"Trompeur" (synon. décevable)

REM. Chron. et hist. saintes et profanes (ms. du XVe s.) ds GD II, 439b. V. aussi deceptible.
 

"Tromperie" (synon. déçoite) : ...Ne ne priserez riens le monde, Mais direz que quanque y habonde N'est que decepte et que falace (Mir. st Alexis, 1382, 306). Rien n'y vault engin, ne decepte (CH. D'ORLÉANS, Rond. C., 1443-1460, 448). Mais toutesfois, c'est chose clére, Que Dieu m'a secouru tousjours, Quelque douleur, quelque impropére Quelque decepte ou vitupére Que l'en me ait fait par aucuns jours. (Myst. Viel test. R., t.2, c.1450, 228).

-

Sans decepte. "Sans tromperie, sans erreur" : Et premièrement, sans décepte, S'ensuit la forme et la recepte Des pillules, forment louées Des anciens et approuvées, à préserver d'épidémie Et de son mal, que Dieu maudie (LA HAYE, P. peste, 1426, 143). ...Sans fraude, barat ou decepte. (Myst. Viel test. R., t.4, c.1450, 132).
 

"Celui qui cherche à tromper, traître" : Et quant le peuple eut aparceu que il avoient menti, ces decepteurs s'efforcerent de retenir et detenir le peuple en ceste police par contrainte. (ORESME, Pol. Arist. M., c.1372-1374, 214).

Rem. Gloss., Paris B.N. lat. 7679, c.1400-1500, ds GDC IX, 279b.
 

"Trompeur" (synon. deceptable) : Alez subtilitez sercher, Songes, fictïons deceptibles, Pour ceulx de Lengres empescher ! (FLAMANG, Vie Pass. st Didier S., 1482, v.1524).

REM. Chron. et hist. saintes et profanes (ms. du XVe s.) et Jardin de santé, c.1500, ds GD II, 439b.
 

"Trompeur" (synon. deceptable) : DIEU. Secondement, le serpent villenable A offencé [l. M'a offencé ?], par mensonge damnable, En parolles et dictz decepcieux (Myst. Viel test. R., t.1, c.1450, 60).

REM. Therence en franç., (éd. 1500-1503), ds GD II, 439b.
 

"Trompeusement" : Item on doit eschiever conclusions sophistiques ou decepvables, car chilz sera haÿ qui parle deceptivement (DAUDIN, De la erudition H., c.1360-1380, 151). ...son oncle, messire Barnabo, qu'il print déceptivement et par manière de trahison (Doc. 1408. In : MONSTRELET, Chron. D.-A., t.1 c.1425-1440, 228).
 

"Trompeur" : On pourroit bien aussi raisonablement dire que cely aime son umbre et son ymage, qui aime celle ou il ne peut trouver amour correspondant ne riens de ce que on desire en amours, quant a vraie existence, se n'est par apparence deceptoire et come umbre inutile (EVR. CONTY, Eschez amour. mor. G.-T.R., c.1400, 592). C'est ung qui ["c'est chose qui"] est deceptoire, Pis vault que la trapë au ras (GARIN, Compl., 1460, 85). ...il jura, creancha, promit et donna son ame à tous les deables ou cas que, de precogité malice, il y voulsist proceder fraudulentement, et, finablement continua tant en sa poursieute que le seigneur de Cohen et ses adherens adjoustèrent foy et credence à ses deceptoires persuasions. (MOLINET, Chron. D.J., t.1, 1474-1506, 358). Vostre ceur ne soit espanté De songes qui sont deceptoires, Vivés en espoir de santé. (MOLINET, Myst. st Quentin C., c.1482, 241). [aussi p.24, v.1459]
 

"Trompeusement" : ...et les tiers le refont frauduleusement et deceptoirement [la rapine], sy come aucuns malicieux et deceveurs font (EVR. CONTY, Eschez amour. mor. G.-T.R., c.1400, 306).
 

"Trompeur" (synon. deceptable) : Nul n'y a que bien ne congnoisse Que failly m'avez de promesse Et que vous m'avez abusay. (...) Comme deceptueux et fin, Avez Lya pour Rachel mise, Que par faulte de voir j'ay prinse (Myst. Viel test. R., t.2, c.1450, 215). Ce sont gens qui guerre desirent, Mutins, traistres, malicieux, Qui de toutes parties tirent Avec eulx gens deceptueux. (Myst. Viel test. R., t.2, c.1450, 221).
 

A. -

[D'une chose] "Trompeur" : ...estimans tous autres estre de leurs natures, par leurs decevables frauldes et par leurs subgestions [les flateurs] empirent et perdent les estats des princes et roys. (ORESME, Monnoies W., c.1365, LXXX). ...par sa mauvaise cautelle decepvable (Hist. Berthe Pépin T., c.1400-1500, 153). Mais aussy il y a beauté painte et vaine de la cher qui est tres decevable et tres plus briefve et muable que la fleur d'un jour (GERS., Concept., 1401, 416). Soit ainsi comme il te plaist ; aussi est il escript que en noz propres faitz nous est oppinion decepvable et sentence incertaine. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 39). Ceste hystoire signifie la faulceté decevable du monde. (Déclar. Hyst. S., a.1449, 156). ...j'ay trop tost adjousté foy a voz semblans et decevables parolles (C.N.N., c.1456-1467, 235). ...et lors s'esleva entre eux la royne, touchant moult couvertement sa decepvable pensee, et dist... (Saladin C., c.1465-1468, 150). O faulce et decepvable envye, Qui m'as par ton enhort ravye Toute joye et felicité ! (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 76). Les cuidez-vous cy enchanter Par vos paroles decevables ? Ce sont tous mots non recevables Et indignes d'être écoutéz. (Myst. ste Barbe P., 1493, 42). Chose n'est qui ne soit immunde, Decevable et malicïeuse (LA VIGNE, S.M., 1496, 470).

Rem. Percef. I, R., c.1450 [c.1340], gloss. ; Hist. prem. destruct. Troie R., c.1470-1480, gloss. ; Paraboles Maistre Alain H., 1493, gloss. ...

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"Qui ne répond pas à l'attente" : Et depuis que li dis Jehans de Quaregnon eut les pourchiaus rechus, on en trouva en celle somme XXIII (...) mausains et fu li marcandise jugie mauvaise et decevaule. (Arch. Nord, 1352, B 11657, f° 15, IGLF). Item, que toute la laine soit pesee bien et loyalment continuelment en clof, sans donner vilain trait ou detenable [l. decevable] et que li peseres soit esleus par nos eschevins de nostre dicte ville de Bruges et par les dis marcheans ( (Arch. Nord, 1359, B 1596, f° 12, IGLF)). ...et pour ce, dietes tenues et subtilles sont plus decepvables que ne sont les dietes un pou plus grosses. (SAINT-GILLE, A.Y., 1362-1365, 54).

