nulle voye et maniere du monde, elle ne povoit demourer ne plus estre avec ledit de Ruilly, son mary, pour la mauvaise et oultrageuse vie que il lui menoit (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 305). Ce jour, maistres Bertrand Fons et J. de la Porte ont, et chascun d'eulz (...) esté commis à enquerir des exactions oultrageuses et indeues que on dit avoir esté faictes par Le Galois du Ploich et autres procureurs de la Court de Parlement, soubz umbre des requestes et espices moderées que on baille aucunes fois pour l'expedicion des procès pendans ceans. (FAUQ., II, 1421-1430, 158). Et se telle seignourie dure aucunement, c'est assavoir par adventureuse force, certainement elle ne puelt pas longuement durer ; car nulle duree ne puelt avoir oultrageuse seignourie. (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 7).

2.

[D'une pers.] "Violent, agressif, qui fait du tort" : Car moult estoit homs courageux, Grevant aultruy et oultrageux. (CHR. PIZ., M.F., IV, 1400-1403, 34). ...icellui Robinet gecta du bout du pié une pierre contre le visaige dudit suppliant tellement qu'il le bleça et lui fist sang, dont il despleut audit suppliant qui dist : "Pour quoy m'as tu gecté ceste pierre ? Tu es tousjours oultrageux en tes faiz" (Doc. Poitou G., t.11, 1473, 330).

-

[D'une chose] "Néfaste" : Mes il [les legislateurs] ont decliné griefment et grandement as ordenances qui sunt utiles et pour profit et a celles qui sunt oultrageuses en subjuguer leur voisins. (ORESME, Pol. Arist. M., c.1372-1374, 326).

3.

[D'une pers.] "Injurieux, insolent" : ...le dit mort moult oultrageux et coustumier de faire desplaisirs et dommages à ses voisins (Doc. Poitou G., t.5, 1385, 257). ...icellui Georget, qui estoit oultrageux et noiseux, print debat avecques le père de sa dicte femme (Doc. Poitou G., t.9, 1450, 193).

-

[De paroles] : ...je pense une lettre A faire, plaine de desroy, La quelle mesdira du roy Par moz oultrageux et vilains (Mir. st J. Cris., c.1344, 293). ...pour faire cesser toutes paroles oultrageuses que on pourroit dire et publier en leur prejudice (FAUQ., I, 1417-1420, 275). Le seigneur de Saintré, qui voit les outraigeuses parolles de damp Abbés qui lui sembloit de part en part percier le cuer (...) voulsist estre mort. (LA SALE, J.S., 1456, 279).

-

Empl. subst. "Insolent" : Qui est cest oultrageux qui se mesle de nos affaires ? (Percef. I, R., t.1, c.1450 [c.1340], 166).
 

A. -

"Excès, situation où les bornes du supportable sont dépassées, outrance"

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Faire outrance. "Commettre un excès" : Or alés, Et vous gardés de faire oultrance. (Pass. Auv., 1477, 228).

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À outrance. "Jusqu'au bout" : Là y ot mainte raison baillie à grant sustanche Du fait de la matère et de la ramenbranche De ce duc d'Orlyens qui fu mors à outranche Par le duc de Bourgongne (Geste ducs Bourg. K., c.1410-1419, 313). Perdu y a sa chevance A oultrance (RÉGN., F.A., 1432-c.1465, 171).

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À/jusques à outrance/à toute outrance. "À l'extrême" : Vous pourriez dancer a la dance A laquelle Narcisus dance, Qui est mort par son orgueil cy, Ou encores en grant meschance De celle cruelle a oultrance Nommee "Dame sans mercy" (Narcissus, p.1426, 318). Raison m'aprent que, se je poursieus mon desir jusquez a outrance, il y a deux meschief (WAUQUELIN, Manequine C.T., a.1448, 151). En ung moulin, comme fut sainct Victor, Ou transglouty en la mer sans alaine, Pis que Jonas ou corps d'une ballaine, Ou soit bany de la clarté Phebus, Des biens Juno et des solas Venus, Et du dieu Mars soit pugny a oultrance Ainsi que fut roy Sardanapalus, Qui mal voudroit au royaume de France ! (VILLON, Poèmes variés R.H., c.1456-1463, 59). Elles ont prins chacune ung compaignon et ont fait jusques a oultrance la folye. (C.N.N., c.1456-1467, 364). Et puis après je gecte crys et plours à toute oultrance, Pour estre ouye (LA MARCHE, Mém., II, c.1470, 364). Envye en sera promotive Et ire la judicative, En qui trop petit de port a ; Et ne cessera Jusques elle t'aura Livré, a oultrance, En haulte balance De la croix, arbre de puissance, Qui tout nostre salut fera. (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 405).

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Batailler/combattre/faire armes/jouster/mener à (jusqu'à/à toute/à droite) outrance. "Combattre jusqu'à la reddition, la défaite complète de l'adversaire, voire sa mort" : Rencontres ot [Bertand du Guesclin] plus que nulz, En gaige s'est vaillamment maintenus Et combatus jusques a droite oultrance (DESCH., Oeuvres Q., t.3, c.1370-1407, 101). C'est la flour du monde sanz faille, Et en Angleterre et en France A il fait armes a oultrance, Ou trop vaillamment s'est portez (CHR. PIZ., Chem. estude P., 1402-1403, 138). ...Ou combatons tellement a oultrance Que l'ung die : Je me rens ou ren toy (CH. D'ORLÉANS, Rond. C., 1443-1460, 461). ...se vous me menés jusques a oultrance (Percef. I, R., t.1, c.1450 [c.1340], 126). Ce Galias de Mantua, je croy que fut puis cellui moult renommé chevalier qui combatit a oultrance messire Jehan le Maingre, mareschal de France (LA SALE, J.S., 1456, 183). ...s'ilz ne trouvoient semblable nombre de chevaliers et d'escuiers qui les combatissent jusques a oultrance (LA SALE, J.S., 1456, 228). Ainsi combatirent à tout oultrance et n'y eust riens reservé (BUEIL, II, 1461-1466, 108). Et combatoient à toute oultrance, sauf que le Jouvencel ne voulust point qu'ilz feissent le serment et voullut payer la finance à qui la gaigneroit (BUEIL, II, 1461-1466, 111). Et cecy estre dit laissent courir leurs chevaulx d'ung couraige pour jouster a oultrance, comme vous l'ourrés cy aprés, car pour deux champions jamays ne fut congneue bataille si aspre ne si oultrageuse. (BAGNYON, Hist. Charlem. K., c.1465-1470, 48). L'USURIER. Tout beau, monsieur ! Ha, je proteste D'en avoir icy la sentence Ou de batailler a oultrance Puisque deffié je suis d'elle. (LA VIGNE, S.M., 1496, 528).

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Armes à outrance : ...et est vrai que s'il eust contendu à le détruire de son corps, il en estoit bien en luy, et légèrement l'eust pu faire, car les armes estoient à outrance (Faits Lalaing K., c.1470, 178).

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Bataille à outrance : Mais la matiere creut et multiplia tellement que une bataille à outrance fut conclue, de trois nobles hommes escossois à l'encontre de messire Simon de Lalain, de messire Jaques de Lalain et de Hervé de Meriadet, et se devoyent faire icelles armes à une fois devant le Roy d'Escosse. (LA MARCHE, Mém., II, c.1470, 105). An ce temps, ung nommé Julio de Pise, chevalier du pays d'Italie, appella et requist ung autre chevalier nommé Boffille de Juge, natif du royaulme de Naples, par maniere de gaige de bataille à oultrance, sur certains cas que ledit Julio imposoit audit Boffille et dont il le vouloit reprocher de son honneur. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 354).

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Combat à outrance : D'un combat à outrance faict entre deux bourgeois de Valenciennes, en la presence du duc Philippe de Bourgongne, comte de Hainaut. (LA MARCHE, Mém., II, c.1470, 402).

