C.N.R.S.
 
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     TRACE1          TRACE2     
FEW XIII-2 *tractiare
TRACE, subst. fém.
[T-L : trace ; GD : trace ; GDC : trace ; DÉCT : trace ; FEW XIII-2, 144b : *tractiare ; TLF : XVI, 433a : trace]

A. -

"Marque, empreinte laissée par qqn ou qqc."

 

1.

"Marque laissée par le passage (d'une pers., d'une troupe, d'un animal), trace" : ...puis, comme il eussent passé la cloison et troveez toutez chosez desertez, il commencierent a suir les ennemis par les traces que il virent. (BERS., I, 9, c.1354-1359, 45.16, 86). Les aultres en alant cuident de leur robe torner la terre et, a maniere des renars, ceuvrent les traches ou ilz ont marchié de leur ceue (DAUDIN, De la erudition H., c.1360-1380, 248). Qant casquns ot pris pieche de terre pour logier, li signeur se traissent ensamble pour avoir consel conment ils se poroient maintenir ne trouver la trace des Escos, lesquels il desiroient au veoir et a combatre. (FROISS., Chron. D., p.1400, 130). ...il lor fu avis que temprement il averoient nouvelles des Escos, car il convenoit que il fuissent passet par la ; et en trouvoient les traces. (FROISS., Chron. D., p.1400, 130). Mais, quant nous fusmes oultre, il print une espine et ung grant raymeau et le traigna par dessus nostre trace, si que oncques n'y parut (BUEIL, I, 1461-1466, 34).

 

-

Perdre la trace de : Mais le porc tourne et se met au cours par telle maniere qu'il n'y ot chien ne chevalier ne homme qui n'en perdist la trace et veue, fors que le conte et son nepveu Remondin... (ARRAS, c.1392-1393, 19).

 

-

Suivre la trace de : Mais en ce meisme jour, sur le vespre, le seigneur de Gaucourt, qui estoit demouré derrière, fut prins de environ dix-huit Anglois qui sievoient leur trace. (MONSTRELET, Chron. D.-A., t.5, c.1444-1453, 420).

 

-

Suivre à (la) trace : Las ! dolens ! c'est ce qui efface En moy d'esperence la grace ; C'est ce qui a la mort me chace Et fait penser Qu'ensement comme uns chiens de chace Après sa beste fuit et chace Et la sieut partout a la trace Pour li tuer, Einsi Desirs de saouler Mes fols yeus d'assez remirer De la bele et bonne sans per La douce face Me berse et chasse sans cesser Et me cuide a la mort mener. (MACH., R. Fort., c.1341, 51). PREMIER SERGENT. Puis que c'est pour quoy cy venez, Alez ; nous vous suivrons a trace. (Mir. st Ign., 1366, 79). Sus les champs y font la grimasse (...) On les peut bien suyvre a la trasse De leur sang qu'ilz ont respanduz. (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 345).

 

.

Suivre qqn qu'à trace qu'à vue. "Suivre qqn tantôt à vue, tantôt en se fiant à ses traces" : Mais Remondin (...) le suit asprement [le sanglier], et il estoit bien montez, et tousjours le suit le conte qu'a trace qu'a veue. (ARRAS, c.1392-1393, 19).

 

-

À trace. "À la suite de, derrière" : Car trois grans loups en la cité Entrerent et enmy la place De la ville, trainant a trace, Alerent (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 209).

 

-

CHASSE : Ensement le sievra que li quiens le sengler Flairant de traiche en trache. (Jourd. Blaye alex. M., a.1455, 643).

 

Rem. HENRI FERR., Modus et Ratio T., c.1354-1377, gloss.

 

.

Beste à trace. "Bête traquée à courre" : LE PREMIER VENEUR. (...) or vouldroie Que par cy venist beste a trasse, Si que mes chiens aler laissasse Pour courre aprés. (Mir. st J. Paulu, c.1372, 101).

 

.

Chien de trace. "Chien courant" : Nous vous faisons conmandement, Seigneurs, que voz roiz, voz levriers Voz chiens de trace et voz lemiers Menez au bois tost sanz laissier [l. laissier.] Il nous convient aler chacier (Mir. st J. Paulu, c.1372, 100).

 

2.

"Marque laissée par qqc." : Bien vous sarai connoistre, car vous estes saigniés D'une trache de sang qui va jusques au piés (Renaut Mont. B.N. V., c.1350-1400, 514). Puis se meïrent en bataille ; Chascuns l'espée qui bien taille Tenoit en sa main toute nue. Adonc n'i ot resne tenue, Tant qu'il veinrent en la place Où de sanc avoit mainte trace, Puis crierent : "à mort ! à mort ! Mauvaise gent, vous estes mort !" (MACH., P. Alex., p.1369, 77). Lors dist Gieffroy au maistre de Rodes qu'il conduisist l'avant garde et qu'il boutast le feu par tout, par quoy il les peust retrouver par la trace de la fumee. (ARRAS, c.1392-1393, 225).

