C.N.R.S.
 
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     PRENDRE     
FEW IX prehendere
PRENDRE, verbe
[T-L : prendre ; GD : prendre/prenant ; GDC : prendre ; DÉCT : prendre ; FEW IX, 339b,340b,341b : prehendere ; TLF : XIII, 1068b : prendre]

I. -

Empl. trans. [Le sujet du verbe est un agent (il agit volontairement)]

A. -

Au propre Prendre qqc. (ou qqn)

 

1.

"Faire le geste nécessaire pour saisir, pour appréhender qqc., saisir qqc."

 

a)

Prendre qqc.

 

-

[De la main, de ses mains] : Henry, vien avant ; pren un madre Plain de vin (...) Et porte a ce ladre la hors (Mir. Amis, c.1365, 54). ...[l'ivrogne] prend et baille son cousteau a ce [prieur] (C.N.N., c.1456-1467, 62). Le medicin prend l'orinal et contremont le leve, et tourne et retourne l'urine (C.N.N., c.1456-1467, 135). ...le bahu fut fermé, et tout jouant, riant et esbatant, prindrent toutes ensemble homme et bahu, et l'emporterent en une petite garderobe (C.N.N., c.1456-1467, 185). ...[elle] s'advisa de prendre une eschalle que ung couvreur avoit laissée lez son ouvrage tantdiz qu'il estoit allé disner. (C.N.N., c.1456-1467, 275). Je prens la roube par ce bout ; Je l'ay guaigné [l. guaignhee] valhenment. (Pass. Auv., 1477, 205). Josep, en grant benignité Prenons ce corps. (Pass. Auv., 1477, 259).

 

-

[Par une partie du corps autre que la main] : Puis la print entre ses bras en disant qu'il luy monstreroit tant de franchise et de bonté en ceste matière qu'il l'aymeroit plus que devant. (BUEIL, II, 1461-1466, 255). Celle croix prenés sur le dos ! (Pass. Auv., 1477, 189).

 

.

[D'un animal] : ...et prist son mors a dens (FROISS., Chron. D., p.1400, 332).

 

b)

Se prendre à qqc. "Se saisir, s'emparer de qqc." : Je n'en despecherey la plasse Se je me prans a mon batom. (Myst. st Sébast. M., c.1450-1500, 150).

 

c)

Prendre qqn (par). "Saisir qqn (par)" : ...et lors il qui parle apperceut venir sondit serourge, print icelli par le manteau, et dudit baston de rondin lui donna cinq ou six coup (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 499). ...icellui barbier vint à elle qui parle ainsi estant à terre, et la print par les cheveux, et dist que ledit Oudot la harigoteroit. (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 510). ...ledit Boulengier le print aux draps et au corps et lui osta un baston qu'il avoit. (Chancell. Henri VI, L., t.1, 1424, 102). N'il n'y ara escorpion, Couleuvre, crapaut, ne dragon, Laisarde, serpent, ne aultre beste Qui ne te prengne par la teste, Se tu ne fais a ton retour Tant que je te raye en amour. (MARCADÉ, Myst. Pass. Arras R., a.1440, 13). Si le prindrent par teste, par piez et par jambes, et tout en air le sourdirent (C.N.N., c.1456-1467, 63). Sa mere la prent par la main, et luy taste son poux (C.N.N., c.1456-1467, 134). ...sans plus dire, la trousse et prend entre ses braz, et dessus ung peu d'herbe (...) souvyne la coucha (C.N.N., c.1456-1467, 156). ...a tant se voult partir le gentil amoureux ; mais la damoiselle le print et accola (C.N.N., c.1456-1467, 381). ...un d'eulx s'avance, qui la prent le plus rudement du monde, disant qu'il aura sa compaignie avant qu'elle luy eschappe, veille ne daigne. (C.N.N., c.1456-1467, 552). Et sans autre desliberacion le demande et le prist par la barbe, et le tyre a soy si rebellement que a peu de fait il l'eust tombé a terre. (BAGNYON, Hist. Charlem. K., c.1465-1470, 97).

 

-

[Avec l'idée de conduire qqn qq. part] : Adont elle print la pucelle par la main ou Flamine la belle pucelle avecq Blanchette se baignoient. (Percef. III, R., t.2, c.1450 [c.1340], 366).

 

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"Emmener qqn" : De froit le povre cueur m'estrainct Et si n'ay membre qui ne tremble ; Mon chief de douleur se retrainct, Je ne sçay pas qu'il vous en semble. Pour ce, prenez moy tous ensemble Et si me portez reposer (LA VIGNE, S.M., 1496, 559).

 

-

Empl. pronom. réciproque : ...Gerard et Conrard se prennent a braz et s'en vont veoir leurs chevaulx (C.N.N., c.1456-1467, 173).

 

-

Empl. pronom. réfl. : ...et se print a ses deux mains par les costes ["elle mit les mains sur les hanches"] (Lyon cor. U., 1467, 44).

 

-

Prendre une femme. "Se saisir d'une femme, la violer" : Jehan Barrier (...) detenu par l'acusacion d'avoir esté, en la compagnie d'autres, a prendre une femme en la ville de Saint Jehan (Doc. 1391. In : P. Rézeau, R. Ling. rom. 78, 2014, 430). [Archives hist. de la Saintonge et de l'Aunis]

 

2.

"Saisir qqc. pour le faire pénétrer à l'intérieur de soi-même, absorber, ingurgiter qqc."

 

a)

[Une boisson, un aliment...] : Si tost comme elle les verroit, S'en porroit prendre tel goulée Que tost s'en seroit saoulée (MACH., D. Aler., a.1349, 268). ...s'il na apetit a la prendre [la viande, la nourriture] et ne la prengne point... (SAINT-GILLE, Comment. A.Y. L., 1362-1365, 322). ...et pour certain Il vault aussi de tout costé Prendre au matin du pain tosté Taint en vin aigre, sans mesleure, Ou en vin aigre et eaue pure (LA HAYE, P. peste, 1426, 125). ...et puis aler prendre vostre reffection. (JUV. URS., Nescio, 1445, 448). ...que aux heures ordonnees il insiste orer et prier Dieu, et que devant heures congrues et convenables il ne prengne boire ou viande. (JUV. URS., Verba, 1452, 211). ...mangüe tousjours en telle maniere que quant tu te leveras de la table ton appetit ne soit pas saoul, et aussi ton boire soit prins atrempeement. (LA SALE, J.S., 1456, 26). De cestui est escript qu'il vaca nonante ans à l'estude de sapience et tant l'ayma que souventes fois oblioit prandre sa reffection. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 72 r°).

 

-

[D'un animal] : ...et [l'aigle] fiert son bec a la plus aspre et dure pierre de la roche, tant qu'il oste son becq et lui en revient ung nouvel, et prend viande aussi bien qu'il fist onques, et ainsi se renouvelle et ajovenist. (Somme abr., c.1477-1481, 179).

 

-

Au passif [D'une chose] "Qui a été absorbé" : Car ceulz qui seulent mengier et boire indifferentement ce que est mis devant eulz, et en prennent tant que ilz se emplent trop, il font ce de superhabundance et excés de nourrissement pris oultre ce qui leur convient selon nature. (ORESME, E.A., c.1370, 224).

 

-

Empl. abs. : A ceulx qui sont en leur accez, l'en ne doit neant donner, ne les doit l'en pas contraindre a prendre, mais on leur doit hoster la viande et les choses c'on leur donne, especialment devant l'eure determinee. (SAINT-GILLE, A.Y., 1362-1365, 57).

 

b)

[Un remède] : ...quant le pacient prent bien ce que l'en lui donne (SAINT-GILLE, A.Y., 1362-1365, 62). Quiconques a pris medecine et est en voye de purgacion et n'a point de soif, il ne se doit pas reposer tant qu il ait soif. (SAINT-GILLE, A.Y., 1362-1365, 73). Spasme venant a aucun qui a pris medecine laxative, c'est signe de mort. (SAINT-GILLE, A.Y., 1362-1365, 98). ...tant de remedes ot pris Contre venin... (CHR. PIZ., M.F., IV, 1400-1403, 22). Pour éviter ce détriment, Prendre des choses amiables Pour la poictrine et proffitables, Comme dragagant est, qui vient Des nobles mèthes d'Orient (LA HAYE, P. peste, 1426, 125). Ilz ordonnerent son regime (...).Et elle prend et fait tout ce qu'on veult pour recouvrer santé. (C.N.N., c.1456-1467, 33).

 

-

Empl. pronom. à sens passif. [D'un remède] : Nasturcium, come est declaré, purge toute espesse de fleume, et quant il se prent par la bouche il prohibe la cause du morphé et oinct par deshors par sa abstertion (Rég. santé corps C., 1480, 135).

B. -

[Avec une idée d'accaparement, de vol] Prendre qqc. (à qqn) "Se saisir, s'emparer de qqc. (qui appartient à qqn), voler qqc." : Et ont Ezechïel leü Qui deffent a prince et ensaigne Que rien par sa force ne praigne Des choses qui au peuple sunt. (Tomb. Chartr. Souvain S., c.1337-1339, 28). ...je t'amain Ceulx contre qui plus mespreis, Quant le leur a force preis (Mir. prev., 1352, 262). ...nostre bon gentilhomme, sans faire semblant de rien, vint au lit d'elle (...) et trouva façon de prendre les braies du prestre sans ce qu'il fust de ame apperceu. (C.N.N., c.1456-1467, 333). ...c'estoit sa coustume que de gaigner et de prendre ce qu'il trouvoit sans garde (C.N.N., c.1456-1467, 401). Car jeunesse me faisoit faire Mains abuz en mon mestier. Voulent augmenter mon repayre, Prendre ay cuidé l'autruy denier. (Pass. Auv., 1477, 119). Il le fault bien, car les satrapas Porroyent bien le corps Jhesu prendre. (Pass. Auv., 1477, 238). ...puis vint en Jherusalem et le mist en desolacion, print les precieux vaisseaux ou Temple et puis le fist abatre (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 44 r°). SECOND BRIGANT. Aussi Par les boys ont fait leur debvoir De prandre a l'un tout son avoir Et a l'aultre du corps la vie. (LA VIGNE, S.M., 1496, 315).

 

-

Prendre qqc. de qqn. "S'emparer de qqc. (qui appartient à qqn)" : Item, aucuns illiberals se abstiennent de prendre aucune chose de autrui, pour ce que il ne peut legierement estre que un homme preingne des autres et que les autres ne preingnent onques aucune chose du sien. (ORESME, E.A., c.1370, 240).

 

-

Empl. abs. : Veez cy le corps de celuy qui est tout vostre : taillez, roignez, prenez, ostez, faictes tout ce qu'il vous plaist. (C.N.N., c.1456-1467, 167).

 

.

"Voler, vivre de rapines" : Mais ceulz qui ne prennent pas indeüement, il ne sont pas communelement quant a ce loés de liberalité (ORESME, E.A., c.1370, 232). Je voy ja ma dampnatïon, Onques ne fut m'antancïon Fors que de panre et de piler, J'ay fait pandre plus d'un millier D'ommes par haïne et par dons. (Jour Jug. R., c.1380-1400, 248). ...il est aucuns princes et chevaliers qui sont infideles et compagnons des larrons, prenans de tous costez et vivans sans foy et sans loy. (BUEIL, II, 1461-1466, 73).

 

-

Mal prendre. "Voler" : Item, cogneut que, puis un an a ou environ, il, de jour, mal print et embla en ladite ville de Troyes, en l'ostel de Guillemin Drouet, son frere, une fourche de fer avec un hoeau, par lui venduz, en icelle ville, XIJ d. par. (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 220). Item confessa que, environ cinq ou VJ jours après, que il et sondit pere buvoient en une taverne à la porte Baudoir, lui et sondit pere mal prindrent et emblerent, en ladite taverne, un autre hennap de madre (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 499).

 

-

Part. prés. en empl. adj. Près prenant. "Qui accapare" : Mes clercs pres prenans comme glus... (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 129). [Éd. : "agrippants"]

 

Rem. Doc. 1459 (la justice est si pres prenant que merveilles) ds GD VI, 383b. Ex. de COURTECUISSE ds l'éd. R.H., n. du v. 1670 (Garde que tu ne soies chiches (...) ne aussi que es choses qui sont de tres petite value tu ayes regart, mais auras honte d'estre si pres prenant).

C. -

[Avec une idée d'attaque, de capture]

 

1.

Empl. trans. Prendre qqn / un animal / p. méton., le territoire de qqn. "S'emparer, se saisir de qqn, d'un animal, du territoire de qqn"

 

a)

"Se saisir, s'emparer de qqn" : Quant les chars furent eschaufées, Si commencerent a puir, Et les ennemis a courir Pour femmes prandre et violer, Pour pillier et pour desrober (DESCH., M.M., c.1385-1403, 336). ...tuer gens et prendre femmes à force (Doc. 1408. In : J. Petit, Bibl. Éc. Chartes 72, 1911, 86). ...car prendre ung malfaicteur c'est voye de droit et de justice. (JUV. URS., Nescio, 1445, 498). Il fist aussi prandre et tuer Joachin et le corps trayner aux champs, affin que les chiens le mengeassent. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 44 r°).

 

-

[D'un bandit] : ...s'il nous advenoit meschef ou d'estre prins ou destroussez de biens (...) ce seroit un merveilleux desplaisir. (C.N.N., c.1456-1467, 171).

 

-

[Du diable] : ...quand tu fus nez, Le dyable vint abrivez, Qui te vouloit prendre et saisir (Mir. enf. diable, c.1339, 27).

 

-

[De la mort] : ...las ! la mort trop me demeure, Quant avant de luy ne m'a pris. (Mir. ev. arced., c.1341, 115).

 

-

Prendre sur qqn. "Attaquer qqn" : En ce temps, le bastard de Bourgongne et le mareschal de Bourgongne, acompaignez de grant quantité de gens de guerre de la compaignie dudit monseigneur de Charrolois, commencerent à courir sus aux villes et subgetz du roy par port d' armes, et vindrent prendre sur le roy Roye et Montdidier. (BUEIL, I, 1461-1466, 45).

 

b)

"Capturer (un animal)"

 

-

"Pêcher" : Toute la nuit, par mon serment, En grant labeur avons pesché ; Nous n'avons riens pris ne trouvé. (Pass. Auv., 1477, 125). Et pour ce les poissons prins en la mer de septentrion laquelle est plus agittee et plus impetueuse, et fluyt et refluyt legierement ; sont meilleurs que les poissons prins en mer meridionale ou de Mydi. (Rég. santé corps C., 1480, 74).

 

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[Métaph. évangélique : Luc 5, 10 : "tu seras pêcheur d'hommes"] : N'aye peur, Pierre ; je t'affie Que les hommes ainsi prendras. (Pass. Auv., 1477, 127).

 

-

"Capturer à la chasse" : Si le suimes [le cerf] ci de près Tout parmy la haulte forest, Ou fu aconseuz et pris. (Mir. femme roy Port., c.1342, 171). Cilz chevaliers, je croy, cuide prendre les grues en voulant. (ARRAS, c.1392-1393, 59). On ne prent mie le lievre au tabour, ne l'oysel a la tartevelle. (Doc. 1400-1500. In : E. Legris, Bibl. Éc. Chartes 1899, 60). ...ses compaignons venoient, qui avoient prins proye. (BUEIL, I, 1461-1466, 37). Par Dieu, se nous sera grant blasme, Nous en retourner sens riens prandre ! (Pass. Auv., 1477, 140). J'en y ay pris aultrefois trois, Tout a ung cop entre mes cordes. (Pass. Auv., 1477, 141). J'ay chassé de nuyt a la torche En Poyto, France et Bretanhe, Et meinctenent suis en Aulvernge, Ou je n'y voy beste pour prandre. (Pass. Auv., 1477, 141).

 

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[D'un animal] : ...et tout environ elle estoyent sensues, couleuvres, laysardes, par lesquelz je entens gens vicieux ou desirs pervers qui sussoyent la partie de ceste beste jusques aux os, et a toutes choses estoyent a descort fors a ce faire comme deux loups s'accordent a prendre une brebis (GERS., Noël, p.1404, 308). ...jadis ung loup print un chievrot d'entre les chievres, qui estoit moult tendre et jeune (COLART MANS., Dial. créat. R., 1482, 168).

 

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[D'un animal] Se prendre / prendre. "Se faire capturer" : ...la rois qui se destent de lui meismes quant l'oisel sauvage prant l'estolon ["engin destiné à prendre les oiseaux" ; prendre l'estolon "s'engager dans cet engin"] qui est en fourme, lequiel [lequel oiseau] se prant de lui meismes. (HENRI FERR., Modus et Ratio, Livre deduis T., c.1354-1377, 162). [Éd., 341 : "l'oiseau est pris par le rets tout seul sans qu'on ait besoin d'être présent pour faire détendre le rets"] ...si que les bous des gluos ataignet cheulz qui sont devant, affin que l'oisel ne se puisse asseer entre-deuz qu'i ne praigne ["sans être capturé"]. (HENRI FERR., Modus et Ratio, Livre deduis T., c.1354-1377, 300).

 

-

Part. prés. en empl. adj. "Bon à la chasse" : ...de tres bons levriers Pour lievre, vistes et legiers, Bien alans et tres bien prenans (HENRI FERR., Modus et Ratio, Livre deduis T., c.1354-1377, 398).

 

-

Au fig. : ...Cui ses cuers est de dame pris (MACH., D. Aler., a.1349, 289).

 

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[Au propre ou au fig.] Estre pris qq. part : Car il est pris en si estroit lïen Qu'il ne scet tour d'eschaper (MACH., J. R. Beh., c.1340, 129). Tuit serons pris à la ratiere. (MACH., P. Alex., p.1369, 102). ...ce lien De mariage, qui trop grieve A ceuls qui sont prins en ce piege (DESCH., M.M., c.1385-1403, 271). ...luy [qui] estoit prins ou las d'amours et feru bien a bon escient, ne veult pas pourtant sa queste abandonner. (C.N.N., c.1456-1467, 294). Je seroys prins au tresbuchet. (Jen. filz de rien T., c.1475-1500, 304).

 

-

Part. passé en empl. adj. "En mauvaise posture" : Quant li diex d'Amours m'a veü Si pris et si despourveü, Il n'atendi plus (Echecs amour. K., c.1370-1380, 132).

