C.N.R.S.
 
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     EMPRENDRE1          EMPRENDRE2     
FEW IV *imprehendere
EMPRENDRE, verbe
[T-L : emprendre ; GD : emprendre ; AND : emprendre1 ; DÉCT : emprendre ; FEW IV, 602a : *imprehendere]

A. -

[Idée d'entreprendre, de commencer]

 

1.

Emprendre qqc. "Entreprendre, engager, commencer qqc." : Je te di tout premierement Que, quant li homs nouvellement Entreprent l'amoureuse vie, Il couvient, quoy que nuls en die, Que Franche Volenté contreingne Son cuer, par quoy l'amer empreingne. Et quant Frans Voloirs l'a contreint, Trés Dous Pensers en li empreint Par sa force et par sa contrainte De ce qu'il vuet amer l'emprainte Qui le justice main et tart. (MACH., D. verg., a.1340, 34). Et quant tu empreïs l'amer, Tu te meïs enmi la mer Entre les perilleuses ondes Cornues et plates et rondes Qui se transportent en po d'eure, L'une au dessous, l'autre au desseure... (MACH., R. Fort., c.1341, 94). ...je vueil de vous congié prendre Pour les euvres aler emprendre Qu'ay divisé. (Mir. parr., 1356, 10). Sire, bien ay oy comment Le saint voiage avez empris, Dont je vous lo forment et pris, Si que à moy me conseilleray Et seur piés vous responderay. (MACH., P. Alex., p.1369, 28). Et s'empris ai plus grant labour Que dou porter n'ai la vigour, S'en pardonne je la folour Mon coer, quel fin ne quel retour Qu'en doie prendre (FROISS., Espin. amour. F., c.1369, 166). ...car celui qui tout creint et ne ose riens soustenir ne emprendre, il est fait par ce paoureus et couart. (ORESME, E.A., c.1370, 150). ...et que il yroient espier les pays et les fortereches et bonnes viles du royaume, et rapporteroient, à la Candeleur ensuïant et darrainement passée, tout ce qu'il aroient sceu et trouvé de l'estat et du fait qu'il avoient empris par devers ledit mesire Willaume, à Calais. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 388). Dame, dist Remondin, j'ay trouvé si bonne verité es commencemens de voz paroles que vous ne me saurez chose commander que nulz corps humains puisse raisonnablement emprendre, que je n'emprengne a vostre plesir. Remondin, dist la dame, par moy n'emprendrez vous chose de quoy vous ne doiez venir a bon chief. (ARRAS, c.1392-1393, 30). Ayés tousjours vostre propos En Jhesucrist, je le vous loz, Et faictes ce qu'avez emprins (Myst. st Adr. P., c.1450-1485, 138). ...si vous me voulez servir en une mienne queste que j'ay emprise (C.N.N., c.1456-1467, 172). Achevons ce qu'avons empris. (LA VIGNE, S.M., 1496, 346).

 

-

Emprendre une emprise : Prenez une dame de pris Qui ara de bon cuer empris Une si gracieuse emprise Qu'elle sera d'amer esprise Et vorra doucement amer, Amouresement, sans amer, Sans penser mal, sans villonnie... (MACH., Compl., 1340-1377, 267). ...Car se Hardement et Emprise Te font emprendre aucune emprise, Se tu en voes a bon chief traire Et toy garder de tout contraire, Si met Atemprance et Avis Ensamble, car il ont avis Plus grant que nuls des aultres n'aient (FROISS., Dits Débats F., 1363-1393, 108). Or vous ay je nommé son nom, Qui est et fu de grant renom, Et sera, s'il joit de s'emprise, Qu'il a à l'onneur Dieu emprise. (MACH., P. Alex., p.1369, 43). Celle haute emprisse de le garder emprist messires Jehans de Jeumont, et le rempara tantos (FROISS., Chron. R., XI, c.1375-1400, 113).

