C.N.R.S.
 
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     POUVOIR1          POUVOIR2     
FEW IX posse
POUVOIR, verbe
[T-L : pöoir ; GDC : poeir1 ; DÉCT : pöoir ; FEW IX, 231b : posse ; TLF : XIII, 976a : pouvoir1]

I. -

[Les conditions de possibilité sont dans le sujet]

A. -

[Auxiliaire marquant la capacité (d'une pers. ou d'un animal qui agit ou est susceptible d'agir volontairement dans telle ou telle circonstance)] "Avoir la capacité de, être capable de, être en état de (dans une circonstance donnée)"

 

1.

Pouvoir + inf. : Mais oncques pour ma force n'en pos ung son getter (Tristan Nant. S., c.1350, 380). ...pluseurs enfans, qui grandement puelent leur lignage regenereir (HEMRICOURT, Miroir Hesb. B.B., 1353-1398, 37). [Forme analogique de vuelent, veulent ; forme fréquente : plus d'une cinquantaine d'occurrences dans la Base du DMF] NOSTRE DAME. Amis, mon filz qui scet et puet Touz desrois remettre en compas... (Mir. parr., 1356, 60). ...mais loy declaire Et deffent fornicacion A toute generacion : Pourras tu estre continens ? (DESCH., M.M., c.1385-1403, 314). Vous devez, durant la baterie de voz bombardes, faire trenchées pour entrer ès fossez. S'il y a eaue que vous puissiez oster, ostez là. (BUEIL, II, 1461-1466, 41).

 

-

Puissant + inf. "Pouvant + inf., ayant la capacité de" : ...et moult fort le commencèrent à envayr et assaillir poissamment et incessamment. Et tant y continuèrent que les asségez, non puissans résister, rendirent eulx et ledit chastel au roy par condicion. (MONSTRELET, Chron. D.-A., t.2, c.1425-1440, 255).

 

-

Ne pas pouvoir beau + inf. "Être totalement incapable de"

 

Rem. Vie st Evroul S., c.1350, 2985 (G. Roques, R. Ling. rom. 56, 1992, 631).

 

2.

[L'inf. est effacé (dans une comparative, une hypothétique...)] : Et l'ennemy de moy trichier, Tant conme il pot, lors se pena (Mir. st J. Paulu, c.1372, 134). Et, quant les chienz seront a li venuz, il doit geter les bouelles ou milieu de touz, si en preigne qui pourra. (GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, 183). Je ne dy pas pourtant que on ne leur doy aidier qui pourra. (JUV. URS., T. rever., 1433, 87). Pour ce, faictes pour luy ce que vous pourrez (BUEIL, II, 1461-1466, 99). Crachés luy trestous au visage, Si vous pouvés (Pass. Auv., 1477, 212). Pour toy saulver, de la descent [de la croix], Si tu puis (Pass. Auv., 1477, 218).

 

-

En partic. [L'inf. est effacé après un superl.] : Celle nuit, chascun se aysa le mieulz qu'il peult. (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 43). Alors montasmes jusques au hault, et sy avant que plus ne poyons se ne fussions tumbez dedens (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 146). La demoiselle de sa maistresse est escollée et advoée que mieulx on ne pourroit (C.N.N., c.1456-1467, 74). ...marchant le plus soef qu'oncques peust, le courtois gentil homme (...) laissa couler ung gros sonnet (C.N.N., c.1456-1467, 124). ...il se vint bouter en son lieu et besongna le mieulx qu'il peult (C.N.N., c.1456-1467, 410). ...et tousjours le faisoit le plus sagement qu'il povoit (BUEIL, II, 1461-1466, 145). Faictes du mieulx que vous pourrez (LA VIGNE, S.M., 1496, 314).

 

.

À ce qu'il peut. "Le plus possible (selon ses capacités), de son mieux" : Le cappitaine de Crathor, qui fut rusé et saige, fist semblant d'avoir grand paour et hastoit ses gens à ce qu'il povoit (BUEIL, I, 1461-1466, 134). Puis, le duc d' Ath se retira en fors chasteaulx et fortes places et quist alliances de princes voisins ad ce qu'il peust. (BUEIL, II, 1461-1466, 250).

 

3.

[L'inf. est représenté (par un quantificateur, un indéfini...)] Pouvoir + mot de quantité (tout / plus / tant...) "Avoir la capacité de faire + mot de quantité" : ...Le maistre qui tout peut et vault, Qui n'a fin ne conmencement (Mir. st Ign., 1366, 92). Ainsi cellui qui puet tout depart et retranche les puissances et de sa pardurable eternité mue les choses qui soubz le temps decourent (CHART., Q. inv., 1422, 2). Jhesus est filz de Dieu le pere, Et pour ce peult tout ce qu'il veult. (Pass. Auv., 1477, 160). Mes pour quoy ara ce prophete [Jésus] Plus grant puissance que vous tous, Veu qu'il est seu et entre vous Estes plus de douze ensemble ? Plus peuvent douze, si me semble, Que ung tout seul en tout affaire. (Pass. Auv., 1477, 160). Tien ma massue Et frapes tant que tu pourras ! (Pass. Auv., 1477, 199).

B. -

Empl. abs. [D'une pers.]

 

1.

[Capacité sexuelle (de l'homme)] "Ne pas être impuissant" : ...fut tresmal fortuné ce gentil seigneur ; et pour ce qu'il ne peut, quand sa dame voulut, je tien, moy, quand il eut depuis bien la puissance a commendement, le vouloir de sa dame fut hors de ville. (C.N.N., c.1456-1467, 196).

 

2.

