C.N.R.S.
 
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     BATTRE     
FEW I battuere
BATTRE, verbe
[T-L : batre ; GDC : batre ; AND : batre1 ; DÉCT : batre ; FEW I, 290b : battuere ; TLF : IV, 290a, 292a, 293a : battre1/battre2/battu]

I. -

Empl. trans.

A. -

Au propre [Idée dominante de coups répétés]

 

1.

Battre qqn (ou une partie du corps, ou un animal)

 

a)

"Frapper, donner des coups à qqn" : Et se aucun fiert et bat un autre, ce est raporté au vice de yre, et ainsy des autres. (ORESME, E.A., c.1370, 281). Pour quoy me bat mes maris ? Lassette ! Je ne li ay riens meffait (MACH., Motés, 1377, 515). Le filz pourra batre son pere (DESCH., M.M., c.1385-1403, 350). ...et dit que yceulx maufaiteurs batirent, fraperent et navrerent pluseurs escoliers (BAYE, I, 1400-1410, 100). Je n'oseroye, dit l'enfant, pour ma mere ; elle me batteroit. (C.N.N., c.1456-1467, 413). Qui (...) bat un sergent a mace Il gaingne cent jours de pardon (Est., p.1460, 21). Perrette Longues Tettes dist que quant la gorge escopist a un homme qui autresfois a batu sa femme, c'est tout signe de pendre. (Ev. Quen., I, c.1466-1474, 110).

 

-

Empl. abs. : Certes, respond Transeline a ce que dit est, vous parlez de batre et mutiler, mais pour aussi vray que je parle, il n'est ou monde plus grant douleur a femme que quant son mary va autre part despendre ce qui de lui ne de par lui ne vient, en commettant fornication et faisant contre Dieu et son commandement. (Ev. Quen., II, c.1466-1474, 118).

 

-

Vouloir estre battu si : J'ay veu maintenant devaler Trop beau hairon sur la riviere, Si fault aviser la maniere Comment il pourra estre atteint ; Car se mon faucon le rataint, Je vueil que je soye batu, Se bien tost ne l'a abbatu (Gris., 1395, 6).

 

-

Battre qqn de tel objet : Si les baterons de leur verge (MACH., P. Alex., p.1369, 104). C'est grant doleur que d'estre en maladie, D'avoir les fievres, froidures ou frissons, Rage de dens et mal d'espidemie, Estre batu souvent de gros bastons (MACH., App., 1377, 646). Par ceste maniere fut puniz Aurelius par le conseil Cotta, car il fut batu de verges et remis avecques les gens de pié (CHART., Q. inv., 1422, 55). ...puis ilz le lyent a une atache et le batent de verges. (LA VIGNE, S.M., 1496, 341).

 

-

Battre la peau à. "Donner une raclée à" : ...Et les autres se merveilloient Qu'il lesoit tuer son oysel Pour batre a son valet la pel. (LA BUIGNE, Rom. deduis B., 1359-1377, 103).

 

.

Au fig. "Corriger, punir" : Dieu, notre juge, nous baille yci election : ou que nous soyons yci batuz de la verge de penitence, ou que nous aurons jugement rigoreux aprés la mort. (GERS., Déf., 1400, 242). Ainsi doncques est vray que Dieu est presque forcé ou semons de monstrer plusieurs signes et de nous battre de plusieurs verges, par nostre bestialité et par nostre mauvaistié, que je croy myeulx. (COMM., II, 1489-1491, 213).

 

.

Inf. subst. : Le pere prent la verge pour batre son enfant, et au batre la froisse et derompt (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 42).

 

-

"Faire subir à qqn le supplice de la bastonnade" : Et fut ainsi mené que dit est batre par lesdiz carrefours dedens ung ort, vilain et paillart tumbereau dont on venoit de porter la boe en la voierie. Et, en le batant par lesdiz carrefours, comme dit est, le monde crioit à haulte voix au bourreau : "Batez fort et n'espargnez point ce paillart, car il a bien pis desservy !" (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 82).

 

b)

[Avec un terme de compar.] Battre qqn comme + subst.

 

-

Battre qqn comme asne à pont : Marchés, marchés, il vous fault courre, Je vous batray com asgne a pont (Myst. st Laur. S.W., 1499, 196).

 

-

Battre qqn comme buee : Se tu faulx, tu sera batu Plus que ne fu oncques buée. (MARCADÉ, Myst. Pass. Arras R., a.1440, 165). Je fay veu aux diables d'infer, Pour ce que tu nous as courchiet, Que batu seras et tranchiet Aussi bien qu'oncques fu buée (MARCADÉ, Myst. Pass. Arras R., a.1440, 239).

 

-

Battre qqn comme chien : Tu en seras plus batu qu'un chien, Car tu l'as tres bien deservi. (MARCADÉ, Myst. Pass. Arras R., a.1440, 28). Je vous batray come ung vieil chien (Myst. st Laur. S.W., 1499, 196).

 

-

Battre qqn comme fer : Ou batu sera [l'empereur] comme fer Et tormanté sans nulle faille. (Myst. st Adr. P., c.1450-1485, 6). Se je ne feusse en ces lyens Tenu en la maison d'anfer, Je vous batisse comme fer, Trahites dyables malheureux ! (Myst. st Adr. P., c.1450-1485, 139).

 

-

Battre qqn comme noix : Pour en avoir la fin Soit bastu Comme noys. Il mourra, bien le voys, Ains que soit le matin. (Myst. st Laur. S.W., 1499, 232).

 

-

Battre qqn comme noyer : ...[il] ala après ledit Jehan le Genure, en lui disant que il estoit bien en sa puissance de le batre ce jour, et que il le batroit comme un noyer. (Chancell. Henri VI, L., t.1, 1424, 167).

 

-

Battre qqn comme peautre : Je te batray comme peaultre, Si vistement ne me rendz ma bourse ! (Sav. Calb. T., c.1475-1500, 165).

 

-

Battre qqn comme plastre : Tu seras plus battu que plastre Sur teste, sur dos et sur bras (MARCADÉ, Myst. Pass. Arras R., a.1440, 239). Trop mieulx ce sçauroit embatre Et esbatre, A quelque povre home batre Comme plastre, En luy rompant bras ou teste. (MESCHIN., Lun. princes M.-G., c.1461-1465, 76). Il fault que je vous face injure ; Je vous battray plus que plastre. (Cuv. T., c.1475-1500, 55).