 

-

Emprendre la parole. "Commencer à parler" : Prudence a empris la parolle, Qui bien et sagement parolle En disant... (LA BUIGNE, Rom. deduis B., 1359-1377, 222).

 

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Inf. subst. "Entreprise, esprit d'entreprise" : Mais celui qui craint aucunes choses et, toutesvoies, il excede et superhabunde en oser ou en emprendre vers les choses terribles, il est appellé hardi ou trop hardi. (ORESME, E.A., c.1370, 208). Trop est personne aventureuse, Qui tel chemin ose entreprendre, Nonpourtant voit on que l'emprendre A fait maint monter au plus hault Et que souvent a plusieurs vault, Non obstant soit il merveilleux Et par la monter perilleux, Et que celle voye moult glice. (CHR. PIZ., M.F., I, 1400-1403, 115). ...tant de glorieuses matrones et gratieuses pucelles (...) ont, par force d'ame et hardy emprendre, conquis aureolles de merveilleuse valeur et de perpetuel honneur ! (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 84). ...de son hault emprendre [du chevalier] il en parvint en glorieuse fin, et de son valereux executer j'en ay tiré l'effect de ma desirance, dont jamais n'en sera heure que je ne soye son obligée, et que je ne labeure en ma pensée comment je lui polray satisfaire à son condigne dont. (LA MARCHE, Mém., IV, Pièces annexées, p.1468, 113). [Le duc Charles] ...qui les provinces voisines a merveilleusement resveilliét au son de ses buisines et a fait plus que le possible du très chevalereux art d'armes, voellant, par hardy emprendre, peser les quartiers occidus à sa ballant [var. peser le quartiers d'occident en sa ballance], est proprement equiparé à Justice, la royne des vertus. (MOLINET, Chron. D.J., t.1, 1474-1506, 27).

 

-

Empl. abs.

 

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"Entreprendre, concevoir un projet et agir en conséquence" : Oeuvre en osant et emprenant, seuffre en craingnant et en soustenant les choses terribles. (ORESME, E.A.C., c.1370, 207). Mais le fort, au contraire, en osant et emprenant et soustenant est tousjours de bonne esperance. (ORESME, E.A., c.1370, 209). La seconde joye si est quant la dame se sent richement abillee, comme dit est, et sceit bien que elle est belle, et si elle ne l'est, si le pense elle et le croit ainxin, et va a pleuseurs festes, assemblees et pelerinages. Et aucunesfois il ne plest pas au mary et, pour ce, emprent avecques sa cousine, sa commere et son cousin, qui a l'aventure ne lui est rien, mais elle a acoustumé ainxin dire (Quinze joies mar. R., c.1390-1410, 14). De moy je n'ay de quoy lui faire offerte ; Mon ignorance est à chascun aperte ; Fol d'en escrire et mains sage d'emprendre : Mon nom, mon bruit n'y puet avoir que perte, Car je n'ay pleume ne langue assez experte Pour me fourrer à si hault entreprendre (ROBERTET, Oeuvres Z., c.1450-1500, 106).

 

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Emprendre + compl. de manière. "Agir (de telle manière)" : Il semble a aucuns que fureur soit fortitude pour aucune similitude, car l'une et l'autre fait emprendre hardiement et soy exposer ou contenir impetueusement es perilz. (ORESME, E.A.C., c.1370, 214). Mais, quant est a la cité prendre, Couvient par trahison emprendre, Autrement ne l'auront ilz pas ! (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 137). [À propos d'usure] Et qui voeult, ou droit escript quiere ; Il dit en quelconque maniere : "D'un denier plus d'un denier prens ; Contre Dieu malement enprens." (Percef. III, R., t.2, c.1450 [c.1340], 41).

 

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Empl. pronom. à sens passif [D'une chose] "Commencer" : ...si s'ensuit doncques que toutes choses se doivent fonder sur raison et emprendre et encommencier de ceste raison qui est fille de Dieu ensuit prudence. (CHR. PIZ., Paix W., 1412-1413, 65).