 

c)

En partic. "Faire qqn prisonnier" : Mais assez tost après ce qu' il ot beu, il fu prins et admené prisonnier à S. Magloire, ne scet la cause pour quoy (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 4). ...li rois est navrés et pris (FROISS., Chron. D., p.1400, 781). Cellui Cornelius Asina fut appellé de Hanibal le viel devantdit, pour traictier de la paix ; sy y alla follement avec sept nefz, et fut la prins et retenu. (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 33). Les Hericiens prindrent la garde des Rommains, qui estoient sur une montaigne, et sceurent toutes les ensseignes ; puis le tuerent et firent vestir ung aultre de ses habis (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 53). ...les Bourgoignons tuerent un grand tas en venue de ceulx de Troyes, et prindrent des prisonniers ung grand nombre (C.N.N., c.1456-1467, 453). Tous laissames le bon Jhesus Quant il fust prys. (Pass. Auv., 1477, 187). Alexandre, diligenment, Sompna, Diatam, et vous, Janua, Prenés moy ce foulastre la Et l'alés mectre en prison ! (Pass. Auv., 1477, 268). Cestui predist au roy Charles la grande bataille d'Espaigne, qui fut ou mois d'avril mil IIIcLXVI, où la chevallerie de France ot moult à fere et y fut prins messire Berthrand du Guesclin. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 143 v°). Et ne fut prins prisonnier de noz gens que monsieur le bastard Mathieu de Bourbon pour homme de nom, lequel vertueusement deffendit la personne du roy, car il estoit tousjours auprés jusque a l'eure qu'il fut prins, en cuydant prendre ung des grans seigneurs de Venise qui s'enfuyoit (LA VIGNE, V.N., p.1495, 288).

 

-

[P. oppos. à mourir "tuer"] : ...et furent tous que mors que pris. (ARRAS, c.1392-1393, 163). Et la furent descomfi les Englois et mis en cace et en i ot biaucop de mors et de pris. (FROISS., Chron. D., p.1400, 44). ...desconfit en petit d'eure Les orent et tous mors et pris. (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 255). Mieulx me vault estre prins que mort. (RÉGN., F.A., 1432-c.1465, 48). ...se je ne suis mort ou prins (Percef. III, R., t.1, c.1450 [c.1340], 118). ...se en la bataille demeures prins ou mort (COLART MANS., Dial. créat. R., 1482, 189).

 

-

Prendre qqn outre. "Forcer qqn à se constituer prisonnier" : ...car ne tendoient les Bourgongnons que à les prendre outre, et pendre après ou tuer (CHASTELL., Chron. K., t.1, c.1456-1471, 125).

 

-

Prendre qqn sus. "Faire qqn prisonnier" : ...dont il en desplaisi grandement au conte de Hainnau, et euist volentiers veu que on l'euist pris sus et retenu en vie. (FROISS., Chron. D., p.1400, 428). ...qui le prist sus pour son prisonnier (FROISS., Chron. D., p.1400, 437). Et dist, se Dieux le peuist aidier, que onques tout le jour de la bataille de Creci, il ne le vei ne oy parler, et que se il l'euist veu, il l'euist pris sus (FROISS., Chron. D., p.1400, 804).

 

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Prendre prisonnier : ...plusieurs de noz bons vrais subgiez et obeïssans ont esté prins prisonniers (Paris domin. angl. L., 1421, 22). Et adonc les Anglois laissèrent couler la harce si hastivement qu'il en demoura d'eux iceulx premiers dedens, qui par ce moyen y furent prins prisonniers. (CHART. J., Chron. Ch. VII, V., t.2, c.1437-1464, 84). ...et tant fist qu'il fist trahyr et prandre prisonnier le bon roy Richard et le degrada de sa couronne (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 148 v°).

 

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Prendre au corps : Cestui fut envoyé pour conduire l'ost dudit Demetrius contre le roy Anthioche et fut Lysias, et si bien se gouverna et bailla si bonne ellection de combatre, que ledit Anthioche fut prins au corps et aussi Lisias et admener à Demetrius, lequel ne les daigna veoir, mais les fist occire. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 66 v°).

 

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Part. passé en empl. subst. "Prisonnier" : [Contexte métaph.] Et je, dame, com loiaus pris... (ACART, Prise am. H., 1332, 56). ...et les noms des mors et des pris (FROISS., Chron. D., p.1400, 786).

 

Rem. FROISS., Ball. B., c.1362-1377, 10/2, 5.

 

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Loc. Ci pris ci pendu / Ci pris ci mis / Ci pris là mis. "Aussitôt pris, aussitôt pendu / Aussitôt pris, aussitôt mis en prison" : Mal y venoyent pecheurs, traites et malfaiteurs qui forfaysoyent contre la magesté royale de Dieu, en trespassant sa loy et ses commandemens, car : cy pris, cy pendus. (GERS., Purif., 1396-1397, 61). ...car furent pendus, si pris, là mis. (CHASTELL., Chron. K., t.2, c.1456-1471, 35). ...et ordonna de le faire pendre, cy-pris, cy-mis (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 105).

 

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Au fig. "Sur le champ" : Je n'y vueil riens que faire ung trot : Vous me rarez cy pris cy mis. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 233). ...elle se delivra, cy prins cy mis, après ceste premiere course, d'ung tresbeau filz (C.N.N., c.1456-1467, 198). Il vint faire son message a sa maistresse, laquelle cy prins cy mis fist faire la response (C.N.N., c.1456-1467, 476). Et commanda que tout soudain Cy pris cy mis, on chapellast Cinq ou six douzaines de pain Et que bien tost on se hatast. (Repues franches K.V., c.1480, 95). Ne a peine croiray je jamais Qu'il se fust cordelier rendu (...), Et qu'il n'eust, cy prins, cy pendu, Jeté la son froc aux orties. (Amant cord. M., 1490, 57).

 

d)

"S'emparer de (une place forte, un territoire...)" : ...[il], a suy et frequenté routes de gens d'armes, et mené routes de gens par les fins et mettes du royaume de France, prins et aidié à prendre et espier les forteresses dessus dites (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 201). ...et faisoit fort assaillir la cité, car il avoit grant desir de la prendre (ARRAS, c.1392-1393, 182). Chasteauls et villes moult y prist Alixandre (CHR. PIZ., M.F., IV, 1400-1403, 47). ...apprès ce que les Rommains orent prins la cité de Messine (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 32). Mais monseigneur Robert, dit Guiscart, son oncle et frere dudit Geffroy, prist a soy viollamment la seignoirie de ladicte conté et en chassa hors ledit Bagellard, son nepveu. (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 166). ...la place estoit bien garnye, comme celle qui jamais n'avoit esté prinse (C.N.N., c.1456-1467, 197). Peu de temps après par Nabusardam, son marechal, environ mynuit, fist prandre Jherusalem, où il y avoit eu si grande famine que les meres y avoient mengé leurs enfans (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 44 r°).

 

-

Prendre d'assaut. "S'emparer (d'une place forte) en l'assaillant" : Aprés avoir un peu lavé leurs gorges, Car de partir sans boire estoit egrum, Pour ce disner prindrent d'assault les Forges Et au souper Nostre Dame d'Embrun. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 156).

 

-

Prendre (une place forte) sur qqn : ...au moïen de la science de astrologie, print sur les Anglois le chastel d'Andeli. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 114 v°).

 

-

Inf. subst. : Car je vi, si m'en guermentay, Que lors ne le porroie prendre Et qu'il me couvenoit atendre Une autre fois, mieus pourveüs, Mieus avisés et mieus meüs Et dou prendre un po plus soutils Et garnis de soutis outis Pour haut lever ou pour estendre, Pour a ce gent esprivier tendre. (MACH., D. Aler., a.1349, 260). Et s'est plus fort chose dou prendre Mil fois que ce n'est dou deffendre. (MACH., P. Alex., p.1369, 104). Pour ce s'enhardissent du prandre. (DESCH., M.M., c.1385-1403, 159). ...mais au prendre il fu ocis. (FROISS., Chron. D., p.1400, 371).

 

e)

"Surprendre (et arrêter) qqn (en train de faire qqc. de répréhensible), prendre qqn en flagrant délit"

 

-

Prendre qqn au fait : ...il fut content de differer sa volunté jusques a tant qu'il eust prins au fait et l'un et l'autre. (C.N.N., c.1456-1467, 352). Demande. Pourquoy, se monniers sont larrons, n'en fait on bonne justice ? Response. Pou de plaintes s'en font ; et que plus est, ne sont prins au fait, et n'ont rien se on ne leur apporte. (Devin. R., c.1470, 161).

 

-

Prendre qqn (tout) prouvé./Prendre qqn à l'épreuve. "Prendre qqn en flagrant délit" : Vostre fille a perdu son pris, Car toute prouvée l'ay pris Avaic Amilles en son lit (Mir. Amis, c.1365, 26). Et s'elle estoit prinse prouvée Et en present meffat trouvée Avecques homme... (DESCH., M.M., c.1385-1403, 99). ...qant je vous ai pris a l'esprueve (FROISS., Chron. D., p.1400, 874).

 

-

Estre pris en méfait. "Être pris en flagrant délit" : ...elle ne savoit que dire ne respondre, comme prinse en meffait evident, sinon de larmes (C.N.N., c.1456-1467, 240).

 

-

Estre pris saisi. "Être pris en flagrant délit" : Quant aucun clerc si est pris sayzi, par le juge seculier, de la chose amblee, se celluy a qui la chose amblee appartient vient en jugement et preuve la chose estre seue, se la justice seculiere luy rent et met au delivre, conme il appartient et selon rayson, nientmoins l'Eglyse demande estre restitué par lez gens du Roy de celle chose amblee, pour ce que, ainssi conme ilz dient, leur clerc en fust pris sayzi. (Songe verg. S., t.2, 1378, 183).

 

f)

Au fig. Prendre qqn. "Attraper qqn, le tromper" : Bref, les plus rouges ["les plus rusés"] y sont pris (ALECIS, Blas. faulses am. P.P., a.1486, 230).

 

-

"Séduire" : ...mais c'est la grant beaulté de vostre cousine laquelle m'a prins (BEAUVAU, Troyle B., c.1455, 568).

 

Rem. G. Roussineau, Z. rom. Philol. 114, 1998, 148.

 

2.

Empl. pronom. Se / s'en prendre à qqn ou qqc. "S'attaquer à qqn ou qqc."

 

a)

Se prendre à qqn : ...chascuns a lui se prent, Si l'ont navré el corps, que li sans en descent (Bât. Bouillon C., c.1350, 148). ...l'umble supplicacion de Guillaume Eraut, contenant que comme, environ la Penthecouste darrainement passé, il eust trouvé Martin Gragaut nu à nu couchié avec sa femme et se feust prins à eulx (Doc. Poitou G., t.5, 1380, 128). ...et tantost après les diz Jehan de Saint Germain et Perrinet de Fleet, compaignons du dit Estor, se prindrent au dit Gressart et le batirent (Doc. Poitou G., t.6, 1391, 52). Si grant roy n'iert, qui s'osast prendre A luy (CHR. PIZ., M.F., IV, 1400-1403, 56). ...car homme ne se prenoit a lui qu'il ne s'en retournast a peu d'honneur. (Percef. III, R., t.2, c.1450 [c.1340], 2). ...[Madame] se print a la pouvre Jehannette par si tres grand courroux qu'il sembloit bien qu'elle eust ung dyable ou ventre (C.N.N., c.1456-1467, 272). ...quand ilz virent (...) et qu'il les avoit ainsi abusez, ilz se vouldrent prendre au marchant (C.N.N., c.1456-1467, 384). A l'ame l'on ne se doit prendre (GARIN, Compl., 1460, 122). Lors, quand le prestre vid et oÿt (...) que cestes gens ainsi trompéz par eulx mesmes s'en penserent venir prendre a ly, sagement leur va dire : "Mes amis et amies, vous n'avez cause de vous prendre a moy..." (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 232).

 

-

Se prendre l'un à l'autre : Il avint à Syn que doy vallet se prisent de parolles li uns à l'autre. En ces parolles disant, li uns ala l'autre ahierdre as mains (Vie urbaine Douai E., t.4, c.1325-13, 327).

 

-

Estre pris. "Être à l'attaque, au combat (?)" : ...vous tous, tant d'un costé que d'autre, Allemens et François, avez au jour d'uy si haultement combatu et honorablement faites voz armes et voz devoirs que ne sont aucuns qui l'eussent peu mieulz faire. Et tant que a peine quant vous fustes prins pourroit on jugier lequel de vous tous ne quel parti avoit du meilleur (LA SALE, J.S., 1456, 267).

 

b)

Se prendre à qqc. : Si se prend a ceste langue de beuf, et de son coulteau bien trenchant en deffist tant de pieces qu'il n'en demoura oncques lopin. (C.N.N., c.1456-1467, 486).

 

c)

S'en prendre à qqn / qqc. : Las ! A qui doncques m'en prendray Fors qu'a moy seule (CHART., L. Dames, 1416, 277). A qui tu t'en prendras ? (CHART., Q. inv., 1422, 43). ...à cellui qui est obligé à toy, s'il est obligié sur ton honneur, prens-t'en à son honneur (BUEIL, II, 1461-1466, 29).

D. -

P. ext. [Sans idée de saisie ou d'accaparement ; mais le sujet reste un agent (il agit volontairement)] "Faire en sorte de disposer de qqn ou de qqc."

 

1.

Prendre qqc. "Faire en sorte de disposer de qqc. (en vue de l'utiliser)"

 

a)

[Objet concret] : Il souffit de prendre de sa berbis la laynne (LA SALE, J.S., 1456, 254). ...[l'ermite] va prendre son breviaire, et son service recommancer (C.N.N., c.1456-1467, 101). Je suis las ; plus ne puis piocher. Accopt, seste pelle prenés. (Pass. Auv., 1477, 104). Accop, pugnaiz, prent tes ostis ; Fay ces cloux et advance toy ! (Pass. Auv., 1477, 177). Prenés encore celle royle Et finirons nostre parfait (Pass. Auv., 1477, 259). ...voyant aussi qu'il n'y avoit homme qui se mist au devant pour les deffendre, lui, comme jeune audax et magnanime, print le gleve ou poing, voyant ses parans tous devant lui, print premier son pere par les cheveux et le mist l'espée ou corps et semblablement à sa mere, à sa femme, à ses enfans et à tous ses parens (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 74 v°).

 

-

[Contexte métaph.] : Praigne mon esperit eles comme une aigle, et vieigne jusques a la biauté de ta mayson (GAST. PHÉBUS, Livre oraisons T., c.1380-1383, 44).

 

-

Prendre la chasuble. "Revêtir la chasuble" : SAINCT MARTIN. Puis que j'ay heu Robe nouvelle, il fault entendre A l'aube et la chesuble prandre Pour faire le divin service. (Icy le vestent de tous poincts des habitz de l'autel, puis il vient audict autel.) (LA VIGNE, S.M., 1496, 551).

 

-

Prendre l'habit. "Devenir religieux, entrer en religion" : SAINCT MARTIN. Il me semble qu'il a ja pris ung ply, A le voir la, qui jamais ne fauldra. Sur ce, ne soit son cas desacomply, Mais, s'il vous plaist, l'abbit present prandra. (LA VIGNE, S.M., 1496, 372).

 

-

Prendre le lit. "S'aliter" : Il luy convint prendre le lict et y continuellement demourer (C.N.N., c.1456-1467, 578).

 

-

Prendre la pie. "Boire copieusement" : ...il joue a la toupie, Il prend le pie (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 595).

 

-

Prendre son repas. "Manger" : Aprés qu'il fut dedens la ville entré, Et qu'il eult print son repas nutritif, Pour passetemps, tantost luy fut monstré Ung robuste homme de la Poille natif. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 157). Paisiblement prenoyent la leur repais (ANTITUS, Poés. P., c.1500, 29).

 

-

Au fig. Prendre son repas à + inf. "Y prendre plaisir, s'y divertir" : Je seray, sans reigle et compas, Batu ; que mauldit soit ma vie ! Les deables prendront leur repas A charger sur moy par envie. (LA VIGNE, S.M., 1496, 486).

 

-

Prendre son vin. "Boire (?)" : Et passa le roy les dictes crotes bien acompaigné, tant de grans seigneurs que ses gentilz hommes et ses gardes, et vint prendre son vin pres d'icelle petite ville cy davant nommee. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 264).

 

-

Prendre sa vie. "Trouver de quoi vivre" : Et pour ce que eulz [des gens pauvres] y prennent leur vie [à la chasse aux oiseaux]... (HENRI FERR., Modus et Ratio, Livre deduis T., c.1354-1377, 267).

 

-

Où pris ? "Où (la chose) sera-t-elle prise ?" : "...je vous bouteray ung quarteron d'enfans ou ventre, et puis je vous habandonneray, et les vous lairray seulle nourrir. - Vous ! dit elle ; mais ou prins ? Vous n'avez pour commencer..." (C.N.N., c.1456-1467, 519).

 

-

Prendre qqc. de qqc. "Prélever qqc. de qqc." : Et donques se l'en prent de cest corps infini .IIII. telles porcions, ce sera un corps fini pesant .IIII. livres (ORESME, C.M., c.1377, 106).

 

.

Empl. pronom. à sens passif. "Être extrait" : Pres ce chasteau une montagne y a La ou se prent le marbre blanc et noir (LA VIGNE, V.N., p.1495, 196).

 

-

Empl. abs. : Ilz furent longtemps en different pour choisir premier ; mais en la fin le mary vaincquit, qui print le premier et print le casier (C.N.N., c.1456-1467, 445).

 

-

Inf. subst. "Action de prendre qqc." : Et au prendre de la lance que Saintré fist, il baisa sa banerolle en faisant le signe de la croix (LA SALE, J.S. E., 1456, 258).

 

-

HÉRALD. Prendre ses armes. "Choisir ses armoiries" : Derechief, nous trouvons armes ou signes de personnes privees, de nobles et de non nobles, dezquelx aucuns prenent leur armes du congié et ordenance du Roy (Songe verg. S., t.1, 1378, 290). Lez aultres sont qui pregnent leurs armes de leur propre auctorité, laquelle chose ilz puent faire lysiblement, mez que ilz le facent sanz prejudice d'aultruy, come il a esté dit ; car, ainssi que lez noms sont mis pour recognoistre lez gens, conme dit la loy, (...) samblablement lez gens pregnent certaines armes pour estre recogneüs. (Songe verg. S., t.1, 1378, 290).

 

b)

[Objet spatial] : ...Afin que [le faucon] le pre ne preïst ["ne se pose dans un pré"] Et que a l'eaue il se meïst (HENRI FERR., Modus et Ratio, Livre deduis T., c.1354-1377, 218).

 

-

Prendre l'adresse vers qqn. "Se diriger vers qqn" : PERE. Nous prenons devers vous l'adresse Pour vostre bonté souverayne Qui nous a esté si humayne Qu'a payne le puis exposer. (LA VIGNE, S.M., 1496, 469).