 

-

Battre qqn comme terre : Ribaulx, delivrés vous grant erre De despoillez ces gens tous nuz, Et a lez batre comme terre Emploiez toutes vous vertus. (Myst. st Adr. P., c.1450-1485, 80).

 

-

Battre qqn comme toile : Frape dela, Malengrongné. Comment ! tu fays l'embesongné ! Hastons nous, batons comme toille. (Myst. st Laur. S.W., 1499, 239).

 

c)

Prov.

 

-

Aussi bien pleure mal battu comme bien battu. "Qu'on soit battu à tort ou à raison, on pleure" : Aussi bien pleure mal batus comme bien batus (E. Legris, Anc. prov. fr., p.1400. In : Bibl. Éc. Chartes 60, 1899, 575). [J. Morawski, Prov. fr., 1925, n° 199]

 

-

Bien battu, mal battu. "Pour telle blessure infligée, telle amende (quelles que soient les bonnes ou mauvaises raisons à l'origine de la blessure)" : Bien batu, mal batu... (E. Legris, Anc. prov. fr., p.1400. In : Bibl. Éc. Chartes 60, 1899, 575). [J. Morawski, Prov. fr., 1925, n° 203]

 

-

Bien est battu qui pleurer/crier n'ose. "Il est bien malheureux celui qui n'ose pleurer" : Ce peuple donc qu'en main tenez, Ne le mettez a poureté, Mais en grant paix le maintenez, Car il a souvent povre esté : Pillé est yver et esté Et en nul temps ne se repose. Trop est batu qui plorer n'ose. (MESCHIN., Lun. princes M.-G., c.1461-1465, 54). Les gros mengüent les menuz, Et toujours sont subgectz tenus [les simples gens] Sy hardy que nul s'y oppose, Car de nul ne sont soustenus : Bien est batu qui cryer n'ose. (Prov. rimes F.M., c.1485-1490, 39).

 

Rem. La forme canonique est : Mal battu qui pleurer n'ose (J. Morawski, Prov. fr., 1925, n° 1191).

 

-

Peu battu longuement pleure : Sire, et a vous tous, messeigneurs, j'ay entendu et seu la cause pour coy ceste guerre est encommenchye, par coy il m'est advis que le duc d'Anternopoly a moult grant tort ; et ce luy procede de grant orgoel et oultrecuidance, dont il a esté decheu come vous savés. Car on dist en ung commun proverbe que "pou batu longement pleure". (Hist. seign. Gavre S., c.1456, 103). ...et raconterons ancores de rechief des communes de Northmandie, qui du tout ne furent pas contentz, car len [l. l'en] dist en ung commun proverbe : "Qui [var. Que] peu batu, longuement pleure." (WAVRIN, Chron. H., t.4, p.1471, 53).

 

-

Tel cuide battre qui tue. "On pense seulement frapper, on finit par tuer" : Mieulx vault batre asnes portans batz Que batre gens, ne hault ne bas. Ne soit donc personne batue Par toy, car souvent qui bat tue. (ALECIS, ABC P.P., 1451, 17). Tel tence qui d'ung rien se cause ; Tel le cuide batre qui tue (ALECIS, Faintes monde P.P., c.1460, 83).

 

Rem. J. Morawski, Prov. fr., 1925, n° 2346.

 

-

Qui trop bat au gibet enballe [l. en balle] "Qui est trop violent finit au gibet" : Le fol dit : "Qui te batra, ba le" ; C'est ung dit qui ne vaut pas balle. Qui trop bat au gibet enballe [l. en balle (de baller) "se balancer"] (ALECIS, ABC P.P., 1451, 17).

 

-

[Un des proverbes évoquant des actions qui font perdre temps et peine] Autant battre son cul au chaud : Il vous oit bien [celui qui ne veut entendre], mais il ne lui en chaut, Autant vaudroit batre son cul au chaut Ou enseignier a harper dix mulès Que de parler a lui ne bas ne hault : Chantez a l'asne, il vous fera des pès. (DESCH., Oeuvres Q., t.1, c.1370-1407, 210).

 

d)

Battre (un animal)

 

-

"Épuiser (un cheval) lors d'une chevauchée" : ...ses gens avoient trouvé l'abeie garnie et pourveue de tous vivres, vins et chars, assés fains et avainnes pour lors chevaus batus et a batre car ceste cevauchie se fut en la plus plentieveuse saison de l'an, ou mois de octenbre. (FROISS., Chron. D., p.1400, 326).

 

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[D'une partie du corps d'un animal] Battu. "Blessé (par des heurts successifs)" : Et, s'ilz [les chiens] ont les soles batues et se duelent pour ce qu'ilz auront chascié un dur païs ou de pierres ou autrement, prenez de l'yaue et dou sel menu dedanz et leur en lavez les piez (GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, 120).

 

-

Prov. Battre le chien devant le lion. "Au lieu de punir le puissant auquel on n'ose pas s'attaquer, frapper un plus faible en manière d'avertissement pour le vrai coupable" : "...Pour abregier doncques l'escripture," dist la chambriere, "j'ay assez batu le chien devant le lyon..." (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.1, c.1386-1389, 576). Le duc de Clèves savoit très-bien que le roy avoit hongnié sur luy et qu'il l'avoit réprouvé d'orgueil et de bobans, pensant qu'il ne voulsist battre le chien devant le lyon, et le mesme noter sur son oncle le duc (CHASTELL., Chron. K., t.4, c.1456-1471, 145). [J. Morawski, Prov. fr., 1925, n° 1699] Et batu droit la devant ung lyon gros, couvint estre deshonnouré [le duc d'Alençon] et porter pugnicion scandaleuse le noble royal sang, le parent de tous les royaulx (CHASTELL., Vérité mal prise D., c.1460, 61). [Il s'agit du même proverbe, la victime animale étant directement remplacée par la victime réelle]

 

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[Représentation dans un entremets] : Le second entremectz de celle table estoit ung lyon mouvant attaiché à ung arbre au millieu d'ung preaul, et là avoit le personnaige d'ung homme qui batoit le chien devant le lyon. (LA MARCHE, Mém., II, c.1470, 353).

 

-

Battre (le poisson). "Rabattre le poisson (vers un certain endroit)" : ...et que l'en ne batte aux arches ne aux grosses herbes (Ordonn. rois Fr. S., t.8, 1402, 535).

 

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Prov. Poisson battu fuit le filet. "Le poisson qui a déjà été poussé, rabattu vers les filets, se méfie" : On dit qu'eschaudez yaue craint, Poissons batu fuit le fillé (DESCH., Oeuvres Q., t.5, c.1370-1407, 30).

