C.N.R.S.
 
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     OUÏR     
FEW XXV audire
OUÏR, verbe
[T-L : öir ; GD : oir1 ; DÉCT : öir ; FEW XXV, 837b : audire ; TLF : XII, 709b : ouïr]

I. -

"Percevoir par le sens de l'ouïe, entendre, écouter"

A. -

"Entendre"

 

1.

Ouîr qqc. : Mes aveques ce, c'est inconvenient que les corps qui n'ont quelcunque sens et ne oiient rien ne eussent a souffrir de ce, car nous voions que les sons excellenz destruissent les corpulences des corps meismes qui sont sans vie, si comme le son du tonnerre dissipe les pierres et les plus durs corps qui soient. (ORESME, C.M., c.1377, 470). Atant se part Gieffroy et vint sur une petite montaigne, entre le point du jour et soleil levant, et voit l'ost tout quoy, et n'y oït on rien, ne que s'il n'y eust nullui. (ARRAS, c.1392-1393, 228). Ainsi comme vous ouez, attendy Gieffroy de nonne jusques a vespres qu'il ne voit ne oit nulle chose du monde. (ARRAS, c.1392-1393, 297). Tu dois entendre que l'air pesant qui se meut naturellement ou nef concave pour l'air de dehors c'est l'oye et la viennent trois accidens, si comme es aultres sens selon Galien ou .IIII. De Morbo, car ou l'oye est ostee ou appeticee ou corrumpue. Elle est ostee quant on ne oyt riens si comme en surdesse, elle est appeticee quant on n'oit point se on ne crye hault, elle est corrumpue quant elle oyt sons fremissans et bruire et les semblables (GORDON, Prat., c.1450-1500, III, 8).

 

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[Un bruit, des sons] : S'entray ens pour moy deporter, Pleins d'amoureuse maladie Et pour oïr la melodie Des oisillons qui ens estoient Qui si trés doucement chantoient Que bouche ne le porroit dire, N'onques homs vivans n'ot tant d'ire Que, s'il peüst leur chant oïr, Qu'il ne s'en deüst resjoïr En son cuer et que sans sejour N'entroubliast toute dolour, Tant avoit en euls de delis. (MACH., D. verg., a.1340, 14). Quant les gens de l'ostel oïrent Ceste clamour, tuit y courirent Pour savoir que ce pooit estre. (MACH., C. ami, 1357, 7). Certes qui n'obeira a ce son, il oïrra l'orrible tonnoirre de la sentence si tres doloreuse : "Ite maledicti in ignem eternum, alés vous en, maudis, ou feu perdurable !" (GERS., Pent., p.1389, 79). Lors commenca telle joye parmy la ville que ceulx de l'ost en oïrent bien le bruit (ARRAS, c.1392-1393, 159). Ly ost se desloge et se met a chemin. La peussiez oïr grant effroy. (ARRAS, c.1392-1393, 174). Et un pou après vespres [Geoffroy] oit un grant escroiz, et voit tout le comble de la tour trembler. (ARRAS, c.1392-1393, 297). Lors, sans plus dire, s'entrecourent sus, et s'entredonnent de grans coups et de crueulx, et oit on la noise qu'ilz font de passer et de despasser, et du tinteis des espees sur les bacinez, tout contreval la forteresse. (ARRAS, c.1392-1393, 298). Et quant ilz approcherent de l'empereur et il ouy le bruit et tumulcte et vit les gens, pouldres, et fumees des chevaulx... (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 55). Et se nous ne le [le son des sphères] oons, c'est pour ce espoir, ce dient, que ce son est de sy grant excellence qu'il confont nostre oÿe et aussy comme toute la vaint et assourdit, combien que nous oyons les autres sons qui se font entre nous, pour ce que ilz sont a nous mieulx proporcionnez (EVR. CONTY, Harm. sphères H.P.-H., c.1400, 63). A celle fin que nous ne oÿons Trop vehement le son quy passe Par l'oreille et quë il ne quasse Le organe de l'audition... (COURCY, Chem. vaill. D., 1406, 19). ...[elles] commencerent a deviser de cent mille propos. Et sembloit, pour trois qu'il en y avoit, de quoy on oyoit la noise qu'il souffiroit oïr d'un quarteron. Ces bons cordeliers, oyans ce bruit de femmes, saillirent de leur chambre (C.N.N., c.1456-1467, 202). Icy se clost le testament Et finist du povre Villon. Venez a son enterrement, Quant vous orez le carrillon, Vestuz rouge com vermeillon (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 150).

 

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Ouïr qqc. + inf. : Si oïrent le saint sonner (Vie st Evroul S., c.1350, 76). Lors print Remondin son espie qui estoit par terre, et ly contes traist l'espee, et attendirent ainsi longtemps pour savoir ce que ce seroit, et se mirent au devant du feu, au lez ou ilz avoient ouy le bois desrompre. (ARRAS, c.1392-1393, 21). ...si oït sonner trompettes et getter canons moult horriblement (ARRAS, c.1392-1393, 130). Et moy tantost de pietonner, Car quant on ouyt clarons sonner, Il n'est couraige qui ne croisse (Fr. arch. B., c.1468-1480, 33).

 

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Ouïr que + complét. "Entendre que" : Ne scet se lors par ledit Alain ou autre elle fu batue ou navrée ; car ilz n'y veoient goute, jà soit ce qu'il oïst bien que elle crioit et se plaignoit moult fort (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 506). Remondin, par Dieu, riens ne vous vault le celer ; je scay bien comment il vous va. Quant Remondin l'entent et oit qu'elle le nomme, il fu si esbahiz qu'il ne scot que respondre. (ARRAS, c.1392-1393, 25). ...le gentil compaignon, qui oyt bien que l'on passoit assez près de luy (...) print a hurter du poing a sa huche (C.N.N., c.1456-1467, 380).

 

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[Suivi d'une interr. indir.] : Oez conme il a corné fort De grant testée. (Mir. ev. arced., c.1341, 131).

 

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Empl. abs. "Percevoir les sons" : ...la estoient si plains De plours, de souspirs et de plains, Si enlaciez, si entrepris Et d'Amours telement espris Que de flair, de vëoir, d'oïr, D'odourer, de tast le joïr Perdoient ; car transi estoient, Ne nulle chose ne sentoient, Qu'Amour leur tolloit leurs cinc sens (MACH., D. Lyon, 1342, 196). Pren bien garde ou tu es assis. Considere ce que tu vois. Tu as veüe ; tu as vois ; Tu pues sentir ; tu pues oïr. Pour faire ton cuer esjoïr, Or me croy, si feras que sages Pour maintenir tous bons usages. (MACH., D. Aler., a.1349, 389). Es constitucions cotidianes borrealles, les corps sont plus fors, bien mouvables, bien coullourez, et les font mieulx oir ; font les ventres secs, mordent les yeux,font douleur en la poitrine, et s'il y avoit avant douleur, tout est acreu (SAINT-GILLE, A.Y., 1362-1365, 68). ...ne avez vous yeulz pour regarder, oroilles pour oïr, bouche et langue pour parler, bras et mains pour servir (...) ? (LA SALE, J.S., 1456, 35). L'OFICIAL. Par où l'oyés-tu ? LE TESMOING. Par l'oreille ; Car on n'ot pas du boult du nés. (Mère Ofic. T., c.1500, 123).

 

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[P. réf. à la parabole du semeur (Luc 8, 10)] : J'ay alheurs paraboles mis, Lesqueulx voyans aveugles sont, Et en ouyant sourtz deviendront. (Pass. Auv., 1477, 137). Guarison m'a donné parfaicte. Je auds, je parle, je suis en paix. Il me pardonra mes mesfaiz, Si luy plait, droit a ceste plasse. [Réf. à Marc 9, 14-27 : guérison miraculeuse d'un sourd-muet] (Pass. Auv., 1477, 163).

 

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Ouïr clair. "Bien entendre" : Les deux vaynes qui sont derriere les aureillez saigne l'on pour la maladie des aureillez et par especial à ceulx qui ont petit d'entendement de oïr cler et qui ont la voix cassé et qui doubtent de mesellerie. (LE LIÈVRE, Traité saignée W., a.1418, 15-16). SCIENCE. Quant ung cerveau est refroidé Les humeurs a cop s'en descendent Tant que les oyes sourdes rendent. Or des peusanteurs et des fes Je te supposeoie estre faiz Sourt. PARIS. Sourt ? A cela ne pensez La Dieu merci, j'os cler assez. (Exc., Science A.R., c.1465-1468, 44).

 

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Ouïr dur. "Être dur d'oreille" : Evaporacion de vin aigre chaut aide grandement a personne qui ot dur, et euvre les conduis (...) et oste les tins des oreilles. (Rustican H., 1373-1374, 114).

 

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Faire ouïr. "Conférer l'ouïe" : ...et fesoit veoir les avugles et fesoit oïr les sours et dressoit les boyteux (Veng. Nostre-Seign. F., t.1, c.1300-1400, 46). Aucune fois [les miracles se font] en creature raisonnable, comme en faisant ambuler et aler droit les boisteux, ouir les sours, susciter les mors et l'enfantement de la vierge Marie. (Somme abr., c.1477-1481, 163).

