C.N.R.S.
 
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     EMPRENDRE1          EMPRENDRE2     
FEW IX 347b prehendere
EMPRENDRE, verbe
[T-L : emprendre ; GD : emprendre ; FEW IX, 347b : prehendere]

A. -

[Idée de prendre, de saisir]

 

1.

Emprendre qqn

 

a)

Au propre "Prendre, saisir"

 

-

Etre empris en qqc. "Être pris dans qqc." : FORTUNE. (...) Il sont en ma roe si emprins Que je leur ay, malgré qu'il ayent, Osté trestoutte leur francise (Bien avisé Mal avisé B., c.1487-1490 [1396], 256).

 

-

"Prendre, saisir, arrêter qqn" : Sy envoyèrent Gantois six-vingt hommes de leurs gens en la ville d'Aire pour prendre dame Ourse et l'amener devers eux ; mais comme son mari estoit de ceux de la Viefville, qui est un puissant lignage, il avoit semons en faveur de sa femme plusieurs de sa parenté, pour aucunement la garantir d'estre emprise. (CHASTELL., Chron. K., t.1, c.1456-1471, 343).

 

b)

Au fig.

 

-

Empris de qqc.

 

.

[Avec une valeur positive] "Qui a la passion de qqc." : Chevalier qu'est de bien empris Doit estre courtois et gentilz Et doit garder pris et noblesce. Purement se doit contenir. (DUPIN, Mélanc. L., c.1324-1340, 88).

 

.

[Avec une valeur négative] "Animé de qqc." : Emprins sont de malvais coraige Cilz qui brisent lour mariaige ; D'aultruy femme ont chasteé vouhee. Garde toy bien de tel outraige (DUPIN, Mélanc. L., c.1324-1340, 197).

 

-

Empris de + inf. "Désireux de" : Or sus, conpaignons de hault pris, Qui estes de mal faire emprins, Maintenant presnez le chemin Trestous, pour moy accompaignier Pour ces prisonniers enmesner Que l'empereur envoye querre (Myst. st Adr. P., c.1450-1485, 144). Quant je me voy en se noble pourpris, Resplendissant sur ceulx de ma semblance, Le cueur m'esmeut et suis formant empris De regenter en plus haulte excellence (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 12).

 

c)

Au fig.

 

-

Emprendre qqn. "Contrarier, agacer qqn" : Ainsi, chiere suer, comme j'ay dit devant que vous devez estre obeissant a cellui qui sera vostre mary, et que par bonne obeissance une preudefemme acquiert l'amour de son mary et, en la fin, a de lui ce qu'elle desire, aussi puis je dire que par desfault d'obeissance ou par haultesse se vous l'emprenez, vous destruisez vous et vostre mary et aussi vostre mesnaige. (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 73).

 

-

Emprendre en/sur qqn. "Intervenir contre qqn, attaquer qqn" : En son cuer Hardiesce maint, Son corps de valoir ne se faint, Car, s'aucun veult sus lui emprendre, Comme lion se veult deffendre (LA BUIGNE, Rom. deduis B., 1359-1377, 130). Par quoy ledit capitaine, esmu d'ire et de félonnie (...) commanda [à certains de ses hommes] d'aller en Avesnes (...) et aller devant justice demander pour quoy et comment les sergens et autres officyers avoient empris sur les gens du roy, en les voulant submettre à leur loy et ordonnance (CHASTELL., Chron. K., t.4, c.1456-1471, 104). ...qui est celuy au monde, fils de prince, voire povre gentilhomme en la maison de son père, qui après avoir autant atteint au vray son parent ou subgect, avoir empris en sa personne par sorceries, par sacrifices et invocations de l'ennemi ["diable"] pour mort et autres mauvaises fins, ne fust venu en faire ses doléances audit son père pour en avoir justice...? (CHASTELL., Chron. K., t.4, c.1456-1471, 323).

 

.

Emprendre l'un sur l'autre. "Empiéter (sur le domaine de l'autre)" : Et pour che chaschun membre tiegne son offise et ne emprendent pas l'un sur l'autre et fache chaschun che que il doit faire, c'est que la main ne parle, ne la bouche ne escoute, ne l'oeil ne prende pas l'office de la langue. (DAUDIN, De la erudition H., c.1360-1380, 248).

 

-

Emprendre sur qqn/qqc. "Empiéter sur qqn/qqc." : Certainement, respondy une matrone, cest article croy je bien, car Dieu n'emprent jamais sur le droit d'autrui et aprés il pardonne, le droit de partie sauf. (Ev. Quen., I, c.1466-1474, 101). Allons doncques de bon cueur a celle guerre, en laquelle n'a quelque suspicion ou de faire injure ou d'enprandre sur aultruy (VASQUE DE LUCÈNE, Cyropédie G.-G., 1470, 208).