 

e)

Au fig. Battre sa coulpe. "Se frapper la poitrine en disant Mea culpa ; d'où se repentir" : Mais dy ta patenostre et baz Ta coulpe (Mir. st Guill., c.1347, 35). Et quant il se fu fait bien confés au Chevalier du Papegau, il bati sa coulpe et mouru illec devant lui (Chev. papegau H., c.1400-1500, 50). Si cogneut qu'il avoit erré, si battit sa coulpe (C.N.N., c.1456-1467, 331).

 

-

Empl. abs. : Si tu tes plaisances purchasses, Au deduyt d'oyseaulx ou de chasses, Il y a du temps pour esbatre Et d'aultre pour pleurer et batre. (MESCHIN., Lun. princes M.-G., c.1461-1465, 39).

 

2.

Battre (une troupe, un ennemi, une position...)

 

a)

Au propre "Pilonner avec de l'artillerie" : Et finablement fut batue icelle ville tant que on y fist plussieurs brèches en la muraille (CHART. J., Chron. Ch. VII, V., t.2, c.1437-1464, 16). Et prenez vostre champ en lieu où ceulx de la ville ne puissent saillir sur vous ne vous batre de leur artillerie, se vous povez. (BUEIL, II, 1461-1466, 40). Et tant chemina par ses journées qu'il vint mettre le siège devant une ville qui avoit nom Aslonne. La ville n'estoit pas des plus fortes et ne doubtoit point ; et la trouva despourveue de gens et promptement la batist et desempara les avant-murs. (BUEIL, II, 1461-1466, 112). Or vous ay-je dit la maniere comment le duc Baudouin fut assiégé. La manière comment il fut guerryé, fut qu'il fut batu par trois lieux bien merveilleusement et lui furent ordonnez trois assaulx. (BUEIL, II, 1461-1466, 149). ...il failloit qu'ilz passassent à la fille [par petitz passaiges], et par cela les gens du duc de Bourgogne venoient seurement à pié jusques au bort du fossé pour les batre de traict (BUEIL, II, 1461-1466, 249). Toutesfois la ville ne valloit guères, et aussi, sans se laisser battre, feïrent semblable composition et baillèrent dix hommes, entre lesquelz se trouva encores cinq ou six desdictz ostaiges. (COMM., I, 1489-1491, 110). Cependant battoit fort ledict duc la ville. Il y avoit de bonnes gens dedans qui la deffendoient bien. (COMM., II, 1489-1491, 89). Et fut tant batu le dit chateau de bombardes, gros canons, gros faulcons et grosses coulevrines, qu'ilz abatirent en la mer l'une des plus grosses tours (LA VIGNE, V.N., p.1495, 256).

 

-

Empl. abs. : ...vostre artillerie assise, vous devez commencer à batre (BUEIL, II, 1461-1466, 41).

 

-

Prov. Tant bat on place qu'elle est prise : Tant gard'on fruit qu'il se pourrist ; Tant bat on place qu'elle est prise ; Tant tarde on que fault l'entreprise (VILLON, Poèmes variés R.H., c.1456-1463, 52).

 

-

[Dans un contexte grivois] : [Une jeune femme répond à un galant entreprenant] Gallant, peu doubte vostre assault ; J'ai chastel qui moult peult et vault. N'y peult batre par nulz ars Autre engiens - si non de coillars. (Six dessins dialogués à double sens, éd. K. Baldinger, c.1470. In : Trav. Ling. Philol. 31, 1993, 28).

 

b)

Au fig.

 

-

"Vaincre, défaire (un ennemi, un rival)" : Et si ay tousjours ouy dire que tel menace a la foiz qui a grant paour et qui puis est batus. (ARRAS, c.1392-1393, 226). C'est a bon droit, si vous avés esté batu. Pourquoi les aliiés vous asallir a lors hostels ? (FROISS., Chron. D., p.1400, 120). ...se ne fust par la paresse et couhardiesse de Hanibal que il avoit ainssy battu (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 44). Et ledit Ferrande et Marquis de Mante se logèrent en ung hault et fortiffièrent leur logis comme ceulx qui craignoient la bataille, car ledit roy Ferrande et ses gens avoient toujours esté batuz et en tous lieux (COMM., III, 1495-1498, 265).

 

-

"Faire subir des dommages (à un pays)" : ...li dus Jehans de Normendie (...) fist faire moult de crueuses justices en son temps. Par quoi li roiaulmes de France, par toutes ses parties en fu si grevés et si batus et si persequtés, que .CC. ans a venir les traces y parurent (FROISS., Chron. D., p.1400, 594).

 

-

Battre qqn à l'enchere. "Offrir mieux que qqn" : Il avoit peur d'estre happé Car on l'eust batu a l'enchere (Gaud. sot, c.1450, 10).

 

-

[D'une maladie] "Frapper qqn" : Mon seigneur mon frére, par foy, Ma maladie est si honteuse C'onques mais de si dolereuse Lepre ne fu homme batu. De touz poins m'a si abatu. (Mir. emper. Romme, 1369, 297).

 

3.

Battre qqc. (pour le façonner)

 

a)

[...un métal, une monnaie] : Armuriers, lormiers, qui fer batent, Et autres, qui les maisons latent, Y a, qui, sanz cesser, martellent (CHR. PIZ., M.F., I, 1400-1403, 138). Item le XIXe jour dudit moys baillé à Jehan Gramin pour une aisselle de grox boys pour batre le plon : III s. V d. (Doc. 1478. In : Pierre et métal dans le bât. au Moy. Âge, 1985, 124).

 

-

En partic. "Battre (une pièce de monnaie)" : ...et certains jours après ensuivans, furent lesdictes pieces batues par lesdis Berengier et des Champs en l'ostel dudit Poissonnier, afin de les mectre en essence de ladicte monnoie. (Chancell. Henri VI, L., t.2, 1427, 38). ...il a fait batre, sans noz congié et licence, monnoye tant d'or que d'argent en la ville d'Angolesme, de mendre poix et loy que ne sont noz monnoyes, et à la impression et coings de nos dictes monnoyes aians cours en nostre royaume. (Doc. Poitou G., t.8, 1431-1447, 17).

