I. -

Adj.

A. -

[En lien avec lat. villa, villanus]

1.

[D'une pers.] "Roturier (et non pas noble)" : Et se des vices separez Estoit et des vertuz parez, Uns savetiers nobles seroit Et uns rois villains, qui feroit Maises ouevres et villonnie. Si que noblesse, je t'affie, Vient de bon et noble corage. Li roy n'i ont autre avantage. (MACH., C. ami, 1357, 68). ... toutes gens, frans et villains, en Castille obeissoient à lui (FROISS., Chron. L., VI, c.1375-1400, 193). Et trop fort se disferent en Engleterre les natures et conditions des nobles aux honmes mestis et vilains, car li gentilhonme sont de noble et loiale condition, et li conmuns peuples est de fele, perilleuse, orguilleuse et desloiale condition. (FROISS., Chron. D., p.1400, 42).

2.

[D'une chose]

a)

"Propre au roturier"

-

Vilain service. "Corvée" : Item, [Guillaume du Bosc et Guillaume de Fornecrot] sont quittes de vendre, d'achatter es forestz et marchiés du roy entre les quatre portes de Normandie, de monneage et de coustume de pasvage, de poudrage, de gués, de veues et de autres villains services. (HECTOR DE CHARTRES, Cout. R.B., 1398-1402, 74).

b)

"Qui appartient au paysan" : ...et ne puet ou doit avoir en ladicte forest nulz pors villains, se ce n'est aux deux premiers pasnages tant seullement. (HECTOR DE CHARTRES, Cout. R., 1398-1408, 331).

B. -

[Croisé avec vilis, vil]

1.

"De peu de valeur (en partic. d'un animal)"

-

[De chiens] : Les mastins ont office et est leur nature de garder les bestiaillz et l'ostel de leur seigneur, et est bonne nature de chienz, quar ilz deffendent et gardent a leur pouoir tout quant qui est de leur seigneur, mes vileins chienz et de vileine taille sont (GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, 137).

-

[De faucons] : Des faucons villains la fumelle est dit lannier ou le fourmé, et le masle est dit tiercelet. (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 68). Autres faucons y a qui sont de Flandres et sont diz faucons sacrez, et sont d'un petit moins delyé maille et ont les piez jannes, et sont comme entre le gentil et le villain, et sont bons, comme l'en dit communement, reclamez au loirre, ou d'omme quant ilz reviennent bien au loirre (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 168).

2.

"Laid, qui déplaît à la vue" : [Polyphème à Galatée] Si est laide chose et villaine Homme sans barbe ; bien m'avient Le poil qui en mon cuir se tient, Qui est long et bien redrecié, Ainsi com soies hirecié. J'ai un seul oeil en mi le vis, Mais bien m'avient, ce m'est avis, Car je l'ai grant et gros et large Ainsi comme reonde targe ; Ainsi com je n'ai c'un seul oeil N'a il en ciel c'un seul soleil, Au monde quë une rondesse. Pour ce, se le poil me redresse, Ne me dois tu pas desprisier : Petit voit l'en l'arbe prisier Quant il a perdue sa fueille. (MACH., Voir, 1364, 638).

-

[Par litote] : Après vint chascuns en la sale Qui ne fu vileinne ne sale, Ou chascuns fu, ce m'est avis, A point honnourez et servis Einsi de vin et de viande Com corps et appetis demande. (MACH., R. Fort., c.1341, 145). Une dame sans villenie D'un chevalier estoit amie, Si li donna un anelet Trop gent (ne fu villein ne let), Par si qu'adès le porteroit Et que jamais ne l'osteroit De son doy, s'elle ne l'ostoit. (MACH., J. R. Nav., 1349, 235). Si resgardai par mi la sale Qui n'estoit vileinne ne sale, Ou il avoit grant compaingnie De chevaliers et de mainie, Ci un, ci deus, ci trois, ci quatre, Attendans pour aler esbatre. (MACH., F. am., c.1361, 182). Il s'assist et me fist sëoir Pour escouter et pour vëoir L'ordenance de la fonteinne Qui n'estoit rude ne villeinne, Et le lieu qui estoit entour Compassez et fais a droit tour. (MACH., F. am., c.1361, 192).

