C.N.R.S.
 
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     MOURIR     
FEW VI-3 mori
MOURIR, verbe
[T-L : morir ; GD : morir ; GDC : morir ; AND : morir1 ; DÉCT : morir ; FEW VI-3, 132a : mori ; TLF : XI, 1154b : mourir]

I. -

Au propre "Passer de vie à trépas, faire passer de vie à trépas"

A. -

[Processus identique pour tous les vivants, dans ses conséquences physiologiques] : Sans laquelle pensee nulz ne peut estre a paix de corage, comme certainement faille morir et ne scet on en quel temps. (DAUDIN, De la erudition H., c.1360-1380, 303). LE QUINT CHEVALIER. (...) la mort Qui nul ne nulle ne deporte, N'a nul age ne se rapporte : Morir fault et ne scet on quant. (Gris., 1395, 12). De riens ne servent plours ne plains : Tous mourrons, ou tart ou briefment (CH. D'ORLÉANS, Ball. C., c.1415-1457, 96). Puis que tous sont faiz pour morir Le remede n'y est loisible : Humanité de mort passible, Peut parfois la mort retarder, Maiz de morir non se garder. (MICHAULT, Danse aveugles F., 1464, 136). ...Et sçay que ceste vie mondaine Est fainte, deceptive et vaine, Faisans cent mille gens perir ; Qui plus y est plus a de peine, Et sy fault une foys mourir. (Amant cord. M., 1490, 9).

 

-

Prov. Les fils d'Adam faut tous mourir : LE MORT (à l'empereur). Vous ne povez plus seignorir. J'enmainne tout, c'est ma maniere, Les filz Adam fault tous mourir. (Danse macabre femmes H., p.1480, 17).

B. -

[Différences dans l'interprétation, dans la manière de mourir, dans les sentiments qu'on éprouve devant la mort...]

 

1.

[Dans l'interprétation (essentiellement d'un point de vue religieux, en ce qui concerne la survie, les rites...)]

 

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[Du corps/de l'âme] (Se) mourir : ...Mes l'ame ne se puet mourir Pour riens qui lui puisse avenir. (Liber Fort. G., 1346, 160). Autres courent, dont l'un parvient, Par la droicte voie qu'il tient, Sanz flechir a destre ou senestre, Au droit lieu de l'ostel celestre, Ou jardin vray et delectable Duquel le fruit est proufitable Pour l'ame repaistre et nourrir, Qui ne pourra jamais mourir (DESCH., M.M., c.1385-1403, 235). ...Si le corps meurt, en paradis va s'arme. (LA VIGNE, Ress. chrest. B., 1494, 119).

 

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Bien mourir/mourir en Dieu/mourir chrestiennement. "Mourir après avoir vécu de façon à mériter le ciel" : Et pour ce dit bien la Sainte Escripture : Beneurez sont les mors qui muirent en Nostre-Seigneur (CHR. PIZ., P.V.H., 1416-1418, 41). ...à propos des bien mourans, et contre ceulx qui les pleurent, dit un aucteur que plus digne est le jour de la mort de creature humaine qui bien muert que le jour de la naissance, et plus est esjoïssable, car, dist-il, l'ome est nez en pechié, et perdus seroit, se sans la regeneracion et lavement du baptesme mouroit. (CHR. PIZ., P.V.H., 1416-1418, 41). ...ceulx qui crestiennement muirent en vraye foy comme catholiques confes, s'ilz ont espace, ou à tout le moins vrais repentans d'entencion, et desir de faire satisfacion s'ilz povoient (...), sont à sauveté et hors le peril de dampnacion, quelque pecheurs que aient esté. (CHR. PIZ., P.V.H., 1416-1418, 41). Ta vie fut establie pour deservir a bien mourir, et ta mort bien ordonee pour entree de mieulx vivre. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 100).

 

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Vivre après mourir : Dispose doncquez ta vie autrement que lez payens, et t'apareille a vivre aprés mourir (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 100).

 

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Mourir damné : Lisent et relisent souvent, chercent et estudient es fables du livre de Charmych, que ilz ont compillé a bourdes contre lez crestiens, neantmoins en lisant se treuveront vivre meschans, et mourir dampnés, se par humilité de pensee ilz ne retournent a congnoistre la vraye esperance, et gouster le sens espirituel de la lettre plus que le charnel. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 109).

 

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Mourir espirituellement. "Être excommunié" : Et certes, qui n'obeït au decret et a la sentence du juge doit morir naturelement ou civilement, selon la nature du cas. Et aussi, qui n'obeïst au commandement du prestre doit morir espirituelment. (Songe verg. S., t.1, 1378, 188).

 

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Mourir à soi-mesme. "Renoncer à trop s'aimer soi-même" : Saches pour certain qu'il te convient mener la vie des mourans, et com plus aucun meurt a soy mesmes tant plus il commence vivre a Jhesucrist. (Internele consol. P., 1447, 51). Mais peu sont qui labeurent morir a eulz mesmes (Internele consol. P., 1447, 235).

 

-

Mourir en grace : ...te plaise au fort vouloir adjouster foy à la Sainte Escripture et à ce que les glorieux dotteurs et maints sages atteurs ont dit, tant d'avoir pacience es choses adverses, que Fortune livre par diverses aventures, comme de la gloire et beneurté de ceulx qui meurent en grace (CHR. PIZ., P.V.H., 1416-1418, 19).

 

2.

[Dans la manière de mourir]

 

a)

[De mort naturelle] : Je vous prie que vous leur alez dire de par moy que il leur plaise a moy venir veoir avant que je muire, car j'ay grant voulenté d'eulx satisfaire a mon povoir de l'onneur et de la courtoisie qu'ilz m'ont faicte (ARRAS, c.1392-1393, 115). Cil roy, dont je vous dy, n'ot oncques puis joye au cuer, et regna grant temps, mais de jour en jour fondoit et decheoit en pluseurs manieres et en fin il mouru. (ARRAS, c.1392-1393, 306). ...se il a enffans de ma fille et ma fille meurt (...) il (...) se remariera secondement (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 147). ...mon plus grant regret si est qu'il fault que je meure avant que savoir et sentir des biens de ce monde. (C.N.N., c.1456-1467, 347).

 

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Mourir naturellement : Las ! Mon amy, se tu ne m'eusses faussee, je estoye gettee et exemptee de paine et de tourment, et eusse vescu le cours naturel comme femme naturelle, et feusse morte naturelement, et eu tous mes sacremens, et eusse esté ensevelie et enterree en l'eglise de Nostre Dame de Lusegnen, et eust on fait mon unniversaire bien et deuement. (ARRAS, c.1392-1393, 256).