 

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Empl. abs. : ...nous avons entendu que vous ou l'un de vous avez pris ou fait prendre de par nous en aucunes de noz monnoies de par dela l'argent de quoy l'en devoit paier ceuls qui avoient apporte [l. apporté] billon a noz dictes monnoies en donnant parmy ce occasion aus marchans et autres personnes de non apporter de ci en avant billon a noz dictes monnoies et de les faire cesser ainsi du tout de batre et monnoier en nostre grant dommage (PHIL. VI VALOIS, Lettres closes C., 1339, 81).

 

-

"Battre (du plomb)" : ...baillé à Jehan Gramin pour une aisselle de grox boys pour batre le plon... (Doc. 1478. In : Pierre et métal dans le bât. au Moy. Âge, 1985, 124).

 

b)

Loc. Battre le fer

 

-

Battre froid fer. "Entreprendre une action difficile, impossible, vouée à l'échec" : Veulz tu du doy arer les champs ? Veulz tu planter bois de festus ? Au cul de l'asne fais tes chans ; Tu bas froit fer, tu es deçus (DESCH., Oeuvres Q., t.1, c.1370-1407, 1407). Par foy, Naymmes, dist il, vous courez contre vent ; Et se batez froit fier, saciez certainnement, Vous perdez vo langage. (Jourd. Blaye alex. M., a.1455, 692). ...il leur convenoit accorder leur demande et passer par celuy destroit, ou autrement allast comme il pust, on y labouroit en vain. Sy virent bien les dessusdits commis que droit là battoient froit fer (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 338).

 

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Battre froid fer en qqn. "Perdre sa peine, son énergie auprès de qqn, agir, intervenir en vain auprès de qqn" : Et faisoit ses doleances et complaintes les plus piteuses du monde et les mieulx colorees, et tellement que ledit messire Guillaume et les aultres perceurent bien qu'on batoit froit fer en luy, et qu'a grant peine on le retireroit de la ou il estoit pour presse ne priere qu'on feist (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 88).

 

-

Prov. Il faut battre le fer quand il est chaud. "Il faut agir au moment opportun" : Qui ne fait mie, quant il puet, Il ne fait mie, quant il vuet ; Et le fer chaut(,) on le doit batre. (MACH., R. Fort., c.1341, 75). L'aultre, qui entendoit son latin (...) s'advisa de batre le fer tantdiz qu'il estoit chault (C.N.N., c.1456-1467, 92). ...le roy Amydas faisoit forger artillerie et assembloit argent où il pouvoit finer ; car il voulloit poursuir sa bonne fortune ; et dient les maistres qu'il fait bon batre le fer quant il est chault. (BUEIL, II, 1461-1466, 222). Il convient batre le fer chault Aultrement tout n'en vauldroit rien. (Sots gard., a.1488, 111).

 

c)

Au fig. "Préparer (une affaire, une entreprise)" : Or nous convient trouver qui a Charlon le die ; Car bien y a maniere pour voir, le vous affie, Que ceste chose cy soit bien batue et fourbie (Galien D.B., c.1400-1500, 30).

 

4.

Battre qqc. (pour en séparer qqc.)

 

a)

[Une pelleterie] "Frapper avec un instrument (pour en chasser toutes les saletés)" : A Jehan Pinchon, varlet peletier et fourreur des robes du Roy nostre sire, pour ses gaiges de 18 d. p. par jour, pour batre, escourre et apecier la peleterie pour fourrer les robes ordinaires et autres garnemens du Roy nostredit seigneur (Comptes argent. rois Fr. D.-A., II, 1387, 256). [Autre ex. Comptes argent. rois Fr. D.-A., I, 290]

 

b)

Battre (un végétal)

 

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"Gauler (un arbre)" : Item, ilz pevent hochier de glan et la faine au pié et à la main, sans battre, leurs pors soubz eulx. (HECTOR DE CHARTRES, Cout. R., 1398-1408, 9).

 

-

Loc. prov. Battre les buissons dont un autre prend les oisillons. "Faire un travail dont un autre récolte les fruits" : N'il n'est raisons Pour ce, s'il est vrais, loiaus et preudons, Qu'il soit de ceuls qui batent les buissons Dont li autre prennent les oisillons. (MACH., J. R. Beh., c.1340, 126). De laquelle chose ledit duc de Bethefort ne fut en riens d'accord ne content, ainssois disoit qu'il avoit icelle ville d'Orléans à sa voulenté, et que ceulx d'Orléans lui paieroient ce qu'il avoit cousté à tenir ledit siège et qu'il seroit bien couroucé d'avoir batu les buissons à ce que d'autres deussent avoir les oiseillons. (CHART. J., Chron. Ch. VII, V., t.1, c.1437-1464, 65). Beau sire, c'est dommaige don, Ou se sont motz bien feriaulx, Que la Simple batte le buisson Et ung aultre en ayt les oyseaulx ! (COQUILL., Oeuvres F., 1478-p.1494, 19).

 

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[Représentation dans un entremets] : Le septiesme estoit le personnaige d'ung homme, qui d'une parche batoit ung buisson plein de petitz oyseaulx, et près d'eulx, en ung vergier cloz de treilles de rosiers, faict très gentement, avoit ung chevalier et une dame assiz à table, lesquelz mangeoient les oisillons dont l'ung bastoit le buisson, et monstroit ladicte dame au doyt qu'il se travailloit en vain et follement perdoit son temps. (LA MARCHE, Mém., II, c.1470, 352).

 

c)

Battre (une récolte)

 

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Battre le grain. "Frapper sur le blé avec un fléau pour en faire sortir le grain" : Charité engrangier le [le grain] fist Et en grange estrange le mist. Plusieurs bateurs (la) le trouverent, (Et) le batirent et vanerent. (GUILL. DIGULL., Pèler. vie hum. S.C., c.1330-1331, 276). ...Diligence mesme y estoit Escourchie et son ble [l. blé] batoit, Et ses deus soers l'amoncheloient (JEAN DE LE MOTE, Voie d'enfer P., 1340, 103). Il doivent de droit et par coustume labourer les terres des gentils hommes, quellier les grains et amener à l'ostel, mettre en la grange, batre et vaner. (FROISS., Chron. R., X, c.1375-1400, 95). Et ilec, au moien de certaine grande quantité de vans, fleaux et autres oultilz dont les gens du roy avoient mené grant quantité avecques eulx en charretes et chariotz, fut batu tout le grain estant et trouvé es granches dudit pays de Bourgongne et Picardie (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 324).

 

.

Empl. abs. : Nous sommes de vers le Crotoy, Et savons bien soier et batre (Mir. femme, 1368, 186).

