C.N.R.S.
 
Famille de sinno- 
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 Article 1/32 
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     AFORCENÉ     
FEW XVII sinno-
AFORCENÉ, adj.
[GD : aforsené ; FEW XVII, 73a : sinno-]

"Forcené" (Éd.) : Ma despite ame aforcenee Me tient en gref deul tant suspens De mon malfaict ne me repens, Puis que desespoir tant me larde. (MICHEL, Myst. Pass. J., 1486, 344).
 

DMF 2020 - Lexique complémentaire 2007 Monique Haas

 Article 2/32 
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     ASSÈNE     
FEW XVII sinno-
ASSENE, subst. fém.
[GD : assene ; FEW XVII, 71a : sinno-]

A. -

[Idée d'installer, de placer qqn qq. part] "Famille, lignée dans laquelle on se marie" : ...la ducoise de Braibant (...) remonstra (...) au duc de Bourgongne comment il (...) avoit de biaus enfans : si estoit bien heure que li uns ou li doi fussent assené et mis en lieu dont il vausissent mieux, et pour le present, elle ne pooit veoir lieu ne asene où il fussent mieux que es enffans de Hainnau pour reconfermer tous les pais ensemble et donner cremeur à ses ennemis (FROISS., Chron. R., XI, c.1375-1400, 188).

B. -

Prendre son assene qq. part. "Viser un endroit, le prendre pour cible, porter un coup" : Et maintenant le voyons trebuchiet [le chêne], Mais quoy que Mort y ait prins son assenne, Au premier cop n'abat on point le chenne. (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 271).

C. -

DR.

 

1.

"Assignation d'une rente ; bien affecté à la garantie d'une rente, d'une pension" : De Monsr de Biauriu, ce jour, pour une assenne de C livrées de tiere qu'il fist a Medame se femme, a tenir se vie .. X 4 livres. (Arch. Nord, 1359, B 10 284, f° 1, IGLF). ...[la foire du poisson et du sel] a nostredite suer (...) fu baillee oultre, en nom d'assenne (Ordonn. Ph. le Hardi, Marg. de Male B., t.1, 1385, 147). ...et en nom de plus grand sceureté, propre, espécial haboult et assenne de ledite rente bien paier à tousjours, comme dit est, lidis Philippes en a rapporté en le main dudit mayeur et présens les juges chi-après nommés deux rasières de hiretaige (Cartul. Flines H., t.2, 1442, 787). ...attendu ossy que elle de portion de paternelle hérédité elle n'a eu sinon tant seullement la dessusdicte assenne, c'est-à-dire les sommes de monnoies sur ladicte duchié à elle assenées (WAUQUELIN, Chron. ducs Brabant R., t.3, c.1447, 727).

 

-

"Hypothèque du fait d'une assignation" : ...il ne savoient sour ledit heritage, about, assene, couvenenche ne enpechement nul par coy li rappors dessusdis ne soit bien fais, as us et as coustumes dou lieu (Doc. 1377. In : T. Malsumma, Mél. L. Fossier, 1991, 225).

 

Rem. Doc. 1333 ds GD I, 431c.

 

2.

Assene (de mariage). "Assignation de douaire" : ...li dis messire Wilheame recognut les convenances et assennes de mariage (HEMRICOURT, Pièces div. B.P., 1377, 82).

 

Rem. JEAN BOUTILLIER, Somme rural, 1393-1396 (éd. 1486, si un gentilhomme a plusieurs enfans, et par especial filles, il leur veult faire assene ou advis que on appelle don pour elles avancer entre leurs aisnez freres) ds GD I, 431b.

 

3.

P. ext. "Richesses, biens" : Pourquoy quiert il en tel ardure Chose mondaine qui poy dure ? Pourquoy quiert il, qui est mortel Et n'a nul demain, grant chatel ? (...) Pourquoy quiert il sy povre assenne, En passant la mer et le sable, Que chose qui est perissable, Comme pastis, pars et manoques ? (Pastor. B., c.1422-1425, 241).
 

DMF 2020 - Article revu en 2015 Pierre Cromer

 Article 3/32 
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     ASSÉNEMENT     
FEW XVII sinno-
ASSENEMENT, subst. masc.
[T-L : assenement ; GD : assenement ; GDC : assenement ; AND : acenement ; FEW XVII, 71a-b : sinno- ; TLF : III, 677a : assénement]

A. -

"Signe, indication" (synon. assignement2) : Nutus (...) : volentés, consentemens ou signe et achenemens de la main ou signe des yex en chillant (LE VER, Dict. M.E., c.1420-1440, 332).

B. -

"Fait de grever un bien du service d'une rente" : ...et par especial, il Nicaises en a fait propre about et especial assenement de et sur deux maisons et tenement tenans ensamble et toutez d'un membre qu'il a seans (Vie urbaine Douai E., t.4, 1383, 580).

C. -

"Alliance" : Et pour ce l'ancienne et vraie histoire racompte que depuis que les emprinses des prouesses et des chevaleries de ceulx dont nous avons parlé furent advenues, et que les mariages et assennemens furent confermés, et aussi que chascun se fut retrait en son paÿs avecq sa femme a requoy, les triumphans prouesses d'eux cesserent (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 482).

REM. Ce mot, courant en a. fr., semble tomber en désuétude en m. fr.
 

DMF 2020 - Synthèse Pierre Cromer

 Article 4/32 
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     ASSENER     
FEW XVII sinno-
ASSENER, verbe
[T-L : assener ; GD : assener ; GDC : assener ; AND : acener ; DÉCT : assener ; FEW XVII, 71a,73a : sinno- ; TLF : III, 677a : asséner]

I. -

[Idée d'orienter, de diriger qqn ou qqc.]

A. -

Assener qqn

 

1.

[Idée d'orienter qqn]

 

a)

"Diriger, guider qqn ; conduire qqn (qq. part, vers qqn)" : Je respondi : "Bien vous say assener La ou il est et, s'il vous plaist, mener..." (MACH., J. R. Beh., c.1340, 108). Au lez vers Allemaigne volt son chemin tourner, Et vint en Couvenance une nuyt reposer. Et le volt par miracle Jhesus Crist assener A l'ostel dont le roy s'ot voulu dessevrer. (Tristan Nant. S., c.1350, 654). ...quant vint a l'issue Du courtil, si adonc veüe De chevaliers grant compagnie. Donc tendi sez bras : "Et las" crie, "Saint Evroul, daignes me mener Et a sauveté assener !" (Vie st Evroul S., c.1350, 158). Aviron ne perches n'aront, Mais aval l'iaue s'en yront La ou Diex les vouldra mener ; Quant les ara fait assener A tel lieu come il li plaira, Le vallet le nous revenra Faire savoir. (Mir. ste Bauth., c.1376, 157). Je vous dy que c'est un message Qui nous peut avoir grant mestier. (...) Et si m'a si bien assené Qu'a un port de mer m'a mené (Mir. fille roy, c.1379, 56). Dieu les vueille si assener [les garçons d'une famille] Que haultement puissent regner (COUDRETTE, Mélus. R., c.1401-1402, 208). LE PREMIER. (...) Nous alïons les maulz sentiers, Se Dieu ne vous eust amené. LE SECOND. Dieu vous a a nous assené, Car certes perdue l'ussions, Et apres ce perdus fussions (Mir. ste Genev. S., c.1410-1420, 87).

 

b)

"Placer, installer qqn qq. part ; fixer une place à qqn" : Moÿse le peuple mena La ou le vray Dieu l'assena ; En tenant la verge pelée Trestout par my la mer salée Mena ce peuple les sentiers. (Renart contref. R.L., t.1, 1328-1342, 48). "Dame," dist Bauduins, "par le vertut discrée, Kièvre couvient brouster là où est assenée." (Baud. Sebourc B., t.1, c.1350, 277). Saint Evroul recet leur prïeres Et fist tant - ne demoura gueres - Que quinze abbaïes fonda Ou mont de bien puis abonda. Hommes et fames i asenne, Chascune gens par soi ordenne (Vie st Evroul S., c.1350, 80). ...or dist l'auctoriteit Que l'evesque Johans fut crais et encombreit, Sus I dure ronchin l'avoient asseneit En une estroite selle, puis l'ont tendant mineit Si qu'il sifaite angoisse ne puet endureir, Droit devant Helechines est à terre vierseit. (JEAN D'OUTREM., Geste Liège B.B., t.5, a.1400, 663).

 

-

En partic. "Établir dans un fief" : ...il avoit Ernoul sen aisnet fil assenet à le contet de Flandres, et Bauduin le maisnet à le contet de Hainnau, et avoit fait faire serment as hommes de Flandres et de Haynau qu'il tenroyent celle assenne. (Hist. chron. Flandres K., t.1, c.1342-1383, 16).

 

c)

"Faire signe à qqn (de venir)" : Le dame entre ou batel et Marie fu la Qui de cuer moult piteux le dame regarda Et le roïne ly, que moult le regarda. Ains qu'elle s'esquipast, le dame l'achena (Belle Hélène Const. R., c.1350, 256). Evous la venue Argentine, Qui l'acene et li fait .I. signe Qu'il se traie avant, de par Dieu. (FROISS., Méliad. L., t.2, 1373-1388, 84). "Vela le roi, je voel aler parler à lui. Ne vous mouvez de chi, se je ne vous acène, et se je vous fac che signe (si leur fist un signe), si venés avant, et ochiiés tout, hormis le roi" (FROISS., Chron. R., X, c.1375-1400, 118). ...Car je voy que taire ne doy Que Boscalus lieve le doy Entre sa gent devant la cene Et les lointains a soy acene (Pastor. B., c.1422-1425, 233). Ainsy que le chariot le approuchoit, il vey que une main se mettoit hors par la couverture du chariot. Et sachiez que celle main l'assena. Quant le gentil chevalier vey ce, il eut grant merveilles que c'estoit a dire et s'apensa que pour aucune chose il estoit assené et que a lache seroit tenu s'il ne aloit celle part. (Percef. III, R., t.3, c.1450 [c.1340], 154).

 

d)

"Donner un rendez-vous à qqn" : Le dimanche apres Pasques charnelz Pierre Limosin le jeune et Jehan Vincent requirent le dit suppliant qu'il s'en aleist avec eulz en l'ostel d'une femme nommee Katherine, laquelle les avoit asseniez la nuyt pour couchier avec elle (Arch. Nord, 1455, B 1686, f° 36, IGLF).

 

2.

[Idée d'orienter qqn vers qqn d'autre]

 

-

Assener qqn (à qqn). "Pourvoir qqn d'un conjoint, marier qqn" : ...Car j'avoie assenér ma fille a telz baron Qu'i n'i ait si herdit de si a Besanson ! (Lion Bourges K.P.F., c.1350, 582). Or a quise la beste Blanchandine ung baron, Et a Tristan mouller de tres noble façon ; Ne l'a pas assené a fille de bricon, Mais a fille de roy (Tristan Nant. S., c.1350, 207). Car fait nous a grace moult grant De ce qu'a un si bon enfant Avons nostre fille donnée, Qu'estre ne pouoit assenée Miex (Mir. femme, 1368, 183). Je n'ose aller en bois, ville ne plaine, Dancer, chanter, manger, boire de vin, Que le villain [le mari], a guise d'un mastin, Ne m'abbaie, crians : "Que fais tu la ?" Perdue suis, maudis soit, sy deffin, Et pandus soit qui ainsi m'assena ! (DESCH., Oeuvres Q., t.5, c.1370-1407, 28). ...se messires Aymons (...) pooit venir par voie de mariage à la fille dou conte de Flandres (...) on ne le poroit miex mettre ne assener (FROISS., Chron. L., VI, c.1375-1400, 81). Nous vous prions qu'a un bon filz, Nostre ami, la [une fille ] vueilliez donner, Car nous le voulons assener (Mir. st Alexis, 1382, 295). Ains que d'ici me parte, serés bien assenee S'il a deça la mer prince qui vous agree. (Flor. Octav. L., t.2, c.1400, 400).

 

-

Estre assené. "Être marié" : S'estoie a marier, par Dieu omnipotent, Et je peüsse avoir a vo corps parlement, J'esploiteroie tant, de coer et de talent, Qu[e] j'aroie de vous l'amour, parfaitement, (...) Mais je sui assenés, s'ai mis mon serement (Bât. Bouillon C., c.1350, 82). - Florie, dit la dame, or n'i allez pansant ! Mes filz est assenér en Sezille la grant. (Lion Bourges K.P.F., c.1350, 632).

 

-

Assener qqn en tel lieu. "Établir qqn par mariage dans telle famille" : ...elle li donnait Cuer, et corpz, et amour, et tout li presentait ; Et ung annelz d'or fin per amour li donnait ; Et Ollivier le prist, que la li affiait Qu'il revanrait laiains au pluxtost qu'il porait. Maix Dieu ne lou volt mie, car plus halt l'assenait : A la fille d'un roy Ollivier mariait Et fuit sire de Bours, car il la conquestait. (Lion Bourges K.P.F., c.1350, 761). ...li chevaliers d'Escoce (...) orent consel ensamble a savoir la ou il poroient lor roi marier et asener en lieu dont il vausissent le mieux. (FROISS., Chron. D., p.1400, 170). Sy ne peut estre que ce ne soit par ton meffait, car de toy mesmes tu es tant simple et tant ignorant que tu ne scez quant tu fais bien ou mal, par quoy Amours s'est apperceu que tu ne vaulz point d'estre assené en sy hault ne sy noble lieu, et pour ce le te a il mis ainsi hors de tes voyes. (Percef. III, R., t.1, c.1450 [c.1340], 284).

 

.

Assener bas. "Viser bas" : Cilz qui veult paix et vivre en mariage Ne doit trop hault ne trop bas regarder, Trop jone avoir ne trop vielle en mesnage ; Prengne femme qui sache gouverner, D'age moyen, qui puist enfans porter ; Ainsy pourra mener joyeuse vie Sans trop querir, sans trop bas assener : Sages est cilz qui ainsy se marie. (DESCH., Oeuvres Q., t.5, c.1370-1407, 248).

 

-

Assener qqn à un lignage. "Donner qqn en mariage, en guise d'alliance, dans telle famille" : Le roy de Galles en fut moult joyeulx de la largesse de Cleriadus et, en son cueur, mercye Nostre Seigneur de ce que sa fille estoit assenee au lignaige de Cleriadus. (Cleriadus Z., c.1440-1444, 168).

 

-

Assener qqn par mariage en qqn : ...[le roi] moult en fu joieulx et dit que de sa part il ne sçavroit mieulx ne plus haultement assener par mariage son nepveu le prince qu'en la contesse, se par amours elle y voloit condescendre. "Ouïl, certez, sire," respondy le conte d'Artois, "car j'en cuide bien chevir." (Comte Artois, c.1453-1467, 64).

 

3.

Assener qqn (de qqc.). "Renseigner, instruire qqn au sujet de qqc." : - Sire, s'ai dit Lion, Dieu vous ait fait parrler, Car je croy que cis hons nous porait assener Et dire aulcune chose pour nous painne fineir. (Lion Bourges K.P.F., c.1350, 156). Sy vous requiers, tres noble roy, et a tous les chevaliers du Francq Palais qui sont tenus de adressier les dames et les damoyselles, qu'ilz me voeullent assener de ce que je demande, c'est du chevalier qui porta les noires armes au couronnement du gentil roy de Cornuaille. (Percef. III, R., t.1, c.1450 [c.1340], 271).

 

4.