 

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N'ouïr goutte./Ne point ouïr. "Être sourd" : ...ceulx qui n'oient point (SAINT-GILLE, Comment. A.Y. L., 1362-1365, 312). Elle fait la sourde oreille a la vois du Saint Esperit, ou elle est si endormie qu'elle n'oït goute, ou elle tient ses portes fermees par les serrures et verrous de divers pechiez, ou honteusement le renvoie. (GERS., Pent., p.1389, 76). Vous semble-il que je n'oy goucte ? (LA VIGNE, Munyer T., 1496, 213).

 

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Non oyant. "Sourd" : ...une pierre (...) Qui les avugles enlumine, Qui fait oir les non oyans Et fait parler les non parlans (Mir. Barl. Josaph., c.1363, 264). Et je suis fait sicomme homme non oyant (CHR. PIZ., Psaumes allég. R., 1409, 100).

 

2.

Ouïr qqn (qui parle, qui chante, qui crie...)/Ouïr (une parole, un chant, un cri...) : Roine, en faiz et en diz Se doit en joie esmouvoir, Qui vous peut oir et voir. (Mir. enf. diable, c.1339, 19). Qui les veïst troter et courre, Herbe aporter, tapis escourre, Braire, crier et ramonner Et l'un a l'autre araisonner, François, breton et alemant, Lombart, anglois, oc et norment Et meint autre divers langage, C'estoit a oïr [à entendre cela] droite rage. (MACH., R. Fort., c.1341, 144). Les sers et les bestes sauvages Le sievoient par les boscages ; Les rivieres aler faisoit Encontremont, quant li plaisoit, Pour son chant oïr et sa harpe Qui doucement resonne et harpe. La ot mainte larme plouree En la tenebreuse valee Des ames qui entroublierent Leurs peinnes dou chant qu'escouterent. (MACH., C. ami, 1357, 83). Lors les femmes, que Dieus maudie, Feïrent trop grant renardie, Car elles feïrent ensamble Si tres grant noise, ce me samble, Qu'on ne pot oïr le chanter Qui les roches sot enchanter, Et la failli l'enchantement Qui vint de son dous chantement, N'onques puis chanson ne chanta, Bois ne rivieres n'enchanta (MACH., C. ami, 1357, 92). ...et dist aussi plusieurs paroles que elle qui parle ne pot ouyr, pour ce que ladite Margot parloit moult bas, et ne povoit entendre ce que elle disoit (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 340). ...ledit prisonnier dist telz moz : Je os en la rue gens qui me devoient venir demander ; je vois veoir se se sont ilz. Et se leva de la table et ala hors de l'ostel, et depuis n'y retourna. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 559). Et celle chante tousjours si doulcement que c'estoit grant doulcour a l'ouïr. (ARRAS, c.1392-1393, 6). Tres chiere dame, pardonnez moy l'injure et la vilenie que j'ay fait envers vous, car certes j'ay trop mesprins, et je vous jure ma foy que je ne vous avoye veue ne ouye quant vous me traïstes par la main. Et sachiez que je pensoye moult fort a un mien affaire qui moult me touche au cuer, et je prye a Dieu qu'il m'en aide a yssir. (ARRAS, c.1392-1393, 25). Ainsi comme je vous ay dit, s'en va Melusigne en guise de serpente vers Lusegnen, volant parmy l'air et non pas si hault que les gens du pays ne la veissent bien, et l'ouoient encores de plus loing, car elle s'en vient, tel doulour menant, et faisant si grant escroiz que c'estoit grant hideur a veoir et a l'ouïr. (ARRAS, c.1392-1393, 260). Et par le contraire ceulz sont en enfer ou, a bien venir, en purgatoire, qui ont ensuy leurs plaisirs mondains ; et se vous les pouiez ouyr corporellement iceulz vous diroyent que bieneureux sont etc... (GERS., Déf., 1400, 220). Alors me suis moult esjoie, Quant j'oz telle parole oie Que long estude ert celle voie (CHR. PIZ., Chem. estude P., 1402-1403, 48). Et certes se tu ne mes peine de toy congnoistre en ces choses, tu orras vne grant et terrible parolle de Dieu qui dit a lame qui ne se veult congnoistre : si ignoras te (CIB., p.1451, 199). LUDIN. Il me semble que je les o. NACHON. Non sont, non. (Myst. Incarn. Nat. L., t.2, c.1454-1474, 112). Monseigneur, je doubte beaucop que madame ne vous oye et ait oy (C.N.N., c.1456-1467, 118).

 

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Ne pas ouïr Dieu tonnant : On [n'] eust pas ouy Dieu tonnant (BRÉZÉ, Chasse T., c.1481-1490, 34).

 

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Estre ouï de qqn : ...[il] fut tantost oy de celle qui n'avoit pas talent de dormir en celle attente (C.N.N., c.1456-1467, 442).

 

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[Lang. de l'amour] Veoir et oïr qqn : ...Qu'en li estoit m'esperance, ma joie Et mon plaisir, Mon cuer, m'amour, mon penser, mon desir. De tous les biens pooit mes cuers joïr Par li vëoir seulement et oïr. Tous mes confors Estoit en li ; c'estoit tous mes depors, Tous mes solas, mes deduis, mes tresors ; C'estoit mes murs, mes chastiaus, mes ressors. (MACH., J. R. Beh., c.1340, 63). Fueille ne flour ne verdure Ne douceur de temps pascour Ne nulle autre creature, Fors vous, dame de valour, Ne pueent mettre en baudour Mon cuer qui muert par desir De vous veoir et oïr. (MACH., L. dames, 1377, 33). "Hé ! tres douce, debonnaire, Quant vous porray je veoir ?" Trop m'est grief à consirrer De vous veoir et oïr, Quant vos dous viaire cler Soloit mon cuer resjoïr. (MACH., L. dames, 1377, 46). Helas ! einsi si griès maus dolereus M'art et m'esprent, en quel lieu que je soie, Ne mes las cuers ne puet estre joieus, N'estre garis sans vous je ne porroie Pour riens qui puist avenir ; Car tant desir vous veoir et oïr Qu'en moy plaingnant di souvent en mon plour Que pour vous sui de morir en paour. (MACH., L. dames, 1377, 135). Tant le desir Veoir et oïr ; N'avenir Ne venir Ne puis au veoir. (MACH., Lays, 1377, 444).

 

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[P. méton. du compl.] : Las ! si ne sçay que devenir Ne quelle part traire, Quant aler ne puis ne venir Au tres dous repaire, Où celle maint qui me fait morir, Quant veoir n'oïr Ne puis son dous viaire. (MACH., Ch. bal., 1377, 583). [Souvenir] Fait mon desir agrandir Mon triste plour, Et fait souvent ma colour Teindre et palir, Quant ne puis vostre valour Veoir n'oïr. (MACH., Ch. bal., 1377, 608).

 

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[Empl. conjoint avec escouter] : ...[il] print loysir et pacience d'escouter ce qu'il orra. (C.N.N., c.1456-1467, 465).

 

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Ouïr et entendre. "Entendre et comprendre ce qu'on a entendu" : Pour ce me pris a frequenter Aucuns des faitis damoiseaus Qui se mesloient des oiseaus, Pour vëoir, oïr et entendre, Car on ne puet pas trop aprendre. Se vi tels choses et oy Dont j'eus le cuer tost esjoy. (MACH., D. Aler., a.1349, 293). Et s'en y a qui n'ont victoire Qu'en la partie de memoire, Mais leur victoire est bonne et belle, Quant besoins est, preus et isnelle : Sentir, vëoir, oïr, entendre, Souffrir a point et garde prendre Aus choses chetives et lentes, Aus passées et aus presentes Et a celles a avenir ; S'on en porroit bien couvenir. (MACH., D. Aler., a.1349, 332). Ma chiere dame, tant vous di : Pleüst a Dieu de paradis Que cils qui doit oïr nos dis Fust ci endroit presentement, Li bons rois qui si sagement Saveroit oïr et entendre, Faire a point, et puis raison rendre, Quant il averoit escouté Ce qu'on li averoit compté ; Bien saveroit examiner Et encor mieus determiner. (MACH., J. R. Nav., 1349, 184). LE JUGE. Guillaume, ne vueil contredire. Dites ce qu'il vous plaist a dire, Hastivement ou a loisir ; Ouvrez en a vostre plaisir. Je vueil bien oïr et entendre, Et s'ay assez loisir d'atendre. GUILLAUME. Grant merci, sire ! Je diray, Et croy que point ne mentiray. (MACH., J. R. Nav., 1349, 197). Le roy rompy la cire et lisi la lettre. Et quant il voit le meschief ou son frere est, si a dit si hault que tous le porent oïr et entendre : Hahay, dist il, Fortune, comme tu es perverse et poy fiable ! (ARRAS, c.1392-1393, 171). Affin doncques que cecy se voie mieulx et plus clerement, soyt ouye et entendue une parabole tele qui s'ensieut. (MIÉLOT, Spec. hum. Salv. L.P., 1448, 121). ...en pou de jours, tant et si tresbien laboura que la vaillant femme fut contente d'oyr et entendre son cas. (C.N.N., c.1456-1467, 24). ...la pouvre gentil femme a cest coup getta ung bien hault et dur cry, qui de pluseurs fut clerement oy et entendu (C.N.N., c.1456-1467, 198). ...ung jeune galant venu a la feste n'estoit gueres loing de ces deux amans qui oyt et entendit toute leur conclusion. (C.N.N., c.1456-1467, 307).