B. -

[D'une pers.]

1.

"Qui cherche à tromper, traître" : Quant on la cuide charitable, Elle [Fortune] est avere, Dure, diverse, espouentable, Traïtre, poignant, decevable (MACH., R. Fort., c.1341, 34). Nul, donques, ne doit avoir familiarité avesques luy [l'Ennemi d'enfer] ne requerir son service ne son conseil, car, aussi, c'est le pere dez mençonges tres decevable (Songe verg. S., t.1, 1378, 376). Fortune est decevable et dure (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 104).

Rem. Myst. process. Lille K., t.4, a.1485, 49/198.

-

Empl. subst. : [Discorde] la mauvaise et la decevable. (MACH., F. am., c.1361, 204).

2.

[D'une pers., de son esprit...] "Qui peut se tromper, faillible" : Mieulx te vault convertir ta subtillité decepvable a congnoistre toy mesmez, que travailler en vain a espuicier la mer et mesurer lez cieulx, et estriver a cil qui nombre lez estelles. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 36). Trop estoit celle multitude de gent indiscripte et decevable de demander aide divin aux mors, et de querir divinité ou humanité estoit fallie et corrumpue. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 114). Fragilité et defaulte sont l'esmouvement de ta priere, et puissance et perfection sont la sourse de ses dons. Doncquez se tu par ton ignorance decevable ou par affection pervertie faulz a fayre ta demande, sa justice invariable et sa science infalible ne faillent pour tant a fayre son ottroy. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 153).
 

[Sur décevable]

Rem. Cf.  ; AND : deceivablement. Lettres agn. L., 33 (desceivablement).
 

"Caractère de ce qui est trompeur" : Decepvableté : deceptibilitas (Gloss. gallico-lat. M.M., c.1425-1450, 203).
 

"Par tromperie, par trahison" : Decepvaument : deceptibiliter (Gloss. gallico-lat. M.M., c.1425-1450, 203).

REM. GARBIN 1487 (falaciter, decevamment) ds GD II, 440c.
 

"Tromperie, fraude, imposture" : Et s'aucun bien fait en sa vie, Il le fait par ypocrisie Pour decevance de la gent. (DUPIN, Mélanc. L., c.1324-1340, 140). De homme a pris la semblance Pour miex faire sa decevance. (Mir. N.D. Rosarius K., c.1330, 42). Cuidez vous ma mesnie avoir Ainsi par vostre decepvance ? (Mir. enf. diable, c.1339, 45). ...et expressément renoncent quant à ce lesdites parties, l'une partie vers l'autre, à tout ayde de droict escrit et non escrit, à toute exception de fraude et de barat, de tricherie et décevance, à toute cause d'ingratitude, au bénéfice de diviser actions, à tous statuts, grâces, privilèges, indulgences faicts et à leur octroyer, et à octroyer des apostres ou de Roy ou de quelques autres princes (Cartul. Laval B., t.2, 1356, 257). ...Car c'est pechiés et decevance De dire contre ce qu'on pense (MACH., Voir, 1364, 476). Et renonçons (...) à toutes exceptions de fraude, de decevance (...) et à impetrer dispensation de pape (FROISS., Chron. L., VI, c.1375-1400, 17). ...toutes ces douces parolles (...) che n'estoit que dechevanche et destrucion pour nous (FROISS., Chron. R., IX, c.1375-1400, 176). ...sa beauté et s'aparance N'est fors que toute decepvence. (CHR. PIZ., M.F., I, 1400-1403, 61). ...messire Gabriel, qui veoit que tout ce n'estoit fors decevance (Bouciquaut L., 1408-1409, 323). Et debouté En doit estre, quant redoubté N'a sa dame, ains s'est arrouté A Faintise qui l'a bouté En tel haultesce Qu'il est, par faulse subtilesce Et decepvance qui l'adresce, Larron d'amoureuse richesce Qu'il a emblee Et de plusieurs lieux assemblee, Dont la joie n'est point doublee, Et mainte dame en est troublee. (CHART., L. Dames, 1416, 220). ...et renoncent en ce fait lesdites partyes chacune en droit soy et pour tant que luy touche, par les foy et serment de leurs corps, à toutes exeptions de deceptions, dol, de mal, de fraude, d'erreur, d'ignorances et deccevances, à tous baratz, cautelles et cavillations, à toutes grâces, franchises et respitz, libertez, dispensations et absolutions, relèvemens et grâces quelzconques de pape et de prince et de prélat (Cartul. Laval B., t.3, 1424, 67). Sces tu qu'il sera, Maubüé ? Saches, mon courage est müé. Je cuide que nostre creance N'est que fantosme et decevance ; Et pour ce je la vueil lessier. (Mart. st Pierre st Paul R., c.1430-1440, 151). ...Malbruny (...) ala a confesse ; et parloit si prudemment et de si long temps que le prestre s'en esmerveilloit ; et aussy tout mal savoit, et estoit tout plain de vices et murdrier d'ames et de corps, et acomplisseur de tous maulx, nulz biens ne faisoit que de apparence et pour decevance. (Nouvelles inéd. L., p.1452, 35). Seigneurs, quoy que soit, vray ou fable, Croire ne puis qu'il fut ainsi Aveugle né, qu'il dit ycy : Il nous sert d'une decevance. (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 454).

Rem. JEAN GOLEIN, Rational B.D., c.1370-1372, gloss. ; Myst. st Clément Metz D., p.1439, gloss. (dessevance) ; TAILLEV., Psaut. vil. D., a.1440, v.292 ...

-

Sans decevance : Mais ceaus qui sont en tristesse, en ardure, En plours, en plains, en dolour sans cesser, Et qui dient qu'Amours leur est si dure Qu'il ne puelent sans morir plus durer, Je ne puis ymaginer Qu'il aimment sans decevance Et qu'en eaus trop ne s'avance Desirs (MACH., R. Fort., c.1341, 73). Savoir faisons que par devant Richart de Vaily et Jehan Piece, clers notaires juréz du Roy nostredit seigneur en son Chastellet de Paris, fu personnelment establi noble et puissant seigneur, monseigneur Edouart, seigneur de Beaujeu, lequel de son bon gré, bonne voulanté, propre mouvement, et de sa certaine et vraye science, senz force, fraude, fiction, erreur, lezion, inadvertance, circonvention, decevance, induction, ou contrainte aucune, (...) recognut (...) avoir donné, quictié, cedé (...) auxdiz Monseigneur le duc de Bourbonnois (...) et à Madame la duchesse sa femme (...) la baronnie, terre (...) dudit Beaujeu (Titres Bourbon L., t.2, 1400, 111).