"Doter, pourvoir qqn de, en qqc." : ...item que ledit Rigaul ait et possede sissante muys de speaulte ["épeautre"] heritables pour ly a prendre et a lever a Fexhe sur les pieces de terre cy dessoub escrit, et trente et huict muyds pour dame Maroye sa soeur, nonain del Vaulx Benoiste, lequeis deverat rendre ledit Rigaul alle dicte dame le cours de le vie ledicte dame Maroye, s'il plaist a ladicte dame Maroye, et se chu non, que ladite dame Maroye soit asseneit de ces pieces de terre ung bonnier pour quattre muyds a son marmontant et toudis par nostre dict (HEMRICOURT, Pièces div. B.P., 1366, 77). Si fu regardé que li rois d'Ermenie [en exil] pour tenir un estat moyen, seroit assené de une rente et revenue par an (...), si fu assigné le dit roy d'Ermenie de VIM frans par an (FROISS., Chron. M., XII, c.1375-1400, 224). Donnez leur argent pour achecter, pour eulx et pour leurs hoirs, cinq cens livres de rente à chascune à par soy et aussi, à toutes les troys, IIIm.livres à partir ensemble. Et de tout cela, (...) en furent bien asseurees toutes les troys et assenees tant que à tousjours mais en furent riches. (Cleriadus Z., c.1440-1444, 423).

 

Rem. Dans l'ex. de Froissart, assener et assigner sont substituables.

B. -

Assener à qqn

 

1.

"Aller vers qqn, rencontrer qqn, s'adresser à qqn" : Il a a bon mire assené, Mais je n'y puis avoir fiance, Ne ja n'i vueil mettre m'entence Jusques j'aye veü sa face. (Jour Jug. R., c.1380-1400, 229). Que me vueilliez dire conment Le [un saint homme] trouveray, car autrement Ne saroie a qui assener N'en ce moustier qui amener Avecques moy. (Mir. st Alexis, 1382, 339).

 

2.

"Épouser qqn" : Ou temps passé, quant je me marïay, Je eux paour d'entrer en jalousie, Mais, Dieu merci, bonne femme trouvay : (...) C'est la meilleur, de bonne heure l'amay : Dieu et les sains humblement remercie Que sans peril a sy bonne assenay. (Recueil galant. V.-B., c.1350-1400, 7).

 

-

Assener à une partie. "Faire un mariage, épouser" : Vrays Dieux, que c'est noble chose et joieuse, Paix et repos a homme qui femme a Obeissant, douce, humble et gracieuse, Et qui oncques son mari ne coursa, Mais en tous cas l'oneure et honourra, Et qui veult tout ce que son mari veult ! Qui tele l'a, il est foulz s'il se duelt, Quant assené a a tele partie. (DESCH., Oeuvres Q., t.6, c.1370-1407, 138).

 

3.

[D'une chose] "Convenir à qqn" : ...les prevosts des marchans, eschevins, bourgois et gens de mestier, manans et habitans de la ville de Paris, chascun estat aiant baniere à lui assenant et appartenant (MAUPOINT, Journ. paris. F., p.1467, 103-104).

 

4.

Assener à qqn de + inf. "Fixer à qqn comme but de" : Car de son mal bien garira, Les bons cirurgïens querra ; De sa viellesse pascïence Ne poeult avoir plus grant sïence. Mais de jalouzie saner Ne scet a nul mire assener. (Renart contref. R.L., t.1, 1328-1342, 34). Car oncques puis qu'a vous mon corps s'acompaigna, Ne pos durer sans vous. Nature m'assena D'amer le vostre corps ou tant de bonté a. (Tristan Nant. S., c.1350, 418).

C. -

Assener qqc.

 

1.

"Fixer qqc."

 

a)

[Une chose concr.] : "...Regardés ceste langue : li mien cors la copa De la teste au joiant qu'aportee on vous a. Vecy vraie ansaingne ; nulz ne m'an desdirait. (...) Ataichiez cest langue au chief qu'il apourtait, La porés vous savoir se joindre s'i porait." Quant l'amiraz l'oyt, assés la regardait ; Or ne sceit que pancer, forment s'amervillait ; Dont dit au chevalier car il responderait Aprés ceu qu'an la goulle celle langue assenait. (Lion Bourges K.P.F., c.1350, 63).

 

b)

Au fig. [Un temps, un lieu] : Dont fist le roy lettres escripre et mist clers en oeuvre à grant plenté, et manda à tous que ilz feussent au Port de Portingal ou là près, dedens le jour que il y assena (FROISS., Chron. M., XII, c.1375-1400, 281). L'obseque sera fait moult noble, et le terme assennez que les barons feront hommage au jeusne conte. (ARRAS, c.1392-1393, 27). Et l'endemain at ons celebreiz messe devant les champions et puys sont armeiz et monteiz a chevaulx. Et sont brocheit en preiz qui estoit assenneit. (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 79). Charlez at assenneit jour de combattre a ung mois : ce fut le IIIIe jour devant la Saint Martin. (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 181). Certes raison n'aura ja lieu Ou fureur celebre son senne. Fureur n'aime pas le milieu Que vertu demande et assenne. Et pource l'ireux tart s'enhenne A regarder la vérité (MARTIN LE FRANC, Champion dames I-II, P., 1440-1442, 170).

 

Rem. Dans ce sens, le verbe assigner est beaucoup plus empl. que assener.

 

2.

"Régler, diriger qqc." : Or avint Que sa voie bien assena, Car la belle Polixena (...) Encontra (FROISS., Joli buiss. F., 1373, 69).

 

-

"Mener à bien, à terme qqc." : Or va, Judas, en la bonne heure ! Et garde bien qu'il ne s'en fuie, Car sa vie forment m'ennuie. Avez vous bien Judas oÿ ? Vous devrez bien estre esjoÿ, Se assener pouez ceste prise. Que le char du glouton soit prise ! (Myst. Pass. N.S. R., c.1350-1370, 121). Missire Lamer mercya le chevalier et luy dist que, pour ceste heure, il luy pardonnast s'il n'y alloit, et qu'il avoit entreprins ung affaire qu'il falloit qu'il assenast. (Charles de Hongrie C., c.1495-1498, 24).

D. -

Assener à qqc.

 

1.

[Une chose abstr.]

 

a)

"Jeter son dévolu sur qqc., désirer" : Souffisse vous ce que Dieu nous envoie : Cieulx est rices a qui demeure joie, Non mie cieulx qui au tresor assanne ; Et dout la departie. (Percef. lyr. L., c.1450 [c.1340], 70). La contesse, veant le fin dyamant, qui estoit mis en son traittié, le congnut legierement et moult d'aultrez fois l'avoit veu, sy le prist et dist qu'a cestuy avoit elle bien assené, si ne vouloit plus avant eslire. (Comte Artois, c.1453-1467, 136).

 

b)

"Parvenir à qqc., atteindre (un but)" : Et vraiement, Tant fu belle, que je croy fermement, Se Nature qui tout fait soutilment En voloit faire une aussi proprement, Qu'elle y faurroit Et que jamais assener n'i saroit, Se l'exemple de ceste ci n'avoit Qui de biauté toutes autres passoit. (MACH., J. R. Beh., c.1340, 72). Mais repeter Vueil vos raisons, se j'y puis assener. (MACH., J. R. Beh., c.1340, 92). Dieu doint que je puisse assener à la verité (LE BEL, Chron. V.D., t.2, 1358, 23). ...car en toutes choses c'est fort de prendre le moien et de assener au moien (ORESME, E.A., c.1370, 172). Et chils si bien y assena Qu'en l'ymage a dire riens n'a De proprieté ne d'assise (FROISS., Joli buiss. F., 1373, 64). Enquiere bien celle que l'on appelle La nompareille que l'on puisse trouver ; Cerche partout s'il y scet assener. (GARENC., Poésies N., 1389, 23). ...tout aussi sont aucuns de leur nature sy eureux et sy bien fortuné, quant a penser ou a pronostiquer des choses dessusdites secretes et occultes, qu'ilz asennent tousdiz communement a la vraye partie. (EVR. CONTY, Eschez amour. mor. G.-T.R., c.1400, 85).

 

-

Empl. abs. "Réussir, parvenir à un but" : "Peres," dist la pucelle, ".I. don vous voel rouver Que les clés du trezor me cargiés a garder. A le fois i venrai por mon cors deporter". "Fille", dist li Califes, "ne fait [pas] a greer, Mais rouvés autre chose si porrés assener." (BRIS., Restor paon D., a.1338, 81). Et, ce fait, s'en alerent en l'ostel d'un marchant de tissuz de soye à Paris, dont ils ne scevent le nom, (...) mais bien ilz asseneroient, et y demanderent des tissuz à veoir (Paris domin. angl. L., 1430, 312).

 

c)

Assener à/de + inf.

 

-

"Se fixer pour but de" : Si est la voie bonne et seine, Par quelle qui d'aler s'asseine Ne puet errer du necligence, Ainz jusq'au joye sovereine Par vertu du bon overeigne Irra devant la dieu presence. (GOWER, Miroir homme M., c.1376-1379, 154). Donc, ne de corps ne d'esperit, N'ont elles [les femmes] sur nous avantage. Leur fresle corps tantost perit, Vermolu et mort avant aage. L'ame sans bon arrest volage Ne scet qu'en vices forsener. Femme de tresmauvais courage Ne veult a bien faire assener. (MARTIN LE FRANC, Champion dames I-II, P., 1440-1442, 167).

 

-

"Parvenir à..." : Cil qui vinrent à Bervich ne fallirent mies ; ançois assenèrent de prendre et eschieller le chastiel et tuèrent toutes les gardes qui dedens estoient (FROISS., Chron. L., IV, c.1375-1400, 142). Si ne quier son tresor celer, Car tel avoir digne est de loz ; Tel vertu il ot, dire l'oz, Que tuit li larron, qui sont né, N'aroient jamais assené A lui en une goute embler. (CHR. PIZ., M.F., I, 1400-1403, 13). Et qui pener Se scet a amours demener, Trop mieulx en sara assener A ses besoignes bien mener. Qui bien pourcache D'amer, celer lui faut sa cache, Parler et maintien faut qu'il sache (CHART., L. Dames, 1416, 287).

 

2.

[Un lieu] "Parvenir à (un lieu)" : ...j'eu le cuer si esperdu Que je ne sceu quel part aler Ne a mon chemin assener (Mir. femme roy Port., c.1342, 157). Et se vous ne savez le chemin, je vous vous y aideray a assenner, car il n'a voie ne sentier en ceste forest que je ne saiche bien ou ilz vont (ARRAS, c.1392-1393, 25). ...a mains de pas Que je n'iroye ou quart d'une heure, J'aseneroie ou (...) demeurent De tieulx, qui grandement honneurent Science (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 64). Loué soit le doulx Jesucrist Qui de sa grace m'a mené Si tres bien que j'ay assené Droit au lieu ou mes freres sont ! (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 380). Lors a parmi le bois le conte tant alé Qu'il assena au lieu où son filz a trouvé, Et l'enfant se dormoit bellement et soué. (Enfances Doon de Mayence P., c.1450-1500, 404).

II. -

DR. [Idée d'attribution] Assener qqc. (un bien, une rente...) (à qqn). "Attribuer, accorder qqc. (à qqn)" : Nous qui ne voulons pas que lesdiz chapellains soient fraudés de leurdite rente, en recompensacion d'ycelle, leur asseons et assenons (...) autres vint et six livres de rente à parisis à prendre, avoir et recevoir doresenavant, perpetuelment, à touz jours maiz, sur toutes les revenues et emolumenz de la souz baillie et prevosté de Poissi (PHIL. VI VALOIS, Doc. paris. V., t.1, 1335, 234). Car labour sans loiier est merchis sans pardon. Li glore du mont est en .II. poins, ce voit on, En preus et en hounors. Mais assener doit on Le proufit as petis, l'ounour au haut baron.xx (BRIS., Restor paon D., a.1338, 102). ...Et de ce qu'il ont bien servi, Dont il ont grace desservi, J'en vorray l'escot assener, Et a chascun son droit donner.xx (MACH., J. R. Nav., 1349, 260). ...et le retint de son conseil et luy assena la conté de Richemont pour son estat maintenir (LE BEL, Chron. V.D., t.1, 1352-1356, 108). Adont prisent conselhe ensemble ly syres de Warfezéez et messires Rasses, sires de Domartien, ses genres, qu'il feroiient les dois freires deseurnomeis prendre l'ordenne de chevalerie et qu'il leur assenneroient terre pour mineir leur estat (HEMRICOURT, Miroir Hesb. B.B., 1353-1398, 9). Et les tres haultes montaingnes sunt aux cerf deputees et assenees. Et li pierre dure est li refuge aux herissons (Psaut. lorr. A., 1365, 105). Puis peus voir la .IIe. sourse, Quy est merveilleuse resourse A ceulx quy en veulent user Sans, par faintisë, abuser Encontre cil quy l'ordonna, Quant pour en boire l'assena Aux vrais piteux, misericors (COURCY, Chem. vaill. D., 1406, 79).

 

-

Assener qqc. sur qqc. "Garantir le paiement de qqc. en y affectant un certain fonds" : ...lequelle capellenie lidis mesires Loys, nos chiers freres dessus dis, assena et dowa especialment et generalment sour tous ses aqués et appartenanches (Trés. Reth. S.L., t.2, 1346, 70).

 

-

Assener la vie à qqn. "Assurer à qqn des moyens d'existence" : ...au Bois de Vincenes fonda chanoines, leur assena leur vie par belles rentes amorties (CHR. PIZ., Faits meurs Ch. V, S., II, 1404, 38).

III. -

[Idée de prendre qqn ou qqc. pour cible]

A. -

Assener qqn/sur qqn

 

1.

"Diriger un coup contre qqn, atteindre, frapper qqn" : [Le chevalier] Parmi la teste l'asena, Tant que par force jus ala Li jaians com tous estourdis. (Dame Lycorne G., c.1349-1350, 177). Et fiert ung Erminois sur sa targe votie. Tellement l'assena, pour voir le vous affie, Le ceur lui pourfendi et d'encoste le fye (Tristan Nant. S., c.1350, 160). ...au cuer me fist grant hide Quant de ce fer li vi donner Et parmi le corps assener (Mir. emp. Julien, 1351, 211). De ma lance le vueil hurter Ou miex assener le pourray. (Mir. Rob. Dyable, c.1375, 63). ...et entant luy getat ung batton qu'il estoit tenant tout parmy le viaire et l'aisenat sy qu'il en fist yssir le sanc de la bouche et du neiz. (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 180). Procris fut longuement avec Dyane es bois pour chacer, et quand retourna a son mari Cephalus, Dyane lui donna un dart de telle vertu que la ou elle le gectoit tousjours assenoit et tuoit ce que elle assenoit, et puis retournoit a sa main (LEGRAND, Archil. Sophie B., c.1400, 183). Si ne fut Beufves de Hantonne gueres esbahy, ainçois tendit la lance et poingnit Arondel le noble destrier des esperons si qu'il le fist saulter plus de dix piedz et assena le payen sans menasser, tellement que mort le porta emmy le pré. (Beufves Hant. I., c.1499-1503, 32).

 

-

[Du dieu Amour] "Atteindre, frapper le coeur de qqn" : Après [le dieu d'Amour] me dist : "Scez tu pour quoy Sans yeus sui et goute ne voy ? C'est pour ce que, quant il avient Qu'un cuer assener me couvient, Nulle goute ne doy vëoir Au donner ne a l'assëoir..." (MACH., D. verg., a.1340, 27). S'en loe Amours qui ha par sa doctrine Moi et mon cuer si tres bien assené Que j'aim la fleur et la droite racine De tous les biens (MACH., L. dames, 1377, 24).

 

2.

Assener sur qqn. "Frapper, battre qqn" : (Il prent sa plommee.) Regardez, j'ay la mienne. Soit bastu comme plastre ; Or voyez sans debatre Le tres ort vil follastre, Comme sur luy assenne. (Myst. st Laur. S.W., 1499, 231).

