C.N.R.S.
 
http://www.atilf.fr/dmf/definition/tordre 
StructureSans exempleCompletFormesExemples
FamilleTextesSourcesImpressionAide à la lecture
     TORDRE     
FEW XIII-2 torquere
TORDRE, verbe
[T-L : tordre ; GDC : tordre ; DÉCT : tordre ; FEW XIII-2, 84b : torquere ; TLF : XVI, 340b : tordre]

A. -

[Idée d'enroulemment sur soi-même]

 

1.

Au propre

 

a)

Tordre qqc. "Soumettre qqc. à un mouvement de torsion, enrouler qqc. sur soi-même, tordre" : Et en ce point prist a plourer Le pommier et soi dolenser En toutes ses branches tordant (GUILL. DIGULL., Pèler. âme S., c.1355-1358, 209). Et puis, quant ce sera lié de sis ou de huit rancs a l'environ, on doit tordre l'une aguille de l'une part et l'autre d'autre, tant come on pourra. (GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, 268). Prenés ung syon a ung neu et le tordez (Hent. soutill. L., c.1466, 84).

 

-

En partic. [Une partie du corps] : Las ! je doy bien tortre mes poins Et clamer sur toy derrechief. (Mir. Theod., 1357, 126). Mouvoir la teste, tordre les bras, les dois estendre, les piés ploiier et tout le corps debatre, qu'est che aultre chose se non samblanche de forsenerie et toy moustrer samblable a ung campion ? (DAUDIN, De la erudition H., c.1360-1380, 147). Qui donc veist hommes, les femmes et enfans de chiaus plorer et tordre leurs mains et criier à haulte vois très amèrement, il n'est si durs coers ou monde qui n'en euist pité (FROISS., Chron. L., IV, c.1375-1400, 59). ...ce fu grans pités de veoir hommes, femmes et enffans plorer et tordre leurs poins pour l'amour de leurs maris, de leurs pères de leurs voisins, de leurs frères (FROISS., Chron. R., X, c.1375-1400, 216). ...ne tors tes levres, ne trop ne les bee (CHR. PIZ., Paix W., 1412-1413, 168). Hommes et femmes, tant du pallais que de la ville, crioient, plouroient et tordoient leurs poings, tiroient leurs cheveux (Cleriadus Z., c.1440-1444, 296).

 

b)

Empl. pronom. [D'une chose] "Être en vrille, être enroulé sur soi-même" : La licorne est vne fiere beste laquelle est semblable a cheual de son corps mais elle a piez de oliphant et queue de serf et sa vois est merueilleusement espouentable et a en my sa teste sus le plus fort vne corne de merueilleuse resplendisseur toute droicte qui se teurt vers le bout la quelle est si forte et si ague qu'elle perce ce qu'elle ataint (Best. hérald. H.E., c.1435-1450, 476).

 

2.

Au fig. : Et tout avant, je fais ma protestacion de non touchier de ma reigle a tous ceulx qui ayment son office, mais a tous ceulx qui ma reigle ont tortue, brisee, ou ployee, et contrefait l'arquemie de vous, Verite la royne, de ma dame qui porte l'espee a deux trenchans. (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.1, c.1386-1389, 536).

 

3.

Part. passé en empl. adj. "Qui n'est pas droit (au propre ou au fig.), tordu"

 

-

Tors/tort. V. tort2 : [Fortune] La teste a pelée a moitie ; D'un oueil rit, de l'autre larmie ; L'une joe a couleur de vie, L'autre est com morte ; S'une de ses mains t'est amie, L'autre t'iert mortel anemie ; Un piet a droit, l'autre clopie, La droite torte. (MACH., R. Fort., c.1341, 42). ...par ceste verge q'est si pliante qi se ploie ausi torte com le pertuz est tort (HENRI LANC., Seyntz medicines A., 1354, 112-113). Et se faisoit fors que d'yaus mener sans peril, car il savoit toutes les adrèces et les torses voies (FROISS., Chron. L., II, c.1375-1400, 6).

 

-

Tortu. V. tortu

B. -

[Idée d'écart]

 

1.

Tordre qqc. (de qq. part). "Écarter, chasser (de)" : Au traytour a demandé Une pomme, et luy commandé Que tost luy quiere, pour ens mordre ; Par ce, cuida le venin tordre, Mais le fauls traytre chenin, En la pomme pire venin Mist que le primier (CHR. PIZ., M.F., IV, 1400-1403, 64).