 

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Ouïr, entendre et escouter : Quand ce gentil chevalier vit son hostesse preste d'oyr, d'entendre et escouter ce qu'il vouldroit dire, pensez qu'il fut joyeux (C.N.N., c.1456-1467, 432).

 

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Prov. : Tant vaut qui eut et rien n'entent (...) Que scil qui chasse et rien ne prent (Myst. st Sébast. M., c.1450-1500, 9).

 

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Ouïr qqn (ou une bête) + inf. : ...quant il se dut departir De la dame, j'oy glatir Les bestes et faire grant noise ; Mais il ne li en chaut ne poise, Eins fist samblant qu'il en fust liez, Dont je me sui trop mervilliez. (MACH., D. Lyon, 1342, 233). Et ainsy comme eulx estoient à debat dudit guelle, il qui parle faingny ouyr passer au devant de ladite taverne marchans de son pays qui menassent bestail à Paris (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 563). Requise se elle se veult rapporter ad ce que laditte divine vouldra de ce dire et deposer pour elle ou contre elle, dit par son serement que non, et que voulentiers elle le orra parler. (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 319). Lequel prisonnier dist que voluntiers il les orroit parler et sauroit qu'ilz diroient, mais aucunement ne se rapporteroit en leurs depposicions. (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 465). Et me orrez declairer la noble lignie qui en est yssue [de la forteresse de Lusignan], qui regnera jusques en la fin du monde (ARRAS, c.1392-1393, 5). Et moult se esmerveille quant il oït la guette de la tour tromper. (ARRAS, c.1392-1393, 76). Et quant ce vint que l'aube fu creue, atant esvous Melusigne qui vint et entra en la chambre. Quant Remond l'ouy venir, si fist semblant de dormir. (ARRAS, c.1392-1393, 243). Se vous les voyez et oyez ainsy plaindre a vous, et vous requerir a prier pour eulz en cuer humble et doloreux, je tiens que vostre cuer n'est pas si endurcy (GERS., Déf., 1400, 229). ...la jeune espousée, oyant le college des femmes ainsi parler, leur dist... (C.N.N., c.1456-1467, 472). ...tantost que vous orrez venir moy et ma compaignie, vous sauldrez sur l'assemblée (C.N.N., c.1456-1467, 450). Pas n'estes si hardy que je vous os vanter ! (Rom. Richart C., a.1496, 60).

 

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Ouïr à qqn + inf. : ...payens furent tous esbahiz. La leur oïst on souvent reclamer leurs dieux. Et neant moins ilz furent tous mors et desconfiz. (ARRAS, c.1392-1393, 129).

 

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Ouïr + inf. : ...car pluseurs qui onques ne virent l'un l'autre ont benivolence l'un a l'autre pour ce que il ont oÿ parler, et cuide chascun l'un de l'autre que il soit vertueus ou proffitable. (ORESME, E.A., c.1370, 416). ...Fors par avoir en ouÿ parler. (ORESME, E.A.C., c.1370, 469). Grans deduiz est de bien oir parler De la vierge Marie glorieuse (Mir. Berthe, c.1373, 254). Mais au jour d'ui plusieurs n'ont point obeissance pour ouvrir les portes de leurs cuers a ceste venue du Saint Esperit ; jacoi ce que trop bien par dehors ilz oïent huchier et appeler, riens ne vault. (GERS., Pent., p.1389, 79). Et suppli humblement a tous ceulx qui l'orront lire [cette histoire] ou le liront, se je y mespren a leur gré en nulle maniere, qu'ilz le me veuillent pardonner, car certainement je l'ay fait au plus justement que j'ay peu, selon les croniques que je cuide estre vrayes. (ARRAS, c.1392-1393, 2). Et lui demanda tantost Anthoine, pour le bien qu'il avoit ouy retraire de lui, se il lui plairoit a aler avec lui et avec Regnault, son frere, en voyage, la ou ilz avoient intencion d'aler, et il en seroit bien guerredonnez. (ARRAS, c.1392-1393, 149). La ouyssiez crier Lusegnen en pluseurs lieux. Les freres vont, toutes les batailles desrompant, et mettent tout en fuye. (ARRAS, c.1392-1393, 287). Neantmoins je scay bien que c'est grande consolacion d'oïr parler de Dieu et des choses divines (GERS., Trin., 1402, 155). ...il a bien oy parler dudit procès et ne scet quant ne comment il commença (FAUQ., II, 1421-1430, 237).

 

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Ouïr dire : Et dist : "Dame, s'a juge le tenez, Je m'i ottroy." Et la dame respondi sans desroy : "Sire, tant oy dire de bien dou roy, Tant est sages, preus et de bon arroy, Que je l'acort." (MACH., J. R. Beh., c.1340, 108). ...N'on ne doit pas si haut monter Qu'on ait honte dou desvaler, Eins doit on le moien eslire, Car meintes fois ay dire, Qui plus haut monte qu'il ne doit De plus haut chiet qu'il ne vorroit. (MACH., R. Fort., c.1341, 139). On ne puet riens savoir si proprement D'oïr dire comme on fait dou veoir ; Mais ce qu'on tient et voit tout clerement Doit on croire sans nulle doute avoir. Et qui legierement croit, Souvent sa pais et sa joie en descroit, Car maint meschié sont venu et norri De legier croire encontre son ami. (MACH., L. dames, 1377, 173). ...lesdiz Brun et Cousin, qu'il a tousjours oy dire et reputer à plusieurs compaignons estre larrons très grans. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 106). ...[un] jaloux (...) vivent a l'ayse ainsi comme Dieu scet que les entachez de ce mal pevent sentir et les aultres pevent appercevoir et oyr dire, ne savoit a qui recourre (C.N.N., c.1456-1467, 85). J'ay tousdiz oy dire (...) que beaucop et souvent faire la chose que savez fait oublyer (C.N.N., c.1456-1467, 363). "...oncques ne m'y trouva. - Non dya ? fist elle ; vous l'orrez dire tantost et le vous feray dire par tous ceulx de ceens." (C.N.N., c.1456-1467, 370). Et aussi y estoit messire Jehan du Belley, qui avoit charge de cent hommes d'armes, plus hardi pour lors qu'il ne morut sain de sa personne, comme j'ay oÿ dire (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 391).

 

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Ouïr dire que. "Entendre dire que" : Je t'ay pluseurs fois oy dire Que tu ne vosisses eslire Autre bien n'autre souffissance, Fors que de sa douce sanlance Souvenirs et douce Pensée Fussent en toy sans dessevrée (MACH., R. Fort., c.1341, 58). Car pluseurs fois certeinnement Oy dire et communement Que, mil trois cent quarante et nuef, De cent n'en demouroit que nuef. (MACH., J. R. Nav., 1349, 151). Et se tu fais forgier monnoie, Pour Dieu, fai la tele qu'on oie Dire qu'elle est de bon aloy. (MACH., C. ami, 1357, 136). Il fist son amiraut venir, Et li dist : "Fait avons grant mise En l'armée qui est sus mise. Si seroit grant descouvenue S'elle estoit gastée et perdue. Pour certein avons oy dire Que li Turquoys ont grant navire Pour aler devers Babyloinne. Montez en mer ; et, sans essoinne, Prenez gens hardis et seürs Et vous en alez sur les Turs..." (MACH., P. Alex., p.1369, 120). J'ay oy dire que li angles, Li saint, les saintes, les archangles, De vois delie, seinne et clere, Loent en chantant Dieu le pere, Pour ce qu'en gloire les a mis Com justes et parfais amis (MACH., Prol., c.1377, 9). ...il oy dire qu'il devoit avoir une feste à Saint-Arnoul en Yveline, en laquelle ville il ala à ycellui jour (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 427). ...et a oy dire que depuis il y ot composicion faicte entre les parties (FAUQ., II, 1421-1430, 238).

 

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Ouïr dire qqc. à qqn : Mervelles vous och dire... (FROISS., Joli buiss. F., 1373, 81). Laissons les atteurs ester et racontons ce que nous avons ouy dire et raconter a noz anciens (ARRAS, c.1392-1393, 3).

 

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Par (l')ouïr dire. "Par la rumeur publique" : Et dit, sur ce requis, que il ne scet, par oyr dire ne autrement, aucunes autres personnes qui aient jettées poisons, ne qui les aient baillées, ne autrement que dessus a dit. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 448). Et voit on que, quant uns homs n'aura oncques yssu de sa contree, qu'il a des choses veritables assez prez de sa contree et region, que jamais ne vouldroit croire par l'ouïr dire, s'il ne le voit. (ARRAS, c.1392-1393, 4). Et pensez vous que je ne sache bien par oyr dire quelz outilz vous portez ? (C.N.N., c.1456-1467, 106). ...il n'est ja mestier que vous en sachez plus avant que par oyr dire (C.N.N., c.1456-1467, 411). Ou le mariage est fait par paroles de present d'une femme de laquelle il a congnoissance ce par oir dire, ou aultre fois il a veu, ou par renommee (Sacr. mar., c.1477-1481, 48). SAINCT MARTIN. Comment voulez vous qu'on entende Qu'il est martir ? PREMIER PRESTRE. Par oÿr dire. Aussi nul n'y veult contredire ; Vella ce qui nous y faict croire. (LA VIGNE, S.M., 1496, 427).

