A. -

[Idée de non-asservissement, de liberté]

1.

"Condition libre (p. opp. à la servitude)" : Saint Pol dit que moult s'avile qui pert sa franchise pour estre serf a un seigneur. (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 44). ...myeux aymerent mourir en leur franchise que vivre en servaige. (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 1130). A dur chiet on de franchise en servaige. (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 163).

2.

"Ensemble des droits, exemptions, immunités et privilèges accordés à qqn ou à une communauté" : Il nous convient (...) pour garder de nostre eglise Les droitures et la franchise, Evesque eslire. (Mir. ev. arced., c.1341, 122). Et premierement confessons [Pierre, duc de Bourbonnois] et en vérité que nous avons veu et tenu la franchise dudit monsieur Gauchier seellée de son seel en laquelle estoit contenu expressement qu'il avoit mis le chastel de Bourbon, les hommes d'icelui chastel et leur choses en liberté pour trois cens solz à payer chascun an à lui à la Saint Michiel. Item leur octroya que se ledit homme dudit chastel de Bourbon se vouloient transporter avec leur choses en autres lieux pour demorer seurement, il pourroient aler et venir, et celle franchise il leur jura à tenir. (Titres Bourbon H.-B., t.1, 1343, 402). Ne pren de tes gens que tes rentes, Soit en blez, en cens ou en ventes, Car se tu les vues escorchier, Mieus te vaurroit estre un porchier. N'asservi mie tes subjès, Car tu les dois tenir adès En leur droit et en leur franchise Qu'ont de toy et des tiens acquise. (MACH., C. ami, 1357, 136). Jugement de l'abel et couvant de Sainct-Clement d'une pairt, et de Robin Lorratte d'autre pairt, que dit coment l'abei de Sainct-Clement ne puelt en la maison que fuit Robin Lorratte (...) panre nul waige parmei le franchise de la maison, jai soit ce qu'elle ciet en son ban. (Jug. maître-échev. Metz S.M.S., t.1, a.1494, [1331], 87).

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[Souvent au plur.] : L'EVESQUE ARCEDIACRE. (...) seigneurs, vraiement : Je vous jur que, tant que vivray, Contre voz franchises n'yray (Mir. ev. arced., c.1341, 128). Et ont li dit detteur renonchiet a toutes bourgesies et frankisses (Rég. jur. Belg. B., 1361,,, 344). ...et si les remetront et recevront aux droiz, honneurs, franchises, libertez et prerogatives des citoiens et habitans de ladicte ville, tout ainsi que se onques n'eussent esté banniz ou condempnez (BAYE, I, 1400-1410, 133). A ce propos que le roy Charles amast science et l'estude, bien le moustroit à sa tres amée fille l'Université des clers de Paris, à laquelle gardoit entierement les previleges et les franchises, et plus encore lui en donnoit, et ne souffrist que ilz leur fussent enfrains. (CHR. PIZ., Faits meurs Ch. V, S., II, 1404, 46). ...afin que aucune chose ne feust faicte ou prejudice des anciennes franchises et libertés de l'Eglise de France et Dauphiné de Viennois (FAUQ., I, 1417-1420, 156).