 

-

[D'une chose] : ...un perilleux baston quant il assene sur les espaules ung homme desarmé (LA BROQUIÈRE, Voy. Outr. S., c.1455-1457, 221).

 

3.

Empl. abs. : ...et communement vous ferez meilleur coup d'une lance moyenne que vous pourrez bien manier que vous ne ferez d'une grosse lance pesante qui vous dessiège de vostre selle. (...) vous n'en courrez pas si beau, si puissamment ne si afusellé comme de la moyenne, ne n'en assegnez pas si bien. (BUEIL, II, 1461-1466, 101).

 

4.

Empl. pronom. réciproque : Sy sont assenneiz sur les ecus sy qu'ilz les ont traueiz, maiz ilz ne sont mie abatus. (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 80).

B. -

"Asséner qqc."

 

1.

"Frapper, atteindre qqc. (avec une arme, un outil...)" : ...et jeo siu tout certeyn qe au ferir einz de clou, meynt foize failli le felon ribaud d'asener le dure clou et feri la douce tendre mayn moelt durement, qe grande peyne vous feust, tresdouce Sires (HENRI LANC., Seyntz medicines A., 1354, 182). Atant brochent l'ung vers l'aultre et asennent les escus, sy ont briseez leurs lancez. (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 153). ...et ne scavoient les canonniers assener le chastel, ains alloient tousjours les pierres pardessus. (WAVRIN, Chron. H., t.5, p.1471, 95).

 

-

Assener qqc. en qqc. "Diriger qqc. vers, frapper qqc. avec" : Et la verge qui Justice comprent Voult Moisès en la pierre assener Dont l'yaue yssi (Mir. st J. Paulu, c.1372, 150).

 

2.

Assener un coup. "Donner, frapper un coup" : Au senestre costé assena tel merel, Se le haubert ne fust d'ouvrage si royel, Encontre cestui coup ne durast ung navel (Huon Bordeaux B., c.1400-1450, 123).

 

-

Assener qqn un coup : Gerars tira l'espee hors du foere, sy assena celluy sur la coiffe d'achier ung cop sy grant que ung oreille et la moittyé du menton luy abaty sur la poittrine. (Gérard de Nevers L., c.1451-1464, 79). ...et l'assena premier ung cop moult bien assis, mais aultre rien ne luy meffist (Comte Artois, c.1453-1467, 12). ...mais quant ce vint au joindre, le sire de Moncade assena le conte d'Artois en l'escu ung cop sy grant que sa lance vola contremont en esclaz, mais de la selle oncquez ne le remua (Comte Artois, c.1453-1467, 55).

IV. -

Part. passé en empl. adj.

A. -

(Estre) bien/mal assené

 

1.

"(Être) bien ou mal loti ; avoir de la chance ou de la malchance" : "Bele," dist li boins rois, "bien estes assenee, Benëois soit de qui vous fustes engenree..." (BRIS., Restor paon D., a.1338, 129). Et au filz le sodant d'Aicre qui fuit tués Es plain de Rommenie si comme oys avés, Tramist trante quetis ensement atornés. Herpin n'i allait mie, bien en fuit assenés, Car de cez trante la n'en fuit nulz eschappés (Lion Bourges K.P.F., c.1350, 110). - Sire, ly chevaliers dont je suis embrasee, C'est Guyon de Nanteul a la brasse quarree ; Ençainte suis de lui, c'est bien chose prouvee. - Dame, ce dist le duc, mal estes assenee Car Guyon de Nantuel a mouller espousee Aiglantine qui est de mon lignaige nee (Tristan Nant. S., c.1350, 107).

 

-

P. iron. Estre bien assené. "Être bien loti ; être bien avancé" : LE JUGE. Veez vous ? Suis je bien assené ! Il ne cessera huy de braire. (Path. D., c.1456-1469, 176).

 

Rem. Sur les différentes trad. proposées pour cet ex. : "assommé", "pourvu de bon sens", "dirigé", "bien servi", "bien placé", "bien renseigné", cf. F. Rauhut, Z. rom. Philol. 97, 1981, 276.

 

2.

Estre mal assené à + inf. "Être mal renseigné pour... ; avoir tort de" : [Le chevalier vient de reprocher au conte de le haïr à mort] "Chevaliers," dist li contes, "ne sai homme vivant Que je hache ["haïsse"] de mort, chertes, né tant né quant. Mal estes assenés à dire tel rommant." (Baud. Sebourc B., t.2, c.1350, 303).

B. -

[D'une pers. mariée ou engagée dans une affaire sentimentale]

 

1.

(Estre) assené de qqn. "Avoir l'affection de qqn" : Et si me tien a mieulz paree et a plus honnouree de vostre amour que de roi ne de prince qui soit en monde, car a mon gré il n'a fame en monde mieus assenee d'ami que je suis (MACH., Voir, 1364, XXVI).

 

2.

Empl. abs. (Estre) bien/mal assené. "(Être) bien ou mal loti dans le domaine sentimental" : N'en ce monde ne fust mie trouvée Dame qui fust si tres bien assenée.x (MACH., L. dames, 1377, 176). Qu'onques dame ne fu née Si bien assenée, Puis qu'il est miens et il m'a. (MACH., Les lays, 1377, 364). Et puis que ad ce s'est accordee Vo gracieuse volenté, Je suis contente en ma pensee. Mon cueur tiens pour bien assené. (LANNOY, WERCHIN, Ball. P., 1404, 362). N'il ne semble ne sage ne sené, Tant se demaine et tant est malmené. Et se clame d'Amours mal assené Et baraté, Et se complaint de sa grant loyauté (CHART., D. Fort., 1412-1413, 184). Dieu mercy, quant me tenés Avoec vous, bien sui assenés. Je ne fuisse pas sy tres liés, Se tous me fust quittiés bailliés Ly mondes, com sui quant vous voy. (Pastor. B., c.1422-1425, 232). Tu m'ayderoy bien a chanter. L'espouse se peult bien vanter Qu'elle sera mal assenée. (Myst. st Bern. Menth. L., c.1450, 33). Et je voy que la chevalerie de ce royaume ne tient compte de vous, mais ce proucede pour ce que vous ne vous faittes de rien cremir, servir ne aucunement honnourer, dont m'en tiens a meschante et mal asnee [sic]. (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 484).

 

-

Estre assené d'une certaine manière. "Avoir telle disposition de caractère" : Dist le duc de Berri : "Ce seroit un beau jeu, Car je sui assenné, si con saint Thomas fu : Ce le chose ne voy, je ne l'ay pas creü." (CUVELIER, Chans. Guescl. F., c.1380-1385, 422).

C. -

Empl. subst. La mal assenee. "Femme mal mariée, femme qui a peu de satisfaction sexuelle avec son mari" : Je dors tousjours sur mon coissin, Et ne foys chose qui agree Gueres a ma malassenee [l. mal assenee], Dont me fait les groings au matin (CH. D'ORLÉANS, Rond. C., 1443-1460, 436). MUNYER. Femme ne sçay de mere née, Qui soit plus aise que vous estes ! FEMME. Je suis bien la malle assenée, Car nuyt ne jour rien ne me faictes. (LA VIGNE, Munyer T., 1496, 197).

REM. Les représentants de sinno- et de assignare (v. assigner) se partagent les mêmes sens par contamination réciproque.
 

DMF 2020 - Article revu en 2015 Pierre Cromer

 Article 5/32 
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     ASSENIR     
FEW XVII sinno-
ASSENIR, verbe
[FEW XVII, 71a : sinno-]

"Assigner" : Jugement que dit coment ung maire a bien a essenir heritaiges sor quoi il demande droictures pour les segneurs don lieu. (Jug. maître-échev. Metz S.M.S., t.1, a.1494, 1355], 341).

REM. V. asséner. GD I, 434c a un adj. asseni dans un texte de Deschamps, cité d'apr. un ms. ; mais DESCH., Oeuvres Q., t.5, c.1370-1407, 187, porte assevis (ex. cité sous assevir).
 

DMF 2020 - Synthèse Pierre Cromer

 Article 6/32 
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     DESSENÉ     
FEW XVII sinno-
DESSENÉ, adj.
[T-L : dessener ; GD : dessener ; FEW XVII, 72a : sinno-]

"Fou, insensé, hors du sen, du sens" : J'ay grant vouloir de moy combatre Contre ces Romains dessannés, Que j'en suis presque forcenez Et em pers presques contenance. (Myst. st Adr. P., c.1450-1485, 20). Las, j'ay erré ! Bien ay esté mal assené Et dessené. Que mauldite soit la journee Que je fus en ce monde né, Car ay jucgé Le juste sans cause approvee ! (Pass. Auv., 1477, 277).

V. aussi dessener
 

DMF 2020 - Synthèse Robert Martin

 Article 7/32 
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     DESSENER     
FEW XVII sinno-
DESSENER, verbe
[T-L : dessener ; GD : dessener ; FEW XVII, 72a : sinno-]

Empl. trans. "Détourner (littér. : faire sortir de la direction [sen])" : Et Desir me vient acuillir, Qui me point et fait tressaillir, Rougir et la couleur muer. Et me deust on ardre et tuer, Sy ne pourray je desener Mon couraige que ne lui die. (Narcissus, p.1426, 291).

V. aussi dessené
 

DMF 2020 - Synthèse Robert Martin

 Article 8/32 
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     DESSENIR     
FEW XVII sinno-
DESSENIR, verbe
[T-L : dessenir ; GD : dessenir ; FEW XVII, 72a : sinno-]

"Perdre la raison, enrager"

REM. LE MUISIT, c.1347-1353, ds T-L II, 1746.
 

DMF 2020 - Lexique complémentaire 2007 Robert Martin

 Article 9/32 
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     EFFORSENNER     
*FEW XVII 73a sinno-
EFFORSENNER, verbe
[*FEW XVII, 73a : sinno-]

Empl. pronom. S'efforsener contre. "Se déchaîner contre" : Et puis que celuy eust souffert moult de tourmens fut il escorché d'iceulx et ne mourut pas. Et pour ce ne despit il pas ceulx qui l'occioient, mais les admonnestoit par miracles et recevoit ses contraires. Mais il n'estoit chose qui refraignist leurs bestiaulx pencees ne ne retraisist de maulx. Que firent ilz aprés ? Ilz s'efforcennerent contre le saint corps. (BATALLIER, Lég. dorée D.-L., 1476, 795).

Rem. Ou lire se (f)forcennerent ? V. forcenner. MotsFantomes : efforsener.
 

DMF 2020 - MAJ 2020 Pierre Cromer

 Article 10/32 
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     ENFORSENNÉ     
FEW XVII sinno-
ENFORSENNÉ, adj.
[GD : enforsener ; FEW XVII, 73a : sinno-]

"Furieux" : L'admiral fut plus determiné et enfourcenné qu'il n'avoit esté par avant (BAGNYON, Hist. Charlem. K., c.1465-1470, 92).
 

DMF 2020 - Lexique complémentaire 2007 Pierre Cromer

 Article 11/32 
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     FORCENABLE     
FEW XVII sinno-
FORCENABLE, adj.
[T-L : forsenable ; GD : forsenable ; FEW XVII, 72b : sinno-]

"Extravagant, insensé, déraisonnable" : La sentence fut forsonnable, Plaine d'oultrage, de cruaulté (SAINT-ANDRÉ, Livre Jean de Bret. C., c.1400, 434).

Rem. Ex. d'a.fr. et Myst. ste Barbe, 1493 (forsonnable) ds GD IV, 96b.
 

DMF 2020 - Synthèse Denis Lalande

 Article 12/32 
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     FORCENAGE     
FEW XVII sinno-
FORCENAGE, subst. masc.
[T-L : forsenage ; GD : forsenage ; DÉCT : forsenage ; FEW XVII, 72b : sinno-]

"Folie, fureur, rage" : Athamas plain de grant rage, La deesse de forcennage, Fist estrangler ces .IJ. enfans ; Pour ce grant yre te deffens. (CHR. PIZ., Ep. Othea L., c.1400-1401, 182). ...Pour vestir les personnaiges De doeul et de foursenaiges (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 575).
 

DMF 2020 - Synthèse Robert Martin

 Article 13/32 
StructureSans exempleCompletFormesExemples
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     FORCENÉ     
FEW XVII sinno-
FORCENÉ, adj. et subst.
[T-L : forsener (forsené) ; GD : forsener (forsené) ; AND : forsené ; FEW XVII, 72a : sinno- ; TLF : VIII, 1069a : forcené]