 

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Empl. pronom. S'ouïr + inf. "Entendre que l'on est (appelé, questionné, loué...)" : "Hau, monseigneur de tel lieu, ou estes vous ? parlez a moy." L'aultre, qui se oyt appeller, fut beaucop esbahy (C.N.N., c.1456-1467, 250). L'enfant, qui se oyoit questionner devant sa mere, qu'il craindoit comme enfans font de coustume, vers elle regardoit et ne disoit mot. (C.N.N., c.1456-1467, 412). Ainsi avient il a pluiseurs hommes aucunes fois quant ilz se oyent loer (COLART MANS., Dial. créat. R., 1482, 180). ...quant il se oÿ ainsi exaulcier et prisier, se commencha a enorgueillir (COLART MANS., Dial. créat. R., 1482, 246).

 

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Empl. pronom. "S'entendre soi-même" : Se tu te ouoies de mes oreilles, tu te tairoies. (COLART MANS., Dial. créat. R., 1482, 261).

 

3.

Inf. subst.

 

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"Faculté de percevoir par le sens de l'ouïe" : Car je pers tout le veoir et l'oïr Et le parler, quant en pensant saveure Sa tres fine douçour que tant desir À reveoir, si qu'adont me court seure Desirs par si grant ardour Que je n'ay scens ne pooir ne vigour, Einsois me sens de s'amour si ravis Que je ne sçay se je sui mors ou vis. (MACH., L. dames, 1377, 149). Quant vrais amans de sa dame se part Qui ne se puet ne vuet de li partir, Grant merveille ay que li cuers ne li part : Tant a meschiés et doleur à sentir ; Quar quant il pert le veoir et l'oïr Et le regart de sa tres douce dame, Comment vit il, je ne le say, par m'ame. (MACH., L. dames, 1377, 195). ...son charme trop subtil boucha alors mon sens d'ouyr (SAINT-GELAIS, Séj. honn. J., c.1490-1495, 79).

 

-

"Fait d'entendre, d'écouter" : Lors me laissay tout bellement chëoir Et me coiti si bien, a mon pooir, Sous les arbres, qu'il ne me pot vëoir, Pour escouter Le trés dous son de son joli chanter. Si me plut tant en oïr deliter Son dous chanter, que jamais raconter Ne le porroie. (MACH., J. R. Beh., c.1340, 58). Encor te dirai un confort Ou moult durement me confort, Et tu t'i dois bien conforter En l'oïr, et en deporter, S'un petit me vues escouter. Je te vueil prouver et conter Que ta prise est pour ton millour, Ton bien, ton profit et t'onnour. (MACH., C. ami, 1357, 98). Semblablement en choses qui sont en oïr, ceulz qui se esjoïssent et delitent superhabundanment et trop en melodies de vois humaines et de sons faites par instrumenz, nul ne les dit pour ce desactrempés. (ORESME, E.A., c.1370, 220). Las ! j'ay failli à mon tres dous desir, Pour ce que trop m'est Fortune contraire, Et tant redoubt le veoir et l'oïr Des mesdisans qui tant me font de haire Que je ne m'os devers ma dame traire ; Dont je me muir à dolour et langui, En desirant de li joie et merci. (MACH., L. dames, 1377, 81).

B. -

[En tant qu'action volontaire, pour entendre ou pour interpréter ce que l'on entend]

 

1.

"Écouter, prêter attention à"

 

a)

[L'attention est portée à qqc.] : Quart li rois par nulle saison Ne doit oÿr petition Se droit ne la louhe et habonde. (DUPIN, Mélanc. L., c.1324-1340, 76). Juge saige et atrempez (...) Tout doit oïr et escouter (DUPIN, Mélanc. L., c.1324-1340, 105). Dame, or oiez Ce que diray et a mal ne l'aiez : N'est merveille se vous vous esmaiez, Car bien est drois que dolente soiez. (MACH., J. R. Beh., c.1340, 66). Douce dame, vueilliez oïr la vois De ma clamour, qu'en souspirant m'en vois, Tristes, dolens, dolereus et destrois, Ne dou retour Ne say dire ne les ans ne les mois. (MACH., F. am., c.1361, 151). Aussi vueil je prier au dieu d'amours Qu'il vueille oïr mes piteuses clamours Et qu'il face tant par ses soutis tours Que la parole De Morpheüs, quant il dira mes plours, Mes grans meschiés et mes dures dolours, Soit a m'amour clere com li biaus jours (MACH., F. am., c.1361, 172). [Une fois loin de la côte, le roi annonce qu'on va attaquer Alexandrie] Quant li roys fu bien eslongiez, Il ne s'est gueres atargiez, Eins fist sonner une trompette, Qui haut et cler sonne et trompette. Lors s'arresta tout le navire, Pour oïr ce qu'on vorra dire. Li rois commanda qu'on leur die Que chascuns le sieve à navie Tout droit le chemin d'Alixandre, Car là vuet il aler descendre, Se Dieux plaist (MACH., P. Alex., p.1369, 65). ...les aultres oïent paroles attraihans a mal et qui boutent le feu mauvais es maisons Dieu et es hospitaulx du Saint Esperit, c'est a dire es ames. (GERS., Pent., p.1389, 79). ...elle seroit tres contente d'oyr ce qu'il luy vouldroit dire (C.N.N., c.1456-1467, 257). ...tantdiz que mon dit mary sera au guet, si vous me voulez dire aucunes choses, les orray tresvoluntiers (C.N.N., c.1456-1467, 388). Bien sçay oussi qu'elle a grant fain De veoir quelque miracle faire A ce prophete de bon aire, Que le cuer des gens admollist ; Et pour ce ne fault que l'atraire A aler ouÿr ce qu'il dit. (Pass. Auv., 1477, 134). Pecheurs, pecheurs, oués ma voix ! (Pass. Auv., 1477, 137). Seigneurs et dames quy cy estes, Ouyés les ordonnances faictes Par noz grans princes de la loy (Pass. Auv., 1477, 180). Os tu point ma peticion ? (MICHEL, Myst. Pass. J., 1486, 315).

 

-

Ouïr + interr. indir. : Et einsi comme il conseilloient En une chambre où il estoient, Il oïrent une grant noise ; N'i a celui qui ne se coise Pour oïr que ce pooit estre. Si ouvrirent une fenestre Pour mieux veoir et plus à plain S'il avoit nelui seur le plain. (MACH., P. Alex., p.1369, 150). N'aveiz oiit comment il at demandeit IIII Sarasins ? (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 81). Et car nous devons plus especialment que une autre foys parler et ouyr comment nous devons avoir cuer doloreux pour estre bieneureux, dire aussi de quelle doleur on entent, et a quoy elle proffite, nous avons besoing de grace a ce dire et ouyr fructueusement et par assentement et operacion. (GERS., Déf., 1400, 220). Je orray quelle chose mon Seigneur et mon Dieu parlera en moy. (Internele consol. P., 1447, 63). Il sera desormais heure de oster nostre prisonnier ; je vois oyr qu'il dira et s'il se vouldra mettre a finance. (C.N.N., c.1456-1467, 187).

 

-

Ouïr des comptes. "Écouter la lecture des comptes présentés par un intendant" : Et quant on lui disoit : Monseigneur, ouez voz comptes, si saurez comment vous vivez. Comment, respondoit il, et ne faictes vous a nullui tort pour rente ne pour revenue que j'aye ? Et quelz comptes voulez vous que je oye doncques, quant vous et moy nous sommes tout aise, et que mes forteresces sont bien retenues, et toutes mes besoingnes en bon point (ARRAS, c.1392-1393, 295).

 

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Ouïr (la) confession : ...qu'il me tiengne En vie tant que prestre viengne Qui oie ma confession (Mir. mère pape, c.1355, 392). ...d'elle orroit la devote confession (C.N.N., c.1456-1467, 464). ...nul, si prestre n'est, ne peut oyr confession. (C.N.N., c.1456-1467, 466).

 

-

Ouïr raison. "Entendre raison" : Aprés nous considereron que incontinence qui est vers yre est moins laide que n'est celle qui est de concupiscences. Premierement, car il semble que ire oie aucunement raison et que par ce soit menee. (ORESME, E.A., c.1370, 383).