"Avoir la puissance d'agir"

 

-

Prov. : Qui ne puet ne puet ["Qui n'a pas la puissance d'agir, ne peut rien faire"] (CH. D'ORLÉANS, Rond. C., 1443-1460, 356). Qui ne peult ne peult. (Myst. Viel test. R., t.6, c.1450, 194). [Prov. H., 199 ; Morawski, 2039]

 

-

Pouvoir moult. "Être puissant" : [Le château de la dame est pris d'assaut (métaphore sexuelle)] Gallant, peu doubte vostre assault ; J'ai chastel qui moult peult et vault. (Six dessins dialogués à double sens, éd. K. Baldinger, c.1470. In : Trav. Ling. Philol. 31, 1993, 28).

C. -

Empl. intrans.

 

1.

Pouvoir + compl. adv. ou prép. en empl. adv. (hors / en / dedens / contre / encontre / envers / sans...) "Avoir la capacité d'agir + compl. adv."

 

a)

Pouvoir qq. part. "Avoir la capacité d'accéder qq. part" : Mais quant il vey qu'il ne pouoit dedens a cheval, il mist piet a terre, puis entra dedens (Percef. III, R., t.1, c.1450 [c.1340], 229). Pour ce, respondy le portier, que se mal voulés a mon seigneur, vous ne pouez ceans (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 222). Et ont iceulx sommelliers la clef de sa chambre (...) et peuvent à toutes heures devers le prince (...). Iceulx escuiers peuvent à toutes heures en la chambre du prince, s'il n'y a conseil (LA MARCHE, Mém., IV, Pièces annexées, 1474,,, 16).

 

-

[Contexte métaph.] Pouvoir en qqn. "Accéder en qqn, au coeur de qqn (pour y trouver l'amour)" : [Passelion, mis dans la fange par Zéphir, ne mérite pas l'amour de Morguanette] Morguanette vous salue sans amour, car mieulx puet qu'en vous ["elle est en mesure de trouver l'amour mieux qu'en vous"] (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 882). [Éd. : "elle mérite mieux que vous"]

 

-

Bien pouvoir + compl. de lieu "Accéder partout qq. part, bien connaître (un lieu)" : Tant le servi bien Cuer d'Acier Que le chevalier l'eut moult chier, Car bien pouoit la terre estraigne. (Percef. III, R., t.2, c.1450 [c.1340], 358). [Éd. : "être à l'aise dans"]

 

b)

Pouvoir hors de. "Avoir la capacité de sortir de" : ...ne cuidons point qu'ilz puissent hors d'illecq fors par la porte (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 237). ...l'en n'en pouoit hors a piet ne a cheval (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 242). [Autres ex. p.242, 260 et 266 ; Percef. III, R., t.1, c.1450 [c.1340], 2, 76...]

 

c)

Pouvoir contre. "Avoir la capacité (d'agir) contre" : Ja soit ce que nous savons bien Que nul ne peut par ses effors Contre vous, tant par estes fors. (Mir. prev., 1352, 239). De vos pleurs vous fault deporter Et prendre en vous ung reconfort, Nuls homs ne puet contre la mort (MARCADÉ, Myst. Pass. Arras R., a.1440, 106). Or avant, puis que chacun est contre moy, il fault bien que je me taise et que j'accorde tout ce qu'on veult, car je ne puis tout seul contre vous tous ! (C.N.N., c.1456-1467, 371). ...de ma fortune, Contre qui ne puis bonnement, Qui si faulcement me fortune, Me vient tout ce gouvernement. (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 32).

 

-

[De la raison] : Car raison est en eulz aussi comme destaincte, et en ont si peu et a si petit de vigueur que elle ne peut contre teles concupiscences. (ORESME, E.A.C., c.1370, 381).

 

-

Pouvoir à l'encontre. "Être en mesure de s'opposer" : ...pource que je suis celle qui pas ne veil troubler, ou je puisse bonnement a l'encontre, je suis contente d'emprandre l'estat de mariage (C.N.N., c.1456-1467, 170).

 

d)

Pouvoir sans. "Avoir la capacité d'agir sans qqn, être en mesure de se passer de qqn" : Sire, vous savez que saint Pierre, Quant il vivoit encor en terre, Vous ordena son sucesseur. L'Eglise ne puet sans pasteur (Mart. st Pierre st Paul R., c.1430-1440, 158). ...tant fu la hantise amoureuse dez deux damez que l'une ne pooit sans l'autre et de pluiseurs chosez secretez se devisoient souventefois aussy priveement que se ce fussent deux seurs germainez (Comte Artois S., c.1453-1467, 121). Tiercement ay entencion de comparer l'un à l'autre [le courtisan et le soldat], et de monstrer que l'un puet sans l'autre et non au contraire. (BUEIL, I, 1461-1466, 46).

 

Rem. Ex. de G. LE MUISIT, c.1347-1353, et de FROISS. ds T-L VII, 1411, l.39-50.

 

-

[D'une chose] : ...s'ainsi n'estoit que elles voulsissent du tout entendre a la vie contemplative et laissier la vie active, si que j'ay dit. Car la contemplative puet bien sans l'active, mais la droicte bonne active ne puet sans aucune partie de la contemplative. (CHR. PIZ., Trois vertus W.H., c.1405, 48).

 

e)

Au fig. Pouvoir en qqc. "Avoir la capacité d'agir en qqc." : ...car ne veoit homme vivant par qui moyen espérast venir à sa paix, qui mal estoit du duc son prince, et à sa desserte, mal du seigneur de Croy, lequel pouvoit moult du roy ["du côté du roi"] en son fait (CHASTELL., Chron. K., t.4, c.1456-1471, 432).

 

-

Pouvoir envers qqn. "Avoir la capacité d'agir sur qqn, avoir de l'influence sur qqn" : ...la veufve, qui moult pouvoit envers le duc, s'en montra durement indignée envers les autres (CHASTELL., Chron. K., t.4, c.1456-1471, 268).