-

"Laid, sale, repoussant" : ...et mes plaies sont si perillouses, si horribles, si pleynes de venym pur purture de vileyne ordure puant, qe c'est honte trop grant de ent parler (HENRI LANC., Seyntz medicines A., 1354, 7). ...dedens ung ort, vilain et paillart tumbereau dont on venoit de porter la boe en la voierie. (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 82). Sus, vilain plat, Diligenment advance toy ! (Pass. Auv., 1477, 98).

-

"Mauvais, méchant" : Et avint que quant le bourreau eut saisie la doulouere pour eulz justicier, il chay devant le peuple de mauvaise et villaine maladie (Chron. norm. 14e M., c.1369-1372, 126). Et là fu consievis à meschief d'une pière grosse et villainne uns bons escuiers de Haynau qui se tenoit tout devant, pour son corps avancier (FROISS., Chron. L., I, c.1375-1400, 201).

3.

[D'une pers., de ce qui touche la pers., de sa conduite, de ses sentiments...]

a)

"Méprisable, indigne, vil" : ...a ma gracieuse dame, Qui a mon cuer, mon corps et m'ame, Me fist Amours adès penser Loyaument, sans vilein penser. (MACH., D. verg., a.1340, 15). Car de meffait C'est un vice si villein et si lait, Car qui le fait, ja de pooir qu'il ait, N'iert de tous poins effacié ne deffait. (MACH., J. R. Beh., c.1340, 101). ...celle qui a meffait Contre Dieu trop vilain meffait. (Mir. abbeesse, 1340, 96). Et aussi ma trés douce dame, Que je desir et aim, par m'ame, De cuer, sans pensée vileinne, Plus que Paris ne fist Heleinne, M'estoit miroir et exemplaire De tous biens desirer et faire. (MACH., R. Fort., c.1341, 7). Pour ce, dame, je m'atour De trés toute ma vigour A vous servir Et met, sans nul villain tour, Mon cuer, ma vie et m'onnour En vo plaisir. (MACH., R. Fort., c.1341, 127). Est ce bien chose deshonneste Et fait vilain ? (Mir. ev. arced., c.1341, 131). Li fait sont vilain et orrible (Mir. femme roy Port., c.1342, 191). ...je fu trop vilaine, Quant te mis sus, par mon pechié, Que tu eus avec moy couchié. (Mir. st J. Cris., c.1344, 283). Ja t'ay je dit que mon eglise Est d'ordure par toy conquise Toute soullie et toute plaine ; Fuy de cy, personne vilaine. (Mir. pape, 1346, 381). Certes un fait vous monsterray Villain et lait. (Mir. marq. Gaudine, 1350, 136). LA DAME. (...) Sire, mon corps deffens et garde De mort vilaine. (Mir. enf. ress., 1353, 66). Car s'il le fait, il m'est avis Qu'il te donne trop bel avis, Et que moult te dois aviser De toudis penser et viser A mettre jus tout villain vice Et a faire son dous service ; Qu'a s'amour te duit et adresse, S'il te punist en ta jonesse, Einsi comme il fist Manassès Qu'en prison ot maint dur assès. (MACH., C. ami, 1357, 73). Forment se repent de ce fait, Car c'est chose trop deshonneste, Laide, villeinne, et scens de beste ; Ne tel chose à roy n'apartient En nulle maniere. Et si tient Que toutes vefves, de son droit, Et pucelles marier doit, Qui demeurent en son roiaume. (MACH., P. Alex., p.1369, 262). Et ainsi et les uns et les autres veullent prendre gaaing de la ou il n'appartient pas et pour ce sont il vilains gaaignëeurs et gaaignent laidement. (ORESME, E.A., c.1370, 241). Et aussi par aventure amistié pour delectacion est plus liberal que amistié pour proffit, se la delectacion n'est villainne. (ORESME, E.A.C., c.1370, 421). Et pour ce que je vueil que chascun congnoisse que je ne fay pas cecy pour avarice, mais pour garder mon droit heritaige et esclarcir la vilaine et felonnesse trahison que le faulx traitre et ses complices firent a mon pere pour lui enchasser, preingne son filz Olivier et un de ses plus prouchains. (ARRAS, c.1392-1393, 59). ... li gentilhonme, ... avoient tousjours regart sus les bourgois de Rennes que il ne fesissent auqun vilain tretié a ceuls de l'oost. (FROISS., Chron. D., p.1400, 506). ...Edipus, qui entechié Se sent de si villain pechié. (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 294). ...par ramposne moult villaine, Lui a dit : "De vous et d'Eleine Cuid qu'adés yert l'amour finee..." (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 139). ...car nostre adversaire, Pechié mortel, le vilain et crueux tirant, avec toute sa maudicte compaignie, (...) et autres Vices sans nombre ont [en] terre presque occupé tout le logis (GERS., Concept., 1401, 394). Et car de nostre temps les pluseurs sont habendonnez a tous pechiez dé leur junesse, et a tous vices et a toutes vilaines ordures plus que bestes (GERS., Trin., 1402, 154). Et ne doit on pas auoir trop grant reflexion sur telles choses inutiles ou vileines, car tant plus y penseras de tant a plus grant peine ten mectras hors. (CIB., p.1451, 213). Le samedi trente et ungiesme jour De ce dit moys, voyant le vilain tour Qu'avoit commis le tres deloyal traïstre Le roy se tint au dit lieu de Belistre (LA VIGNE, V.N., p.1495, 241).