 

b)

[L'attention est portée à qqn] Ouïr qqn : "...Dites le moy, et de vo sairement Vous aquitez." - "Moult voulentiers, mais que vous m'escoutez, Et que vo cuer de tristesse gettez, Par quoy toute vostre entente mettez A moy oïr." - "Certes, sire, po me puis resjoïr. Mais j'en feray mon pouoir, sans mentir." (MACH., J. R. Beh., c.1340, 67). Et se Pité consentir Vuet que me daingniez oïr En ma clamour, Je ne quier de mon labour Autre merir, Qu'il ne me porroit venir Joie gringnour. (MACH., R. Fort., c.1341, 127). Puis une dame trés parfaite De quanqu'à vray amant couvient, Qui pour Dangier desdire vient, Lors son contredit tout efface Et tel cop li donne en la face Que devant li chiet estendus, Ne plus ne puet estre entendus, Car on ne le vuet plus oïr. Adont l'en couvient il fuïr. Celle dame qui fait Dongier Dou secret d'amours eslongier, On l'apelle Douce Plaisence. (MACH., D. Aler., a.1349, 323). Et vues tu clerement savoir, Sans riens enclorre, tout le voir, Dont viennent richesse et noblesse ? Resgarde eu livre de Boësse Qui te dira, s'oïr le vues, Que tous les biens que perdre pues Sont de Fortune qui moult tost Le bien qu'elle a donné tout tost. (MACH., C. ami, 1357, 68). "...Et reçoit, quant on li demande, Especiaument à sa guise ; Et je vous jur, par sainte Eglise, Que vostre honneur y garderay En tous les cas que je saray." Li roys oy bien le saint pere, Qui haïne moult vitupere, Si que très bien considera Comment il li respondera. (MACH., P. Alex., p.1369, 238). Se vous suppli, dame, tres humblement Que me vueilliés oïr courtoisement Et avoir soing de mon aligement ; Car, par ma foy, Sans retollir sui vostres ligement (MACH., Bal., 1377, 564). ...Princes, priez bonne Amour qu'elle m'oie, Si que de li ne soie en nonchaloir, Car je ne vueil ne desir autre avoir, Fors tant, sans plus, que mors ou amès soie. (MACH., L. dames, 1377, 35). Quant en plourant li depri qu'elle m'aint, Desdains ne puet souffrir qu'oïr me vueille, Et s'elle en croit mon cuer, quant il se plaint, En sa bouche Refus pas ne sommeille, Eins me point au cuer trop fort ; Et son regart rit et a grant deport, Quant mon cuer voit qui font et frit et art. (MACH., L. dames, 1377, 184). Quant ta biauté mon cuer en moy ravi, Amours me volt si fort enamourer De ton gent corps cointe, appert et joli Que puis ne pos autre que toy amer. Or ne me vues oïr ne resgarder. Si n'ameray ja mais en mon vivant Ne fiance n'aray en nul amant Ne priseray, se bien sui avisée, Cuer de marbre couronné d'aïmant, Ourlé de fer, à la pointe asserée. (MACH., L. dames, 1377, 223). Et sachiez que Remond l'escouta diligemment et l'ouy tres voulentiers, et lui plot moult, car Gieffroy leur afferme que sa mere fu fille du roy Elinas et de Presine. (ARRAS, c.1392-1393, 270).

 

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Ouïr qqn en ses excusances. "Écouter les excuses de qqn" : ...et se par aventure aucuns hayneux a monseigneur avoient informé Gieffroy d'autre chose que de raison, je lui vouldroye supplier humblement et requerre que il lui pleust a ouïr monseigneur en ses excusances. (ARRAS, c.1392-1393, 208).

 

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Part. passé [D'une pers.] Estre ouï. "Être entendu" : Le peuple terme demanda [pour payer les nouvelles impositions] (...) Mais unques n'y pot estre ["mais il ne put se faire entendre"] (Tomb. Chartr. Souvain S., c.1337-1339, 27). ...[le médecin] se fist fort de la garir. Pensez qu'il fut tresvoluntiers oy (C.N.N., c.1456-1467, 34). ...je ne peuz estre oy, et me fut force, si je ne me vouloye laisser tuer en la place, de me rendre. [D'un homme arrêté par erreur] (C.N.N., c.1456-1467, 56). ...il print pacience, esperant recouvrer tout la nuyt prochaine, ou il fut autant oy que a la premiere ; et ainsi a la troisiesme, quatriesme, et jusques a la quinziesme [D'une jeune mariée qui refuse le devoir conjugal] (C.N.N., c.1456-1467, 498). ...je ne suis pas voulentiers oÿs en ton royaulme. (COLART MANS., Dial. créat. R., 1482, 243).

 

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Ouïr qqn en confesse / en confession : Le pape a vous ici m'adresce Pour ce que m'oiez en confesse. (Mir. Rob. Dyable, c.1375, 41). Naguieres je lisoie d'un frere precheur, qui fu penancier en l'eveschie de Cambray, qui recite de II ou III personnes, lesquelles il oÿ en confession (GERS., Pent., p.1389, 77).

 

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Qui l'oyoit. "Pour qui prêtait attention à ses propos" : ...qui le oyoit, jamais femme ne fut plus loyalement obeye ne servye qu'elle seroit (C.N.N., c.1456-1467, 49). ...qui l'oyoit, il sembloit que le monde fust finé. (C.N.N., c.1456-1467, 259).

 

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Qui vous ouït. "Si l'on prête attention à vos propos" : Comment, dist le maistre de Rodes, il semble qui vous oït que vous les ayez ja desconfiz [les Sarrasins] jusques au gallaffre et au roy Braidimont. (ARRAS, c.1392-1393, 136).

 

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[Dans une tournure concessive exprimant le défi] Qui que l'ouïe ! "Quel que soit celui qui l'entendrait (et tenterait de m'en empêcher)" : Avec vous mourir je vouldroye, Qui que l'oye ! (Pass. Auv., 1477, 103).

 

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À vous ouïr. "Si l'on prête attention à vos paroles" : Vous feriez merveilles, dit elle, a vous oyr (C.N.N., c.1456-1467, 344).

 

2.

[Le compl. d'obj. désigne, par delà la réalité des paroles entendues, leur contenu ou leur signification] "Prendre connaissance de (en écoutant, en entendant dire)" : Or t'ay je dit, se Dieus me gart, De ma puissance une grant part. Mais encor te diray je plus, Se tu vues oïr le seurplus. Et si te diray de mon nom, Se tu le vues savoir ou non, Je ne te le quier ja celer : Dieus d'Amours me fais appeller. (MACH., D. verg., a.1340, 26). Premiers oïr vueil vostre entention ; Car vous m'avez maint conseil donné bon. (MACH., J. R. Beh., c.1340, 119). ...nuls ne doit dire d'autrui Ce qu'il ne vuet oïr de lui. (MACH., R. Fort., c.1341, 9). Quant j'oÿ chel commandement... (Echecs amour. K., c.1370-1380, 116). Et ce que j'ay ouy de l'Escripture je ne l'ay pas retenu et mis a euvre par ma paresce. (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 31). ...la matiere est grande, grosse et notable, et est expediens que chacun l'oie et entende (BAYE, I, 1400-1410, 158). Lors se lieve en estant et die au pueple d'environ, Doulces gens, öyiez avez Les tribulacïons du monde (Mir. ste Genev. S., c.1410-1420, 84). Quant les huit chevaliers qui estoient freres aux douse jennes pucelles oÿrent l'aventure... (Percef. III, R., t.1, c.1450 [c.1340], 66). ...[la meunière devint] courroucée d'oyr la perte du meilleur membre de son corps, et dont elle se servoit le mieulx (C.N.N., c.1456-1467, 39). ...[madame] oyant la bonne repentence de monseigneur, assez legierement s'en contenta (C.N.N., c.1456-1467, 77). Le pere ne fut pas moyennement joyeux d'oyr le bon vouloir et la sage response de sa fille (C.N.N., c.1456-1467, 170). ...et pour ce aussy que plusieurs roys, princes, contes, barons, prelatz, nobles hommes, gens d'eglise et aultre populaire se sont souvent delictez et delictent à ouyr et escouter des hystoires merveilleuses et choses advenues en divers lieux, tant de ce royaulme que d'aultres royaulmes christiens... (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 1). ...quatre lettres (...) unes à l'Université, les autres aux gens d'Eglise et les autres à la court de Parlement, qui contenoient en effect que lui et ceulx de son sang avecques lui tout assemblez estoient ilec venus pour tout le bien universel du royaume de France, et que par ladicte ville lui feussent envoiez cinq ou six hommes notables pour oyr les causes pourquoy lui et ceulx de sondit sang estoient ainsi venus que dit est. (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 88). Si vous en oués nulle greuse, Maintenant n'y retournés plus. (Pass. Auv., 1477, 136). L'oste, ceste chose oyant, s'en alla soubtillement en la chambre de son gendre (COLART MANS., Dial. créat. R., 1482, 191). Anaxagoras, oÿe la mort de son filz, dist au messagier : ... (COLART MANS., Dial. créat. R., 1482, 273). LE ROY DE BARBARIE. Mes chevaliers, escoutez moy parler Et vous orrez ce qui m'est advenu. (LA VIGNE, S.M., 1496, 249). L'OFFICIAL. Or sà, qu'avés-vous à me dire ? LA MERE. Monsieur, la plus grand traysson (...) Que vous ouystes de vostre age. (Mère Ofic. T., c.1500, 98). Messrs, je me recommande à vous. J'ay receu voz lettres et oÿ la creance qui m'a esté dicte de par vous par Pierre Cleret. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 295).