 

-

[De maladie] : ...maiz quant il leur vient aucune maladie cronique, ilz meurent souvent en icelles. (SAINT-GILLE, A.Y., 1362-1365, 63). Les dissoulz en vertu, qui encore ne sont pas mors et a qui l'escume vient a la bouche pour cause d'estrenglement, ne reviennent point a santé maiz meurent. (SAINT-GILLE, A.Y., 1362-1365, 63). Tous ceulx qui sont splenetiques, et avec ce ont dissintere, se la dissintere leur sourvient cronique, en telz corps vient ydropisye ou lientere, et tel corps meurt tantost. (SAINT-GILLE, A.Y., 1362-1365, 94). Quiconques seuffre spantillon ou cervel se meurt en trois jours (SAINT-GILLE, A.Y., 1362-1365, 101). Et, combien qu'il soit évident Que chascun homme, résident En terre où court épidémie, Soit en grant péril de sa vie Pour l'air infect qu'il fault attraire, Toutesfoiz n'est pas nécessaire Que tous ceulx de celle partie Meurent de celle maladie (LA HAYE, P. peste, 1426, 59).

 

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Mourir d'enfant. "Mourir en accouchant" : ...le XXe jour d'apvril, l'an dessus dit, trespassait de cestuit monde dame Mairiatte (...) laquel fuit morte d'enffant, tellement qu'il la fallit ovrir bien piteusement. (AUBRION, Journal L., 1466, 16).

 

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Mourir de + compl. de cause : Si comme Dido la royne, qui mourut de deul que elle perdy son amant. (ORESME, E.A.C., c.1370, 210). ...eulz mesmes sont tant chetifs qu'ilz meurent de froit (CHR. PIZ., Paix W., 1412-1413, 98).

 

b)

[De mort violente]

 

-

[À la guerre ou en d'autres circonstances] : ...et pour ce que l'un desdiz compaignons voult emporter un gobelet de voirre, l'un d'iceulx le frappa d'un coustel par le corps, donc il mourit (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 243). ...[il] en bailla à il qui parle XIJ noëz envelopez de pappier, dont chascun noët estoit aussy gros comme une grosse noizille, et lui dist qu'il les jettast en XIJ puis ou fontaines, affin que ceulx qui en buvroient morussent. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 441).

 

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Mourir par armes : Saiches que, tant comme tu les auras [les anneaux], ou l'un des deux, toy ne tes hoirs, s'ilz les ont après toy, ne seront ja desconfiz en plait ne en bataille, se eulx ou vous ont bonne cause ; ne ja toy, ou ly hoir qui l'aura, ne morra par armes quelxconques de trait, de ject de pierre, ne d'autre chose. (ARRAS, c.1392-1393, 259).

 

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Mourir en (la) croix : Diex, qui pour nous morut en croix... (Mir. enf. diable, c.1339, 34). ...Et li doulz Dieux nous ama tant Que homs voult pour nous devenir Et comme homs en la croix mourir: Eve fist mal, Marie bien. (DESCH., M.M., c.1385-1403, 279).

 

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Faire mourir qqn : ...il se mist et assist sur la forcelle dudit Andry, et lui estoupa de sa main son nez et sa bouche, tant qu'il le estaigny et fist mourir (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 128). ...il, avec de ses compaignons, a esté complice de faire morir soixante François par force de prison, ou par faire morir de fain et de trop batre (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 97). Par ma foy, monseigneur, dist le messagier, il est ainsi, faictes moy mettre en prison, et se vous ne trouvez qu'il soit ainsi, faictes moy mourir de quele mort qu'il vous plaira. (ARRAS, c.1392-1393, 253). Ne veez la Oruble qui n'a pas VIJ. ans acompliz, qui a ja occiz deux de mes escuiers, et avant qu'il eust trois ans, avoit il fait mourir deux de ses nourrices par force de mordre leurs mamelles ? (ARRAS, c.1392-1393, 253). ...les dessusdiz, assemblez en grant nombre, alerent celle nuyt ou Grant Chastellet et ou Petit et rompirent à force toutes les prisons, tuerent et firent mourir tous ceulz qui estoient prisonniers (FAUQ., I, 1417-1420, 150). Grant mal sera, par mon serment, De faire morir Jehan babtiste. (Pass. Auv., 1477, 97).

 

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Au passif Estre fait mourir. "Être mis à mort" : Audit temps fut fait mourir et enfoye toute vive, audit lieu de Paris, une femme nommé Perrette Mauger, pour occasion de ce que ladicte Perrette avoit fait et commis pluseurs larrecins, et en ce faisant par long temps continué, et aussy favourisé et recellé plusieurs larrons (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 4). Si le faictes mettre a martire, S'il ne veult noz dieux aorer. Hastivement sans demourer Soit faict mourir par griefz tourmens. (Myst. st Laur. S.W., 1499, 211).

 

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Faire mourir/occire qqn de male mort : Sachiez que il n'y a si grant, se il ne veult obeir a mon mandement, que je ne face mourir de male mort. (ARRAS, c.1392-1393, 197). Par Dieu, se je creoie mon cuer, je vous feroye mourir de male mort, mais raison naturelle le me deffent, pour ce que vous estes mon frere. (ARRAS, c.1392-1393, 242). ...ensi (...) il en est esceu et pris au roi Edouwart, pere de cesti qui resgne en present, que si honme ont fait morir de male mort ens ou chastiel de Bercler (FROISS., Chron. D., p.1400, 221). Et ainsi furent li duy frere Occis par male mort amere, Dont cilz de l'ost tant s'esbahirent Que d'ambedeux pars s'en fuïrent, Mais ainçois tant y ot de mors Qu'on ne pot passer, pour les corps. (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 320).

 

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Mourir devant ses jours. "Mourir avant que l'heure de la mort naturelle soit venue" : ...et lui bouta [à l'empereur Henri] le venin contenu en son ongle, avec la sainte hostie, en la bouche, dont il mourut violentement devant ses jours. (CHASTELL., Chron. K., t.1, c.1456-1471, 26).

 

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Mourir par les mains de qqn : ...il [le géant] savoit bien qu'il devoit morir par les mains de Gieffroy. (ARRAS, c.1392-1393, 265).

 

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Mourir de/pour des coups : Et lui, estant couchié au lit de la mort, dist par plusieurs foiz à elle qui parle qu'il moroit des coups que ledit prisonnier lui avoit donnez (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 176). ...pour lequel reffus ilz lui donnerent et frapperent, c'est assavoir : ledit prisonnier et sondit frere chascun un coup de baston, et ledit cordouennier un coup de coustel ; pour lesqueles batures ledit homme mouru en la place. (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 216). Pareillement il donna grace et remission à ung nommé Jehan de la Roche, escuyer, de ce qu'il avoit occis ung homme auquel il avoit donné ung cop en la cuisse d'un espée, dont il morut. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 250).