-

Vilain cas. "Affaire honteuse" : ...[elle] dit et afferma par serement estre née du pays de Meaulx, et que tout le temps de sa vie elle a esté et demouré en la ville de Paris, et servi comme chamberiere, sans estre reprinse d'aucun cas villain ou reprouche. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 323). ...quant à lui onques ne fit excès, fors un du procureur du Roy en son hostel, dont en a esté delivrés par le Roy et sa justice de ceans, où sa grace et remission fu enterinée, maiz onques autre villain cas ne fist (BAYE, I, 1400-1410, 108). ...ledit suppliant s'est bien et doulcement gouverné, sans oncques avoir esté actaint d'aucun villain cas, blasme ou reprouche (Doc. Poitou G., t.10, 1459, 198). Vienne ce qu'avenir pourra De cas villain long souvenir (Sots gard., a.1488, 112).

-

Jurer le vilain serment. V. serment

-

[Dans un cont. d'injure] "Grossier, sale" : Mais les plusieurs tantost en bouche Aront, pour chose, qui pou touche, D'appeller "ort villain mastin" Un crestien (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 35). "Faulx traitre, vilain chien, murtrier, par le sang Dieu, nous te tuerons" (Doc. Poitou G., t.8, 1447, 429).

-

[P. méton. du déterminé] "Qui porte sur une chose vile" : Mais vraiement, j'ay un noble confort, Qu'en vous servir et en vous amer fort Et en espoir me delite et deport Par Souvenir Qui me monstre vostre gracieus port Dont nuls ne puet dire villain rapport. Là pren je force et vigour et ressort Contre Desir ; Quar s'il avient qu'il me veigne assaillir, C'est mes recours : là ne puis je faillir. (MACH., Bal., 1377, 565). Mais pour peinne qu'endure, Tant soit à porter dure, N'orrez vilain rapport, Que je pense laidure, Barat ne mespresure Vers vostre gentil port ; À Amours m'en raport. (MACH., Ch. bal., 1377, 620).

b)

