C.N.R.S.
 
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     HONTEUX     
FEW XVI *hauniþa
HONTEUX, adj.
[T-L : hontos ; GDC : hontos ; DEAF, H575 hontos ; AND : huntus ; DÉCT : hontos ; FEW XVI, 182a : *hauniþa ; TLF : IX, 911a : honteux]

A. -

[D'une chose] "Qui cause de la honte, qui est avilissant" : [Fortune] C'est largesse advaricieuse ; C'est orphenté ; C'est santé triste et dolereuse ; C'est richesse la soufferteuse ; C'est noblesse povre, honteuse, Sans loiauté ; C'est l'orguilleuse humilité ; C'est l'envieuse charité ; C'est perilleuse seürté (MACH., R. Fort., c.1341, 41). C'estoit vie trop deshonneste, Honteuse, s'il en tenist conte ; Mais point ne congnoissoit de honte. (MACH., J. R. Nav., 1349, 226). ...par li furent si mal mis Qu'il furent tuit ensamble mort De male et de honteuse mort. (MACH., C. ami, 1357, 57). Ne te doubte d'avoir finance, Car l'onneur avec la chevence Te venra, se tu le dessers. Et se tu ta richesse sers, C'est trop honteuse servitute. Et saches, biaus amis, que tu te Honnis et mes a deshonneur. Fi de richesse sans honneur ! (MACH., C. ami, 1357, 103). Et li Sarrasin furent mort De ville et honteuse mort. (MACH., P. Alex., p.1369, 95). Mais onques chose si honteuse Ne fu, ne si mau gracieuse, Ne dont honneur tant abaissons, Se ceste fort cité laissons. (MACH., P. Alex., p.1369, 106). A mort honteuse la livrez, Si que jamais je ne la voie. (Mir. emper. Romme, 1369, 275). Ma maladie est si honteuse C'onques mais de si dolereuse Lepre ne fu homme batu. (Mir. emper. Romme, 1369, 297). Hee, faulse Fortune, comment es tu si perverse que tu m'as fait occire cellui qui tant m'amoit, cellui qui tant de bien m'avoit fait ! Hee, Doulx Pere puissant, ou sera ores ly pays ou cest fors divers pecheur se pourra tenir. Certes, tuit cilz qui orront parler de ceste mes prison, me jugeront, et auront droit, a mourir de honteuse mort et en grief martire, car plus fausse ne plus mauvaise trahison ne fist oncques pechierre. (ARRAS, c.1392-1393, 22). Vray est que comme le soleil cler et luisant et bel et en soy griefve et desplaist a regarder a ceulz qui ont les yeulz malades et empeschiez, ou qui se donnent a honteux faiz, non autrement je treuve que aucuns ont voulu reprandre saint Pol, non pas pour cause de reprouche ou de blasme qui feust en luy mais pour obscurté et malice des repreneurs. (GERS., P. Paul, a.1394, 499). Or est ainsi que, toutes foys que ung homme peche mortelment, il se livre a mort. Voire quelle mort ? A mort la plus honteuse et espouentable qui soit : c'est la mort de pechié. (GERS., Purif., 1396-1397, 64). ...pour la mort Eschever, bien honteux accort Firent, car Romme tributaire A eulx ilz promirent de faire (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 256). Helas, desleaux Juïfz infeaulx, - remplis d'envie malicieuse, Vous n'estes leaulx, Ne bons ne feaulx, - d'avoir fait chose si onteuse ! (Pass. Auv., 1477, 210). Josep, mon frere et amy, Bien devons a Dieu rendre grace, Car entre bras en ceste plasse Nous tenons le corps de celluy Que pour nous a souffert enuy Et en celle croix mort onteuse. (Pass. Auv., 1477, 243). Elles [vos joues] sont toutes reffroidies, Fort onnyes, Car remplies - on les a d'onteuse liqueur. (Pass. Auv., 1477, 255). Voicy chose terrible, Miserable, honteuse et confusible, Et se le tout se trouve veritable, O genre humain qu'est ton peché horrible Devant les dieux, puans et detestable Ce me seroit chose toute impossible De soustenir ceste offence execrable. (Cene dieux, c.1492, 116). ...Le franc rosier de vertus magnanyme, L'estoc des preux, le chief victorïeux, Le per sans per aux exploictz furïeux Qui paix honteuse encontre guerre anime (LA VIGNE, V.N., p.1495, 190).