 

2.

"Comprendre dans, placer (entre)"

 

-

"Placer (entre)" : Et sont les bancqs ordonnez par ordre, à l'encontre du passet, pour seoir les princes du sang, les ambassadeurs, les chevaliers de l'ordre et les grans pencionnaires par ordre ; et scet chascun où il doibt aler. Et derrière la chayere et le dos du duc sont empriz les escuiers du duc, c'est assavoir ceulx de la chambre, qu'en France on dit enfans d'honneur, qui aucunefois servent à l'estat d'eschanson, panetier et escuyer trenchant, quant le prince est en chambre à sa privauté (LA MARCHE, Mém., IV, Pièces annexées, 1474,,, 5).

 

-

[D'une chose] Estre empris dans qqc. "Être contenu, compris dans" : Ewangille sont quatre, k'on list en Sainte-Eglise ; Li vie Jhesu-Crist est par dedens emprise. (GILLES LE MUISIT, Poésies K., t.1, c.1347-1353, 246).

B. -

[Idée de prendre sur soi] Emprendre qqc.

 

1.

"Prendre sur soi, porter"

 

a)

Au propre

 

-

"Prendre sur soi, porter (une chose difficile à porter, au propre ou au figuré)" : ANNE. ...Mieulx vault de souffrir ung tel fol [Jésus] Que d'enprendre sur nostre col Ung fardeau qui n'est point portable (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 221). Confession, Contriction Et moy veulx prandre ; Polucion D'infection Ne veulx emprandre. Je veulx apprandre A bien comprandre Et laisser ma detraction Sans plus de peché me surprendre (LA VIGNE, S.M., 1496, 392).

 

-

"Emporter, emmener, entraîner" : ...prestement et comme par envoi de Dieu, commença un tel discord et desroy entre ceux qui l'avoient prise et desconfite, pour cause du butin et du gagnage de sa despouille, que furieusement tuans l'un l'autre, comme gens enragés, n'entendoient plus à la très-douloureuse desconfortée royne leur princesse, mais l'abandonnèrent, et fuyans, l'un ci, l'autre là, par impétueuse fureur, pour occir et estre occis, afin d'emprendre leur proie à part, l'un d'un costé, l'autre de l'autre, dont il en ensuivy mainte mort. (CHASTELL., Chron. K., t.4, c.1456-1471, 301).

 

-

"Accepter (une chose difficile)" : JÉSUS (à l'archange Michel). ...Ton benoist messaige m'efforce Et me donne vigueur et force De payer ce dangereux pris Que pour les humains ay empris. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 251).

 

b)

Au fig.

 

-

"Assumer qqc., se charger de qqc. (une charge, une fonction)" : Li gentils chevaliers s'escusoit par pluiseurs raisons, et ne voloit mies encores emprendre si grant fais que de la connestablie. (FROISS., Chron. R., IX, c.1375-1400, 233). Et entra en le cambre dou duch, et li requist moult aigrement que il volsist emprendre le fais des besongnes dou royaume et mettre y conseil. (FROISS., Chron. L., V, c.1375-1400, 96). Cil, au commandement et ordonnance du duc, emprist le soing et la charge de garder, et à ses perilz, les chastiaux. (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 172). ...pour le grant desir que j'ay pour deffendre ce royaume, je suis content d'emprendre ceste charge. (Percef. III, R., t.1, c.1450 [c.1340], 342). "...j'avoye besoing de ung tel capitaine comme vous estes, qui emprinstes la charge de conduire mes hommes et ma chevalerie en la deffaulte de moy a l'encontre des Rommains..." (Percef. III, R., t.2, c.1450 [c.1340], 195). Le roy cessa atant son testament. Peleus emprint la charge de gouverner le royaulme et de lors en avant se prinst a regenter la cité et Jason, qui par trait de tamps parvint en l'aage de dixhuit ans. (LEFÈVRE (R.), Hist. Jason P., c.1460, 127).

 

-

Emprendre qqc. en/sur soi. "Prendre sur soi, assumer (la responsabilité de qqc.), se charger de qqc." : LE MARQUIS [à Griseldis]. (...) tu cougnoiz sanz contredit Mes condicions et mes meurs, Et comment on doit les seigneurs Et dames ceans recevoir (...) Vueil que tu empregnes en toy Toute l'ordennance et la cure [de mon remariage] (Gris., 1395, 90). ...il emprint sus lui l'aventure et jura qu'il demourroit a la tombe celle nuit et sans compaignie (Percef. III, R., t.1, c.1450 [c.1340], 261). "Tarquin, se vostre voulenté est telle que vous dittes et que vous voeilliez empredre le champ sus vous, je resigneray la moitié de ma terre en voz mains." (Percef. III, R., t.2, c.1450 [c.1340], 258). Et vela pourquoy les pucelles n'ont au jour d'hui nulle fiance en leurs desirs fors en vostre aide, car oncques chevalier n'emprint sur lui sy haulte charge ne tant gentement achevee. (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 106).