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En partic. "Exemption (d'une charge), exemption de droits, d'impôts, de taxes" : Là avoit il Venitiens Et pluseurs autres Crestiens Qui furent pris et enserré, Feru, batu et aterré Des Sarrazins villeinement, Et traitié moult honteusement, Non contrestant la marchandise Qui avoit là moult grant franchise. (MACH., P. Alex., p.1369, 116). Et se vous dittes que vous avés prescripcion pour vous, par laquelle vous jouissiés de franchise et de liberté que vous ne devés, ne en temps de guerre, ne aultrement, poïer teles tailles ne subvencions, je vous respons, car, en tant que, de la benignité dez princes, vous avés usé de plus longue liberté, en tant ou lez princes aroient neccessité, deveriés vous estre plus enclins de leur donner aide et secours. (Songe verg. S., t.1, 1378, 44). Des hommes D'Orsie vers Brancion, qui vouloient estre frans, pour certaines reddevances paiant à monseigneur, l'en ne treuve ne tiltre, ne lettres de previlege de leur franchise (Cout. bourg. glosé P.M., c.1380-1400, 261). ...la franchise et acquis que il disoit a lui appartenir des poissons peschiés en ses nefs (Mémor. Echiq. Archev. S., 1381, 25). ...avecques toutes les autres franchises, libertés et usages qui ont et pevent avoir les frans coustumiers d'icelle forest. (HECTOR DE CHARTRES, Cout. R., 1398-1408, 4). ...il seroit respondu de par la Court en la excusant, et iceulx laiz par especial de par icelle, que attenduz les petis gages et profiz qu'ilz ont, et leur charge, et la franchise en laquelle ont esté tenus de tout temps jusques à ores (...) n'est point leur entention que lesdiz laiz paient ledit subside (BAYE, II, 1411-1417, 212). Franchises de harengueson eschues (...). A Raoulin Blanchaston, pour tous les francz de son hostage dont les noms et les sommes et la cause de leur franchise sont declarés es quittances payees par ledict receveur et cy rendues, montant en somme ensemble... (Comptab. Dieppe M., 1474-1475, 123). Et est assavoir que en la ville a telle franchise que s'il est aulcun maistre varlet bouvier qui veille entreprendre de faire le mistere que dit est, et il le puisse faire sans tumber a terre, ses beufz et son charroy seront francs toute l'annee au dit Moncaillier. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 302).

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Au plur. p. méton. "Lettres qui accordent l'exemption d'une charge" : ...et auxi doit estre le dimence d'apres la saint Jehan avec ledit verdier au lieu où ceulx qui sont frans en ladicte forest de Rouvroy viennent monstrer leur franchises, pour aider à juger comme il appert en cas que question ou debat y soit. (HECTOR DE CHARTRES, Cout. R., 1398-1408, 67).

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P. méton. "Lieu où ces privilèges s'exercent" : En ceste taille sont compris les hommes et femmes de la franchise de Charmont (Chartes communes Bourg. G., t.1, 1371, 352). ...la bonne cité, université, franchise et banlieu de Liege (Louis XI Anglet. C.P., 1462, 281).

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En partic. "Ensemble de droits et privilèges accordés à une communauté professionnelle" : ...dedens le temps de leur apresure, il ne puist aucune chose gaignier, ne partichiper aveucq leur maistre ou maistresse en perte ne en gaigne, ne faire aultre mestier ou stil durant ledict temps, sur paine de perdre leur franchise. (Hist. Lille T., t.2, 1500, 512).

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Accorder la franchise du sceau et de la loi. "Autoriser (une communauté professionnelle) à exercer une profession en s'appuyant sur des statuts et en ayant un sceau" : De la halle de Langhemarc, dont on prent pour monseigneur de chascun drap que l'en y fait 4 solz et du demi drap 2 solz, et pour ce on leur a accordé leur franchise du seel et loy de la drapperie, que maistre Guillaume Liissenzone a prins à ferme (Comptes Etat bourg. M.F., t.3, 1416-1418, 80).

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P. méton. "Redevance due pour avoir le droit d'exercer une profession" : Ceulx qui seront en deffauct de payer leur franchise et mestroient ostiles sus et fiessent ledit style, sans prendre congé à l'esgard, ils seront tenus de payer douze sols d'amende (Hist. Lille T., t.2, 1496, 520).

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P. ext. "Privilège accordé à qqn, faveur qui lui est faite" : Vueilles donner a moy telle franchise, Que de mes maulx jamais, pour abreger, Devant Jesus ne puisse avoir reprise. (Prières saints R., t.1, c.1488, 46).

3.