 

-

Inf. subst. : Et aprés, quant celle semence fu parcreue et moutepliee, monstra comment ilz soyeroyent les blefs et, par batre de fleaulx, les osteroyent des espis. (CHR. PIZ., Cité dames C., c.1404-1407, 744).

 

.

Loc. Battre blé en autrui grange. "Commettre l'adultère avec une femme mariée" : ...que nulz ne preigne Fornicacion ne ne tiengne Concubine ne femme estrange, Ne bate blef en aultrui grange, Car ce seroit pechiez mortés. (DESCH., M.M., c.1385-1403, 38).

 

.

[Sens de battre détourné, dans une sentence qui semble propre à l'auteur] Savoir mieux battre que vanner : Devant eulx [les fumeux (confrérie imaginaire de jeunes gens guidés par Outrecuidance, Orgueil...)] fait mauvais parler : Mieulx scevent batre que vanner ; A pluseurs font affliction Par leur rude pugnicion (DESCH., Oeuvres R., t.7, c.1370-1407, 314).

 

.

Prov. Gerbe n'est ja de bon grain eswidie, S'elle n'est bien battue. "Il faut bien battre la gerbe si on veut en faire sortir tous les grains ; au fig. il faut battre, châtier le vilain si on veut en tirer quelque chose" : Li vilains ne vaut riens, qui bien ne le castie ; Ja par lui ne sera crasse soupe taillie ; Ne le garbe n'est ja de bon grain eswidie, S'elle n'est bien batue. (Jourd. Blaye alex. M., a.1455, 567).

 

-

Battre huile. "Extraire l'huile en pressant les graines oléagineuses" : ...de son molin leur on soloit battere [sic] oile (Doc. 1386. In : Y. Coutant, Terminol. du moulin médiév. dans le comté de Flandre, 1994, 494). ...toute l'oille battu ou dit molin (Doc. 1453. In : Y. Coutant, Terminol. du moulin médiév. dans le comté de Flandre, 1994, 494). ...ung molin (...) ou l'on souloit batre oile (Doc. 1453. In : Y. Coutant, Terminol. du moulin médiév. dans le comté de Flandre, 1994, 494).

 

5.

Battre qqc. (pour remuer, pour réduire en poudre...)

 

a)

"Réduire en poudre (une substance) en la broyant" : ...et faictes bactre du sucre grant foyson en poudre (CHIQUART, Cuis. S., 1420, 158). ...et y mecte et mesle de saffran bactu ce que il sera necessaire pour le faire jaune (CHIQUART, Cuis. S., 1420, 191). ...lequel moulin ledit Houel ne sez hoirs ou ayans cause, ne aultres tenans d'icellui, ne pourront, pour le temps advenir, fere batre aucun tan ["écorce de chêne"], mais le pourra édiffier à fouller draps ou piller champvre (Cartul. Hôtel-Dieu Cout. L., 1446, 257).

 

b)

"Frapper sur qqc. pour remuer, agiter" : Gramose est faicte de la char froide du giste qui est demouree du disner, et de l'eaue d'icelle char demouree comme dessus, en la maniere qui s'ensuit: Primo, il couvient batre .IIII. ou .VI. oeufz (c'estassavoir moyeul et blanc) et batre tant qu'ilz soient degoutans comme eaue (car aultrement ilz se tourneroient) et mectre autant de vertjus comme les oeufz montent, et faire boulir avec l'eaue de la char (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 204). Car quant est de lioyson de moyeulx d'oeufz, il les couvient batre, couler par l'estamine, et filer dedens le lait apres ce qu'il a bien boulu et qu'il est trait arriere du feu avec les poiz nouveaulx ou feves nouvelles et les espices. (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 214). Item, ayez de ..VI.. oeufz les moyeulx et ung petit de vin blanc, et soit tout batu ensemble tant comme a ennuy, puiz mis avec de l'eaue de la char, et du vertjus vieil et non nouvel, car il tourneroit (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 221).

 

-

Battre le plastre : ...deux fourniers qui ont battu le plastre (Comptes Archev. Rouen J., 1437-1438, 162). Item ledit jour baillé à ung homme pour trois jours d'avoir cuit et batu du platre... (Doc. 1478. In : Pierre et métal dans le bât. au Moy. Âge, 1985, 124).

 

c)

"Baratter (le lait)" : La seconde viande est le lait, et selon aulcuns, le texte s'entend du lait eburré, nommé selon les medecins et des gens communs lait batu, ou lait baraté. Lait eburré recent meslé avec pain chault fort engraisse. (Rég. santé corps C., 1480, 31).

 

6.

Battre le cabas. "Voler, escroquer (en faisant croire que ce qu'on a acheté pour qqn coûte plus cher que le prix qu'on l'a payé)" : Et tout sont les servens plus prest De loyaument faire besongne Sanz poiteviner escalongne, Et sanz penser ne hault ne bas Ainsi comme on bat le cabas A ceuls qui ne scevent le pris Du marchié, tant qu'ilz ont apris (DESCH., M.M., c.1385-1403, 115). ...Les .VII.. deniers seront pour my, Qui suy servens, pour moy esbatre. Ainsis seult on le cabas batre, Bat on et a l'en souvent fait A ceuls qui ne scevent ce fait. Au bout de l'an y a grant somme D'argent au regart d' un saige homme Et l'en fait denier a denier Grant moncel d'or et grant grenier (DESCH., M.M., c.1385-1403, 115). Si ont ycelles office d'acheter la viande et aler a la char, ou trop bien batent le cabaz - qui est un mot communement dit, qui est a entendre : faire acroire que la chose couste plus que elle ne fait, et retenir l'argent. Si font entendant que le quartier de mouton leur couste .IIII. solz que elles ont pour .X. blancs ou moins (CHR. PIZ., Trois vertus W.H., c.1405, 209).

B. -

P. anal. [Idée dominante d'itération]

 

1.

Battre (un lieu)

 

a)

"Fouler aux pieds, fréquenter, parcourir" : Cilz chemins si est moult batus (ACART, Prise am. H., 1332, 6). Et tout droit pris mon chemin ay A une sente po batue, Pleinne d'herbe poignant et drue (MACH., D. Lyon, 1342, 166). Bien est voir que chienz viennent aucune foiz chassant jusques a une voye qui sera foulee et usee et batue et poudreuse, et donc les chienz passent la voye tout oultre, et le cerf aura fouy et refouy la voye ou aval ou amont. (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 196). ...allasmes par sentiers non hantez et pou batus de marcheiz de gens. (BUEIL, I, 1461-1466, 34). Puis leur ordonna que le mercredy au matin s'en allassent à Gervaise atout vingt chevaulx courir jusques à la Vannais pour batre le païs, adfin que, s'il y avoit nulz adventuriers sur les champs, qu'ilz s'enfouyssent. (BUEIL, I, 1461-1466, 83).