I. -

Adj. "Qui est hors du sens, qui a perdu la raison, fou (de colère, de chagrin...), furieux, enragé" : Et quant elle sot la nouvelle, Qui ne li fu plaisant ne belle, Elle fu si desesperée, Si hors dou sens, si forcenée, Que deus enfans qui sien estoient, Pour ce que Jason ressambloient, Occist en despit de Jason, Puis mist le feu en sa maison. (MACH., J. R. Nav., 1349, 233). Et quant de près le pot vëoir [Léandre], Seur le corps se laissa chëoir Au pié de sa tour droitement ; Si l'embrassoit estroitement, Forcenée et criant : "Haro !" Einsi fina belle Hero, Qui de dueil fu noïe en mer Avec son ami, pour amer. (MACH., J. R. Nav., 1349, 250). Et encor ont mi anemi, Que j'ay moult doubté et cremi Et a qui j'ay tant escremi Que le cuer en ay entumi, Mon b mol de be fa be mi Mis en b dur. Amis, tu m'i Pues bien aidier, par saint Remi, Car comme fol et esturmi, Com forsené [var. forsonne] et esrami, M'ont par maintes fois esturmi. (MACH., C. ami, 1357, 142). Et ja soit ce que je ne soie amez, Douce dame, de vous, n'amis clamez, Se vos fins cuers estoit ad ce menez - Dont Dieux me gart - Que par amours fust a autre donnez, J'en seroie si mortelment grevez Que j'en seroie ou mors ou forsenez [var. forsonnez], Ou tempre ou tart. (MACH., F. am., c.1361, 154). Li prince fist fermer la porte, Et les clés avec li enporte, Pour ce qu'entrer on n'y peüst, N'issir, se bien ne li pleüst. Celle nuit vint et descendi Bremons. Et quant il entendi Comment nostre gent sont menez, A po qu'il ne fu forsenés ; Et tant avoit de dueil et d'ire Que ne le vous saroie dire. (MACH., P. Alex., p.1369, 158). Li roys vit bien leur volenté Qu'en riens ne sont entalenté D'avoir traitié, ne pais, n'acort ; Eins ne quierent que le descort. Si s'en partirent, que response N'en portent qui vaille une ronce. Quant il se furent departi, Li roys estoit en tel parti Qu'il cuidoit estre forsenez. Il fist apparillier ses nez, Et tantost monta en galée, Et aussi fist toute l'armée. Si ne tourna ne sà ne là, Mais droit en Chypre s'en ala... (MACH., P. Alex., p.1369, 204). Et si avoient ordené Que troy chevalier forsené Feroient tout ce malheür [le meurtre du roi]. Li uns est li sires d'Absur, Qui le het plus qu'il ne solet. L'autre fu cils de Gibelet, Li tiers fu cils de Gaverelles Qui li porta dures nouvelles, Car ce fu cils qui à grant tort Li donna le cop de la mort. (MACH., P. Alex., p.1369, 268). Je seroie bien forsenez Et devroie estre touz confus Se vous en faisoie refus. (Mir. Oton, c.1370, 365). Car se aucun estoit qui ne crainsist chose du monde ne mouvement ou tremblement de la terre ne inundacions ne autres choses terribles et horribles, il seroit forsené ou il seroit comme celui qui ne sentiroit nulle douleur. (ORESME, E.A., c.1370, 208). Que dira vostre baronnie, S'une meshaingnie prenez ? Il diront qu'estes forcenez De cecy faire. (Mir. fille roy Hongrie, c.1371, 29). Au quel cry la femme du dit Jobert et suer du dit Guillaume d'Argy acouru, criant comme femme forsenée pour la dolour que elle avoit de son dit mary, doubtant que le dit chevalier ne le meist à mort (Doc. Poitou G., t.5, 1377, 58). Et soupir parfondement, Quant vous partés Et faire ne puis comment Vous die "A Dieu vous commant". Desesperez En sui et si forcenez, Quant si mal sui fortunez, Qu'à grief tourment M'ocira vo partement. (MACH., Ch. bal., 1377, 622). Et ceulx leur comptent toute l'adventure, et comment le roy Guion d'Armenie et le maistre de Rodes estoient desconfiz, si ne feust un chevalier tous forcenez qui y survint a tout un pou de gent et crie : Lusignen ! et n'est nul qui a lui se puist tenir. Veez le la ou il se combat a voz gens, et s'est feru ou havre emmy les plus druz, et quanqu'il attaint est destruit et mis a fin. (ARRAS, c.1392-1393, 220). ...je [Remondin] vous feroye mourir de male mort, mais raison naturelle le me deffent, pour ce que vous estes mon frere. Alez vous ent, ostez vous hors de devant mes yeulx. Que tous les menistres d'enfer vous puissent convoier et martirer de VIJ. tourmens infernaulx. Quant le conte appercoit son frere qui fu pres que tous forcenez, si yst de la sale, lui et ses gens, et monte a cheval et s'en va grant aleure vers la conté de Forest, forment doulent et repentant de sa folie entreprise, car bien scet que Remond ne l'aimera jamais ne ne le vouldra veoir. (ARRAS, c.1392-1393, 242). ...li Frison ensi que tout foursené, entroient en la mer, li pluisseur jusques a la boudine, et venoient en cel estat combatre les Hainnuiers (FROISS., Chron. D., p.1400, 644). Ainsy quant les filz d'Israel l'aourerent comme roy, et quant une fois par avant il sembla forcené, pour la grande ardeur qu'il avoit de garder l'onneur de Dieu, son pere, entre les juifs, ilz le blasmoyent (GERS., Concept., 1401, 424). Celui qui mon mal empire Par despire Mon corps a mort condempné ? En France n'en tout l'empire N'y a pire Tirant, meurtrier forcené. (Narcissus, p.1426, 302). ...et pour ce ilz le couvoitent tant qu'ilz en sont forcenés, ces dist Ovide, et leur jugement est corrumpu selon les versifieurs (GORDON, Prat., c.1450-1500, II, 19). Sa mere, toute enragée, forcenée et tant marrie qu'on ne pourroit plus, la voyant ainsi deshonorée, si prend a la tanser (C.N.N., c.1456-1467, 69). Helas ! tant tormentez cest homme ! Je voy bien a vostre visaige, Certes, que vous n'estes pas saige. Par ceste pecheresse lasse, Se j'eusse aide, je vous lïasse : Vous estes trestout forcené ! (Path. D., c.1456-1469, 124). (Ilz s'en retournent tous soubdain, cryans et braillans comme devant.) SATHAN. Nous sommes tretous estonnez, Maulgré en ait Dieu du paillart, Desesperez et forcenez Pour ce que rien ne vault nostre art. (LA VIGNE, S.M., 1496, 516).

 

-

Forcené de + compl. de cause : Achimenides, qui le vit [le géant Polyphème], Disoit comment il se chevit Quant de son oeil fu defferrés : Jamais dÿable ne verrés Si forsené, si enragié De son oeil qu'on a arragié. (MACH., Voir, 1364, 626). ...tous ceulx qui sont forcennez de yre sont ou commandement des princes d'enfer (ARRAS, c.1392-1393, 255).

 

-

"Qui se conduit d'une manière insensée, déraisonnable ; d'où imprévisible" : Or est ma dame comparee A Fortune la forsenee, Quar bien puelent aler ensemble Pour ce qu'a Fortune ressemble En cas de variableté, Ou il n'a point d'estableté (MACH., Voir, 1364, 722).

 

-

[D'un animal] "Furieux" : ...Dont le mareschal ha juré Que, foy qu'il doit saint Honnouré, Ja mais il ne le ferrera Ne près de lui n'aprochera, Qu'il a paour qu'il [un cheval] ne le tue. N'a pas lonc temps qu'en mi la rue Li courut sus, guele baée, Comme une beste forcenée, Et l'eüst estranglé, ce cuide, S'il n'eüst tost fait une vuide. Mais s'il avient qu'il se desferre, .X. hommes faut, quant on le ferre : Li uns sache, li autres boute. (MACH., Compl., 1340-1377, 264). Car nes les bestes qui s'enclinent A li de mal faire ne finent ; Et veü l'avez au jour d'ui, Que pour ce que je me dedui Au lion, ces bestes venues Sont et près de nous acourues, D'envie et de courrous enflées, Aussi com toutes forcenées. (MACH., D. Lyon, 1342, 228). Mais quant je vin a mon hostel, Assaut en ma vie n'os tel, Car Honte me vint assaillir, Dont je cuidai bien sans faillir Qu'elle me deüst estrangler : Onques mais ourse ne sangler Ne beste, tant fust foursenee, Ne vi venir si aïree, Car quant elle vint contre mi, Par Dieu, tout le sang m'i fremi... (MACH., Voir, 1364, 218). Cil Flamenc, qui descendoient orgilleusement et de grant volenté, venoient roit et dur, et boutoient, en venant, de l'espaulle et de le poitrine, enssi comme sengler tout foursené. (FROISS., Chron. R., XI, c.1375-1400, 54). Hector, le fort et le puissant, Un leon forsené ressemble (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 99).

 

-

[D'un comportement, d'un sentiment...] "Fou, déraisonnable" : Or avez oÿ la chanson Du definement jusqu'en son Et d'en son jusques en la fin : Comment li jaians de cuer fin Ama la bele Galatee, Et sa maniere (se) forsenee, Sa traÿson, sa cruauté Et sa tresgrant desloiauté... (MACH., Voir, 1364, 644). J'ay en amours mauvais maistre Qui m'ocist de mort amere, Pour ce que mon cuer desmestre Ne puis de ma dame chiere. S'en vif com homs sans maniere, Pleins de forcené desir, Dolereus, à cuer iré, Quant je voy autrui joïr De ce que j'ai tant amé. (MACH., L. dames, 1377, 68). C'est pensée Forcenée, D'un fol desir engendrée, Qui tue honneur et deffait Honnourée, Renommée, Ne ja n'iert bien dame amée D'amant qui ce pense ou fait, Ne celée Ne gardée. (MACH., Les lays, 1377, 454). ...une foursenee et non loisible amour de une femme de laquelle la hantise estoit tresperilleuse (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 29). Regardez moy quel musart ! Hay avant ! hay ! lasche journee, La malle rage forcenee Tressanglante le cueur vous hape. (P. Jouh. D.R., a.1488, 35).

 

-

[Du coeur, de la tête] "Rendu comme fou, bouleversé" : ...de mes fréres proprement Ay esté futez laidement, Et (...) Ne m'ont dangné frére congnoistre, Dont le cuer ay tout forsené (Mir. Amis, c.1365, 49). J'ay enduré nuyt et jour grant tristesse, A la pluyë, au vent, a la gellee ; Puis ay tramblé, puis sué par destresse. Milles fievres ay eu mainte journee, Et mal de cuer, la teste foursenee, Vellier de nuyt sans nul reposement (Jeu quatre pers. L., a.1465, 193).

II. -

Subst. "Celui qui a perdu la raison, qui est fou furieux, qui est comme fou" : Ainsi les bestes mues qui n'ont pas volenté et entendement ne les enfans et forcenéz qui n'ont pas usage de raison ne font rien voluntairement. (ORESME, E.A.C., c.1370, 183). "Sires, vous n'avés que faire d'emploiier vos gens contre ces foursenés : laissiés les aler et yaus sancier. Il ne vous poent tollir vostre hiretage, ne bouter hors par fumières." (FROISS., Chron. L., VII, c.1375-1400, 246). Orgueil trebuchera qui si hault y veult monter, Ire la forcenee n'i pourra demourer, Luxure, la paillarde, et Gloutonnie, la soullarde, et autres Vices mauvais n'i pourront dedens entrer. (GERS., Pent., p.1389, 74). Et s'aucune fois ilz samblent rire ou jouer, c'est le ris et le [le] chant des forsonnez et des hors du senz. Bien sont hors du senz voirement quant ilz se vont pendre et tuer perdurablement. (GERS., Pent., p.1389, 85). Par laquelle denonciacion ceulz de Thebes, esmeuz en ire, se combattirent comme forsenez et vaincquirent la battaille sur les puissans. (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 55).
 

DMF 2020 - Article revu en 2015 Robert Martin

 Article 14/32 
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     FORCENEMENT     
FEW XVII sinno-
FORCENEMENT, subst. masc.
[T-L : forsenement ; GD : forsenement ; FEW XVII, 73a : sinno-]

"Folie, fureur, rage" : SATHAN. Crever puisse tu, quant tu nous Faiz tant de peinne et de traval, Faulx traite, dyable desloyal, Plain de noise et forcennement, Roy d'anfer, eternellement Mauldiz sur toute creature ! Tu nous donne tant de torture Que c'est bien chose inexprimable. (Myst. st Adr. P., c.1450-1485, 109). Car de ligier tous forcenemens de vices regneront (MICHAULT, Doctr. temps prés., 1466. In : Chrestom. R., 200). Lou ravissant et comme chien, Plain de rabi foursenement... (MOLINET, Myst. st Quentin C., c.1482, 183). Rens [l. Riens] n'y vault tourment qu'on leur face (...) ...ilz prient devotement Leur dieu qui les coups rompt et ploye. J'en ay pris tel forcenement Que je m'ochis, s'on ne me loye. (MOLINET, Myst. st Quentin C., c.1482, 284). Aide, aide. Je meurs de grant fourcenement. Harau, quel paine et quel tourment. (MOLINET, Myst. st Quentin C., c.1482, 286).

Rem. Ex. d'a.fr. ds T-L III, 2146. Guill. Orange T.H.G., p.1450, gloss. (forcenement).
 

DMF 2020 - Synthèse Robert Martin

 Article 15/32 
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     FORCENÉMENT     
FEW XVII 72b sinno-
FORCENEEMENT, adv.
[T-L : forsener (forseneement) ; GD : forseneement ; AND : forseneement ; FEW XVII, 72b : sinno-]

"Dans la folie, avec fureur"

REM. Gloss., Paris B.N. lat. 7679, c.1400-1500 (furialiter : forcenement), Ancienneté des Juifs (ms. fin XVe s., fourseneement) et De Vita Christi (XVe s., fourseneement) ds GD IV, 96c. Aussi Hist. anc. jusqu'à César O.C.-N., c.1330-1350, 276 (forceneement).
 

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 Article 16/32 
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     FORCENER     
FEW XVII 72b sinno-
FORCENER, verbe
[T-L : forsener ; GD : forsener ; AND : forsener ; DÉCT : forsener ; FEW XVII, 72b : sinno- ; TLF : VIII, 1070a : forcener]

I. -

Empl. intrans.

A. -

"Devenir fou, comme fou" : ...le prince de Castellongne tel deul en son cuer recevoit que pou s'en failly qu'il ne foursena (Comte Artois S., c.1453-1467, 32). ...Semiramis sachant [la tuerie des Assiriens], elle forcenoit et, comme femme enragee veant tuer ses enfans, crioit merveilleusement en sa voix feminyne et clere (MAMEROT, Traité Neuf Preues S., c.1461-1472, 33). Tantost l'admiral sceut la mort de Sortybrant, dont a peu qu'il ne forcenna de dueil (BAGNYON, Hist. Charlem. K., c.1465-1470, 165).

 

-

Cuider forcener. "Avoir l'impression de devenir fou" : Le roy fu si dolent qu'il cuida forcener (Renaut Mont. B.N. V., c.1350-1400, 224). Nouvelles vinrent à messire Jehan de Hollandes que li uns des archiers à messire Richart de Stafort avoit mort son escuier, celi ou monde que il amoit le mieux (...) Quant messires Jehans de Hollandes fu enfourmés de ceste avenue, si quida bien foursener. (FROISS., Chron. R., XI, c.1375-1400, 261). La, voit les Troyens malmener, Bien cuide d'ire forsener (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 100). Quant elle y fut arrivee et elle voit Ladiree qui parloit seul à seul à ung homme, elle cuida forcener (Cleriadus Z., c.1440-1444, 377).

B. -

"Se comporter follement, furieusement, durement" : ...quant Clovis s'aire Il forcene, ce vous puis dire, Conme un lion bien attené (Mir. Clov., c.1381, 217). Et ne te sousfist il pas de forsener en publicque mauvestié sans forcener en deshonnesteté privee ? (LA SALE, Sale D., 1451, 112). Quant elle eust beaucop crié et cerchee, devint enrouee a force de crier et commença a forcener (Belle Maguel. C., 1453, 35). ...la vielle (...) voyant qu'elle estoit addressee a ung jeusne radde gallant qui (...) lui reprouveroit sa ridee peau, forsena toute et jura saint Pierre et saint Piat que jaméz ne yroit avant en ce mariage (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 232).

 

-

Forcener contre. "Se comporter follement, furieusement, durement à l'encontre de" : Certes ce n'est pas fait de puissance de forsener selon sa volenté contre ses sougiéz, mais punir ou traveillier ses sougiéz selon le plaisir de la divine dispensacion (FOUL., Policrat., IV, 1372, 50). Maiz ainsi comme Hecube estant ou doulz eage de juenesse receut honneurs, clarté, et gloire, et fut auctorisee en haultesse royale, aussi elle ja vieille souffry avec son mari Priam, douleurs tenebres, hontes, et toutes vilenies de par fortune forsenant contre Hecube (PREMIERFAIT, Cas nobles hommes G., 1409, 183). Et se on doubtoit que par aventure, par les lais, peust estre usurpée aulcune chose contre l'estat de l'Eglise, pour ce qu'ilz ne doibvent jetter leur fauch en aultrui champs ou fruis. Mais pour vray, ces subtilités de retarder le saint concille feront foursener les lais contre l'Eglise et clergié (Doc. 1431. In : MONSTRELET, Chron. D.-A., t.4 c.1444-1453, 451).

 

.

"Se comporter durement contre qqn, malmener qqn" : En ceste maniere les princes et les seigneurs, quant il ne pueent corrigier les deffauz de leurs sougiéz par douce et debonnaire main, il doivent prendre plus aigres paines, combien que il leur desplaise, et les baillier au deffaillant, et par une piteuse cruauté doivent forsener contre les mauvais a fin qu'il gardent la saine bonté des bons. (FOUL., Policrat., IV, 1372, 71).

II. -

Empl. pronom. "Se comporter durement" : Lors come li diz Seycus feist semblant d'estre souverainement corrochiez contre son pere et que il s'en voloit tantost aler d'ilecquez se il ne le retenoient, lez Gabieyns l'ont benignement retenu avec eulz et li ont dit qu'il ne merveille mie se sez perez, tiex comme il a esté en ses subgiz et puiz en sez conpegnons, tieux il [vouloit] estre a la parfin en sez enfanz, et que finablement il se forcenera en soy meisme si autre maniere lui faut a se forcener (BERS., I, 1, c.1354-1359, 53.10, 89). Nous, dist il, sommes pleige et fermances, qui sommes assez souffisant en ce qui nous appartient et en ce que nous povons prester et baillier, ce sont noz corps et noz courages. En ces, dist il, se il veulent se pueent il forsener et en ceulz pueent il aguisier et emploier leurs armes et leurs ires ! (BERS., I, 9, c.1354-1359, 9.18, 17).