 

-

Ne pouvoir ne hors ne ens. "Ne pas avoir la capacité de maîtriser, de saisir qqc." : ...et [oyant l'alarme des Gantois, le duc] comme ["comme si"] féru se trouvast d'un maillet au front, se trouva esmerveillé de ceste besongne, et n'en pouvoit, ne hors, ne ens, dont ceci pouvoit venir (CHASTELL., Chron. K., t.5, c.1456-1471, 262).

 

2.

Pouvoir qq. part. "Avoir la capacité d'être qq. part, de tenir qq. part, de se trouver contenu qq. part" : ...une grant loege de feuillie, ou il puisse trois compaignons ou quatre tous en estant. (HENRI FERR., Modus et Ratio, Livre deduis T., c.1354-1377, 295).

 

-

[D'une chose] "Tenir qq. part, pouvoir être contenu qq. part" : Le chaut, le froit, le sec, le moiste, ne porroient en une boiste Que l'un l'autre ne consumast (LE FÈVRE, Respit Mort H., 1376-1380, 29). SAINT ANDRY. Nous avons trouvé douze mandes Pour bouter tout ens qui vouldra. SAINT PHELIPE. Je ne sçay se tout y pourra, Car les biens sont fort sumptueux (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 174). Lors lui souvint d'un anel qu'il avoit, qui tant estoit petit qu'il ne pouoit en son doy (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 33). Les ennuys ou je perche Ne pourroyent pas a une bien grant huche (MESCHIN., Lun. princes M.-G., c.1461-1465, 14).

 

Rem. MICHEL, Myst. Pass. J., 1486, 8065 (Prenés du lait d'une nonnain Autant que pourroit a la main) et 10, 343 (Je ne scay si tout y pourra) ; J. Orr, Rom. Philol. 19, 1965, 376.

II. -

[Les conditions de possibilité tiennent à la norme, au droit, à l'usage... ou à une autorisation donnée ; marque l'absence d'empêchement déontique]

A. -

[Empl. d'auxiliaire] Pouvoir + inf.

 

1.

"Avoir la permission de, être en droit de, être en conformité avec une norme ou une autorisation en" : Maris puet a sa femme traire, Et la femme avec son mari, Pour hoirs avoir (DESCH., M.M., c.1385-1403, 313). Le XVIIIme est de ceulz qui pevent porter banieres. (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 6). RUBEN. (...) Prenons quelque place retraitte, Et y allons prendre deduyt Ung petit. BALLA. (...) Bien vous pouez venir coucher Avecques moy pour ung petit ["c'est bien votre droit"], Et la faire a vostre appetit (Myst. Viel test. R., t.2, c.1450, 302). Elles s'en pevent bien aller quand leur plaira, monseigneur, dist maistre Jehan. Ne font pas ? (C.N.N., c.1456-1467, 225). Je cogneuz (...) deux gentilz hommes, beaulx compaignons, bien assoviz et adressez de tout ce qu'on doit ou peut loer [en] ung gentil homme vertueux. (C.N.N., c.1456-1467, 362). ...[il] s'enhardit de demander a sa dite hostesse sa courtoisie, c'est asavoir qu'il peust estre son amy et elle sa dame (C.N.N., c.1456-1467, 386). ...Jehan requist que avecques elle il peust soupper, affin de eulx mieulx ensemble deviser (C.N.N., c.1456-1467, 389). ...n'estes vous pas bien vestue, bien logée, bien servye, et de tout ce que gens de nostre estat pevent par raison desirer bien convenablement partie ? (C.N.N., c.1456-1467, 470). ...[les perdrix] ne furent pas si tost mises a la broche que, par les paroles que je sçais, je les charmé tellement que en substance de poisson se convertirent ; et en pouriez trestous qui estes icy menger, comme moy, sans peché. (C.N.N., c.1456-1467, 583). [Le bourreau, s'adressant à Jean-Baptiste] Jehan, plus ne puis cy arrester ; Guyeres plus n'est longue ta vye (Pass. Auv., 1477, 100). Qui mal a, et n'a failly, Bien se peult douloir ["il est bien en droit de se plaindre"]. (DU PRIER, Songe past. D.-M., c.1477-1508, 105).

 

2.

[Idée plus ou moins vague de légitimité (de conformité à la raison, à l'usage, à l'attente...)] : Fille, or t'a bien Dieu grace fait : De ce puet estre ton cuer fis. (Mir. st J. Cris., c.1344, 283). DEUXIESME SERGENT. (...) Sa, sa ! boutez vous par cest huis ; Or demenez la voz deduiz Hardiement. PREMIER SERGENT. Il peut bien dire vraiement Qu'il est en lieu obscur et noir (Mir. st Ign., 1366, 87). ...se peut intituler le livre de Cent Nouvelles nouvelles. (C.N.N., c.1456-1467, 22). ...vous povez bien penser qu'elle [la confession] fut bien nouvelle et estrange ! (C.N.N., c.1456-1467, 61). ...il ne m'en chault pas tant qu'on pourroit bien dire (C.N.N., c.1456-1467, 245). ...il n'avoit besoigné sur son harnois, que l'on peut appeller cuirasses, toutes les foiz qu'elle eust bien voulu (C.N.N., c.1456-1467, 516). Je yrey plus tost qu'a l'offerende ! Sans jurer vous m'en pouvés croyre. (Pass. Auv., 1477, 90). J'ay des biens prou, comme pouez pencer (LA VIGNE, S.M., 1496, 507).

 

-

[Nég. au nom de la raison, de l'usage...] : Vous ne povez nyer que ung tel (...) ne soit de vous entretenu. (C.N.N., c.1456-1467, 234).