 

-

"Parcourir et en même temps dépouiller de son gibier (en parlant de la loutre qui chasse)" : ...il ne demeure mie longuement en un gite, pour ce que le païs ou il a esté en pasture est tantost batu, et va en autre lieu demeurer et peschier. (HENRI FERR., Modus et Ratio, Livre deduis T., c.1354-1377, 94).

 

-

Battre le pavé. "Aller et venir sans but" : Je parloye à Godart si nous yrions aujourd'uy batre le pavé. Il nous fault trouver tous au Palais, à deux heures après midi, pour faire l'assemblée et pour ordonner en quel lieu nous nous rendrons tous ensemble. (Doc. Poitou G., t.10, 1460, 224).

 

b)

[D'un animal]

 

-

Battre l'eau. "Nager" : ...le cerf ne pourra passer [le ruissel] ne batre l'yaue amont ne aval qu'il ne touche au bois ou de la teste (GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, 207). Et, si en tout le païs n'a grosse riviere, il vet as petites et batra ou amont ou aval, selon ce que plus li plaira, demie lieue ou plus sanz venir a l'une rive ne a l'autre. (GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, 63).

 

.

Empl. abs. : Et, si en tout le païs n'a grosse riviere, il vet as petites et batra ou amont ou aval, selon ce que plus li plaira, demie lieue ou plus sanz venir a l'une rive ne a l'autre. (GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, 63). Et, quant il a bien longuement batu ou amont ou aval, il demeure en l'eaue dessouz aucunnes racines qu'il n'apert en l'yaue fors que la teste, et li passeront aucunne foiz les chiens et les veneurs par dessus et par de costé, qu'il ne s'en bougera ja, quar, combien qu'il soit fole beste, si a il assez de malice et de subtilité par soy garentir. (GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, 76).

 

-

Battre une voie. "Suivre une voie" : Et quant il s'en ira a son giste, il [le lièvre] prendra aucune voye, ou petite ou grant, la quele il ira batant une grande piece (GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, 222).

 

c)

Au fig.

 

-

Battre la voie. "Tracer un chemin" ; d'où "donner l'exemple" : ...Ogier, se dist ly roy, la voye avez batue (Renaut Mont. B.N. V., c.1350-1400, 218).

 

-

Battre l'eau et le vent. "Perdre sa peine" : ...convient-il pour tant que monseigneur, sur leur faire qui est cognu, boute outre ce qui ne portera point d'effet, fors que honte et blasme, et que tout volontairement et sciemment il envoie perdre ses gens, battre l'eaue et le vent, et se miner d'argent et de chevance, pour un néant ? (CHASTELL., Chron. K., t.5, c.1456-1471, 56).

 

-

Battre Seine. "Se démener inutilement" : Perdre aussi bien va son langage Conme s'il aloit batre Saine (Mir. Pierre Changeur, c.1378, 235).

 

2.

Battre l'oeil. "Cligner de l'oeil"

 

-

Sans battre l'oeil ni incliner les oreilles. "Sans hésiter, sans tergiverser" : ...ta personne royalle (...) a tous conseilliers de non [doit] donner la matiere, non pas obscure mais bien clere, de faire un beau latin, c'est assavoir sans batre l'oeil ne encliner les oreilles de dire pure verite hardiement aussi et sans aucun regart, a la lectre, sans souspecon ne aucune palliacion. (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.2, c.1386-1389, 344).

 

-

Inf. subst. En un battre d'oeil. "En un clin d'oeil" : ...et tantost que l'evesque ou le prestre est desvestus de ses ornemens, visiblement la belle dame a toute sa belle compaignie se part en un batre d'eul (MÉZIÈRES, Vertu sacr. mar. W., c.1384-1389, 390). Lesquelles chambrieres en un batre d'oeil s'esvanouirent de la presence de tous les assistens (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.1, c.1386-1389, 306).

 

Rem. Cf. DI STEF, 596c, s.v. oeil.

II. -

Empl. intrans.

A. -

[Idée dominante de coup, de heurt]

 

1.

[D'une pers.] "Frapper, heurter (à une porte)" : Li messagier forment a batre Conmencha, que vint a la porte Un portier armé, qui aporte En sa main un trenchant espié. (Dame Lycorne G., c.1349-1350, 206).

 

-

"Frapper, heurter (à une porte) et p. ext. attendre, languir" : ...il a eu beaucoup a faire au service de ceste dame, car au commencement luy a esté rude et fait batre aucun temps avant qu'elle lui ait voulu faire aucun bien. (MART. D'AUV., Arrêts Am. R., c.1460-1466, 137).

 

2.

[D'un oiseau]

 

-

Battre à la chair. "Becqueter la viande" : ...et aprés a grant jour li soit donné le sourcuis de la cuisse d'une poullete, en le fesant batre a la char devant les gens. (HENRI FERR., Modus et Ratio, Livre deduis T., c.1354-1377, 183).

 

3.

[D'une chose] Battre qq. part

 

a)

[D'un projectile] Battre contre qqc. "Taper, cogner (contre qqc.)" : La, nuit et jour ouÿst on batre Les pierres contre les creniaulx (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 315).

 

b)

[De la mer, d'une rivière...] Battre à (un lieu). "Heurter de façon continue, toucher, baigner" : Courc siet en païs d'Ermenie, Et s'est assis par tel maistrie Que la mer li bat au gyron, Et non mie tout environ. (MACH., P. Alex., p.1369, 136). ...il estoient asegiet par terre et par la riviere de la Geronde, laquelle bat et fiert as murs de la ville (FROISS., Chron. D., p.1400, 632). ...bien lui sambloit que une tempeste cheoit en ung vivier qui batoit a l'un des lez de la tour (Percef. III, R., t.3, c.1450 [c.1340], 84). ...passer a nou la grosse riviere du Rone, qui battoit a l'ostel ou sa dame demouroit. (C.N.N., c.1456-1467, 358). Assés prés d'illuec estoit un chasteau fort et puissant environné d'une grosse riviere qui batissoit a la muraille (Fille comte Pontieu B., c.1465-1468, 116).