 

-

Parties honteuses / membres honteux. V. membre "Parties génitales" : En esté, oultre telz maladies, il vienent fievres continues, causon, tierces, vomite, dyarrie, obtalmies, douleurs des oreilles, ulceracions de la bouche, pourritures es parties honteuses, desudacions. (SAINT-GILLE, A.Y., 1362-1365, 69). ...la charongne du pelerin soit despoullie toute nue, exepté que une petite pieche de sac ou d'un touillon de cuisine en forme d'un escu soit mise et bien atachie sur les membres honteux du povre pelerin (MÉZIÈRES, Test. G., 1392, 308). Par les hanches sont entendues les parties basses du ventre et du nombril jusques aux cuisses et aux membres honteux, desquieulx les parties sont triples: c'est assavoir les unes contenantes, les aultres contenues et les aultres yssent dehors. (PANIS, Guidon, 1478, tr.I, doct.2, chap.7).

 

Rem. FEW : «mfr. membres honteux (...) (hap. 15. jh.)».

 

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"Qui cause du tort" : Finablement il s'acorderent Et une autre pais ordennerent, Qui estoit au roy damageuse Et à tout son païs honteuse. (MACH., P. Alex., p.1369, 200).

B. -

[D'une pers.]

 

1.

"Qui est déshonoré (de son propre fait ou du fait d'autrui)" : LE ROY. Qui est il ? COQUIBUS. C'est un guippelin, Et le mal de sainct Mathelin Le tient au sommet de la teste. LE ROY DES SOTZ. Non fait ; mais ce n'est qu'une beste, Ou il est en ce point honteux. (Roy sotz, c.1450-1500, 222). Je cognoiz bien - la chose est seure - Qu'on a fait ung tresgrant peché D'avoir mis a mort a cest'eure Ce bon Jhesus, qu'est estaché En croix tout onteux et craché. (Pass. Auv., 1477, 233). Croix, je te tien ; Pour nulle rien Ne te larrey sans estre onteuse, Jusques que ma cher precïeuse, A moy larmeuse Et doleureuse, Aras rendu entre mes bras (Pass. Auv., 1477, 244).

 

2.

