C.N.R.S.
 
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     BESOGNER     
FEW XVII *sunni
BESOGNER, verbe
[T-L : besoignier ; GD : besoignier ; GDC : besoignier ; AND : bosoigner ; DÉCT : besoignier ; FEW XVII, 278a-b : *sunni ; TLF : IV, 423b : besogner]

I. -

[Corresp. à besogne A ; idée de besoin, de nécessité]

A. -

Empl. trans. indir.

 

1.

Besogner de qqn/qqc. "Avoir besoin de qqn, avoir à se servir de qqc." : Le chevallier mist lors son espee, sa lance et son escu auprés de lui pour ce que il ne sçavoit s'il en avroit a besoigner (Percef. III, R., t.1, c.1450 [c.1340], 150). Et pour ce fut leur deliberacion d'y envoyer le Mareschal de Crathor, qui estoit homme bien entendu et cognoissant en tel cas plus que nulz autres gueres qu'on eust peu trouver pour le temps, combien qu'ilz eussent bien à besongner de lui en la place. (BUEIL, I, 1461-1466, 165). ...je vous remercye de l'euffre que me faictes, à mes enffans et à moy, car eulx et moy avons bien à besongner des bons amis de feu monsieur le gouverneur (Cartul. Laval B., t.5, 1482, 101).

 

-

Besogner de + inf. "Avoir besoin de" : ...ordinons que d'hors en avant ly maires et les jureis des vinals, leur clerc et varlet, quant aulcunne personne besongneroit d'avoir le papier des jureis pardevant les maistres et conselhe por alcunne plainte ou fame termineez et gisant en rapeaux (...) soit tenus de cheli papier aporteir (STAVELOT, Chron. B., a.1447, 71). ...chosez veritables et saines aucunefois besongnent aussi bien d'avoir aide comme les plus troubles. (CHASTELL., Vérité mal prise D., c.1460, 78).

 

-

Besogner à + inf. "Avoir besoin de" : Et encore i avoit un autre point pour quoi li dus de Lancastre besongnoit à demorer en Engletière. (FROISS., Chron. R., X, c.1375-1400, 91).

 

2.

Besogner à qqn

 

-

[D'une chose] "Être nécessaire à qqn" : Se bien avés fait jusc'a or, En bien perseverés encor ; Et ce grandement vous besongne, Je vous dirai pour quel besongne. (FROISS., Méliad. L., t.3, 1373-1388, 29). ...li repos à aucuns besongnoit bien, car il en i avoit grant fuisson de blechiés et de lassiés. (FROISS., Chron. R., X, c.1375-1400, 162). ...il ne les avoit de quoy racheter, car les seigneurs n'ont mye toudis argent quant il leur besoigne (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 157). [Ou empl. impers. ?] ...ledit messire Simon qui jà avoit sa response, estoit encore droit là, et surattendoit aucunes lettres lesquelles lui besognoient du conseil du roy. (CHASTELL., Chron. K., t.4, c.1456-1471, 16). Quant la nef fu faitte, il le fist sçavoir a Peleus et a Jason. Jason en eut grant joye. Tout ce qui lui besoignoit estoit prest. (LEFÈVRE (R.), Hist. Jason P., c.1460, 168).

 

-

Empl. abs. [D'une pers.] "Être utile, nécessaire" : Et se tint li dus de Normendie a Cambrai un lonch temps, et li rois de France se tenoit a Pieronne en Vermendois, et donnoient saudees a tous Genevois et Prouvenchiaus arbalestriers ; et qant il estoient paiiet pour trois mois, on les envoioit oultre sus les pasages et frontieres, la ou on supposoit que il besongnoient. (FROISS., Chron. D., p.1400, 413).

B. -

Part. prés. en empl. subst. "Celui qui est dans le besoin" : Par Salomon te veuil retraire ; Dist : "Justice espreuve les besongnans Et met en grace et en bonté." (Renart contref. R.L., t.1, 1328-1342, 54).

C. -

Empl. impers.

 

1.