 

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"Créer, instituer qqc." : Voyant le chief dont et ses freres D'humble et grant devotion Tenans ces termes et materes Et ayant grant affection A saint Andrieu benoit patron De l'ordre qu'avoient empris, La dame sans dilation Les mist en honneur et en pris. (TAILLEV., Songe thois. D., 1431, 81).

 

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Emprendre + inf. "Entreprendre de" : Pour acquerir honneur et pris, Ma dame servir ay empris Et entrepris Pour les biens dont chacun la prise (Rond. poés. XVe s. R., c.1400-1500, 128). Se le grand duc de Bourgoigne a empris A juste pris, vous reduire a raison Et que tres bien gardés vostre pourpris, Sans estre pris, ja n'arés los ne pris, Puisque repris soiés de desraison (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 61). ..."Sire, a vous m'envoye le Chevalier de l'Estang, lequel a empris garder et deffendre le Cerf Blanc a la Couronne d'Or ; s'il y a si hardy chevalier en voustre court qui se vueille venir esprouver et de se mectre a l'enqueste de trouver le serf et le chevalier, ilz le trouveront tout prest de combatre a touz ceulx qui y vouldront venir, pour deffendre le cerf a son povoir." (Charles de Hongrie C., c.1495-1498, 93).

 

-

Emprendre à + inf. "Entreprendre de, se mettre à" : NOSTRE DAME. (...) Car empris ont par grant estude A aler vous et moy requerre Si loing que la ou fine terre (Mir. enf. ress., 1353, 80). Quant il les vit, moult les prisa, Et l'ouvrage à faire empris a. (MACH., P. Alex., p.1369, 8). Et a cest propos dit Vegece que nul ne doubte emprendre a faire ce que il se confie avoir bien apris. (ORESME, E.A.C., c.1370, 212). Et se arresta tous quois devant lui et li dist : "Chandos, ossi vous desiroi je à encontrer. Depuis quant avés vous empris à porter ma devise ?" (FROISS., Chron. L., V, c.1375-1400, 28). Et nous tourne a grant mervelle celle dureté que vous avés empris a faire a vostre frere, nostre roi, et vostre serour, nostre roine, qant ce tant de petit hiretage que Dieus lor a donné, vous volés destruire. (FROISS., Chron. D., p.1400, 212). Et, se aucun me veult reprendre De ce que j'ay osé emprendre à translater ceste matière Je respons en ceste manière Que j'ay veu petit lévrier Courre plus tost que grant coursier (LA HAYE, P. peste, 1426, 164). Lors tirerent bonnes espees, puis se ferirent ou turpinoy ou ilz emprindrent a faire droittes mervelles d'armes les uns sur les autres (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 448). Car quant il emprist a delivrer Athaines des mains aux .XXX. tirans (...) ung de ces gens luy dist : ... (LA SALE, Sale D., 1451, 100). ...ayant si grand regret a son aultre mestier de navyeur qu'il luy sembloit plus aisié et legier a maintenir que celuy qu'il avoit si voluntiers emprins a gouverner. [Un négociant a renoncé à naviguer pour se marier] (C.N.N., c.1456-1467, 558).

 

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Emprendre de + inf. "Entreprendre de" : ...li contes de Hainnau (...) li remonstra le voiage que il avoit empris de faire, d'aler en Engleterre. (FROISS., Chron. D., p.1400, 363). L'autre dist, qui dormir vouloit Et a dormir avoit apris, Ne de devis ne lui chaloit Car de sommeil estoit espris : "Frere, se vous avez empris De veiller a voustre loysir, Les autres n'y sont pas compris." (CHART., D. Rev., a.1424, 307). O mort doloreuse, O Mort rigoureuse, Qui t'a fait emprendre De si tost saillir Pour moy ja tollir Et mon frere prendre (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 197). ...nostre bon clerc, voyant son maistre assez content de luy, emprint de parler (C.N.N., c.1456-1467, 93). ...ung prestre qui se nommoit messire Nicaise, lors chanoine dudit Braux, (...) trespassa en ung voyage qu'il avoit emprins de faire oultre les mons (Trés. Reth. L., t.3, 1473, 483). Cestui emprint selon les corps celestes de mesurer la mer et les profons gouffres, et trouva le plus parfont estre de XV stades en la haulte mer (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 67 r°).