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Jouste à outrance. V. jouste

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Mettre qqn à outrance. "Réduire qqn à merci, le vaincre" : Mais, nonobstant leur grant deffence, Les meist Scipïon a oultrance, Qui moult grant avoir y acquist Et de groz prisonniers y prist (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 230). ...et entre les autres fu mort un geant nommé Corfus, auquel je me combatis corps contre corps, non pas par force qui fust moy, mais par desir d'honneur acquerre et de faire chose dont la grace de ma dame peusse desservir. Si le mis a oultrance en la vertu de la beauté d'elle, et a elle l'honneur en appartient. (LEFÈVRE (R.), Hist. Jason P., c.1460, 165).

Rem. Ex. d'a.fr. ds T-L VI, 1420. FROISS., Méliad. L., 1373-1388, gloss.

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Par outrance. "En dépassant toutes les bornes" : LE CHRESTIEN commence. (...) Helas, las, helas, las, Consideré mon cas Qui sonne si trescas, N'est que desesperance. Fortune par oultrance Me tient icy en trance Sans nulle recouvrance, Mais malheur a grant tas. (Mir. st Nic. juif, c.1480-1500, 73).

-

Sur l'outrance. "À l'extrême" : Quant il vey son maistre ainsi mener que près sur l'outrance, il fu moult couroucié... et print la hache entre ses mains dont il se combatoit (FROISS., Chron. M., XII, c.1375-1400, 53).

B. -

"Violence extrême" : L'ainsnee au bon Loys de France Fu fïancee, mais l'oultrance De la mort celluy marïage Deffit (CHR. PIZ., M.F., IV, 1400-1403, 71). Mon enfent, mon bien, mon avoir, A voulu souvenance avoir De moy, et m'a fait demonstrance Que de la mort et son oultrance Est relevé victorïeux (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 952).
 

A. -

[Dans l'espace] "Au-delà (de)"

1.

[Dans des verbes ou des dérivés de verbes ; idée de limite franchie ou bien idée de traversée]

Rem. V. outre-aller "aller au-delà" ; outrecourir "courir au-delà, traverser en courant", outrecourement ; outrefuir "fuir au-delà, fuir en traversant" ; outrejeter "lancer au-delà, faire traverser", outrejettement, outrejet "pointe de terre" ; outreluire "luire à travers" ; outremarcher "mettre les pieds de derrière devant les traces de ceux de devant" ; outremener "mener au-delà" ou "faire traverser", outremenance, outremenement ; outremonter "traverser un sommet" ; outrenager, outrenoer "traverser à la nage ou en bateau" ; outrepasser "aller au-delà", outrepassement ; outreporter "porter au-delà, transférer" ; outresaillir "aller au-delà, passer".

-

[Équivalent à trans-]

Rem. V. outre-ecrire "transcrire" ; outreficher "transpercer" ; outrepercer "transpercer".

2.

[Dans des adj. ou des dérivés d'adj. ou bien des subst. marquant une qualité ; idée d'au-delà]

Rem. V. outremer "au-delà de la mer" ; outremarin ; outremontain.

B. -

Au fig.

1.

[Dans des verbes ou des dérivés de verbes ; idée de limite franchie, idée d'excès]

Rem. V. outrechargé "chargé, accusé à l'excès" ; outrecuider "être d'une confiance excessive en soi", outrecuidance, outrecuiderie... ; outreprendre "prendre d'un autre encore" ; outrevengeance "vengeance extrême".

2.

[Dans des adj. ou des dérivés d'adj. ou bien des subst. marquant une qualité ; idée de très haut degré]

Rem. V. outrebon "extrêmement bon" ; outrebord "au plus haut degré, excessivement" ; outrebu "ivre" ; outrefin "étoffe de laine particulièrement fine" ; outrelargesse "plénitude, profusion" ; outremesure "surabondance, profusion" ; outrepreux "de très grande valeur, de très grande prouesse" ; outrevieux "excessivement vieux".

V. aussi ultra-
 

I. -

Adv.

A. -

[Domaine spatial et temporel]

1.

[Dans l'espace]

a)

"Au delà, plus loin" : ...Montferant qui siet environ une petite lieue oultre... (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 199). Item, se la ligne total retournoit en montant droit en haut et .a. alast oultre vers .d. et apres retournast vers .c. (ORESME, C.M., c.1377, 64). Item, au partir d'icellui lieu en descendant oultre, a main senestre, est le lieu ou saint Estienne fut lappidez (Voy. Jérus., c.1395, 15). Item, en montant oultre, si comme au tiers dudit mont, a main senestre, a une chappelle fondée de Nostre Dame. (Voy. Jérus., c.1395, 49). Enfans, il nous fault tirer oultre. Levés sus, et dirons nous graces. (Pass. Auv., 1477, 156).

-

Passer outre. V. passer "Aller plus loin" : Les deux l'enferrent sur le comble de l'escu, et ly autre en la couppe du bacinet, et tant rudement le fierent qu'ilz portent lui et le cheval par terre, et passerent oultre. (ARRAS, c.1392-1393, 72). ...l'ivroigne salua premier le prieur, qui luy rendit son salut tantost ; et puis passe oultre, continuant son service, sans en aultre propos l'arrester (C.N.N., c.1456-1467, 60).

-

Un peu plus outre. "Un peu au delà" : Item, ung pou plus oultre, a senestre partie est Gessemany (Voy. Jérus., c.1395, 17).

-

Tout outre. "Au delà, plus loin" : Lequel Jaquet il qui parle vit bien et apperçut qu'il estoit mouche des Englois contre les François, et que aucune fois il passoit au plus prez des embusches faites par les François, et les advisoit sanz eulx dire aucune chose, et chevauchoit tout oultre au devant d'eulx, faignant qu'il ne les eust point veuz (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 57). Il n'y a pas moult longue voye : Tout sus piéz m'y vouldray trouver ; Il me fault ma robe lever Et moy aventurer tout oultre. (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 965).

-

Loc. adv. En outre. "Au delà, plus loin" : Et dist Haly que chascune ydole tenoit unes clefs en segnefiant que en outre vers occident et vers celle grant mer l'en ne treuve habitacion. (ORESME, C.M., c.1377, 566).

b)

"De l'autre côté" : ...ilz vindrent hurter a la chambre ou estoit la pucelle (...) et bouterent l'huis oultre. (C.N.N., c.1456-1467, 551).

-

Estre outre. "Être mort" : ...et se nous arrivons par delà et trouvons aucuns infidelles qui voellent combattre pour la Foy de Jhesus-Crist, je me metteray en tout devoir de les furnir de pié, en champ ou autrement, tant et sy avant, que l'un de nous deux soit oultre (Doc. 1454. In : ESCOUCHY, Chron. B., t.2, a.1465, 212).

-

Mettre outre. "Faire aller à l'autre bord, de l'autre côté de la mer" : ...si s'en vint au port et trouva marchans qui le mirent oultre (WAUQUELIN, Manequine C.T., a.1448, 170).

-

Passer outre. V. passer "Traverser" : Et en outre il s'ensuit que la lumiere du soleil se profonde en la lune aucunement, mes elle ne perce ou passe pas tout outre pour la grande quantité et parfondeur du corps de la lune. (ORESME, C.M., c.1377, 458). ...il avoit environ XV. hommes, qui la estoient descenduz, et avoient les lances es poings, et mis les bacinez a la guise que ilz se armoient en la contree. Et, d'autre part, voyent bien IIIJc. hommes armez, qui moult fort se mettoient en paine de passer oultre pour grever ceulx de deca. (ARRAS, c.1392-1393, 100).

.

"Traverser la mer" : ...et se mist sur mer (...). Si passerent oultre (Ponthus Sidoine C., c.1400, 174). ...et puis fist preparer nef et barghes pour passer oultre. (WAUQUELIN, Manequine C.T., a.1448, 164).

c)

"De part en part" : Mais Logre recula un pou son destrier, si que le cop descendi sur son col et li [le lui] trencha oultre, si que le cheval cheï mort (Bérinus, I, c.1350-1370, 174).