 

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Empl. trans. [Uniquement aux temps composés ou au passif] Avoir mort qqn. "Avoir tué, avoir fait mourir qqn" : Car, pour vray, j'ay cest homme mort : Sachiez de vray hier je l'occis. (Renart contref. R.L., t.1, 1328-1342, 21). ...cil qui l'a mort Est evesque et tient la sa feste (Mir. ev. arced., c.1341, 131). LA DAME. (...) Ay je mort mon enfant je mismes ? (Mir. enf. ress., 1353, 32). Puis qu'il est ainsi qu'il a mort, Dame, vostre serjant a tort, Il fault qu'il muire, ce me semble, Et en ame et en corps ensemble. (Mir. ev. arced., c.1341, 139). ...en yaus assallant, il leur avoient mort un chevalier des leurs, apert homme d'armes durement. (FROISS., Chron. L., IV, c.1375-1400, 11). "...encore ai je plus chier que je l'aie mort que il m'euist mort." (FROISS., Chron. R., XI, c.1375-1400, 261). ...Lois de Male (...) disoit francement que ja n'averoit a fenme le fille de celi qui li avoit mort son pere. (FROISS., Chron. D., p.1400, 797).

 

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Au passif : Enssi furent mors et mourdrit en la ville de Gaind chil doi vaillant homme rice et sage (FROISS., Chron. R., X, c.1375-1400, 151). Vous avés bien oy compter ci dessus comment messires Charles d'Espagne fu mors par le fait dou roy de Navare. (FROISS., Chron. L., IV, c.1375-1400, 174). Et bien savoient que, se de force il estoient pris, il seroient tout mort sans merci. (FROISS., Chron. L., IV, c.1375-1400, 198). ...IJ ou IIJ jours après ce que dit est, fait et advenu, il oy dire, environ ladite eglise de Sainte-Opportune, comme ledit Cloz avoit esté batus, et qu'il avoit esté mort. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 102). ...car l'en dit que desja avoient esté mors et tuez en ce royaume, tant d'un costé que d'autre plus de XX mil personnes de tous estas, tant en armes que autrement (BAYE, II, 1411-1417, 84). Et desdiz gens d'armes de la compaignie dudit d'Auffemont furent aucuns mors et tuez par les gens d'armes tenans ledit siege. (FAUQ., II, 1421-1430, 40). ...il se mist le derrain en ung pas, et la fist tant des armes pour soubstenir la charge de ses ennemys qu'il saulva les .III. pars de ses gens et puis fut mort. (LA SALE, Sale D., 1451, 99). ...pluseurs chevaliers (...) furent prisonniers, dont les aucuns furent mors et executez (C.N.N., c.1456-1467, 422).

 

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"Se donner la mort"

 

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Mourir de sa propre main : Par avanture pourras tu estre meu en abhomination de ta vie, a l'exemple d'autres qui sont mors de leur propre main par desplaisance de vivre. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 98).

 

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Se faire mourir : Mieulx venist que je me feusse noyee ou fait mourir d'autre mort cruelle ou que je eusse esté mort nee que tant de nobles creatures eussent esté periz et mors par mon pechié. (ARRAS, c.1392-1393, 162).

 

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[Dans une formule de serment] : (Respont SAINT PERRE a Jhesucrist.) Se toute ta compaignie te laisse, Quante a moy, point ne te laisse. Premier je me feray morir ! (Pass. Autun Biard F., 1470-1471, 77). [Réf. à Math. 26, 33-35]

 

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[Dans le cadre juridique de la peine de mort]

 

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Faire mourir un condamné. "Mettre à mort en exécution d'un jugement de condamnation" : Auquel Breton il qui parle a oy dire par plusieurs fois que il aymeroit mieulx que l'en le feist morir que l'en le meist plus en gehine, et que il prendroit la mort en bon gré, et que, sur l'ame de lui, se l'en le faisoit morir, qu'il prendroit la mort en bon gré, et que l'evesque de Poitiers ne ses gens n'avoient coulpe en chose dont il les avoit accusez. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 546).

 

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Juger qqn à mourir. "Condamner qqn à mort" : A tort sui jugie a mourir (Mir. marq. Gaudine, 1350, 152). Sy fut mis devant ce cadés Pour estre jugiez a mourir. (VILLON, Test. M., 1461-1462, 31). Ma dame, faictes l'advertir [Pilate], Fin qu'il ne jucge a morir Le bon prophete Jhesus. (Pass. Auv., 1477, 168).

 

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[D'un faussaire] Mourir en la chaudiere : Et atant fini ledit Jehan Jouye ses jours, et moru en la chaudiere, où il avoit esté mis pour ladite cause, et acomplissant ledit premier jugement. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 493).

 

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Mourir de peine capitale : Toute loy saincte et decretale Veult que pour majesté bleciée Muyrent de peine capitale Ceulx qui la loy aront froissiée. (ROBINET, Compl. François H., p.1420, 104).

 

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[P. oppos. à mourir civilement] Mourir naturellement. "Subir la peine capitale" : Et certes, qui n'obeït au decret et a la sentence du juge doit morir naturelement ou civilement, selon la nature du cas. Et aussi, qui n'obeïst au conmandement du prestre doit morir espirituelment. (Songe verg. S., t.1, 1378, 188).

 

Rem. À rapprocher de mort naturelle "peine de mort", cf. FEW VII, 49a.

 

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Desservir à mourir. "Mériter la mort" : ...laquelle confession il afferma estre vraye, et en icelle persevera, disant que plus ne autre chose il n'avoit mesfait, et que il avoit gaignié et desservi à mourir. (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 353).

 

c)

Mourir de telle ou telle manière

 

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Mourir + compl. ou adv. de manière : ...trop mieulx luy valoit mourir à honneur et attendre l'aventure que monstrer faulte de courraige. (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 66). Et c'est trop plus grant avantage Mourir par honneur en ostage, Qu'aloignier sa vie a hontage. (CHART., L. Dames, 1416, 227). Qu'esse que de plaisance vayne, Qu'esse que vivre meschamment, Qu'esse que de vïe mondayne, Quant on meurt deshonnestement ? (LA VIGNE, S.M., 1496, 320). Cayphe sire, Comment pouvez vous ce oyr ? Joseph est digne de morir Aux champs sans avoir sepulture, Il met no loy en adventure, Comment ! et il est convertis ! (MARCADÉ, Myst. Pass. Arras R., a.1440, 226). Et ne sera jamais Fortune contre Julius que une nuit et ung jour, et s'il eschappe ce pas, son nom et sa puissance croistera tousjours et morra de belle mort. (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 1098). Et ce que vous demandez tant, Qui vous fait trestant de rudesse, C'est la Pucelle que je atant Pour faire morir a destresse. (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 652). [Un cul-de-jatte :] (...) Par mon serment ie ne pourroye Plus viure gueres en cest estat Ou mourir me fauldroit tout plat (Myst. st Martin K., a.1500, 364).