Il besogne qqc. à qqn. "Qqc. est nécessaire à qqn" : Et a painnes li signeur osent Dire quel cose il leur besongne (FROISS., Joli buiss. F., 1373, 54). Nous la venu, je suppose que nous serons adrechié, conforté et consillié de tout ce qu'il nous besongne. (FROISS., Chron. D., p.1400, 56). Et la se rafresqirent de tout ce que il lor besongnoit, de chevaus, de sellerie, d'armeures et de toutes aultres coses qui apertiennent a gens d'armes. (FROISS., Chron. D., p.1400, 113). ...ce que il lor besongna tant de monteures que d'abis, il s'en pourveirent a Bruges (FROISS., Chron. D., p.1400, 238). Toutes les garnisons françoises de la environ furent pourveues de ce que il lor besongnoit, pour atendre l'aventure et passer la saison. (FROISS., Chron. D., p.1400, 413). Syre chevalier, or vous prie je que me voeilliez adouber, car j'ay tout ce qu'il me besongne. (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 909).

 

-

Empl. abs. : A ceste parole s'acorderent tout li compagnon, et furent tantos apparilliet, et lors chevaus refierés a ceuls asquels il besongnoit. (FROISS., Chron. D., p.1400, 533).

 

-

Il besogne à qqn + inf. "Il est nécessaire à qqn de" : Car il te besoingne esperer de luy ce que tu ne peulz avoir sans luy. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 93).

 

-

Il besogne bien à qqn (d'une action évoquée ds le contexte) "C'est utile, nécessaire, c'est une chance pour qqn" : Nostre gendre (...) Et sa femme sont mors ensemble, Qui tenoient toute Soissongne ; De ce rien miex ne nous besongne : miex amasse chascun vesquist. (Mir. Berthe, c.1373, 199). Ce jour que je vous ay compté, ilz se sauverent et aussi firent-ilz tous les autres, et bien leur besoingnoit car se ilz eussent esté tenus ne trouvés, sans merchy ilz estoient mort. (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 72). Ce roy, de bonne memoire, en son temps mist grant paine d'acquerir amis à tous lez, et bien luy besoingna (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 177).

 

.

Il besogne bien à qqn que : Si que le fis le ressongnoit Trop fort, et bien li besongnoit Qu'il tenist la chose secrete, Par voie honnourable et discrete. (MACH., P. Alex., p.1369, 13). Messires Thumas Trivès (...) et li sires de Basset, cascuns sa banière devant lui, vinrent à l'escarmuce, et bien besongnoit à l'avant garde que il fuissent hastéement conforté, car il furent sus le point de perdre tous leurs logeïs. (FROISS., Chron. R., X, c.1375-1400, 23).

 

2.

Il besogne à qqn. "Qqn est dans le besoin" : Elle cognoist moult bien qu'il me besongne, Et pour ce voelt entendre a ma besongne Et moi garnir de ce qui m'est mestiers. (FROISS., Orl., 1368, 95).

 

3.

Il besogne de qqc. "Qqc. est nécessaire" : ...[ se ] ceulx-cy vouloient faire droit et raison et compter, on trouveroit or et argent assez plus qu'il n'en besoingne à present pour estoffer les besoingnes d'Angleterre. (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 24).

 

4.

Empl. abs. S'il besogne. "S'il le faut, si la situation l'impose" : Et se acumenièrent et confessèrent li pluiseur, et se misent en bon estat, ensi que pour tantost morir, se il besongnoit. (FROISS., Chron. L., I, c.1375-1400, 3). Dont li requissent li Flamenc que il establesist en Flandres, de par lui et ou nom de li, deus ou trois vaillans honmes et gens d'armes et archiers, qui li aidaissent a garder la frontiere et euls consillier, se il besongnoit. (FROISS., Chron. D., p.1400, 342). ... il n'atenderoient pas que les Escos les venissent requerre ne enclore dedens la ville dou Noef Chastiel sur Thin, mais se departiroient, le bon matin, tout apresté pour tantos combatre, se il besongnoit, et se meteroient sus les camps et prenderoient cel avantage, et ensi esbahiroient ils lors ennemis. (FROISS., Chron. D., p.1400, 774).

II. -

[Corresp. à besogne B ; idée d'activité]

A. -

Empl. intrans.

 

1.