-

Tout outre : ...et sy tost que il fu baissié, ledit Jehan Eustace le refrapa par derriere tellement que il lui persa le corps et le braz tout oultre, et tout à un cop. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 415). Le soudant estoit embrunchiez, et le heaume estoit court par derriere, l'espee trouva le col nu, excepté le gambison de la gorgerete, et trencha l'espee le ganbison tout oultre et les deux maistres vainnes et les tendans jusques au gorgeron. (ARRAS, c.1392-1393, 113). ...et les pelez tout entour [des noix] et puis les perciez en troiz lieux tout oultre (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 267). ...qu'i le tresperça tout oultre et mort le rendi entre lez aultres saxonnois (Cligès C.T., 1455, 116). ...se l'empereur eust tant soit peu tardé de les faire prendre et departir que vraiement ilz estoient au dessoubz, car l'un estoit fort blessié ou pyé tout outre, qui ne pouoit plus, et les autres deux avoient ja perdu du sang tant qu'ilz estoient presques pasmez (LA SALE, J.S., 1456, 269). Et, incontinent que ledit Breton ot ainsi navré ledit cheval, vint à lui ung archer de la compaignie de mondit seigneur d'Eu, qui le traversa tout oultre le corps d'une demie lance, et incontinent cheut à terre tout mort, et fut son cheval amené et habillement apporté à Paris et le corps laissié mort en chemise. (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 87).

-

Loc. adv. D'outre en outre. "De part en part" : Quant au tiers point, je pose que la terre fust perciee et que l'en veist par un grant treu tout d'outre en oultre siques de l'autre part la ou seroient les antipodes se la terre estoit partout habitee (ORESME, C.M., c.1377, 572). ...et le roy y fiert a plaine taille et le va fendre d'oultre en oultre parmy la moienne (Percef. I, R., t.1, c.1450 [c.1340], 123). A ce poindre premiers en ont abatu tant Que le campaigne en vont d'outre en outre jonquant (Jourd. Blaye alex. M., a.1455, 398).

2.

[Dans le temps] Perseverer outre / proceder outre. "Poursuivre" : Item persevera oultre en la cotte hardie par lui prinse ès hayes derrieres Saint-Nicolas-du-Louvre et ès VIJ sols par lui euz à sa part d'un manteau emblé (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 471). Et pour ce le Chancellier ne volt proceder oultre (BAYE, II, 1411-1417, 101). Et puis ce fait, proceda oultre jusques ad ce qu'il fust pervenu a son agnus Dei [Un prêtre dit sa messe] (C.N.N., c.1456-1467, 447).

-

Parler outre. "Continuer à parler, poursuivre" : Mais parlez oultre, tant que vous on en sache gré et que nous n' ayons cause de renouveller nostre maltalent sur vous, car trop vous cousteroit. (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 169).

-

Etre outre. "Être passé" : ...ains que la nuyt a venir fust oultre (Percef. I, R., t.1, c.1450 [c.1340], 447).

B. -

Au fig. [Idée abstr. de dépassement]

1.

[Idée d'ajout, d'adjonction]

a)

"De plus, en outre, de surcroît" : Oultre, sire, vezci un pain (...) Qu'il a a un povre donné, Pour ce qu'il l'ot araisonné (Mir. Pierre Changeur, c.1378, 248). Oultre, quant ne me venderas, Je te promet vendu seras. (Mir. Pierre Changeur, c.1378, 267). Mais un point oultre convendroit Qu'avecques nous vous venissiez Et nostre latinier fussiez Pour nous conduire. (Mir. fille roy, c.1379, 57). ...et fait venir Gilete La Large, prisonniere, dessus nommée, laquelle, après ce qu'elle ot continué et perseveré ès confessions cy-dessus escriptes, par elle faites, cogneut oultre, et par dessus ce que dit est, les choses dessus dites par elle prinses en l'ostel dudit de Maalmes, son maistre. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 109). Et puis lui firent lire ung article contenu en une cronique, qui estoit en l'ostel d'icelle ville publiquement devant tous, qui contenoit en effect que jadis y ot un roy de France qui mourut, et après son trespas demoura deux filz, dont l'un par ainsnéesse succeda à la couronne et à l'autre fut baillé pour son appanage la duchié de Normendie, que depuis ledit roy de France volt ravoir, et en print guerre contre son frere et ceulx de ladicte duchié, qui la tindrent bonne, et oultre pour leurdit duc guerrierent tellement ledit roy de France que par leur puissance d'armes ilz mirent en exil ledit roy de France et firent leurdit duc roy. (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 147). Outre, le roy mist et fist pour lors de la monnoye nouveau maistre Moreau aux dommaines (LA VIGNE, V.N., p.1495, 258).

-

Dire outre (que) : Mais je di oultre (,) que tout aussi comme aucun chante bien ou fait ymages ou autres besoingnes senz art et senz doctrine par son engin, qui est a ce naturelment enclin, et neent moins il n'est pas ainsi de chascun. (ORESME, E.A., c.1370, 99). Je di oultre que pour ce que chascun n'a pas possibilité de soy excerciter en toutes vertus et de les avoir complectement, l'en doit considerer asquelles l'en a plus de possibilité (ORESME, E.A.C., c.1370, 361). Et dit oultre (,) que dudit monstier ilz alerent tous ensamble en l'ostel du curé d'icelle ville (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 241). Et dist oultres : ... (CHR. PIZ., Paix W., 1412-1413, 163). Et dit outre ledit du Lau audit de Nemours qu'il ne se souciast point de monseigneur du Maine, qu'il luy feroit avaller sans ce qu'il s'en aperceust. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 189).

-

Et outre que. "Et de plus que..., et en outre que..." : Pour quoy ledit procureur d'iceulx religieux avoit conclus et requis audit sergent en ceste partie que es dictes saisines et possessions par lui pretendues et alleguees cy dessus il le maintenist et gardast, pour et ou nom des dis religieux, en deffendent audit curé que en ycelles il ne les troublast ne empeschast en aucune maniere, mais que d'icelles il les laissast joïr et user paisiblement, et oultre que il fist conmandement a ycellui curé que il rendist, restituast et restablist tout ce que il avoit prins et receu appartenant a yceulx religieux (Chartes Abb. St-Magl. T.F., t.3, 1396, 707).

b)

Loc. adv.

-

En outre. "De plus" : ...et en outre vienent il tous armez et ont ja sormonté le mi de la vallee (BERS., I, 1, c.1354-1359, 12.4, 20). Et en outre il s'ensuit que la lumiere du soleil se profonde en la lune aucunement, mes elle ne perce ou passe pas tout outre pour la grande quantité et parfondeur du corps de la lune. (ORESME, C.M., c.1377, 458). ...il n'y avoit pas cause pour quoy elle deust souffrir mort, mais conseillerent que elle feust tournée ou pillory, et, en oultre, tenue prisonniere au pain et à l'eaue un mois oudit Chastellet (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 201). Et, en outre, a ordonné ladicte Court, par la deliberacion et en la presence des dessusdis des Comptes et Tresoriers, que ... (FAUQ., I, 1417-1420, 7).

-

Outre plus. "En outre, de plus" : Par foy, sire roys, dist Jossellins, il dist verité. Et oultre plus, icellui Hervy occist le nepveu du roy vostre predecesseur, en trahison, et s'en fouy hors du pays (ARRAS, c.1392-1393, 56). ...et oultreplus, luy desplaisoit de ce qu'elle avoit dit son nom Constance (Hist. Berthe Pépin T., c.1400-1500, 170). Mon maistre, vous veez mon infortune, dont de rechef vous prie qu'elle soit celée. Et oultre plus, treshumblement vous requier (C.N.N., c.1456-1467, 94). Item, et au mont de Montmertre, Qui est ung lieu moult ancïen [où il y a une abbaye de femmes], Je lui donne et adjoincts le tertre Qu'on dit de mont Valerïen [où il y a un hermitage], Et oultre plus un quartier d'an Du pardon qu'apportay de Romme ; Sy yra maint bon chrestïen En l'abbaye ou il n'entre homme. (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 122). Qui riens te dira, dy sans plus Que j'ay escript ce qu'est escript. Oultre plus diras que j'ay dit Qu'aultre chose n'escriprey pas. (Pass. Auv., 1477, 214).