"Qui éprouve de la honte" : Après ce Durtez durement Respont et moult crueusement Le honteus amant despita, Car en li dueil et despit a De la joie qu'il a rouvée (MACH., D. verg., a.1340, 41). Car Grace, ma trés chiere amie, Va a Dangier, et se li prie Qu'il ne soit pas si dongereus Au fin amant qui est honteus, Et qu'atant se vueille souffrir De lui ramposner et laidir, Et que plus ne li soit contraires, Car il est dous et debonnaires, Et s'a servi moult humblement (MACH., D. verg., a.1340, 44). Tu ne scez qu'il t'est avenu Pour la biauté qui t'a feru, Ne tu ne scez quel part tu iés Pour l'amour dont tu iés loiés. Et avec ce tant iés honteus Devant li et si paoureus Qu'aucune personne ne sache L'amour qui en ton cuer s'atache, Et que ne soies perceüs, Dont estre puisses deceüs, Que cela dou tout bestourner Fait ton voloir et destourner Le hardement que tu avoies Ou cuer quant dire li voloies (MACH., D. verg., a.1340, 52). Mais quant mes maus retraire li cuidoie, Si paoureus, Si veins, si mas, si las, si engoisseus, Si desconfis, si tramblans, si honteus Estoit mes cuers et dou mal amoureus Si fort espris, Qu'en li n'avoit scens, maniere, n'avis, Einsois estoit com transis et ravis (MACH., J. R. Beh., c.1340, 75). L'AMANT. (...) Demander vient de villonnie, Et loange de courtoisie. LA DAME. Vous dites voir ; c'est ce qu'on dist. Et aussi cils qu'on escondist Doit estre honteus, s'il est sages, Soit grans, petis, vallès ou pages. (MACH., R. Fort., c.1341, 139). Com bonne, sage et bien aprise, M'araisonna courtoisement Et me demanda doucement Par ou j'estoie venus la. Et quant je vi qu'a moy parla, Je fui honteus, si tressailli, Car mespris avoie et failli, Quant devant li venus estoie Et nulle riens ne li disoie, Si que tantost m'en excusai Mieus que pos (MACH., D. Lyon, 1342, 186). DEUXIESME NONNE. Conme honteuse et esgarée, Ma dame, merci vous requier (Mir. nonne, 1345, 349). Quant pour ma mort voy en corps si vaillant Ouvertement, de fait et de pensée, Cuer de marbre couronné d'aïmant, Ourlé de fer, à la pointe asserée. Honteuse sui, quant je parole einsi, Et laidure est seulement dou penser, Qu'il n'apartient que dame à son ami Doie mercy ne grace demander ; Car dame doit en riant refuser Et amis doit prier en souspirant (MACH., L. dames, 1377, 224). Et, d'autre part, belle niepce, sachiez que vous n'estes pas trop bonne pour avoir si noble homme a mary comme Regnault de Lusegnen, car il est bien digne d'avoir la plus grant dame du monde, tant soit de noble ligne, tant de beauté, de bonté et de haulte prouesce. Quant la pucelle entendy le roy, son oncle, si fu toute honteuse. Et voit bien qu'elle est en dangier et de son peuple et de pluseurs autres choses. (ARRAS, c.1392-1393, 189). Dolens et honteux s'en retournent. (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 183). ...le pouvre mary se trouva si honteux et tant esbahy qu'il ne savoit sa maniere (C.N.N., c.1456-1467, 198). ...[il] luy fist hurter si rudement a son atour qu'il l'envoya par terre, dont elle fut bien honteuse et malcontente (C.N.N., c.1456-1467, 238). La compaignie fut bien esbahie d'oyr ce propos, et la pouvre femme bien honteuse. (C.N.N., c.1456-1467, 323). La pouvre fille ne savoit que dire, tant estoit honteuse et desplaisante. (C.N.N., c.1456-1467, 500). La sceut nouvelles que le duc de Calabre, De paour qu'il eult aussi froit comme ung mabre Denicorde, grandement marmiteux, S'estoit fuÿ de Cappe tout honteux, Laissant illec grosse gendarmerie Avec foison de bonne artillerie, Pour resister en effect et substance Contre le roy et toute sa puissance. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 247).

 

-

(Estre) honteux de qqc. : Eins puis cils mot n'en debati, Car il fu d'avoir pis doubteus, Et s'en fuï trés tous honteus De ce qu'il se fu debatus, Pour la quel chose il fu batus. (MACH., D. Aler., a.1349, 321). Or resgarde que je ne mente ! Car vraiement, se je mentoie, Confus et honteus en seroie. (MACH., F. am., c.1361, 145). Dont il avient souvent, quant je suis seuls, Qu'on m'araisonne, Mais si sui pris que je nul mot ne sonne, Car trop fort pense a la belle et la bonne Qui de tous biens est la mette et la bonne, S'en sui honteus. (MACH., F. am., c.1361, 178). De Ardré scet on bien de voir Qu'il est voulentiers rioteux, Et n'est pas de mentir honteux (Mir. Amis, c.1365, 37). Et je m'en vois en autre lieu Visiter povres menagiers Qui leur vivre ont a grans dangiers, Car trop petite gangne font Et du demander honteux sont (Mir. st Lor., 1380, 165). Quant celle [Mélusine] voit que il se celoit si fort contre lui, si lui a dit : Remondin, par Dieu, riens ne vous vault le celer ; je scay bien comment il vous va. Quant Remondin l'entent et oit qu'elle le nomme, il fu si esbahiz qu'il ne scot que respondre. Et elle, qui bien apperceut que il estoit tous honteux de ce qu'elle savoit tant de son estat, lui dist : Par Dieu, Remondin, je suiz, aprez Dieu, celle qui te puet plus aidier et avancier en ce mortel monde, en tes adversitez, et ton malefice revertir en bien. (ARRAS, c.1392-1393, 25). Elle fut bien honteuse et desplaisante de leur venue (C.N.N., c.1456-1467, 345).