 

-

Prendre le / son / ce chemin / sa route / sa voie... "Emprunter une certaine direction" : Qui ces chemins prant, il se tuert Et desvoie de bonne sente. (DESCH., M.M., c.1385-1403, 192). Sy ont leur chemin pris et sont monteiz sur mere a Jaffe (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 81). N'est voye qu'il tant voulsist prendre ! (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 30). ...et porteray la lumiere de ma science par le chemin lequel eulz vouldront prendre, et y deussent rompre le col. (GERS., Noël, p.1404, 306). Après ce, Hanibal se party ; et Claudius le syevit droit a Venouse, ou il avoit pris son chemin. (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 42). Je conseilleroie Quant a moi qu'on prensist la voye Tout droit devers le capitole (Myst. Incarn. Nat. L., t.1, c.1454-1474, 29). ...le bon hermite prend le chemin devers son reclusage en la montaigne. (C.N.N., c.1456-1467, 99). Il se partit de sa femme et prend son chemin devers Noyon. (C.N.N., c.1456-1467, 287). ...jamais ne povoit passer que par devant l'huys d'icelle maison, puis qu'il prenoit son chemin par ladicte rue. (C.N.N., c.1456-1467, 569). ...il prinst la petite route ou sentier (BUEIL, I, 1461-1466, 34).

 

.

Prendre le grand chemin. "Se mettre en route" : LE ROY. Gentil herault, par toy fault que soit pris Le grant chemin et en voye te mectre Pour t'en aller vers l'empereur de pris, Et luy donras de par moy ceste lectre. (LA VIGNE, S.M., 1496, 250).

 

.

Prendre le chemin et sentier de + inf. "Se mettre en route pour" : En apprés, de vostre cartier S'en alla, par vostre licence, Et prist le chemin et sentier De venir faire residence En ce lieu. (LA VIGNE, S.M., 1496, 579).

 

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Prendre la voie vers qqn. "Se mettre en route vers qqn, aller le trouver" : SAINCT MARTIN. (...) Car Jhesus en propre figure S'aparut au lieu ou j'estoye (...). Et me dist lors que je debvoye Sa foye et sa creance ensuivre : Pour quoy j'ay pris vers vous la voye Pour m'enseigner a le bien suivre. (LA VIGNE, S.M., 1496, 261). GABRIEL. (...) Dieu ta priere a retenue, Dont maintenant vers toy m'envoye Affin que, sans plus de tenue, Vers l'empereur preigne la voye (LA VIGNE, S.M., 1496, 505).

 

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[D'une chose en mouvement] : Il peut bien estre, Balthazar, Car l'estoille qui nous convoye prent vers la son chemin et voie, Sievons le tant que nous porrons. (MARCADÉ, Myst. Pass. Arras R., a.1440, 43).

 

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Empl. abs. "Suivre une certaine direction" : DEUXIESME SERGENT. Voire, ou envis ou volentiers Y venrez vous ; plus n'en parlons. Touz trois d'un front nous en alons. Pren de la, pren. (Mir. st Ign., 1366, 95).

 

Rem. Cet ex. est cependant douteux ; on pourrait comprendre aussi (l'homme d'armes s'adressant à Ignace) "recevoir des coups".

 

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Prendre champ. "Occuper le terrain" : Et, pour ce, on doit prendre champ de bonne heure, qui veult combatre à pié. (BUEIL, II, 1461-1466, 64).

 

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Prendre la mer / le large. "S'embarquer pour naviguer en mer" : ...et prindrent le large de la mer (ARRAS, c.1392-1393, 219). ...et prens le large (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 206).

 

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Prendre terre / rive / rivage / prendre port. "Débarquer" : Si attendirent tant qui li Gamelois furent venu a port et qu'il eurent tous pris terre. (Bérinus, I, c.1350-1370, 128). Bien estoient plus de C. mille, Et s'en yssoit hors de la ville, Tant et si mervilleusement Que nuls homs nombrer bonnement Ne le peüst en verité, Tant en y ot grant quantité Qui empeschierent le descendre De ses vaissiaus et terre prendre (MACH., P. Alex., p.1369, 67). Il estoient en leur galée, Et bien veoient la meslée, Mais ne pooient terre prendre, Ne il ne pooient descendre (MACH., P. Alex., p.1369, 72). ...et tousjours fusmes en mer sans prandre port jusques au mardi apprès Penthecouste (Voy. Jérus., c.1395, 98). ...li contes de Qent avoit pris terre en Engleterre (FROISS., Chron. D., p.1400, 82). Certain s'apprestent a port prendre (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 70). Aultre part veult prendre rivage (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 232). ...et firent tant que dedans peu de jours prinrent port a Aiguesmortes. (Belle Maguel. B., c.1400-1450, 68). ...puis le mirent en leur bateau et firent tant qu'ilz prindrent rive. (Percef. III, R., t.2, c.1450 [c.1340], 157).

 

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Prendre (sa) place : Et quant le gallaffre et le soudant virent leurs gens qui estoient traiz a terre, ilz manderent par druchemant au roy Uriien trieves trois jours, et qu'il venist prendre place et se logast et rafrechesist ses gens, et au quart jour il lui livreroit bataille. (ARRAS, c.1392-1393, 221). ...nous sommes trois et elles trois, chacun prenne sa place quand elles seront endormies. (C.N.N., c.1456-1467, 202). ...le disner fut prest, et ceulx qui mandez y furent comparurent ; et print chacun place comme leur hoste l'ordonnoit (C.N.N., c.1456-1467, 321). Tantost aprés qu'es haulx cieulx alla l'ame Ou devant Dieu s'a elle sa place prinse Mil quatre cens et quatre vings et quinze (LA VIGNE, V.N., p.1495, 317). ...plusieurs femmes et enffans et aultres gens jeunes a une douzayne du mains viengnent prandre place devant la chaire sans dire mot. (LA VIGNE, S.M., 1496, 330).

 

-

Prendre son tour vers. "Virer vers" : ...il vont trouver ces chevaliers poitevins qui avoient pris lor tour viers Bellain et Ierin et avoient fait bouter le feu dedens (FROISS., Chron. D., p.1400, 386).

 

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Prendre lieu et espace de + inf. "Prendre la liberté de (?)" : L'ABBÉ. De tous pechez Jhesus pardon vous face, Beau filz Martin ! Qu'esse qui vous amayne En ce couvant ? SAINCT MARTIN. J'ay pris lieu et espace De venir cy pour l'amour souverayne Et l'entiere devocion certayne Que j'ay en Dieu, mon benoist Redempteur, Pour delaisser ceste vie mondayne Et me tenir son loyal serviteur (LA VIGNE, S.M., 1496, 359).

 

-

Prendre hostel. "Retenir un logis" : Et ainsi il avoit envoyé un de ces escuyers en la cité pour penrre hostel pour ly et pour ses gens (Cardenois C., c.1380-1400, 70).

 

-

Prendre un lieupour giste. "S'installer, se loger qq. part" : Aprés disner, la Coste Sainct Andrieu Pour giste print, ou receu fu tres bien. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 321).

 

-

Prendre une chambre. "Se loger dans une chambre" : Quant ilz furent a Saint Cler de Gommaiz, ensemble se logerent, prindrent une basse chambre aboutissant sur ung jardin (Nouvelles inéd. L., p.1452, 55).

 

-

Prendre son giste. "Se loger" : Dedens Susanne lendemain fut disner, Car jusques la n'y avoit c'une course, Puis s'en alla sans personne indigner Prendre son giste a la prevosté d'Ourse. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 157).

 

-

Prendre son logis. "Se loger" : ...et puis s' en retournerent viers Oizemont, ou li rois d'Engleterre et les Englois, pour ce jour, avoient pris lor logeis. (FROISS., Chron. D., p.1400, 705).

 

c)

[Objet temporel]

 

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Prendre délai. "S'accorder un délai" : Pour ce .VI. jours pran de delay De respondre (DESCH., M.M., c.1385-1403, 20). ...et soient [les lettres] seellées, expediées, publiées et executées le plus tost que bonnement faire se pourra, sans autre delay prendre pour quelconques occasions. (FAUQ., I, 1417-1420, 110). ...le recteur de ladicte Université, qui par avant avoit prins delay de parler en la congregacion de ladicte Université (FAUQ., II, 1421-1430, 46).

 

-

Prendre une heure. "Fixer une heure pour un rendez-vous" : ...a l'heure prinse d'entre sa dame et luy, se vint rendre a l'endroit d'une fenestre (C.N.N., c.1456-1467, 358).

 

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Prendre l'heure que : ...l'eure fut prinse que l'escuier doit venir coucher avec elle. (C.N.N., c.1456-1467, 121).

 

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Prendre son heure. "Prendre son temps, se reposer, se détendre pendant un certain temps" : IPOLITE s'assiet a table. Lucille, venez a la table Devant moy, et vous aussi, dame. Après qu'on a pensé de l'ame, On doibt au corps sa nourriture ; Il fault pour soustenir nature Repaistre et prendre son heure. (Myst. st Laur. S.W., 1499, 254).

 

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Prendre (le) jour / (la) journee (de). "Fixer la date (de)" : ...que prise Fust une journée d'acort (MACH., P. Alex., p.1369, 122). Et quant la journee qui par avant avoit esté prinse fut venue... (Percef. III, R., t.2, c.1450 [c.1340], 152). Ilz fiancerent et prindrent jour d'espouser. Ce jour d'espouser prins, elle le fist savoir a Loys. (Nouvelles inéd. L., p.1452, 12). Lors prindrent le jour du partir au XVe jour du prouchain mois de juillet ensuivant. (LA SALE, J.S., 1456, 90). ...à certain jour que vous prendrez (BUEIL, II, 1461-1466, 83).

 

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Prendre jour / journee de / pour + inf. "Fixer une date pour" : Il part de leans, et prend jour a demain de retourner pourveu et garny de medicine (C.N.N., c.1456-1467, 34). ...a la journee prinse pour combatre (COLART MANS., Dial. créat. R., 1482, 215).

 

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Prendre bon jour. "Fixer une date et s'y tenir (pour de bon)" : Deux ans, trois ans, sont ja passez et expirez que, tousjours ainsi m'avez dit, mais vous n'en avez rien fait ; prenez bon jour, je vous en prie, si n'y faillez point. (C.N.N., c.1456-1467, 458).

 

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Prendre temps : Douce dame, prenés temps et loisir Pour moy garir de l'ardeur qui me tient (MACH., L. dames, 1377, 86).

 

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Prendre son temps de + inf. "Fixer le moment de" : ...et prist son temps de partir (BUEIL, II, 1461-1466, 143).

 

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Prendre terme de + inf. "Fixer une date pour" : Prenez terme d'aller vers elle quand elle sera couchée (C.N.N., c.1456-1467, 409).

 

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Prendre bon terme : L'on dit tousjours ceens, et si fait elle mesme, qu'elle s'en va et qu'elle se meurt, et rien n'en fait. Prengne bon terme, de pardieu, comme tant de foiz luy ay dit, et si ne faille point. (C.N.N., c.1456-1467, 459).

 

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Prendre fin : ...la mauldicte et pestilencieuse guerre de France et d'Angleterre regnoit, et qui encores n'a prins fin (C.N.N., c.1456-1467, 54).

 

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Prendre la longue crastine. "Faire la grasse matinée" : ...[il] laissoit sa femme prendre la longue crastine jusques a VIIJ ou a IX heures, ou si longuement qu'il luy plaisoit. (C.N.N., c.1456-1467, 492).

 

d)

[Objet abstrait]

 

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Prendre un impôt. "Lever un impôt" : [Contexte érotique] ...le chapellain de leens (...) se vint bouter auprès d'elle pour luy faire compagnie affin qu'elle n'eust paour, ou espoir pour faire l'essay ou prendre le disme advenir (C.N.N., c.1456-1467, 333).

 

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Prendre une mesure. "Évaluer, mesurer" : "Perrin, mon ami, pour combien avroye je diemenche prouchain un pourpoint pour moy tout fait, qui fust de damas bien cramoisy ?" Perrin qui l'avisa un petit, print sa mesure, puis lui dist : "Avez vous de l'argent ?" (LA SALE, J.S., 1456, 51). Sus, pren la grandeur de ce truant, Malbec, pour mieulx faire devoir. (Pass. Auv., 1477, 194). On dit que cestui ala aux mons de Ethna, qui tousjours ardent sans diminuer, et y ala plus avant que homme n'avoit encore fait, pour prandre au juxte le zeniq et centre d'iceulx, pour sçaver soubz quel ymage de la IXe espere ce povoit estre (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 29 r°).

 

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Prendre la moison. "Établir les dimensions d'un objet" : C'est par ce que quant tu foras, Tu pris maisement la muyson, Or avise que j'ay raison, Il y a a dire ung quartier. (MARCADÉ, Myst. Pass. Arras R., a.1440, 187).

 

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Prendre un principe. "Adopter un principe" : ...car les principes de prudence sont pris selon les vertus moralz. (ORESME, E.A., c.1370, 524).

 

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Prendre une charge. "Assumer une charge" : Centurion est bien nostre amy ; Si luy plaisoit la charge prendre, Cortoisie nous faroit grande, Et nous l'en vouldrions bien prïer. (Pass. Auv., 1477, 273).

 

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Prendre qqc. devant. "Préférer qqc." : J'ayme tresbien voirement pastez d'anguilles (...) et n'est viande que devant je ne preisse. (C.N.N., c.1456-1467, 83).

 

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Au passif. [D'une chose, dans le domaine d'une opération intellectuelle] Estre pris de qqc. "Être emprunté à qqc., venir de qqc." : Vez ci donques une cause prise de la nature de la chose. (ORESME, E.A., c.1370, 171).

 

e)

En partic. "Appréhender qqc. par l'esprit, considérer" : ...et tout pour embellir et verifier nostre matiere, et le vueil-je prendre au commencement de creacion des dus de Guerles. (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 143). Or prenons la cause finale D'un autre pechié perilleux (DESCH., M.M., c.1385-1403, 347). Et si tost qu'il vey la lettre et qu'il en eut prins le sens... (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 956). ...Affin que je preigne le fond De ma matiere (RIVIÈRE, Nef folz D., 1497, 672).

 

Rem. L'ex. suiv. est sans doute à mettre ici : ...et le monstre bien en icelui livre ouquel il reduit à diverses plantes aucunes estoilles et aussi aux ellections qu'il enseigne prandre à planter, semer et anter ["qu'il enseigne à appréhender, à considérer en plantant..." (?)]. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 71 v°).

 

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Prendre qqc. (de telle ou telle manière) : ...a prendre generalment et en commun, spasme est quant... (SAINT-GILLE, Comment. A.Y. L., 1362-1365, 377). Y. prent cy enffance pour le commencement de la nativité jusques en la fin de leur croissement (SAINT-GILLE, Comment. A.Y. L., 1362-1365, 377). Et de telle fin en tant comme prinse pour fin ne conseille l'en pas. (ORESME, E.A.C., c.1370, 191). Or prenez chascune a sept ans Pour veoir combien, a bien compter, Les septante pourront monter. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 123). A prendre la signification de ce nom dieu selon la premiere maniere... (Somme abr., c.1477-1481, 130).

 

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Prendre qqc. à. "Considérer qqc. comme" : Se tu les prens [ces paroles] a rigoreuses... (Myst. Viel test. R., t.5, c.1450, 42).

 

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Prendre qqc. pour. "Considérer qqc. comme" : ...et adont ce nom "le Saint Esperit" n'est que une diction, mais a le prendre pour deux dictions "sainct" et "esperit", adont le "saint" est adjousté par maniere de raison. (Somme abr., c.1477-1481, 122).

 

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À tout prendre : ...à tout prendre, ceste cité de Paris est la cité que jamais je veisse environnée de meilleur pays et plus plantureux (COMM., I, 1489-1491, 58).

 

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À le bien prendre. "À bien le considérer" : Mais Dieu y pourveut de remede, car comme se sc'eust esté par divin miracle ou ordonnance de Dieu, les ennemys qui estoyent dix contre ung, encore ung d'eulx en valloit trois des nostres a le bien prendre, veu le lieu ou ilz estoient et le grant voyaige qu'ilz avoient fait (LA VIGNE, V.N., p.1495, 288).

 

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Bien pris ou mal pris. "À tort ou à raison" : [Le prêtre qui vient de marier deux couples avec interversion des époux à cause de la pénombre] J'ay fait mes devoirs envers vous d'autant que g'y suis tenu. Se faulte y a au remanant, ne vient pas de moy (...). Et pourtant allez vous en voz maisons et faictes voz nopces telles qu'il vous plaira, car, bien pris ou mal pris, vous n'en poez avoir aultre chose. (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 232).

 

Rem. Déf. de l'éd, p. 346 : «bien pris ou mal pris, 232, que ce soit une bonne ou une mauvaise chose».

 

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"Comprendre, interpréter qqc." : Item, qui met ensemble .I. et .II. et .III., ce sont .VI. lequel est le premier nombre parfait a prendre perfection si comme elle est prinse en arismetique (ORESME, C.M., c.1377, 50). Les divins jugemens sont inscrutables et dangereux a y bouter doit, et ne siet a homme de soy y plongier parfont, sy non en tant qu'il en peut prendre par ce qui en ensieut par effect (CHASTELL., Temple Boc. B., 1463-1464, 149).

 

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"Envisager, garantir qqc." : Oultre plus, vueil que la richesse Des biens d'Amours qu'avoir souloye Departie soit a largesse A vrais amans, et ne vouldroye Que faulx amans, par nulle voye, En eussent part aucunement ; Oncques n'euz amistié a eulx ; Je le prans sur mon sauvement Devant tous loyaux amoureux. (CH. D'ORLÉANS, Ball. C., c.1415-1457, 97).

 

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Le prendre. "Considérer qu'il en est ainsi" : Filz, c'est bien dit ; or le prenons (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 124).

 

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Prendre son imagination sur qqn / qqc. "Se faire des idées sur qqn ou qqc." : Ha ! monseigneur, dit elle, par Dieu vous avez tort de prendre vostre ymaginacion sur luy. (C.N.N., c.1456-1467, 232). ...pour l'imaginacion que vous en pouriez prendre, elles ne vous feroient ja bien [À propos de perdrix que la parole d'un prêtre vient de "changer" en poissons] (C.N.N., c.1456-1467, 583).

 

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Prendre sa raison sus qqc. "Fonder son argumentation sur qqc." : Et telx se fondent et prennent leur raison sus ce que moult de gens qui sont en grant puissance - princes et autres - font choses semblables a ce que faisoit Sardinapalus. (ORESME, E.A., c.1370, 111).