"Prérogative dont jouit qqn, autorité qu'il exerce, pouvoir (sur d'autres)" : ...et touz les autres membres a sousmis au chief en tant qu'il sont touz bien gouvernez et droitement meuz quant il suivent et obeïssent au commandement et a la franchise de saine teste (FOUL., Policrat., IV, 1372, 50). ...la franchise du roy nostre sire (...) est telle qu'il peut prendre sa femme ou qu'elle soit sans avoir regard aux franchises du paÿs (Percef. III, R., t.2, c.1450 [c.1340], 207). ...car vous de vostre franche voulenté meistes vostre liberté en la subgection et franchise de douse pucelles pour accomplir leurs voulentaires desirs (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 106). [le roi Perceforest] ...tenant telle franchise en son demaine que prendre pourra partout le paÿs (...), sur les rentez et revenues appartenans ou royaume, en telle quantité comme a lui appartendra pour maintenir son estat de roy. (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 514). Aussi ne povoit-il [le duc Charles, confronté à toutes sortes de difficultés] estre maistre aussi de sa francise, pour la tourner là où il voudroit. (CHASTELL., Chron. K., t.5, c.1456-1471, 361).

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La haute franchise sur qqn. "Le privilège souverain sur qqn" : Tollu m'as [la vieillesse à la belle Heaumière] la haulte franchise Que Beaulté m'avoit ordonné Sur clers, merchans et gens d'Eglise, Car lors il n'estoit homme né Qui tout le scien ne m'eust donné, Quoy qu'il en feust des repentailles, Mais que lui eusse abandonné Ce que reffusent truandailles. (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 53).

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Sous la franchise de qqn. "Sous l'autorité de qqn" : ...je suis content de demourer avecques vous sus vostre franchise (Percef. III, R., t.2, c.1450 [c.1340], 287).

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La franchise de la loi. "L'autorité de la loi" : Donques en ce est la seule ou la greigneur difference entre le prince et le tyrant que le prince obeïst a la loy et gouverne le peuple par la franchise de la loy (FOUL., Policrat., IV, 1372, 49). ...obeïs a la franchise de la loy (FOUL., Policrat., IV, 1372, 53).

4.

"Inviolabilité de certains lieux ; droit d'asile qui y est attaché ; limites, enceinte où s'exerce cette inviolabilité"

a)

"Droit d'asile, protection, asile" : ...quant il avenra Qu'aucun malfaitteur a garant, Pour quelque meffait apparant Qu'il ait fait, s'en fuit en l'eglise, Qu'il y soit sauf et ait franchise. (Mir. st Sev., 1362, 214). Telle estes vous, Vierge tres digne ! Vous estes le vray lieu de reffuge raisonnablement comparé a celuy que Romulus ordonna en fondant Romme, ou tous maifaitteurs estoyent en franchise, seurté et liberté. (GERS., Purif., 1396-1397, 60). ...le roy vouloit que, pour bien repeupler sa ville de Paris, qu'il disoit avoir esté fort depopulée, tant pour les guerres, mortalitez et autrement, que toutes gens de quelque nacion qu'ilz feussent peussent de là en avant venir demourer en ladicte ville, et en icelle et es faulxbourgs et banlieue ilz peussent joyr de toutes franchises de tous cas par eulx commis, comme de murdre, furt, larrecins, piperies et tous autres cas, reservé crime de lese majesté (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 174).

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En franchise : ...et chargeans en bouges multitude d'avoir, s'en allèrent en divers lieux en franchise (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 315).

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Lieu de franchise. "Lieu auquel est attaché ce droit d'asile" : Se bastart a sa mansion soubz aucun seigneur, il sera et demourra sa vie durant de la condicion des autres du lieu, taillable, justiçable et explectable, soit en lieu de mainmorte ou de franchise (Cout. bourg. glosé P.M., c.1380-1400, 92). ...et disoit que le lieu où il avoit esté prins estoit lieu de franchise et que on l'y devoit remettre. (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 176).