 

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"Apprendre (qqc. de la bouche de qqn), entendre parler de" : Grande fut la bataille, jamais telle n'orrés. (Bat. Angl. Bret. B., a.1355, 65). ...tel boucherie Qu'onques veu d'oeil n'oüy d'oreille Ne fut, ce croy ge, la pareille (ROBINET, Compl. François H., p.1420, 49). ...bien scet qu'elle n'orra chose d'eulx qui luy plaise. (C.N.N., c.1456-1467, 345). Prenez terme d'aller vers elle quand elle sera couchée, et je me mettray en vostre lieu, et vous orrez après bonne chose (C.N.N., c.1456-1467, 409). ...[vos paroles] m'ont donné la cognoissance de ce qu'oncques je n'oiz ne aprins (C.N.N., c.1456-1467, 565).

 

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Ouïr qqc. de qqn. "Entendre dire qqc. de qqn" : Or ça, sire, pour le tresgrand bien, honneur et courtoisie que j'ay oy et veu de vous, j'ay esté contente mectre en vostre obeissance et joissance la rien que plus en ce monde doy cher tenir. (C.N.N., c.1456-1467, 122).

 

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Ouïr (la / les) nouvelle(s) : Li grans maistres de l'Ospital Descendi dou chastel aval, À moult tres noble compaingnie, De chevaliers et de maisnie, Pour eaus veoir et conjouir, Et pour les nouvelles oïr. Briefment des vaissiaus descendirent Liement, et terre preïrent. (MACH., P. Alex., p.1369, 57). Quant Bremons oy la nouvelle, Moult li fu agreable et belle ; Si l'en mercia humblement (MACH., P. Alex., p.1369, 112). Sire, je cuide que demain en ouriréz nouvelles [Cf. apr. aurir, FEW XXV, 838b] (Cardenois C., c.1380-1400, 151). La queste de ce dyamant dura longuement, sans qu'on en sceust oyr nouvelle (C.N.N., c.1456-1467, 44). ...si conclud qu'elle ira veoir s'elle orra nulles nouvelles (C.N.N., c.1456-1467, 355). ...la damoiselle, qui se donnoit grands merveilles se son amy ne viendroit point, alloit devant et derriere pour veoir s'elle en orroit point de nouvelle. (C.N.N., c.1456-1467, 380). Et, quant le roy en ot ouy les nouvelles, il manda aux garnisons d'Amiens, Beauvais et autres lieux (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 321).

 

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[Avec un attr. de l'obj.] : Le bon musnier, oyant bonne cette adventure, ne fist pas semblant par dehors tel que dedans son cueur portoit (C.N.N., c.1456-1467, 42).

 

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Ouïr + inf. : Ha ! belle seur, dist madame, quantesfoiz avez vous oy prescher que mieulx vauldroit a une personne s'abandonner a la mort que commettre ung seul peché mortel ? (C.N.N., c.1456-1467, 142). ...se sa male fortune n'est digne d'estre ou dit livre de Boccace, j'en fais juges tous ceux qui l'orront racompter. (C.N.N., c.1456-1467, 191).

 

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Ouïr qqn + inf. "Entendre que qqn est..." : ...il estoit tresgrand clerc, mesmement qu'elle l'oyoit priser et renommer pour le plus sage de toute la cité. (C.N.N., c.1456-1467, 569).

 

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Part. passé : Le filz, oye ceste menace, si sault sus, et s'en picque par derriere et se sauve. (C.N.N., c.1456-1467, 325).

 

-

Ouïr que. "Apprendre, se rendre compte (en écoutant) que" : Triste chose est a moy de ce que je voy et oy que toutes choses passent. (GAST. PHÉBUS, Livre oraisons T., c.1380-1383, 44). Vous oyez par leur confession que ces ribaulx moynes ont fait merveilles d'armes (C.N.N., c.1456-1467, 206). ...la damoiselle oyt qu'il y avoit aucun empeschement qui ne luy laissoit desployer ses armes (C.N.N., c.1456-1467, 574). Et quant ledit Reilhac ouyt qu'il se disoit avoir esté serviteur dudit conte Dampmartin, si se doubta bien qu'il estoit venu en court pour aucunes affaires (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 148).

 

.

"S'entendre dire que" : Quand la jeune musniere oyt qu'on trouveroit bien remede en son fait, le sang luy commence a revenir (C.N.N., c.1456-1467, 39).

 

3.

[À l'impér. (ou au subj.), pour demander l'attention par l'écoute] : Oëz (...) Comment vaine gloire est punie (Tomb. Chartr. Trois contes S., c.1337-1339, 100). Qui biau dist bel oie ["Celui qui dit bien (ce qu'il faut dire), écoute le bien"] (JEAN DE LE MOTE, Voie d'enfer P., 1340, 107). Or öés (,) qu'il m'avint depuis (Echecs amour. K., c.1370-1380, 232). Or oyéz histoire trop piteuse. (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 20). ...je tiendray, bien veuil que chascun l'oche, Sy court tout le tournoy (...) Que... (Percef. lyr. L., c.1450 [c.1340], 47). Oyez voulentiers parler de Nostre Seigneur et le querez en toutes lez manieres que vous pourrez. (Nouvelles inéd. L., p.1452, 129). Oués, tous que avés oureilhes ! (Pass. Auv., 1477, 137). Ouyés comment avis estoit A l'acteur Qu[e]... (DU PRIER, Songe past. D.-M., c.1477-1508, 103).

 

4.

[Comme adresse de l'auteur au lecteur / auditeur pour rappeler ou annoncer un point du développement ; souvent à l'impér. ou au fut.] : Puis s'en ala par mer nagent En larrecin, lui et sa gent, Qu'onques puis Dydo ne le vit. Oiez, comme elle se chevit : Quant failli li ot dou couvent Qu'eü li avoit en couvent, Einsi com pluseurs amans font Qui l'amant loial contrefont, La desesperée, la fole (...) L'espée d'Eneas trouva Et en son corps si l'esprouva Qu'onques ne se pot espargnier Qu'en soy ne la feïst baingnier. (MACH., J. R. Nav., 1349, 209). En l'eglise qu'oëz retrere[que vous entendez évoquer ici], La reïne... (Vie st Evroul S., c.1350, 85). ...la venue de Gieffroy au grant dent, dont vous orrez cy aprez. (ARRAS, c.1392-1393, 14). En ce party que vous ouez tint Remondin Olivier grant espace de temps. (ARRAS, c.1392-1393, 63). Ly preudoms se party du roy quant il lui ot dictes les paroles que vous ouez. (ARRAS, c.1392-1393, 303). Cil paradis que vous oyéz [que vous entendez évoquer ici] est ung noble lieu en la fin de la terre (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 174). ...[elle] enferma son mary ou coulombier par la maniere que vous orrez. (C.N.N., c.1456-1467, 18). ...il fut puny en la façon que vous orrez (C.N.N., c.1456-1467, 402). Or, oez comment nostre curé se gouverna après que la defense luy fut faicte. (C.N.N., c.1456-1467, 441). Vous orrez cy aprés tantost Comment il cheust sans dire mot (Vig. Trib., c.1480, 231).

 

-

Ainsi comme / si comme / comme / ainsi que ... vous ouyez / orrez / ouïr pourrez / ouï avez ... : ...Si com je fis (...) commë oïr porrés, Quant lire en la matere orrés. (ACART, Prise am. H., 1332, 14). ...Com avez en l'istoire [le présent conte] (Tomb. Chartr. Trois contes S., c.1337-1339, 81). ...Pour ce qu'il avoit espousee Sa fille, com avez . (Tomb. Chartr. Trois contes S., c.1337-1339, 115). ...Et avecques lui bien .lx. miller, Ainsy que vous orrés ou livre retraittier. (Tristan Nant. S., c.1350, 91). ...Ainsi com vous aurrés au livre raconter (Flor. Octav. L., t.1, c.1356, 5). Ainsi comme vous povez ouïr, fu ly roys Elinas repeuz et si abusez tant du doulz chant que de la beauté de la dame qu'il ne scet s'il dort ou se il veille. (ARRAS, c.1392-1393, 6). Par Dieu, se je vous pers [Mélusine, sa femme] pour ceste cause, je m'en yray en essil en tel lieu ou on n'ourra jamais nouvelles de moy. Ainsi comme vous ouez, se dementoit Remond, et se fiert et debat par telle maniere qu'il n'a si dur cuer ou monde, s'il le veoit et ouoit, a qui il n'en preinst pitié. (ARRAS, c.1392-1393, 243). Et eslut leans la place ou il vouloit gesir, ainsi comme vous orrez plus a plain en avant. (ARRAS, c.1392-1393, 289). ...et dedens II mois, ou la entour, ot sa fille, la belle Beatris, espouseit le roy de Danemarche, ainsy que vous oreis (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 7). Et il voit maintenant teil croaulteit en luy comme vous ouyeiz. (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 106). ...preudomme le cuidoyt, maiz non estoit, comme orrez. (Nouvelles inéd. L., p.1452, 1). ...sa femme en fut treshonteuse, comme vous orrez plus a plain cy après. (C.N.N., c.1456-1467, 14).