 

-

Battre parmi. "Couler à travers, arroser" : Physon est uns flueves qui bat Parmi la terre de Enlath (MACH., P. Alex., p.1369, 191).

 

4.

P. anal. [D'une chose qui pend] "Arriver, tomber qq. part"

 

a)

[Des cheveux, de la barbe] : Barbe soubz le nombril avoient Qui jusqu'aulx genoulx leur batoit, Et de la couleur d'or estoit (Renart contref. R.L., t.1, 1328-1342, 161). La biauté de son dous viaire Et ses crins d'or, crespes et longs, Qui li batent jusqu'aus talons (MACH., C. ami, 1357, 77). Ses cheueulx estoyent beaulx et blonds et lui battoyent jusques a la caincture [l. çaincture] (MIÉLOT, Mir. N.D. W., 1456, 68). ...ilz avoient estez choisis a l'eslite, et avoient les cheveulx aussi blondez que fin or, qui leur batoient jusques sur leurs espaules. (Jehan de Paris W., 1494-1495, 63).

 

b)

[D'un vêtement, d'un tissu] : Messires Jehans Chandos (...) environnés des siens et vestis dessus ses armeures d'un grant vestement qui li batoit jusques en terre (FROISS., Chron. L., VII, c.1375-1400, 202). Et sur les harnas du Roy estoit une courniole couverte d'orfaverie. Et sur son cheval estoit un pers velours, tout tissu de grandes fleurs de lis d'or moult riches, et batoit jusques à terre. Et avoit ung chanffrain d'acier, sur lequel avoit ung très bel plumail. (MONSTRELET, Chron. D.-A., t.5, c.1444-1453, 304).

B. -

[Idée dominante d'itération]

 

1.

[D'une partie du corps] "Être animé de mouvements répétés, de battements" : Dieux ! Comme il a boulant le chief, Et comme les temples li batent ! (Mir. emper. Romme, 1369, 259). Trop tost, oultre le commun cours, Vous bat le cuer en la poictrine (CH. D'ORLÉANS, Rond. C., 1443-1460, 382). Luy voy tu point les vaines batre ? (Pass. Auv., 1477, 250).

 

-

[De l'âme] Tant que l'ame me bat au corps. "Tant que je suis en vie" : Si tost qu'amours est mypartie, Tout le hault plaisir en est hors ; Si ne sera par moy partie, Tant que l'ame me bate ou corps. (CHART., B. Dame, 1424, 353). LE MALADE. Elle [la mort] prent ceulx qu'elle veult prandre Et les autres si laisse actendre Tant que avant que viengne ilz sont mors ; Mais qu'on me contraingne a lui rendre Pardon pour meffaire et mesprandre Tant que l'ame me bate au corps... (HAUTEV., Conf. Test. am. tresp. B., c.1441-1447, 48). Je vous promectz Que tant que l'ame au corps me bate, De ses dampnables entremetz Je n'ay pas grant peur qu'il m'abate. (LA VIGNE, S.M., 1496, 494).

 

2.

[D'un oiseau] Battre des ailes. "Remuer les ailes pour s'envoler" : Et quant le faucon qui vole est enmi son haut, il doit oster le chaperon a son faucon nouvel, et se il bat pour aler a l'autre, il le doit lessier aler (HENRI FERR., Modus et Ratio, Livre deduis T., c.1354-1377, 191). Le faucon bat vers la fenestre, Qui a l'eir des champs voussist estre (LA BUIGNE, Rom. deduis B., 1359-1377, 153). Mais aprez ce, se il bat a la perche, c'est signe de fain et qu'il veult estre sur le poing. Et pour ce est bon qu'il ait tousjours gens devant lui afin que, s'il se pendoit ou debatist, qu'il fust tantost secouruz et relevé. (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 149).

 

3.

[D'un autre animal] "Être animé de mouvements saccadés, haleter" : L'autre maniere de rage s'apelle la rage efflanchee, quar ilz [les chiens] sont cousuz parmi les flans, comme s'ilz n'avoient mengié, et poussent des flans et batent grief (GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, 115).

 

4.

[D'une chose qui pivote sur des gonds] "Être animé d'un mouvement constant (ici, d'ouverture et de fermeture)" : Esgarde, et ne vont tes fenestres battant contre leurs posteaux et n'y viennent pluye et tempeste, sifflans parmy, par non avoir qui les ferme ? (CHASTELL., Oeuvres K., t.7, c.1435-1475, 41). ...ilz furent cincq qui (...) tous d'um voulloir entreprindrent de aller jusques aux portes de mettail que nuit et jour battent (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 80).

III. -

Empl. pronom.

A. -

Empl. pronom. réfl. "Se frapper, se flageller" : En ce temps vint une maisnie De par leur dame Ypocrisie Qui de courgies se batoient Et adens se crucefioient (MACH., J. R. Nav., 1349, 145). Et avoient iceulx batans chascuns vestu une cotte de toille, les visages couvers fors que tant que en droit leurs yeulx avoit pertuis pour veoir a eux conduire, et se batoient d'icelles escourgées a nu entre les espaulles, et chantoient en eux batant tous ensemble ung chant pareil: et estoit merveilleuse chose et piteuse a veoir. (Voy. J. c.1395, 99). En l'an de grace Nostre Signour mille CCCXLIX, alerent li penant et issirent premierement d'Alemagne et furent honmes liquel faisoient penitances publiques, et se batoient d'escorgies a neus durs de quir farsis de petites pointeletes de fier. (FROISS., Chron. D., p.1400, 894).

 

-

Se battre de sa propre arme. "Se faire du tort à soi-même" : ...et si y ot pluisseurs gens qui dirent que ung bon taire lui vaulsist mieulx, et qu'elle s'estoit batue par son baston mesmes, c'est -à-dire par sa langue et son hatif parler. (LA TOUR LANDRY, Livre pour l'enseign. de ses filles, éd. A. de Montaiglon, 1371, 33). Car aucunes gens par leur grant yre et convoitise se bastent de leurs bastons mesmes et se pourchassent de jour en jour peine et ennuy. (LA TOUR LANDRY, Livre pour l'enseign. de ses filles, éd. A. de Montaiglon, 1371, 84). ...De son cousteau il s'est couppé, De ses verges il s'est batu ; Le brassin a beu que a brassé. (Myst. Viel test. R., t.6, c.1450, 178).

 

Rem. Cf. J. Morawski, Prov. fr., 1925, n° 2335 : Teus cuelt la verge dont il meïsmes est batu.