 

-

La trace d'un chemin : Aultre chose ne ramenoient-ilz en leur fort, car ilz ne peurent pour les estroittes montaingnes et divers passages où ilz passoient (...). Et, quant ilz estoient rentré en la trace de leur chemin, qui bien duroit troix lieues, ilz estoient aussy asseur que dont qu'ilz fussent dedens leur garnison. (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 191).

 

-

"Odeur qui subsiste" : A fy ! l'ung de vous a vecy, Ou c'est moy, j'en sens la trace. (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 210).

 

3.

"Ce qui reste d'une action, de ce que qqn fait, marque" : Souvent regardoit son anel Et moult tenoit le don a bel, De fois a autre le baisoit Et a son coutel assaioit, Qui moult estoit de dur affaire, S'il y poroit le trache faire Ainsi que ly dyamant font Par dedens le fier quant vray sont (Dit prunier B., c.1330-1350, 66). ...Dont cinc cent mil hommes et femmes Perdirent les corps et les ames, Se cils qui a tous biens s'acorde Ne les prent a misericorde ; Et maint païs destruit en furent, Dont encor les traces en durent (MACH., J. R. Nav., 1349, 144). Li quars qui en milieu estoit Angles de Dieu le pere estoit, Qu'envoié avoit et tramis Pour reconforter ses amis. N'il ne paroit coulour ne trace En la fournaise n'en la place Dou feu, car il estoit estains Qui si mervilleus estoit ains. (MACH., C. ami, 1357, 23). Mais garde le contremander, Car li contremant dou roiaume Ont fait ardoir maint toit de chaume, Dont encor apperent les traces En mains lieus et en maintes places. (MACH., C. ami, 1357, 110). Des fais duquel ne fault pas demander, car ou qu'il voist ne viengne appert bien la sienne trace : s'il fiert aulcun de lance il faut qu'il voist a terre et se c'est d'espee, encores pis (Jehan d'Avennes F., c.1465-1468, 95). Le Messïas es de la loy, Des Juïfz roy. Dieu t'a tramis en ceste place ; Tu es son filz ; j'en voy la trasse A ta face, Venu des cieulx pour tous saulver. (Pass. Auv., 1477, 131).

 

-

"Blessure, plaie" : Mais le fer ardant de la flesche Qui le cuer toudis art et seche, Saches certeinnement qu'il art Et bruïst par si soutil art Qu'il n'i pert tache ne arsure, Trace, plaie, ne blesseüre, Et einsi se keuve et engendre Com li charbons dessous la cendre. (MACH., R. Fort., c.1341, 69). ...ou que la mere a esté blecee en la bouche de la matrice par dehors et y a une trache et une duresse (GORDON, Prat., c.1450-1500, VII, 16).

 

-

DRAP. "Claire-voie dans la chaîne d'un tissu, provoquée par un un fil non renoué au moment de la fabrication" : ...doivent li peseur rewarder tous les dras et couvretures a pierche bien et loyalment, et vir s'il i a trache, double, rebat ne gieters encontre, plus d'un quartier de lonc. (Drap. Valenc. E., 1344, 286).

 

Rem. Cf. G. de Poerck, La Drap. médiév. en Flandre et en Artois, t.2, 1951, 206.

B. -

P. anal.

 

1.

"Quantité très faible d'une substance qui demeure qq. part" : Tantost aprés, maulgré leur resistence, Si bien ne sceurent eulx conduire en deffence, Car assiegez estoient tout autour, Que par la bresche d'une moult forte tour, La ou avoit quelque trace de sang, Qu'on n'y entrast soudain de ranc en ranc, A si horrible et dure inimitié, Que c'estoit trop execrable pitié (LA VIGNE, V.N., p.1495, 244).

 

Rem. Ex.1377 ds TLF.

 

2.

"Indice de qqc."

 

a)

"Indice qui permet de reconnaître qqc." : Lors Serche, quiert trace et partout va, Et fait tant que les clefs trouva (COUDRETTE, Mélus. R., c.1401-1402, 279).

 

b)

"Indice de la présence de qqn ou de qqc." : Quelle doleur a nous se ainsi nous volons decliner a repoz comme s'il fust ja paix et seurté, combien que encore ne appere trace de vraie sainteté en nostre conversacion (Internele consol. P., 1447, 337).

 

-

[Dans une phrase négative] : Vous partirez de ceste place, Tant du pont, du chasteau et tour : D'Anglois n'y en demorra trace (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 630).

 

-

Plus trace de + subst. "Plus aucun" : Nous avons guangné ceste place Qui estoit pour ung petit lieu Fortiffiee par grant odasse. Si veil que on la detarasse Sans y lesser riens que la terre, Afin que desormais plus trasse D'Anglois n'y puisse rien conquerre. (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 594).

C. -

Au fig.

 

1.

"Exemple à suivre ; p. ext. façon de se conduire"

 

a)

"Exemple, modèle" : LE PERE. (...) Mon chier enffant, je te supplie, ensuys La voye et trace De moy, ton pere, et de ceulx de ta race. S'ainsi le faiz, pence que sera ce De toy, apprés. Mahon t'en doinct la grace Et le vouloir, Car grant honneur t'en pourra revaloir ! (LA VIGNE, S.M., 1496, 164).