"Agir, oeuvrer"

 

a)

"S'acquitter d'une tâche, d'une affaire, d'une mission" : L'AMANT. Et tu l'aras certainement : Va besoingnier. LA MAQUERELLE. En l'eure sanz plus esloingnier, Mais qu'elle seulement m'escoute, La besongne feray sanz doubte. (Mir. Theod., 1357, 73). ANNE. Avez vous besoignié ? JHEROBOAM. Si bien Que vous en serez tout contempt. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 258). Mais je vous promés, comme chevalier, que je revenray au plus tost que je pourray, et ay espoir d'avoir besongné dedens ung mois au plus tard. (Percef. III, R., t.2, c.1450 [c.1340], 313). Et quant le jour fut venus, oye la messe et dictes ses heures, de besoingnier il ne cessa, et tant que a l'ayde de Dieu, du roy et de Madame il fut d'armes, de destriers et de tres riches paremens et autres abillemens si bien en point, -- que vous diroye je ? (LA SALE, J.S., 1456, 151). ...et là nous repaistrons ung peu et, selon ce que noz guides nous diront, nous besongnerons. (BUEIL, I, 1461-1466, 103). Sus mon ame, Naudet, je n'eusse pas cuydé. Tu en besongnes comme un maistre. (Gent. Naudet T., c.1500, 295).

 

b)

Besogner + adv. ou compl. de manière "Agir, oeuvrer (de telle ou telle manière)" : Seigneurs, Dieu vous doint besoingnier Si bien et par faiz et par diz Qu'avoir en puissiez paradis. (Mir. ev. arced., c.1341, 141). G'y vois ; ne sçay quant revenray Ne conment je besongneray. A Dieu vous dy. (Mir. Theod., 1357, 69). Et atant vint Melusigne qui moult doulcement le bienviengna et receupt moult amiablement en disant : Monseigneur, je suiz moult joyeuse de ce que vous avez si bien besoingnié et si honnourablement en vostre voyage. (ARRAS, c.1392-1393, 78). Et vrayement se besongner En loyauté veulent toudis, Bien y acquestent paradis (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 78). Sans lesqueles [des pommes confites] aucunement Nul ne présume aler ades Visiter gens qui sont malades, Et qui veult à point besoignier, S'il est sain, se doit esloignier, Espécialment en temps Des maladies mal sentans (LA HAYE, P. peste, 1426, 140). Et lui dist le Roy : " Beau cousin, vous avez très bien besongné". (BUEIL, II, 1461-1466, 7). Mes vous advés mal besoignhé, Quant vous l'advés cruxiffié, Et mal vous en prendré, se croy ! (Pass. Auv., 1477, 267). Il se tint peu de choses qui y furent promises. Ilz besongèrent en dissimulation. (COMM., I, 1489-1491, 141).

 

-

C'est bien besogné. "Beau travail" : LE CRESTIEN. Le juif ay si bien blasonné Et attiray tant en mes las, Au moyen de sainct Nicolas, Qu'il m'a presté cent escus d'or. LA FEMME. Cent escus ! LE CRESTIEN. Voyez. LA FEMME. Quel tresor ! C'est bien besongné, par mon ame ! (Mir. st Nic. juif, c.1480-1500, 96). PREMIER SERGENT. Il en prent ung. J'en tiens ung. PREVOST. C'est bien besongné ! A l'aultre tost aprés, aprés ! (LA VIGNE, S.M., 1496, 310).

 

c)

[D'une chose] "Procéder" : Aussy science ne traicte point des choses singuliers, ainçoys lez relaisse a experience et conseil, qui besoingnent par patron et par exemple. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 134).

 

d)

Part. prés. en empl. subst. [Dans le nom d'une allégorie] Bien Besognant. "Celui qui agit bien ; ici, celui qui s'acquitte bien de ses devoirs" : Li varlés a nom Biaus Samblans, Et son frere, Bien Besognans, Est priés d'iluec, car je le voi (FROISS., Par. am., c.1361-1362, 62).

 

e)

Part. passé en empl. subst. "Besogne dont on s'est acquitté" : ...je sçay que desirez aussi sçavoir du besogné qui a esté fait audit Resgembourg à ladicte journée (ESCOUCHY, Chron. B., t.3, Pièces justif., 1454, 447).