-

P. méton. "Celui qui trompe, qui cherche à tromper" : Lennemy est leur deceuance : Et aussi la faulce creance Que ie voy en ses sarrazins Qui croyent mahom et iupins : Ydolles sont de damnement. (Myst. st Martin K., a.1500, 176).
 

[V. decevoir] "Trompeur" : Mauldit soit le serviteur seduissant ou decepvant ou quel se confie plainement la dilection du dominant ! (DAUDIN, De la erudition H., c.1360-1380, 270). Cuers où merci faut et cruautés dure, Dont il ne puet pour moy pité issir, Yex decevans, biau corps, douce figure, Vraie biauté pour cuer d'amant ravir M'ont pour amer fait si lonc temps languir Qu'Amours depri que, s'elle ha volenté De moy donner merci pour ma grieté, Reteingne la, car je n'en puis garir. (MACH., L. dames, 1377, 59). Or me gart Diex de leur sort Faus, mauvais et decevant. Et pour ce amoureusement Endurer Les maus d'amer Vueil sans desroy (MACH., Les lays, 1377, 440). Et se j'ay prins en ma faveur Ses doulx regars et beaux semblans De tres decevante saveur Me tresparsans jusques aux flans, Bien ils ont vers moy les piés blancs Et me faillent au grant besoing : Planter me fault aultres complans Et frapper en ung aultre coing. (VILLON, Lais R.H., c.1456-1457, 12). Amère mère, qui, decevante, vente Et torsfaitz faiz, car en patente tente Tu abas bas soubz ta morsure sure, Par desroy roy d'euvre exigente, gente, Gent preffis filz, issu d'excellente ente, Et surpris pris de ta dardure dure, Dure, hellas ! (LA VIGNE, Compl. roy Bazoche M.R., 1501, 392).
 

"Tromperie" : Pour Dieu, seignour, vous pri, ne faites movement, Qu'il vous pourroit tourner a grant decevement (Gir. Ross. H., c.1334, 122). [Fortune] Les bras et le pis a d'argent, Mais ce n'est que decevement (MACH., R. Fort., c.1341, 38). ...pour doubtance de decevement, li signeur detinrent les deus trompeurs tous quois (...) et ne rompirent point leur ordenance. (FROISS., Chron. L., I, c.1375-1400, 70). Si lui dira de bons exemples du mal qui puet avenir et qui est maintes fois avenu a pluseurs pour telz folies, la grant deshonneur et reprouches qui en sourdent, et les deceuvemens qui sont es hommes. (CHR. PIZ., Trois vertus W.H., c.1405, 102).

Rem. Jourd. Blaye alex. M., a.1455, gloss. MACHO, FARGET, Nouv. Test. en fr., c.1479-1480, ds GD II, 441a (le decepvement des richesses).

-

Sans (nul) decevement : S'elle m'ocist, c'iert pechiés et enfance, Puis que je l'aim sans nul decevement (MACH., L. dames, 1377, 116). Si tiens que parler de princesse Vient du cueur, sans decevement, Ma Dame, ma seule maistresse. (CH. D'ORLÉANS, Ball. C., c.1415-1457, 77).
 

"Tromper, abuser" : Gardes y bien que tu feras, car tu es trop aisee a decever. (JUV. URS., Aud. celi, 1435, 223).
 

I. -

Adj. "Qui trompe"

Rem. Cligès C.T., 1455, 97v (Fortune cruelle, decepveresse).

II. -

Subst. fém. "Celle qui trompe, dissimulatrice" : Aucunesfoiz aussi cel regard et cel bel acueil, qui samblent estre de premiere venue gracieux et plaisant et significatif de doulçour et d'amour, sont contrefait et faint (...) sy come nous avons cy devant dit d'aucunes qui sont deceverresses et usent de faulx traiz. (EVR. CONTY, Eschez amour. mor. G.-T.R., c.1400, 667). Par leurs parolles espoventables et trespercans le cueur et la pencee m'avoient ja ces troys derroiees et sedicieuses deceverresses bestourné le sens et aveuglé la rayson, et mené jucquez pres le mast de mortelle forcenerie en grant hayne de ma vie et souhayt de mourir (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 21).
 

"(Celui) qui trompe, qui cherche à tromper, imposteur" : Oy tes comptes diligemment Et par ce verras clerement Ce que tu pues par an despendre Et ou tu dois tes rentes prendre, Et saras se ti receveur Sont bonne gent ou deceveur (MACH., C. ami, 1357, 135). ...et les tiers le refont fraudileusement et deceptoirement [la rapine], sy come aucunes malicieux et deceveurs font (EVR. CONTY, Eschez amour. mor. G.-T.R., c.1400, 306). ...et ne het seulement que faulx decepveurs et malvaiz mesdisans qui sont aussi come dragons cruelx, qui du venin qu'ilz ont es langues et es dens, destruient ceulx qui ne veulent que bien. (EVR. CONTY, Eschez amour. mor. G.-T.R., c.1400, 647). A la parfin prenons contre ce deceveur advocat, Plaisir mondain, ces trois raisons lesquelles j'ay amenees contre luy, et trois pour cuer doloreux. (GERS., Déf., 1400, 244). La condition du deseveur est : menteur, parjure, faulz samblant, flateur, traitre, fallacieux, malicieux, agaitant, couvert, et autres maulx infinis (CHR. PIZ., Déb. R. Rose H., 1401-1402, 130). Ne il n'est deceveur affaitié, Maiz prest a tout loyal traictié, Bien entendant ; Tousjours a bonne fin tendant Va sa jennesce en amendant. (CHART., L. Dames, 1416, 235). Chier seigneur, mes est le renom, Et nous en sommes bien racordz, Que ce decepveur, dont le corpz Vous avéz fait executer, Pour nostre loy plux confuter A dist que, puis que mort seroit, Au tier[s] jour resusciteroit. (Pass. Semur D.M., c.1420 [1488], 234). Aprés ceste entree s'aida le malin esperit de ce decepveur d'une seconde cautele, et s'apensa que extremité n'aquiert riens sans debat et que la voie moienne a ses adresses a tous chemins. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 119). L'ost des François, comme je croy, A Orleans est en noble arroy, Ou sont grant nombre de seigneurs Tous parens et amis du Roy, Qui le servent de bonne foy En grans peine et en grans labeurs, Encontre gens diffamateurs, Maleuseurs, larrons, decepveurs, Qui sont Anglois de tel nature, Pires que Sarrazins ou Teurs (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 605).
 