-

Et ainsi outre. "Et ainsi de suite" : Et ainsi oultre tant comme l'en weult, pour ce que cest corps est infini. (ORESME, C.M., c.1377, 108).

.

Et ainsi en outre sans fin : ...et samblablement en retournant vers le temps passé et en rabatant de l'isneleté selon proporcionalité soudouble, si comme que le ciel fust hier meu plus tart que hui de la moitié de l'isneleté du jour de hui et avant-hier plus tart de la moitié de ceste moitié et ainsi en oultre sans fin. (ORESME, C.M., c.1377, 426).

2.

[Idée de dépassement, d'excès]

a)

[Idée de dépassement (par les qualités, les propriétés...)] "Plus, davantage" : Car ilz superhabondent oultre et sus les hommes en tous biens. (ORESME, E.A., c.1370, 427).

-

Plus outre. "Davantage, bien davantage" : Il est vray, seigneurs, que nous deux Estïons palhars luxurieux, Et advons joué tout le nostre, Et puis nous advons fait plus oultre, Car pour mieulx palharder Nous nous sommes mis a rober Et avons fait les larressins Qu'on nous mect sus, et enclins Avons esté de faire pis. (Pass. Auv., 1477, 174).

-

Plus en outre. "Davantage, plus loin" : Car de chascun des premiers principes, puisque il est le premier et commencement, il ne faut plus en oultre enquerir. (ORESME, E.A., c.1370, 123).

-

Tout outre. "Au delà de toute limite, de toute restriction, pleinement" : Doncques doit ung chief de guerre, Qui se moustre vaillant tout oultre, Grant loz et grant honneur acquerre (CHART., D. Her., p.1415, 429). Vous vous devés vengier tout oultre (JUV. URS., Aud. celi, 1435, 225). Ceste vaillante preude femme, par saint Denis, mariée a ung tout oultre noz amys, avoit pluseurs serviteurs en amours (C.N.N., c.1456-1467, 241). ...avoit puis certain temps en ça une bonne bourgoise maryée, qui estoit tout oultre de la confrarie de la houlette (C.N.N., c.1456-1467, 521).

.

Tout en outre : Mon treschier filz, le cuer me dit tout en oultre que c'est la bonne Helayne que nous avons tant quis en pluseurs royaumes. (WAUQUELIN, Belle Hélène Const. C., c.1448-1452, 315).

b)

[Idée d'excès]

-

Passer outre. "Enfreindre une réglementation" : ...car il sembleroit que encor passeroit elle oultre se ne estoit la lay (ORESME, Ycon. Arist. M., 1374, 827).

-

Tout outre. "Excessivement, démesurément" : ...ung gentil curé demourant a la bonne ville (...) faisoit du gorgias tout oultre. (C.N.N., c.1456-1467, 530). Il n'est homme, tant fust constant, Quil ne perdist cy pacïence : En cueur, en corps, en conscïence, Il nous a dit blasme tout oultre, On le voit. (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 592).

c)

[Idée d'un dépassement qui va à l'encontre de qqc., qui est en dépit de qqc., en opposition à qqc.]

-

Passer outre. "Refuser (en dépit de qqc.)" : Le roy passa oultre et dit que ja bataille ne sera sur ce faicte. (Ponthus Sidoine C., c.1400, 83).

II. -

Prép.

A. -

[Domaine spatial et temporel]

1.

[Dans l'espace]

a)

"Au delà de" : Et se cest honme aloit tout droit vers le pole artique et passast outre tout droit vers les antipodes, le soleil et les estoilles leveroient a sa senestre et coucheroient a sa destre des ce que il seroit notablement oultre le pole. (ORESME, C.M., c.1377, 572). Ouquel jourd'uy, ledit Jehannin Le Voirrier, en ensuïant ledit jugement, fu mené à son derrenier tourment en la place aus Pourceaux, oultre la porte Saint-Honoré (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 189). ...et, ce fait, passa oultre icelle sale, et entra en la chambre en laquele a acoustumé gesir Guiot de Roussay (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 135). Congneut oultre icellui prisonnier, que demi an a ou environ, à deux lieues oultre Senliz, en alant ou païs de Valois, se loga au soir en un village dont il ne scet le nom (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 483). Et estoit la fontaine en un fier et merveilleux desrubaux, et avoit grans rochiers au dessus et belle praierie au long de la valee, oultre la haulte forest. (ARRAS, c.1392-1393, 23). ...disant ces parolles, [elle] marcha la dureau, faisant le petit sault oultre la raye bien avant. (C.N.N., c.1456-1467, 152). Et, contre la porte de Chastellet, y avoit de moult beaulx personnages. Et, oultre ledit Chastellet, sur le pont aux Changes, y avoit autres personnages et estoit tout tendu par dessus. (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 29).

-

Se ferir outre ses ennemis. "Se précipiter sur ses ennemis (au delà de leur première ligne)" : Et cilz leur courent sus, et firent grant dommage des gens Remondin, aincois que Remondin y peust venir, ly quelz venoit a desray de cheval, tant qu'il povoit courre, et se fiert oultre ses ennemis, lance baissiee, et porte le premier qu'il encontre a terre. (ARRAS, c.1392-1393, 72).

b)

"De l'autre côté de" : Le landemain, par matin, passa la grosse bataille, et puis passa l'arriere garde en belle ordonnance, et se logierent oultre le Rin. (ARRAS, c.1392-1393, 176).

-

D'outre le Rhin. "D'outre-Rhin, d'Allemagne" : ... il et Anthoine en aloient secourir le roy d'Ausaiz, que le duc d'Ostriche, et le conte de Fribourt, et le conte de Salverne, et jusques a X. contes d'Alemaigne d'oultre le Rin avoient assegié a Porrentru. (ARRAS, c.1392-1393, 283).

-

Outre la mer. "De l'autre côté de la mer" : Las, que vous m'avéz fait de mal souffrir des lettres que vous m'envoyastes en France oultre la mer ! (WAUQUELIN, Manequine C.T., a.1448, 181).

.

Outre mer. V. outre-mer

2.

[Dans le temps] "Au delà de" : ...qu'elle ne vivera jamais oultre nonne de ce jour (Cligès C.T., 1455, 147). ...sa maistresse l'envoyoit devers le curé pour savoir qu'il tardoit tant de venir oultre l'heure prinse entre eulx deux. (C.N.N., c.1456-1467, 355).

B. -

Au fig. [Idée abstr. de dépassement]

1.

[Idée d'ajout, d'adjonction] "En plus de" : En ces .II. chapitres, oultre ce que dit est, sont aucunes choses plaisantes a considerer : et premierement, je diray de la pesanteur de la terre ou resgart du centre (ORESME, C.M., c.1377, 566). Et oultre ce, congnut que jà pieça il fu prins par les gens de l'evesque de Paris, pour cause d'un debat qu'il avoit eu en la terre dudit evesque avecques un compaignon dont il ne scet le nom (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 81). ...il fu fait despouillier tout nu, mis, lyé et estendu à la question sur le petit tresteau, et, lui estant en cest estat, oultre et par-dessus ce que cy-dessus a confessé, cogneut et confessa [ceci] (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 372). ...et avoir IJc livres oultres les gaiges d'iceulz (FAUQ., I, 1417-1420, 3).

-

En outre de qqc. "En plus de qqc." : ...et ainsi en oultre de celles qui sont denommees par nombre per, et soient conjointes ensemble en figure sperique par la maniere devant mise. (ORESME, C.M., c.1377, 236).