 

2.

"Accomplir un travail (manuel ou autre), travailler pour gagner sa vie" : ...la Court lui a dit que la fin pourquoy avoit esté esleu estoit à ce qu'il traveillast, laborast et besoignast en ladicte Chambre (BAYE, I, 1400-1410, 299). Estoit sa coustume telle que il portoit en sa gibeciere tousjours cent frans ou plus en ore, si regardoit aucune fois ces povres varlés qui portent la buche, ou autres que il veoit de ses fenestres besongnans par sa court ça et là, appelloit les aucuns où il lui sembloit que bien fust employéz de ceulx qui jamais rien demander ne lui ossasent ne parler à lui, leur demandoit s'ilz estoient mariéz, et leur enqueroit de leur estre. (CHR. PIZ., Paix W., 1412-1413, 155). À Pierre Roux, sommelier de la panneterie de la royne, ledit jour, eu VI réaulx, neuf livres à lui ordonnez estre baillez pour les envoier à maistre Nicaise, tapicier besongnant à Saumur (Comptes roi René A., t.1, 1451-1480, 250). ...se ung povre homme mecanique de son mestier a besongnié pour aucun qui ait promis de le contenter (JUV. URS., Verba, 1452, 368). ...selon les cas d'injures, bateries et autres excès et maléfices que lesdiz maistres, ouvriers, maneuvres, servicteurs et autres besongnans ès dictes mines commectront et perpétreront, ledit gouverneur les pourra faire mectre et constituez prisonniers ès lieux des dictes mines (Aff. Jacques Coeur M., 1453-1457, 353). Je congnois quant tout est de mesmes, Je congnois qui besoigne ou chomme, Je congnois tout fors que moy mesmes. (VILLON, Poèmes variés R.H., c.1456-1463, 54). J'entends bien qu'il fault besongner Qui veult vivre (Mir. st Nic. juif, c.1480-1500, 83). ...promist ledit roy [à Raymond Lulle] qu'il le feroit et le mist contre son serment en une forteresse pour le faire besongner à force, lequel lui fist l'or, duquel furent faiz les vielz nobles d'Angleterre (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 128 r°).

 

-

Empl. impers. (Il) est besogné en qqc. "On travaille à, on s'occupe de" : Cedit jour, a esté besoigné en l'election dessus touchée, jusques à IX heures, que messeigneurs les presidens a convenu aler au Conseil devers monseigneur le Dauphin. (BAYE, I, 1400-1410, 341). Et tant y fut besongné que finablement iceulx biens, c'est assavoir ceulx qui furent trouvez dedens la cité de Cambray, lui furent rendus et restituez. (MONSTRELET, Chron. D.-A., t.2, c.1425-1440, 247).

 

-

Prov.

 

.

Peu parler et bien besogner : Dès que dou prendre s'embesongne, Je li lo selonc la besongne Pour li a point embesongnier Po parler et bien besongnier, Car on dit que trop parler nuist. (MACH., D. Aler., a.1349, 269). Preng ce qu'il te fault et te tais : Pou parler et bien besoignier ! (Gris., 1395, 5). A poy parler, bien besongner. Que me donrrez vous pour ung an ? (Myst. Résurr. Angers S., 1456, 256).

 

.

Quand les blés sont bien drus, il y faut besogner : Car ly laboureus dient souvent en reprouchier Quant les blés sont bien druz, il y faut besongner. (Flor. Octav. L., t.2, c.1400, 468).

 

3.

En partic.

 

a)

[Domaine milit.] "Se battre, combattre" : ...Phillibert et ses X chevaliers furent venus a la bataille, et orent tellement besoingnié que tous les hommes Giron furent mors et Giron pris. (ARRAS, c.1392-1393, 201). Li François estoient la grant fuisson, et se tout euissent monstré corage et desfense, ensi que li troi chevalier desus nonmet fissent, il euissent espoir mieuls besongniet que il ne fissent. (FROISS., Chron. D., p.1400, 869). Toutesvoyes, avant que la tempeste fut passee, il fut tant traveillié de ferir que, s'il eust eu a besongnier, ses coups eussent estés de petite value. (Percef. III, R., t.1, c.1450 [c.1340], 12). Si a mon, ce dit le duc ; mes qui luy pourions nous mettre en barbe, homme de sorte ? Puis qu'il a si grant fain de besongnier, il convient bien qu'il en ait ung. Ja est la troizieme ou IIIIe fois qu'il me tempte, et ne cesse de me presser que je luy baille homme pour faire armes. (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 134).