 

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En partic. Mourir à honte : LA DAME. (...) Or voy je bien que prïere Cy endroit rien ne me vauldra. A honte mourir me fauldra ; Nulle riens n'y vault l'estriver. (Mir. enf. ress., 1353, 38). Qu'esse d'un maulvais garnement Que maleur et orgueil surmonte, Aussi maulvais gouvernement, Tant qu'il luy fault mourir a honte ? (LA VIGNE, S.M., 1496, 320). Sire, pour les grans graces qui vous sont faictes, faictez moy grace et à mes povres enfans, ne souffrez que pour mes pechiés je meure à honte et confusion ne qu'ilz vivent en deshonneur et au pain querant. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 369).

 

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Prov. Mieux vaut à honneur mourir qu'à honte fuir et courir/que vivre à honte : ...encores nous vault mieulx morir à honneur, en gardant nostre hiretaige et la foy de Jhesu Crist, que vivre a honte et en servage dessoubz ces chiens mescreans (FROISS., Chron. M., XII, c.1375-1400, 220). Et mieulx vault a honneur mourir Qu'a honte fuïr et courir. (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 217).

 

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[D'un personnage important, pour dire que la mort ne connaît que des mortels] Mourir comme un laboureur. "Mourir comme meurt le dernier sur l'échelle sociale" : Où sont les princeps de la terre ? Où est Alexander d'Aillier, Chelly qui tout vollu conquerre ? Où est le bon roy d'Angleterre, Artus et son coraige fier ? (...) Ilz sont mors comme .I. laboureur ! (CHASTELL., Miroir mort V.H., c.1436-1450, 62).

 

Rem. Même idée p. 74 : Le bourgois qui boit du melleur Et à tous fait chiere commune, Mort ne ly fera plus d'honneur Comme à ung povre laboureur

 

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[Prov., sentences]

 

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À bien mourir doit chacun tendre : A bien morir doit chascun tendre. (MIÉLOT, Prov. U., 1456, 192).

 

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Envis/à peine meurt qui appris ne l'a : Du premier est dit en proverbes : "A paine meurt qui ne l'a aprins", c'est a dire qui ne scet soustenir les menaces de mort qui sont tribulations. (DAUDIN, De la erudition H., c.1360-1380, 350). Enuiz muert qui apris ne l'a ; apren doncquez a mourir, car nulz biens en sa vie n'aura qui a morir n'a apris. (THOM. SALUCES, Chev. errant W., 1394, 1132). Congnoisse sa vie faintive, Et prende tout en patience. Il fera tant par sa science Qu'aprez sa mort il vivera : Envis moert quy apris ne l'a. (CHASTELL., Miroir mort V.H., c.1436-1450, 74). "Sire, ce dist Euryant, sachiés que envys meurt quy aprys ne l'a. Trop me greveroit et seroit estrange de delaissier la vye que tous temps ay volu mener..." (Gérard de Nevers L., c.1451-1464, 29). ...des hommes bons et maulvais, J'ay ouy reciter cela : Envis meurt qui apris ne l'a. (MICHAULT, Danse aveugles F., 1464, 137). LE SERGENT. Moy qui suis royal officier Comme m'ose la mort frapper ? Je faisoys mon office hier Et elle me vient huy happer. Je ne sçay quel part eschapper (...). Enviz meurt qui appris ne l'a. (Danse macabre femmes H., p.1480, 30).

 

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Celui qui a appris à mourir n'a pas appris à servir : Au contraire dist ichelui [Sénèque] a Lucile : "Cilz lequel a aprins a morir n'a pas aprins a servir, car il est sur toute puissance et hors de toute puissance..." (DAUDIN, De la erudition H., c.1360-1380, 350).

 

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Mourir faut on ne sait comment : L'HOMME D'ARMES. A ceste danse par la main Je suis menez piteusement ; Mort y contraint tout homme humain. Mourir faut on ne scet comment. (Danse macabre femmes H., p.1480, 29).

 

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Qui bien voudra mourir, bien vive : Fors [var. lors] qui voelt bien morir bien vive, Seloncq Dieu et sa conscience Et ses commandemens avive. (CHASTELL., Miroir mort V.H., c.1436-1450, 74). Au darrain, afin que ce qui est escript ne fausist point, c'est assavoir : Celuy ne puet bien morir qui mal aura vescu, il fut occis par Ermenfroy, le noble et vaillant homme qu'il avoit grandement injurié. (WAUQUELIN, Chron. ducs Brabant R., t.1, c.1447, 129). Qui vouldra bien morir, bien vive. (MIÉLOT, Prov. U., 1456, 198). On dit "De tel vie, tel fin" : Pour ce fault morir en vivant Et recorder sa mort, afin Qu'on puisse bien vivre en morant. Tu as assez sceu cy avant Et ne fault ja que le t'escrive : Qui bien vouldra morir, bien vive. (MICHAULT, Danse aveugles F., 1464, 137).

 

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Quiconque meurt meurt à douleur : Et meure Paris ou Elayne, Quicunques meurt meurt a douleur Telle qu'il pert vent et alaine, Son fiel se criesve sur son cueur, Puis sue Dieu scet quel sueur... Et n'est qui de ses maulx l'alege, Car enffant n'a, frere ne seur, Qui lors voulsist estre son pleige. (VILLON, Test. M., 1461-1462, 43).

 

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Va où tu veux, meurs où tu dois : Troïlus, qui estoit eschauffé, se refraint pour ce mot, et aussi il estoit desirant de sçavoir qui estoit le tirant, dont ce fut grant meschief, car par cel arrest il eschappa et mist depuis a mort l'un des bons chevaliers du Franc Palais. Et pour ce dist on : "Va ou tu veulx, meurs ou tu dois." (Percef. III, R., t.3, c.1450 [c.1340], 325). [Var. de la p.223]

 

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Mourir + attribut : Quant aucun meurt bon homme et en bonne fortune, nulle fortune selonc Solon ne li puet plus nuyre. (ORESME, E.A.C., c.1370, 131). ...Margerite (...) elle morut jone. (FROISS., Chron. D., p.1400, 854). Me sembloit d'eulx ouÿr parler Qu'antr' eux jouassent une farce, Et lors il me va remambrer Du vaillant bailly d'Aigueperse Qui me dist une foys : "Alain, J'ayme trop mieux paier la taille Et vivre longuement villain, Que noble mourir en bataille." (CHART., D. Her., p.1415, 435). Et se jeune tu muers, de ce que pers-tu, puis que une fois le te couvient ? (CHR. PIZ., P.V.H., 1416-1418, 27). Tu me fais souffrir grief martyre, Et me fauldra mourir martyr, Fortune bien te dois mauldire (RÉGN., F.A., 1432-c.1465, 37). Icy se clost le testament Et finist du povre Villon. Venez a son enterrement, Quant vous orez le carrillon, Vestuz rouge com vermeillon, Car en amours mourut martir ; Ce jura il sur son coullon, Quant de ce monde voult partir. (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 150). LE PREVOST. Helas, or est il [le chrétien] mort parjure ! Vecy l'or en ce baston creux. (...) LE GREFFIER. (...) Par courtoisie, est malheureux. Helas, or il est mort parjure ! (Mir. st Nic. juif, c.1480-1500, 143). LE PRESTRE. Assemblement Le glorieux sainct Nicolas Nous doint a tous joye et soulas Et si tres bien nous secourir Que vrays conféz puissons mourir ! (Mir. st Nic. juif, c.1480-1500, 158).