B. -

"Avoir le pouvoir, le droit de faire qqc." : Le duc a ung grant maistre d'ostel qui peult à tous consaulx ["qui a le droit de prendre part à tous les conseils"], tant de la justice comme de la guerre ; et se doibvent adrecier à luy reçoiptes et coeulloites de princes et d'ambassades. Il peut servir aux quatre nataulx de l'an, et quant le prince tient estat solemnel. (LA MARCHE, Mém., IV, Pièces annexées, 1474,,, 13).

 

-

Part. prés. en empl. subst. masc. "Celui qui a le droit et la possibilité de faire qqc. dans un domaine précis" : ...sur l'obligacion de touz ses biens et des biens de ses hoirs, meubles et héritages, ou qu'ilz soient, présens et advenir, pour estre vendus et despendus du povan d'office de justice, sans nul plet ordenné (Cartul. Hôtel-Dieu Cout. L., 1415, 234).

III. -

[Les conditions de possibilité sont dans les choses, dans l'état de choses (y compris du sujet) ; auxiliaire marquant l'absence d'empêchement aléthique]

A. -

[D'une pers.]

 

1.

"Avoir la possibilité de"

 

Rem. Sens le plus général, que tous les autres impliquent ; les ex. sont innombrables.

 

a)

Pouvoir + inf. : Se croire vouloies conseil, Encor la pourras tu ravoir Et aussi clérement veoir Conme onques fis. (Mir. st Panth., 1364, 327). ...ceuls qui sont presentement, Peulent, et a moins de tourment [,] Garder leur tropel, s'ilz vouloient, Qu'au commencement ne faisoient Les apostres (DESCH., M.M., c.1385-1403, 170). ...s'il n'eust eu les yeulx bandez et couvers, il povoit veoir apertement ce dont ung aultre a qui rien ne touchoit se perceut a l'oeil. (C.N.N., c.1456-1467, 253). ...[elle] prioit Dieu journellement que bref le peust ravoir et reveoir par deça [son mari], si encores il estoit vif (C.N.N., c.1456-1467, 423). ...bon escuyer de recommencer sa chanson de tousser, voire si treshault qu'on l'eust bien peu oyr de la chambre (C.N.N., c.1456-1467, 436). ...de tout ce dont on peust demander conseil d'homme, nostre bon maistre avoit la huée. (C.N.N., c.1456-1467, 468).

 

-

Empl. pronom. à sens passif : ...entre les aultres nostre gentil homme, qui mignon se povoit bien nommer ["que l'on pouvait bien..."], n'en fut pas le mains contant (C.N.N., c.1456-1467, 80). ...debvoir avoit esté fair de recouvrer le roy par amiable voye, se faire se povoit (MOLINET, Chron. D.J., t.1, 1474-1506, 622).

 

-

Prov. : On ne peult faire que en faisant. (COQUILL., Oeuvres F., 1478-p.1494, 242).

 

-

[L'inf. est effacé] : Quant il fait ce qu'il peult, il doit assez suffire. (Flor. Octav. L., t.1, c.1356, 89). C'est(e) [l'ânesse] une beste debonnaire, Menés la luy ou vous vouldrés, Je n'y contrediroie jamés ; Ramenéz la quant vous pourés. (Pass. Semur D.M., c.1420 [1488], 154). ...quand il sera possible, je feray autant pour luy, si je puis. (C.N.N., c.1456-1467, 42).

 

-

Que l'on puisse / la ou l'on puisse. "À condition de pouvoir (le faire), si c'est faisable, là où c'est faisable" : ...et li tent le poing et garde que il [le faucon] ne saille hors sans saillir sus ton poig, que tu puisses, et li donne une bechiee de char (HENRI FERR., Modus et Ratio, Livre deduis T., c.1354-1377, 189). BERTHE. Pére, ne met nul contredit En chose que de moy faciez. Certaine sui que vous puissiez [l. , que vous puissiez, "si c'est faisable"] Que bien n'aray ["que ce ne sera que pour mon bien"]. (Mir. Berthe, c.1373, 159). ...je ne vouldroie pas que l'en m'y trouvast que je ne fusse en estat pour moy deffendre. - Sire, respondit elle, il ne vous y sçavront point la ou nous puissons, car nous seriens aussi bien en peril de mort comme vous. (Percef. III, R., t.1, c.1450 [c.1340], 108).

 

-

Le plus / le moins / au mieux que faire se pourra. "...qu'on aura la possibilité de le faire" : ...soient vendus le plus proufitablement que faire se pourra (BAYE, I, 1400-1410, 174). Donques la personne discrete par bon avis, selon l'estat où Dieu l'a appellée et sa possibilité, se vouldra gouverner en chascune chose tout au mieulx que faire se pourra (CHR. PIZ., Ep. de la prison de vie humaine, 1418. In : S. Solente, Bibl. Éc. Chartes 85, 1924, 36). Et, pour aller jusques à eulx seurement, noz escarmoucheurs rebouteront les leurs au plus qu'ilz pourront, affin qu'ilz n'apperçoivent point ce que nous ferons, ou au moings le moings que faire se pourra. (BUEIL, II, 1461-1466, 199).

 

.

Prov. Qui ne fait mie quant il peut, il ne fait mie quant il veut : On dit : qui ne fait quant il puet, Il ne fait mie quant il veult. (LE FÈVRE, Lament. Math. V.H., c.1380, 229).

 

Rem. DI STEF., 325 ; R. M. Bidler, M. fr. 33, 1993, 181 (GERS. ; EVR. CONTY, Eschez amour. mor. G.-T.R., c.1400 ; Mir. ste Genev. S., c.1410-1420, 124).

 

-

Pouvoir que. "Avoir la possibilité de faire que" : Et ne soustendront onques que ilz peüssent que leurs amis eüssent tristece se il n'estoit ainsi que l'apeticement ou diminucion de leur propre tristece ne excedast tres grandement la tristece de leur amy (ORESME, E.A., c.1370, 492).