"Trompeur" (synon. deceptable)

-

[D'une pers., d'une collectivité] : ...on le tient [le peuple de Gand] à mauvais et à déceveux (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 400). Je estoy vous le scavés bien Deceveus pour tresgrant erreur Et si avoy haynne et dolleur Quant des crestiens parler veoy (OUDIN, St Genis M.S., c.1490, 78).

-

[D'une chose abstr.] : Peut-il en vostre coeur cheoir une telle horreur que de (...) donner volontairement vostre âme au diable sous semblant déceveux soy donnant à Dieu ? (CHASTELL., Chron. K., t.1, c.1456-1471, 35). ...en samblant déceveux (...) mist tout le monde en erreur et en fremison (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 299). ...son inconstance et deceveuse [var. decepvable] nature (CHASTELL., Temple Boc. B., 1463-1464, 5).

Rem. RENÉ D'ANJOU, Cuer am. espris (éd. Quatrebarbes), 1457, 2 (Doulce guerre, mal savoureux, Plaisant ennuy, bien decepveux ; desheureux ds W., 27).
 

"Tromper" (synon. décevoir) : Se a une fenestre est ne an rue Et son esgart nulle part rue, Tu pances qu'aucuns doit venir, Qui te pourra decevir. An quelconques leu qu'elle voise, Tourjours ara an tun cuer noise (Renart contref.,, 1ère réd. R.L., t.2, c.1319-1322, 197).
 

A. -

[Idée de tromperie, d'illusion]

1.

Empl. trans.

a)

Decevoir qqn / une collectivité. "Tromper, abuser qqn, induire qqn en erreur"

-

[D'une pers.] : Li villain sil [si] est de tel grain Qu'il cuide tout jours par certain C'on le vuille honir et decepvre. (DUPIN, Mélanc. L., c.1324-1340, 145). Et soit mémoire que le Roy fust deceu en lassiette de ladicte terre, car un denier de rente en Languedoc vault deux deniers aux partyes de France. (Titres Bourbon H.-B., t.1, c.1331, 336). C'est fols s'i fie ! Chascun deçoit et nelui ne deffie. Et se je di que la mort qui m'aigrie Puis demander a ma dame jolie, Par quel raison Le feray je, ne par quel occoison ? Elle s'est mise en la subjection (MACH., J. R. Beh., c.1340, 85). Par felons traitteurs sont mains corps trop decepu (Flor. Octav. L., t.1, c.1356, 294). Ainsi aux autres mousterray Conment se devront entremettre De fil de roy en erreur mettre Ne decevoir. (Mir. Barl. Josaph., c.1363, 282). Seigneurs, bien me triche et deçoit Ignace, que ne puis vertir Ny a nostre loy convertir. (Mir. st Ign., 1366, 107). ...et quant ilz [les paroles et la vie] sont descordables, tels paroles sont a soustenir ou a prendre comme de gens qui veulent decevoir. (ORESME, E.A., c.1370, 529). Mes je les dechuc [var. decus] par leur rire ["en riant"] (FROISS., Pris. am. F., 1372-1373, 76). ...le conte d'Armignac leur prommettoit qu il les menroit en Lombardie, et le conte de Foix, qui n'est mie legier à decepvoir, pensoit tout le contraire (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 188). Et chascuns clerement voit Qu'amis n'est pas qui son ami deçoit ; Dont se honnist amans qui tant s'assert Qu'Amours le fuit et le nom d'amy pert. (MACH., L. dames, 1377, 196). ...pour certain je vous afferme, Sanz vous decevoir n'engignier, A les vous dire (Mir. st Lor., 1380, 175). [Personnif.] Verité a la foys par le moyen de Conscience denoncoit a Male Voulenté cachee soubz dissimulacion, que elle failloit, que elle se parjuroit, que elle decevoit son seigneur et son peuple a escient, et dechassoit bonne paix. (GERS., Noël, p.1404, 305). ...combien que pour aucuns rappors lors vraissemblables, et, pour aucunes conjectures assez apparens, ledit duc de Bourgoingne, doubtant estre deceu, eust delayé aucunement d'assembler audit lieu (FAUQ., I, 1417-1420, 317). Il en est beaucoup de telz foulz ; Tout le monde en est bien deceu. (Roy sotz, c.1450-1500, 217). ...de troys marchans de Savoye (...) qui furent trompez et deceuz par trois cordeliers, lesquelz coucherent avec leurs femmes (C.N.N., c.1456-1467, 7). L'abusé et deceu maistre remonstre a son clerc l'aspreté de religion (C.N.N., c.1456-1467, 95). Et dont quant divorce est celebré a cause de frigidité, il n'est pas donné licence a l'homme qu'il espouse une aultre femme, car se il l'espouse, le mariage sera separé, car l'eglise a esté deceute. (Sacr. mar., c.1477-1481, 78). Il n'est pas bon de croire la flaterie des maulvays hommes, car par leurs doulces parolles ilz decepvent les bons. (MACHO, Esope R., c.1480, 83). Sans qu'on y fust ne trompé ne deceu. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 178).

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[En coord. avec trahir] : Ha ! ma chiére dame et amie, Deceu m'avez et trahy Se vous n'avez de moy mercy (Mir. abbeesse, 1340, 72). ...chils faus chevaliers lombars mesires Ainmeris de Pavie les avoit trahis et deceus fausement et couvertement (FROISS., Chron. D., p.1400, 872). ...tu m'as trahy et deceu. (MACHO, Esope R., c.1480, 160).

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Empl. abs. : Nostre ame comme la leur est faicte a Dieu congnoistre et l'amer. Ne nous mesprisons pas doncques, ne decevons, ne deshonnourons, ne dampnons et perdons a escient, mais soyons telz que nous puissons estre nombrez avec ceulz qui sont amez de Dieu et par luy excellemment honnourez (GERS., P. Paul, a.1394, 516).

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[Du diable, du mauvais esprit...] : ..."Lez dyvins sont diz come ceulx qui sont plains de Dieu, car ilz faignent que ilz soient plains de deïté et anuncent aux gens lez choses advenir par aucunes conjecturacions", conme il leur est revelé par lez mauvez espiriz, qui y sont plusieurs foys decepuz, en telles conjecturacions, et faillent conmunement a anuncier lez choses advenir. (Songe verg. S., t.1, 1378, 364). Avises aussy que aucune fois on cuide recevoir le Saint Esperit et on recoit le mauvais, pour ce que soubs semblance de bien il hurte a l'uis, et faint qu'il soit le bon esperit, et decoit la simple ame, et li fait faire de tres grans pechiez en cuidant bien faire. (GERS., Pent., p.1389, 81). Car nous avons par les saintes escriptures que, depuis la passion nostre seigneur dieu Jhesucrist, toutes ydolles, toutes fantosmes et toutes dyableries perdirent incontinent leurs malvaistiez, faulcetez et tricheries, de quoy les dyables decepvoient les gens (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 125). Iay plus parle de la vertu ymaginatiue que des autres pour ce que souuent elle empesche saincte meditacion et que le deable en fait souuent son instrument a nous deceuoir car il ne quiert que nous precipiter en pechie (CIB., p.1451, 214).