 

-

Suivre/ensuivre la trace/les traces de qqn. "Suivre l'exemple de qqn" : ...et, suivant les traces de ceulz et de celles qui estoient devant selon la foiblesce feminine, elle donna a ceulz de son païs pour duc un homme tres noble en armes et en pitié (FOUL., Policrat., IV, 1372, 78). De beaulz enfens a eus, pluseurs filz et filles, des quelz sanz plus .II. belles et bonnes dames sont en vie, l'une contesse de Savoye, l'autre mariée au premier né filz du duc de Bourbon, à present conte de Clermont, laquelle est dame de grant devocion et bonté, suivant la trace de sa bonne mere (CHR. PIZ., Faits meurs Ch. V, S., I, 1404, 144). Or est il ainsi, et n'est nulle doubte, que il convient que tout cuer qui bien aime Dieu le demonstre par oeuvre, si comme il meismes dit en l'Euvangile : Les oveilles qui sont de mon parc m'aiment et je les garde, c'est a dire que les creatures qui l'aiment suivent ses traces, qui sont de vertu, et il les garde de tous perilz. (CHR. PIZ., Trois vertus W.H., c.1405, 11). LAZARUS. (...) Quant hors en suis [de l'enfer], je t'an randz graces, Des cy toujours suyvray tes traces. Bien te doix louer et servir Pour ta grant amour desservir (Pass. Semur D.M., c.1420 [1488], 146). ...car de la maison de Lalaing sont issus maints bons chevaliers et escuyers, desquels nous et nos ancestres avons esté bien servis, et je crois que celuy qui vous doit venir servir, ne forlignera point, mais suivra la trace de ceux dont il est issu (Faits Lalaing K., c.1470, 13). C'est l'aultre bien qu'après je te poursuis Et s'une fois ce degré aconsuys, Mon chier enffant, je te supplie, ensuys La voye et trace De moy, ton pere, et de ceulx de ta race. (LA VIGNE, S.M., 1496, 164).

 

-

Fuir la trace de qqc. "Éviter l'exemple de qqc." : Et pour ce que suivre la voye de ceste vertu pour sa noblesse, et fuir la trace de mençonge pour sa grant vilté et lait non est chose propre plus à prince qu'à quelconques autre homme (CHR. PIZ., Paix W., 1412-1413, 162).

 

-

Maintenir la trace de qqc. "Maintenir l'exemple de qqc." : Dieu part sa grace A tous nous aultres qui maintenons la trace De ces vertus (MESCHIN., Lun. princes M.-G., c.1461-1465, 91).

 

b)

P. ext. "Façon de se conduire, d'agir, conduite, mode d'action" : Les condicions et la trace De maint, qui y sont, ay compté (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 79). M'ame est entré en la trasse Qui me casse ; Pour quoy a toy me complains. (Myst. st Bern. Menth. L., c.1450, 35). Nous prierons Dieu devotemant Qu'il nous doint par sa digne grace Avoir si bom advisemant Que de pechié fuyons la trasse (Myst. st Sébast. M., c.1450-1500, 14). SATHAN [aux diables]. (...) Pour les agraver [le juif et le chrétien], Fainctes eslever Et me preserver, Monstres, espouentables faces, Pour vous abruver, Venez approuver Icy voz tirannicques traces ! (Mir. st Nic. juif, c.1480-1500, 123).

 

2.

"Ce qui reste de qqc. (d'une chose abstr.), conséquence perceptible de qqc." : ...N'il ne voloient pas avoir Merci par scens, ne par avoir, Par jousteries, par karoles (...), Ne par leur dames anoier De requerir et de proier, Einsois les voloient servir, Tant qu'il peüssent deservir, Sans plus, qu'il eüssent leur grace, Et que partout alast la trace De leur valour, de leur bonté, De leur pris, de leur loyalté, Ne nulle merci ne voloient Recevoir, s'il ne le valoient. (MACH., D. Lyon, 1342, 211). Qant messires Robiers d'Artois se vei ensi aquelliés dou roi Phelippe et de la roine, et que a la priiere dou duch de Braibant, dou conte de Hainnau et dou conte de Blois, il ne pooit venir a paix, et estoient sa fenme et si enfant enprisonné, il li deubt tenir et tourner a grant desplaisance, car encores n'avoit il de quoi vivre, se li signeur ne li aidoient. Si s'avisa, puisque ensi estoit, il honniroit tout et meteroit tel tourble et descort en France que les traces i demorroient .CC. ans a venir. (FROISS., Chron. D., p.1400, 198). En Ytalie, en mainte place, De son renom en est la trace (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 41). Certainement vertu qui vient du ciel, ou habitent les choses pardurables, retient la trace et la semblance du lieu de sa nativité (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 46).

 

Rem. FOUL., Policrat. B., V, 1372, gloss.

 

-

De fraische trace. "Sans attendre les conséquences, tout de suite" : ...et sans barguegnier les assault de fresce trace (Cligès C.T., 1455, 121).

 

Rem. Erec C.T., c.1450-1500, gloss.
 

DMF 2020 - Synthèse Robert Martin

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