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"Sauvegarde, protection accordée par qqn" : Briefment, c'est quanque je puis dire : Elle me fait plourer et rire Et resjoïr a son voloir, Ne son vueil ne puis desvoloir, Eins ne vueil fors ce qu'elle vuet ; Vivre ou morir faire me puet. C'est tout. Or en face a sa guise, Car tous suis mis en sa franchise. (MACH., D. Lyon, 1342, 168). Et pour ce me suis je mise En ceste noble franchise, En espoir De miex valoir (MACH., Les lays, 1377, 350).

b)

"Lieu inviolable, lieu d'asile, asile" : Quant li malvais cuens vit qu'ainsint li eschapoient Et que en la frainchise leur hutilles portoient, Il commande a sa gent tantost brisaint les portes (Gir. Ross. H., c.1334, 293). Et le feu arcevesque de Cantorbye qui avoit nom Waldem et le bon evesque de Carlin on les fist venir hors des franchises de Wastmonstier et furent amenez en la tour de Londres (Chron. Rich. II, W., c.1400-1420, 100). Et, ce jour, ladicte abbesse fu prise et mise de fait hors de la franchise de son eglise et amenée au Chastellet de Paris prisonniere par ledit prevost (FAUQ., III, 1431-1435, 65). Et ce fait, yssit ledit suppliant de ladicte eglise et franchise de Saint Cyprien, et a sceu que, non obstant l'exempcion par lui faicte de nostredit seneschal ou sondit lieutenant, nostre procureur en nostredit païs de Poictou l'a fait adjourner par diverses foiz par cry publicque audit lieu de Poictiers, auquel n'est son domicille ne residence (Doc. Poitou G., t.10, 1464, 459).

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Se bouter / se mettre / se tenir en franchise./Prendre / tenir franchise. "Se réfugier dans un lieu d'asile" : Après le quel fait, le dit Jehan, doubtant rigueur de justice, se mit en franchise en l'église du dit lieu d'Ordenon (Ch. VI, D., t.2, 1383, 5). ...lequel prisonnier leur requist que il le menassent en la rue Saint-Jaques, et il leur enseigneroit où ; et en passant par devant Saint-Severin, s'en fouy et se bouta en franchise oudit moustier. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 15). ...il se eschappa dudit varlet, et se bouta en franchise à l'ospital de Ronceval (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 251). ...mais en demoustrant signe de estre malvais et de luy doubter, [il] print le inmunité et se mist en francise en l'eglise de Saint-Quentin en ladite ville. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 381). ...et, après plusieurs paroles, li demanda pourquoy il n'estoit venus parler à luy, et pourquoy il avoit prins franchise de l'eglise. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 382). ...Marguerite de Chaalons, fiancée dudit Thevenin, et tenant franchise à Saint-Jaques de la Boucherie [ou "bénéficiant d'exemptions" ?], tesmoigne et afferme que... (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 145). ...maistre Jehan Bourdin qui se tient en franchise aux Jacobins de Bourges (Aff. Jacques Coeur M., 1453-1457, 484). À l'occasion desquelles reddargucions, ledit Bourdin qui est foible, de petite complession et paoureux, voiant que icellui Granier ne se contentoit, ne ne vouloit se contenter de sesdictes raisons, excusacions et deffenses, doubtant qui le voulsist constituer et arrester prisonnier ou lui voulsist faire aucun autre empeschement à sa personne, s'en ala mectre en franchise, cinq mois a ou environ, en l'église des Jacobins (Aff. Jacques Coeur M., 1453-1457, 567). Et, pour lequel recouvrer, fut fait bien grant diligence, tellement que, ledit jour dudit desrobement, fut ledit brigandinier trouvé tenant franchise aux Carmes de ladicte ville (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 325). ...et à tant se departirent les IIII dessusdiz et s'en alerent bouter en franchise aux Celestins de Paris (ROYE, Chron. scand., II, 1460-1483, 59).

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Donner franchise à qqn./Mettre qqn en franchise. "Donner asile à qqn dans un lieu inviolable" : Entre autres choses, ceste ville-icy par previlège ancien peut recueillir et donner francise à deux conditions de gens, l'une sy est à gens homicides, et l'autre à gens fuians devers eux pour debtes (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 39). Dit plus qu'il y avoit ung nommé maistre Anthoine de Lafons que on reppute communement par tout le pays estre invocateur et ingromancien, lequel autrefois ledit de Nemours fist prendre et mectre en franchise aux Cordeliers, et qu'il doubte qu'il feist quelque jugement de ingromance pour monseigneur de Nemoux (Procès de Jacques d'Armagnac, 1477, ms. Paris, Bibl. Ste Geneviève 2000, f° 108 v°).