 

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Mourir comme + attribut "Mourir en" : LA MARQUISE. (...) suis appareillie De retourner en la maison Mon pere, (...) Ma viellesce y trespasseray Comme ma jeunesse y usay Et morray com vesve eüreuse, Qui ay esté femme et espeuse De tel et si noble seigneur. (Gris., 1395, 82).

 

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Mourir + compar. : Esgar, il remue la teste ! Pierres, vous mourez comme beste. Nous voulïez vous decevoir ? (Mart. st Pierre st Paul R., c.1430-1440, 126). Puys l'empereur dyoclecien Morust pouvremant comme ung chien (OUDIN, St Genis M.S., c.1490, 53).

 

3.

[Dans les attitudes, les sentiments face à la mort]

 

-

Doutance/peur de mourir : Et alerent ainsi vaucrant parmy la mer a grant meschief et a grant doubtance de mourir, et reclamoient Dieu et sa mere moult devotement. (Bérinus, I, c.1350-1370, 208). Et quant Aigres vist ce, si fut a grant mesaise, car il veoit la gent aprouchier, si ot grant paour de mourir, donc s'avisa comment il se pourroit garantir et tenser. (Bérinus, I, c.1350-1370, 409). Principal, vez le cy en place, Regardez quel homme notable, Je cuide qu'il se tient coupable Car il a grant peur de mourir. (Sots gard., a.1488, 103).

 

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Resoigner à mourir. "Craindre de mourir" : Si lui commença la char a fremir pour la cremance de la mort, car par nature toute chose qui vie a ressongne a mourir, si que, pour fuïr la mort le plus qu'il pouoit, il commença sa viande a espargnier et lui a consirer, si que il fu moult grant temps que onques son saoul ne menga (Bérinus, I, c.1350-1370, 249).

 

-

[Mourir pour qqn, pour une cause] : Item, tele chose se avient a ceuls qui meurent bien pour autre, car en ce faisant ilz eslisent tresgrant bien pour eulz meïsmes. (ORESME, E.A., c.1370, 482). Je, endroit de moi, ai si grande esperance d'avoir grace et pardon enviers Nostre Signeur, se je muir pour che peuple sauver, que je voel estre li premiers ; et me meterai volentiers en purs ma cemise, a nu chief et a nu piés, la hart ou col, en la merchi dou gentil roi d'Engleterre. (FROISS., Chron. D., p.1400, 843). Mais ung homme est dit vaillant quant par bonne discrecion, sans lachetté de courage, scet bien les temps, forme et maniere de congnoistre le fait de la guerre, tant en assaillant comme en deffendant, et telles gens sont tenus et reputés avoir force et vertu de courage et honneur, tellement que se ilz meurent pour la chose publique imperpetuum per gloriam vivere intelliguntur. (JUV. URS., Verba, 1452, 225). Et, s'ainsi estoit qu'il ne eust riens en ce monde, au moins meurt-il en grant et hault honneur pour lui et pour les siens (BUEIL, I, 1461-1466, 56). Suivés Jhesus, car il est filz De Dieu le Pere vrayement, Né de vierge sa bas vivant Pour mourir a nous donner vie. (Pass. Auv., 1477, 87).

 

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Vivre et mourir pour qqn : Et si leur mandoit de bouche par ledit de Harlay certain accord qu'il avoit fait avecques lesdiz ducs de Bourbon et Nemours et les sires d'Armaignac et d'Albret, et comment, en faisant ledit accord, chacun d'eulx avoit promis au roy de bien et loyaument le servir et de vivre et mourir pour luy. (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 54). ...lesdiz habitans d'Aucerre mandoient ausdiz commissaires qu'ilz avoient mis et bouté avecques eulx dedens ladicte ville grande garnison de gens de guerre pour ledit duc, et que au regard d'eulx ilz estoient fermez et deliberez de vivre et mourir pour ledit duc et garder ladicte ville pour lui. (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 254).

 

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Vivre et mourir en qqc. "Rester totalement fidèle à qqc." : La joye avoir me fais, haulte deesse, A qui pecheurs doivent tous recourir, Comblés de foy, sans faincte ne parresse : En ceste foy je vueil vivre et mourir. (VILLON, Test. M., 1461-1462, 80). Et, sur le serement que vous en avez fait, je veulx vivre et mourir en ceste querelle juste. (BUEIL, II, 1461-1466, 183).

 

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[Sentence] Qui meurt pour son seigneur, il meurt en courtoisie : "...J'atenderay le mort de volenté trez lie : Qui muert pour son signeur, il meurt en courtoissie..." (Hugues Capet L., c.1358, 199).

 

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[Des abeilles] : ...et mectent leur vie pour deffendre et entretenir leur assemblee et leur petite pollice et pour garder la seigneurie de leur roy qui regne entre elles soubz une petite ruche, que moult de foiz, quant il est navrez en leurs batailles, contre une autre compaignie d'autres mouchetes, elles portent et soustiennent a leurs eles et se laissent mourir pour luy maintenir sa seigneurie et sa vie. (CHART., Q. inv., 1422, 65).

 

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Faire qqc. pour qqn/qqc. jusqu'au mourir : L'eritaige de leur seigneur le conte de Flandres il ne pooient ne voloient pas donner ne amenrir, mais le deffendroient et garderoient jusques au morir. (FROISS., Chron. R., X, c.1375-1400, 242).

C. -

[Façon de désigner l'imminence de la mort, les derniers moments de la vie et l'état après la mort]

 

-

Estre en danger de mourir : ...en telle maniere que, le jour Saint-Jehan Baptiste, environ IX heures de matin, une telle frenesie le print qu'il se getta par la fenestre de sa chambre en la rue, et se rompit une cuisse et froissa tout le corps, et fut en grant danger de mourir, et depuis persevera longuement en ladicte frenesie, et après se revint et fut guery. (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 161).