 

-

Avoir bien à besogner. "Avoir à se battre durement, avoir des difficultés pour s'imposer" : ...il trouva le sire de Rocqueton et ses gens qui combatoient bien durement et avoient bien à besongner ; car dedans Escallon avoit beaucoup de vaillans gens (BUEIL, II, 1461-1466, 130).

 

-

Donner à besogner (à un ennemi). "Donner du fil à retordre" : ...il avoit bien intencion de leur donner tant a besongnier, a l'ayde de la bonne chevalerie qu'il avoit en son royaume, qu'ilz n'y conquesteroient synon paine et maleureuseté. (Percef. III, R., t.2, c.1450 [c.1340], 57).

 

b)

[Domaine politique, diplomatique] "Négocier, traiter (une affaire)" : Devers le soudan s'en alerent Et à son conseil besougnierent Si bien, que bons acors fu fais De tous delis, de tous meffais (MACH., P. Alex., p.1369, 222). En tel estat, il vint à Montpellier et descendi à l'ostel à l'Angele, et dist que c'estoit ung abbé de la haulte Gascoingne qui s'en aloit à Paris pour besongnier. (FROISS., Chron. M., XII, c.1375-1400, 26). Le duc de Bourbon y envoia son ambassade notable pour besognier (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 7). ...dont lesditz embassadeurs se trouvèrent fort troubléz, comme gens mal acoustuméz de besongner en si grans affaires et matières. (COMM., II, 1489-1491, 194).

 

-

Besogner en toutes pieces. "Avoir pleins pouvoirs" : Touteffoix, il vint ung des capitainnes de la dite armée, appellés capitainne de Petre, lequel avoit puissance de besongnier en touttes pièces ; auquel on acordont que moienant une sertaine somme d'argent (...) tout fut apaixiés (AUBRION, Journal L., 1494, 349).

 

c)

[Dans un contexte grivois] "Faire l'amour" : ...les deux chevaliers et leurs compaignes firent silence et besongnerent tellement a leurs plaisances que, ains qu'ilz se descouchassent le matin, ilz laisserent chascun leurs femmes enchaintes d'un beau fils, comme vous orrez ci aprés (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 251). Saint Jehan ! dirent elles, si vostre mary a bien besoigné ennuyt, les nostres n'ont pas esté oiseux. (C.N.N., c.1456-1467, 204). Vela comment ilz s'entre aymerent. Et tousjours si bien s'accorderent, Sans couroucher ne rechigner, Que je cuide qu'ilz besongnerent Ainsy qu'il falloit besongner. (COQUILL., Oeuvres F., 1478-p.1494, 104). ...puis après que tout fut couché, se leva d'auprès sa femme et fist aller coucher son compaignon à sa place, qui ne différa point à besongner à ses pièces avecques la jeune fille, qui bien entendit la sottie de son mary (TARDIF, Facéties Pogge M., c.1490, 225).

B. -

Empl. trans. indir.

 

1.

[Le compl. désigne une chose]

 

a)

Besogner à qqc. "Travailler, s'employer à, s'acquitter de" : De ce faulx Jhesus engigner, Pour bref, il m'y fault besongner : Je m'en vois en enfer le cours A Lucifer querre secours, Combien que je seray frotté Cent contre ung. (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 616). Et, pendant le temps que ledit grant maistre besoignoit à laditte matere, le roy luy rescripvit tant pour le fait dudit duc de Nemours comme des gens d'armes et autres choses (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 276).

 

-

Besogner à + inf.

 

.