 

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Empl. abs. : L'ÉPICIER à Nicodème. ...Je voy a vostre chiere active Que vostre besongne est hastive. Alez ou vous avez empris (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 358).

 

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S'emprendre de + inf. : Il li prioient affectueusement que de bonne volenté il se vausist emprendre d'avoir le gouvrenement de la ville et le fais des besongnes ens et hors. (FROISS., Chron. R., X, c.1375-1400, 85).

 

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Emprenant de qqc. "Prêt à entreprendre qqc." : Item, se par aventure il convenoit que l'en feist aucun homme bien grant, l'en doit garder que ce ne soit pas un qui soit selon ses meurs hardi et courageus. Car homme qui est de telz meurs est meismement envaïssant et emprenant de toutes actions ou besongnes. (ORESME, Pol. Arist. M., c.1372-1374, 250).

 

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Part. prés. en empl. adj. ou subst.

 

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Adj. "Entreprenant, qui prend l'initiative" : Et pour ce sont il au commencement impetueus et emprenans. (ORESME, E.A.C., c.1370, 209).

 

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Subst. : Item, les assaillans ou emprenans se reputent plus fors et doivent mieulx savoir ce que il ont a faire, et quant et comment, que les actendans ou deffendans (ORESME, E.A.C., c.1370, 206). De toutes choses s'entremet Dame Esperance et hault et bas, Les emprenans n'oublie pas, Si donne bon cuer aux hardis, Mais trop het les acouardis. (CHR. PIZ., M.F., I, 1400-1403, 93). ...et iceluy évesque de là en avant gouvernoit tout et manioit le fait de la justice et des finances comme homme bien actif en toutes choses et hardy enprenant. (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 332).

 

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Prov.

 

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Qui onques rien n'emprist, rien n'acheva : ...qui onques riens n'emprist, riens n'achieva. (FROISS., Chron. D., p.1400, 250).

 

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Toucher empris par vile arsure, par non toucher vient à sa cure. "Les tentations de la chair sont guéries par l'abstinence" : On puet dire par maniere de proverbe, que Toucher emprins par vile arsure Par non toucher vient a sa cure. (GERS., Déf., 1400, 243).

 

2.

En partic.

 

a)

"Entreprendre (une guerre, une expédition, un fait d'armes)" : ...s'il y avoit gherre qui honneur nous feroit, Emprendroit l'aventure, si qu'aventurez doit. (Flor. Rome W., c.1330-1400, 152). Et pour ce te vueil commander, Deprier, enjoindre et requerre, Que pais faces de ceste guerre Qu'empris as contre toy meësmes, Car c'est fole emprise et fols esmes. (MACH., R. Fort., c.1341, 75). Aussi est bien cil a reprendre, Quant veult contre aucun guerre emprendre, S'il n'est tellement sur sa garde Que tout premierement regarde Qu'il ait bon droit contre celui Qu'il veult faire son ennemi (LA BUIGNE, Rom. deduis B., 1359-1377, 198). Ceste [Espérance] conforte toute gent, Elle promet or et argent, Honneurs, estas et seigneuries, Faire fait les chevaleries, Sur les grans seigneurs les grans prises, Entreprendre les fors emprises, Qui a peu semblent impossibles, Et fait porter les fais penibles Legierement et a grant joye Et entreprendre longue voye, Et si fait chalengier les terres Aux seigneurs et emprendre guerres Et a chacun le mieulx promet. (CHR. PIZ., M.F., I, 1400-1403, 93). Le livre de chevalerie, Que Vegece fist, ne dit mie Que nul qui que soit doie emprendre Guerre, se trop ne veult mesprendre, S'il n'a bon tiltre de ce faire (LE PETIT, Champ d'or L., c.1388-1392, 82). Comme cault et malicïeux, Envoya dons moult precïeux Au consule, en moult grant priere Que "la guerre en nulle maniere Ne voulsist contre luy emprendre..." (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 268). ...les chevaliers de mon hostel maintenant se deportent d'emprenre les haulz fais d'armes (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 146). ...sy fu plus frez et vighereux que devant, dont son adversaire se perchut bien et congnut que trop estoit grant le dangier ou il se mist qu'il emprist contre ly bataille (Comte Artois, c.1453-1467, 56).

