A. -

Au plur. [À propos d'une pers., d'une catégorie de personnes]

1.

"Conduite, comportement, manière de vivre (dans une perspective morale)" : J'ay, passét a plus de .X. ans, Oy dire que mesdisans Sont necessaires en amours Et que leurs jangles et leurs mours Font estre meinte bonne dame Nette de corps, de cuer et d'ame Et garder bonne renommée En fait, en dit et en pensée, Et les amans mettre à mesure, Quant desirs trop les desmesure. (MACH., Compl., 1340-1377, 267). A Romme avoit cent cenatours, Nobles en meurs et en atours, Qui tous cent un songe songerent De prim somme et le revelerent L'un a l'autrë en audience, Car c'estoit grant signefiance Des choses qui sont a venir (MACH., F. am., c.1361, 237). Il dit en aucuns textes que le joenne d'aage ou de meurs n'est pas propre auditeur de politiques (ORESME, E.A.C., c.1370, 107). Et ne creez ja conseil de garcon, ne ne trayez ja trop privé de vous homme que vous n'aiez bien essayé ses meurs et ses condicions. (ARRAS, c.1392-1393, 85). ...les histoires des vaillans, Qui furent preux et traveillans Et de soy gouverner par meurs Prudens et bons, sages et meurs (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 64). ...maistre Nycole Gomaud (...) prestre, maistre en ars et bacheler en theologie, et bon gramarien, suffisant homme tant en meurs que en discipline de lettres (BAYE, I, 1400-1410, 191). ...le sage roy anobli de nature par longue genealogie continuée en triomphe, avec ce de Dieu par grace doué de noblece de courage, laquelle lui fist delaissier ignorance en jeune aage (...), desirant delaissier les choses basses et tendre aux hautes beatitudes, porpensa comment et par quel maniere pourroit attraire et aluchier meurs vertueux par continuacion de vie salutaire (CHR. PIZ., Faits meurs Ch. V, S., I, 1404, 36-37). ...et [le concile de Basle] est principalment institué, establi et ordené pour extirper les heresies qui pullulent en pluiseurs parties de la crestienté, pour la reformacion des meurs du clergié (FAUQ., III, 1431-1435, 34). Ilz sont nobles de sanc, mais de meurs riens (JUV. URS., Aud. celi, 1435, 244). Pense que iamais vng pere ne pense si diligemment instruire ses enfans en science ne en meurs comme Dieu fait toy. (CIB., p.1451, 188).

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En partic. Bons/bonnes moeurs. "Conduite vertueuse" : Car touzjours a esté moult sage Et de bons meurs. (Mir. abbeesse, 1340, 91). Si n'est homs vivans qui s'exente De Fortune, ne qui se vente Qu'en ses mains ne soit, qu'exenter Ne s'en porroit homs, ne vanter Par raison, s'il n'est de vertus Et de bonnes meurs revestus. (MACH., C. ami, 1357, 69). Mais des vices victoire acquerre Par vertu de bonnes meurs vient (Mir. st Sev., 1362, 199). ...cilz est folz qui fait message Dont on a courrous ou damage, Especialment en amours ; Car homs n'est si parfais en mours, S'il est poins d'amoureuse lance, Qu'il n'ait courrous ou desplaisance S'on li raporte de sa dame Chose qui puist tourner a blame. (MACH., Voir, 1364, 710). Ha, doulx Aubin, quant me recors De l'onnesté qu'en toy avoies, De la grant amour dont m'amoies, Des bons muers dont estoies plains, J'ay bien cause se je te plains... (Mir. femme, 1368, 198). Le Livre de Ethiques, c'est livre de bonnes meurs, livre de vertus ouquel il enseigne, selon raison naturel, bien faire et estre beneuré en ce monde. (ORESME, E.A., c.1370, 97). ...à la confusion, desolacion et total destruction des eglises, contre droit commun et contre bonnes meurs (FAUQ., I, 1417-1420, 267). Et encores a ce propos, pour entretenir les bonnes meurs, mon ami, je vous recorde le dit du saige Salon d'Athenes (LA SALE, J.S., 1456, 21). Des cinq degrez ou eschelons le premier est leçon ou doctrine et conuient aulx commencans cest [l. c'est] a dire a ceulx qui commencent a monter en la montaigne de parfaicte vie telle que doit estre la vie des crestiens qui doit estre en sanctite [l. sanctité] de bonnes meurs (CIB., p.1451, 177). Bien sçay, se j'eusse estudïé Ou temps de ma jeunesse folle Et a bonnes meurs dedïé, J'eusse maison et couche molle... Mais quoy ! (VILLON, Test. M., 1461-1462, 36). Pere et mere, juge, predicateurs Seuffrent a mal leurs subjetz convertir, Et par ce point perissent bonnes meurs. (Cene dieux, c.1492, 110). Larchediacre [l. L'archediacre] que voyez cy Et tout le college de Tours Pour le bon sens et bonnes meurs Qui sont en vous et grandz bontez Veullent que Archeuesque soyez (Myst. st Martin K., a.1500, 291).

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Estre de bonnes moeurs : Si estoit cil marquis Gautier Beau de corps, fort, preu et legier, Noble de sanc et de lignie, D'avoir riche et de seigneurie, De bonnes meurs parfaictement (Gris., 1395, 3).