 

b)

[Sous la négation ; l'empêchement existe] Ne pas pouvoir + inf. "Ne pas avoir la possibilité de" : Dame vaillant, c'on ne peut trop loer... (Mir. ev. arced., c.1341, 145). NOSTRE DAME. Joseph sire, cuer qui se fie En Dieu ne peut estre periz (Mir. nat. N.S.J.C., c.1343, 208). ...et si te mande Agriano que tu fuies hors du royaume et te va pourchacier ailleurs, car cy ne pourras tu durer d'ores en avant (Bérinus, I, c.1350-1370, 126). Mais or me puys je bien tres dolente clamer Qu'avec les bons pastours ne vous pouu louer ["je ne vous pus louer" ; l. povu ?] (Pleur ste âme B., c.1375-1425, 62). ...et en nul des autres fondiques ne peulent estre herbergez les pelerins (Voy. Jérus., c.1395, 78). ...Sans non [explétif] pouair avoir loysir (Rond. poés. XVe s. R., c.1400-1500, 114). ...les vertus ne les vices Des parens, soient sage ou nices, Si ne font mie a imposer Aux enfans, fors tant comme user Et ensuivir leurs meurs ilz veulent, D'autre chose ennoblir ne peulent. (CHR. PIZ., Chem. estude P., 1402-1403, 178). Nostre Seignieur m'a bien amé De m'envoyer telle nouvelle De mon filz ; on ne peult plus belle En ce monde de homme compter. (Myst. st Bern. Menth. L., c.1450, 162). Il ne peut obtenir ung tout seul mot (C.N.N., c.1456-1467, 116). Les aultres disoient qu'ilz ne pourroient croire que ce fust verité (C.N.N., c.1456-1467, 222). ...refuser ne luy peut nullement ce que pluseurs devant et après ne peurent obtenir. (C.N.N., c.1456-1467, 227). Vous dictes tresbien, dit le curé, et par ma foy, vous ne povez mieulx faire que de vous en despescher (C.N.N., c.1456-1467, 295). Haro, ilz ne peuvent actandre Au partuis, car il est trop bas. (Pass. Auv., 1477, 198).

 

-

[Inf. passif] : ...mesires Rauze ne polut ["ne put être trouvé" ; "on ne put trouver..."] eistre troveis (STAVELOT, Chron. B., a.1447, 501). ...si tresbien se caicha qu'il ne povoit estre apperceu. (C.N.N., c.1456-1467, 50).

 

-

[Inf. pronom. à sens passif] : La bonneürté souvereinne Et la felicité certeinne Sont souverein bien de Nature Qui use de Raison la pure ; Et tels biens, on ne les puet perdre. Pour ce comparer ne aërdre Ne s'i puelent cil de Fortune ["on ne peut y comparer..."]. Car on voit - et chose est commune - Que qui plus en a, plus en pert. (MACH., R. Fort., c.1341, 90).

 

-

[L'inf. est effacé] : ...il me fault paier la cotte simple de satin ! Et vrayement je ne puis (C.N.N., c.1456-1467, 189). Et la cygoingne s'en troubloit, car, quant elle se vouloit reposer sur ses oefs ou sur ses petis, elle ne pouoit pour le jargon de l'arondelle. (COLART MANS., Dial. créat. R., 1482, 187).

 

c)

[L'empêchement est plutôt dans le sujet lui-même] : Nostre maistre, de nostre vie Ne vous pourrions habandonner. (Pass. Auv., 1477, 87). Las, quel torment ! Nepveu, coment - pouvés vous souffrir tant de maulx ? (Pass. Auv., 1477, 210). Las, mon amoreux, et coment Vous porrey je ycy laiser [l. laisser] ? (Pass. Auv., 1477, 264).

 

d)

Au subj. [Pour marquer le souhait, l'imprécation] : Perdre puissiés vous les artoys ! (Pass. Auv., 1477, 209). Qu'on te puisse au gibet deffaire, Filz de putain (LA VIGNE, Munyer T., 1496, 230). Je puisse Mahon regnyer Se je sçay plus que je doy dire ! (LA VIGNE, S.M., 1496, 292). Jupiter te puisse mauldire ! (LA VIGNE, S.M., 1496, 292).

 

2.

"Être susceptible de"

 

-

[Inf. passif] : Encor vous puÿssiés estre pis assenés ["Il était possible que vous fussiez..."]. Dieu le fait pour vo bien ; frere, prenés l'en grés. (Tristan Nant. S., c.1350, 678).

 

-

[Inf. actif à sens passif] : ...si ce pendant il vouloit venir parler a elle, elle orroit voluntiers ses devises ; mais, pour Dieu, qu'il y vint si secretement qu'elle n'en peust avoir blasme. (C.N.N., c.1456-1467, 389). Et, pour vous dire quant à la mort, aussi tost peuvent mourir gens de court comme vous, et advient souvent que aussi tost meurt ung autre homme comme ung homme de guerre. (BUEIL, I, 1461-1466, 44). Ainsi comme a dit nostre compaignon qui a parlé avant moy, les malheurtez qu'on puet avoir à la guerre, peut-on aussi bien avoir par sieuvir la court, et des autres encores plus largement, comme povreté, paine, travail, estre mal couchié, mal repeu, mal logié (BUEIL, I, 1461-1466, 54).

 

-

[En tournure nég.] "Ne pas être susceptible de, ne pas être exposé au risque de" : Nul jamais triste Es cieulx ne peult estre Qui soit ministre De Dieu le grand prestre, Mais qu'il soit juste Et leal ad son maistre Nostre redempteur. (Pass. Auv., 1477, 101). Quoy que soit, on ne peut mesprendre D'aler garder le corps Jhesus, Fin qu'on n'y face nulz abus (Pass. Auv., 1477, 274). Qui juste vit, ne peult mesprendre (DU PRIER, Songe past. D.-M., c.1477-1508, 111).