"Travailler à faire qqc. qui est du ressort de sa profession" : ...plusieurs ouvriers et ouvrieres pour avoir besongné a faire trois trefs et trois bonnetes (Clos galées Rouen M.-C., t.1, 1370, 215). ...Clement de Venise et Jehan Achoue, calfas estrangiers sans gaiges, pour avoir besongné de leur mestier de calfas a calfestrer les galees dessus-dictes pour tout le moiz de mars derrain passé (Clos galées Rouen M.-C., t.2, 1389, 189).

 

.

"S'occuper de, tâcher de" : Besongnez à savoir qui chevauchera et à la police de vos vivres et de vostre guet (BUEIL, I, 1461-1466, 202).

 

b)

Besogner de qqc.

 

-

"S'occuper de qqc." : ...pria et requist a lui depposant et a feu Poncelet Gourlidot, en son vivant juré royal, qu'ilz voulzissent aler avec lui en ladicte ville de Saulce Champenoise pour besongnier avec pluseurs habitans dudit lieu des cens, rentes et reddevances qu'ilz doivent (Trés. Reth. L., t.3, 1456, 385).

 

-

"Régler (une situation)" : ...ledit roy, après avoir fait coupper les testes à neuf des séculiers, les évesques tint en prison et envoya vers nostre Saint-Père Calixte pour savoir comment il en devroit ouvrer à l'exigent du cas, duquel envoy ne m'est apparu depuis comment nostre Saint-Père en ordonna, ne comment ledit roy aussi en besongna, ou par mort ou par condempnation à chartre perpétuelle. (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 311).

 

c)

Besogner sur qqc. "S'occuper de qqc." : ...et besongneray sur ceste entreprise a mon honneur et prouffit et au voustre. (Rambaux Frise S., c.1450-1475, 53). ...et avisez bien de telement faire et besongner sur les comptes des patrons des galées du temps passé que notre droit y soit bien gardé et que n'y soyons point desfraudez (Aff. Jacques Coeur M., 1453-1457, 179). Le VIIe et VIIIe jours dudit mois, ledit sire Octo et moy avons besongné ensemble sur l'expédicion dudit sire Octo, qui s'en va devers le Roy pour faire rapport audit seigneur des matières de notre commission (Aff. Jacques Coeur M., 1453-1457, 229).

 

2.

[Le compl. désigne une pers.] Besogner à qqn

 

a)

"Traiter avec qqn, avoir affaire à qqn" : Et quant on voloit parler à lui ou besoingnier, on le venoit là querre. (FROISS., Chron. R., IX, c.1375-1400, 77). Oultre un po ay a besongnier La hors, mentir ne vous en quier, A un marchant. (Mir. march. juif, c.1377, 214). Chere seur, je vous conseille et prye que vous ayez tousjours en memoire de dire a voz gens qu'ilz aient a besongner a gens paisibles, et marchandent tousjours avant le fait (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 127). Et, pour ce, garde toy de la compaignie d'ung envieux, car avoir à besoigner a luy est chose perilleuse et difficile (MACHO, Esope R., c.1480, 174).

 

-

En partic. "Avoir affaire à qqn (dans un combat), se battre avec qqn" : Par foy, dist chascuns, il a grant temps que nous ne veismes nul plus bel homme en armes, ne de meilleur contenance. Cil n'a pas euvre laissiee qui a tel homme a a besoingnier. (ARRAS, c.1392-1393, 61). Par ma foy, Sire, respondy Gadiffer, le chevalier est le plus expert a la jouste a qui j'eusse oncques a besongnier, mais j'ay grant merveille qui il est. (Percef. III, R., t.2, c.1450 [c.1340], 221).

 

-

Besogner à qqn à + inf. "Charger qqn de telle besogne" : ...le Roy m'a besongné à examiner Guiotin de Nores et Ector Jassellin, cyprians prisonniers, détenuz ou chastel de Sausset (Aff. Jacques Coeur M., 1453-1457, 462).

 

b)

"S'occuper de qqn" : Prevost (...) Se vous avez ung peu loysir De besongner a noz personnes, Nous vous dirons nouvelles bonnes Et que vous ourrez voulontier. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 406). ...il s'en alla vers le logeis du roy, en regardant s'il verroit personne de ceulx à qui il avoit à besoingner (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 145).