III. -

Empl. trans. "Rendre fou, comme fou, malmener" : Je n'auroye pas ung seul denier Ce ce n'est par travail et paine, Et ma femme tant me demaine Que merveilles, et de pis en pis. Je luy fois tout ce que je puis, Encor suis je tout forcené. (P. Jouh. D.R., a.1488, 16).

IV. -

Part. passé en empl. adj. V. forcené
 

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 Article 17/32 
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     FORCENERESSE     
FEW XVII sinno-
FORCENERESSE, subst. fém.
[FEW XVII, 72b : sinno-]

"Celle qui rend fou" : [Injures contre une femme qui l'avait trahi] Touz les diables vous aiment par amours, Car vous estes leur dame et maistresse, Royne d'enfer, de tous maulx amoureuse, O Lachesis, raige et forsenneresse, Tourment sanz fin, laide, noire et hideuse. (DESCH., Oeuvres Q., t.5, c.1370-1407, 215). [Éd. : "qui rendez fous"]
 

DMF 2020 - Lexique complémentaire 2007 Robert Martin

 Article 18/32 
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     FORCENERIE     
FEW XVII sinno-
FORCENERIE, subst. fém.
[T-L : forsenerie ; GD : forsenerie ; AND : forsenerie ; FEW XVII, 72b : sinno-]

"État ou acte de celui qui est forcené, folie, fureur" : ...Amours le fait nuit et jour enflamer, N'il ne vorroit, ne porroit oublier Son anemie. Savez pourquoy ? Pour ce que Compaingnie, Amour, Biauté et Juenesse la lie, Et Loiauté, qu'oublier ne vueil mie, En grant folie, En rage, en dueil et en forcenerie Le font languir, et en grant jalousie, Et en peril de l'ame et de la vie. (MACH., J. R. Beh., c.1340, 122). Et qui en ce point le feroit, Je croy que folie seroit, Nom pas folie seulement, Mais on diroit apertement Que ce seroit grant derverie, En sousposant forsennerie [var. forsonnerie]. (MACH., D. Aler., a.1349, 302). ...Car avant que homs son sens perde, Ne que forsens a lui s'aërde, Le prent et seurprent maladie Qui le trait a forcenerie. Si vueil faire un po d'argument Qui vous moustrera vivement Comment m'entente prouveray Dou droit que pour moy trouveray. (MACH., J. R. Nav., 1349, 227). Et dou chevalier qui par ire, Pour ce qu'il ne se volt desdire, Copa son doy a tout l'anel, Il fist en s'onneur un crenel De honte pleinne de sotie Avec trés grant forcenerie, Quant a sa dame l'envoia. Car bien croy qu'il li enuia ; Au mains li dut il ennuier D'un si fait present envoier. (MACH., J. R. Nav., 1349, 264). Telz .XII. chevaliers y ot de signourie Qui pour Maugis estoient en grant forcenerie (Renaut Mont. B.N. V., c.1350-1400, 368). Apres si est sailli ausi par ma bouche le pecché de ire mult anguisousement et sovent sanz en avoir bone discrecion de droit ou nule, de qoi tout pleyn en ont eu damage mult grant [comme] en ma forsenerie comander et exciter de tuer, de batre et maheigner (HENRI LANC., Seyntz medicines A., 1354, 17). En le cité de Durem ne demora adonc homs ne femme, ne petis enfans, ne maison ne eglise, que tout ne fuissent mis à destruction. Dont ce fu grans pités et cruèle foursenerie et est, quant on destruit ensi sainte chrestieneté et les eglises où Diex est servis et honnerés. (FROISS., Chron. L., II, c.1375-1400, 124). Pour moy le di, qui de tel maladie Ay longuement esté si fort espris Qu'il n'est rage, maulz ne forcenerie Dont assaillis ne soit mes esperis A toute heure ; si en seray peris, Car je derve de dueil et de courrous. (MACH., L. dames, 1377, 67). Amour aussi se mue en flaterie et esperance en grant presumpcion, leesce en dissolucion, et aussi fait yre en forsenerie. (EVR. CONTY, Eschez amour. mor. G.-T.R., c.1400, 644). A ! Baudius, mon très chier frere, et quelle forcenerie t'a tant en si pau de temps fait oublier l'amour de nous deux ? (LA SALE, Sale D., 1451, 112).

 

-

[Comme acte, comme manifestation] : Les autres sont telz par maladies ou par forseneries. (ORESME, E.A., c.1370, 381). Certes, onques n'avint entre crestiiens ne Sarrasins tèle forsenerie que ces meschans gens faisoient. (FROISS., Chron. L., V, c.1375-1400, 100). Quant li gentil homme de Biauvoisis (...) et des terres où ces meschans gens conversoient et faisoient leur foursenerie, veirent ensi leurs maisons destruites et leurs amis tués, il mandèrent secours à leurs amis en Flandres. (FROISS., Chron. L., V, c.1375-1400, 102). ...si que dit Senecque, l'omme surpris d'ire ou hayne et convoitise ne voit, n'ot, n'entent, ne pense, ne parle fors toute forcenerée, sans nul regart à conscience ne autre peril. (CHR. PIZ., Paix W., 1412-1413, 94). Avisons quel forcenerie sembleroit estre veoir un homme tel atourné par grant yre que il mesmes se veast à destruire (CHR. PIZ., Paix W., 1412-1413, 135). Quant homme est plain de yre il ne voit riens fors toute forcenerie et mauvaistié. (CHR. PIZ., Paix W., 1412-1413, 172). Ha ! tous nous dieux, que veult ce dire ? Vecy bien grant forcenerie, Quant celluy qui toute sa vie A soubstenu nostre creance, La met du tout a nonchaillance Et la renye entierement ! (Myst. st Adr. P., c.1450-1485, 99).
 

DMF 2020 - Article revu en 2015 Robert Martin

 Article 19/32 
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     FORCENEUX     
FEW XVII 72b sinno-
FORCENEUX, adj.
[T-L : forcenos ; GD : forseneux ; FEW XVII, 72b : sinno-]

"Fou, furieux" : Rabiosus (...) : enragiez. forcenés (Aalma R., c.1380, 345).

Rem. Gloss., Salins 44, a.1436 (rabiosus : enrageux, forceneux), ds GD IV, 97c. L'ex. cité ds T-L doit aller sous forcené.
 

DMF 2020 - MAJ 2020 Robert Martin

 Article 20/32 
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     FORCENIÈRE     
*FEW XVII sinno-
FORCENIERE, (?)
[GD : forcenniere ; *FEW XVII, 72b : sinno-]

[Sans doute mauvaise lecture pour forcenerie] : ...pour expurger la vanité de forceniere et follie... (RIVIÈRE, Nef folz D., 1497, 7). [Seul ex.]
 

DMF 2020 - Article revu en 2015 Hiltrud Gerner

 Article 21/32 
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     FORCENIR     
FEW XVII sinno-
FORCENIR, verbe
[FEW XVII, 72b : sinno-]

"Devenir fou, perdre la raison" : Vous ne faicte plus que dormy Et me laissés icy mourir Et forsenir de male fain. (Myst. st Bern. Menth. L., c.1450, 127).
 

DMF 2020 - Lexique complémentaire 2007 Robert Martin

 Article 22/32 
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     FORSEN     
*FEW XVII sinno-
FORSEN, subst. masc.
[T-L : forsen ; GD : forsens ; AND : forsen ; DÉCT : forsen ; *FEW XVII, 72b : sinno-]

"Folie, égarement, rage, fureur" : ...Et dist qu'oiseaus qui n'a doubtance De l'aigle selonc sa puissance, Qu'il est fols et desmesurez Ou il est tous desnaturez, Aussi com uns homs hors dou scens Qui oseroit par son forsens Un roy ou le pape assaillir, S'il pooit jusqu'a euls saillir, Et a la mort les metteroit, Qui contre ne resisteroit. (MACH., D. Aler., a.1349, 359). Quant Dieus vit de sa mansion Dou monde la corruption Qui tout partout estoit si grans, N'est merveilles s'il fu engrans De penre crueuse vengence De ceste grant desordenance ; Si que tantost, sans plus attendre, Pour justice et vengence prendre, Fist la mort issir de sa cage, Pleinne de forsen et de rage, Sans frein, sans bride, sans loien, Sans foy, sans amour, sans moien, Si trés fiere et si orguilleuse, Si gloute et si familleuse, Que ne se pooit saouler Pour riens que peüst engouler. (MACH., J. R. Nav., 1349, 149). Vous dites que mal ne sentoit, Pour ce que desvoiez estoit De maniere et d'entendement ; Mais il est bien tout autrement : Car avant que homs son sens perde, Ne que forsens a lui s'aërde, Le prent et seurprent maladie Qui le trait a forcenerie. (MACH., J. R. Nav., 1349, 227). ...Mais un vaut vint et un vaut cent Qui hardiement se deffent, Especiaument en ce cas. Car qui deffent de haut en bas Il a des C. pars l'avantage. Ne ce n'est que forsen et rage D'assaillir encontre ces murs, Qui sont haus, larges et seürs. Et se bien nous en est cheü, Dieux l'a fait, vous l'avez veü. (MACH., P. Alex., p.1369, 103). Si s'avisa finablement Pour lui vengier plus hautement, Pleins de forsen et de desroy, Qu'en champ appelleroit le roy, Pour lui combattre corps à corps A li ; là fu tous ses accors. (MACH., P. Alex., p.1369, 227). Harau, quel forsen et quel raige, Quelle horribilité ! (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 17). Seigneurs, escoutez quel horreur, Quel perte, quel forcen, quel raige ! Voicy le plus mauvais langaige, Le plus fier, le plus desplaisant Qu'oncques fut et le plus cuisant. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 86).

Rem. Ex. d'a.fr. ds GD IV, 97c.
 

DMF 2020 - Article revu en 2015 Robert Martin

 Article 23/32 
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     MALSENÉ     
FEW XVII sinno-
MALSENÉ, adj.
[T-L : mal2 (malsené) ; GD : malsené ; AND : malsené ; FEW XVII, 73b : sinno-]

"Insensé" : Et quant Anthoines voit celle gent malsenee, Dont ne se pot tenir ne face une risee Et a dit au soudant : "Quel gent m'avés livree ?" (Tristan Nant. S., c.1350, 471).
 

DMF 2020 - Lexique complémentaire 2007 Pierre Cromer

 Article 24/32 
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     RASSEN     
FEW XVII sinno-
RASSEN, subst. masc.
[GD : rassen ; FEW XVII, 71a : sinno-]

"Nouvelle assignation d'un revenu" : Chiaprés sensient les rendaige et rassen des argent (Terre Jauche D., 1479-1480, 195).
 

DMF 2020 - Lexique complémentaire 2007 Robert Martin

 Article 25/32 
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     RASSENER     
FEW XVII sinno-
RASSENER, verbe
[T-L : rassener ; GD : rassener ; FEW XVII, 71a : sinno-]

A. -

"(Se) diriger, orienter"

 

1.

"Diriger à nouveau ou à son tour son arme sur qqn ou qq. part, frapper à nouveau ou à son tour" : Se je puis rassener en ce lieu proprement L'espaule te toray, s'aras le cuer dolant (Chev. cygne P., c.1356, 82). ...mais il rassena telement lui qu'il n'ot si bon harnois qui le garentist qu'il ne lui fichast la lance par entre les costez (Bouciquaut L., 1406-1409, 51).

 

2.

"Diriger pour remettre" : La les vot Jhesu-Cris si dignement aidier C'a cascun chisne va sa kaine ratakier. As .V. a rassené sans point a variier. (Chev. cygne P., c.1356, 96).

 

3.

"(Se) diriger pour retrouver son chemin, retrouver son chemin" : ...quant on a encontré de cerf ou de sangler enmi les forz et on ne scet rassener a ses brisiees, le chien ne faudra point a le remener, s'il y est apris (GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, 172). La premiere chose que en ce cas doit fere le veneur, il doit savoir certainement par ou le cerf entre en l'eaue, et illec sus les routes giete unes brisiees et autres en pendant la endroit, affin que, si chienz ou chevaux emportoient celles de terre, que celles en pendant demuerent et qu'il y saiche rassener, quar il les verra de plus loing qu'il ne fera celles de terre. (GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, 206). L'ystoire nous dit que, quant Presine party de Elinas atout ses trois filles, qu'elle s'en ala atout elles en Avalon, nommé l'Ille Perdue, pour ce que nulz homs, tant y eust esté de foiz, n'y sauroit rassegner, fors par aventure [leçon n'y saroit jamais rassener, sinon de grant aventure ds GD VI, 611b]. (ARRAS, c.1392-1393, 11).

 

-

"Faire retrouver les traces de" : Et, si les chienz ne le drescent et rasxanent [var. rassenent, ressanent] de l'une part de l'yaue ou de l'autre, il puet bien penser qu'il [le cerf] fuyt l'yaue (GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, 208).

 

-

Rassener son chemin à qqn. "Faire retrouver son chemin à qqn, remettre qqn sur la bonne voie" : Mais oncques il ne ouyt ne cor, ne chien, ne personne qui luy rassenast son chemin et si estoit ja presque nuyt. Finablement, il trouva d'aventure ung sentier batu (MIÉLOT, Mir. N.D. A., 1456, f° 73 r°).

B. -

Au fig.

 

1.

"Indiquer"

 

Rem. FROISS., Chron. L., IV, c.1375-1400, 173 (GD VI, 611c).

 

2.

"Réassigner qqc." : ...item, rassenne a dit hospitaul demey muy de spealte hiretable (HEMRICOURT, Pièces div. B.P., 1364, 72).

 

Rem. Doc.1493 (Tournai) ds GD VI, 611a.

 

3.

"Cautionner à nouveau"

 

Rem. JEAN D'OUTREM. ds GD VI, 611c.
 

DMF 2020 - Article revu en 2015 Robert Martin

 Article 26/32 
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     RASSENEUR     
*FEW XVII sinno-
RASSENEUR, subst. masc.
[T-L (renvoi) : rassenëor ; GD : rasseneur ; *FEW XVII, 71a : sinno-]

"Celui qui réassigne"

REM. Doc. 1355 ds GD VI, 611c.
 

DMF 2020 - Lexique complémentaire 2007 Robert Martin

 Article 27/32 
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     RASSENNE     
FEW XVII sinno-
RASSENNE, subst. fém.
[GD : rassen/rassenne ; FEW XVII, 71a : sinno-]

A. -

"Arriéré, créance à recouvrer"

 

Rem. Doc. (Tournai) 1444 et 1455 ds GD VI, 611c-612a.

B. -

"Compte des créances arriérées"

 

Rem. Doc. (Tournai) 1412 et 1460 ds GD VI, 611c-612a.

C. -

"Nouvelle assignation d'un revenu" : Sensiwent les rendaiges et rassenne desdits cappons (Terre Jauche D., 1491-1492, 254).
 