 

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Entrer en peril/en aventure de mourir : Si dist la dame: "Dieux le vous mire, qui vous doint joye et honneur et qui vous maint a sauvetté, car bien vueil que vous sachiez que, quant vous ystrés de ceste ville, vous entrerés en grant peril et en grant aventure de mourir." (Bérinus, I, c.1350-1370, 263).

 

-

Empl. pronom. Se mourir. "S'acheminer vers la mort, être à l'article de la mort, être sur le point de mourir" : Je me muir, seigneurs, vraiement: Le cuer me fault. (Mir. st Panth., 1364, 356). Quiconques seuffre spantillon ou cervel se meurt en trois jours ; s'il passe les trois jours, il est gary. (SAINT-GILLE, A.Y., 1362-1365, 101). NOSTRE-DAME. (...) Ta mort mon filz griefment me blesse ! Pour quoy avecques toy me muyr (MARCADÉ, Myst. Pass. Arras R., a.1440, 195). ...a chef de piece dit : "Mere, je me meurs ! - Non faictes, si Dieu plaist, fille ; prenez courage ; mais dont vous vient ce mal si a haste ?..." (C.N.N., c.1456-1467, 134). Il se meurt : cecy nous enseigne Qu'il fault ses derniers sacremens. (Path. D., c.1456-1469, 134). "Mons. le grant maistre, depuis les dernieres lettres que je vous ay escriptes, j'ay eu nouvelles que monseigneur de Guienne se meurt, et qu'il n'y a point de remede en son fait, et le m'a fait savoir ung des plus privez qu'il ait avec luy..." (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 280). CATECUMINAIRE. Ha, je sçay bien que non fera, Car plus n'en puis, le cueur me fault. Du corps mon ame partira ; A ce cop le sens me deffault. (Il se meurt.) (LA VIGNE, S.M., 1496, 378). ...et eust le roy grant peur qu'il [Ballue] ne se morust ; et s'en esbaÿssoient plusieurs gens, veuez les grans mauvaistiés qu'on disoit qu'il avoit faictes au roy... (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 394).

 

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[D'un animal] : En fera bien penser ou temps que devront agneler, et prendre grant soing des aigneaulx, car souvent se meurent par faulte d'en penser. (CHR. PIZ., Trois vertus W.H., c.1405, 155).

 

-

Inf. subst. Estre au mourir. "Être à l'article de la mort" : LA CHAMBERIERE. (...) se Dieu sa grace n'y met, Ly et l'enfant, je vous promet, Sont au morir. (Mir. enf. ress., 1353, 23). NOSTRE DAME. Je vous requier (...), Biau filz, que je voise garir Guillaume, qui est au morir, Tant l'ont batu li ennemi (Mir. st Guill., c.1347, 44).

 

-

Part. prés. en empl. subst. : ...car elle dit qu'elle est adresce et voie aux meserrans, verité aux ignorans, vie aux morans, vertu aux deffaillans. (Mir. st Panth., 1364, 308).

D. -

Loc. prov.

 

1.

Loc.

 

-

[Pour renforcer une promesse, un serment] Pour mourir

 

-

[Dans une phrase nég.] "Pour rien au monde, même au risque de la mort" : L'autre dit que sa femme lui avoit respondu qu'elle n'estoit venue ne yssue d'enchanteurs ne de sorciers, et qu'elle ne savoit jouer des basteaulx de nuyt, ne des balaiz, et pour mourir elle ne feroit ne consentiroit, ne jamaiz en l'ostel ne gerroit s'il estoit fait. (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 86). ...et toy et tes aliés criés, saint George, et veullent tesdis aliés soubmectre lesdictes noble devise et cry a celuy de ton pais, et abolir de tous points mes honneur et droit, ce que le roy Charles et mes bons enffans de ma terre ne soufferront pour mourir. (JUV. URS., Aud. celi, 1435, 193). ...les aultres dient que ilz ne sacrifieroient point pour mourir, et que ilz ne laisseroient point leur religion crestienne. (JUV. URS., Nescio, 1445, 464). ...maiz se ung jenne compaignon me vouloit sievir en bien et me prioit de parler, et il n'y venoit, jamais pour y morir plus ne l'escouteroie ne rebailleroie ne jour ne heure. (Ev. Quen., II, c.1466-1474, 134). Si luy dist son maistre : "Il vous couvient mettre a ranson", et luy dist : "Vous paierez trois cens escuz en or, ou vous perdrez la vie", lors ledit prisonnier respondit amyablement, et jura par sa foy que pour mourir il ne pourroit paier vingt escuz en or. (Mir. ste Cath. Fierbois C., 1470-1483, 41). Et luy dist ledit du Lau qu'il n'en dist rien à son oncle, car pour mourir il ne s'i consentiroit, mais qu'il ne s'en souciast point et qu'il luy feroit avaller sans ce qu'il s'en aperceut. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 192). Sire, j'ay faict à mon povoir ce que par Messrs le chancellier, premier president, Mons.. de Montagu et visroy, vous a pleu me commander, car, pour mourir, ne vous veul desobeir ne desobeiray. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 368).

 

-

[Formule de serment] Je veux mourir si : Par le vray Dieu qui me fist naistre, Se jamais vous me rassaillez, Je vueil mourir se vous faillez A bien estre en chastïé ! (Myst. Résurr. Angers S., 1456, 680). Si vostre peau vault au jour d'uy ung cart, Je veulx mourir sans aultre mot sonner ! (LA VIGNE, S.M., 1496, 341).

 

2.

[Prov., sentences]

 

-

Aussi tost meurt jeune que vieux : Aussi tost muert jeune que vieulx. (MIÉLOT, Prov. U., 1456, 192).

 

-

C'est grande peine que de vivre en ce monde, C'est encore plus de peine de mourir : C'est grant paine de vivre en ce monde, Encore esse plus paine de mourir ! (CH. D'ORLÉANS, Rond. C., 1443-1460, 378).

 

-

Envie ne meurt jamais : Si me dit : "Amis, vous savez, Et bien oï dire l'avez, Qu'Envie si ne puet morir Et que partout vuet signourir..." (MACH., D. Lyon, 1342, 224). ...Car en proverbe est dit pieça Qu'Envie si ne mourra ja. (LA BUIGNE, Rom. deduis B., 1359-1377, 250).

 

-

Les gens meurent quand il plaist à Dieu : "Sire, dit le Mareschal, les gens meurent, quant il plaist à Dieu..." (BUEIL, I, 1461-1466, 176).

 

-

L'homme va et vient et meurt où il doit : ...et pour ytant dist Salmon : "Homme va et vient et muert ou il doit". (Bérinus, I, c.1350-1370, 389).