-

Outre ce que. "En plus de ceci, à savoir que..." : ...et a la partie senestre, oultre ce que il estoient plus serré que les autres, adjousta l'en par le conseil Pecellius nouvelles forces (BERS., I, 9, c.1354-1359, 27.9, 50).

2.

[Idée de dépassement, d'excès]

a)

[Idée de dépassement (par les qualités, les propriétés...)] "Au delà de" : Dieu est oultre tout et dehors toutes choses (JEAN GOLEIN, Rational B.D., c.1370-1372, 564).

-

"Plus que" : ...le roy de France est especialment oint es mains oultre les autres roys (JEAN GOLEIN, Rational B.D., c.1370-1372, 695). [Traité du sacre]

-

Outre ce que... "Plus que ce que..." : ...toutesfoiz leur veult il monstrer especial grace [aux larrons], oultre ce que ses predecesseurs n'ont fait (JEAN GOLEIN, Rational B.D., c.1370-1372, 531).

b)

[Idée d'excès] "Au delà de" : Car ceulz qui seulent mengier et boire indifferentement ce que est mis devant eulz, et en prennent tant que ilz se emplent trop, il font ce de superhabundance et excés de nourrissement pris oultre ce qui leur convient selon nature. (ORESME, E.A., c.1370, 224). ...a fin que l'en ne demande et que l'en ne preigne rien oultre le statut. (FOUL., Policrat. B., V, 1372, 407). Et ce est a entendre des parties integrales ; mais il me semble que se un corps est infini, il ne s'ensuit pas que il soit infini de toutes pars et semblablement de ligne et de superfice, quar l'en puet ymaginer un corps simplement infini et plus grant que quelconque corps fini oultre toute proporcion. (ORESME, C.M., c.1377, 118). Et pillierent et prissent li Alemant sus les Ronmains tant et oultre ce que on lor devoit, et n'en porent avoir aultre cose (FROISS., Chron. D., p.1400, 245). Or te demande je doncques qui est le plus dommageable vice, ou a nous de abuser des estas oultre ce que mesure donne quand ilz nous appartiennent, ou a toy de les prendre telz qu'ilz ne t'appartiennent pas ? (CHART., Q. inv., 1422, 40).

-

Outre mesure. V. mesure : ...cuidant avoir ma chambriere, par tant de foiz et oultre mesure m'avez accolée pour accomplir vostre desordonnée volunté (C.N.N., c.1456-1467, 76).

-

Outre raison. "Plus qu'il n'est raisonnable, de façon immodérée" : Et par teles pompes ilz veulent manifester et monstrer leur bonnes fortunes oultre raison, et parlent de eulz meïsme et en dient grans choses et se ventent, afin que ilz soient grandement honorés. (ORESME, E.A., c.1370, 257). Mais toutesfoiz gardez vous que, quelx qu'ilz [ceux que vous avez conquis] soient, durs ou debonnaire, que vous ne leur alevez nouvelle coustume qui soit desraisonnable. Prenez sur eulx vostre droit, sans eulx taillier oultre raison, ne alever coustumes inraisonnables, car, se peuple est povre, le seigneur est mendiz, et, se besoing lui orisoit de guerre ou d'autre neccessité, il ne se sauroit de quoy aidier, dont il pourroit cheoir en grant servitute, et n'en seroit ja plaint ne d'estrangiers ne de privez. (ARRAS, c.1392-1393, 86).

-

Outre l'enseigne. "Au delà de ce que l'on peut dire ou penser" : ...il n'a pas esté seul entaché de ce mal [la jalousie] ; mais toutesfoiz, car il le fut oultre l'enseigne, je ne le saroie passer (C.N.N., c.1456-1467, 255).

c)

[Idée d'un dépassement qui va à l'encontre de qqc., qui est en dépit de qqc., qui est en opposition à qqc.] "Au delà de, en dépit de, à l'encontre de" : Item, dit que environ a VIJ ans, il print par force une jeune femme mariée à un cousturier demourant à Saint-Aubin du Cormier en Bretaigne, à laquelle il ot compaignie charnelment, oultre le gré et volenté de ladite femme. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 19). ...je le vous diray par ainsi que vous me promecterés faire mon gré sans aler oultre mon plaisir ne ma voulenté en aucune maniere (Hist. Berthe Pépin T., c.1400-1500, 136). ...et, s'il pouoit, il savroit pourquoy Lyon fasoit ce oultre sa deffence. (WAUQUELIN, Belle Hélène Const. C., c.1448-1452, 197). Traistre ribauld, comment avez vous osé rober l'église oultre mon commendement et ma defense ? (C.N.N., c.1456-1467, 58). Monseigneur le prevost, dit elle, je me plains a vous de la force qu'il m'a violée oultre mon gré et ma volunté (C.N.N., c.1456-1467, 160). Le promoteur fut arriere adverty comment son curé se gouvernoit oultre la regle, bonne et honeste conversacion des personnes d'eglise (C.N.N., c.1456-1467, 531).

-

Outre la volenté de qqn. V. volenté

-

Outre le seu de qqn. "À l'encontre de qqn, sans que qqn le sache, à l'insu de qqn" : ...je vous ay tenu en mon hostel et vostre, s'il vous plaist, par .XV. jours oultre vostre sceu, non pas oultre vostre vouloir (Percef. I, R., t.1, c.1450 [c.1340], 207).

III. -

Interj.

-

[À la chasse, pour appeler à aller de l'avant] : Oultre, a li, oultre, outre ! (GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, 176).

-

[Pour marquer un rejet, pour envoyer au diable] : Oultre, dist il, vilain, jamais ne reprouche homme de sa deffaulte quant il ne le peult amender ! (Percef. I, R., t.1, c.1450 [c.1340], 473). Outre, dist il, cuvers, ja n'ait t'ame salu ! (Jourd. Blaye alex. M., a.1455, 105). Outre, dist il, cuviers, tu soiiez maleïs ! (Jourd. Blaye alex. M., a.1455, 186).
 

"Étoffe de laine fine"

REM. Doc. 1440 (Tournai, des draps que on appelle fins ou oultrefins fais et composés de fine laynne englesque) ds M. Höfler, Z. rom. Philol. 82, 1966, 349.
 

"Que l'on trouve en traversant la mer, qui se trouve outremer, qui vient d'outremer" : Et le gente Erenbourc se fame o cors sené L'ont en .I. rice drap de soie envolepé C'on avoit d'un ermin outremarin fouré (Jourd. Blaye alex. M., a.1455, 16). ...et de telle altitude que les isles oultre marines en perchoivent la relucence. (MOLINET, Chron. D.J., t.2, 1474-1506, 592).
 

A. -

"Excessivement" : Mais il ira bien autrement ; Quant il sera plus liement Conjoins a li et affermez En la fiance d'estre amez, Elle li jouera d'un tour Outréement, sans nul retour, Ou il trouvera fausseté Contre lui, et desloiauté, Et se ne le porra niër. Si doit bien celui anuiër, Ce n'est mie moult grant merveille. (MACH., J. R. Nav., 1349, 171). Et tant exaulça Salhadin le nom d'icellui que la royne en son cuer si oultreement fu atainte d'amours que nonobstant lez deffencez Salhadin elle trouva maniere, par le chepier, d'avoir Chavingny hors de prison. (Saladin C., c.1465-1468, 160).