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Empl. abs. : De la mauvaise vie d'Antecrist. (...) Des quatre manieres par lesquelles il decepvera. (Somme abr., c.1477-1481, 96).

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[De Fortune] : Li bons par Fortune dechiet, Et souvent au mauvais eschiet Li biens qui dou bon est cheüs, Quant par Fortune est decheüs [Ou est-ce dechoir ?]. (MACH., D. Aler., a.1349, 318). La, peüst on appercevoir Com Fortune scet decepvoir Ceulx qu'elle veult a droit aherdre (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 211).

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"Leurrer (le diable)" : Levés vous eles Pour ses prudences et cautelles. Il [Jésus] a les dïables deceu. (Pass. Auv., 1477, 113).

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[Sur le plan conjugal] "Tromper" : ...savoir et cognoistre les façons et manieres et quoy et comment femmes pevent decepvoir leurs mariz. (C.N.N., c.1456-1467, 255).

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[Sexuellement] "Abuser" : ...lequel Jehan Tortier, qui estoit marié, de sa malvaise volenté, solicita, deceut et induit par pluseurs foiz ladicte Marguerite tellement quil la congneust charnellement et l'engroissa (Titres Bourbon L., t.2, 1400, 106). ...Morice Guilloteau, prestre, combien qu'il se deist grant ami dudit Pierre Bouhet et conversant souvent avec lui en son hostel, avoit faulcement et mauvaisement deceue et deflorée et congneue charnelment une sienne suer (Doc. Poitou G., t.7, 1410, 192). ...de l'ermite qui deceut la fille d'une povre femme, et lui faisoit accroire que sa fille auroit ung filz de lui qui seroit pape (C.N.N., c.1456-1467, 4).

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[D'une chose, d'un état de choses] : Et vraiement, si com je cuit. Qui plus couvoite qu'il ne doit, Sa couvoitise le deçoit. (MACH., R. Fort., c.1341, 139). Tu n'iès pas de la bonne ligne De Juda qui droit regle et ligne Et qui fu de Dieu beneoite, Pour ce qu'elle estoit juste et droite. Biauté t'a pris et deceü Et concupiscence esmeü Et ton cuer ont si retourné Qu'a tous maus faire t'ont tourné, Quant a tort Susanne jugas. (MACH., C. ami, 1357, 14). ...jovente vous dechuite et foux ["faux"] oultrequidier vos governe (JEAN D'OUTREM., Myr. histors B.B., t.6, a.1400, 499). ...et furent decheu par le bruine, car il ne veoient point lonch ne autour de euls, et ne se donnerent de garde. Si furent enbatu ou logeis le roi de Boesme et de l'evesque de Liege. (FROISS., Chron. D., p.1400, 434). ...lesdictes lettres lui sembloient très desraisonnables et au Roy prejudiciables, et que le Roy y est grandement deceu (FAUQ., I, 1417-1420, 122). ...c'est le bourdon de frere Conrard. Il n'y a nonnain ceans qui bien ne le cognoisse ; vous n'avez garde que j'en soye deceue [par ses paroles], je le cognois trop. (C.N.N., c.1456-1467, 108). Quant vint le vespre et le solleil commença à esconsser ses rays, pour donner lieu à la clarté de la lune, qui est l'heure que toutes bestes prennent repos et cuident estre en sceurté, dont souvent sont deçeues, ainsi qu' il appert de l'oustarde et d' autres oyseaulx, semblablement aussi de plusieurs reptibles de la terre, qui sont prins et deçeuz par la fiance de la nuyt, meismement les hommes surprendent l'un l'autre et se font les trahisons et perilleuses entreprinses (BUEIL, I, 1461-1466, 36). ...il [le comte d'Armagnac] cuidoit certainement avoir obtenu dispense de nostre Saint Pere de pooir maintenir sa seur en l'estat de mariage, et de cela avoit acquises bulles fauses, non que lui sceust la faulseté (...). Si en fut ledit conte deceu et mis en grant declamace du peuple (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 257). Convoitise de gloire a decheu tant maint. (CHASTELL., Temple Boc. B., 1463-1464, 185). Et, quant le corbeau vit que par vaine gloire il estoit deceu, fut moult doulent et triste et se repentit de ce qu'il avoit creu le regnard. (MACHO, Esope R., c.1480, 88). Je estoy vous le scavés bien Deceveus pour tresgrant erreur Et si avoy haynne et dolleur Quant des crestiens parler veoy (OUDIN, St Genis M.S., c.1490, 78).

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[Par un bon tour] : ...toute deceute et esclandrie, tost après se partit de leans. [Un chevalier a profité de la crédulité d'une chambrière pour se jouer d'elle] (C.N.N., c.1456-1467, 125). Ainsi qu'avez oy fut le bon chevalier deceu par le subtil et percevant engin de sa desloyalle femme. (C.N.N., c.1456-1467, 466).

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[Par une confusion] : ...vostre mere et la mienne le vous y fist [un signe sur l'épaule] afin qu'elle ne fust deceue de sa lignie [pour éviter toute possibilité de confusion sur ses enfants] (Percef. III, R., t.2, c.1450 [c.1340], 311).

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Decevoir les sens : Mais se il est de tel corps ou de tel, ce jugement est fait par les sens de dedens, si comme il met en Perspective, et sont telz sens souvent deceus en telz cas, si comme il fu dit devant de celui qui est en la nef meue. (ORESME, C.M., c.1377, 536).

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Empl. abs. : Trop grant actrait fait amuser Souvent, et deçoit et aluche (CHART., D. Rev., a.1424, 317).

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Sans decevoir. "Sans tromperie, sans mensonge" : Or t'ay devisé et apris, Se retenu l'as et compris, Comment ta dame puet savoir Que tu l'aimmes sans decevoir, Car les armes portes entieres En cuer, en vis et en manieres, Fors tant que les enarmes toutes Sont sans cause en l'escut deroutes, Pour ce qu'Esperence te faut... (MACH., R. Fort., c.1341, 70). Dont toutes les fois qu'il avient Que de ta dame te souvient, Se tu n'as pas en temps passé Son commandement trespassé, Eins l'as servi sans decevoir, Tu dois en ton cuer concevoir, Ymaginer, penser, pourtraire La biauté de son dous viaire Et ses crins d'or, crespes et longs, Qui li batent jusqu'aus talons..., (MACH., C. ami, 1357, 77). Souvenirs fait meint amant resjoïr, Mais il me fait toute doulour avoir ; Car il m'estuet tout adès souvenir De ma dame que j'aim sans decevoir, Et quant ne puis ne sentir ne veoir La parfaite douceur dont elle est pleinne, Joie me fuit et doleur m'est procheinne. (MACH., L. dames, 1377, 38). ...sans decevoir, Je suis sien toute ma vie [à ma dame] (CH. D'ORLÉANS, Chans. C., c.1415-1440, 205).