 

-

On se avise tart en mourant : On se avise tart en mourant. (MIÉLOT, Prov. U., 1456, 196).

 

-

Quand mourir faut, c'est grande contrainte : Quant morir fault, c'est grant contraine. (MIÉLOT, Prov. U., 1456, 198).

 

-

Qui est mort est mort : Le cry fait, chascun s'en yra, Ne de nous plus parlé sera, Qui est mort est mort, c'est l'ordinaire, Ne a personne n'en souvenra (HAUTEV., Conf. Test. am. tresp. B., c.1441-1447, 79).

 

-

Qui meurt a le droit de tout dire : Et s'aucun m'interrogue ou tente Comment d'Amours j'ose mesdire, Ceste parolle le contente : "Qui meurt a ses loix de tout dire". (VILLON, Test. M., 1461-1462, 69).

 

-

Qui tantost meurt, il languit moins : "Sire, nous acordons tout vostre parlement, Et a qui Dieu voura donner eür briefment, Cy prengne l'avantaige et le commencement, Car mieulx vault tost mourir que languir longuement !" (CUVELIER, Chans. Guescl. F., c.1380-1385, 379). Et puis qu'ainsi m'est escheü D'estre a mercy entre voz mains, S'il m'est au chëoir mescheü, Qui plus tost meurt en languist moins. (CHART., B. Dame, 1424, 340). Trouvons fachon d'eschapper de leurs mains : Qui tantost moeurt, on dit qu'il languist mains. (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 216). LE LOUP (au mouton). Qui moeurt tantos, il languist mains. Mieux te vault ferir en ma gueule Que rompre poings et tordre mains, Ne plourer une larme seule (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 668).

 

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[Même idée] : ...mieulx me vault prochainement mourir, que en telle douleur longuement vivre et languir. (Bérinus, I, c.1350-1370, 275). Car il me vaut trop mieus morir Pour vous a un cop que languir. (MACH., R. Fort., c.1341, 154). Puis que tu as prins ma maistresse, Prens moy aussi son serviteur, Car j'ayme mieulx prouchainnement Mourir que languir en tourment, En paine, soussi et doleur ! (CH. D'ORLÉANS, Ball. C., c.1415-1457, 81).

 

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[Loc. proverbiale (exprime une certaine indifférence face à la vie)] Meure qui meurt, vive qui vouldra vivre : Si laisseray aux autres leur foiz suivre Les biens d'amours, qui les vouldront pursuivre, Car quant a moy plus n'estudieray livre ; Pour y tascher trop suis defortuné, Du quarteron j'en ay paié la livre Sans ung seul bien n'aucun prouffit ensuivre. Meure qui meure, vive qui vouldra vivre, Jamais ne quiers plus y estre assigné. (HAUTEV., Compl. B., c.1441-1447, 30).

 

-

[Croyance populaire] : Quant vous veez de nuit cheoir une estoille, sachiez pour vray que c'est un de voz amis qui est trespassé, car chascune personne a une estoille ou ciel pour lui et quant il meurt, elle chiet. (Ev. Quen., I, c.1466-1474, 115).

II. -

P. anal. au fig.

A. -

P. anal. [D'une chose concrète ou abstr.]

 

1.

Empl. intrans.

 

-

"S'arrêter, s'éteindre, disparaître" : ...quant l'un desdiz mariez sera aley de vie à trespassement, la moitié desdites livreisons et quarante soulz desdiz deniers mourront, et ainsi demourront à celi qui le plus vivra cinquante soulz et la moitié desdites livreisons. (Cartul. Hôtel-Dieu Cout. L., 1378, 183).

 

-

"Cesser d'exister, être anéanti" : Terre trambler, L'aer deust toner - et l'eau corant Et la dorment deussent falhir [;] Le feu ardent [,] Par grief torment - deust tout morir. Les elemens deussent perir, A neant venir, Sentent la mort de leur createur. (Pass. Auv., 1477, 247). ...vostre temps present ne regne plus, Car maintenant tousjours de plus en plus Mon bien se pert et mon temps si se passe, Ma joye meurt, mon plaisir est reclus (LA VIGNE, Ress. chrest. B., 1494, 120).

 

-

"Tomber dans l'oubli" : Or retournerons aux besongnes de Portingal, car elles ne sont pas à laisser pour les grans fais d'armes et emprises qui en sont yssus, et pour hystorier et cronisier toutes avenues, afin que en temps avenir on les treuve escriptes et registrées, car se elles moroient ce seroit dommaige. (FROISS., Chron. M., XII, c.1375-1400, 237). Longuement vivre, que t'aura proffité Quant tu seras es latebres gecté De ce vieil Temps, qui tout ronge et affine Et dure apres que Fame meurt et fine. (ROBERTET, Oeuvres Z., c.1450-1500, 183).

 

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[D'un végétal] "Dépérir" : Certes quelconques bois est planté encoste ces yaues si ne peut sechier ne mourir. (FOUL., Policrat., IV, 1372, 83). ...plusieurs abrez, perdans la nourriture de la terre fort sesche, conglutinée et sans humur, morurent geléz et steriles (MOLINET, Chron. D.J., t.1, 1474-1506, 354).

 

-

Faire mourir un fossé de soif. "Assécher un fossé" : ..."Monsieur le curé, vous mangez tout le poisson qui est en nostre fossé, duquel je doy avoir la moitié, dont je ne suis pas bien contempt". Et lors ledit curé luy fit responce qu'il avoit exploité par an et par jour et qu'il n'y auroit aucune chose. Auquel curé ledit supliant respondy : "Si auray, s'il vous plaist, ou je le feray mourir de soif." (Doc. Poitou G., t.10, 1456, 2).

B. -

Au fig.

 

1.

[Souvent par hyperb.]

 

a)

Empl. abs. "Éprouver une grande affliction" : Que farey je, mes doulces seurs ? Las, je meurs ! Mon Dieu, veez la terribles cops. (Pass. Auv., 1477, 197).

 

b)

Mourir d'un besoin de l'organisme

 

-

(Se) mourir de faim/de soif. "Avoir une très forte envie de manger, de boire ; souffrir de la faim, de la soif" : Voulez vous que voz serviteurs meurent de fain decoste vous honteusement ? (GERS., Noël, p.1404, 307). Moïse, morron cy par toy, Donne nous de l'eaul, cy bevrom, Le peuple meurt icy de soifz. (Pass. Semur D.M., c.1420 [1488], 36). [Réf. à Exode 17, 1-3] Jhesus, que faix icy tout seul, Quil es cy longuement oiseulx ? Tu as .XL. jours juné Sans avoir de riens desjuné, Tu te doix bien morir de fain ; Dy ces pierres devienne pain, (...) Ce tu es celluy Dieu, vray Crist. (Pass. Semur D.M., c.1420 [1488], 117). Alons emsemble chiés Brouchet, Car vraymant je meur de soif. (Myst. st Sébast. M., c.1450-1500, 246). Si nous n'y advisons, nous serons enfermez dehors [de la ville], et nous fauldra gesir en ung meschant village et tous morir de faim. (C.N.N., c.1456-1467, 475). Ou quelque bon lopin de pain Au povre qui se meurt de fain, Pour Dieu, qui en a si m'en baille. (Sots gard., a.1488, 102).