B. -

"Complètement, totalement, absolument, pleinement" : Et cil qui sa porte li euvre Pert tout son bien oultreement (Tomb. Chartr. Trois contes S., c.1337-1339, 105). ...sur les pecheurs pas n'envoies Ta justice (...) Pour les destruire oultréement, Mais pour eulx amiablement Relever (Mir. st Guill., c.1347, 41). ...si soeffrir le volons bonement com pur medicine, mes grant bien nous ferroit et nous garroit tout outrement de viles brisures qe n'ont pas estee bien garriz avant ces heures (HENRI LANC., Seyntz medicines A., 1354, 198). Lors l'arbre qui pommier est dit (...) ainsi dist : "Se dë Adam je sui nee (...) Si n'est point en moi le venin Qui par Adam vint ou pepin. Entee a[i] este franchement Et exemptee outreement De venin et toute tache, Qui tous autres arbres tache, Et n'ay nulle sauvagine Dë estoc ou de racine..." (GUILL. DIGULL., Pèler. âme S., c.1355-1358, 197). ...noz mains nous sont revenues Que nous jugions avoir perdues Oultréement. (Mir. st Panth., 1364, 358). Et de ce treuve len en l'hystoire rommaine que un qui estoit aveugle de nativité ot response des dieux que s'il aloit a l'empereur et lui priast de cuer tres humblement qu'il lui voulsist les yeux touchier de sa propre salive, qu'il se verroit guery oultreement. (EVR. CONTY, Harm. sphères H.P.-H., c.1400, 41). Un autre clerc, qui toudis avoit l'ueil que le nottaire fust oultreement trespassé, par un autre moyen fist requerir au roy le dit office (CHR. PIZ., Faits meurs Ch. V, S., II, 1404, 53). Et mist ty et te gent en tel encombrement Qu'il te convint guerpir le camp outreement (Jourd. Blaye alex. M., a.1455, 209).

Rem. Percef. III, R., t.1, c.1450 [c.1340], 143/643 ; Cligès C.T., 1455, gloss. ...

-

"Pleinement, au plus haut point, par dessus tout" : ...il amoit oultreement l'une des douse pucelles qui furent presentes quant les douse chevaliers vouerent les douse veux (Percef. III, R., t.1, c.1450 [c.1340], 143).

-

"Pleinement, sans obstacle, sans difficulté" : "...Vous m'avez dit qu'en Alixandre A une porte qui est mendre Des autres, et que c'est li lieus De la ville où on porroit mieus Assaillir, et qu'on la porroit Penre par assaut qui vorroit." Percevaus tantost respondi : "Certes, sire, je vous le di, Veoir la poez outreement [var. clerement], Et chascuns sans empeschement, C'est la Porte de l'Audouanne..." (MACH., P. Alex., p.1369, 85).

REM. Ex. d'a.fr. et Lancelot du Lac (éd. 1488) ds GD V, 670b-571a. T-L VI, 1443-1445. Lettres agn. L., 1369-1412, 126 ; 409 ; 446. CHASTELL., Chron. K., c.1456-1471 (Heilemann).
 

"Au-delà de la mer" : ...ces deux nagueres estoient arivez d'oultremer, du royaume de Germanie (Ponthus Sidoine C., c.1400, 132). Laquelle [Jeanne d'Arc] me voult affermer Que brief elle feroit defermer Le siege clos devant Orleans, Dont iceulx estoient enfermez Par Anglois venuz d'oultre mer Qui sont anemis anciens. (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 513).

-

En partic. "Au-delà de la mer (Méditerranée), en Orient" : ...pour 3 camocas d'Oultremer, de plusieurs soyes... (Comptes argent. rois Fr. D.-A., I, 1352-1360, 120). Ceo lour soit grauntéz, c'est assavoir que le dit estaple y soit tenuz et null part aillours es parties de outremyer, si bien des leynes, quirs et pealx lanutz come de plumbe, esteym, draps appellés worstedes, furmage, bure, plume, gaul, ffelparie et suwe. (Hist. dr. munic. E., t.2, 1376, 375). ...pour la tuicion et garde de la Saincte Terre de oultremer (Doc. Poitou G., t.5, 1377-1390, 24). ...Il se fault habiliter a sobresse pour non estre gras, remplyz et endormiz, et pour bien travaillier, car oultremer en combatant pour la foy ne se trouveront pas les viandes delicatives (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.2, c.1386-1389, 432). Dist avec ce (...) que, puis ledit temps, il a alé et venu par pays, tant à Rome la grant, à Sainte-Katherine du mont Signay, oultre mer, que en plusieurs et divers pelerinages. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 315). N'est mie comme ceulx de Venise et de Jannes qui vont oultre mer, et par tous païs ont leurs facteurs achetent en gros, et font grans fais, et puis semblablement envoyent leurs marchandises en toutes terres a grans fardeaux, et ainsi gaignent leurs richeces. (CHR. PIZ., Trois vertus W.H., c.1405, 184). Se vous estes de m'alience, De la place les hosterons, Et sevelir les pourterons Oultre mer, en Constantinoble, Couvertement ; car em plus noble Cité ne les pourrions nous mettre. (Myst. st Adr. P., c.1450-1485, 162). ...et, pour se moquer des chrestiens et leur porter dommaige, a plusieurs foiz fait clorre ledit Saint Sepulcre et casser le passage d'oultremer (GERMAIN, Discours outr. S., 1452, 325). ...[il] s'avolenta d'aller voyager oultre mer en divers lieux (C.N.N., c.1456-1467, 461). Predist plusieurs choses, mesmement du scisme qui fut en son temps et de la disposicion du temps du terre motus, qui fut oultre mer et, par especial, à Anthioche et en plusieurs places et chasteaux. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 119 r°). Cestui predist de la descente des enfans d'Almaigne, qui disoient aller oultre mer recouvrer la Terre Sainte (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 120 r°). Cestui fut homme singulier et fut moult aprecié des princes d'icelui temps et du vulgal. Cestui alla avecque saint Loys oultre mer et lui predist ce que lui advint. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 124 v°).

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Graine d'outre-mer. "Anis ou cardamome"

Rem. HENRI FERR., Modus et Ratio T., c.1354-1377, gloss.

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Rose d'outre-mer. V. rose

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(Saint) voyage d'outre-mer. V. voyage "Pèlerinage à Jérusalem ou croisade en Terre sainte" : ...garnisons et pourveance pour le saint voiage d'oultremer (Clos galées Rouen M.-C., t.2, 1335, 10). Or mandons les deux chevaliers qui sont venus du saint voyage d'oultre mer, et leur enquerrons plus avant de cest affaire. (ARRAS, c.1392-1393, 81). ...quand un noble homme venoit en eage compétent de porter armes, jamais ne cessoit, non doutant péril de corps, peines, ni travaux que advenir luy pust, qu'il n'allast enquérant les hauts faits d'armes et les beaux voyages d'outre-mer et autre part (Faits Lalaing K., c.1470, 2). Cestui dist bien au roy Loys VIIIe de ce nom, comme il lui adviendroit de ses voyages d'oultre mer, qui ne voulut croire, dont le royaume eust puis beaucop à souffrir. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 119 v°). Cestui moult aprecié du roy Saint Loys et lui predist l'infortune qu'il eut en son voyage d'oultre mer, où il fut pris (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 125 r°).
 

A. -

Adv. "De plus, outre cela" : Et se je puis faire oultre plus Je le feray. (Mir. prev., 1352, 253). Car Dieu pour m'amour a mercy T'a pris ; soiez en tout certain. Oultre plus vezcy je t'amain Ceulx contre qui plus mespreis (Mir. prev., 1352, 262).

B. -

Subst. masc. "Reste, surplus" : Mais ne vous peut ore chaloir Que l'oultre plus m'en enquerez, Car je say que briément (...) verrez tout appertement Ce que je di couvertement (Mir. ev. N.D., c.1348, 66). Si tost conme a dire me mis Domine, labia, sanz plus Il parfinérent l'oultre plus. (Mir. ev. N.D., c.1348, 85). ...et à son compte qu'il a rendu en la chambre de nozd. comptes (...) lui avez mis en deport le oultre plus de lad. somme de vingt l. de gaiges (Actes Jean V Bret. B., t.2, 1415,194). ...et l'oultre plus de ladite somme sera baillee par lesdits fermiers (Reg. Poitiers F., t.4, 1474, 115).
 