 

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Estre honteux de qqn. "Éprouver de la honte en la présence de qqn" : Ma fille, ne plorez plus ; mais dictes moy hardiement. Je suis vostre mere, a qui ne devez rien celer, et de qui ne devez estre honteuse. (C.N.N., c.1456-1467, 133).

 

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En partic. "Qui éprouve de la honte à cause de sa misère, qui est dans la misère" : Item, je lesse IIIIc frans d'or à donner et distribuer par l'ordonnance de mes executeurs, c'est assavoir, les deux pars à povres honteux mesnagiers et povres femmes vesves, et à povres orphelins et povres filles à marier, et la tierce partie à povres escoliers et povres estudians par les estudes de Paris. (Test. Parlem. Paris T., 1394, 275). Notez se une povre femme grosse, malade, honteuse, a VI petiz enfans, estoit en la froidure, et n'eust pain pour donner a ses enfans qui criroint a la rage de fain, et une noble et riche dame la veoit, elle seroit trop dure s'elle ne luy donnoit du pain, et tant plus s'elle luy ostoit. (GERS., Annonc., a.1400, 239). Item, a Pierre Chastellain, tabellion de la court monsr de Beauvais, pour avoir esté en plusieurs paroisses de la ville de Beauvais, tant pour passer les quictances de plusieurs povres personnes, honteux et mendians ausquielx ont esté donnez plusieurs aumosnes pour prier Dieu pour le dict deffunct et pour ses amis trespassez (Invent. test. beauv. L., 1453, 85).

 

Rem. FEW : «fr. pauvre honteux "qui cache sa misère, qui n'ose demander l'aumône publiquement" (seit ca. 1300)».

 

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"Qui est gêné, embarrassé" : Je vueil que tu voises, entens, Aux petiz mesnagers honteux De ceste ville souffretteux, Et cest argent ci leur donrras (Mir. Pierre Changeur, c.1378, 260).

 

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"Qui a facilement honte, qui est réservé, timide, pudique" : Conme la glorieuse vierge eust oy le salut de l'ange, elle fut troublée (...) et ce vint de ce que elle estoit vierge vergondeuse et honteuse. (Mir. nonne, 1345, 314). Dous viaire gracieus, De fin cuer vous ay servi. Vueilliés moy estre piteus, Dous viaire gracieus. Se je sui un po honteus, Ne me metés en oubli : Dous viaire gracieus, De fin cuer vous ay servi. (MACH., Rond., 1377, 569). Ma dame, il fault que je me acquicte, ce que j'ay par pluseurs jours oblié : c'est de vous faire une requeste de par un jeune tres honteux escuier, qui tant est craintif qu'il ne la vous ose faire. (LA SALE, J.S., 1456, 66). ...pource que je suis de ma nature et propre coustume honteux, j'ay mieulx amé endurer et seuffrir jusques cy les maulx que j'ay porté [Ici, p. antiphr., le remède proposé est, de fait, très malséant] (C.N.N., c.1456-1467, 537).

 

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Empl. subst. : Lors sa sereur n'attendi point, Ains se coucha en un des lis Acouve(r)té de fleurs de lis. Ma dame en l'autre se coucha Et .II. fois ou .III. me hucha, Aussi faisoit sa compaignette Qui avoit a non Guillemette : "Venés couchier entre nous deulz, Et ne faites pas le honteus : Vesci tout a point vostre place." (MACH., Voir, 1364, 336). LE ROY DES SOTZ. Vrayement ? Tu estoyes donc bien sot ? Il ne faut jamais craindre honte. GUIPPELLIN. Non, certes, car on ne tient compte Des honteux. Pour ce, vous prometz Que je ne le seray jamais... (Roy sotz, c.1450-1500, 225). Et elle, comme ung peu faisant la honteuse, luy respondit... (C.N.N., c.1456-1467, 280).
 

DMF 2020 - Synthèse Robert Martin

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