5.

P. ext.

a)

"Liberté" : Nul n'avoit sur l'autre maistrise ; Trestous vivoient en francise ; Il n'estoit baillif ne prevost. (Renart contref. R.L., t.2, 1328-1342, 149). Si que je croy Qu'a bonne Amour, a Fortune, n'a soy Riens demander de mes dolours ne doy. Et en puis je riens demander a moy ? Certes oïl ! Car je me mis de richesse en essil, De seürté en un mortel peril, De joie en dueil, par son regart soutil, Et de franchise En servitute ou on n'aimme, ne prise Moy, ne m'onnour, m'amour, ne mon servise, Ne ma vie vaillant une cerise. (MACH., J. R. Beh., c.1340, 88). Mais j'aim trop mieus franchise et po d'avoir Que grant richesse et servitute avoir. (MACH., Compl., 1340-1377, 252). ...Et [le sultan] dist einsi premierement : "Vous requerez qu'on laisse vivre Vos Chrestiens et qu'on les delivre, Et que leur franchise perdue Ne soit pas, eins leur soit tenue. Vous nous requerez courtoisie, Et si nous faites villonnie ! N'est pas chose qui se puist joindre, Quant vous nous volez poindre et oindre..." (MACH., P. Alex., p.1369, 117). Et si tient Que toutes vefves, de son droit, Et pucelles marier doit, Qui demeurent en son roiaume. Pour V^c mille muis de baume Ne les devroit einsi traitier, Et si se doit moult bien gaitier Qu'il met sa vie en aventure, S'ame, s'onneur ; et c'est laidure Et pechié fait et mal aussi, Tous princes qui le fait einsi. Car tel franchise ont toutes fames, Que de leur volenté sont dames. Ce dit li Romans de la Rose, Tout clerement, sans mettre glose. (MACH., P. Alex., p.1369, 262). Avant que Loy fust par Droit ordonnée, Vivoit chascuns en franchise commune (DESCH., Oeuvres Q., t.1, c.1370-1407, 225). Liberté ou franchise est la supposition de policie democratique. (ORESME, Pol. Arist. M., c.1372-1374, 257). Et aussi leur dirent que le Roy, la Royne et monseigneur de Guyenne n'estoient pas en leur franchise et liberté, qui leur sembloit chose bien estrange. (BAYE, II, 1411-1417, 120). ...et ycellui [un prisonnier] avons mis et mectons a sa franchise et pleine delivrance de sa personne (Doc. 1434. In : P. Champion, Le Moy. Âge 14, 1910, 194). Je pri Dieu le roi droicturier Qu'il veulle l'enfant despecier Du grant peschiet originel Qui nuyt a tout homme mortel Et le mettre en la grant francise Des constitutions Moyse. (MARCADÉ, Myst. Pass. Arras R., a.1440, 32). Qui es tu ore qui desloies Les pecheurs et qui les convoies En leur ancienne franchise Ou toute leesse est comprinse ? (MARCADÉ, Myst. Pass. Arras R., a.1440, 242). Je croy aussi en saincte eglise Catholique saine et entiere, La communion et franchise Des sains qui ont joie plainiere. (MARCADÉ, Myst. Pass. Arras R., a.1440, 281). ...car la premiere loy rommaine vuelt, ordonne et commande prendre les armes et pour son droit, franchise et liberté combattre et disposer son corps a morir. (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 20). Je veil avoir maintenant liberté et franchise de faire tout ce qui me vient a plaisir. (C.N.N., c.1456-1467, 560). Leonides (...) combati le roy Xerses pour la liberté et franchise de son pays (COLART MANS., Dial. créat. R., 1482, 176). Et sur toutes choses ilz luy prierent et requirent franchise et liberté (LA VIGNE, V.N., p.1495, 267).

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[À propos d'une chose et de sa liberté de mouvement] : Se tu estens au vent ton voile, Fait de main de maistre et de toile, Tu scez bien que ta nef ira La ou li vens la conduira, Pour ce, sans plus, que la franchise De ta nef au vent sera mise. (MACH., R. Fort., c.1341, 94).