A. -

[Idée de dépassement d'une limite]

1.

[Dans l'espace]

a)

Outrer la mer. "Traverser la mer" : Puis que voulez la mer oultrer, Alons touz en la nef entrer (Mir. fille roy, c.1379, 59).

b)

S'outrer de. "Sortir de, quitter (un lieu)" : Ha ! sire [Dieu], quant je me recors Que des cieulx vous estes oultré Et a moy vous estes moustré... (Mir. Oton, c.1370, 373). ...puis si t'en vas (...) Devant ce vergier toy monstrer Et d'ilec en passant oultrer Et courre fort, se l'en te chace (Mir. fille roy, c.1379, 100).

2.

[Dans le temps]

-

Part. passé. [Du temps, d'une durée...] "Écoulé" : ...celui (...) Qui t'a, ou temps qui est oultré, Du saint autel admenistré Le sacrement. (Mir. st Lor., 1380, 163). Oultrez estoit celle journée : L'on savoit sa douleur finée, Et estoit desconfiz ly champs (DESCH., M.M., c.1385-1403, 21).

-

Empl. intrans. ou pronom. "Se terminer" : La feste se prist a outrer Quant on eut assés esbatu (FROISS., Pris. am. F., 1372-1373, 50).

3.

Au fig.

a)

"Dépasser, outrepasser qqc." : Car par amours est pres ma vie oultree (FROISS., Orl., 1368, 85). Quar quant amours maint en cuer debonnaire, Juene, gentil, de franchise paré, Plein de cuidier et de joieus affaire Et de desir par plaisence engenré, C'est trop fort à contrester, Qu'il font souvent sens et mesure outrer ; Pour ce adès pense à ces poins et regarde Qui de s'onneur vuet faire bonne garde. (MACH., L. dames, 1377, 182). S'aim miex que je li die ma langour, Qu'einsi morir, sans avoir la savour De la joie qu'est parfaite douçour À savourer ; Et dou dire ne me doit nulz blamer Qu'amours, besoins et desirs d'achever Font trespasser mesure et scens outrer. (MACH., Motés, 1377, 496). Moab li connestables (...) là vot le commant trespasser De David son segneur. Atant m'en voel passer, Mais loiautés li fist obédience outrer. (Geste ducs Bourg. K., c.1410-1419, 317).

-

"Repousser qqc. dans sa limite, dans son achèvement, outrepasser la limite qui devait être la limite finale de qqc. sans qu'elle soit effective (en sorte que cette chose reste contamment inachevée)" : ...celle [Marie] deprie Qu'elle te face ta besongne. (...) Car se tu n'as par elle entrée [au ciel], Ta besongne est sanz fin oultrée (Mir. pape, 1346, 374).

b)

"Vaincre qqn ou qqc. ; tuer qqn ; anéantir qqn ou qqc."

-

"Vaincre qqn ou qqc." : Pour Dieu, doulx amis, dy moy veritablement se Logre est du tout oultrez et se il avoit mais nul pouoir de lui deffendre. (Bérinus, I, c.1350-1370, 176). Sire, qui (...) As volu prendre humanité Et toi Dieu et homme moustrer Et mort as mort par mort oultrer... (Mir. st Panth., 1364, 362). Sa maniere seüre, Douce et simple, à mon gré, Et la riche faiture De sa plaisant biauté Par leur douce pointure M'ont conquis et outré. (MACH., Ch. bal., 1377, 597). Et puis, quant la place est oultrée, Orrez que ceuls de la contrée Diront que se le plus eust trait Contre le moins par autre trait Qu'ilz ne firent, tuit fussent mors Et que nulz ne leur fust estors, Mais ce qu'a droit n'ouvrerent point Les a destruis. (DESCH., M.M., c.1385-1403, 360). Gualien y moult estoit lassés, Trois fois est [Gualien] lés l'estandart pasmés, Ernault et Emeri cuident qu'il soit oultrés. (Galien D.B., c.1400-1500, 141). ...vous en irez sans teste ou vous vous tendrez pour oultré et jurerés a faire ma voulenté. (Percef. I, R., t.1, c.1450 [c.1340], 146). Mais nonobstant il ne fut pas content et se plaingnist au duc Baudouyn, lequel lui dist qu'il avoit tort et que, puisque son adverse partie estoit deffendeur, il le devoit oultrer dedans le soleil couchié, ou aultrement il perdoit sa cause. (BUEIL, II, 1461-1466, 111).

Rem. Renart contref. R.L., 1328-1342, gloss. ; Myst. process. Lille K., t.4, a.1485, 44/137 ; 58/112...

.

Outrer la bataille. "Emporter la bataille, vaincre" : Au ber Huon Capet le pris pour le journee ! C'est ceus qui au jour d'ui a le bataille outree ! (Hugues Capet Lab., c.1358, 226). ...la bataille oultra (MARTIN LE FRANC, Champion dames D., t.4, 1440-1442, 228).

.

Outrer d'armes. "Vaincre par les armes" : ...tous furent oultrez d'armes et envoyez à la prison de la belle Sidone. (Ponthus Sidoine C., c.1400, 70).

-

"Tuer qqn" : Et aussi estoient les lions qui, pour plaie qu'ilz eüssent, ne laisserent point a courre sur Aigre, ainz le penerent et travaillerent tant, que il estoit prez de l'outrer, car quant il se deffendoit a l'un, l'autre le rassailloit (Bérinus, I, c.1350-1370, 316). A Antheon l'ont bien monstré, Qui par ses propres chiens oultré Y fu, si tost com cerfs devint (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 22). Puis qu'ainsi est que dieu des dieux est vray Pour gerre humain a créé toute chose. A tort seroit par peste a mort livré(r) Quelque chose que nature propose, Et soustiendray, tandis que je vivray, Que encore doibt vivre bien longue pose Sans estre oultré, ne blecé, ne navré Tant que viellesse a son gré en dispose. (Cene dieux, c.1492, 111).

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Part. passé Outré. "Mort" : Morte se fist, qu'on l'enterrast (...). Mais le conte Raymon n'avoit Regret a elle, et ne pouoit Croire que du tout fust oultree, Ains toudis en Dieu se fioit Qu'elle seroit ravigoree. (MARTIN LE FRANC, Champion dames D., t.2, 1440-1442, 104). Moult fu Oriabiel de malage apressee ; Ne mengüe ne boit nes quant elle fu nee, Ne voit, ot ny entent nes qu'elle fust outree. (Jourd. Blaye alex. M., a.1455, 370).

Rem. Erec C.T., c.1450-1500, gloss.

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Outrer le corps. "Mourir" : Mieulx vault oultrer Le corps, que soy faire moustrer Au doy sans oser encontrer Les bons n'en compaignie entrer. (CHART., L. Dames, 1416, 227).

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Outrer sa vie. "Mourir" : Si rencontrerent Si mal que leur vie y oultrerent. (CHART., L. Dames, 1416, 283).

-

"Dépasser, détruire, anéantir qqn ou qqc." : ...Et de laissier Fedry cez bataillez [ses propres troupes] outrer (Hugues Capet Lab., c.1358, 214). Et s'elle vuet vers moy estre si dure Que d'un regart ne me vueille enrichir, À tout le meins la tres grief mort obscure, Que j'ay pour li, deingne penre en plaisir. Et se c'est trop de tel don requerir, Rage d'amours le fait qui m'a outré. Et malades, quoy qu'il soit, de senté, Prent volentiers ce dont il ha desir. (MACH., L. dames, 1377, 61). Et se je suis par la grant cruauté De ma dame menez jusqu'à la mort, Miex me vaura que vivre en tel durté, Qu'entendement, scens, maniere et deport Ay tous perdus ; et com plus m'humelie, De tant croist plus la dure maladie Qui m'art et seche et me fait esperer Qu'Amours n'a pas pouoir de moy donner Mercy : tant sui je outrés crueusement De la doleur que j'endure humblement. (MACH., L. dames, 1377, 64). ...au departir sera ta joye oultree Q'ung dur regret (SAINT-GELAIS, Séj. honn. D., c.1490-1495, 190). L'eage ferree commença durement Car Vertu fut subitement oultree, Paix espautree hors de toute contree, Foy rencontree au cueur amerement. (ANTITUS, Poés. P., c.1500, 34).

c)

Part. passé en empl. adj. Outré de. "Dépassé par, plein de" : ...tournoyant comme homme oultré de desplaisir (SAINT-GELAIS, Séj. honn. D., c.1490-1495, 247).