 

-

[En tournure nég. comparative] : Adonc la merchia le pelerin, qui avoit si grant joie que plus ne pouoit. (HENRI FERR., Modus et Ratio, Songe pest. T., c.1354-1377, 137). Il fut sy enivreiz d'amour que plus ne pouoit. (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 6). Sa mere, toute enragée, forcenée et tant marrie qu'on ne pourroit plus, la voyant ainsi deshonorée, si prend a la tanser (C.N.N., c.1456-1467, 69). ...[elle] estoit tant gracieuse qu'on ne pourroit plus. (C.N.N., c.1456-1467, 315). ...le mary et le gentil homme son cousin (...) estoient tant aises qu'on ne pourroit plus. (C.N.N., c.1456-1467, 354).

 

3.

N'(en) pouvoir plus. "Être au bout de ses forces" : ...et quant il [le cerf] est si viel que il ne peut plus... (HENRI FERR., Modus et Ratio, Livre deduis T., c.1354-1377, 118). [en enfer] ...les chetives ames sont si desconfortees que elles ne peuent plus (HENRI FERR., Modus et Ratio, Songe pest. T., c.1354-1377, 18). Et dit que un tyrant avoit violee sa fille et il contretint longuement son ire et la celoit. Et quant il ne pot plus, il se occist de deul et de douleur. (ORESME, E.A.C., c.1370, 390). Ceste durté cruelle et dure Et ceste paine tant me dure Que plus n'en puis (Au grey d'amours F.-H., c.1400-1500, 210). ...il fist tant que son cheval n'en pouoit plus. (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 32). ...la damoiselle, qui plus ne povoit si le cueur ne luy sailloit du ventre, ne peut oncques dire ung seul mot (C.N.N., c.1456-1467, 213). ...tant luy fist elle recommencer qu'il n'en peut plus. (C.N.N., c.1456-1467, 348). Le bon homme, qui ne povoit plus s'il n'enrageoit, combien que semblant ne fist, voulut aller en sa chambre (C.N.N., c.1456-1467, 443). PATHELIN. Hée ! m'amye chere, Je n'en puis plus, à bref parler. Par ma foy, je m'en vueil aller. Acomplissez mon testament. (Test. Path. T., c.1470-1475, 202). Souverain Dieu, o Dieu mon pere, J'ay si grant soif que ne puis plus. (Pass. Auv., 1477, 221).

 

-

Ne pouvoir en avant. "Être au bout de ses forces" : Reconfortés, dame, vostre servant, Qui dou tout s'est donnés en vo dangier : Tant a souffert qu'il ne puet en avant (FROISS., Rond. B., c.1365-1394, 60).

 

-

N'en pouvoir mais. "Ne disposer d'aucune possibilité d'action en qqc., ne pas être responsable de qqc., n'y être pour rien" : Or voy je bien que, ainsi que violence se donne droit par la force ou elle n'a riens, en semblable maniere veult oultrecuidance confundre verité par haultaines parolles et soy descharger de ses oeuvres vituperables sur ceulx qui mais n'en pevent. (CHART., Q. inv., 1422, 37). ADAM. (...) Helas ! ilz [ceux de mon lignage] n'en peuent maiz. (Myst. Viel test. R., t.1, c.1450, 77). Madame, dist Zephir, par ma foy, il n'en peut mais s'il pourquist a mengier quant il n'y avoit aucun qui l'en administrast. (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 699). Si son furon a fourragé l'ostel, il n'en peut mais, car, des adonc qu'il est par [terrier] ou duyere, il est hors de son chastoy. (C.N.N., c.1456-1467, 161). Ainsi acheterent bien cherement les pouvres cordeliers le disme non accoustumé qu'ilz misrent sus. Dieu mesmes, qui n'en povoit mais, en eut bien sa maison brullée. (C.N.N., c.1456-1467, 226). ...il n'y eut dommage que du pouvre loup qui fut brullé, qui ne povoit mais du meffait des aultres. (C.N.N., c.1456-1467, 356).

 

-

Bien en pouvoir. "En être bien responsable" : ...bien en puis mais ! ["C'est bien ma faute !"] (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 36).

 

-

Qu'en peut-il ? "En quoi est-il responsable ?" : ...qu'en poeut il s'il en chante ? ["Ce n'est pas de sa faute si"] (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 719).

 

4.

Pouvoir bien + inf. "[L'absence de tout empêchement pour faire qqc. rendrait coupable celui qui ne le ferait pas (dont il est bien vrai qu'il ne peut dire "je ne peux pas")]" : Folie, bien vous pouez taire, Car vostre conseil ne vault rien (DESCH., M.M., c.1385-1403, 355).

B. -

[D'une chose ; l'état de choses est tel qu'il ne fait pas obstacle à qqc.]

 

1.

Pouvoir + inf. "Être susceptible de" : Car je say bien c'est une ruse Qui ne peut estre. (Mir. abbeesse, 1340, 70). Pleurer vous peut estre nuisant, Seigneurs, et sachiez riens ne vault. (Mir. ev. arced., c.1341, 115). Mais ce ne puet valoir, car se une chose dure plus que l'autre il ne s'ensuit pas pour ce, que il soient de diverses especes. (ORESME, E.A., c.1370, 114). Item, aus qualités des vertus par lesquelles sont faites les influences peuent estre alterees les parties du ciel selonc la diversité des regars et des disposicions que il ont par leurs mouvemens. (ORESME, C.M., c.1377, 82). ...le grant dommaige Qui puet venir par mariaige (DESCH., M.M., c.1385-1403, 41). ...sans point d'adversité, Qui nous ait peu grever en rien (Myst. Incarn. Nat. L., t.1, c.1454-1474, 26). ...tout ce qu'il pensoit qui peust plaire a sa dame luy estoit possible (C.N.N., c.1456-1467, 343). ...rien ne luy venoit a son entendement qui peust eloigner ce maudit mary (C.N.N., c.1456-1467, 183). ...pensez que je suis noble homme, et pour chose qui me peust advenir ne vouldroye faire chose qui tournast a vostre deshonneur (C.N.N., c.1456-1467, 388). Mes voiant III ou IIII exemples pooir souffire droit cy... (CHASTELL., Temple Boc. B., 1463-1464, 121). J'en previs la chose pooir advenir ainsy (CHASTELL., Temple Boc. B., 1463-1464, 129). Dieu en est le juge, à qui les choses occultes ne peulent estre mucées, ne absconses. (LA MARCHE, Mém., I, c.1470, 134). Il n'est monoye, Joyau, viande, voye, Qui me peust mon corps resjoyr, Ou que je soye. (Pass. Auv., 1477, 109).