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"La liberté que confère qqc." : ...mieux aimant la franchise des champs que la douteuse sureté de sa place... (CHASTELL., Chron. K., t.1, c.1456-1471, 288).

b)

En partic. "Liberté morale, libre arbitre" : Et, tresdouz Sires Jesus Crist, la grande franchise qe vous m'avetz donee, c'est Franche Volenté (HENRI LANC., Seyntz medicines A., 1354, 58). Et dit que elle [tele delectacion] est liberale, car elle est selon franchise et liberté de volenté, laquelle volenté n'est pas serve a concupiscence ne a autre malice. (ORESME, E.A.C., c.1370, 516). Et pour ce dit Ptholomee que le sage seigneurira sur les estoilles. Et ainsy peut on dire de toutes autres choses qui sont a Fortune subgettes et a nostre franchise. (EVR. CONTY, Harm. sphères H.P.-H., c.1400, 26). Ilz arguent par grant fallace, Car divine provision Ne fait pas spoliation De la contingence ou franchise Qu'elle aroit en noz choses mise. Item les Sages anciens, Paiens et Juifz et Crestiens, Qui loiz et règles à délivre Establirent lors pour bien vivre, Rémunérèrent vertueux Et punirent les vicieux, En quoy feissent iniquité, Se tout fust par nécessité, De laquele noble franchise Dieu soit loé en toute guise (LA HAYE, P. peste, 1426, 70). Dieu seroit facteur de noz maulz. Et nulle raison seroit d'esperer aucune chose ou de supplier. Seroit aussi evacuee et widié la liberté et franchise de la liberté, qui est franche a faire ou non faire equalement. (Somme abr., c.1477-1481, 167).

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[À propos de Dieu] : Car se Dieu faisoit ce qu'il fait comme par contrainte, et que autrement ne peut riens faire fors ce qu'il fait, quelle perfection seroit ce ? Quelle liberté ? Quelle franchise ? Quel gré luy en devroit on scavoir ? Se tu, mon Ame, as franche voulenté sur ton corps et sur tes affections, trop mieulx doit avoir franchise et liberté nostre Dieu, le tout puissant, sur toute chose (GERS., Trin., 1402, 162).

B. -

[Idée de noblesse (la noblesse supposant par nature le non- asservissement) ou de qualité associée à la noblesse (noblesse de coeur, de conduite, générosité, loyauté...)]

1.