 

-

Tordre son chemin à qqn. "Faire faire un détour à qqn" : Et conviendra que le pauvre marchant, clerc, noble ou bourgois, s'il porte chose qui doye paiage selon l'usaige tyrannique, doye arriver au chastel ou a une mayson sus la riviere en lui torsant ou alongeant son chemin et destourbant d'une lieue ou de deux. (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.2, c.1386-1389, 415).

 

-

Chemin tortu. "Chemin détourné" : En ung destroit bien gardé par offence, Prenant chemin tortu, inextricable, Qui difficile nous seroit explicable (ANTITUS, Poés. P., c.1500, 4).

 

2.

(Se) tordre (de)

 

a)

"Se détourner (au propre ou au fig.), s'écarter (de)" : ...je say bien un autre point Qui ce point ci dou tout desment, Dont cils qui le maintient se ment, Et tantost li reprouveray, Car selonc raison prouveray Pour moy droit et contre lui tort, Car de la verité se tort. (MACH., D. Aler., a.1349, 301). LA DAME. Sire, ceste raison me plait. Dès qu'entamé en avons plait, Mon fait moustreray par figure Selonc les ouevres de Nature, Tout pour Guillaume qui se tort De verité dont il a tort. (MACH., J. R. Nav., 1349, 193). Ha, ce dist Misericorde, Ne voi pas mont c'on se torde De Sapience ouir parler De ceci et determiner (GUILL. DIGULL., Pèler. J.-C. S., 1358, 17). ...maiz aussi a il oultre en ly raison qui le doit gouverner et ne le doit tant soit pou laissier oncques tordre ne decliner du chemin de vertu pour fortune quelconques (EVR. CONTY, Eschez amour. mor. G.-T.R., c.1400, 501). La est la souvraine Geomettre, Ou Dieu a voulu chacun mettre En son lieu par mesure et ordre, Ou la ligne ne se peut tordre De tendre a Dieu (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 111). ...le bel ordre Des planetes qui ne puet tordre De son cours (CHR. PIZ., Chem. estude P., 1402-1403, 81).

 

-

"Dévier" : ...le premier est le droit chemin de raison, qui veult aler tousdiz le droit, sanz tordre, ainsy que l'entendement bien conseillié le juge et determine (EVR. CONTY, Eschez amour. mor. G.-T.R., c.1400, 60).

 

-

"Faire un détour" : Remond fist moult beau don aux deux chevaliers, et leur bailla lettre, et leur dist qu'ilz lui saluassent Gieffroy et qu'ilz portassent la teste du jayant a Melusigne, qui estoit a Nyort, et qu'ilz ne se teurdroient de gaires. (ARRAS, c.1392-1393, 248).

 

b)

(Se) tordre. "S'égarer (au propre ou au fig.), se fourvoyer" : [Le sultan envoie de nouveaux négociateurs] Si qu'en Chypre les envoia ; Moult leur dist et moult leur pria Qu'en toutes manieres s'acordent ; Car s'il font pais, pas ne se tordent. Li amiral ont pris congié, Qui n'ont pas dormi ne songié, Einsois faut que chascuns entende Ad ce que leurs sires commande. (MACH., P. Alex., p.1369, 133). ...le second est le mouvement de sensualité, qui tousdiz voulentiers s'en va tout au contraire du chemin de raison, en ensievant le jugement du sens qui de legier se tort et se desvoie (EVR. CONTY, Eschez amour. mor. G.-T.R., c.1400, 60). G'y voix, Dieu doint que ne me torde. (Pass. Semur D.M., c.1420 [1488], 25). Nostre Dame, je me tordroye De beaucoup a aler par la. (Path. D., c.1456-1469, 74).

 

-

Prov. Ne se tord jamais qui prend le bon chemin. "Celui qui prend le bon chemin, jamais ne se fourvoie" : ...s'ilz vous disent que le tour est grant, vous savez qu'il ne se tort jamais qui prent le bon chemin. (Lettres Ch. VIII, P., t.2, 1488, 148).

V. aussi tort2
 

DMF 2020 - Synthèse des lexiques Robert Martin

Fermer la fenêtre