DMF 2020 - Lexique complémentaire 2007 Robert Martin

 Article 28/32 
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     SEN     
FEW XVII sinno-
SEN, subst. masc.
[T-L : sen3 ; GD : sen ; DÉCT : sen2 ; FEW XVII, 70b : sinno-]

I. -

[Domaine intellectuel et moral] "Jugement, discernement, subtilité" : ...le duc de Normandie Est bien souffisant, dire l'ose, Pour tel fait faire (...) ; Car plain est de sen et d'avis. (Mir. ste Bauth., c.1376, 107). Nous, confians du sen et dileigence de Estienne Biseul, ycellui avons commis, institué et establi seneschal de nostre ville et chastellenie de Nogent le Rotrou. (Arch. Nord, 1385, B 1575, f° 10, IGLF). "...A telx seigneurs politiques et perilleux", dist la chambriere, "les recteurs peuent trop bien remedier par sen, et non pas par puissance, auctorite et cruaulte, mais par bonne justice et amour ilz sauront bien leurs subgiez gouverner..." (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.1, c.1386-1389, 620). Ainsi vi comment, par son sen, Fu lors roy de Mede Arbacen, Et comment l'onneur y porta (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 191). Seigneurs Rommains, qui de noblesce, De sen, d'onneur et de prouesce Estes nommez puissanment En tous païs generaument... (Mart. st Pierre st Paul R., c.1430-1440, 122). [Autres ex. p.123] ...ledit Clement entra en frenaisie de teste, tant qu'il perdit tout son sen naturel (Mir. ste Cath. Fierbois C., 1470-1483, 133).

 

Rem. Doc. 1415 (Nous confians en le loyaulté, sen et discretion de...) ds GD VII, 375c.

 

-

[A propos d'une bête] : ...il n'i a nul si bon veneur ou monde qui peüst penser les malices et subtilitez que un cerf scet fere, ne n'est nul si bon veneur ne si bons chienz qui moult de foiz ne faillent bien a prendre le cerf a force, et ce est par son sen et par sa malice et par sa subtilité. (GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, 64). ...le sen et la conoissance que Diex a donné a bons chienz (GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, 134).

 

-

Faire (grand) sen. "Agir raisonnablement" : LE ROY. (...) Je m'en vois ; tu t'aviseras, Et je croy que grant sen feras D'obeir moy. (Mir. Barl. Josaph., c.1363, 277).

II. -

[Idée de direction (et, au fig., de manière)]

A. -

"Direction"

 

Rem. T-L IX, 425.

 

-

Sen dessus dessous. "Sens dessus dessous" : Renversés sen dessus dessouz, Est ce bien fait ? (CH. D'ORLÉANS, Rond. C., 1443-1460, 404). Par dieu, vous serés ranvercés Sen dessus dessoulx, fau crestïent. (Myst. st Sébast. M., c.1450-1500, 191). Maintenant tout est à refere Et tourne sen desus desoublz. (Mère Ofic. T., c.1500, 114).

 

Rem. Forme sen dans tous les exemples relevés (et non sens). Mais peut-être réfection homonymique à partir de *cen dessus dessous (où cen serait ce en ou même une simple var. de ce ; cf. p. ex. : Se tes ditz estoient certains Et tu faisoyes sen que tu dis..., "ce que tu dis", Myst. st Laur. S.W., 1499, 215). Sur les armes mises sen dessus dessous, en signe de déshonneur, cf. Ph. Contamine, Guerre, Etat et soc. à la fin du Moy. Age, 1972, 192 (n.50).

 

-

Sen devant derriere. "Sens dessus dessous, à l'envers" : Dyable, tourne moy quatre tours La teste sen davant deriere. (Myst. st Sébast. M., c.1450-1500, 296). Tout yroit sen devant deriere. (Gent. moun. T., c.1500, 335).

B. -

"Manière d'être" : Le mantellet de soye regarde entierement Et le sen de la lettre qui y fut ensement. (Tristan Nant. S., c.1350, 241).

 

-

En nul sen. "D'aucune manière" : Comme il soit donques ainsi, sire, Que vous et vos choses nous plaisent Et en nul sen ne nous desplaisent, Maiz tous jours nous ont bien pleü Pour le bien qu'y avons veü, Et reputons nostre bon eur Que nous vous avons a seigneur (Gris., 1395, 11).

REM. Seules les occurrences de la forme archaïque sen, impossibles à rattacher à sens issu de sensus, ont été placées sous la présente entrée. Les formes éventuelles avec -s ne sont pas discernables du mot sens.
 

DMF 2020 - Synthèse Robert Martin

 Article 29/32 
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     SENÉ1          SENÉ2          SENÉ3     
FEW XVII sinno-
SENÉ, adj.
[T-L : sené2 ; GD : sené2 ; DÉCT : sené ; FEW XVII, 72a : sinno-]

A. -

"Sensé, sage, intelligent" : Li chevaliers respondi com senez : "Je croy que Dieus nous ait ci amenez." (MACH., J. R. Beh., c.1340, 108). Adonkes ploura Regnaut le preux et le senés (Renaut Mont. B.N. V., c.1350-1400, 236). Enssy vont cevauchant ly crestyen sené. (...) A sy parfaite joie, à telle dignité. (God. Bouillon R., t.2, c.1356, 351). Droguez parla premier qui le cuer ot sené. (Hugues Capet Lab., c.1358, 239). Et je juroie verité Si com devant l'ay recité, Car Venus parla longuement De la pomme a moy seulement, Tant qu'elle dist comme senee : "Or as response a ta pensee". (MACH., F. am., c.1361, 237). Dieu m'avoit donné Le plus courtois, le miex sené, Le plus amoureux, le plus doulx Et le plus liberal de touz Les hommes (Mir. femme, 1368, 194). Une autre chose est appellee synesie et son contraire asynesie, selon lesquelles nous dison les uns synés ou scenés, et les autres asynés ou non scenés et asnes. (ORESME, E.A., c.1370, 351). Et prent l'en une meïsme chose synesie et eusynesie, et aussi scenéz et bien scenéz. (ORESME, E.A., c.1370, 351). Mais tant est bien doctrinée, Douce, humble, simple, senée, Plaisant, loyal et secrée Ma dame d'onnour Qu'en li veoir iert doublée Ma joie et m'ardeur finée Et .C. fois guerredonnée Toute ma tristour. (MACH., Ch. bal., 1377, 589). ...le bon archevesque qui tant estoit senés Remontra au commun parlers si advisés Que par le sens de lui ilz furrent accordés (Cip. Vignevaux W., p.1400, 33). ...Athenes (...) dont philosophes de nom, Saillirent plusieurs moult senez (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 328). Ou soit de Vïenne et Grenobles Ly daulphin, ly preux, ly senez, Ou de Dijon, Salins et Dolles Ly sires filz le plus esnez, Ou autant de leurs gens prenez, Heraux, trompectes, poursuivans, Ont ilz bien boutez soubz le nez, Autant en emporte ly vens ! (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 49).

 

Rem. Renart contref. R.L., 1328-1342, gloss. ; Jourd. Blaye alex. M., a.1455, gloss. ...

 

-

Bien sené : Le nobles homs tres bien senez... (DUPIN, Mélanc. L., c.1324-1340, 239). Et prent l'en une meïsme chose synesie et eusynesie, et aussi scenéz et bien scenéz. (ORESME, E.A., c.1370, 351). Car un homme est dit bien sené et eugnomé ou sygnomé en ce que il est bien judicatif. (ORESME, E.A., c.1370, 352).

 

-

Mal sené. "Insensé" : Frére, je vous voi mal sené, Qui amez miex ainsi morir Que vostre pechié regehir. (Mir. emper. Romme, 1369, 306). LA FILLE. (...) Anne, avecques moy sanz demeure Vous en venez. ANNE. Je seroie trop mal senez Se je disoie : Non feray. (Mir. fille roy, c.1379, 111). A ! faux glouz mal senez (Jourd. Blaye alex. M., a.1455, 363).

 

Rem. WAUQUELIN, Faits conq. Alexandre Hé., a.1440, 90/31.

 

-

Non sené : Car quiconques ne se courrouce pour les causes pour quoy il se convient courroucier et qui ne se courrouce en la maniere que il se convient courroucier, et qui ne le fait quant il appartient et qui ne le fait contre ceuls contre lesquelz il appartient, ce est fait et condicion de fol et de non scené, pour ce qu'il semble que tel homme ne sente ne apparçoive mal qui li adviengne et que il ne ait pour ce quelconques tristece. (ORESME, E.A., c.1370, 261). Une autre chose est appellee synesie et son contraire asynesie, selon lesquelles nous dison les uns synés ou scenés, et les autres asynés ou non scenés et asnes. (ORESME, E.A., c.1370, 351). Et les autres sont folz et non senéz par maladie, comme par epylences et par forseneries. (ORESME, E.A., c.1370, 382).

 

-

[D'un enfant] "Qui a atteint l'âge de raison" : Il [l'ennemi] ne venra pour sa promesse, Tant que li enfes soit senez. (Mir. enf. diable, c.1339, 16).

B. -

"Savant, instruit" : Mire devenray si sené Qu'il ne sera mal quel qu'il soit, Se de ma main cure reçoit, Que je ne garisse... (Mir. st Panth., 1364, 319). LE SECRETAIRE. Tost m'en delivreray sanz faille. Dame, tenez. LA MÉRE. Vous estes clerc gent et senez (Mir. fille roy Hongrie, c.1371, 46).
 

DMF 2020 - Synthèse Robert Martin

 Article 30/32 
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     SENÉEMENT     
FEW XVII sinno-
SENEEMENT, adv.
[T-L : sené2 (seneement) ; GD : seneement ; FEW XVII, ... : sinno-]

"Sagement, avec bon sens" : Li contes de Honstidonne fist se seneement la response de toutes ces coses desus dittes, que la roine et tout li signeur s'en contenterent, (FROISS., Chron. D., p.1400, 786).
 

DMF 2020 - Synthèse Jacqueline Picoche

 Article 31/32 
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     SENITÉ     
*FEW XVII sinno-
SENITÉ, subst. fém.
[GD : senité ; *FEW XVII, 72a : sinno-]

"Instinct, ruse"

REM. Chron. et hist. saintes et profanes, 1430 (les femelles [de ces bêtes] ne se pevent prendre pour cause de la senité et calidité qu'elles ont naturellement), ds GD VII, 380c.
 

DMF 2020 - Lexique complémentaire 2007 Pierre Cromer

 Article 32/32 
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     SENS     
FEW XI 463a sensus FEW XVII 70b sinno-
SENS, subst. masc.
[T-L : sens ; GDC : sens ; DÉCT : sens ; FEW XI, 463a : sensus ; FEW XVII, 70b : sinno- ; TLF : XV, 319b : sens1 ; TLF : XV, 323b : sens2]

I. -

[Domaine de la perception ; lat. sensus]

A. -

"Faculté de perception du monde physique" : Clo ton bec, tes iex, tes oreiles, Ton cuer et tous tes autres sens ! (Best. lap. Rosarius S., c.1330, 28). ...toute l' inclination Des cinc sens que Dieus m'a donné Y estoient si ordonné Que n'avoie cuer ne penser Que lors peüsse ailleurs penser (MACH., J. R. Beh., c.1340, 107). ...le sens de l'oye (SAINT-GILLE, Comment. A.Y. L., 1362-1365, 335). Et de telx principes l'en a la cognoissance en diverses manieres ; car les uns sont cogneüs par induccion, les autres sont cogneüs par sens, les autres sont cogneüs par accoustumance et les autres en autre maniere. (ORESME, E.A., c.1370, 123). Tous mes cinq sens, yeulx, oreilles et bouche, Le nez et vous, le sensitif, aussi, Tous mes membres, ou il y a reprouche, En son endroit ung chascun die ainsi : ... (VILLON, Poèmes variés R.H., c.1456-1463, 76). ...sa tresbelle et bonne dame et espouse (...) fut bien esbahie, et de tous ses sens tant alterée et soupprinse qu'elle ne savoit sa contenance. (C.N.N., c.1456-1467, 424).

 

-

A sens ouvert. "Clairement" : Et, certes, benoistz sont voz yeulx A qui telz dons sont octroiéz Que de veoir ce que vous voiez, Et vostre ouÿe est saincte et digne A qui la magesté divine Donne d'ouïr a sens ouvert Ce qui vous sera descouvert. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 171).

 

-

Les (cinq) sens dehors / de dehors : Et ce appert par raison, car le mouvement du soleil et des estoilles est tres merveilleusement isnel toutevoies, pour ce que il est si loing de nous, il n'est pas appercevable par sens dehors, c'est a savoir par nostre voiement precisement sanz l'aide de la vertu memorative que se recorde que le soleil ou l'estoille fu veue en un lieu et puis est veue en autre ou en autre resgart, car qui les resgarde de prime face, il samble que elles ne se mouvent. (ORESME, C.M., c.1377, 474). Car les quatre vertus sensitives dedens homme, que nous appellons sensitive, ymaginative, estimative et memoire, sont corporelles et organiques, et se pevent grever par trop souvent ou en trop fort oeuvre les exploicter, ainsi que entre les cinq sens de dehors l'oeil se trouble par regarder clarté trop resplendissant, ou par trop souvent lire, ou fichier son regard sur choses menues, de deliee ou differente figure. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 4).

 

-

Les (cinq) sens corporels / de corps : Mais toutevoies aucuns signes sont qui riens ne monstrent a quelconques sens corporel, mais a l'entendement de toute personne (...). En ceulz qui dorment, les vertus de vie corporele, selon les sens qui sont dis de corps - et ils sont de l'ame - se reposent (FOUL., Policrat. B., II, 1372, 148). Toutesfoys, dit icy l'Ame, que il fault - vuellent ou ne daignent - que ilz confessent aucunes choses espirituelles, et lesquelles on ne puet congnoistre par les V sens corporelz (GERS., Trin., 1402, 168). ...je congnoys doncques une saigesse et non mie par aucun de ces sens corporelz. (GERS., Trin., 1402, 168). Est a scavoir, toutevoies que entre les choses congnoissibles les aucunes sont en dessoubz raison, comme celles que nous congnoissons par les sens corporelz comme les choses blanches, noires et verdes, doulces, ameres, dures, moles, les aultres sont prochaines a raison (Somme abr., c.1477-1481, 136).

 

-

Les (cinq) sens naturels / de nature : Il y a cinq cens naturéz Et si vous diray tantoust quelz Ilz sont : cë est le voiement ; Le segond est le oÿement Et l'odourement est le tiers (...) ; Le quart appelle l'en goustement ; Et cinquiemë, atouchement. (Liber Fort. G., 1346, 169). Vierge qui es [la] medecine Des pecheurs, oste la racine De pechié mortel de mon cuer Et ne me lesse a nul fuer Mes cinc senz naturelz perir, Mais les veulles par ton plaisir Tant con je vivrai gouverner (ARNAUD, Prière Vierge O., II, c.1350-1400, 150). Item, des choses que nous avons par nature ou qui nouz viennent de nature, nous avons premierement les puissances et puis aprés faisons les operacions, si comme il appert de noz sens naturels. (ORESME, E.A., c.1370, 147). Item, selon ce l'en pourroit dire que aussi comme les sens naturelz des honmes et des bestes sont d'autre raison et d'autre maniere que l'entendement des intelligences ou des honmes, samblablement les sons sensibles sont d'autre guise et d'autre maniere que ne sont les sons celestielz lesquielz sont insensibles. (ORESME, C.M., c.1377, 478). [Titre] Des cinq sens de nature. (HAUTEV., Compl. B., c.1441-1447, 39). Et tant et tellement donna que il deult amer ce que il ly donna, car il te ennoblit quant a l'esteriorité et par dehors des cinq sens de nature (CRAP., Cur Deus, De arrha B.H., c.1450-1460, 274). Maintenant est tempz d'emploiier tous vos .V. sens de nature de mettre la ducé et comté de Bourgoigne en mes mains. (MOLINET, Chron. D.J., t.1, 1474-1506, 173). LA MERE. [La mère prétend voir si son gendre a bien tout ce qui fait un homme] Jamais n'ira, tant que j'aye veu S'il a ses cinq cens de nature (Nouv. mar. T., c.1490-1500, 98).