 

-

"Organiser (un tournoi)" : Ainsi comme ouy avés emprindrent le tournoy Galaphur et Passelion. (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 965).

 

-

Emprendre la Croix (merveille)/le voyage de la vermeille Croix. "Entreprendre une croisade" : ...li rois de France (...) avoit en imagination que d'enprendre la crois et aler au Saint Sepulcre et delivrer des mescreans (FROISS., Chron. D., p.1400, 190). Si pensoit a recouvrer son hiretage de la Sainte Terre par la poissance dou roi de France et des Crestiiens, puisque li voiages de la vermelle Crois seroit empris. (FROISS., Chron. D., p.1400, 240). Et la furent faites grandes predications et belles devant les rois et toutes touchans a la Crois vermelle emprendre. Et l'emprisent ou nom de Dieu et le jurerent et voerent a porter oultre mer en la Sainte Terre, en la capelle dou pape, li doi roi desus nonmé (FROISS., Chron. D., p.1400, 241).

 

-

Emprendre armes à qqn. "Décider de combattre contre qqn" : Le roy (...) le regarda en sousriant, comme esmerveillié en pensant que un si josne homme et de assez menue façon avoit cuer a si fortes armes emprendre a un si grant et puissant homme comme ce chevalier poulain estoit (LA SALE, J.S., 1456, 147).

 

-

Empl. abs. : Mon frere, si se fauldra sur ce adviser d'estre sur sa garde, que s'il [Geoffroy] avoit a faire, que on lui feust prez. Je ne lui sauray ja mal gré de cela, car puis qu'il se sent puissant de lui mesmes, et il est hardiz et emprent hardiement, ce n'est que bien, car chose hardiement entreprise et ensuye est a moitié faicte. (ARRAS, c.1392-1393, 283). Et pour ce que le bon prince (...) que pour ce Dieu le fait sy eureux que sa bonne renommee reluist par tout, et tant que les aultres princes et contes de l'empire, s'il emprend a peu de force et aucunes foiz a leurs requestes, pour estre bien gouvernez le requerront et semondront a la couronne de l'empire. (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 224). "Sire, ne vous desplaise se demandé ay la jouste, car belle amye ay qui m'en a donné le courage et hardement." "Puis que ainsi est, dist Passelyon, hardiement pouez emprendre, car tout sera achevé." (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 954).

 

b)