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Prov. : Tels cuide autrui dechoivre qui devant le sera. (Bât. Bouillon C., c.1350, 334). On dist communement que cuidier dechoit (Percef. III, R., t.1, c.1450 [c.1340], 376).

b)

"Séduire, tromper par quelque illusion"

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[À propos d'un enchantement, d'un songe] : ...bien se percheut qu'il estoit deceu par son songe (Percef. III, R., t.1, c.1450 [c.1340], 26). Gadiffer (...) ne pouoit estre deceu par nul enchantement pour ung ung anel que sa mere lui avoit mis au doy (Percef. III, R., t.1, c.1450 [c.1340], 208). ...Virgille le deceupt faulsement Par mauvais art imbut d'enchantement (MICHAULT, Procès honn. F., p.1461, 57). ...ilz dechoivent comme enchanteurs (MOLINET, Myst. st Quentin C., c.1482, 63).

-

[Dans le domaine de l'amour] "Séduire" : Mais je vueil celle dame avoir, Qui tant belle est, que j'ay veu. Le cuer ay pour li deceu, Si que je ne sçay contenance. (Mir. march. larr., c.1349, 107). Decheüs est par femme ; il s'en asotera. Aussi fu Aristotes, qu'en si grans sens regna : Une femme fist tant qu'elle le chevaucha. (Bât. Bouillon C., c.1350, 197). ...Yex decevans, biau corps, douce figure, Vraie biauté pour cuer d'amant ravir (MACH., L. dames, 1377, 59). En nagant il regarda Deyanira, et tant la regarda que sa beaulté le deceupt. (LEFÈVRE (R.), Hist. Troyes A., c.1464, 368). De l'omme chaste deceu par la femme. (COLART MANS., Dial. créat. R., 1482, 270). L'amour d'une femme deçoyt Le coeur de l'homme asés souvent. (Gent. moun. T., c.1500, 349).

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[Avec une idée de surprise] "Surprendre" : ENTENDEMENT. Monstre moy celle difference qui me deçoit. ESPERANCE. Voulentiers, maiz note bien mez parolles, et entens souvent ceste distinction. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 156).

c)

"Prendre par la ruse" : Mais avant elle fust decepue et es mains de son anemy livree, qui la manda au chastel de Mur en Baselicat, et la, entre deux cointes de plume, sur ung lit lui fist rendre l'ame a Dieu. (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 184).

-

"Se procurer qqc. par la tromperie, la ruse" : D'armes gaigner, decevoir et conquerre Et de paillars pour nostre enffer acquerre Feray debvoir (LA VIGNE, S.M., 1496, 220).

-

Decevoir un animal. "Attraper (un animal) par ruse, par un piège" : Adont le païsant felon Contre terre estraint le faucon Et fait qu'en a la seignourie, Maiz se n'est pas sans vilenie Et sans domage que reçoit Le Faucon, que la roys deçoit (LA BUIGNE, Rom. deduis B., 1359-1377, 96). ...ung pescheur (...) alla querir ses roix et ses laschs et les tendy et appresta affin qu'il les puist decevoir et prendre [des brochets] (COLART MANS., Dial. créat. R., 1482, 147).

2.

Empl. intrans. ou pronom.

a)

"Se tromper, se méprendre, commettre une erreur" : LA CHAMBERIERE. Dame, ne vous decevez mie ; Mandez la ventriere briefment. Vous traveilliez certainement (Mir. enf. ress., 1353, 18). S'il est ainsi conme vous dites, Je le verray isnel le pas. Sire, ne vous decepvez pas, Gardez vous bien. (Mir. emper. Romme, 1369, 294). L'EMPERERIS. Mes seigneurs, je vous dy sanz doubte Que il meismes s'est deceu. (Mir. emper. Romme, 1369, 305). ...il creoit fermement qu'elle en luy son cuer et amour avoit ; comme font ces quoquars et musars qui tiennent et cuident que telles femmes paillardes les ayment pour ce que leurs amys les appellent et par devant leur font le beau beau, et en derriere le syzeau. Telz badins se deçoyvent, car pour ce ne lez ayment mie telles femmes rusees, mais seulement leur argent. (Nouvelles inéd. L., p.1452, 40). Prince tres saige [Charles d'Orléans], legitur Quod astutior s'i deçoit (VILLON, Poèmes variés R.H., c.1456-1463, 48). Et qui son loz et extimacion [d'Honneur Femenin] Cuide de fait estaindre et ignorer, Il se dechoipt (MICHAULT, Procès honn. F., p.1461, 49). Qui bien se garde, bien se voit Et bien se treuve bien souvent ; Qui deffault, souvent se deçoit Et en vient inconvenient. (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 550).

-

Prov. : Par trop cuidier on se dechoit (TAILLEV., Prise Luxemb. D., 1443, 168).

b)

Empl. intrans. "Être sous l'emprise de l'amour, être fou d'amour" : Car les Anglois m'ont tout tolu, Et une meschine qu'avoye Si belle, que trop decevoie, Que j'avoie prise en Bourgoingne. (Mir. chan., c.1361, 164).

3.

Part. prés. en empl. adj. "Trompeur"

a)

[D'une pers.] : ...mainttes personnes nobles et vaillans ont esté menees a povretté, a honte et a mort pour avoir dit leurs secreps aux mauvais ypocriptes desloyeux et decevans (Chastel. Vergier S., c.1450-1480, 82).