 

2.

"Éprouver (tel sentiment)" : ...il fist tant devers messire Regnault d'Esconnevort que cilz emprist une petite haynne devers ledit chevalier à petite occoison (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 175).

 

-

Emprendre qqn en tel sentiment : Apriès, avint que li rois Phelippes emprist et acqueilla ce monsigneur Robert d'Artois en (...) grant hayne. (FROISS., Chron. L., I, c.1375-1400, 100). ...li rois Phelippes emprist et aquella ce messire Robert d'Artois en (...) grant haine en l'oqison d'un plait qui esmeus estoit en parlement a Paris (FROISS., Chron. D., p.1400, 196).

C. -

[Idée d'allumer, d'enflammer]

 

1.

Empl. trans.

 

-

[P. méton. de l'obj.] "Allumer qqc." : Lors commanda qu'on empreïst La fournaise et qu'on y feïst Le feu plus grant qu'on ne soloit Set fois, car einsi le voloit. (MACH., C. ami, 1357, 21).

 

-

[D'une émotion] "Causer des chaleurs à qqn, faire rougir qqn" : "Sire, dit la pucelle qui tant ot le corpz gens, Vuelliez a moy juer s'i vous vient a tallant !" Et quant Ollivier l'ot, trop grant honte l'enprant, Car ne sceit que c'estoit ; ne rien ne s'i antant. (Lion Bourges K.P.F., c.1350, 778).

 

-

[D'un organisme] Empris d'un mal. "Rongé (par une maladie)" : Elais, dit Florantine, li mien corpz est faillis, De teille mallaidie enbrasee et enpris, Se j'estoie avuec vous ung poc, se seroit parraidis ! (Lion Bourges K.P.F., c.1350, 305).

 

-

Au fig. [D'une chose abstr.] "Enflammer qqn" : Engin ne comprent Ta vertu ne prent, Tant par est feconde ; Cellui qu'elle emprend, Ame ne sourprend Tant le garde munde. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 440).

 

2.

Empl. intrans. ou pronom. "S'enflammer" : Si getta [l'ange] le brandon dautre [l. d'autre] part, dont layr [l. l'ayr] dentour [l. d'entour] semprist [l. s'emprist] et ardit comme on en pouoit ouyr le bruit (MIÉLOT, Mir. N.D. W., 1456, 55).

 

-

[Dans le langage amoureux]

 

.

[Du coeur] : Quant les dames sont a loisir Et chascune dit son plaisir Des bachilers, des juenes gens La maniere du contenir, Et de l'aler et du venir, Le cuert leur eschaufe et emprent. (DUPIN, Mélanc. L., c.1324-1340, 153). Quant la pucelle ouÿ l'escuier en present Qui du gentilz Florent telz nouvelles reprent, Amours l'embrase sy que tout son cueur emprent. (Flor. Octav. L., t.1, c.1356, 136).

 

.

Estre empris de qqn. "Être enflammé d'amour pour qqn" : ...Car amour en ce point la print et la saisy Si que droit dans le cueur la frappa et fery, Quant l'enfant v(e)oit si bel, tout le cueur ly fremy, La en fut si enprinse du damoiseau joly Que volentiers le v(e)oit la belle davant ly (Flor. Octav. L., t.1, c.1356, 216).

 

.

[D'une pers.] Estre empris de qqc. "Être enflammé (ici d'ardeur amoureuse)" : Vous diz que loyaument fait ceste questïon Coume chilz qui est empris de l'amoureulx brandon, D'Amours par qui maint cuers sont en subgjectïon. (Les enfances Garin de Monglane, 1400, 55).

REM. On a groupé sous emprendre1 ce qui correspond à emprise "entreprise", sous emprendre2 tout ce qui correspond à prendre. Parfois emprendre est mis par agglutination pour en prendre : : Dist Melyador : "Ne me caille Qu vous soiiés, sachiés de voir ; Mais faire vodrai mon devoir Enviers vous, comment qu'il m'emprende [l. en prende "de quelque façon que tournent les choses pour moi"]..." (FROISS., Méliad. L., t.1, 1373-1388, 114). Si eurent moult de povretez tout les plus grans seigneurs qui y furent (...) si comme vous recordray comment il leur emprist [var. comment il leur en prist "comment les choses tournèrent pour eux"]. (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 85).
 

DMF 2020 - MAJ 2020 Pierre Cromer

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