 

-

[Avec dessus "ci-dessus", ci-après...] : Lors li a compté la maniere De sa mort merveilleuse et fiere, Comme dessus l'avez oïe [Noter l'accord ; c'est la mort en tant qu'événement qui a été contée] (Tomb. Chartr. Souvain S., c.1337-1339, 36). Apres la confession vient satisfacion, que on doit faire selon l'arbitrage et le conseil du sage confesseur, qui se fait en trois manieres : c'estassavoir en jenne, en aumosne, ou en oroison, selon ce que vous orrez cy aprez. (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 20). Gwion, dont vous oreis cy aprés. (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 21). ...il estoit hay mortellement, comme plus a plain pourrez ouyr cy après. (C.N.N., c.1456-1467, 16).

 

5.

Part. prés. en empl. subst. "Celui qui écoute, auditeur" : Aussi est il [le nom de Marie] espandu es cuers des meditans, en la bouche des loans, en l'oreille des escoutans et des oians. (Mir. ev. N.D., c.1348, 61). S. PIERRE. En l'honneur de Dieu, mes amis, Je vous requier tant que je puis Que nous façons presentement Cy entre nous joyeusement Aulcune chose de nouvel Ou les oyans prengnent revel Qui soit au monde salutaire. (MARCADÉ, Myst. Pass. Arras R., a.1440, 280). A toy Zachee, devant jeunes et vieulx, Je dy ces motz ainsi devant les yeulx De tous voyans, et les oyans aussy (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 483). Par quoy les oyans s'en tanent. (COLART MANS., Dial. créat. R., 1482, 243).

II. -

En partic. DR.

A. -

Ouïr qqn (un plaideur, un témoin...). "Entendre qqn, recevoir la déposition de qqn" : Et afin que l'en sceust de ce la verité, fu commandé et commis à maistres Nicolas Chaon, examinateur, que ledit Petit-Sain il ouyst sur ce et examinast, meist sa deposicion par escript, et ouyt aussi tous les autres tesmoins que ledit prisonnier vouldra produire sur la proprieté de la possession du signe de tonsure dudit prisonnier. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 401). Ce jour, J. Pingué, procureur de maistre J. Tarenne, conseiller du Roy nostre Sire ceans, s'oppose que aucun ne soit receu en l'office dudit Tarenne sans le oïr. (BAYE, II, 1411-1417, 60). Tandem, la Court a dit que les parties seront oïes mercredi prouchain. (BAYE, II, 1411-1417, 136). ...et que aucunes lettres n'en feussent passées ou seellées sans oïr le procureur du Roy (FAUQ., I, 1417-1420, 157). ...[le curé] requist qu'il fust oy, et monseigneur [l'evesque] luy accorda. (C.N.N., c.1456-1467, 541).

 

-

Part. passé : Jehannin de Premont (...), oy et examiné, l'an et jour dessus dis, dit et deppose par son serment (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 258). ...oy aussi maistre Jehan Le Conte, cirurgien juré du roy, qui dist que la playe faite audit feu Criquetot en la teste fu d'une hache, si comme il croit en sa conscience. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 409). Gerart Le Bouvier, prisonnier oudit Chastellet, oy, examiné et requis sur ledit fait (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 233). ...de la sentence que le dit official en donna, après les parties par lui ouyes (C.N.N., c.1456-1467, 18). Oÿes lesquelles parties en tout ce qu'elles voulurent dire et aleguer, le dit prevost... (MART. D'AUV., Arrêts Am. R., c.1460-1466, 12).

B. -

Ouïr qqc. (un témoignage, une déposition, un compte, une plaidoirie, un rapport, une requête...). "Écouter, recueillir, prendre connaissance de" : Auquel, par ledit maistre Jehan, fu dit et accordé que volentiers il et les assistans illec les orroyent [les confessions], et ycelles feroit escripre le mieulx qu'il pourroit par le clerc juré de mons. le prevost. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 26). ...du commandement de bouche à eulx fait et ordonnance de la court de parlement ilz estoient venuz ouyr les causes d'appel d'icelle prisonniere. (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 428). Et outre a ordonné la Court que le bailly de Troyes d'ores en avant orra de par le Roy les comptes de ladicte eglise de Nostre Dame (BAYE, I, 1400-1410, 47). Item, cedit jour, maistre Phelippe de Boisgillou et maistre Pierre LE FÈVRE ont esté ordonnez à oir le compte de ladicte execution. (BAYE, I, 1400-1410, 125). ...après leur a esté dit par la Court (...) que le jour que parleront proposient en françoiz, pour ce que touz ceulx qui viennent ceans oïr les Plaidoiries n'entendent pas latin. (BAYE, I, 1400-1410, 158). Ce jour, la Court s'est levée pour aler en la sale vert oïr les requestes des Angloiz. (BAYE, II, 1411-1417, 191). ...Dieu scet que pluseurs se rendirent au consistoire pour oyr ce nouvel proces (C.N.N., c.1456-1467, 37).

 

-

Part. passé : Lesquelx oppinions oïz, et leu ledit procès, ycellui Colin fu ad ce condampné par ledit mons. le prevost, presens les dessus nommez. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 183). Oye la requeste aujourdui faicte en jugement par le procureur du roy... (Sent. Chât. Paris M., II, 1454, 79).

 

-

Ouïr droit. "Entendre la sentence" : La Court a au jour d'ui ordonné que aux parties, lesquelles ou aucune d'icelles ne comparront pas au jour qui à elles sera assigné à oïr droit, sera prorogué jour pour tous delaiz au VIIJe jour dudit jour autrefoiz assigné à oïr droit (BAYE, I, 1400-1410, 252).

 

-

Ouïr de qqc. "Connaître de qcc., juger qqc." : Des testamens [celui] qu'on dit le Maistre De mon fait n'orra quy ne quot, Mais ce fera ung jeune prestre Qui est nommé Thomas Tricquot. (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 147).

III. -

P. méton. "Être témoin de (en écoutant), assister à (en écoutant)"

A. -

[Le compl. d'obj. désigne un fait, un événement] "Être témoin de (en écoutant)"

 

-

Voir et ouïr qqc. : ...le curé de ladite ville (...) veant et ouant la cruauté que faisoient iceulx gens, comme tous esbayz, leur encommença à dire que c'estoit et qui ilz estoient qui ainsi gastoient le monstier et l'eglise de Dieu (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 223). ...et sont ses choses merveilleuses, et en tant de formes et manieres diverses, et en tant de pays, selon leur diverse nature, espandues, que, sauf meilleur jugement, je cuide qu'onques homme, se Adam non, n'ot parfaicte congnoissance des euvres invisibles de Dieu, pour quoy il ne puist de jour en jour prouffiter en science et oïr ou veoir chose qu'il ne puist croire estre veritables, lesquelles le sont. (ARRAS, c.1392-1393, 3). Et celle chante tousjours si doulcement que c'estoit grant doulcour a l'ouïr. Elinas en fu tous abusez et si oubliez que il ne lui souvint de nulle chose fors de ce qu'il voit et oit, et demoura la en cel estat moult grant temps. (ARRAS, c.1392-1393, 6). La busche s'esprist. La peussiez oïr et veoir grant pitié, car, si tost que les moines sentirent le feu, ilz commencierent a faire piteux criz et tres amers et doulereux plains (ARRAS, c.1392-1393, 251). Le pouvre mary, qui tout avoit veu et oy, n'en povoit plus, s'il n'enraigeoit tout vif. (C.N.N., c.1456-1467, 321). Comme doncques j'eusse tout veu cecy et oÿ [var. auy] et que au sourplus je... (CHASTELL., Temple Boc. B., 1463-1464, 79). Advint que ung dauphin le chargea sur son dox et le porta au roy Arion de Corinthe, racomptant la merveille que nul n'avoit jamais oye ne veue (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 41 v°). Cestui predist que plusieurs choses se verroient, que jamais veues ne oyes n'avoient esté (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 124 r°).

 

-

Empl. abs. Oyant tous. "En présence de tous" : Et lors ung mauvés homme (...) dist ausant tous [forme du Sud ; apr. ausir, FEW XXV, 838a ; var. devant tous] que... (Veng. Nostre-Seign. F., t.1, c.1300-1400, 65). Oians touz le congié t'en doing (Mir. ev. arced., c.1341, 135). Lors leur dist Uriiens, oyant tous : Beaulx seigneurs, nous sommes cy assemblez pour soustenir la foy de Jhesucrist, et de laquelle il nous a regenerez. (ARRAS, c.1392-1393, 108). ...[il] dist hault et cler, oyans tous... (C.N.N., c.1456-1467, 427).

 

.

Tous oyans et voyans. "En présence de tous" : ...ont requiz que la cedule, dont la teneur est cy après enregistrée, fut leue en la Court et publiée tous oyans et voyans. (BAYE, I, 1400-1410, 34).

 

.

Oyant de tous : Un chevalier en Pulle je trouvai, Qui de vous tient souvent grant parlement [;] Oiant de tous, ne s'en test nullement [;] Dit que... (Dame Lycorne G., c.1349-1350, 142).

 

.