 

-

Au subj. [Pour marquer le souhait, l'imprécation] : Tenés, diables, mangés trestous ! Les os vous puissent estrangler ! (Pass. Auv., 1477, 250). Sortez dehors, que la malle tempeste, La malle rage et malle mort aussi, Villaynement, ains que partez d icy, Vous puisse a tous fouldroyer corps et teste ! (LA VIGNE, S.M., 1496, 137).

 

2.

[En tournure impersonnelle ; les choses sont telles que...] : De quoy leurs propos furent, il se peut assez penser. (C.N.N., c.1456-1467, 418). Mais il y puet advenir beaucoup de choses, tant à pié comme à cheval, qui ne sont pas icy escriptes. (BUEIL, I, 1461-1466, 162).

 

-

Vienne / advienne que pourra : ...et du surplus avienne ce que pourra. (LA SALE, J.S., 1456, 150). Asalt, asalt ; vieignhe que pourré, Car le plus fort l'emportera, Ou je mourrey a la parsuite. (Pass. Auv., 1477, 205).

 

-

Il me peut bien + inf. : Bien me pouoit a souvenir De ceulz qui ne doubtent mourir (THOM. SALUCES, Chev. errant W., 1394, 75). [Est-ce un verbe asouvenir ? Ou pouvoir à + inf. ?]

 

-

[En tournure nég.] : D'ainsi plourer avez grant tort, Quant il ne peut estre autrement. (Mir. ev. arced., c.1341, 121). ANTHURE. (...) Que Dieu vostre plus grant desir Vous enterine. LA MÉRE ANTHURE. E ! lasse, je ne sui pas digne, M'amie : il ne peut avenir. (Mir. st J. Cris., c.1344, 286). ...trop sui malade : Le corps m'est si pesant et fade Que plus ne peut. (Mir. st J. Cris., c.1344, 303). Ma besongne si va si mal Que ne peut pis. (Mir. mère pape, c.1355, 377). Ha ! monseigneur, dist elle, il ne se peut faire ainsi. (C.N.N., c.1456-1467, 123). Toutesfoiz il ne peut estre aultre, et fault que vous en passez tel qu'il est (C.N.N., c.1456-1467, 471).

 

.

Il ne peut que + subj. : Je vous ay pieça dit, biau fiex, Qui ne croit a mére et a pére Il ne peut qu'il ne le compére. (Mir. roy Thierry, c.1374, 265).

 

-

Il ne peut estre que + subj. : ...sont plus de deux heures qu'il y est. Il ne peut estre qu'il ne soit beaucop ennuyé. (C.N.N., c.1456-1467, 269).

IV. -

[Il se mêle plus fortement qu'ailleurs à l'idée de possibilité celle, épistémique, d'incertitude, de non-connaissance ; auxiliaire marquant l'éventualité (le fait que décrit la proposition est envisageable, sans être certain)] "Être envisageable"

 

Rem. Les limites avec III, surtout III B, sont imprécises ; le possible étant par nature ce qui n'appartient pas au monde actuel, il s'y mêle toujours de l'incertitude. Mais cette incertitude tend ici à prédominer ; l'auxiliaire pouvoir prend ainsi une valeur plus ou moins nettement épistémique.

A. -

[En tournure impersonnelle] : ...et vous enfourmez par les sages de la coustume du pais et de son droit [du droit de la dame de Leon sur la terre de Bonnevillete] et quoy et combien li empeut [l. em peut] et doit appartenir ["dans quelle mesure il est envisageable ou que l'on doit envisager que cette terre lui appartient"] (Actes Ch. Blois J. Penth. J., 1351, 127). ...Et l'amour et la cognoissance Qu'il puet avoir en la science. (LA BUIGNE, Rom. deduis B., 1359-1377, 370). Nous avons oy les parties, Or fault bien noter : Les parties Des raisons qui cy proposees Nous ont esté, soient pesees Par mon conseil, qui ordener Bien en sara et discerner Tel droit comme il y puet avoir. (CHR. PIZ., Chem. estude P., 1402-1403, 258).

 

-

Bien peut estre que : Bien peut estre qu'en recompense de ses maulx la gouge en eut depuis pitié (C.N.N., c.1456-1467, 457).

 

-

(Il) se peut faire. "C'est envisageable" : Sire, Dieu vous en sache gré, Mais il ne se peut faire ainsi. (Mir. mère pape, c.1355, 394). D'une chose ci nous parlez Qui ne se peut faire (Mir. fille roy, c.1379, 39). Dont, pour le present, considerons se il se peut faire raisonnablement (CRAP., Cur Deus, De arrha B.H., c.1450-1460, 226). Estes vous deliberé de ainsi le faire ? Il respondist : Oil, et plus grant, s'il se peut faire (BUEIL, II, 1461-1466, 185).