B. -

Empl. pronom. réciproque.

 

1.

[De pers.] "Se combattre" : En Thesale aussi se batoient L'un l'autre et fort se combatoient Li Thesalin et Sabïen, Qui ne se vouloient nul bien, Dont des mors y ot grant foison, Tant que dura celle saison. (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 331). Dehors ancor se combattent Chacun jour s'occient et batent. (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 130). La plupart des gens des deux roys estoient logéz à Bayonne, qui d'entée se battirent très bien. (COMM., I, 1489-1491, 137).

 

2.

[De choses] "Se heurter, se rencontrer" : ...quant les .II. freres ardoient En .II. feux, en hault se batoient Les fumees, qui de leur corps Yssoient et sailloient hors (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 327).

C. -

CHASSE [D'un oiseau] "Remuer les ailes" : La quinte [raison de mettre un chaperon au faucon] est que il en a meilleur courage de voller, et si le peut l'en partout porter sans ce que il se bate ne bouge (HENRI FERR., Modus et Ratio, Livre deduis T., c.1354-1377, 34). A ce qu'il dit qu'oiseaulx se batent Telement que frois mors s'abatent, Il est bien voir que l'esprevier De souvent batre est coustumier (LA BUIGNE, Rom. deduis B., 1359-1377, 339).

IV. -

Part. prés.

A. -

Empl. subst. "Personne qui se frappe avec une corde, un fouet..., flagellant" : Et avoient iceulx batans chascuns vestu une cotte de toille, les visages couvers fors que tant que en droit leurs yeulx avoit pertuis pour veoir a eux conduire (Voy. Jérus., c.1395, 99).

B. -

Empl. adv.

 

-

Battant. "Vite, immédiatement" : Après ma gent iray batant Tout a par moy. (Mir. femme roy Port., c.1342, 165). A ce mot sont paiens arriere reculé, De cy a l'estandart en sont batant mené (Galien D.B., c.1400-1500, 129). ...et quant Madame fut sur les champs, tant que hacquenee pouoit aler s'en ala batant. (LA SALE, J.S., 1456, 288). ...puis ampoignerent lez lancez, acolerent leurz escus, et ferant et batant vindrent en celle plaine (Fille comte Pontieu B., c.1465-1468, 59).

 

.

Tout battant : ...et Orchas, qu'ilz enmenoient tout batant, commença a crïer a haulte voix: "Aigres, Aigres, beaux compaings, or me faiz secours et aïde." (Bérinus, II, c.1350-1370, 119). ...[ils] delibererent (...) que s'il ne confessoit autre chose que dit est, attendu la peine de prison par lui soufferte, et que partie est restituée du hanap d'argent dessus dit, par lui prins, que icellui prisonnier, à la premiere justice que l'en feroit, feust batus et mené tout batant, au cul de la charrete (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 159). Finablement, tant s'esvertua messire Gilles de Chin que par sa haulte proesse il remist ceulx de dehors dedens les liches et chassierent tout battant ceulx de dedens jusques dessoubz les hours des dames. (Messire Gilles de Chin L.-R., c.1400, 87). Si m'en suis venu tout batant, Car pas n'est temps d'estre bastant Ne auprés de luy soupirer. (MICHEL, Myst. Pass. J., 1486, 332).

 

Rem. Autres ex. ds R. Ling. rom. 77, 2013, 285.

 

-

Ferant/courant battant. "À toute vitesse" : ...et messires Bertrans et se grosse route tantost venront ferant batant, sans yaus espargnier ne leurs chevaus. (FROISS., Chron. L., V, c.1375-1400, 6). ...messires Bertrans et se grosse route tantost venront ferant batant, et enteront en le ville (FROISS., Chron. L., VI, c.1375-1400, 102). Sy envoyèrent courant battant un message devers le roy, pour luy annoncer ce que avoient trouvé (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 189).

 

.

Pied battant : A Dieu ! je m'en vois pié batant (Mir. fille roy Hongrie, c.1371, 68).

V. -

Part. passé en empl. adj.

A. -

[D'une pers.] Avoir le coeur battu de qqc. "Avoir le coeur occupé de" : La feste se prist a outrer Quant on eut assés esbatu, Et je qui le coer euch batu De grans pensers fors et divers, (...) Me parti d'iluec erranment. (FROISS., Pris. am. F., 1372-1373, 50).

B. -

[D'une chose]

 

1.

DRAP. COST. [D'un tissu] Battu à/en/de (une substance précieuse). "Incrusté, brodé, orné de" : ...un paveillon batu a or et a pierres precieuses (ARRAS, c.1392-1393, 39). Or dirons du fait du feu roy anglois. Assavoir est que les seigneurs de son sang le mirent sur ung chariot que menoient quatre grans chevaulx. Et avoient fait sa semblance et représentacion de cuir boulu, moult gentilment, portant en son chef couronne d'or moult précieuse, et tenoit en sa main dextre ung ceptre et verge royale, et en la senestre portoit une pomme d'or. Et gisoit en ung lit sur ledit chariot, le visaige vers le ciel. Duquel lit, le couvertoir estoit de drap de soie vermeil batu à or. (MONSTRELET, Chron. D.-A., t.4, c.1425-1440, 113). ...dames et damoiselles tant noblement parees de couronnes et de pierres precieuses et de vestures batues en or... (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 446). ...sa chayere [du roi] paree de veloux cramoisy battu en or (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 33). ...à .II. estéz de lui, avoit deux valetz de pied, vestus de hoccque tous batus d'or (MOLINET, Chron. D.J., t.1, 1474-1506, 427). Jehan de Paris et ses cent gentilz hommes estoient tous vestus d'ung drap d'or batu, tant riche que ne le vous sçaurois declairer. (Jehan de Paris W., 1494-1495, 74).

 

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P. ell. Battu. "Brodé d'or" : ...en une cambre bien parant, Bien aournee et bien vestue De tapisserie batue, Tous seulés illuec m'esbatoie. (FROISS., Espin. amour. F., c.1369, 126).

 

2.

La mer battue. "La mer agitée, remuée (ici, la Mer Noire)" : La premiere partie qui est Indie, est enclose de la mer qui est devers le midy, nommee par aulcuns la mer noire ; et aultres l'appellent la mer battue, pour le grant debattement ou elle est tousjours a cause de VIImVc et XLVIII ysles qui y sont (LA SALE, Sale D., 1451, 159).
 

DMF 2020 - Article revu en 2015 Pierre Cromer

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