En oyant. "Devant tous, publiquement (et non à voix basse, en privé)" : Errant dist a le demoiselle, En oyant, par devant sa gent : "Venez cha, dist elle..." (Dit prunier B., c.1330-1350, 87). Aprés dist a touz en oiant A belle chiere et a voiz liee : "Sachiez touz qu[e]..." (Tomb. Chartr. Souvain S., c.1337-1339, 38). ...si lor dist en (n) oiant... (Bât. Bouillon C., c.1350, 8). Il ait dit a cez homme haultement en oiant : ... (Lion Bourges K.P.F., c.1350, 19). [Autres ex. p.59 et 269]

B. -

[Le compl. d'obj. désigne une cérémonie religieuse] "Assister à (en écoutant)"

 

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Ouïr le service divin / le service de l'Eglise : Faictes venir ma fille, si orrez le service divin. (ARRAS, c.1392-1393, 122). Car quant li hom ou la femme est au moustier pour ouyr le service divin son cuer ne doit mie estre en sa maison, ne es champs, ne es autres choses mondaines (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 12). ...comme les simples gens oÿent a proffit le service de l'eglise en latin combien que ne l'entendent mie. (GERS., Trin., 1402, 155).

 

-

Ouïr complie : ...il me semble qu'il est heure D'aler au temple ouÿr complie. (Pass. Auv., 1477, 261).

 

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Ouïr (la) messe. V. messe : Si montames par les degrez En une chapelle moult cointe, D'or et de main de maistre pointe Et des plus trés fines coulours Qu'onques mais veïsse que lours. Si fu la messe apparillie, Devotement ditte et oye. (MACH., R. Fort., c.1341, 143). ...puis si irons au moustier Oir la messe. (Mir. st J. Cris., c.1344, 258). ...il ala oïr la messe. (Vie st Evroul S., c.1350, 46). Mais il ne fist pas lonc sejour, Car l'endemain, au point dou jour, La messe oy, puis se parti. (MACH., F. am., c.1361, 242). Au matinet qu'il ajourna, Li roy bien et bel s'atourna Et trestuit li autre ensement. Messe oïrent devotement, Et puis en leurs vaissiaus monterent (MACH., P. Alex., p.1369, 64). Li gentils roys, pleins de noblesse, Se leva et oy la messe, Humblement et devotement (MACH., P. Alex., p.1369, 97). Le matin se levat et oit messe (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 67). ...non pas luy donner gloire de bouche seulement, comme font ceulz qui en disant leur patenostre ou autre oroison, ou en oyant la messe ou sermon, ont le cuer tousjours a terre, c'est a dire a pensee terrienne (GERS., Noël, p.1404, 299). Ce jour, le Roy, qui avoit intencion de partir prochainement de Paris, ala oïr messe en l'eglise Nostre-Dame (FAUQ., I, 1417-1420, 192). ...la nouvelle mariée (...) se va mettre en son siege pour oyr la devote messe que le bon curé vouldra dire. (C.N.N., c.1456-1467, 301). Tant que d'oyr messe, il est meshuy trop tard (C.N.N., c.1456-1467, 399). Et, le landemain qu'ilz furent arrivez en ladicte ville, qui fut le dimenche IIIIe jour de janvier, furent lesdiz ambassadeurs flamens en l'eglise Nostre-Dame de Paris oyr illec la messe (ROYE, Chron. scand., II, 1460-1483, 126). Or, messeigneurs, comme savez, Ouyr la messe vous devez Et, pour l'onneur du saint dimenche, Louez Dieu et le merciez Des biens qu'i vous donna yer, Par sa volanté pure et franche, Quant des mains de personne estrange Vous a desmis et fait ung change. (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 494).

 

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(Après) la messe ouïe. "Après avoir assisté à la messe" : En ceste partie dit l'ystoire que, le lendemain, par matin, fu Uriiens, après la messe ouye, devant sa tente, et fist venir, l'un après l'autre, tous les cappitaines (ARRAS, c.1392-1393, 108). Ainsi demoura Remond en l'abbaye, et le lendemain, la messe ouye, fu convoiez au pié de la falize qui joint aux chambres de leans. (ARRAS, c.1392-1393, 273).

 

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Ouïr un sermon : ...ainsi comme l'en faisoit un sermon ou cymetiere Saint-Innocent, à un jour de vendredi aouré, s'aprocha près d'une femme qui ouyoit ledit sermon, qui avoit pendu à sa sainture une bourse de cuir, laquelle il qui parle li coppa (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 282).

 

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Ouïr vespres : ...il laissa icelle Marion en sondit hostel et s'en ala ouyr vespres (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 426). Adont se descend et retourne a Orleans et va ouyr vespres a Sainte Croix (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 437).

IV. -

Au fig.

A. -

"Comprendre, interpréter" : Lesquelx Englois, selon ce qu'ils ouoient le rapport dudit Jaquet, chevauchoient, une fois plus de gens, et une autre fois moins, et se retrayoient audit lieu et forteresse de la Sousterrine. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 57). Les medicins, tous d'un accord, m'ont dit qu'en mon fait n'a que ung seul remede (...) Vous oez que c'est (C.N.N., c.1456-1467, 537).

B. -

"Exaucer, accueillir avec faveur" : Dame de pitié tresoriére, S'il vous plaist, oiez ma priére ! (Mir. st J. Cris., c.1344, 299). Dous sires, qui tout scez et vois, Oy ma priere, enten ma vois, Qu'en toy est toute m'esperence, Mon cuer, m'amour et ma fience. (MACH., C. ami, 1357, 11). Or les deus genous de mon cuer Fleche vers toy, sire, et te pri Qu'oie ta bonté mon depri. J'ay pechié, sire, j'ay pechié Et bien recongnois mon pechié, Mes deffaus, mes iniquités Et de mes pechiés les viltez, Si te suppli tres humblement Et te requier devotement : Pardonne moy, sire, pardonne ! (MACH., C. ami, 1357, 54). Pour ce te pri, Vierge, oy mon depri, Car po cri, Po descri, Po pleur les pechiés Qui sont en mi (MACH., Lays, 1377, 411). Et aussy se en la darrienne heure de la mort la personne en grace demande estre quitte de purgatoire, sa priere est oÿe (GERS., Déf., 1400, 237). C'est pour moy piteuse besongne : Dieu en veuille ouÿr ma clameur ! (VILLON, Lais R.H., c.1456-1457, 14).

C. -

"Suivre un enseignement sur qqc."

 

-

Ouïr (un enseignement sur qqc.). "Suivre un enseignement sur qqc." : Et en puet l'en bien dire ce mot de l'Escripture : "Audiens sapiens sapientior erit" - "le sage sera plus sage de oÿr ceste science." (ORESME, E.A., c.1370, 99). Et affin que tu puisses mieulx entendre tu dois sauoir que le premier pas ou degre cestassauoir lecon ou doctrine donne intelligence, soit par lecon leue ou liure ou par doctrine ouye en predicacion ou aultre maniere de instruction (CIB., p.1451, 177).

 

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Ouïr grammaire / logique... "Entendre un enseignement de grammaire, de logique..." : ...et ala ung jour ou deux à l'escole, et si n'avoit onques mais oy grammaire ne logique (FAUQ., II, 1421-1430, 244).

 

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Ouïr de qqc. "Suivre un enseignement sur qqc." : ...le diable les tient a l'escole de sorchieries et de toutes mauveses scienches de quoi l'en veult oïr (HENRI FERR., Modus et Ratio, Livre deduis T., c.1354-1377, 53). Les aprentis respondirent que verement en vouloient oïr (HENRI FERR., Modus et Ratio, Livre deduis T., c.1354-1377, 215). Item, celui qui ensuit ses passions ou desiriers orroit de ceste science en vain et senz proffit (ORESME, E.A., c.1370, 107).

 

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Ouïr qqc. de qqn : Mais rendre les causes comme tele passion de yvresce ou de dormir est faite ou ostee, ce n'est pas propre ne appartenant a ceste science, mais convient teles choses oïr des philosophes naturelz. (ORESME, E.A., c.1370, 375).

 

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Empl. abs. : ...aucun Escolier oudit Estude, ne doit estre receu au degré de Bachelier, se il n'a oy par le temps de quarante mois deuement et continuelement (Ordonn. rois Fr. S., t.8, 1395, 223).

REM. Forme hoit ds PHIL. DE BOULAINVILLIER, in CH. D'ORLÉANS, Rond. C., 1443-1460, 468. Peut-être confusion graphique orra pour aura ds GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, 56, 32, 57, 6, 60, 84 : cf. compte rendu de L.F. Flutre, R. Ling. rom. 36, 1972, 186. L'ex. suiv. fait difficulté : ...ilz sont penanciers de madame la Royne de Faierie, et la penitance est telle que vous ne pourriez endurer la paour que vous pourriez oïr en veant leur tant espouentable penitance. (Percef. III, R., t.2, c.1450 [c.1340], 64).Même leçon ds B et E. L'Éd. traduit par "que vous pourriez ressentir, éprouver". Mais ce sens, purement contextuel, ne se rattache à rien. La mention en veant rendant impossible l'interprétation par "entendre dire", corriger en [av]oir ?
 

DMF 2020 - Synthèse Robert Martin

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