 

-

V. peut-estre

B. -

[En dehors de l'impersonnel (mais glosable par "il est envisageable que", "peut-être", "éventuellement")] : Et quant il leur plaist a deffaire Ce qui leur puet estre contraire ["ce qui leur est éventuellement contraire"]... (LA BUIGNE, Rom. deduis B., 1359-1377, 134). Vous n'en pouez tousdis que mieulx valoir [c'est la seule hypothèse envisageable]. (GRANDSON, Poés. P., c.1360-1397, 306). Mais quant je pense a ceste fable, Elle puet estre veritable ["il est envisageable qu'elle le soit"] (DESCH., M.M., c.1385-1403, 36). Or allon, car saison est ; Bien pouon avoir trop songé ["C'est fort possible, c'est tout à fait envisageable"]. (Myst. Viel test. R., t.3, c.1450, 4). ...te semble il que je ne soye ennuyé, qui veulx que je me passe de la char de ma femme. Tu peuz penser, par ma foy, que ["il est envisageable que tu penses que, sans doute penses-tu que"] j'en suys aussi saoul que tu es de pastez (C.N.N., c.1456-1467, 83). ...encores se peust passer ceste nuyt sans aultre chose a faire (C.N.N., c.1456-1467, 102). ...la dicte damoiselle luy pria moult doulcement que en gré il voulsist prendre le plaisir qu'elle luy avoit peu faire (C.N.N., c.1456-1467, 390). Quelque devoir que nostre mary peust faire, il ne peut trouver la maniere d'estre receu a cest escu (C.N.N., c.1456-1467, 498). ...et moy remis lors en esperit, commenchay a penser a ceste vision et notay bien que grant mistere y pouoit avoir (CHASTELL., Temple Boc. B., 1463-1464, 195).

 

-

[Au cond. ; suivi de bien, pour exprimer la crainte d'une éventualité fâcheuse] : Les princes nous porroyent bien nuyre. (Pass. Auv., 1477, 263).

 

-

On ne peut mieux. "Il n'est pas envisageable de faire, de trouver mieux" : ZEBEL. (...) Vezci vostre enfant ; couchié l'ay Au miex que je couchier le say, Se m'aist Diex. NOSTRE DAME. Zebel, m'amie, on ne peut miex (Mir. nat. N.S.J.C., c.1343, 224). LE MARQUIS. Dame, j'ay oy un sermon Bon et bien fait. LA MARQUISE. Sire, on ne peut miex par souhait. (Mir. marq. Gaudine, 1350, 125).

 

-

Qu'on peut. "Qu'il est envisageable de faire, de trouver" : MALIFERAS. Droissons la [la lance] droit a la poytrine ! Gardons bien qu'elle vaise droit. ALEXANDRE. Elle est si tresbien qu'on pourroit. Boute, Longis ; boute fort, boute ! (Pass. Auv., 1477, 231).

 

.

[Dans une évaluation] : Celle dame avoit une fille, la quelle povoit bien avoir environ de VIIJ. a IX. ans (ARRAS, c.1392-1393, 207). ...il avoit bouté en ung de ses doiz ung aneau d'or garny d'un beau gros dyamant qui bien povoit valoir la somme de trente nobles. (C.N.N., c.1456-1467, 390). ...et povoient bien estre en tout de quatre à cinq cens lances (BUEIL, I, 1461-1466, 92). Et povoit bien avoir troys cens hommes d'armes et quatre mille archiers soubz sa charge (COMM., I, 1489-1491, 11). ...et povoient bien estre six mille hommes à cheval très bien empoint (COMM., I, 1489-1491, 40).

C. -

[En renforcement d'une interr. partielle, directe ou indirecte ; la réponse est envisagée parmi une multitude de possibles] : PREMIÉRE NONNE. (...) Or sus, ma suer, sus sanz respit. Egar ! pas n'est dedanz son lit. Ou peut elle estre ? ["Où est-il envisageable qu'elle soit ?"] L'ABBESSE. Je ne say, par le roy celestre, S'elle n'est en l'eglise alée. (Mir. nonne, 1345, 335). ...peut c'estre ["est-il envisageable que ce soit"] ore mençonge Ceste vision, ou vray songe ? (Mir. emp. Julien, 1351, 200). J'oy dire qu'il a fait veu Que ja ne se mariera, Et que briefment prestre sera. Puet ce voir estre ? ["est-il envisageable que ce soit vrai ?"] (Mir. chan., c.1361, 157). Et dont peut il venir ceens, dit il, ne qui le nous a envoyé ? [Après l'apparition d'un homme pris pour un diable] (C.N.N., c.1456-1467, 438). Le bon homme, bien esbahy quelle chose ces sergens luy povoient vouloir, se partit incontinent (C.N.N., c.1456-1467, 510). Qui les peut ainsi devorer ? (Pass. Auv., 1477, 142). Mes dont luy peut venir femme Et renommee si tresgrande ? (Pass. Auv., 1477, 121). Hee, mon Dieu, mes ou peut il estre ? Seroit il pas alé ches sa mere ? (Pass. Auv., 1477, 123). Sces tu, Tadee, que ce peut estre, Ainsi pardonner les pechés ? (Pass. Auv., 1477, 155). Lorraine, que peult elle dire De mon nom et de ma venue ? (DU PRIER, Songe past. D.-M., c.1477-1508, 117). Le religieux, ceste chose estraigne voyant, s'esmerveilla que ce pouoit estre. (COLART MANS., Dial. créat. R., 1482, 191).

D. -

[Dans une affirmation, p. oppos. à l'attente (on pouvait penser qu'une chose n'est pas possible, et pourtant elle est réelle ; c'est donc bien qu'elle est possible)] : C'est grant noblesse de veoir le beau lieu et noble qui y peult estre [et qui y est de fait !], et le beau jardin et la belle et bone fonteine qui est dedans et qui sort par aval ladicte maison et abbaye. (Voy. Jérus., c.1395, 70).
 

DMF 2020 - Synthèse Robert Martin

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