 

-

Sens commun / sens humain. "Faculté qui synthétise les perceptions des différents sens, de manière à donner à l'esprit la représentation d'un objet [scolastique]" : Et pour ce qu'il n'y a en la .IXe. espere nulles estoilles ne nulle chose qui se puist monstrer au sens humain, pour ce n'est elle pas a nous sensible. Maiz raison nous aprent qu'il le convient de neccessité mettre. (EVR. CONTY, Harm. sphères H.P.-H., c.1400, 8). Ce n'est pas l'oeil qui ycy est deceu, mais c'est le sens commun qui a ceste occasion erre et grandement s'abuse, car, comme son office soit de joindre les accidens de dehors a la substance ou ilz sont, par ceste mutacion qui est faite de la figure et couleur de la chose veue, il juge ycelle figure et couleur estre ou corps ou elle n'est pas (Inv. secte vaud. V.B. D., p.1460, 101). [Autre ex. p.102] L'excellence de la dignité divine est tant grande que la pensee et la cogitation humaine deffault en pensant de Dieu, car il est incomprehensible. Le sens humain ne le perchoit, car il est invisible. (Somme abr., c.1477-1481, 148). Sens commun est une potence vigoreuse et vertu laquelle rechoit tous les objets, c'est a dire ce qui appartient a ung chascun des sens pour faire son jugement. (Somme abr. M., II, c.1477-1481, 113). En la premiere partie du ventricule du devant est mis le sens commun et en la seconde la [vertu] ymaginative. (PANIS, Guidon, 1478, tr.I, doct.2, chap.1). ...la vertu que se appelle le sens commun ou la fantasie qui comprent toutes les formes comprinses par les cinq sens naturels et iuge de elles apres la remotion de l'aprehension des vertus et des instrumens sensibles exteriores (PREVOST, Cir. Guill. Salicet, 1492, IV, 1).

B. -

P. méton.

 

1.

"Sensation procurée (ici de chaud et de froid)" : [À propos d'un des quatre fleuves du paradis] Et aussi se mue il en quantité, quar il est en .i. lieu grant et en l'autre petit ; et aussi en sens, quar il est une heure froit et autre chaut. Et ce flueve avironne la terre d'Ynde. (VIGNAY, Oisiv. emp. Gerner, t.2, a.1330, 22v°b).

 

2.

"Conscience, sensibilité" : ...et ainsi selon Avicenne le sens ou sentement vient du cervel, l'esperit et le vent viennent du cueur, le sang et le desir vient du foye (GORDON, Prat., c.1450-1500, VII, 1). CATECUMINAIRE. (...) Du corps mon ame partira ; A ce cop le sens me deffault. (Il se meurt.) (LA VIGNE, S.M., 1496, 378).

 

-

Avoir sens de qqc. "Avoir le sentiment, l'intuition de qqc." : ...car la nature de elles [les bestes mues] est venue a perfection siques a ce qu'elles ont sens et apparcevance de tristece et de delectacion. (ORESME, Pol. Arist. M., c.1372-1374, 49).

 

3.

Au plur. "Instincts sensuels" : ...si est bel et a bon sens Et bien gouverne tous ses sens (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 87).

II. -

[Domaine intellectuel et moral ; lat. sensus ; francique sinno-]

A. -

[Comme faculté]

 

1.

"Faculté de comprendre, de juger, raison" : Dame, il est ja si eslevez (...) et si membruz Con s'il avoit quinze ans ou plus. De lettre apprendre s'appareille, Si que chascun s'en esmerveille Du sens que Dieu a en lui mis. (Mir. enf. diable, c.1339, 24). ...vostre amour si me maistrie Que tout mon sens surmonté a : Faites tout quanqu'il vous plaira, Amis, de moy. (Mir. abbeesse, 1340, 72). On doit bien telle creature Prisier et amer, mes amis, En qui Dieu tant de bien a mis Et tant de sens. (Mir. mère pape, c.1355, 353). Dieu, qui toi bien appercevra, La foleur pour sens recevra Que tu feras par ficcion (Mir. parr., 1356, 9). Vous estes astrologiens, Les plus haulx de sens et d'engiens Tenuz de toute ceste terre. (Mir. Barl. Josaph., c.1363, 243). Et si sachiés bien que Richece N'aconte rien a gentillesce, A grant sens, a beauté, n'a force, Ne de proesce ne fait force (CHR. PIZ., M.F., I, 1400-1403, 66). Et dit que n'est droit qu'elle doye, Consideré son grant savoir, A Amours laisser decevoir Son cuer, n'ainsi estre surpris, Qui tant avoit de sens compris (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 37). ...dont perdoit senz et memoire quant il consideroit sa foiblece et petitesse de son entendement et suffisance (BAYE, I, 1400-1410, 171). Je laisseray le parler, Car mon scens n'est pas si cler (LA SALE, Sale D., 1451, 3). ...d'ung curé qui oublia par negligence, ou faulte de sens, a annuncer le karesme a ses paroichiens (C.N.N., c.1456-1467, 18). ...quelque sens que Dieu luy eust donné, il ne savoit remede a son cas, fors de soy taire et faire du mort (C.N.N., c.1456-1467, 310). ...homme de grant aage et de cler sens, souverain astrologien en son temps (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 140 v°). Cestui respondit en plaine congregacion d'icelle Université que le livre de Almageste que aucuns folz theologiens vouloient condempner pour ce qu'il passoit leur sens, et dit que le contenu de ses conclusions estoit le livre ouquel l'engin humain reluisoit le plus. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 154 r°).

 

-

Prov. : ...car la plus sage femme du monde, au regart du sens en a autant come j'ay d'or en l'oeil ou come ung singe a de queue (Quinze joies mar. R., c.1390-1410, 91). ...contre Dieu sens de homme n'a vertu ne pouoir. (TARDIF, Apologues R., c.1493-1498, 88).

 

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Par sens / par grand sens. "Raisonnablement" : Ma doulce dame debonnaire, Vous en avez par sens ouvré. (Mir. enf. diable, c.1339, 15). Non pas, sire, que vous ne donnez, mais (sire) donnez par sens et par mesure (GERS., Noël, p.1404, 311). ...ung de ses serviteurs le vint trouver ung jour en sa chambre, a part, et luy va dire par grand sens... [L'homme révèle à son maître que sa femme le trompe] (C.N.N., c.1456-1467, 311).

 

-

De sens rassis. "La raison bien ferme" : Et quant il furent la assis, La dame dist de sens rassis : ... (MACH., J. R. Nav., 1349, 188). Je, Françoys Villon, escollier (...), de sens rassis... (VILLON, Lais R.H., c.1456-1457, 11). ...touteffois vous sçavez Que tous hommes n'ont pas le sens rassis. (VILLON, Poèmes variés R.H., c.1456-1463, 66).

 

Rem. R. Ling. rom. 51, 1987, 293. Trav. Ling. Litt. 19, 1975, 81.

 

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Estre en sens. "Être dans la plénitude de ses moyens intellectuels" : ...monseigneur le duc d'Orléans (...), pour ce qu'il estoit frère du roy, estoit en âge et en sens, lui sembloit, pour manier et gouverner le fait dudit seigneur roy son frère, non bien maistre de son sens (...), disposer de tous les affaires à sa guise et intention (CHASTELL., Chron. K., t.1, c.1456-1471, 13).

 

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Bon sens. "Faculté de bien juger, discernement" : JEHAN. ...vierge benigne, J'ay en mon cuer un ferme espoir Qu'en gré prendrez (...) Les loenges que je diray De vous, dont un livre feray (...). LE DYABLE. Tu n'aras ja tant de bon sens, Ne te ventes mie si tost, Que tu en escrises un mot. (Mir. st J. Cris., c.1344, 278). ...le duc Philippe (...), en l'eage de soixante et onze ans ou environ, plein encore de bon sens et de semblant de corps, mais fort débilité depuis deux ans ou trois avant sa mort... (CHASTELL., Chron. K., t.5, c.1456-1471, 227). Ung fol, comme on dit en ung conte, Jamais son bon sens n'apperçoit Tant que sa folye le dompte Ou c'un bien grant mal en reçoit. (LA VIGNE, S.M., 1496, 320).

 

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De bon sens. "Qui est sensé" : ...subtil chevalier estoit et de bon sens (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 109).

 

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Avoir bon sens / estre en bon sens : ...si est bel et a bon sens Et bien gouverne tous ses sens (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 87). Le sanguin quant il est pur et net a bon sens subtil et chault mouuement pour les operacions corporelles et a lentendement bon et bien arreste (CIB., p.1451, 218). Item homme ou femme de pensee allienee, c'est quant ilz ne sont pas en bon sens, ilz ne peuent vouer d'entrer en religion. (Sacr. mar., c.1477-1481, 52).

 

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(Bon) sens naturel, sens de nature : Aprés je di que il est bien possible que aucuns ont bien gouverné senz avoir veüz telx livres, par ce que ilz avoient si bon sens naturel et si bonne prudence et si tresgrant desir au bien publique que ceste science estoit en leur cuer naturelment entee, nee et plantee. (ORESME, E.A., c.1370, 99). Il estoit petit homme de corpz, mais fort eloquent en .II. ou .III. langaiges et plain de vif sens naturel (MOLINET, Chron. D.J., t.1, 1474-1506, 414). Pardonne-moy, si mon sens de nature [,] Incapable [,] n'a scavoir d'ouverture [l. n'ouverture ?] Pour reciter ton vertueux empire. (RIVIÈRE, Nef folz D., 1497, 826).

 

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Sans sens. "Insensé" : Aucuns en la parfin ont voulu blasmer saint Pol de ce qu'il diffamoit les autres en les appellant aucunes foys folz et sans sens (...), aucunes foys males bestes et menteurs (GERS., P. Paul, a.1394, 506).

 

-

Alienation de sens : Sans faille, on treuve bien aussy en la science de medecine que telles mutacions et telles alienacions de sens et de pensee se peuent souvent faire pour aucunes maladies. (EVR. CONTY, Harm. sphères H.P.-H., c.1400, 96).

 

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Non sens. "Défaut de jugement" v. non-sens

 

Rem. Mal sens : H. Lewicka, Les Comp., 1968, 92.

 

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(Estre) hors du sens, issir (hors) du sens, issir de son bon sens, perdre (son) sens, estre esgaré / estrangé de sens, estre ravi de son sens, estre fourvoyé de bon sens... "Devenir fou" : Je fusse yssu hors de mon sens, Se je feusse cy demourez. (Mir. enf. diable, c.1339, 23). Car s'elle ne m'eust secourue, Je feusse de mon sens yssue Aujourduy (Mir. enf. diable, c.1339, 24). Et quant elle sot la nouvelle, Qui ne li fu plaisant ne belle, Elle fu si desesperée, Si hors dou sens, si forcenée, Que deus enfans qui sien estoient, Pour ce que Jason ressambloient, Occist en despit de Jason, Puis mist le feu en sa maison. (MACH., J. R. Nav., 1349, 233). Doncques est cest lÿon de son cens forvoyés ? (Flor. Octav. L., t.1, c.1356, 370). Or ne est il nul qui ignorast toutes ces circonstances se il n'estoit hors du sens. (ORESME, E.A., c.1370, 181). Et ne prent pas Aristote fureur pour une maladie de laquelle un homme est dit furieus et hors du sens (ORESME, E.A.C., c.1370, 214). Aucune fois par teles choses il perdent sens et avis (ORESME, E.A.C., c.1370, 364). ...a l'exemple du piteux pere qui son enfant fol et hors du sens combien que le lie et bate, neantmoins tout est par amour et compassion (GERS., P. Paul, a.1394, 507). A pou que Daires n'ist du sens (CHR. PIZ., M.F., IV, 1400-1403, 48). Il n'est homme, s'il n'a le sens perdu, Qui de cecy trop ne se merveillast (NESSON, Lay guerre P.D., c.1424-1429, 60). Esgaré suis et de sens estrangé (HAUTEV., Compl. H., c.1441-1447, 64). ...je croy que vous [resvez], ou que vous estes hors du sens ; car vous savez bien que je n'en portay oncques la clef [du coffre], mais pend a vostre cincture avecques les vostres... (C.N.N., c.1456-1467, 383). A peine qu'il [l'official] ne saillit de son siege hors du sens, quand il regardoit son curé estre habillé en guise de mommeur. (C.N.N., c.1456-1467, 532). ...il sembloit mieulx hors de son sens que aultrement, tant sentoit grand doleur. (C.N.N., c.1456-1467, 535). ["fou de douleur"] ...[elle] alloit et venoit maintenant cy, maintenant la, tant estoit esmeue qu'il sembloit qu'elle fust ravye de son sens. (C.N.N., c.1456-1467, 572). Dyables, j'enracge maintenant. Maudit soit mon premier parent Qu'oncques fus en ce monde né. Je pers mon sens, non esperant D'estre jamaiz sain ne saulvé. (Pass. Auv., 1477, 217). ...au moïen de quoy [de la foudre] plusieurs moururent et autres yssirent de leur bon sens et fist plusieurs autres grans dommages. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 111 r°). LUCIFFER. Je meurs de dueil, je ne me puis tenir ; Hors du sens suis, pis c'un desmonÿacle ; Je ne sçay plus quel propos maintenir Se maintenant vous ne faictes miracle. (LA VIGNE, S.M., 1496, 369).

 

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Avoir le sens dervé / mari / mis à l'envers : Quand Gaudisse l'entent, pres n'a le sens mary (Jourd. Blaye alex. M., a.1455, 250). [Autre ex. v.17073] Tel deul a en son cuer, prez n'a le sens dervé (Jourd. Blaye alex. M., a.1455, 319). [Autres ex. v.16515, 17526...] J'avoys le sens mis à l'envers. (Cuv. T., c.1475-1500, 76).

 

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Le sens me trouble : Le sens me trouble, l'ame dans mon corps tremble. (HAUTEV., Compl. H., c.1441-1447, 66).

 

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Subst. Un hors du sens. "Un forcené" : Du secont nous povons mettre exemple quant celluy contre qui l'en donne la sentence est tel que il ne puet pecher, conme un enffent ou un hors du sens, conme le Pape Innocent le Quart l'a noté... (Songe verg. S., t.2, 1378, 163). Et s'aucune fois ilz samblent rire ou jouer, c'est le ris et [le] chant des forsonnez et des hors du senz. Bien sont hors du senz voirement quant ilz se vont pendre et tuer perdurablement. (GERS., Pent., p.1389, 85). ...les aucuns pour l'empeschement du corps qui oste l'usaige de raison, soit a cause de aage comme es enfans, soit a cause de maladie comme es demoniaques et hors du sens, et soit par mauvaise complexion comme es folz de nature (GERS., Trin., 1402, 153). Le jalloux est au pié qui bruict Et crie comme ung hors du sens (Chans. XVe s. P., c.1430-1500, 43).

 

2.

"Habileté, intelligence pratique, savoir-faire, subtilité, à-propos" : De tout ce estoit mes patrons sages, Si qu'il m'avoit de maint peril Gettee, par son sens soubtil, De celle grant mer occeane (CHR. PIZ., M.F., I, 1400-1403, 41). ...par sa force et sens, Fu Auffrique prise en tous sens. (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 252). ...puis mainte terre vainqui, Par son grant sens plus que par armes. (CHR. PIZ., M.F., IV, 1400-1403, 74). ...car y avoit des soubtils engins qui contrepensoient et qui le plus dur du noeud pensoient bien à rompre par sens, entre lesquels celuy de Lannoy, gouverneur de Hollande, et qui cognoissoit pays et les natures des hommes. Iceluy soubtilla fort en ceste matière (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 102). ...le sens et le pouvoir des Brederode leur estoit grant reconfort en l'attente de ceste guerre (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 126).

 

-

Avoir le sens de qqc. "Avoir la pratique de qqc., le savoir-faire" : Orpheüs qui sa harpe avoit Et qui seur tous chanter savoit Et de tous genres de musique Avoit le sens et la pratique Et en fu plus souverein mestre Qu'homme né ne qui fust a nestre, Sa harpe acorda sans delay (MACH., C. ami, 1357, 82).