-

Outré de deuil. "Dépassé par la douleur" : La royne Mirro, oyant l'entreprise de Jason, tant fu oultree de doeil qu'il lui sambla que l'en la frapast d'une lance ou travers du cuer, tant amoit Jason. Toutesvoyes elle tinst maniere le mieulx qu'elle poeut. (LEFÈVRE (R.), Hist. Jason P., c.1460, 142). ...mon dolent cueur, qui tant estoit de dueil oultré et desconfit par forte peine (SAINT-GELAIS, Séj. honn. D., c.1490-1495, 292).

-

Outré de ire : Mais il fu si tresperciez et oultrez de yre que raison naturelle s'en estoit fuye de lui. (ARRAS, c.1392-1393, 255). ...quant Estonné veyt qu'on le ruoit ainsi, il fut tout oultré de ire (Percef. I, R., t.1, c.1450 [c.1340], 318).

-

Outré de peur. "Dépassé par la peur, mort de peur" : ...tout de paour yert oultrez (CHR. PIZ., Chem. estude P., 1402-1403, 49).

d)

Inf. subst. Sus l'outrer. "À la limite (de rupture)" : Vrais Diex, si sui je si atains Pour s'amour que priés sus l'outrer, Ensi que je le voel moustrer, Mais que j'aie tamps et loisir (FROISS., Pris. am. F., 1372-1373, 44).

B. -

P. ext. [Idée d'atteinte d'une limite]

1.

"Achever, terminer qqc." : GUILLAUME. Dame, fait avez un devis Ou ma grant deshonneur moustrez, Mais li procès n'est pas outrez, Ne mis en fourme justement. Pour faire certein jugement, Vous me deüssiez dire en quoy J'ay forfait, et tout le pourquoy Amener a conclusion. (MACH., J. R. Nav., 1349, 166). Dame, foy que doy sainte Eglise En qui ma foy est toute assise, Pour nulle rien ne le feroie ; Eins iray tout outre la voie Dou fait, puisque j'y suis entrez. Dès que mes jugemens outrez Est de moy, je le soustenray, Tant com soustenir le porray. Mais qui vorroit avant venir Pour le contraire soustenir, Moult volentiers oubeïroie A quanqu'oubeïr deveroie. (MACH., J. R. Nav., 1349, 172). C'est uns homs a cui il ne chaut A tort ou a droit soustenir ; Tout aussi chier s'a il tenir Vers le tort comme vers le droit, Si com vous orrez orendroit. En un debat sommes entré Dont nous devons de fait outré, Sire, devant vous plaidïer, Mais qu'il ne vous doie anuier. Moy bien meüe et il meüs, Pour juges estes esleüs ; Dont c'est pour nous belle avenue, Biau sire, de vostre venue. (MACH., J. R. Nav., 1349, 188). Le pape s'est assiz, Charles se va encliner Et par devocion a Dieu mercy prier Qu'i lui laisse sa confession benignement oultrer (Renaut Mont. B.L. V., c.1350-1400, 39). A ce que miex la chose oultrée Soit, pére, faites nous savoir Conment il [cest enfant] puist baptesme avoir (Mir. st Panth., 1364, 320). Il est au jour d'ui la journée Que bataille doit estre oultrée De nous deux. (Mir. Amis, c.1365, 35). ...jusques ad ce que la battaille d'eulx deux fust oultree. (Gérard de Nevers M., c.1451-1464, 169).

Rem. Myst. process. Lille K., t.2, a.1485, gloss.

2.

"Accomplir qqc." : Vous plaist il mieulx me veoir oultrer Mort devant vous pour voustre esbat, Que pour un confort demoustrer Respitier la mort qui m'abat ? (CHART., B. Dame, 1424, 356). Et tantost que ces gens veirent que la bataille estoit oultree et que... (Percef. III, R., t.1, c.1450 [c.1340], 135). Li uns desiroit l'autre, leur plaisance ont monstree [var. outree] (Jourd. Blaye alex. M., a.1455, 288). [aussi v.11074]

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"Conclure, fixer (le prix offert au cours d'une vente)" : ...pour iceluy [encherisseur] ou ceux plus offrant et dernier encherisseur tenir ledict moulin et usine hereditablement a luy ou a ses hoirs perpetuellement, pour le pris et somme de la vallue qu'ilz seront outrée au jour de la couppée (Trés. Reth. L., t.3, 1441, 202).

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S'outrer de + inf. "Se hâter de" : Or tost, mareschal, sanz attente, D'aler encontre eulx vous oultrez Et vostre pouoir leur monstrez, Et nous vous suiverons après. (Mir. fille roy, c.1379, 74).

3.

Outrer qqn. "Convaincre pleinement qqn" : YPOLITE. Nous vous mercion humblement Du grant bien que vous nous monstrez. En l'amour Dieu sommes oultrés Et voulon mourir en la loy. (Myst. st Laur. S.W., 1499, 237).
 

"En dépassant toute règle, toute norme" : Lors vist-on un merveilleux dueil en ce chevalier, lequel s'avisant de mander le pareil aussi à la duchesse, envoia à tuer cheval devers elle, lui mandant l'extrémité de son mary et que si jamais le désiroit à voir vif, que elle se hatast outre-règle (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 443).
 

"Excessif" : Neantmains, car nostre hault povoir n'est sy rigoureux que ne puist estre de misericorde flechy, vengeance oultriere ne prendons maintenant de vous et atant endurrons, mais que en aucun desert retiréz le residu de vostre meschante vie et plus de vos poisons ne enveniméz le monde. (MARTIN LE FRANC, Estrif D., 1447-1448, 6). [Même forme, éd. 1480, ds GD V, 673c-674a]
 

A. -

Paroutrer qqc. "Conduire qqc. à son terme ultime" : ...sans ce que li rois en fust point infourmés, Fist paroutrer le fait (Geste ducs Bourg. K., c.1410-1419, 317). Soiez plus content de prendre de moy ce qu'en vouldrez par mon accord et volunté (...) que malgré moy vous paroultrez vostre vouloir desordonné. [Un seigneur s'apprête à violer une jeune fille ; texte Vérard : que par force et malgré moy voz paroles et vostre vouloir desordonné soyent accomplis] (C.N.N., c.1456-1467, 157).

Rem. FROISS. ms (il n'osoit paroultrer ses entreprinses) ds GD V, 785b.

B. -

Se paroutrer en qqc. "Se jeter à fond dans qqc., s'adonner à qqc. de façon outrancière" : ...onc (...) N'en requist absolucion, Mais en sa dissolucion De plus en plus se paroustroit Quant le bon curé li monstroit Que s'en adreçast envers li (Mir. parr., 1356, 21).

C. -

Part. passé en empl. adj. "Excessif, démesuré" : PREMIER CURÉ. (...) Tu scés bien (...) conment t'es maintenuz En rigueur d'orgueil paroutré Toutes foiz que je t'ay monstré Les offenses et les pechiez Dont surpris es (Mir. parr., 1356, 12).

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Paroutré de. "Dominé par"

Rem. CHASTELL., Chron. K., t.1, c.1456-1471, 49 (le jeune desconforté prince vaincu et paroultré de douleurs ; GD V, 785b).
 

[Forme savante de outre-] "Au-delà (de), dans l'espace"

Rem. V. ultramontain.

V. aussi outre-