-

Part. prés. en empl. subst. : ...il ne doit pas tousjours croire aux parolles enmiellees des decevans (COLART MANS., Dial. créat. R., 1482, 265).

b)

[D'une chose] : Delectacion nous est si doulce et si amiable, si atrahant, blandissant et decevant que tantost et presentement nostre appetit, qui ad ce est enclin, la prent et poursuit senz actendre que raison ait espace de considerer et deliberer et jugier se c'est bien ou mal, qui ne s'en guecte et n'y prent garde soingneusement. (ORESME, E.A.C., c.1370, 173). Aucunes aultres sciences sont pour cognoistre lez choses advenir, lezquellez ne viegnent mie de neccessité, ne conmunement, ne si n'ont aucunes causes natureles, et telles ars et sciences sont faulses et descevantes, plaines de vanité (Songe verg. S., t.1, 1378, 364). Et neantmoins il en y a aucune qui bien cognoissent la descoyvante chancon de la serayne et non pourtant ilz la retiennent en possession et demayne. (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.1, c.1386-1389, 244). ...mon cuer a tant fouÿ D'eulx les paroles Et leurs grans loberies foles, Leurs decevans blandices moles ! (CHART., L. Dames, 1416, 222). Et se j'ay prins en ma faveur Ses doulx regars [de celle que j'aimais] et beaux semblans De tres decevante saveur Me tresparsans jusques aux flans, Bien ils ont vers moy les piés blancs Et me faillent au grant besoing : Planter me fault aultres complans Et frapper en ung aultre coing. (VILLON, Lais R.H., c.1456-1457, 12).

4.

Part. passé en empl. subst. À deçu. "Par tromperie, par trahison" : ...ilz feissent ou feissent faire par icelles places, par jour et par nuit, bon guet et bonne garde, et icelles emparassent et fortifiassent le mieulx qu'ils pourront pour les deffenses d'icelles, et gardassent qu'ilz ne soient prins par les rotiers et gens de compaigne nommez Escorcheurs, à desceu ou autrement, ainsi qu'ilz ont cuidié faire en aucunes places par cy devant (Ecorch. Ch. VII, T., 1444-1445, 83).

B. -

En partic. empl. trans. [Idée d'une attente trompée, insatisfaite, d'une désillusion ; d'une pers., d'une chose ou d'un état de choses] "Tromper l'attente de qqn, ne pas répondre à l'attente de qqn, causer chez qqn une désillusion" : Chose qui plaist est a demy vendue, En quelconque marchandie que ce soit, Mais l'eul [l'oeil] prise tel chose qui desoit, Le plus souvent, quant elle [est] bien connue (JEHAN DE LORRAINE. In : CH. D'ORLÉANS, Rond. C., 1443-1460, 489). Dist l'asne ! "Mon maistre me dechoit. Il a ung petit chien auquel il donne a mengier de la meilleure viande qui est a sa table (...). Il l'aplanie et se joue avec lui. Et moy, jamais ne me toucha ne parla doucement a moy..." (COLART MANS., Dial. créat. R., 1482, 260).

-

Part. passé : Et pensoit ensi que li rois d'Espagne et toutes ses batailles le sievissent, mès non fisent, dont il en fu laidement deceus (FROISS., Chron. L., I, c.1375-1400, 82). Hahay, dist il, Fortune, comme tu es perverse et poy fiable ! Ly homs est bien deceuz qui en toy ne en tes dons s'affie. Or n'a pas granment que du plus hault de ta roe tu m'as mis au plus bas (ARRAS, c.1392-1393, 172). Le filz s'i accorda, et quant il ot partout alé, il feist son rapport a son pere : "Certes, pere, bien as dit verité, et trop malement je estoye deceu ; car je suis alé au premier que je cuidoye estre mieulz ton amy pour les biens que tu luy fais. Il m'a respondu qu'il te feroit compaignie jusques au gibet, mais illec te laisseroit..." (GERS., Concept., 1401, 415). LE PREMIER GERARIEN. C'est quelque fortune d'orage, Qui cest année leur court sus. LE SECOND GERARIEN. Ilz en ont esté bien dessus, Car le temps passé tant avoyent Eu de blez que point ne doubtaient De malle fortune advenir. (Myst. Viel test. R., t.2, c.1450, 125). Adont il rendi ses armes a son varlet, puis monta a cheval et dist : "Pucelle et vous, chevalier, a Dieu vous commans, car jamais repos n'avray, si seray chevalier." Lors fu la pucelle deceue, car bien cuidoit de son amour jouyr. (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 910). Pour ce que l'appetit de l'homme est insaciable et quiert tousjours choses nouvelles, pourquoy très souvent il est deceu... (BUEIL, I, 1461-1466, 40). ...en une chose [disent les étoiles] sommes supplantees et deceutes, c'est que nostre resplendeur et beaulté ne reluist pas tousjours, ains est limitee a certaines heures. (COLART MANS., Dial. créat. R., 1482, 94). ...cellui est moins deceu auquel est hastivement denyé ce qu'il requiert. (COLART MANS., Dial. créat. R., 1482, 184). L'ERMITE. Corps bieu, il y a longuement Que ne les vy në apparceu. LE PRINCIPAL. S'ilz ne viennent, je suis deceu. L'ERMITE. Il n'est pas quë aulcun ne faille. (Sots gard., a.1488, 102).

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Estre / se trouver deçu de / pour qqc. : ...adonques se aucun des deux est deceü pour ce qu'il cuide estre amé de tele amour et non est, et se l'autre n'est en rien cause de ceste decepcion, lors cestui doit causer et accuser soy meïsmes. (ORESME, E.A., c.1370, 462). Par mon chief, dist le roy, je ne scay ne ne puis adviser lieu dont secours leur puisse venir. Je ne m'en doubte pas que je ne les aye ou par force ou par famine. Et ainsi s'asseura le roy d'Ausay, de quoy il se trouva bien deceu. (ARRAS, c.1392-1393, 152). Gadiffer et les .II. pucelles (...) cuidoient que leurs mariniers fussent tous en bon point et qu'ilz deussent tresbien mener leur navire. Mais de ce furent ilz deceuz, car (...) la navire, qui sans nul gouverneur estoit, couroit sus l'eaue vaucrant a sa voulenté. (Percef. III, R., t.2, c.1450 [c.1340], 129). Et, qui pis estoit, [le connestable] avoit escript et mandé au roy Edouart d'Angleterre, après le traictié par lui fait avecques le roy, et qu'il estoit retourné à Calais pour passer mer et retourner en Angleterre, qu'il estoit ung lasche, deshonnoré et povre roy d'avoir fait ledit traictié avec le roy, soubz umbre des promesses que le roy lui avoit faictes, dont il ne lui tiendroit rien, et que en fin s'en trouveroit deceu. (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 347).

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Se tenir pour deçu : ...ces compagnons (...) se tirent pour trop decheu, quant il sceurent que li sires de Couchi leur estoit escapés (FROISS., Chron. R., VIII, c.1375-1400, 223).

C. -

P. méton. [Idée de nuisance (par tromperie, par surprise...), de faute commise]

1.