 

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Prendre qqc. pour autre chose

 

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"Confondre" : Mais il prend opinion pour raison. (ORESME, E.A.C., c.1370, 184). Mais Anaxagoras use de cest nom et non pas bien, quar il prent ether pour feu. (ORESME, C.M., c.1377, 88). Quant les parolles sont equivoques ou doubles, l'en doit declairer leurs significacions ou sens afin que l'en ne preingne un sens pour l'autre. (ORESME, C.M., c.1377, 188). ...pource que le curé ne veoit pas trop cler, il print l'une pour l'autre, et changea a chascun homme la femme qu'il devoit avoir (C.N.N., c.1456-1467, 12).

 

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[Sans idée de confusion] "Tenir l'un pour l'autre, considérer comme" : ...cestes paines qu'ilz prennent pour joies (Quinze joies mar. R., c.1390-1410, 5). Et sont les jours de pardons pris pour les jours des penitences enjointes. (GERS., Déf., 1400, 237).

 

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Empl. pronom. à sens passif. Se prendre comme / de / pour / selon. "Être considéré, être interprété comme / pour / selon" : Notes que se "ung" se prend et entent comme commencement de nombre, par tele maniere pas ne compete a Dieu quant on dist ung Dieu. (Somme abr., c.1477-1481, 104). Et ceste diffinition se prend selon la nature de la chose. (Somme abr., c.1477-1481, 130). Ceste diffinition se prend selon l'ethymologie, c'est a dire l'interpretation de la diction et du mot, car personne selon l'interpretation du nom vault a dire comme chose par soy une. (Somme abr., c.1477-1481, 130). ...car, par ce moyen, l'on peut prevoir et remedier aux inconveniens qui par icelle congnoissance sont preveuz et congneux avant la main et descencion des infortunes, laquelle utillité ne se prent pas de la simple theorique des mouvemens, mais des autres parties de astrologie. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 5 r°). ...pour chacune diversité de maladie, mist epithaphes et tiltres, pour advertir que l'un ne se print pour l'autre. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 70 r°).

 

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Prendre une chose pour ce qu'elle vaut : Et se le vendëeur li disoit senz faire pris que il la preïst pour ce que elle vault, ce seroit plus juste chose que l'acheteur taxast le pris que le vendëeur. (ORESME, E.A.C., c.1370, 454).

 

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Prov. : Bien peut le jeune mal fuyr, Si se veult regir par raison, Et qu'il s'en vayse recuillir Avec gens de bonne maison. Il n'est riens que n'aye saison, Quant par saison la chose est prinse. Il en vient du bien a foison, Aussi du jeune qui l'advise. (Pass. Auv., 1477, 119).

 

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Se prendre sur qqc. "Tenir compte de qqc." : Mes che n'e[st] point l'apointement Sus quoi nostre juge se prent (HENRI FERR., Modus et Ratio, Livre deduis T., c.1354-1377, 265).

 

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Se prendre au contraire. "Opter pour le contraire" : Or me pren du tout au contraire. (HENRI FERR., Modus et Ratio, Livre deduis T., c.1354-1377, 116).

 

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[Suivi de l'indicatif ou du subjonctif] Prendre que. "Admettre (comme une hypothèse plausible) que, considérer que" : Prenons c'uns amans est espris D'amer une dame de pris (MACH., D. Aler., a.1349, 327). ...prenons que aucun ait une fievre tierce vraye (SAINT-GILLE, Comment. A.Y. L., 1362-1365, 377). Prens que tu aies ton talent, Aras te pour ce plus d'argent ? (FROISS., Ball. B., c.1362-1377, 8). Or preng ensi que sus soiiés Arrestés sans departement (FROISS., Dits Débats F., 1363-1393, 107). Dont plainnement est entendu que, se il advient ce qui est dit de ces devineurs, non pas selon Dieu, il ne doit pas estre pris ne creu (,) que teles choses soient faites pour leur commandement et que l'en honeure ce que ilz honeurent. (FOUL., Policrat. B., II, 1372, 201). ...mais je prens, sur mon ame, Qu'il en est peu ou l'on se doibt fÿer. (Au grey d'amours F.-H., c.1400-1500, 259). Et de ce, à parler en brief par similitude, je prens que un puissant seigneur soit tant detestable, malicieux, et mauvais que son inclinacion ne soit qu'à troubler toutes terres s'il pouoit. (CHR. PIZ., Paix W., 1412-1413, 120). ...prenons par cas possible (...) que un roy de France n'eust que une fille (JEAN DE MONTREUIL, Traité cheval. G.O.O., 1413, 130). Et encores, par maniere d'esbatement, prenons que le gras mardy de quaresme Jehan, comme galant et gourmant, aprés souper dit que il n'yrat pas dormir jusques a la myenuit que quaresme encommencera (FUSORIS, Traité cosmogr. G., 1432, 10). Croy que ne te failliray point, Prens que le temps soit mal utille ["si tu considères que, à envisager que"], Car tu es le filz de ma fille, Que jamais n'abandonneroye. (Myst. Viel test. R., t.3, c.1450, 230). Or bien, sire, prenons qu'il soit ainsin con vous dictes (LA SALE, J.S., 1456, 12). Je prens qu'aucun dye cecy (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 61). Et prenés qu'ilz fussent desconfis (BUEIL, I, 1461-1466, 115). Prenez que vous y soyez venu par enchantement. (BUEIL, II, 1461-1466, 239). ...prennons qu'ilz ne fussent pas au service du temps du deccés de son predeccesseur (Traité politique C., c.1492-1493, 147).

 

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"Considérer comme vrai" : ...disant qu'il prenoit sur sa dampnacion que sa querelle estoit bonne et juste (MONSTRELET, Chron. D.-A., t.4, c.1444-1453, 463).

 

2.

[À la suite d'une transaction avec qqn ou avec l'accord de qqn] Prendre qqc. (à qqn / de qqn). "Faire en sorte de disposer de qqc. (dont qqn d'autre disposait) ; accepter qqc. de sa part"

 

a)

"Faire en sorte de disposer de qqc. (dont qqn d'autre disposait)" : ...tant en voes, tant en prent (FROISS., Past. M., c.1362-1394, 158). Je vous abandonne la forest pour prendre bois a charpenter (ARRAS, c.1392-1393, 75). ...avec ce a droit de prendre et avoir en ycelle forest bois pour son chauffer et user. (HECTOR DE CHARTRES, Cout. R.B., 1398-1402, 40). Soiez plus content de prendre de moy ce qu'en vouldrez par mon accord et volunté (...) que malgré moy vous paroultrez vostre vouloir desordonné. (C.N.N., c.1456-1467, 157). Je prens ceste quictance a mon prouffit, et vous en mercye toutesfoiz, car je le doy faire. (C.N.N., c.1456-1467, 401).

 

-

"Acheter qqc." : Afin que vous me la vendez [ceste nef]. Je vous di (...) Que je la pren pour la royne (Mir. ste Bauth., c.1376, 158).

 

-

[D'un auteur] "Emprunter qqc." : ...et de lui [Galien] le prist et emprunta Serapion, et icy endroit, il en fu son regratier (SAINT-GILLE, Comment. A.Y. L., 1362-1365, 377).

 

-

Empl. abs. : ...il donne volentiers et ne prent pas de legier. (ORESME, E.A., c.1370, 237).

 

b)

[Proche de l'idée d'acceptation] "Accepter qqc. (de qqn), recevoir qqc." : ...la subtillité aussy de Demostenès secourut noblement a une meschine, laquelle avoit prins peccune en garde de deux hostes, par celle condicion que elle leur renderoit a tous deux enssemble. (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 32). ...quand le prestre vit que monseigneur le seneschal ne vouloit prendre la paix devant [luy], il laissa Dieu qu'il tenoit en ses mains, et print la paix et la porta a monseigneur le seneschal (C.N.N., c.1456-1467, 448). Prent cel argent ; Aultrement ne prendrey la toele ! (Pass. Auv., 1477, 237).

 

-

"Accueillir qqc." : Pour laquelle cause, Sigimont conte de Hohemberg, Sigmont de Stoeffee, Erard de Neuverouche, bailli dudit conté de Montbelliart et Wolffen de Nunhusen, eulx disans et portans conseilliers et officiers de nobles seigneurs, Loys et Horrich, contes de Wiertemberg et dudit Montbelliart, freres, et eulx disans avoir puissance de par eulx sont venuz par devers nous, en nous humblement requerant qu'il nous pleust ... prendre liberallement l'obbeissance des dits villes et chastel de Montbeliart (Ecorch. Ch. VII, T., 1444, 8).

 

-

Prendre mieux. "Accepter de recevoir plus" : ...quand il besoigne une foiz en ung moys, c'est au mieulx venir. Il ne fault ja que j'en face la petite bouche ; creez que je prendroye bien mieulx. (C.N.N., c.1456-1467, 248).

 

-

[De Dieu] : Dieu a exaussié la voix de ma priere ; Dieu a prins mon oroison. (CHR. PIZ., Psaumes allég. R., 1409, 87).

 

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Inf. subst. : ...et de rechief le vous dy par tel sy que plus grant plaisir me feriez du prendre mille fois que du reffuser (Comte Artois S., c.1453-1467, 135).

 

c)

[L'obj. désigne de l'argent, une somme...] "Prélever, toucher" : ...lesquielx hommes darmes et servans avoient servi par divers temps ou fait des Bretons estanz à Champeaulx et à Genez pour resister à yceulz, et prenoit chascun homme darmes et chascun archier XV fr. par mois (Compte Navarre I.P., 1367-1371, 276). ...certaine somme d'argent qui devoit estre prinse et levée. (FAUQ., I, 1417-1420, 313). Voyans aussi qu'ilz sont loing de leur pays (...) si furent contens de prendre argent pour leurs despens et s'en retourner dont ilz vindrent. (C.N.N., c.1456-1467, 337). ...[elles] voulrent paier l'oste et leur escot. Mais l'oste dist qu'il ne prendroit rien d'elle. (C.N.N., c.1456-1467, 410). Par quoy, [le duc de Milan] sentant que ce prince le duc de Cleves lui estoit si pres qu'il ne restoit qu'a passer la riviere qui ceurt devant Versay [pour entrer] en son pays, prestement manda a tous les ostelens par ou il devoit passer que riens ne prensissent de ly ne de ses gens (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 242). Prent cel argent ; Aultrement ne prendrey la toele ! (Pass. Auv., 1477, 237). ...amaroys mieulx morir Que si en prenoye ung denier [de cette toile] (Pass. Auv., 1477, 237).

 

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Prendre (une certaine somme) sur qqn / qqc. : Gilles Rappiout, sergent a cheval, ou nom de lui et de Jehanne, sa femme, s'oppose pour la proprietté de IIII l. p. de rente que il prent et a droit de prendre sur le dit moulin (Chartes Abb. St-Magl. T.F., t.3, 1389-1390, 613). On lit que Pilate, avant que il fust envoyé a Romme de par l'empereur, il c'estoit meslé de finances et receptes, et une foys dit a l'empereur ou escripvist que se il vouloit il auroit foison argent, et que il ne faloit que le prendre sur le peuple et ceulx qui en auroient, et que tout estoit sien. (JUV. URS., Verba, 1452, 271). ...la somme De cent francs, prins sur tous mes biens. (VILLON, Lais D., c.1456-1457, 69). ...par le moyen des charges qu' i [le roi] prant sur son peuple (JUV. URS., D. Tours, 1468, 446).

 

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[Dans un cont. métaph.] : Et moult fort Maudire je te devroye, Car ton envïeux remort Mist accort L'omme premier en ta voye ; Pour quoy le filz, que j'avoye Et amoye Plus que riens dessoubz les cieulx, De mort a pris la monoye, Qu'il employe A rachapter l'omme vieulx. (Pass. Auv., 1477, 245).

 

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Part. prés. en empl. subst. "Celui qui reçoit qqc." : Mais toutesvoies, la retribucion doit estre faite a tant comme les prenans ou recevans le ordennent. (ORESME, E.A., c.1370, 455). Don recëu oblige le prenant, Et le donneur sa grant bonté acquite (CHART., B. Nobles, c.1424, 405).

 

d)

[L'obj. désigne un sacrement, la grâce qui en résulte...] : Et leur fist dire messez, chacun fu absolu, Prindrent leur sacrement en non du roy Jhesu. (Bat. Angl. Bret. B., a.1355, 48). ...il estoit le plus vaillant chevalier tenu du royaume de France, lequel de sa vie naturelle fina ses jours en la ville du Saint Esperit sur le Rosne, aiant prins tous les sains sacremens, ainsin que tous bons et vrais chrestiens doivent faire (LA SALE, J.S., 1456, 308). SAINCT MARTIN. (...) Mon chier enffant, je te baptise In Nomine Patris et Filii et Spiritus Sancti, Amen. Puisqu'avez telle grace prise, Pencez d'estre bon catholique (LA VIGNE, S.M., 1496, 384).

 

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Prendre le corps Jésus-Christ : De la maniere de recepvoir et prendre le corps Jhesu Crist. (Somme abr., c.1477-1481, 95).

 

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Prendre Dieu en soi. "Recevoir Dieu en son for intérieur" : LUCIFFER. Je congnois bien qu'il est plus dur que fer Envers le Dieu qu'en soy a volu prandre (LA VIGNE, S.M., 1496, 479).

 

e)

[L'obj. désigne une chose abstr.] : ...la dicte damoiselle luy pria moult doulcement que en gré il voulsist prendre le plaisir qu'elle luy avoit peu faire (C.N.N., c.1456-1467, 390).

 

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Prendre la foi de qqn de + inf. "Obtenir de qqn la promesse de" : Madame, assise sur les piés du petit lit, le fist entre elle et ses femmes venir, et lors print la foy de lui de ly dire de toutes ses demandes la verité. (LA SALE, J.S., 1456, 7).

 

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Prendre l'hommage de qqn. "Recevoir l'hommage de qqn" : Lors par son vexil ou baniere [le Pape] l'envestist a roy dudit royaume, et fust le premier roy par l'esglise. Et alors prist l'ommaige de lui personnellement, en l'an de nostre seigneur mil C et XXX, en la cité de Benivent (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 169).

 

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Prendre le serment de qqn. "Recueillir le serment de qqn" : Après laquelle ordonnance ainsi faicte et declarée auxdiz André et Marcel, la Court, a pris le serment d'eulx de bien et loyaument faire, gouverner et exercer lesdiz garde, provision et gouvernement ou administration et d'en rendre compte selon ladicte ordonnance. (BAYE, II, 1411-1417, 247). Lors le roy a son mareschal commanda en prendre les seremens (LA SALE, J.S., 1456, 125).

 

3.

[Avec l'idée d'action commune, de collaboration...] Prendre qqn. "Faire en sorte de former un couple plus ou moins durable avec qqn dans tel ou tel dessein"

 

a)

[Dans le couple de l'homme et de la femme]

 

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Prendre une femme "Épouser une femme" : C'est quant Pierre cuide prendre Katherine riche, puissant, noble et vierge, et il la prent corrumpue, povre et non noble. (Sacr. mar., c.1477-1481, 48). Erreur de fortune, c'est quant il cuide prendre une femme sage et discrete, et elle est pou discrete, sage et pou prudente. (Sacr. mar., c.1477-1481, 48).

 

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Prendre qqn à / en / par mariage. "Épouser qqn" : ...comme environ la feste de l'Ascencion Nostre Seigneur derrainement passée, Jehan Roudet, de la duchié de Guyenne, eust prinse la dite suppliante par mariage, qu'il n'estoit guerre aucune entre nous et le prince de Gales, après lequel mariage, se fust trait ycellui Roudet devers le sire de Mirebeau, ou sez officiers, et li eust juré feaulté pour cause du fort de Ry et dez appartenances de ycelly, et finé du rachat (Doc. Poitou G., t.4, 1369, 13). Quand je vous prins en mariage a la male heure, vous ne apportastes gueres avecques vous (C.N.N., c.1456-1467, 420). ...ung jeune homme print a mariage une tendre jeune fille (C.N.N., c.1456-1467, 496).

 

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Prendre femme / mari : ...Que jamais mary ne prandray (DESCH., M.M., c.1385-1403, 179). ...Ne soy tenir de femme prandre (DESCH., M.M., c.1385-1403, 330). ...ne prenez jamais femme d'estrange nacion. (C.N.N., c.1456-1467, 330).

 

-

Prendre qqn à femme / à mari / à espouse / à moullier : ...ma fille ne vault mie De sens, d'avoir ne de lignie Tant qu'a femme la doiez prendre (Mir. femme roy Port., c.1342, 160). Li roys la fist tantost mander Pour li enjoindre et commander Que son servant à mari prengne. (MACH., P. Alex., p.1369, 260). ...se tu treuves homme qui te veuille prendre a espouse (ARRAS, c.1392-1393, 13). ...la prenderay a moulhier (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 8). ...il la prendroit a femme (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 21). Mais depuis ce il prist a femme madamoiselle Agnez, fille du conte Pietre, par dispense. (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 178). ...il la prendroit a femme si son mary terminoit vie par mort. (C.N.N., c.1456-1467, 415). Comme dist Saint Ambroise : "Gardez", dist il, "que ne prendez a femme gentile, payenne ou heretique". (Sacr. mar., c.1477-1481, 66).

 

-

Prendre qqn pour femme : Je veux (...) que icy en ce saint lieu, devant tous, tu la espouses et la preignes pour femme. (Belle Maguel. B., c.1400-1450, 102).

 

-

Prendre qqn comme sa femme : ...[l'évêque] commenda au chaperon fourré qu'il la prinst comme sa femme ; car elle estoit sienne (C.N.N., c.1456-1467, 417).

 

-

Prendre qqn en femme : Pour conclusion il fault dire que veu simple empesche mariage a estre contrait, et tant que se cellui qui a simplement voué, aprez a donné jurement a aucune femme que il l'espouseroit et prendroit en femme, il doit son veu acomplir et faire penitance de son jurement illicitement presté et donné. (Sacr. mar., c.1477-1481, 54).

 

-

Prendre qqn à mariage : D'uy en quinze jours sanz faillir Femme a marïage prendray. (Gris., 1395, 19). [Autre ex. p.23]

 

-

Empl. pronom. réciproque. Se prendre par nom de mariage. "S'épouser" : ...lui et la dicte Jourdaine avoient promis l'un à l'autre qu'ilz se prendroient par nom de mariage (Doc. Poitou G., t.7, 1412, 224).

 

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Prendre (un amant) : ...[elle] fut contraincte par son trop demourer [du mari] de prendre ung lieutenant, qui en peu d'heure luy fist ung tresbeau filz. (C.N.N., c.1456-1467, 127). Elles ont prins chacune ung compaignon et ont fait jusques a oultrance la folye. (C.N.N., c.1456-1467, 364).