"Noblesse, noblesse de coeur, de conduite, générosité" : ...Puis que nous sommes en l'eglise La dame plaine de franchise (Mir. pape, 1346, 395). ...Einsi est il d'aucun, s'il aimme Et que loiaus amis se claimme, Li quels moult bien le prouveroit En tous cas, qui l'esprouveroit, Si se sent ardemment espris D'une douce dame de pris Qui s'est sus l'arbrissel assise De scens, d'onneur et de franchise, Et dessus l'aubrissel si franche Qu'elle saute de branche en branche, Abatant la douce rousée Des dous biens dont elle est ornée. (MACH., D. Aler., a.1349, 262). Nompourquant li aigle honnourée Est assez de son droit loée Partout ou on congnoist noblesse, Franchise, honneur et gentillesse. Se m'en passeray plus briefment Entre la gent d'entendement. (MACH., D. Aler., a.1349, 345). Mais cuides tu, pour estre eschars, Pour garder tes vins et tes chars, Ton or, ton argent, tes jouiaus, Tes robes a dorés nouiaus, Tes destriers, tes courciers, tes selles, Aquerir les victoires belles ? Nennil ! N'i met mie t'estude, Car le sens aroies trop rude. Mais douceur, franchise, largesse, Diligence, amour, hardiesse, D'onneur et de victoire don Te feront ; c'est biau guerredon. (MACH., C. ami, 1357, 115). Garde t', amis, qu'aus dez ne joues Et que pas ton temps n'i aloues, Car c'est chose trop deshonneste A prince qui quiert vie honneste ; Car il ne vient pas de franchise, Eins est fondez seur couvoitise, Et s'i moustre on si sa maniere Que maint en parlent en derriere. (MACH., C. ami, 1357, 138). Et quant ma dame ara bien parceü Et pluseurs fois en son songe veü Les grans meschiés qu'ai pour li receü, Et que faintise N'est pas en moy n'en mal que j'aie heü, S'elle un petit en a le cuer meü, Ne sçay comment de moy sera sceü. Mais je m'avise : En Morpheüs ara tant de franchise Qu'il me dira sa maniere et sa guise, Et s'elle a puis d'amours esté requise, Se son deü Fait envers moy ; car elle est si aprise, Tant aimme honneur, tant deshonneur desprise, Que ja par li, s'elle est d'amer esprise, N'iert congneü. (MACH., F. am., c.1361, 174). ...Car qui s'aërt A desespoir et en fait son compere Et de penser a tristece se pere, S'il estoit roys, si vit il en misere Et si s'assert Qu'honneur, franchise et toute joie pert. Mais quant amans en esperence sert, Tres dous Penser le fait cointe et apert, Quant n'est avere S'amour de li donner un chapiau vert. (MACH., F. am., c.1361, 175). ...Et qui repugne a franchise de cuer et est contraire a noblesce de courage. (ORESME, E.A.C., c.1370, 261). Si que je ne puis veoir, Ymaginer, penser ne concevoir, Par quel moyen escuser me porroie Envers Amours, se son bien ne voloie. Et avec ce, se foy, pais et honnour Et loiauté me vuet faire tousdis, Dedens moy n'a franchise ne tenrour, Pitié, douçour n'amour, s'il en vaut pis Qu'il n'en doie pis valoir, Car se son bien ne vueil, c'est decevoir. Dont vraiement mortelment pecheroie Envers Amours, se son bien ne voloie. (MACH., L. dames, 1377, 179). Et aussi, mes chiers seigneurs, vous m'avez envoié, de vostre bonne grace et franchise, le roy d'Ausaiz, mon ennemy, dont plaise vous assavoir que je ne suiz mie celle qui vueille ne doive prendre pugnicion de lui ne lui retenir prisonnier ; mais il en appertient a vous d'en faire vostre bon plaisir, qui avez eu la peine et le peril de le conquester ; si vous doit demourer, car c'est raison. (ARRAS, c.1392-1393, 166). ...j'ayme et suis aimé de la fleur de toute beauté, en laquelle tout bien, toute courtoisie, toute honneur, toute franchise, tout soulas et tout deduit habitent. (Percef. III, R., t.1, c.1450 [c.1340], 144). ...lequel, quant il oyt la noise, vint hastivement contre les robeurs, et, par sa franchise delivra de leurs mains moy et ma compaingnie ; et je, qui de tel effroy avoie esté fort espouvantée, gisoye comme paulmée à terre (Doc. 1448. In : ESCOUCHY, Chron. B., t.1, c.1453-1460, 246).

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Par franchise : Resgarde Venus, ta deesse, Qui par franchise et par noblesse Te vient aidier en la tristesse Que tes cuers porte. (MACH., F. am., c.1361, 227). Et se j'ai fait rien que vo cuer desprise, Veuilliez le moi pardonner par franchise (MACH., Voir, 1364, 552). ...Dont j'ay perdu si le pouoir de my, Que je n'ay mais maniere ne vigour. Pour ce vueil bien morir de la dolour Qui par desir mon cuer d'amer enflame, Au gré d'Amours et à l'onneur ma dame. Mais tost m'aroient par franchise gari Grace et Pité de toute ma langour, S' .I. ferme espoir avoie de merci Dont je me truis plus loing de jour en jour. (MACH., L. dames, 1377, 22). Si pri Venus qu'elle adresse Mon cuer, s'il n'est en l'adresse D'amours, et que ma tristesse Mue en joie et en leesse, Et par ce sera refais ; Et qu'elle face largesse Des biens d'amours sans promesse, Par franchise et par noblesse, Pour garir ce qui me blesse Et qui me tient en destresse : Autrement je sui deffais. (MACH., Les lays, 1377, 441).