"Inconvenant" : Il vint en l'ostel le viconte, Les chiens prist et les acoupla. Et le filz de laiens s'anfla, Et en dist villeinnes paroles, Qui estoient rudes et foles. Dont il fist mal et villenie, Qu'à fil de roy on ne doit mie Dire pour chose si petite, Chose de quoy on le despite. (MACH., P. Alex., p.1369, 256). Et a gouliardois et disëeurs de comedies, c'est a dire, de villains ditéz ou vilainnes chançons, il donne grans disners comme noces ou il fait mectre pourpre ou telz precieus paramenz par la ou il marche, si comme faisoient ceuls d'une cité appelee Megare. (ORESME, E.A., c.1370, 246). Et quant il [le vrai amoureux] est a la messe c'est le plus devot, a table le plus honneste, en compaignie des seigneurs et des dames le plus avenant, de ses oroilles nul villain mot escouter (LA SALE, J.S., 1456, 30). Nicodemus, je pressuppose Que nous ne facions nulle chose Que desplaisante soit a Dieu, De vouloir que ce corps [de Jésus] reppose En terre qu'est si villain lieu ? (Pass. Auv., 1477, 259).

c)

"Horrible, cruel" : Trop villainement s'est meffait Quy murtre si vilain a fait (Mir. ev. arced., c.1341, 131). Entre les autres ... villains fais, il tuèrent un chevalier et boutèrent en un hastier, et tournèrent au feu et le rostirent, voiant la dame et ses enfans (FROISS., Chron. L., V, c.1375-1400, 100). La bataille fu desconficte, et s'en vont ceulx qui porent eschapper, les uns vers Balle, les autres vers Fribourc. Et y ot vilaine occision, car il en y ot occiz de XXV. a XXXm. des Ostrissiens que de leurs aidans. (ARRAS, c.1392-1393, 287). ...il estoit et avoit esté herites et sodomites, ensi que renonmee puble couroit par toute Engleterre, et dou roi meismes. Et pour ce vilain et ort pechiet, li rois avoit escaciet la roine sa fenme en sus de lui. (FROISS., Chron. D., p.1400, 92). Vous irés deviers mon adversaire Phelippe de Valois et li dirés de par moi que, pour tant que il a mis a mort vilainne si vaillans chevaliers et si gentils ... je di et voel porter oultre que il a enfraint et brisiet les trieuves que nous avions ensamble (FROISS., Chron. D., p.1400, 599). ...pour raison de plusieurs plaintes qui furent baillées à ladicte court à l'encontre dudit Daniel, et mesmement à la complainte d'une nommée Marion, femme de Colin Panier, et d'une autre femme dissolue, qui chargeoient ledit Daniel de les avoir efforcées et en elles fait et commis l'ort et villain pechié de sodomie. (ROYE, Chron. scand., II, 1460-1483, 65). Parcula, ma dame, a songé Q'un grant juge vous condempnoit A mort vilaine et disoit : "Si se Pilate jucge a mort Jhesus, ce sera a grant tort..." (Pass. Auv., 1477, 168). ...En requerant ceste court souvoraine Par sentence diffinie, les humains Devoir mourir de mort la plus villaine Qu'il soit possible. (Cene dieux, c.1492, 117). ...pour ce qu'il trouvoit des estoilles fixes, qui ont nature de eslever les hommes à grande sublimité et en bref temps et souldaiment descheoir et venir à villaine mort ou mendicité (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 76 r°).

-

"D'une cruauté, d'une intensité justifiée" : Je hach les crestyens de haïne vilaine ; Car en iaus ay trouvé grant traïson grevaine (God. Bouillon R.B., t.3, c.1356, 354).

d)

En partic. "Avare"

Rem. FEW XIV, 455a (allègue un ex. du XVe s. ; source ?).

II. -

Subst. masc.

A. -

[En lien avec lat. villanus]

1.