 

-

[Union sexuelle] Se prendre à. "S'unir sexuellement à" : ADAM. (...) Or est vray que Dieu ordonna Que ensemble comunicasson, Affin que la terre emplisson ; Si me semble bien necessaire, Pour multiplicacion faire, Que Cayn se prenne a sa seur. (Myst. Viel test. R., t.1, c.1450, 75). ...il, tempté de l'ennemi et gardant les vaches ou les touchant ès marez de la Ronde, il se print à une vache, la congneut charnellement et eust sa compaignie charnelle une foiz seulement. (Doc. Poitou G., t.11, 1469, 217).

 

b)

[Prise en charge]

 

-

Prendre qqn (avec soi). "Assumer la responsabilité de qqn, recevoir, recueillir qqn" : ...si vous prie tant que je puis qu'après ma mort, qui sera brefment, vous les prenez avecques vous et les entretenez, nourrissez et elevez [Ladite femme adultère à ses amants] (C.N.N., c.1456-1467, 328). ...après sa mort ilz les prendront et n'en ara jamais charge. [Une femme à l'agonie annonce à son mari que ses amants s'occuperont des enfants qu'elle a eus d'eux] (C.N.N., c.1456-1467, 329). Femme, ce filz te veulx donner. Or le prens ; je veulx qu'il soit tien ; Par ressussitacion estoit mien Pour ce qu'il m'a pleu le souver. [Réf. à Luc 7, 11-17] (Pass. Auv., 1477, 131).

 

-

Prendre qqn à sa charge : Et à ce nous feist responce que seurement ilz povoient venir faire leur poursuite et qu'ilz les prenoit à sa charge, et que, sur son honneur, leur feroit baillier bonne provision de justice et commission pour adjourner en personne ledit messire Lancelot (Lettres Ch. VIII, P., Pièces justif., t.1, 1483, 366).

 

-

Prendre qqn à merci. "Accorder à qqn sa grâce" : Tantost aprés eulx mesmes sans attendre, Tres humblement au roy se vindrent rendre Luy apportant des portes de la ville Et du chasteau, en maniere serville, Toutes les clefz : luy suppliant aussi A joinctes mains qu'il les print a mercy. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 247).

 

-

Prendre qqn en garde. "Prendre qqn sous sa protection" : ...Comme eulx disans estre plus asseurez D'estre sans plus dessoubz la sauvegarde Du roy françoys, s'il les prenoit en garde Contre Tuscans, marranes poiltronnailles, Que de cent portes ne de mille murailles. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 224).

 

-

En partic. : Mon pere, prens mon esperit ; Entre tes mains le recommande. [Réf. à Luc 23, 46] (Pass. Auv., 1477, 223).

 

c)

[Dans une collaboration] "Faire en sorte de disposer de qqn (en vue de qqc.)" : Prendons ung messaige ["un messager"] et sy l'envoyons a Charles dire qu'il s'en revoise a France (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 46).

 

-

Prendre qqn avec soi. "Emmener avec soi (en partic. pour le combat)" : ...il s'arma de toutes pieces et print o lui un escuier qui savoit tout le pays (ARRAS, c.1392-1393, 198). ...maistre Symon prist avecques lui plusieurs de messieurs dudit Parlement (BAYE, I, 1400-1410, 4). Sy prist de ses hommes grant foison (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 52). ...je t'advise Que preignes avec toy Sathan Et Asmo pour mectre en mal an Jehan baptiste, nostre contraire. (Pass. Auv., 1477, 94).

 

-

Prendre qqn à témoignage / à témoin : Dieu preng a tesmoing sur mon ame Que tousjours me suis reputee Ta povre ancelle (Gris., 1395, 81). ...je le prens [Dieu] a tesmoignage qu'oncques en jour de ma vie je ne tins termes a cestuy dont vous parlez, ne a aultre, quel qui soit (C.N.N., c.1456-1467, 232).

 

-

Prendre qqn en son service : Dieu, par ta benignité, Veulhe moy prendre en ton service. (Pass. Auv., 1477, 164).

 

-

Prendre qqn de son costé : Et de ce je en prens Dieu de mon costé, qui me sera au jour d'uy en ayde. (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 217).

 

-

Prendre qqn à / pour. "Faire en sorte de disposer de qqn en qualité de, choisir qqn comme"

 

.

Prendre qqn à : Et nous eslisons et prenons a conseilliers gens qui scevent discerner et cognoistre de grans choses et notables, aussi comme si nous ne fusson pas souffisans a ce de nous meïsmes. (ORESME, E.A., c.1370, 190). Le dimenche, .XXI. jour de juing, les habitans de Pise vindrent au matin devers le roy, et luy prierent et requirent qu'il luy pleust de sa grace les prendre a serviteurs et qu'ilz fussent subjectz a luy pour faire et acomplir des la en avant tout son bon plaisir (LA VIGNE, V.N., p.1495, 275).

 

.

Prendre qqn pour : ...et pour ce lesdiz prisonniers prennent pour advocas maistre Pierre de Marigny et pluseurs autres (BAYE, I, 1400-1410, 235). ...Que j'ay pieça pour juge pris (CHART., E. Dames, 1425, 370). ...les Rommains prenoient pour chef ung laboureur (JUV. URS., Verba, 1452, 246). O femme, de Jehan seras mere ! Au monde n'aras aultre enfant ; A celluy te fauldré retraire. Or doncques pour ton filz le prent ! Jehan, mon cosin, pareilhement Pour mere prendras celle feme ! [Réf. à Jean 19, 26-27] (Pass. Auv., 1477, 220). Car, comme ilz disoient, ilz se donnoyent a luy, le recevant et prenant pour leur roy, seul seigneur et vray protecteur ; ce qu'il leur fut accordé. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 272).

 

-

Prendre qqn. "Choisir qqn (comme chef)" : Quant a moy, je suis cellui qui, de ma part, a l'ayde de Dieu et de Nostre Dame le vous accorde [vous donne mon accord], remerciant quant vous m'avez en tel nombre et compaignie prins et esleu. (LA SALE, J.S., 1456, 230).

 

-

Prendre qqn tel qu'il est. "L'accepter tel qu'il est" : Il fault temporiser, dit il ; il faut dissimuler ; tel me veulent, tel me prenent. (GERS., Annonc., a.1400, 235). Tel me veez, tel me prenez. (MIÉLOT, Prov. U., 1456, 199).

 

-

Se prendre à qqn. "S'allier à qqn" : Bien voy que je puys vers le Pere advenir, A Jhesucrist son Fil me vueil prendre et tenir. (Pleur ste âme B., c.1375-1425, 59).

 

-

Se prendre par compagnie. "Se rassembler par compagnies" : ...et aussy chascun jour les gens estans en icellui pays se prenoient par grans compaingnies, tous deschaus et à nues testes, où il passoit, devant lui, criant mercy ; lesquelz il recepvoit benignement. (ESCOUCHY, Chron. B., t.2, a.1465, 19).

 

d)

[De Dieu] "Amener, appeler à soi" : ...si Dieu vouloit prendre ma femme, jamais ne fu si eureux. (C.N.N., c.1456-1467, 284). Loué soit Dieu que vous a pris ! (Pass. Auv., 1477, 138). Plus n'accomplirey vostre veul, Palharde cher pugnaise et orde, Puis que Dieu m'a pris en sa corde. (Pass. Auv., 1477, 149). Je suis du tout de s'amour prise ; En penitence me suis misse, Affin qu'aye plus tost sa grace. (Pass. Auv., 1477, 151).

II. -

Empl. trans. [Le sujet désigne une pers., mais qui n'est pas un agent (qui n'agit pas volontairement), qui est sans plus le siège de qqc., qui subit qqc.]

A. -

"Être frappé de"

 

-

[Coups] : La ot maint coup pris et donné (ARRAS, c.1392-1393, 180).

 

.

[P. métaph. de l'obj.] : ...prent ces deux noix Et ceste figue mal rostie ! (Pass. Auv., 1477, 189).

 

.

Empl. abs. : On dit que fol ne doubte jusqu'il prent ["ne craint rien jusqu'à ce qu'il reçoive des coups"]. (DESCH., Oeuvres Q., t.3, c.1370-1407, 145).

 

-

[Une maladie, un mal...] : DEUXIESME CHEVALIER. (...) S'il [le roy] n'a trouvé aucun recet Ou ait esté, par m'ame c'est Pour prendre une grant maladie (Mir. roy Thierry, c.1374, 309). Qui par froit prant la maladie, Par chaleur doit estre garie (DESCH., M.M., c.1385-1403, 238). ...de dueil elle prist le mal dont elle morust (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 198). ...femme qui nouvellement a pris les fievres (Ev. Quen., I, c.1466-1474, 114). Le bon roy de France (...) print une maladie que longuement luy dura (Jehan de Paris W., 1494-1495, 16).

 

-

Au fig. "Subir" : Mes Barlabam dist que ce seroit mal fet car messagier ne doit penre mal ne vilannie pour chose qu'il die, pour tant qu'il ait de commandement. (Veng. Nostre-Seign. F., t.1, c.1300-1400, 66). Et tout prenoit pacïemment, Remerciant devotement Nostre doulx saulveur Jhesuchrist. (Vie st Eust. 2 P., c.1400-1450, 219). ...[il] leur dist qu'il vouloit encores une foiz visiter Alixandrie (...) mais il ne leur declara pas les troubles qu'il prenoit a l'occasion de son mariage. (C.N.N., c.1456-1467, 560). Tropt grand troublys Prennés, ma seur ; - il fault que vous ayés pacience. (Pass. Auv., 1477, 188). Mes vous advés mal besoignhé, Quant vous l'advés cruxiffié, Et mal vous en prendré, se croy ! (Pass. Auv., 1477, 267). Qui pour son profit mal conseille, s'il en prent mal n'est point merveille [ou : s'il lui en prent mal ?] (COLART MANS., Dial. créat. R., 1482, 239).

 

.

Prendre qqc. à coeur / au coeur / en coeur. "Être touché par qqc." : ...n'estoit nul qui conforter le sceust ; tant fort mesmes le print il au cueur (...) que au bout de XV jours de dueil il en mourut. (C.N.N., c.1456-1467, 460). Si fort prens en cuer ce diffame Que j'en pers du tout le parler (Pass. Auv., 1477, 208). Plus fut content le roy de ce mistere Que qui luy eust cent mil escuz donné, Et print a cueur tellement la matiere Que tost aprés de volunté entiere Leur petit don fut bien reguerdonné, Car il estoit large et habandonné En toutes choses luy seul plus c'un millier. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 172).

 

.

Prendre coeur douloureux : Prens en toy cuer doloreux et le nettoye de toute ordure, car autrement tes larmes et ta doleur ne proffiteroyent que bien peu. (GERS., Déf., 1400, 230).

 

-

[P. allusion au cercueil de plomb] Prendre son dernier plomb. "Disparaître, mourir" : Ainsi royal racine Print la son darrain ploncq (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 293).

B. -

Se prendre qq. part. "Être comme saisi et fait prisonnier qq. part" : ...et me prenoie Com papeillons a la chandeille (ACART, Prise am. H., 1332, 41). ...gluos ["la glue"] a quoi il [les oisaux] se pranent (HENRI FERR., Modus et Ratio, Livre deduis T., c.1354-1377, 299). ...remirant la beauté d'elle, Se prent com mouche a la chandoile (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 114).

III. -

[D'une chose]

A. -

Empl. trans.

 

1.

[Le sujet est source de qqc.] Prendre qqn. "Saisir, envahir qqn, faire entrer qqn dans tel ou tel état"

 

a)

[D'un mal, d'une maladie, du sommeil...] : ...n'a guéres que si prise Estoit de sommeil (...) Qu'elle est alée dormir un poy (Mir. marq. Gaudine, 1350, 137). ...se l'andemain la fievre le prent en la mesme heure, telle fievre est de malle terminacion. (SAINT-GILLE, A.Y., 1362-1365, 74). Les corps qui sont en fievre quarte ne sont pas souvent pris de spasme (SAINT-GILLE, A.Y., 1362-1365, 89). Je friçonne toute, par foy, Et sens bien que d'acès sui prise (Mir. femme, 1368, 189). ...une maladie la print (LA SALE, J.S., 1456, 270). ...une toux le va prendre, si grand et horrible que merveille (C.N.N., c.1456-1467, 436). ...une maladie le print en l'oeil (C.N.N., c.1456-1467, 502). Pou de temps aprés, les fievres le prindrent si fortes et si tres agües qu'il devint si malade qu'il ne se pouoit aidier. (COLART MANS., Dial. créat. R., 1482, 231). Tel mal fut si soubdain prenant Vostre novice... (LA VIGNE, S.M., 1496, 380). LE MESEL. Sire a moy ne vueillez toucher Car ma maladie vous prendroit (Myst. st Martin K., a.1500, 299).

 

-

[De la nuit] : ...car il est de necessité que nous soions en la haulte mer ains que la nuit nous prende (Percef. III, R., t.2, c.1450 [c.1340], 126).

 

-

[De la mort] : Jusques atant que la mort me prendra (MACH., J. R. Beh., c.1340, 64). La nourrice qui m'alaicta La malle mort la puisse prandre (LA VIGNE, S.M., 1496, 321).

 

-

Prendre sur qqn. "S'emparer de qqn" : L'occasion ou cause de sa maladie print au disner sur le premier president premier jour de Parlement. (BAYE, I, 1400-1410, 179).

 

b)

[D'un sentiment] : Et que pité de moy vous preingne (MACH., R. Fort., c.1341, 135). J'ay bien cuidié qu'en deux partir Deust mon cuer pour s'amistié, Tant me prist de li grant pitié (Mir. ste Bauth., c.1376, 113). Quant vous plaira, de moy merci vous prengne (MACH., L. dames, 1377, 104). ...je suis au lit ou j'ars, Prins de desir dont je ne me depars (CHART., R. Bal., c.1410-1425, 390). Pour le frimas, pres du tison, Me prinst le vouloir de briser La tres amoureuse prison Qui me souloit bien debriser (VILLON, Lais D., c.1456-1457, 65). [Leçon Me vint ung vouloir ds l'éd. R.H., 11] Douleur m'assault, rigueur me prent (LA VIGNE, S.M., 1496, 488). Jamais ne te prenne envie De faire telle mocquerie (Myst. st Martin K., a.1500, 346).

 

c)

[D'une chose qui produit tel ou tel effet] : Car par ta biauté sommes pris Et de t'amour forment espris. (MACH., C. ami, 1357, 6). ...c'est a dire, il est aësey ou legier a vener et a estre tost pris et veincu par chose delectable. (ORESME, E.A., c.1370, 179). Le regart de celle m'a prins (VILLON, Lais D., c.1456-1457, 66).

 

2.

[Le sujet est le siège de qqc.] "Occuper (un certain espace)" : Pren donques ton reseul, qui doit estre si lonc que il praigne tout le chemin de travers (HENRI FERR., Modus et Ratio, Livre deduis T., c.1354-1377, 163).

B. -

Empl. intrans. ou pronom. [Le sujet est à la fois source et siège de qqc.]

 

1.

"Se figer, se cailler" : ...frommage pris (FROISS., Past. M., c.1362-1394, 155). ...la terre y est encore condée et blanche comme lait prins (Voy. Jérus., c.1395, 33).

 

Rem. Gloss., c.1400-1500. In : P. Nobel, Lexique 4, 1986, 169.

 

2.

"Se fixer, s'attacher" : ...glu si est si ardant et si tenant que il n'est rien qui deserdre s'en puisse : elle se prent et aert a tout chen qui la touche (HENRI FERR., Modus et Ratio, Livre deduis T., c.1354-1377, 309). Ceste couleur se tient moult fort ou elle se prent et ne l'en puet on oster que il n'y pere tousjours. (CORBECHON, Couleurs S., 1372, 378). C'est forte chose que vignes se prengnent et viengnent en terre rouge (Rustican H., 1373-1374, 73). Et sachez que ce est ainsi fait pour ce, qui brayeroit le frommage avec les herbes et oeufz, quant l'en cuideroit frire son alumelle, le frommage qui seroit dessoubz se tendroit a la paelle. Et ainsi fait il d'une alemelle de oeufz, qui mesle les oeufz avec le frommage. Et pour ce l'en doit premierement mectre les oeufz en la paelle, et mectre le frommage dessus, et puis couvrir des bors des oeufz ; et autrement se prendroient a la paelle. (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 244). Quant vous serez amont, il vous fault de bons, gros et fors bastons, que vous mettrés au travers des anneaulx de voz eschielles de corde et les ferez traverser et prendre entre deux creneaulx affin de tenir voz eschielles plus ferme. (BUEIL, I, 1461-1466, 90). Tien sur le cul ! tien sur la cuisse ! (...) Tien ! tien ! c'est pour ta peau escourre, Afin que la pouldre n'y prengne. (Myst. st Laur. S.W., 1499, 224).

 

-

Se prendre qq. part : ...affin que feu ne s'y puisse prendre (BUEIL, II, 1461-1466, 50).

 

-

"S'unir, se souder" : ...fist sculper deux pierres precieuses en certaines constellacions, l'une de telle efficace, après qu'elle fut mise sur le bort d'une couppe d'or à l'endroit où l'on beuvoit, que souldainement, se aucun homme qui eust faulté ou rompu son mariage, sa bouche se souldoit et prenoit, comme si les levres feussent d'une piece. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 34 r°).

 

3.

Se prendre à. "Attaquer" : ...[il] entretenoit son ouvrouer de paour que le rouil ne s'i prenist. (C.N.N., c.1456-1467, 507).

 

-

[D'une maladie] Prendre à. "S'attaquer à" : Aussi, si chien enfondu ou roigneux y avoit, il le doit traire hors des autres du chenill, affin que la roigne ne preigne aux autres (GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, 149).

 

.

Se prendre à : Ceste rage ne se prent point aux autres chienz ne a homme ne a rien. (GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, 115).

 

.

Empl. abs. Se prendre : L'autre maniere de rage s'apelle rage de teste, combien que toutes les rages soient de folie de teste et de chaleur de cuer, pour ce que la teste leur devient grosse et enflee et les yeux gros et enflez et ne menjuent point, et einsi muerent. Et ceste rage aussi ne se prent point. (GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, 115).

 

4.

Prendre sur qqc. "Être plus fort que qqc." : ...ne fut oncques en sa puissance de tirer sa dague pour esprouver et savoir s'elle pourroit prendre sur ses cuirasses. [Cont. érotique] (C.N.N., c.1456-1467, 194).

C. -

[Tours impers.]

 

1.