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P. personnif. : Einsi encontre Cruauté Deffent l'amant douce Pité. Mais Franchise, la trés courtoise, Dit a Durté sans faire noise Qu'il ne se doit point entremettre De retolir ne de promettre Les dous biens plaisans, savoureus, Qui sont fait pour les amoureus ; Car par Franchise sont acquis Et par Franchise departis. (MACH., D. verg., a.1340, 45). Mais Hardiesse L'acompaingnoit, et sa fille Prouesse Et doucement tint par la main Largesse, Une dame de moult grant gentillesse. S'i fu Richesse, Amour, Biauté, Loiauté et Leësse, Desirs, Pensers, Volenté et Noblesse, Franchise, Honneur, Courtoisie, Juenesse. Cil seize estoient Avec le roy, n'onques ne s'en partoient. (MACH., J. R. Beh., c.1340, 113). Après li rois appella sa maisnie ; Si vint Franchise, Honneur et Courtoisie, Biauté, Desir, Leësse l'envoisie, Et Hardiesse, Prouesse, Amour, Loiauté et Largesse, Voloir, Penser, Richesse avec Juenesse, Et puis Raison qui de tous fu maistresse. (MACH., J. R. Beh., c.1340, 132). ...Et pour ce tu ne te dois mie Einsi mettre a desconfiture, Car Pitez est dessus droiture, Qui jamais ne porroit souffrir Toy vëoir a la mort offrir Pour amer, c'est chose certeinne, Ne Franchise qui moult procheinne Est de Charité et d'Umblesse. (MACH., R. Fort., c.1341, 61). Premiers vous poés regarder Maniere, Atemprance et Francise Et Pité d'autre part assise (...) Et Plaisance a che corps joli (FROISS., Joli buiss. F., 1373, 129).

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"Noblesse de la condition, dignité, condition éminente" : Le renom de ma franchise ia espandus en toutes places, les gouverneurs de noble attrace avec leurs enfans me pristrent en bail (CHR. PIZ., Avision T., 1405, 79).

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"Générosité" : Et quant messire Enguerrant vist ce tresbel gros diamant et la franchise, liberalité et haulte courtoisie de Saintré, se tourna aux autres seigneurs prouchains (LA SALE, J.S., 1456, 120).

2.

"Loyauté, droiture" : Mais cils qui sert plus loiaument, Cils a le milleur paiement. Et pour cela point ne regarde, Quant je preng un cuer en ma garde, S'il est parfais ou non parfais. Mais je te diray que je fais : Je regarde la grant franchise Qui en li est mise et assise, Et comment il vuet sans fausser En moy servir sa vie user ; Et puis, selonc ce qu'amer vuet, Soit bas, soit haut mettre l'estuet, Car raison n'y iert ja gardée, Puis que mise y iert sa pensée. (MACH., D. verg., a.1340, 29). ...quant amans, par reclamours, Par servir ou par ses prieres Et en toutes bonnes manieres, Puet en pais de dame joïr Dou droit especial joïr Qu'amours donne de sa franchise. La est Bonneürtez assise Entre ami et loial amie Qui ne vuelent que courtoisie Et ont par certeinne affiance Li uns a l'autre grant fiance. (MACH., J. R. Nav., 1349, 271). Pour ce amours, amis, droiture, Franchise, loyauté pure, Grace, eür, pité, mesure M'ont mis par envoiseüre En dous paradis d'Amours. (MACH., Les lays, 1377, 351). ...il la fist marier tresrichement et bien, a la contemplacion seullement de la franchise et loyaulté qu'en elle avoit trouvé (C.N.N., c.1456-1467, 158). Le comte lors, voyant l'affection de ses serviteurs et comment amour les avoit menés à larmes de compassion envers luy, luy aussi envers eux soy trouvant commu en ferveur, fondy larmes de pitié aussy pour récompense de leur franchise, disant : "Enfans, je vous mercye de vostre amour..." (CHASTELL., Chron. K., t.4, c.1456-1471, 337).

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P. iron. : ...si vous sçay grand gré que vous avez la franchise de bien garder vostre promesse. (C.N.N., c.1456-1467, 317).