 

c)

"Se battre en duel avec" : ...et en ce faisant, il ne fait service à nul, il despent son argent, il expose son corps pour tollir la vie ou l'honneur à cellui à qui il a à besongnier, qui lui vient à petit de profit (BUEIL, II, 1461-1466, 100).

 

d)

[D'une chose] "Concerner, intéresser, préoccuper qqn" : Se li soit comptez li secrez Entierement de la besoigne Qui a vous et a moy besoigne. (MACH., J. R. Nav., 1349, 174). Se de t'aider bien l'amonnestes Conseil mettra en ta besongne Selon le cas qui le [l. te] besongne (Mir. parr., 1356, 26).

C. -

Empl. trans. dir.

 

1.

[Le compl. est en général un pron. pers. ou interr. ou un nominal (rien, chose)] Besogner qqc.

 

a)

"Faire qqc., s'occuper de qqc." : ...et ne veult [le prisonnier] aucune chose besongnier pour commandement que l'en li face (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 519). Furent assemblés en la Chambre de Parlement les presidens et conseilliers des trois Chambres dudit Parlement pour oïr la relacion de Guillaume de Buymont de ce qu'il avoit fait et besongné ou voiage de Rouen, selon l'instruction à lui baillée de par la Court (FAUQ., III, 1431-1435, 14). Enffans, que besongnez vous la Maintenant de si grans façons ? (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 147). Or ça, mes seurs, considerons Quel chose avons a besoigner. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 378). ...le jour de Pasques XXIe dudit mois, n'avons riens besongné pour la révérence des festes. (Aff. Jacques Coeur M., 1453-1457, 189). Or ça, beau cousin, advisez que avez à besongner ; car je vous vueil bien faire plaisir. (BUEIL, II, 1461-1466, 150). J'aime mieulx non rien besoigner Que ces cloux faire, par mon ame ! Je seroie palhart infame, Si besoignhois pour Jhesus pendre. (Pass. Auv., 1477, 177). Sire, c'est l'effect de ce qui a esté besongné touchant la matere dessusdite. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 223).

 

b)

"Obtenir qqc. dans un traité, par une discussion" : ...la Court ot très agreable ce que par les dessusdis avoit esté fait et besoingné ou fait de ladicte ambassade (FAUQ., I, 1417-1420, 219). ...et lui firent des offres [les notables], mais non pas suffisans, ne tels comme on les demandoit, par quoy ne besongnèrent riens (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 158). Ainsi retourna sans riens besoingner, et racompta au duc de Bourgoingne la rudesse qu'il avoit trouvée, lequel en fut très desplaisant (LEFÈVRE ST-RÉMY, Chron. M., t.1, c.1462-1468, 145).

 

c)

Besogner qqc. à qqn. "Faire, infliger qc. à qqn" : ...ung homme qui (...) se mesle de tailler gens, d'arracher dens, et d'un grand tas d'aultres brouilleries ; et avoit ne sçay quoy a besoigner a l'oste de leens. (C.N.N., c.1456-1467, 402).

 

d)

Besogner qqc. sur qqn. "Entreprendre (qqc.) contre" : Ilz ont debatu avec les compaignons, si le secours leur venoit, qu'ilz avoient à faire et aussi ce que on pourroit besongner sur les ennemyz (BUEIL, I, 1461-1466, 181).

 

e)

[Dans un contexte grivois] "Entreprendre qqc." : La bonne fille fut tant pressée qu'il luy convint dire que l'on n'avoit encores rien besoignié en son ouvrouer (C.N.N., c.1456-1467, 498). La nuyt se passa sans rien besoigner qui despleut moult a nostre sire des nopces. (C.N.N., c.1456-1467, 498).

 

2.

Besogner qqn. "Se concilier les faveurs de qqn" : Plus que paien ne juif sont pire, Quant de lui [la Vierge] folie ozent dire. Merveilles que terre ne font Et tel merdaile ne confunt. [T]el sot le maistre [Jésus] deveroient Besoingnier, se sages estoient. (Propr. choses Rosarius Z.S., c.1330, 60).
 

DMF 2020 - Article revu en 2015 Pierre Cromer

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