(Il) prend (à qqn) + subst. (de + inf.) "Il arrive, il advient (à qqn / un animal)"

 

a)

[Une maladie, de la fièvre, une douleur...] : Autre maladie qui leur prent dedens la teste [aux chiens ; il leur prend une maladie...] (HENRI FERR., Modus et Ratio, Livre deduis T., c.1354-1377, 100). ...Li prist une grant maladie (MACH., P. Alex., p.1369, 130). L'evesque de Biauvais là estant, une maladie luy prist, dont il s'alitta (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 3). Si luy prist une grosse apostume ou corps. (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 113). En ce moment print grant soif au roy Elinas (ARRAS, c.1392-1393, 6). ...et, au revenir, luy prinst ung vent sur mere que le b(a)alhat tant par mere qu'il l'at geteit a Bolongne. (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 20). ...le traveil d'enffantement lui print (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 193). A me blasmer a tort te prens, Mes, pour Dieu, plus ne t'y reprens Car par moy ne t'est nul mal pris (Poés. lyr. court. XVe I., c.1454-1456, 109). ...il luy print une moult grande maladie en ung oeil (C.N.N., c.1456-1467, 18). Ma foy, dit elle, il m'est prins ung tel mal de teste que je ne saroye tenir sur piez (C.N.N., c.1456-1467, 242). Ceste maladie luy prit d'une fièvre très-aspre (CHASTELL., Chron. K., t.4, c.1456-1471, 200).

 

b)

[Un sentiment, une volonté...] : Je croy qu'il vous a pris voloir De ses disciples devenir Et de vos erreurs relenquir ? (MARCADÉ, Myst. Pass. Arras R., a.1440, 101). Freres, alons premierement Par Samarie et Galilée, No voie soit par la trouvée, Il m'en est prise volenté. (MARCADÉ, Myst. Pass. Arras R., a.1440, 109). Moult print grant pitié aux dames (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 158). ...j'ayme bien vostre mary, il me prend pitié et compassion de vostre fait. (C.N.N., c.1456-1467, 40). ...il luy print volunté d'aller voyager et veoir païs. (C.N.N., c.1456-1467, 332). Comme il estoit ung soir avec ses gens, après souper, devisant et esbatant avec eulx, fain luy print d'aller au retrait. (C.N.N., c.1456-1467, 428). ...et de nul meffaire, tant pust-il estre horrible, ne leur prent pité (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 460). ...par aucunes frénésies qui lui prirent par trois ou quatre jours routiers (CHASTELL., Chron. K., t.4, c.1456-1471, 169). ...au roy prit faim aussi de l'envoyer devers le duc à Bruges (CHASTELL., Chron. K., t.5, c.1456-1471, 394). Las ! y m'est prins une faillance En se lieu (Gent. moun. T., c.1500, 380).

 

-

Prendre envie à qqn de + inf. : PREVOST. Sans plus aultre chose sçavoir, De vous juger m'est pris envie. (LA VIGNE, S.M., 1496, 315).

 

2.

(Il) (en) prend à qqn (de telle ou telle manière). "Les choses se passent pour qqn (de telle ou telle manière)"

 

a)

(Comment / comme) il (en) prend à qqn. "(Comment) les choses se passent pour qqn" : ...pour racompter comment il lui print de son emprinse. (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 94). Et, sans de rien avoir doubtance, si verras comme t'en prandra (Abuzé D., c.1450-1470, 88). Voyez comment il vous em prent. (Pouvre peuple H., c.1450-1492, 227). Le .Vme. [chapitre] de Sacrilege traicte de la paix des Roumains et du roy Anthiocus, et comment lui prit du temple de Jupiter qu'il desroba (LA SALE, Sale D., 1451, 19). Et lors de mot a mot l'istoire compte (...) et, pour abregier, comment ilz furent en la cité digner, comment ilz furent armez, et leur bataille, comment a l'abbé en print, aussi les parolles que Madame dist a l'amant... (LA SALE, J.S., 1456, 304). ...je le desireroye beaucop (...) mais au fort j'essaieray comment il m'en prendra. (C.N.N., c.1456-1467, 178). Est ce cela ? dit il. Or bien, bien : vous verrez comment il vous en prendra (C.N.N., c.1456-1467, 189). J'en ay au cueur des douleurs plus de vingt ; Je ne sçay pas commant il m'en prandra, Car oncques joye depuis ne me survint ; Conseillez moy que faire me fauldra. (LA VIGNE, S.M., 1496, 178).

 

-

(Comment) il (en) prend à qqn de + inf. "(Comment) les choses se passent pour qqn quand" : ...le roy lui demanda comment il lui print de garder la tombe Darnant (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 63). Cestui par avant avoit esté Anglois, mais le roy lui fist des biens entour Mente, où il predist aux Anglois plusieurs de leurs infortunes et ne le voulurent croire, dont il leur print comme l'on scet. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 154 v°).

 

-

Comment qu'il prenne. "Quoi qu'il advienne, quoi qu'il en soit" : Et si me font amer, comment qu'il preingne, Celle qui ha plus qu'autre de douçour. (MACH., L. dames, 1377, 97). Chaussemente fault et solers, Pour les venues, pour les alers, De blanc, de noir et de vermeil, L'un de blanc, l'aultre despareil, Qui soient fait comment qu'il prangne, Estroiz, escorchiez, a poulaine Ronde, deliée et ague, Tant qu'om la voye par la rue (DESCH., M.M., c.1385-1403, 49). ...senon luy donra bataille Comment qu'il luy en doye prendre (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 233).

 

b)

[Avec un adv.] : ...il estoit povrement pris encore de leur voyage ; car avoient despendu jà temps et argent et longuement vaucré par mer en divers périls. (CHASTELL., Chron. K., t.5, c.1456-1471, 47). Ainsi en prent a maint et maintes. (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 57).

 

-

En prendre bien à qqn. "Bien lui en advenir" : Sy en prist bien à aucuns qui furent détenus pour prisonniers, et aux autres mal, car il furent pendus (CHASTELL., Chron. K., t.2, c.1456-1471, 35). ...tant m'en est bien pris que... (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 122). Tay toy, dissimuleur, tay toy, Car il est tart ! Il t'en prent bien, Pour ce que le grant sabbat vien. Si ne fut si tart, je t'adffie Qu'on t'eust mis a la companie De Jhesus, et t'eussions fait morir (Pass. Auv., 1477, 267). SAINCT MARTIN. Qui en Jhesucrist se confie, En la parfin bien luy en prend. (LA VIGNE, S.M., 1496, 449).

 

-

En prendre grand bien à qqn. "Lui en advenir grand bien" : Veille toy donc a eulx tous revertir Sans jamais jour leur pouoir divertir ; Par ce moyen grant bien t'en pourra prandre. (LA VIGNE, S.M., 1496, 145).

 

-

Mal (en) prendre à qqn. "Mal lui en advenir, lui en arriver malheur" : Elle ne se peut gueres tenir qu'elle ne demandast a son mary qu'il avoit fait de leur filz. "Ha ! m'amye, dist il, il ne le vous fault pas celer : il luy est tresmal prins..." (C.N.N., c.1456-1467, 130). ...ou aultrement mal leur en prenderoit. (MOLINET, Chron. D.J., t.1, 1474-1506, 608). Aussi m'en est-il mal prins (Cuv. T., c.1475-1500, 74). ...si Dieu ne destournoit les influences celestes, il lui en prendroit mal (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 7 v°). ...à ceste cause mal leur en print et fut leur duc tué, par quoy ilz desemparerent et s'en allerent. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 65 v°). Maistre Jehan Spirink, grant et expert astrologien en ce temps, fut moult aprecié, pour ce qu'il fist sçavoir au duc Charles de Bourgoigne que s'il alloit sur les Suissez, comme il estoit deliberé faire, il lui en prandroit mal. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 160 v°). Et au regard des sommiers, bagaiges et autres gens de suyte, pource qu'ilz se mirent en desordre, mal leur en print. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 284). Mais mal luy print certes a ceste foys (SAINT-GELAIS, Enéide VI, B., c.1500, 304).

 

-

Ainsi t'en prend. "Que cela te soit profitable (?)" : Pour ce je te dy maintenant Que, car elle m'a bien amé, Mains pechés luy ay pardonné A peu d'amour, petit pardon. Certes, ainsi t'en prent, Simon ; Garde toy de plus murmurer ! (Pass. Auv., 1477, 154).

IV. -

[Par affaiblissement de sens : valeur inchoative]

A. -

Empl. intrans. ou pronom. [D'une pers. ; le sujet est un agent] (Se) prendre à + inf.

 

1.

Prendre à + inf. "Se mettre à" : A lui mesmes print il a dire : ... (Renart contref. R.L., t.1, 1328-1342, 11). ...si print a rire (Renart contref. R.L., t.1, 1328-1342, 36). Si prist a chanter sans demeure (MACH., R. Fort., c.1341, 128). Lors prist ses cheveus a tirer ["se mit à tirer ses cheveux"] (MACH., J. R. Nav., 1349, 215). Une fois presins a danser (FROISS., Espin. amour. F., c.1369, 79). S'il y a prestre ne convers Qui mot en die de travers Ou qui a groucer vueille prendre, Qu'en celle heure (...) Soit mis a mort. (Mir. Rob. Dyable, c.1375, 6). Lors prinst il a dire : ... (DESCH., M.M., c.1385-1403, 147). Grant joye pristrent a mener (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 44). Adont Hanibal a plourer Prist (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 231). ...je prins fort a considerer les manieres diverses par lesquelles Male Voulenté ostoit la gloire a Dieu. Et ainsy comme je pensoye, me fut avis que Male Voulenté se apparut a moy en maintes guises (GERS., Noël, p.1404, 303). ...en laquelle place lesdis brigans prindrent a ferir mortelment sur lesdites femmes (Chancell. Henri VI, L., t.1, 1425, 185). Car ilz prindrent a getter pain en pluiseurs lieux. Et quant les Galx les virent, ilz furent tous esbahis, et cuiderent qu'ilz eussent infinie plenté de froument, et laisserent le siege. (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 38). Adont le chevalier la prinst treshumblement a mercier (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 94). ...et le [l. la ?] prindrent a regarder les merveilles que le Chevallier Sauvage faisoit. (Percef. III, R., t.1, c.1450 [c.1340], 60). ...puis appella la royne et Lyonnel et leur print a lire les lettres qu'il avoit receues ["et se mit à leur lire"] (Percef. III, R., t.1, c.1450 [c.1340], 315). Sa mere, toute enragée, forcenée et tant marrie qu'on ne pourroit plus, la voyant ainsi deshonorée, si prend a la tanser (C.N.N., c.1456-1467, 69). ...[le prisonnier] print a hurter du poing a sa huche tant que la damoiselle l'oyt (C.N.N., c.1456-1467, 380). Et le bastard (...) prist a dire ces parolles... (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 162).

 

-

Prendre de + inf. "Entreprendre de, prendre l'initiative de" : ...le duc (...) prit en luy-mesme et en son propre avis de mettre sus un prévost des maréchaux (CHASTELL., Chron. K., t.5, c.1456-1471, 421). Ma mere, j'ay pris d'estre frisque Entre les nobles chavaliers ; Pour ce avec les escuyers Je feray une doulce dance. (Pass. Auv., 1477, 89).

 

2.

Se prendre à + inf. "Se mettre à" : Cil Paulin se prist des s'effance A Dieu et a touz biens amer ["se mit à aimer Dieu et à aimer tous les biens (spirituels)"]. (Tomb. Chartr. Trois contes S., c.1337-1339, 103). Pour ce me pris a frequenter Aucuns des faitis damoiseaus (MACH., D. Aler., a.1349, 293). La se prist (...) Premier a s'espée sachier Thibert pour li le chief tranchier (Mir. Berthe, c.1373, 228). Ceste condicion emprist Qu'a donner largement se prist (Mir. march. juif, c.1377, 180). Ains se mist de son lit au bort Et se prist a plourer moult fort (Mir. fille roy, c.1379, 94). ...et, ce fait, lui et ledit Jehannin Favas, demourant en la rue au devant dudit huys, et par maniere d'esbatement, se prindrent à chanter haut et cler de leur povoir, afin que les voisins ne peussent pas si aisiement oïr aucune noise (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 102). ...et, lui ainsi cheu, icellui curé de present se print à batre et navrer très-inhumainement ledit predecesseur curé, et de fait lui coppa, li present, tous les dois d'une de ses mains (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 109). Quant je me prens a resveiller ["quand je commence à me réveiller"]... (Au grey d'amours F.-H., c.1400-1500, 219). Lors je me prins a despoiller ["alors je me mis à me déshabiller"] (Vir. H., c.1400-1500, 101). ...leurs deux chevaulx se prindrent a mener grant bruit (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 1106). Alors toutes se prindrent a rire des grans assaulz que Madame lui faisoit (LA SALE, J.S., 1456, 60). Si se prend a meiser, et, a chef de sa meditacion, se tire près d'elle (C.N.N., c.1456-1467, 29). Quand ses compaignons ouirent ceste conclusion, ilz se prindrent a rire (C.N.N., c.1456-1467, 543). Quand ce bon mary eut finé sa parolle, la belle, doulce et debonaire sa femme, la face rosée, se print a trembler (C.N.N., c.1456-1467, 564). ...et messire Jacques de Lalaing (...) les prist à suivir ["se mit à les suivre"] (CHASTELL., Chron. K., t.2, c.1456-1471, 316). LE PERE. (...) Ne doi ge pas ta vie bien mauldire Quant devant moy tu te prens a mesdire De celuy Dieu en qui j'ay ma fïance ? (LA VIGNE, S.M., 1496, 143). Adoncques je me prins a rire (Myst. st Martin K., a.1500, 322).

 

-

Se prendre + inf. : S'un grans portoit mantel envers, Incontinent un vilain sers Aussy se prent envers porter ["se met lui aussi à porter (le manteau) à l'envers"] Pour les bien nobles ressambler. (BOUVET, Appar. Meun A., 1398, 29). Si me pris d'elle m'approcher (RÉGN., F.A., 1432-c.1465, 162).

 

-

Se prendre à qqc. "S'adonner à qqc." : ...mielx se volt prendre Aux noces espirituelles (Tomb. Chartr. Trois contes S., c.1337-1339, 90). ...Combien encores il se prent a la dance, Cuidant fairë ung peu de chiere lye (RÉGN., F.A., 1432-c.1465, 176). ...voicy tresbeau jeu. Si je m'y prens, par le corps bieu, De vous faire dresser devant ! (P. Jouh. D.R., a.1488, 34).

 

.

Prenons nous y. "Commençons, allons-y" : Avant ! Avant ! Qu'il soit batu ! Prenons nous y, comment qu'il aille. (Pac. Job M., c.1448-1478, 385).

 

-

Empl. abs. Se prendre. "Se livrer" : ...ilz sont tres diligens regardeurs et considereurs du temps, que ["car"] ilz ne dient rien ne mectent avant trop hastivement, mais par un entremés, ou quant aucun sera esjoÿ pour cause de vin ou pour autre delice, la se prennent. (FOUL., Policrat. B., III, 1372, 214).

 

-

Se prendre près de. "Entreprendre de s'occuper au mieux de, entreprendre de" : ...j'espoir qu'ilz se prendroient pres de faire paix a Permenion. (Percef. I, T., c.1450 [c.1340], 129). ...dittes moy quelle elle est, et je m'en prenray moult pres (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 46). ...Par quoy il se prenra plus pres De vous accorder Bellissent. (DU PRIER, Roy Adv. M., 1455, 14).

 

.

Se prendre près de + inf. "Se tenir prêt à, être sur le point de" : ...il se prist prez de parler au duc (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 99).

B. -

Empl. intrans. ou pronom. [D'une chose. ; le sujet est le siège de qqc.]

 

1.

Qqc. (se) prend

 

-

Qqc. prend. "Survenir" : Aux armes ! chevaliers, car le besoing en prent. (Tristan Nant. S., c.1350, 613).

 

-

Qqc. se prend. "Se former" : Mais Fortune, la traitresse, comme dit le bon Boece, a sa destre plaine d'orgueil, veult ses sergens mectre en dueil. Plus soudainement les surprent que le flot de mer ne se prent (LA SALE, J.S., 1456, 303).

 

-

Qqc. se prend. "Avoir son origine, commencer" : Lesquelles ceinctures sont mises et assises en et sur un manteau de veluiau vermeil en graine : C'est assavoir, l'une par devant, qui se prent en la poictrine du costé destre et descent tout au lonc dudit manteau, et l'autre par derrière, semblablement assise, et avec ce deux renges d'annelès de fil d'or et d'argent de Chippre, assises semblablement sur ledit mantel. (Comptes argent. rois Fr. D.-A., II, 1387, 195). ...une autre piece de chaussée en ladite rue, à commancer à la jambe d'entre les maisons Simon de Bucy et Andriet d'Azy, drappier, en allant vers la porte de Paris, jusques au comble d'icelle rue qui se prent devant la maison Thomas Corneille (Comptes Paris V.L.D., t.1, 1446-1447, 509). Lors le cry se prist des gens de ladite avant-garde (CHASTELL., Chron. K., t.2, c.1456-1471, 303).

 

-

Caresme prenant. "Carême commençant" : LE FOL. (...) Je vueil que karesme prenant Soit venredy. (Mir. parr., 1356, 49). ...et y furent jusques à karesme prenant. (GRUEL, Chron. Richemont L., c.1459-1466, 42).

 

.

V. carême

 

-

Prendre à declin. "Commencer à décliner"

 

Rem. Galien D.B., c.1400-1500, 3187 (le jour prent a declin "la nuit commence à tomber").

 

2.

(Se) prendre à + inf. "Commencer à" : Le temps se prist si a troubler, Obscurcir... (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 220). La couleur me print a muer Quant je vy son tresdoulx regard (RÉGN., F.A., 1432-c.1465, 100).

 

-

Se prendre + inf. "Se présenter de manière à" : Adont se prist la chose estre menee par conseil ; sy orent trois opinions. (LA SALE, Sale D., 1451, 183).

C. -

[L'objet de prendre désigne une action ou un état saisi dans sa phase initiale ; prendre est sans plus un verbe "support"]

 

1.

[D'une pers. (qui est agent)] "Commencer à faire qqc. ou entrer dans un état plus ou moins voulu"

 

a)

Prendre + subst. d'action ou d'état

 

Rem. De très nombreux autres syntagmes pourraient être relevés (prendre ses aises, prendre aventure, prendre baptesme, prendre conroi, prendre contenance, prendre courroux, prendre deduit, prendre deport, prendre envie, prendre esbat, prendre esbattement, prendre esperance, prendre espoir, prendre estrif, prendre fornication, prendre fuite, prendre hardiesse, prendre le parti de, prendre mariage, prendre peine, prendre soulas...). Ils sont (ou seront) illustrés sous le mot de base.

 

-

Prendre allee. "Se mettre en mouvement, se déplacer" : Le fille enfantera le mere ; Lyons nagant en mer sallee, Poissons es bois prenront allee (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 546).