Emprendre le/tel chemin/erre/la voie. "Prendre la route, se mettre en route, prendre telle direction" : Mais nous vous volons demander En quel part aler vous devez, Ne quel chemin emprins avez (Renart contref. R.L., t.2, 1328-1342, 36). Si respondi assez briefment: "Sire, bien ai oy comment Vous avez empris ceste voie : Dieu la vous doint finer à joie !" (MACH., P. Alex., p.1369, 37). Diex, j'ay touz les membres roupz De cest erre que j'ay empris. (Mir. Oton, c.1370, 360). L'autrier nous feusmes des compaignons plusieurs Qui empreïsmes le chemin d'oultre mer (GARENC., Poésies N., 1390, 29). Or me convient tourner arriere, A vous raconter la maniere De l'edefice, sur la porte De ceulx qu'Esperance conforte Et dont elle est maistre portiere, Non obstant qu'avant et arriere Convoye trestous les montans, Qui s'i efforcent, en tous temps, Et que pour eulx elle labeure En tous les chemins, a toute heure, Et qu'es grans travaulx les convoye Et leur face emprendre la voye, Car, qui esperance n'aroit Ja nul ne s'en efforceroit (CHR. PIZ., M.F., I, 1400-1403, 122). En grant doulour ont mon cuer mis, Pour vostre mort, voz ennemis, Qui tant veoir vous desiroye Que j'en ay empris longue voye, Par le renom de vo proece, Qui de ce me mit en l'adrece (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 143). JASPAR, (un des rois mages). En mon cueur ay voulu emprendre Voye semblable comme vous Si suis mëu et mes gens tous Pour y venir hastivement. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 80). ...vostre hacquenée aussi est tant deffrayée que je n'oseroie pas bien emprendre le chemin sur elle. (C.N.N., c.1456-1467, 312). Monseigneur, si Dieu vous doint joye, Se me crez, la voye emprenrons Et de leur creance enquerrons Et, si ce qu'ilz dient est vroy, Quant a moy, je conseilleroy Que leur creance mous prenons. (DU PRIER, Roy Adv. M., 1455, 111). ...cestui marchand une fois s'en alla en ses affaires, et emprist un chemin dont jamais ne retourna, car fut meurdry piteusement et trouvé depuis (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 456). Or, est advenu que ledit messire Symon a esté longtemps fort malade d'une jambe, comme il est encores de present et tellement qu'il n'a peu empprandre le chemin (Doc. 1460. In : H. Stein, Bibl. Éc. Chartes 98, 1937, 311). Bien tost serons, se me semble, au millieu De la grant voye que nous avons empris (LA VIGNE, S.M., 1496, 170).

 

3.

Emprendre une façon d'être, une condition sociale, religieuse.... "S'engager (dans tel état)" : ...sachiez dès s'enfance Ceste condicion emprist Qu'a donner largement se prist (Mir. march. juif, c.1377, 180). En cel espoir me voeil dou tout offrir Au gré d'Amours et a son plaisir rendre, Car il m'a fait si noble estat emprendre Qu'il m'est avis que, quant je le recite, Que tout mi mal ne sont que grant merite, Car tant a grasce, honnour, löenge et pris Celle pour qui j'ai ce dittié empris Et qui de moi est tres souverainne, Que, se pour li reçoi griefté ne painne, A son plaisir y poet mettre aligance. (FROISS., Orl., 1368, 85). ...je suis contente d'emprandre l'estat de mariage, ou aultre tel qu'il vous plaira (C.N.N., c.1456-1467, 170). Et entre aultres qui devoient emprendre ce doulx et seur estat de mariage, et promectre en la main du prestre ce que pour rien ne vouldroient trespasser, il y avoit ung jeune homme et une jeune fille qui n'estoient pas des plus riches, mais bonne volunté avoient, qui estoient l'un près de l'autre, et n'attendoient fors que le curé les appellast pour espouser. (C.N.N., c.1456-1467, 338). Mes freres, volés vous empprendre Ceste sainte foy catholique ? (MOLINET, Myst. st Quentin C., c.1482, 51).

 

-

"Adopter, contracter (une habitude)" : Et li desplaisoit li usages que li rois avoit empris. (FROISS., Chron. L., I, c.1375-1400, 13).

 

-

"Affronter (un danger)" : Et avecques ce, ceuls qui ont ceste vertu de fortitude il emprennent vigueureusement et courageusement les perilz es quelz est tele vertu, ou la ou c'est bien de morir. (ORESME, E.A., c.1370, 206).