Empl. trans.

a)

[D'une pers.] "Faire (par tromperie, par surprise...) du mal, du tort à qqn, nuire à qqn" : ...et la voulenté et entencion que elle avoit d'aler querre les botereaux, pour faire mengier à sondit ami du venin d'iceulx pour le decevoir (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 311). ...ceulx d' Arras se tindrent pour deceüz ["en mauvaise posture"] de se voir ainsi enclos de costé et d'autre, où il y avoit largement gens d'armes et grant nombre d'artillerie (COMM., II, 1489-1491, 186).

-

Decevoir qqn de qqc. "Duper, voler qqn de qqc." : ...ouquel paiement il eust bien esté deceu de la tierce partie ou au moins de grant somme de deniers. (Chancell. Henri VI, L., t.1, 1426, 331).

-

"Être défavorable à qqn" : Dieus, aies merci de moy, ne me dessoy mie avec mes iniquitez, ne a moy ne te courrouces (GAST. PHÉBUS, Livre oraisons T., c.1380-1383, 49).

-

Estre deçu. "Être mis en échec" : ...m'avez accolée pour accomplir vostre desordonnée volunté, dont vous estes, la Dieu mercy ! bien deceu, car aultre que moy, pour ceste heure, n'aura ce qui doit estre mien. (C.N.N., c.1456-1467, 77).

b)

[D'une chose] "Faire du tort à qqn ou à un animal (par surprise, contre toute attente...), porter préjudice, nuire à qqn, l'attaquer" : ...la cole le deçoit [le chien] (LA BUIGNE, Rom. deduis B., 1359-1377, 328). Les nuis y sont chaudes pour la grant chaleur qu'il a fait la journée devant, mais, sus l'aube crevant, l'air se refroide durement, et ce les decepvoit (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 98). ...et si estoient bien pourveu de toutes coses que il lor besongnoit ; mais orgoels et outrequidance les dechut (FROISS., Chron. D., p.1400, 496). Ta demouree te dechoit. Va t'en aprés, tu feras droit. Tu as icy trop reposé ! (Percef. III, R., t.2, c.1450 [c.1340], 358). Ta grant malice, A la fin, si te decepvra (Mir. st Nic. juif, c.1480-1500, 133). Jamais son corps ne fut deceu [de Marie qui a enfanté vierge] (MICHEL, Myst. Pass. J., 1486, 40). J'ay moult grant peur, si le froit dure, Qu'aulcuns en seront trop deceux. A ! les rains ! (LA VIGNE, Munyer T., 1496, 194).

-

[D'un comportement, d'un fait] "Trahir qqn" : Ainsi que avez oy fut la belle damoiselle deceue par la mulette, et contraincte d'obeyr au chevalier et a l'escuier [Il s'agit de la mule qui a conduit d'elle-même l'écuyer chez la maîtresse du chevalier] (C.N.N., c.1456-1467, 214).

2.

Empl. pronom.

a)

"Se rendre coupable (de qqc)., commettre une faute" : Mais encor plus me deceüsse Assez, se menti li eüsse ; Car mentir ne doit a sa dame Amans pour mort de corps ne d'ame, Eins li doit toudis dire voir Au plus près qu'on le puet savoir. (MACH., R. Fort., c.1341, 27). Se cil a destre sont paié, Si qu'il ne sont point delaié, Cil de la senestre partie Ont aussi tost leur departie, Si desservent et si reçoivent De quoy malement se deçoivent, Quant dames cuident decevoir. Je croy bien dire de ce voir. (MACH., D. Aler., a.1349, 339).

b)

"Se faire du tort à soi-même" : Pour Dieu ! pren en gré son chastoy Tout aussi bien comme d'un roy, Et tien que de cuer t'amera, Quant en secret te blasmera. Car qui doctrine ne reçoit En gré de tous, trop se deçoit. Et si n'est homs, tant soit parfais, Qui n'erre par dis ou par fais. (MACH., C. ami, 1357, 127). Nous sommes ung petit ; se nous nous entouellons ne ensonnions à prendre prisonniers, nous nous deceverons et ne pourrons entendre à chose que nous aions à faire. (FROISS., Chron. M., XII, c.1375-1400, 285). ...comment il, qui n'est vray confez, comment osera il recevoir son Createur ? Et s'il ne le reçoit, comment il se deçoit et en quel peril il se met. (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 18). Car la mousche vers lui courra, Dont l'aguillon lui demourra, De quoy garde ne se dourra. Lors recevra La pointe qu'il n'appercevra. Sans le savoir, s'en decevra A tant que douloir s'en devra. (CHART., L. Dames, 1416, 255).

3.

Part. prés. en empl. adj. "Nuisible, qui fait du mal" : ...plaies fraudulentes, decepvans et malvaises (SAINT-GILLE, Comment. A.Y. L., 1362-1365, 255). ...pour la froideur decevante la chaleur naturelle se retrait au cuer (SAINT-GILLE, Comment. A.Y. L., 1362-1365, 255).

4.

Part. passé en empl. subst. Au deçu de qqn. "Au détriment de qqn (par tromperie)" : Lequel suppliant au desceu d'icelle Ysabeau eust osté le clouet du fermant du coffre où estoit ladicte finance et icellui eust ouvert, et, ce fait, eust prins oudit coffre cent pieces d'or, tant frans à pié comme à cheval (Paris domin. angl. L., 1426, 204). ...il [Jacques Coeur] devoit avoir envoyé audit souldan de Babilonne, au desceu du Roy, un harnois complet, à la fachon des parties de par deça (ESCOUCHY, Chron. B., t.2, a.1465, 284-285).
 

"Tromperie" (synon. décepte) : Ainsi font moult de gens en cest monde qui quierent leur vies par telles dechetes et vont es eglises, ou il s'asamble plus de gens, et en la greigneur presse il se laisent cheer comme se il fussent mors et traient la langue, et leur saut l'escume de la geule, et font acroire que il sont malades de mal de saint pour avoir et sourtraire l'argent des gens. Telles gens sont larrons Dieu, qui quierent leur vies par telles mallisses et decheites. (HENRI FERR., Modus et Ratio, Livre deduis T., c.1354-1377, 152). Je n'ay de vostre conseil cure ; Trop y a malice et deçoite (Cent ball. R., c.1388-1396, 135). Mes coulleurs me convient jetter Avant que le puisse livrer, Car il n'est pas bon a avoir, Il le me convient decepvoir Et tout le fait de le deçoite Vous diray. (MARCADÉ, Myst. Pass. Arras R., a.1440, 122).
 

"D'une manière qui ne peut décevoir" : Indeceptibilis (...) : qui ne peult estre deceu (...). Indeceptibiliter (...) : indecevablement (LE TALLEUR, Vocab. E.M., c.1490, 164).
 

"Caractère de celui qui ne peut être déçu" : Indeceptibilitas (...) : indecevableté (LE TALLEUR, Vocab. E.M., c.1490, 164).