 

-

Prendre assurance : Ne demoura gueres, toutesfoiz, que la rougeur s'evanuyt, et print asseurance, en fermant et appuyant son courage de constance. (C.N.N., c.1456-1467, 564).

 

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Prendre bataille. "Engager la bataille, décider la bataille" : Et trouva son frere et sa soeur en grant debat pour la couronne, dont la bataille fut prinse (Percef. III, R., t.2, c.1450 [c.1340], 329). [Autre ex. p.301]

 

-

Prendre confort : L'arme de mi n'ait uolut panre confort ne consolation. (Psaut. lorr. A., 1365, 77). ...Car je prenc confort souverain Es choses (Echecs amour. K., c.1370-1380, 157). Vous advés tort Si grand remort - faire, et aquarrés ung blasme ! Prenés confort (Pass. Auv., 1477, 240).

 

-

Prendre congé (de / à qqn) : A ces parolles chascun sailli dehors et le petit Saintré a genoulz print congié. (LA SALE, J.S., 1456, 7). Nostre Escossois, après ceste haulte adventure, prend de sa dame congé jusques une aultre foiz (C.N.N., c.1456-1467, 51). ...après les congez a madame sa femme prins et de pluseurs ses parens et amys, se mect a voye (C.N.N., c.1456-1467, 109).

 

.

Prendre son congé : ...le curé se partira de leens et prendra son congié (C.N.N., c.1456-1467, 353).

 

-

Prendre conseil : Conseilh de famme bien souvant, Quant on le prent, A sages gens porte profit, Mes qu'il soit pris d'entendement, Le dirigent Par raison que tout dirigit ! (Pass. Auv., 1477, 278).

 

.

"Délibérer" : Noz ennemys nous requierent d'avoir Treves et paix : pour ce, faisons debvoir De sur ce cy prandre conseil vaillable. (LA VIGNE, S.M., 1496, 252).

 

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Prendre conseil et conclusion que. "Décider, après réflexion, que" : Si prindrent conseil et conclusion ensemble que le curé se partira de leens (C.N.N., c.1456-1467, 353). Lors print congié debonnayre et humain Le roy du pape, en luy baisant la main. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 240).

 

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Se prendre conseil de + inf. "Prendre la décision de" : Sy eurent paour telle qu'ilz se prindrent conseil de eulz retourner ; dont en retournant, laisserent le plus des choses qu'ilz portoient. (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 81).

 

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Prendre considération sur qqc. "Veiller à qqc." : Prens sur cecy consideracion : Si les seigneurs sont en discencion, Ne laisse poinct le sang humain espandre. (LA VIGNE, S.M., 1496, 249).

 

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Prendre courage : Il convient doncques que prenez maintenant courage, bon et ferme. (C.N.N., c.1456-1467, 561). Il l'ammonesta si doulcement qu'il luy fist prendre courage (C.N.N., c.1456-1467, 578). BOURREAU. (Il sont sur l'eschaffault.) Sa, sa, que je vous mecte a poinct, Mon amy, prenez bon couraige ! (LA VIGNE, S.M., 1496, 323).

 

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Prendre coeur : Alors le pouvre desconfit print cuer et dist : "Oÿ, ma dame, puis qu'il vous plait." (LA SALE, J.S., 1456, 10). Vous serez tantost en bon point, si Dieu plaist, madame, dist la religieuse messagiere ; faictes bonne chere et prenez cueur (C.N.N., c.1456-1467, 140).

 

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Prendre confort : OFFICIAL. Hellas, monsieur, prenez confort ! Ne vous chaille, vous guerirez Se Dieu plaist. (LA VIGNE, S.M., 1496, 559).

 

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Prendre cure et soin pour qqc. "S'occuper, se préoccuper de qqc." : Ja Dieu ne veille que pour le ventre d'une femme je prende si estroicte cure ne soing (C.N.N., c.1456-1467, 560).

 

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Prendre cure de + inf. "Veiller à" : ...car il n'est pas possible bonnement que une ait grans peccunes ou richesces qui de les acquerir ou garder ne prent cure, sollicitude et diligence, et ainsy est il en autres choses. (ORESME, E.A., c.1370, 234).

 

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Prendre entendement. "Acquérir la faculté de raisonner" : Mais les filz actendent a amer leur parens par un procés de temps jusques a tant que ilz prennent entendement ou sens. (ORESME, E.A., c.1370, 441).

 

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Prendre excusation : Et si tu prens excusacion que tu ne pues venir à moy, certes si pues en tant qu'il m'est besoing (GERS., Déf., 1400, 227).

 

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Prendre exemplaire / exemple à / de. "Prendre modèle sur" : Si que la prenoit exemplaire De tout ce qu'elle devoit faire. (MACH., J. R. Nav., 1349, 177). ...car nous devons a Dieu prendre exemple. (Bérinus, II, c.1350-1370, 131). Et pour ce que nulle ribaulde ne regne a l'exemple de Lucresse, qui vouldra prendre exemple au pechié et au forfait, si prengne aussi exemple a l'amende. (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 54). Assez le peut on noter et prendre exemple du roy Roboan, qui, pour les oppressions de son peuple qu'il ne voult amendrir ne cesser en delaissant le conseil des saiges anciens et ensuivant la sote oppinion des jounes et non saichans, perdy de sa seigneurie dix lignies et demie. (CHART., Q. inv., 1422, 23). Prende qui veult a ses fais exemplaire (TAILLEV., Rég. fort. D., c.1445, 233). LA MERE. Mon chier enffant, prens a ton pere exemple Et sa doctrine en ce cas cy bien ample, Quoy qu'il en soit, ne vueille aneantir. (LA VIGNE, S.M., 1496, 145).

 

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Prendre fiance en qqn. "Avoir confiance en lui" : ...en lieu que celuy [qui] luy est tant estrange et prend si peu de fiance en luy, il s'accointera de sa dame (C.N.N., c.1456-1467, 228). ...je m'esbahis bien que vous prenez si peu de fiance en moy (C.N.N., c.1456-1467, 229).

 

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Prendre foi de qqc. "Croire à qqc." : Mais que a mouvement circulaire nul autre movement local n'est contraire, l'en puet de ce prendre foy par plusseurs raysons. (ORESME, C.M., c.1377, 88).

 

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Prendre garin. "Se mettre à fuir, fuir" : Si tourne bride et print garin, et aux aultres la queste abandonna. (C.N.N., c.1456-1467, 462).

 

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Prendre garde à

 

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"S'intéresser à, veiller à" : Et qu'est cecy ? dit l'un, et ne prenez vous point garde a la bonne chere que nous fait nostre hoste ? (C.N.N., c.1456-1467, 199). SAINCT MARTIN. (...) Dieu suppernel, doulx Createur, Dorenavant prens a moy garde, Comme mon benoist Redempteur Et me tiens en ta saulvegarde. (LA VIGNE, S.M., 1496, 302).

 

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"Être sur ses gardes" : ...le chemin de cy a Saint Nicolas n'est pas bien seur (...) et a quoy on doit bien prendre garde. (C.N.N., c.1456-1467, 171).

 

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Se prendre garde de qqc. "Constater qqc." : ...elle le refusa plainement devant tout le monde, dont pluseurs se prindrent garde. (C.N.N., c.1456-1467, 181).

 

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Prendre gloire : Congnoissant que Alexandre prenoit trop haulte gloire, vint au devant lui, dist, comme Democrites le philozophe avoit dit, qu'ilz estoient plusieurs mondes (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 64 v°).

 

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Prendre guerre. "Entrer en guerre" : ...un grant roy ou pays d'Asie prinst guerre contre deux freres (BUEIL, I, 1461-1466, 125).

 

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Prendre hardement de + inf. : ...toutesfoiz print cueur et hardement et vouloir de soy defendre (C.N.N., c.1456-1467, 428).

 

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Prendre loisir à / de + inf. : ...tant ne le fut [ébahie] qu'elle ne print bien le loisir de mucer son amoureux le curé en ung casier (C.N.N., c.1456-1467, 443). Ad ce faire prendray loysir (Pass. Auv., 1477, 90).

 

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Prendre le loisir de + inf. "Vouloir bien" : DIEU. (...) Mes anges, prenez le loisir De descendre la bas grant erre Et veillez le temple choisir En façon que nul plus gesir N'y puisse ; mectez tout par terre. (LA VIGNE, S.M., 1496, 436).

 

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Prendre loyauté. "Opter pour la loyauté" : Laissons envie, sy prendons loiaulteit et soyons toudis bons compaingnons (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 106).

 

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Prendre plaisance : O Jehan, mon filz, dy moy a qui Je prendrey plaisance ne joye ? (Pass. Auv., 1477, 265). ...en se Veyent je prens plaisance Si tresgrant que plus ne veulx mie ! (Pass. Auv., 1477, 280).

 

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Prendre plaisir en qqc. "Trouver du plaisir à qqc., se réjouir de qqc." : ...il scavoit bien que les graces qui estoient en luy estoyent plus a louer que les pechiés qui estoient es aultres, mais il ne prenoit pas plaisir en ceste louange (GERS., P. Paul, a.1394, 504). Et, en apprés, plaisir prenons en bledz Qui ne sont poinct desrobez ne enblez, Puisque Jhesus chascun an les envoye Par cy par la, en chemin et en voye, Sur terre, roche et en souefve arayne, Par sa grace begnigne et souverayne (LA VIGNE, S.M., 1496, 332).

 

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Prendre plaisir à + inf. : Il faut dire que vous prenez plaisir a abuser femmes, qui par ma foy n'est pas bien fait. (C.N.N., c.1456-1467, 81). ...[il voyait] les peres et les meres prendre grand plaisir a veoir les enfans jouer et faire soupplesses et apertises (C.N.N., c.1456-1467, 555).

 

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Prendre plaisir de + inf. "Se réjouir de" : Donques, pour amour de ses vaillances, j'ay prins plaisir de veoir ou son corps gist (LA SALE, J.S., 1456, 309).

 

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Prendre plait. "Conclure un contrat" : Encor vous puis je commander Si qu'il vous couvient amender Un autre fait qui me desplait, De ce que vous prenistes plait Contre dame de tel vaillance Et de si trés noble puissance... (MACH., J. R. Nav., 1349, 268).

 

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Prendre possession. "Instaurer son autorité" : Mardy deuxiesme de decembre, le roy En excellence de pondereux arroy Pour demonstrer sa dominacion Sans estre mis de nul en desarroy, Fit mettre aux champs de son ost le charroy, Pour aller prendre vraye possession Et maintenir en sa protection Pour desormais, Senes la ville antique (LA VIGNE, V.N., p.1495, 222).

 

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Prendre possession de : ...[le curé] print congié de son maistre pour ung espace de temps, a venir par deça a leur ville prendre possession de sa cure. [Elle vient de lui être attribuée] (C.N.N., c.1456-1467, 287).

 

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Prendre règle que : ...la belle dame commença le lendemain a faire son abstinence, en prenant regle et ordonnance que durant le temps de son jeune ne mengeroit son pain et eaue jusques après soleil couché. (C.N.N., c.1456-1467, 576).

 

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Prendre règle de + inf. : Par l'ordonnance de sa dame, il print regle et coustume de la venir visiter a toutes les foiz qu'il sentoit le mary estre absent (C.N.N., c.1456-1467, 441).

 

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Prendre réjouissance. "Se réjouir" : LE SOUBDAN. Beaux chevaliers, a petit de langaige Dedens voz cueurs prenez resjoyssance, Car nostre roy plain de grant vassellaige Je voy venir avecques sa puissance. (LA VIGNE, S.M., 1496, 234).

 

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Prendre répit : Prenés ung poy - joyeux respit. (Pass. Auv., 1477, 242).

 

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Prendre séjour. "Demeurer" : Puis le corps print sejour Dedens Vendosme a pourrir sous la lame (LA VIGNE, V.N., p.1495, 317).

 

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Prendre autre séjour. "S'arrêter davantage, prendre davantage de repos" : Le vendredi vingtdeuxïesme jour Du moys d'aoust, sans prendre autre sejour, Le roy, la royne de Vïenne partirent Et en vollant allerent la autour (LA VIGNE, V.N., p.1495, 142).

 

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Prendre soin pour + inf. : Ho ! il me vault mieulx vivre que morir pour prendre soing pour la garder [la chasteté de sa femme] ! (C.N.N., c.1456-1467, 560).

 

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Prendre le soin de + inf. "S'appliquer à" : LE TIERS CHEVALIER. (...) Au fort aller, Martin n'est pas trop loing ; Notiffïer je luy voys tout cecy Et de venir en luy prandra le soing. (LA VIGNE, S.M., 1496, 238).

 

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Prendre suspicion à qqc. : ...ce nous sera la plus convenable voye du monde pour prendre nos delictz et plaisances, et mesmement en sa chambre, affin que l'on y prenne mains de suspicion. (C.N.N., c.1456-1467, 504).

 

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Prendre trêve : Atant sont sus courut, sy sont combatus longuement et asseiz et tant qu'ilz furent sy laisseis qu'ilz prisent triwez l'ung a l'autre. (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 154). Moult fort me griefve, Sans prendre tresve - si grant effort. (Pass. Auv., 1477, 240).

 

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Prendre vengeance. "Se venger" : Et quant ilz ont retribué pugnicion et pris venjance, ilz sont apaisiéz. (ORESME, E.A., c.1370, 262).

 

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Prendre vengeance de qqc. "Se venger de qqc." : ...si n'eust esté son cousin, il en eust prins vengence criminelle et de main mise (C.N.N., c.1456-1467, 352).

 

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Prendre vengeance sur qqn : SAINCT MARTIN. (...) Veulx tu vengence sur moy prendre De tes dieux s'on les a deffaiz ? (LA VIGNE, S.M., 1496, 448).

 

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Prendre telle ou telle qualité ou défaut : Et se nous avion toutes les choses par lesquelles nous povons estre bons et prendre ou acquerir vertu, ce nous devroit estre chose chiere et amable. (ORESME, E.A., c.1370, 531). ...l'en peut dire que se il sunt tant soit peu ovecques serfs il prendront ou aprendront illiberalité ou deshonesteté par les choses qu'il orront et verront. (ORESME, Pol. Arist. M., c.1372-1374, 337).

 

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Prendre vouloir de + inf. "Vouloir bien" : DIEU. Pour ce que l'empereur forfait A commys au jour d'uy matin, De courage rude et infect, Envers mon bon amy Martin, Touteffois, en son advertin, Preigne vouloir de retourner Audict empereur Constantin ; Et que tantost, sans sejourner, Soit certain, avant que tourner, Il aura tout ce qu'il demande. (LA VIGNE, S.M., 1496, 505).

 

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[Du Christ] Prendre chair./Prendre humanité./Prendre humaine nature : ...Dieu tout puissant qui descendi en terre pour penre char humaine. (Veng. Nostre-Seign. F., t.1, c.1300-1400, 48). Sire, vecy le corps en quoy Tu preis vraie humanité, Sanz corrompre virginité. (Mir. prev., 1352, 255). Doulz Jhesucrist qui en Marie Preinstes corps humain sans pechié (Jeu st Den. S., c.1380-1400, 113). Dy pourquoy Nostre Seigneur attendi tant pour prendre char humaine ? (GERS., Annonc., a.1400, 230). Amés vertus et le filz de Dieu, Que a pris humaine nature Pour la tourner en son hault lieu. (Pass. Auv., 1477, 125).

 

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Prendre son corps arriere. "Ressusciter" : Mon corps quil fust crucifïé Est a present gloriffïé, Dont je randix l'ame a mon Pere, Et depuis mon corps prins arriere, Mes a mon Pere veul monter Pour vous pechïers surmonter. (Pass. Semur D.M., c.1420 [1488], 257).

 

b)

Prendre + dét. + subst.

 

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Prendre du passe-temps. "Trouver de l'agrément" : Mais la marquise souvent y frequentoit Pour y prendre du passe temps assez. Car il y a l'une des belles places, Des gorgïases et des bien acoustree De grosses tours, rivieres, boys et chasses Qu'on saiche point en toute la contree (LA VIGNE, V.N., p.1495, 178).

 

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Prendre du bon temps : ...[il] laissoit sa femme prendre du bon temps a la bonne ville (C.N.N., c.1456-1467, 507).

 

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Prendre du repos. "Se reposer, se délasser" : ...quand je seray seulle je prendray quelque pou de repos. (C.N.N., c.1456-1467, 242). DOYEN. Monsieur, pour milleur repox prendre, Coucher vous fault en ung bon lit. (LA VIGNE, S.M., 1496, 560).

 

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Prendre la défense pour qqn. "Défendre qqn" : CLAUDE. Dieu preigne pour moy la deffence, Car je ne doybs rien a personne ! (LA VIGNE, S.M., 1496, 518).

 

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Prendre la charge de + inf. : ...il la demanda a ceulx qui en prindrent la charge de la penser, garder et aider en sa gesine [sa dame]. (C.N.N., c.1456-1467, 147).

 

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Prendre le hardement de : Et convint que en sa presence Je preisse le hardement De li demander plainement Un baisier (Mir. marq. Gaudine, 1350, 154).

 

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Prendre la parole : Ce maistre curé (...) commence a prendre la parole a ce trenchecoille et luy va demander de son mestier (C.N.N., c.1456-1467, 403). Alors la mere print la parolle, et a part dist a sa fille... (C.N.N., c.1456-1467, 472).

 

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Prendre de la peine. "Se donner du mal" : OFFICIAL. (...) Or ça, nous en chevirons bien. Neantmoins touteffois, combien Que de la payne qu'avez prise, Vous en remercyons tresbien ; Nous retournons a nostre eglise. (LA VIGNE, S.M., 1496, 407).

 

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Prendre la peine de + inf. : ...vous prendrez bien la peine de les coudre [des chemises]. (C.N.N., c.1456-1467, 189).

 

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Prendre la querelle sur qqn. "S'en prendre à qqn" : LE TURC. Pour achever la presente entreprise A l'excercice de perilleuse guerre, Sur l'empereur la querelle avez prise ; Pour ce, pençons tous de courir sa terre. (LA VIGNE, S.M., 1496, 230).

 

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Prendre cest age. "Atteindre cet âge" : ...et ceulx sont bien eureux qui prennent cest aage. (JUV. URS., Verba, 1452, 333).

 

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Prendre une conclusion. "Décider qqc." : Et il, qui ne se peut plus tenir de executer la conclusion prinse entre son compaignon et luy, luy dist... (C.N.N., c.1456-1467, 239). ...fut prinse conclusion par eulx tous ensemble que chacune d'elles aroit habit de religieux (C.N.N., c.1456-1467, 373). ...celle conclusion prinse, le marchant alla a l'ostel (C.N.N., c.1456-1467, 380).