 

-

Emprendre sa mort. "Engager sa vie, risquer la mort" : ...qui s'i efforce Follie fait, sa mort emprent, Car, qui a ce faire se prent N'en emporte se la mort non, Et que maint chevalier de nom S'i sont essayez, par folour, Qui y sont mors, a grant doulour. (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 32).

 

-

[D'un sacremet] Estre empris. "Être célébré" : Et la fu empris li mariages dou jone conte Lois de Male, conte de Flandres, et de madamoiselle Isabiel d'Engleterre. (FROISS., Chron. D., p.1400, 804).

 

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Emprendre qqc. à qqn. "Faire s'engager qqn dans qqc., faire adopter qqc. à qqn" : Mes pour ce que il cremoit que les corages du peuple par pays et par ociouseté se habandonnassent a superfluités et a luxures, lesquelz le paour des anemis et la discipline de chevalerie et le labour des armez avoient jadis contenu et atrempé, il li sembla car en celle multitude, ignorant et rude, la creinte des dieux seroit souvereine et tres efficace remede qui bien la leur porroit emprendre et incuter. (BERS., I, 1, c.1354-1359, 19.4, 31).

B. -

P. ext. [Idée de décider, fixer, déterminer]

 

1.

"Décider qqc" : Comme il fut avisé et empris, il fut fait (CHASTELL., Chron. K., t.1, c.1456-1471, 228). Le roy Xerses, sans avoir aucun regard au conseil du philosophe, fist comme emprins l'avoit. Si lui advint tout ainsi comme Damascus lui avoit predit, car toute ceste grande et innumerable multitude, par deffaulte de providence et de gouvernement, fut vaincue (COLART MANS., Dial. créat. R., 1482, 144).

 

-

Emprendre de + inf. "Décider que" : -- Ceste dame, comme dit est, aiant emprins, pour quelconque occasion que ce fust, de jamais plus soy marier, et non obstant ce, elle aiant son cuer en diverses pensees, entre lesquelles par maintes fois se pensa qu'elle vouloit en ce monde faire d'aucun josne chevalier ou escuier un homme renommé, et en celle pensee s'arresta totalement. (LA SALE, J.S., 1456, 6).

 

2.

En partic. "Fixer (la date, le moment de qqc.)" : L'auctorité du roy Tarquin estoit ja mout grande entre lez barons latins, si a empris une journee et ordené que tous les princez du paÿs se adjoustassent en un certain lieu appelé le boyz de Ference afin de traiter des choses communez. (BERS., I, 1, c.1354-1359, 50.1, 83). ...et le jour venu du parlement par avant empris et accordé, fit le duc faire au roy et a ses princes ung grant soupper (JUV. URS., T. crest., c.1446, 86). Quant vint la nuit ordonnée et emprise, sur le premier somme, Pierre vint a la petite porte du jardin avec ses trois chevaux. (Belle Maguel. B., c.1400-1450, 49). ...lesquelz [coureurs] fraudeleusement et avant l'eure emprise se partirent, par quoy furent plus avant que par raison ne peussent. (LA SALE, Sale D., 1451, 101). ...lui fust force de composer et prendre jour à rendre la place, se au jour empris il ne fust secouru. (LA SALE, Reconf. De Fresne H., 1457, 7). Et la cause pourquoy si longuement on avoit mis à delivrer ledit de Compais, estoit pour une douleur de gravelle qui print ledit Anthoine, et dont à icelle heure n'estoit il bien guari, combien que le jour empris et baillé aux parties se tint et executa (LA MARCHE, Mém., I, c.1470, 328).

 

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Empl. impers. : Alors part, a piet ou monté a cheval, qui voldra ; car en gaige de battaille et de querelle, se il n'est emprins, face chascun le mieulx qu'il pourra. (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 222).
 

DMF 2020 - Synthèse Pierre Cromer

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