"Roturier, homme de basse condition" : Maistre, avecques ces abbaies, Trouverons nous bien, par ces villes De ces villains riches a milles Qui le leur n'osent desploier (Mir. Rob. Dyable, c.1375, 7). ...quant les vilains se revelerent et leverent ... se les Londriens voulsissent avoir esté de leur accord, ilz eussent honny le roy et ce royaulme. (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 60). Jamais on ne feuist adonnés à ce que ce fust Trimilien, ung des Cambrelans du roy, car il n'estoit pas en abit d'omme de bien, fors que de vilain. (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 52). ...ilz sont si lassé et hodé et mal gouverné, et tous leurs chevaulx mort, et sont gentilz et vilains si descouraigiez pour celle saison, je le vous dy, que nul bon service n'y devez-vous entendre (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 100). ...on crya en plus de cent lieux "as armes !" et fut dit : Muerent les chitoiens et les villains de la ville ! (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 130). ...je vous mettray dedens de Montferrant, dedens XV. jours ; en laquelle ville gist très grant pillaige, car elle est riche de soy et bien marchande, et y a des riches vilains grant fuison (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 205). Robers, vous estes chevaliers... Vous n'estes mies gentils hom, mais fils d'un villain et d'un machon, sicom nous sommes (FROISS., Chron. R., X, c.1375-1400, 115). Toudis en larechin, li villain et li païsant de Hainnau, pour gaegnier , leur menoient en leur ost assés de vivres (FROISS., Chron. R., X, c.1375-1400, 260). Car qui vuet jugier à droit, Nul n'i est qui frans ne soit, Et s'uns villains y entroit, Bonne Amour li mueroit En miex son corage ; Franchise l'affranchiroit, Loyauté l'enseingneroit, Plaisence amer le feroit (MACH., Les lays, 1377, 349). Clers et laiz, vilains et gentilz (...) Se merveillent conment tant regne Le roy ne tant est en veuvage (Mir. fille roy, c.1379, 37). Assez en ay dit, quar c'est chasce de vileins et de communs et de paysanz. (GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, 256). Le pavillon ot fait vuidier Le duc, si n'y ot chamberlain, Ne varlet, noble, ne villain (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 225). N... fait serment et promet (...) d'exercer l'office de bailli (...) il ne confacera non plus en jugement ny dehors la personne du pauvre que du riche, du vilain que du gentil, de l'etranger que du privé (Hist. dr. munic. E., t.1, 1449,,, 103). Je congnois que pouvres et riches, Sagez et folz, prestres et laiz, Nobles, villains, larges et chiches, Petiz et grans, et beaulx et laitz, Dames a rebrassés colletz, De quelconque condicïon, Portans atours et bourreletz, Mort saisit sans excepcïon. (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 42). Encore dy-je plus que ung homme d'armes se doit combatre à gentilz et à villains et à bestes mues et à toutes choses qui contre lui vueillent combatre (BUEIL, II, 1461-1466, 81). Petis et grans, Bourgoix, marchans, Nobles, vilains [l. nobles et vilains] en ung tas, Jeunes, anfans, Sont tous nuysans Les ungs es autres en tous cas. (Pass. Auv., 1477, 110). Exemple : se ung villain, qui soit de la nation de Biscaye ou de Gascoingne, viengne a une femme noble en lui disant : Je sui filz de roy ou de prince (Sacr. mar., c.1477-1481, 48). ...c'est assavoir XII gentilz hommes, liez à la queue des chevaulx, que conduisoient aucuns villains (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 150 v°). Car il n'y eult gentil, vilain ne noble Qui n'y vinssent de toute la contree. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 143).

-

[Dans un cont. d'injure] : Et tantost le dit feu Michel lui respondi moult arroganment en l'oppressant (...) que se villains portoient queues, il en porteroit deux. (Doc. Poitou G., t.6, 1396, 238).

-

Prov. : On dit, et il est tout certain, Qu'il n'est dangier que de villain N'orgueil que de povre enrichi. (Pouvre peuple H., c.1450-1492, 189).