 

.

[Sentence] Celui doit bien mourir de faim, qui n'ose demander du pain à celui qui peut le donner : Aussi n'est ce pas de mervoille: Celuy doit bien mourir de fain Qui n'ose demander du pain A celluy qui le peut donner. (Narcissus, p.1426, 289).

 

.

[Loc. proverbiale] J'ai plus cher mourir de faim que vouloir perdre ma bonne renommée : Dont pour conclure, mon ami, souvienne vous de ce dit qui dit : J'ay plus chier morir de fain que vouloir perdre ma bonne renommee. (LA SALE, J.S., 1456, 21).

 

.

Mourir de sommeil : Laissez moy dormir, je meurs de somme. (C.N.N., c.1456-1467, 174).

 

-

Mort de faim et de soif. "Ayant une très grande faim et une très grande soif" : ...ledit suppliant, accompaigné dez autres francs archiers (...) se logèrent tous laz, mors de fain, de soefz et fort travailliez (Doc. Poitou G., t.12, 1476, 85).

 

c)

Mourir de un sentiment/une sensation. "Souffrir de, éprouver intensément" : Les filles le roy y trouverent Leur maris, qu'elles tant plourerent Que tout ne vous pourroie dire Le grant dueil, a peu meurent d'ire ! (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 327). Tant faittes, qui tout vourroit dire, Que c'est assés pour morir d'ire. (Pastor. B., c.1422-1425, 98). Mais ils m'ont si esmut la teste Pour les parolles que m'ont dit Que je meurch a peu de despit. (MARCADÉ, Myst. Pass. Arras R., a.1440, 43). Je deusse morir de destresse, Veu les grans pechés ou je suis. (Pass. Auv., 1477, 138). Ha, mon Dieu, je meurs de doleur ! Adieu, Jhesus, mon doulx amy (Pass. Auv., 1477, 182). Puis qu'a mort Jhesus est donné, Doleureux suis. Je meurs de deul Et voy bien que ne suis pas seul. (Pass. Auv., 1477, 234). ...la doleance Et paine que j'ay veu souffrir A mon filz, qu'estoit ma plaisance, De grant doleur me fait morir. (Pass. Auv., 1477, 258). Aussi messire Jehan Chabot ; Sont tous demeurez en ung blot Qui estoit la fleur de noblesse. J'en ay le cueur sarré si fort Que j'en meurs de dueil et tristesse. (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 342).

 

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En partic. [Dans le langage amoureux] : Je muir pour vous, Chiere dame, a qui je sui tous, Et langui en trop grief martyre Pour vostre amour qui me martyre, Si qu'einsi ne puis plus durer, Car trop ay dur a endurer. (MACH., D. Lyon, 1342, 192). S'onques amans rechut mort pour penser A ses amours, morir je deveroie, Car nuit et jour je pense sans cesser A ma dame, comment je le revoie. (FROISS., Ball. B., c.1362-1377, 12). Car je muir pour vostre amour Et, en quel part que je voie, Diex doinst [que brief vous revoie]. (FROISS., Rond. B., c.1365-1394, 52). Ma dame, or soiés seüre Que je muir pour vous amer, Car li desirs et l'ardure Que j'ay de tost retourner Vers vous me font desperer (MACH., L. dames, 1377, 42). Et se je muir de l'amoureus tourment, Puis qu'il vous plaist, douce dame, il me plait (MACH., L. dames, 1377, 79). Sachiés que vous estes celle Pour qui je muir sans delay. (MACH., Les lays, 1377, 313).

 

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Inf. subst. Estre au mourir. "Être sur le point de mourir ; d'où, au fig. souffrir profondément" : LA VOISINE. Mes amis, vostre povre fille De vostre mal est au mourir, Dont affin de vous secourir Veult aller en quelque bon lieu Servir. (Myst. jeune fille L., c.1413-1445 [c.1530], 20).

 

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Mettre qqn au mourir : Le departir si me met au mourir ! (GARENC., Poésies N., 1389-1415, 107). Faulse beaulté qui tant me couste chier, Rude en effect, ypocrite doulceur, Amour dure plus que fer a macher, Nommer que puis, de ma deffaçon seur, Cherme felon, la mort d'un povre cueur, Orgueil mussé qui gens met au mourir, Yeulx sans pitié, ne veult droit de rigueur, Sans empirer, ung povre secourir ? (VILLON, Test. M., 1461-1462, 83).

 

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Mourir de + inf. "Avoir une très forte envie de + inf." : Ma loy renoy ce je m'y soing, Car de ly nuyre tout je meur. (Pass. Semur D.M., c.1420 [1488], 202). Le mary, qui mouroit de faire ung cop de sa main, trouva façon d'envoyer son cousin veoir que faisoient leurs chevaulx (C.N.N., c.1456-1467, 355).

 

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Se mourir de qqc. : Helas ! tresdoulce damoiselle, ce suis je qui me meurs icy de chault et de doubte [L'homme a été enfermé, sans savoir pourquoi, dans une huche] (C.N.N., c.1456-1467, 380).

 

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Mourir sur bout/pied. "Se dessécher sur pied, perdre toute vitalité" : Mes yeulx pleurent ens et rïent dehors, Et tousjours ay le doloreux remors Du hault plaisir qui de tous poins me cesse. Las ! Or n'est plus ce que j'avoye, Amors. Je muir sur bout, et en ce point me pors Comme arbre sec qui sur le pié se dresse. Si suis desert, despointé et deffait De pensee, de parolle et de fait, De los, de joye (CHART., Compl., 1424, 322). ...Pluseurs Est de vous sy tresamoreux Que c'est une grande mervoille. Il en a la puce en l'oreille Tellement que ne pence a rien, Se n'est a vous. (...) [-] Il ne dort point ne ne repose, Il meurt sur le pied. (Pouvre peuple H., c.1450-1492, 219).

 

2.

Mourir civilement. "Perdre ses droits de citoyen" : Et certes, qui n'obeït au decret et a la sentence du juge doit morir naturelement ou civilement, selon la nature du cas. Et aussi, qui n'obeïst au conmandement du prestre doit morir espirituelment. (Songe verg. S., t.1, 1378, 188).
 

DMF 2020 - Synthèse Pierre Cromer

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