 

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Prendre un danger. "S'exposer à un danger" : L'EMPEREUR. Vella bien dit. Il n'aura dens sa main Aulcun baston pour sa vie deffendre. Mahon n'est poinct tant mon cousin germain Que je voulsisse pour luy ce dangier prandre. (LA VIGNE, S.M., 1496, 248).

 

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Prendre un état. "Adopter une condition" : ...[ils] luy dirent qu'il estoit temps qu'il se mariast (...). "Vous avez aussi, dirent ilz, desja XXIIIJ ans, si ne pourriez en meilleur eage prendre cest estat..." (C.N.N., c.1456-1467, 131). Or est il temps de me retraire ; Temps est il d'un aultre estat prandre, Qui a cestuy sera contraire. (LA VIGNE, S.M., 1496, 256).

 

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Prendre un autre pli. "Adopter une autre conduite" : LA MERE. Mais qu'aultrement vers vous il [saint Martin] ne mefface Et a noz dieux en rien ne se defface, Du demourant il est tout acomply. LE PERE. Que dictes vous ? Prent il ung aultre ply ? A il son cueur d'une aultre loy emply ? N'est pas Mahon son vray Dieu naturel ? (LA VIGNE, S.M., 1496, 142).

 

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Prendre un sort de qqc. "Se référer à qqc. pour imaginer le sort" : Item, dist Justin que la cause du sort qu'ilz prinrent du soleil levant et du hanissement du cheval, fut pour ce que les Persans adoroient le soleil (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 31).

 

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Prendre un train. "Se conduire d'une certaine façon" : LUCIFFER. Ce paillart, deshonneste, Coquin Martin, villain filz de putain, La cervelle de tous poincts me tempeste Pour ce qu'il prend ung tresterrible train. (LA VIGNE, S.M., 1496, 352).

 

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Prendre un voyage. "Entreprendre un voyage, une expédition" : Si prie le Roy à mesdiz seigneurs qu'ils ne veuillent croire ne penser que pour cause nulle autre que dessus est dicte, qui tant touche son honneur et bien, il ne prent celui voiage (ESCOUCHY, Chron. B., t.3, Pièces justif., 1442, 46).

 

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[Du faucon] Prendre ses perches. "Percher" : Faucons perchent en haus arbres de fous ou de chesnes et ne pranent mie leur perches dedans le bois (HENRI FERR., Modus et Ratio, Livre deduis T., c.1354-1377, 270).

 

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Prendre ses delits. "Trouver de l'agrément" : ...ce nous sera la plus convenable voye du monde pour prendre nos delictz et plaisances (C.N.N., c.1456-1467, 504). Deliberans en leurs cueurs et pensees Que des affaires en France pourpensees A leur povoyr en estre executeurs, Et tellement par armee dompteurs Que Lombardye et toutes les Ytalles, Les regions dictes orïentalles, Et autres lieux pour prendre leurs delitz, Cliner feroyent aux nobles fleurs de lis. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 138).

 

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Prendre de l'esbattement. "Trouver de l'agrément" : Tandis, veillez vous disposer D'aller jouer dessus l'erbecte, Au long de celle belle umbrete ; Prenez ung peu d'esbatement Soubz la ramee nouvellete, Vous promenant tout bellement. (LA VIGNE, S.M., 1496, 206).

 

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Prendre ses esbats à + inf. "S'occuper de" : Martin, mon filz, conte bien et rabats : A les servir fault prandre tes esbats Et pour tes dieulx fault que tu les provocque. (LA VIGNE, S.M., 1496, 145).

 

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Prendre sa plaisance en qqc. "Trouver plaisir à qqc." : SAINCT MARTIN. Je suis seur qu'en telle boubance Jamais Dieu ne vinct sur la terre Ne ne prist oncques sa plaisance En nulle precïeuse pierre. Dont nous vient cecy ? Trop tu erre : Dieu ne fut oncq si bien vestu, Veloux ne volut onc acquerre Ne couronne aussi ; qui es tu ? (LA VIGNE, S.M., 1496, 541).

 

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Prendre son chant / la chanson. "Se mettre à chanter, entreprendre son chant" : Dont pour l'amour de la loiielle, Que ma tres souverainne appielle, J'ai mon chant pris. (FROISS., Dits Débats F., 1363-1393, 135). ...tu es ung chanteur, Commence, prens la de bon ton. (Sots, c.1480-1500, 279). [Ou est-ce prendre le la "donner le la" ?]

 

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Prendre son régime. "Suivre sa course (?)" : Auprès de luy j'ay faict mectre Saturne De par lequel l'essence dyuturne Prent son regyme au zodïaque bas (LA VIGNE, S.M., 1496, 145).

 

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Prendre telle audace vers qqn. "Se comporter avec cette liberté envers qqn" : FRANCEQUIN. Humblement pardon vous demande De prandre vers vous telle audace. SAINCT MARTIN. Poinct n'en serez mys en l'amende ; Sus, a coup, prenez vostre place Devant moy ! (LA VIGNE, S.M., 1496, 203).

 

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Prendre tel goust à qqc. que : ...ayma tant la science de astrologie et les autres ars liberaux et print tel goust à sçavoir, qu'il assembla cinquante mil volumes de livres (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 58 v°).

 

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Prendre tel propos que. "Se mettre à soutenir que, soutenir que" : L'ygnorant gent prent tel propos, Duquel vrayement ne me los, C'un prince... (BOUVET, Appar. Meun A., 1398, 10).

 

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MUS. "Entamer, commencer" : CHANTRE. Or sus, messieurs, veillons donc prandre En bon ton le present office. LA TENEUR. Je veulx faire a Dieu sacriffice De ma voix a mode nouvelle. (LA VIGNE, S.M., 1496, 551).

 

c)

Prendre qqc. / qqn + à / en + subst.

 

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Prendre qqc. en dédain. "Se désintéresser de qqn" : De regenter lieu si haultain, Incertain, Sans vostre aÿde ne pourroye, Car j'ay trop pris l'estat mondain En desdain (LA VIGNE, S.M., 1496, 419).

 

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Prendre qqc. en gré. "Agréer qqc." : ...monseigneur d'Estampes (...) le deffrayoit, qui est une chose qu'il prend assez bien en gré. (C.N.N., c.1456-1467, 396). ...pourquoy, s'il y a quelque erreur ou negligence de grande investigacion, vous plaise à supporter mon imbescille science et prandre en gré seullement mon bon vouloir (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 1 v°). Et je n'ay nul mal, fors qu'alaigre Ne suis par ceste maladie Dont, s'elle m'est ung petit aigre, En gré prens, quoy que l'on me dye. (LA VIGNE, S.M., 1496, 567).

 

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Empl. abs. Prendre en gré. "Accepter" : C'est, dist il, ce que je vous puis maintenant donner ; prenez chacune en gré, je vous en prie. (C.N.N., c.1456-1467, 523).

 

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Prendre gré de qqc. : ...si n'eussions sceu de vray qu'il n'eust pas bien pleu a madamoiselle, encores y fussez vous. Et prenez en gré. (C.N.N., c.1456-1467, 189).

 

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Prendre qqc. en mémoire. "Fixer qqc. dans sa mémoire" : Donques, pour amour de ses vaillances, j'ay prins plaisir de veoir ou son corps gist, et de la lasme couchee sur lui prins en memoire les lectres entaillees (LA SALE, J.S., 1456, 309).

 

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Prendre qqc. en sa main, protection et sauvegarde. "Placer qqc. sous sa domination" : Et pour avoir plus grant reverence et honneur envers luy, aussi pour plus facillement le mouvoir a pitié et compassion, la pluspart d'icelles dames, bourgoises et autres femmes estoient nudz piedz et en dueil, et se misrent a genoulx, mains joinctes, en luy priant et suppliant tres humblement que son bon plaisir fust de prendre la dicte ville de Pise, ensemble hommes, femmes, enfans et tous leurs bien entierement en sa main, protection et saulvegarde. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 275).

 

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Prendre en fantaisie à qqn de + inf. "Avoir l'intention de, décider de" : LE ROY DE BARBARIE. Mes chevaliers, escoutez moy parler Et vous orrez ce qui m'est advenu. En fantasie m'est pris de m'en aller Pour aulcun cas en mon cueur survenu. (LA VIGNE, S.M., 1496, 249).

 

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Prendre qqc. sur soi. "Assumer la responsabilité de qqc." : Alors le seigneur de Loissellench dist : "Vous voiez mielz que moy mon honneur et ma honte : je les remetz en vos mains." Alors ilz dirent que sur eulz ilz le prenoient pour le tresgrant dengier ou ils le veoient (LA SALE, J.S., 1456, 157).

 

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Prendre qqn à despourvu : Car on les cuide prendre à despourveu (BUEIL, II, 1461-1466, 244).

 

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[Aux échecs] Prendre à descouvert : Mais ayes tousdis l'oeil ouvert, C'on ne te prende a descouvert (Echecs amour. K., c.1370-1380, 221).

 

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Prendre qqn à merci : Et je croy qu'il vous penra a mercy. (Veng. Nostre-Seign. F., t.1, c.1300-1400, 118).

 

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Prendre qqn en haine. "Se mettre à haïr qqn" : Cestui predist au roy qu'il seroit prins en hayne de ses vassaulx en celui an (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 143 r°).

 

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Prendre qqn en sauvegarde : Mais celuy n'a besoing de soy armer Que Dieu et Droit prendent en sauvegarde. (DU PRIER, Songe past. D.-M., c.1477-1508, 100).

 

2.

[D'une pers. (qui est le siège de qqc.)] "Entrer involontairement dans un état, entrer dans un état que l'on subit, auquel on se résigne ou que l'on accepte"

 

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Prendre estre. "Naître, exister" : ...Qui est ung cas enorme et nompareil, Car oncques d'ueil n'en fut veu le pareil Depuis le temps qu'omme prist a terre estre (LA VIGNE, V.N., p.1495, 137).

 

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Prendre mort. "Mourir" : ...car il print mort de cellui coup (ARRAS, c.1392-1393, 106). Est il si pres de prandre mort ? (Pass. Auv., 1477, 187). ...mon enfant (...) Qui prent piteuse Mort, ne se greuse (Pass. Auv., 1477, 211). [Jésus] La mort prent pour nous saulver tous (Pass. Auv., 1477, 218). Benoist Jhesus, tu t'es fait mien En prenent mort et passïon, Et a cel'heure m'as fait tien (Pass. Auv., 1477, 252). Puisque mort tu as volu prendre Pour moy et les aultres pecheurs, Je veulx desormais entreprandre De frequenter tes bons prescheurs (LA VIGNE, S.M., 1496, 152).

 

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Prendre la mort : Et si m'est un grant reconfort -- Et en deusse prendre la mort -- Que nul ne puet dire, " Il a tort De celle amer " (CHART., L. Dames, 1416, 205). ...il y print la mort. (FILLASTRE, Traité Conseil H., c.1472-1473, 203). Mais un gavelot qui courut soudainement par my son cousté le navra, si que il en print la mort. (BATALLIER, Lég. dorée D.-L., 1476, 827). [Var. ds VIGNAY, ms. BNF fr. 241, a.1348 : emprist]

 

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Prendre naissance. "Naître" : Se le fol par descongnoissance Fais ou lieu ou preis naiscence Afin que nulz ne t'aperçoive... (Mir. parr., 1356, 9).

 

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Prendre sa naissance. "Naître" : SAINCT MARTIN. (...) Mects dont mon cas en parfaicte croissance Affin qu'es cieulx en la parfin j'ascence, En l'absence Du faulx deable qui, nuyt et jour, m'ensence, Depuis le jour que je pris ma naissance Sur la terre. (LA VIGNE, S.M., 1496, 349).

 

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Prendre desplaisance / desconfort à qqc. : ...faictes, je vous requier, bonne chere, et vous monstrez joyeuse ; et ne prenez ne desplaisance ne tristece en ce que je vous veil declarer. (C.N.N., c.1456-1467, 561). Ce voyage, doncques, ne vous doit gueres ennuyer, et n'en prenez ja desconfort, car le retour en sera bref. (C.N.N., c.1456-1467, 561). A ce prophete, qui penitance Preschoit en vie virtüeuse, Elle prist si grant desplaisance (...) Que luy a fait coupper la teste. (Pass. Auv., 1477, 110).

 

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Prendre qqc. à desplaisance : ...toutesfoiz le [celoit] il a sa femme, doubtant qu'el ne le print a desplaisance. (C.N.N., c.1456-1467, 559).

 

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Prendre devotion de qqc. "Être saisi du désir de qqc." : ...[il] demanda a monseigneur si en son village avoit rien de beau pour aller courre l'aguillette, car la devocion luy en est prinse après ces bonnes cheres [Cont. érotique] (C.N.N., c.1456-1467, 75).

 

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Prendre indignation. "S'indigner" : Et se le Roy prent indignacion contre aucune persone de l'Eglyse, par la priere dez evesques, le mautalent et l'indignacion si est remisé et rapaisié. (Songe verg. S., t.1, 1378, 238).

 

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Prendre humilité. "Éprouver de l'humilité" : Par ceste consideracion prenoit saint Pol en soy humilité vraye et sans faintise, laquelle est reputee par les orguilleux comme une menconge. (GERS., P. Paul, a.1394, 504).

 

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Prendre patience. "Se résigner, accepter" : SAINCT MARTIN. Nul de vous ne se desespere ; Mes amys, prenez pascïence. Quelque chose qu'en moy appere, N'en ayez nulle desplaisance, Puisque c'est de Dieu la plaisance Que mourir au jour d'uy me faille, Pour avoir es cieulx mon aisance. (LA VIGNE, S.M., 1496, 570).

 

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Prendre patience de qqc. "Accepter de supporter qqc." : Je ne sçay ou mieulx loger, prenez en pacience ! (C.N.N., c.1456-1467, 243).

 

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Prendre la patience : ...il s'en fust bien passé, combien que pour obeir il fut content de prendre la pacience pour ceste nuyt. (C.N.N., c.1456-1467, 325).

 

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Prendre qqc. en patience : ...elles qui doivent obeir, le prindrent bien en pacience, sans dire mot (C.N.N., c.1456-1467, 203).

 

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Le prendre (de telle ou telle manière). "Accepter la chose (de telle ou telle manière)" : ...il troussa sa dame, et luy monstra le courroux qu'il avoit sur elle, laquelle le print paciemment. (C.N.N., c.1456-1467, 381). ...et nous semble bien voz raisons en aucunes choses avoir lieu et en aucunes que vous le prenez un peu chauldement. (BUEIL, II, 1461-1466, 230).

 

3.

[D'une chose (qui est le siège de qqc.)]

 

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Prendre commencement de. "Trouver son origine dans" : Toute multitude et compaignie, comme dist Saint Denis, se commence de unité et prend commencement de ce qui est ung. (Somme abr., c.1477-1481, 106).

 

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Prendre croissance. "Croître" : Item, le ciel ne puet crestre, quar tote chose qui prent cressance, c'est de chose conveniente qui vient dehors et est resolue en la matiere. (ORESME, C.M., c.1377, 82).

 

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Prendre effet. "Arriver" : Mes freres de vouloir parfaict, Notez bien ce que vous viens dire : Quelque chose prandra effect Que l'on ne pourroit contredire. (LA VIGNE, S.M., 1496, 557).

 

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Prendre fin. "Se terminer" : Mais quant nostre voyaige prendra fin... (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 130). ...que ceste feste prende fin a l'onneur et a la recongnoissance du Dieu Souverain (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 22).

 

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Prendre naissance. "Commencer" : Par quoy appert evidamment le trouble et le conflict d'icelle mortelle pestillence avoir prins naissance, origine et commencement d'une seulle personne (BUEIL, I, 1461-1466, 13). Les anciennes servitudes, ainsi que racomptent aucuns jurisconsulz, ont prins naissance et commencement par les batailles, victoires et triumphes des anciens guerroyers. (BUEIL, I, 1461-1466, 50).

 

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Prendre semblance à qqc. "Ressembler à qqc." : ...ce que j'ay fait par cy devant prenne semblance et comparaison aux oiselletz qui font leurs nidz (C.N.N., c.1456-1467, 557).

 

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Prendre son cours : ...si la maladie, par faulte d'ayde, peut prendre son cours comme el s'efforce, jamais homme a temps n'y viendra. (C.N.N., c.1456-1467, 140). ...il failloit que la maladie print son cours (MART. D'AUV., Arrêts Am. R., c.1460-1466, 176). Ainsi print la douleur son cours. (DU PRIER, Songe past. D.-M., c.1477-1508, 107).

 

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Prendre sa dénomination : Et selonc ceste rayson, la fin de tout le monde et tout le temps et la perfection qui contient infinité est pardurableté, et prent sa denominacion ou est ainsi dicte de ce qu'il est chose inmortelle et divine. (ORESME, C.M., c.1377, 162).

 

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Prendre son departement. "Trouver son départ" : ...ce penser prent son departement D'un vrai desir amoureus (FROISS., Orl., 1368, 94).

 

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Prendre sa source. "Trouver sa source" : C'en est la fonteine et la source, Dont les autres prennent leur source (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 134). Et combien que chascune sourse Par deux ruisseaulz prengne sa sourse... (COURCY, Chem. vaill. D., 1406, 76).

 

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Prendre le fond. "Aller au fond, couler" : Entre aucunes choses, escripvit la nature du figuier de Egipte, les branches ou bois duquel, gectées ès l'eaue, prennent le fons et ne nagent point sur l'eaue, comme autre bois (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 24 r°).

V. -

Part. passé en empl. adj.

A. -

[D'une pers.] "Surpris par qqc." : Ceste pouvre fille, autant prinse et esbahie que si a la mort fust adjugée, ne se vouloit accorder nullement qu'on la meist en fasson que son mal fust apperceu (C.N.N., c.1456-1467, 33). Elle ne savoit que respondre, tant estoit a celle heure prinse, soupprinse. (C.N.N., c.1456-1467, 239). Elle, qui estoit prinse et soupprinse, vit bien que le refus n'estoit pas de saison (C.N.N., c.1456-1467, 309).

B. -

Bien pris. "Bien fait" : ...Hommes bien pris, bien formez et fondez (LA VIGNE, V.N., p.1495, 211). DUC DE FALAIZE. (...) Regardez, est il droit, Bien pris, bien mys, de gracïeuse taille ! (LA VIGNE, S.M., 1496, 176).

C. -

[D'une fleur, d'une femelle] Prise. "Fécondée" : Et le fleur est tost anullee Ains qu'elle soit prinse et nouee (Dit prunier B., c.1330-1350, 41).

 

Rem. Plus ou moins confondu avec un autre mot : preinz de praegnas, FEW IX, 295b. Cf. note de l'éd. p.91-92.
 

DMF 2020 - Article revu en 2015 Robert Martin

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