2.

En partic. "Paysan" : Maistre, ne vous mentiray pas, Vezci du vilain la maison. (Mir. Rob. Dyable, c.1375, 8). Adont [le géant] se lieve moult mal talentiz, et prent un grant levier entre ses poings, un fort vilain auroit assez a faire de le lever. (ARRAS, c.1392-1393, 263). Item, a Jehan Trouvé, boucher, Laisse le Mouton, franc et tendre, Et ung tacon pour esmouchier Le Beuf couronné qu'on veult vendre, Et la Vache, qui pourra prendre Le villain qui la trousse au col : S'il ne la rend, qu'on le puist pendre Et estrangler d'un bon licol ! (VILLON, Lais R.H., c.1456-1457, 21).

-

Prov. Qui a le vilain, si a son boeuf. "Le paysan appartient au seigneur avec tout ce qu'il possède" : Le Saint Pere, donques, qui governe l'ame, ne doit pas estre exclus du governement dez choses mundaines qui sont subjectes a l'ame, car l'en dit comunement que qui a le vilain si a son buef. (Songe verg. S., t.1, 1378, 89).

Rem. Cf. Thesaurus proverbiorum Medii Aevi, t.1, 1995, 376, s.v. Bauer.

B. -

[Croisé avec vilis, vil] "Celui qui est méprisable" : Mais quant il ont tuit debatu Le don de toute leur vertu Et il ont l'amant villené Villeinnement et ramposné Et despité par leur envie Com villeins pleins de villenie, Sachiez que ces sis damoiselles, Qui sont juenes, gentis et belles, Sont champions et advocas Pour l'amant qui est si trés mas Qu'il est de toute doleur pleins Pour la doubtance des villeins. (MACH., D. verg., a.1340, 43). Lors s'à boire demande, j'ay vin de couleur perse Dont li muis ne vaut pas la queue d'une querse, Car mon ventre fait bruire et les bouiaus me perse. Trop est de put afaire, trop a la main escherse ; N'a si mauvais villain de Paris jusqu'en Perse. De Dieu soit il maudis et tués d'une herse, Ou decopez par pieces com la terre c'on herse, Et com le laboureur la fent, quant il la berse, Ou pendus au gibet de la ville de Merse. (MACH., Compl., 1340-1377, 266).

-

[Dans un cont. d'injure] : Si tost comme il les vey, il commença à crier. L'un deux sailly tantost avant et le prist par la gueule et luy dist : "Villain, tu y es mors se tu sonnes mot." Quant il se vey en ce party, il se teut tout quoy (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 213). ...[il] dist au François : "Frappez sur ce villain qui vous a retenu sans cause et sans raison..." [L'homme est, en réalité, un gentilhomme de la suite de Talbot] (C.N.N., c.1456-1467, 57). Il te fault la vie finer. Accop, vilain, couche toy la ! (Pass. Auv., 1477, 195). LE CRESTIEN [au juif]. Je perdray icy pacience Saillez dehors, villain infame, Ou, par la glorieuse Dame, Du corps brief je vous courceray. (Mir. st Nic. juif, c.1480-1500, 111). Tu es ung gros villain rebelle (Tr. Men., c.1480-1500, 293).

-

Malgré les vilains. "En dépit des rustres" : Car il convint amasser tous les pyonniers de la dicte armee et mettre incontinent en besogne, tellement que tantost aprés, maulgré les villains, la dicte artillerie passa gayement. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 292).

III. -

Subst. fém. "Roturière" : Vray Dieu, sy vray que fermement Croy que nasquites de la belle Qui enfanta, vierge pucelle, Vostre saint corps sanz souffrir paine ; Et qu'onques franche ne villaine Ne pot dire, par verité, Qu'enfantast en virginité Fors elle (Vie st Fiacre B.C.P., c.1380-1400, 25).