 

-

Faire qqc. au plus beau de son sens. "Faire qqc. au mieux de son savoir-faire" : ...il iroit à Hesdin devers luy, et là feroit et pratiqueroit ceste matière au plus beau de son sens, quoique la chose il la jugeast bien grande, pour cause des Croy qui la romproient (CHASTELL., Chron. K., t.4, c.1456-1471, 332).

 

-

Ne pas avoir le sens au bout du pied. "Ne pas manquer d'à-propos" : Et pour iceulx promps canoniers subtilz Qui n'avoient pas au bout du pié le sens, Patrons, pillotes, contremaistres puissans, Voilles a force, guydons et estendars (LA VIGNE, V.N., p.1495, 136).

 

-

Ne pas estre loin de son sens. "Savoir comment agir" : Et alors le duc qui n'estoit mie loings de son sens, mais prest en ce que devoit respondre, commença à dire : ... (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 345).

 

3.

"Sens moral, sagesse" : Dame, d'onneur, de sens et de mesure A plus en vous qu'en autre creature (MACH., J. R. Beh., c.1340, 92). Par les vertus des .VII. pucelles, Le sens et la prudence d'elles... (COURCY, Chem. vaill. D., 1406, 44). Comme le printemps donne la fleur, comme la fleur donne le fruit, et comme le fruit donne l'odeur, ainsin l'estude donne les meurs, et les meurs donnent le sens, et les sens donnent les honneurs (LA SALE, J.S., 1456, 76).

 

-

Mettre qqc. sur le sens de qqn. "S'en remettre à propos de qqc. à la sagesse de qqn" : ...si vostre plaisir portoit de vous joindre emprès luy, de mettre sur son sens toutes vos imaginations et querelles et vous donner bon temps, vous, de vous-mesme, par vostre vertu et maugré tous vos hayneux, viendriez au-dessus de tout (CHASTELL., Chron. K., t.4, c.1456-1471, 329).

 

4.

P. ext. "Faculté (en général), possibilité (d'agir)"

 

-

Avoir (le) sens de + inf. "Avoir la possibilité de" : Createur Souverain de tout, quant j'ay a tout advisé, je n'ay point le sens d'en sçavoir qui encoulper fors vous, car vous estes Souverain pardessus les loix, sy poués establir et rappeller. (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 570). ...et les .iii. ne eurent sens si non deulx en fuir tant comme ilz peurent. (MIÉLOT, Mir. N.D. W., 1456, 53). La pouvre fille, revenue de paumoison (...) cessa la grand flotte de ses larmes, mais elle n'avoit encores force ne sens de respondre. (C.N.N., c.1456-1467, 133).

 

-

De tout sens. "Autant que possible" : ...mais iceluy, voyant le reculement de son père, la forte ennemie main aussi de ses contraires, tendans à sa désertion, différa son venir en court, et recula de tout sens tant et si longuement que pouvoit (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 457). Sy se fonda le père fermement sur ces mots et de tous sens laboura pour deffendre son fils. (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 458).

B. -

[Comme acte, comme attitude]

 

1.

"Jugement, avis" : Ne fais rien seulement de toi Sans l'autrui sens, je t'en castoi. (FROISS., Dits Débats F., 1363-1393, 103). Je n'osai parler plus avant, Car aultres sens me vint devant, Qui me fit taire et arester. (FROISS., Pris. am. F., 1372-1373, 52). On dist communement qu'il n'est sens ne adviz que d'homme oyseux, quant il est bien applicqué. (BUEIL, I, 1461-1466, 77).

 

-

Au plur. : ...et s'ils y font doubte, ilz vont aux sens et au conseil aux eschevins d'Arras, ausquelz ilz exposent le cas qui s'offre et en demandent leur examen (Hist. dr. munic. E., t.1, 1406,,, 570). Audit maistre Thierry, (...) monseigneur le duc Phelippe (...), confians plainement de ses sens, loyaulté et bonne diligence, a retenu en son conseillier, et avec ce pour la bonne et grant experience qu'il a ou fait desdictes chartres, il l'a fait et ordonné garde d'icelles chartres et de tous autres privileges, lettres et escriptures touchans son pays de Flandres et autres qui sont et seront mises en ses tresoreries ordonnees en icellui pays (Comptes Etat bourg. M.F., t.3, 1418-1420, 515).

 

-

"Jugement divin" : Qui pourroit comprendre les sens de nostre Seigneur, sa justice et sa misericorde ? (GERS., Trin., 1402, 164). [Trad. du lat. sensum Domini, cf. éd., 142.]

 

-

Selon mon sens. "A mon avis" : Je diroye, selon mon sens, Que vous honteux estre en devriez. (Dit prunier B., c.1330-1350, 47).

 

-

Sens de maistre. "Avis d'une juridiction supérieure" : [Dans un procès que l'on ne parvient pas à trancher] ...et demanderent li homme sens de maistire [var. de maistre] (Doc. 1400-1500. In : N. Dupire, Z. rom. Philol. 60, 1940, 285).

 

Rem. Synon. chef de sens, cf. F. Lot, R. Fawtier, Hist. des instit. fr. au Moy. Âge, t.1, 1957, 414.

 

-

Macher du sens. "Émettre son avis de manière péremptoire, faire l'important" : Tel et tel si mache du sans : On donne a leurs femmes tissuz, Et en sont aussi innocens Que Judas de la mort Jesus. (COQUILL., Oeuvres F., 1478-p.1494, 330). Et disna la, tout a loisir, Machant le sens, trenchant du sage (Repues franches K.V., c.1480, 118).

 

.

Un mache sens. "Personnage qui livre son avis de manière péremptoire, qui cherche à en faire accroire" : Il y a des oppinions Bien diverses dessus ce cas, De procureurs et d'advocatz, De docteurs et gros mache sens (COQUILL., Oeuvres F., 1478-p.1494, 63).

 

2.

"Compréhension de qqc."

 

-

Devant son sens. "Avant même de comprendre" : Cuides tu qu'on tiegne a eür Celi qui emprent (...) Un tres grant fet devant son sens ? (FROISS., Dits Débats F., 1363-1393, 107).

 

-

En grant sens. "Par mûre réflexion" : ...[le] duc (...) en maints et divers ploys tournoit et viroit ceste venue et l'estimoit de grant pois et bien digne d'estre digérée en grans sens (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 193).

 

3.

"Attitude sensée, sage" : Comme le printemps donne la fleur, comme la fleur donne le fruit, et comme le fruit donne l'odeur, ainsin l'estude donne les meurs, et les meurs donnent le sens, et les sens donnent les honneurs (LA SALE, J.S., 1456, 76).

 

-

Faire (grand) sens. "Agir raisonnablement" : Je ne feroie mie sens Se je m'en faisoie prier : Car j'ay de reposer mestier (Mir. femme roy Port., c.1342, 156). L'ERMITE. Vous servirez, sy ferez sens, Celle sainte vierge royne (Mir. femme roy Port., c.1342, 201). SAINT JEHAN. (...) Allons compter ceste aventure A noz freres, je m'y consens. SAINT PIERRE. Je pense que nous ferons sens, Car de le querir cy entour Il n'y fault ja faire retour : Ce seroit abus a nous deux. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 391). Et me dist que tout le plus grant sens que je pourroye faire, c'estoit de cremir et amer sus toute rien mon Dieu Souverain et de moy garder de l'offensser. (Percef. III, R., t.2, c.1450 [c.1340], 119). ...pour celui temps se sambloit vouloir tenir roide aucunement sur les alliances que avoit prises avec le conte du Maine et ailleurs, dont ne faisoit sens (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 344).

 

-

[D'une attitude] Estre sens. "Être sage, raisonnable" : Et vraiement, je croy que ce soit sens. (MACH., J. R. Beh., c.1340, 99). ...je vous conseil pour bien, M'amie, se vous savez rien Qu'aiez meffait encontre li, Que vous li en criez merci : Ce sera sens. (Mir. nat. N.S.J.C., c.1343, 216). Ce n'est pas sens d'aler caroler et tresquier, Mais ch'est sens de l'issir, c'on ne le puist moquier. (Bât. Bouillon C., c.1350, 337). Ce n'est pas sens le monde trop amer (MESCHIN., Lun. princes M.-G., c.1461-1465, 1). Cy vins, dont se ne fut point cens A my de le venir querir. (Pasté T., c.1475-1500, 206). Ce n'est pas sens soy eslever, en son estat doit reposer. (COLART MANS., Dial. créat. R., 1482, 170).

 

-

[A propos d'une attitude jugée insensée] Quel sens ? : De grant malice estes remply, Juïfz, maleureuses gens ! Tüer le mort, fraper celluy Qui est tout mort ! Helas ! Quel sens ? (Pass. Auv., 1477, 232).

 

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Propre sens. "Attitude de celui qui n'a en vue que lui-même, qui s'obstine dans ses convictions ; obstination" : Ce puet tres bien apparoir par l'exposicion du dyamant pris pour la sinagoge des Juifz, car des .IIIJ. faces de cestui dyamant en la prumiere reluisoit fort grant orgueil et propre sens, en la seconde face reluisoit ostinacion et toute durté de cuer, en la tierce face reluisoit avarice et convoitise, et en la quarte simulacion et ypocrisie. (MÉZIÈRES, Vertu sacr. mar. W., c.1384-1389, 111). ...l'orgueil et obstinacion d'aucuns particuliers des grans juges, qui jamais ne recognoystroyent leurs deffaultes, et que pis est ilz sont de propre sens, et comme dit saint Jeroisme des prestres et clercs de la foy crestienne, qui cuident estre plus saiges que les autres et sont incorrigibles, plus leur moustre on leurs faultes et plus sont obstinez (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.1, c.1386-1389, 504-505).

 

Rem. Cf. l'all. Eigensinn, du m. h. all. eigensinnec.

C. -

[Comme contenu de compréhension] "Signification, interprétation" : ...et ainsi appert tout le sens et la sentence de l'a[phorisme] (SAINT-GILLE, Comment. A.Y. L., 1362-1365, 380). Les gouverneurs des citéz, par le sens de quoy traicte ceste science[,] deveent aucuns arts, les autres souffrent (ORESME, E.A.C., c.1370, 105). ...des equivocacions qui ont pluseurs sens et entendemens divers (FOUL., Policrat. B., II, 1372, 155). ...si demanda tres diligenment a tresgrant instance que un autre homme li exposast une chose doubteuse et li desclarast le sens de celle chose si comme il le pouoit et savoit bien (FOUL., Policrat. B., II, 1372, 156). ...il doit du tout entendre et prester son sens et son entendement sousmettre au parfait et entier sens de la loy. (FOUL., Policrat., IV, 1372, 68). En celle saule tu troveras le mirour de Sainte Escripture, ouquel tu pourras voir ta face et congnoistre quelle elle est ou quelle fut, et par ainsy tu congnoistras quy tu es. Mais tenir droit tu dois ce mirour, sans le decliner a parvers sens ou malvaiz entendement, car il te ferait la face tortuse et vitupereuse. (CRAP., Cur Deus, De arrha B.H., c.1450-1460, 284). [Pourrait être mis aussi sous III, en emploi métaph.] ...combien qu'elle [cette proposition] soit une et pareille selon la matere et forme, toutevoies elle est aultre et aultre selon le sens, selon que cest adverbe "quod", qui est une diction determinative, c'est a dire restraintive, determine le mot mis au subject ou au predicat. (Somme abr., c.1477-1481, 169). Se dont aiant regard a Dieu, ce mot ou diction "necessaire" determine le mot du subject, adont l'oration comme bien et deuement ordonnee est, comme il apartient et est en sens compost et vraie. (Somme abr., c.1477-1481, 169). ...ladicte proposition est divisee, c'est a dire de sens divis, et est faulse. (Somme abr., c.1477-1481, 169). SAINCT MARTIN [au second prestre]. Jamais ne querray la deffaicte De ce que vous m'avez appris, Ne en moy ne sera forfaicte L'or de si tresexcellent pris, Car j'en ay totallement pris Au mieulx que j'ay peu la substance, Et le sens de si prés compris Qu'a aultre chose je ne pence. (LA VIGNE, S.M., 1496, 154).

 

-

Tirer au sens. "Devenir signifiant, venir à l'essentiel" : ...et tantost après se trouvèrent ensamble là où leurs paroles commencèrent petit à petit à tirer au sens (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 211).

 

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Prov. : On dist que sens cachié [corr. de sanc crachié, d'après une var. sens repus] ne vault pas ung bouton. (Flor. Octav. L., t.1, c.1356, 61).

 

Rem. Sur la confusion sens / sang, cf. R. Ling. rom. 46, 1982, 43 (K. Baldinger).

III. -

[Francique sinno-]

A. -

"Direction, côté d'un corps ou d'une chose"

 

-

En un sens / en tous sens : Et corps est divisible de toutes pars ou en touz senz, et a touz léz ou selon toutes dimensions et mesures, car des magnitudes, celle qui est divisible en un sens ou selonc une dimension, ce est ligne (ORESME, C.M., c.1377, 46). ...pour 5 poultres, chacune de 4 toises de long et d'un pié et un quart de fourniture en tous sens, lesquelles servent, c'est assavoir, l'une à faire le patin dessus dit, et deux des autres servent à faire les deux pieux de ladite palée, à faire les deux liernes qui sont en icelle palée d'un costé et d'autre, lesquelles deux poultres ont estés refendues de leur long à trait de fer, pour faire lesdites liernes (Comptes Paris V.L.D., t.1, 1449-1450, 675). ...pour le menaige et chargeaige d'un cent et un quarteron de solives chacune de 2 toises de long, d'un espan de fourniture en un sens et demy pié... (Comptes Paris V.L.D., t.1, 1449-1450, 676). Et si y a une belle abbaye Spacïeuse en tous sens, longue et large. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 194).

B. -

Au fig. "Moyen, façon, manière" : Nous t'avons quis trois jours par foy De lieu en lieu, chiez noz parens. Nous ne savions mais par quel sens Nouvelles de toy eussions. (Mir. nat. N.S.J.C., c.1343, 241).

 

-

A tous sens / en tous sens. "De toutes les manières" : ...nullement puet estre amenuisé ne acreu et en tous sens demeure pardurablement infeni fors que par devers la sapience infinie de Dieu. (FOUL., Policrat. B., II, 1372, 170). Le roy à son début, qui veoit et considéroit à qui il pouvoit avoir à faire, si la guerre alloit avant, se pourvit et se fortifia à tous sens, et mit tous ses engins en oeuvre et tous ses entendemens en employ (CHASTELL., Chron. K., t.5, c.1456-1471, 384).

 

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De nul sens / par nul sens. "D'aucune manière, d'aucune sorte" : ...si a beau crier, il n'est ame de nulz sens qui le puist oyr (C.N.N., c.1456-1467, 186). ...à quoi toutevoies les dessusdits, et souverainement ceux de Brederode, par nul sens ne vouloient condescendre (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 107).

REM. Faut-il distinguer (comme le fait par exemple le TLF) deux mots sens, en isolant sous un sens2 ce qui est mis ici sous III ? On a préféré une solution unitaire en considérant que, sous II, le mot sens porte indiscernablement en lui l'héritage du latin sensus et du francique sinno, et qu'ainsi l'unité de sensus sous-jacente à I et II et celle de sinno sous-jacente à II et III justifiaient que l'on se borne à une seule entrée, d'autant plus que l'idée d' "orientation" (la perception et le jugement "orientent" vers une certaine interprétation) est partout présente, le plus nettement sous III.
 

DMF 2020 - MAJ 2020 Robert Martin

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