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[Sentence] Mauvaises paroles corrompent bonnes moeurs : Aussi par parole, selonc le dit de l'Apostre en la premiere Epistre aux Corinthiens ou .XVe. chapitre : "Mauvaises paroles corrompent bonnes meurs". (DAUDIN, De la erudition H., c.1360-1380, 263). ...et par ce approuvoit ce sage roy la parole, que dit saint Pol du poete Menander, de qui il prent auttorité, telle que il escrist aux Corintiens : "Les paroles mauvaises courrompent les bonnes meurs". (CHR. PIZ., Faits meurs Ch. V, S., I, 1404, 85).

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Males/mauvaises moeurs : Un filz de males meurs avoit, Qui plusieurs femmes decevoit. (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 190). On a fait maintenent les cris Qu'on vaise avec les seigneurs, Lesqueulx par leur maulvaises meurs Ont fait juger Jhesus en croix Devoir pendre. (Pass. Auv., 1477, 182).

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Moeurs et vertus : ...[il] fist allyance a une jeune fille (...) ayant bruyt autant et plus que nulle de son temps, tant par sa grande et non pareille beaulté comme par ses tres loables meurs et vertuz (C.N.N., c.1456-1467, 192). ...le seigneur fut bien content de luy bailler sa fille a mariage, jasoit qu'il n'eust cognoissance de luy fors de ses loables meurs et vertuz. (C.N.N., c.1456-1467, 332).

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Bien appris de toutes moeurs : LE SECONT BARON aux chevaliers. (...) Car [le marquis] preudons est et de grant pris Et de toutes meurs bien appris ; En lui n'a que bien et honneur. N'onques maiz n'eümes seigneur Qui si bien feust moriginé. (Gris., 1395, 7).

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Informé en moeurs. "Instruit, formé aux bonnes moeurs, bien élevé" : Sy vueil qu'ilz [mes trois orphelins, mes trois vieux usuriers] soient informez En meurs, quoy que couste basture. Chapperons aront enformez Et les poulces sur la sainture, Humbles a toute creature, Disans : "Han ? Quoy ? Il n'en est rien !" Sy diront gens par adventure : "Vecy enffans de lieu de bien !" (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 106).

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Introduire qqn en/de bonnes moeurs : LE MARQUIS. (...) [qu'elle] pregne paine De l'enseignier le fils du marquis et introduire De bonnes meurs et de desfuire Les vices qui sont a blamer (Gris., 1395, 55). LE SERGENT. (...) vueilliez garder et tenir Et introduire [cest enfant] en bonnes mours (Gris., 1395, 56).

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Muer ses moeurs : Le promoteur (...) fut informé du gouvernement de nostre gentil curé, et le fist citer pour le corriger et luy faire muer ses meurs . (C.N.N., c.1456-1467, 530). Quant aincy je veulx müer meurs, Puis que Dieu m'a donné respit, Si de corps suis ung peu petit, Augmenter me fault en virtus. (Pass. Auv., 1477, 117).

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Reformer les moeurs de qqn : ...renommée couroit que le saint concille estoit assamblé présentement pour réformer les meurs du peuple chrestien (MONSTRELET, Chron. D.-A., t.4, c.1444-1453, 449).

2.

"Habitudes, goûts" : LE MARQUIS [à Griseldis]. Pour ce, vueil je que tu y soiez [à mon remariage], Nonobstant ton petit habit, Car tu cougnoiz sanz contredit Mes condicïons et mes meurs, Et comment on doit les seigneurs Et dames ceans recevoir. (Gris., 1395, 90). O hommes forvoiez du chemin de bonne cognoissance, feminins de couraiges et de meurs, loingtains de vertuz, forlignez de la constance de voz peres, qui pour delicieusement vivre choisissez a mourir sans honneur... (CHART., Q. inv., 1422, 10). ...meurs femenines Par leurs parolles legieres, Sont du dyable messagieres. (MICHAULT, Procès honn. F., p.1461, 84).

B. -

[À propos d'une collectivité, sans considération morale]

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Au sing. "Coutume" : En grec "ethos" c'est meur ou coustume, et "ethica" c'est vertu moral. (ORESME, E.A.C., c.1370, 146).

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Au plur. "Habitudes de vie, coutumes, moeurs" : Et samble par raison que il convient que il [un autre ciel immobile] soit, car autrement l'en ne pourroit reduire a cause celestiel aucunes diversités qui sont en terre selon longitude, c'est a savoir en procedant d'orient vers occident ou, au contraire, sanz approchier ou esloingnier des poles, si comme pourquoy une partie de la terre selon cest procés est habitable et l'autre non, et pourquoi les plantes et les bestes et les corps et les meurs des gens sont tant differens d'orient en occident qui ont presque un meisme resgart au soleil et aus planetes et aus estoilles et aus parties des cielz qui sont meuz. (ORESME, C.M., c.1377, 334). L'autre part est non approuvee D'aucuns, et les Mathematiques Si l'ensuivent en leurs pratiques, Qui se meslent des jugemens, Selons les divers mouvemens Et cours des estoilles erables, Et qui disposent, en leurs tables, Les signes du ciel par parties En l'ame et es membres parties, Et jugent du temps a venir, Ainsi comme il en doit venir, Et les meurs et condicions Des hommes, par leur nacions Ou nativitez, selons cours De planetes en divers cours (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 121). Devers Oriant droitement En y ot assis haultement Plusieurs d'estranges estatures, Mais de leurs meurs, ne leur natures, Ne quier je si grant compte faire, Car ne sont pas de nostre affaire. (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 11). Et se esmeut en yre [Alexandre] pour ce que ycelluy serviteur le blamoit de ce qu'il delaissoit les bonnes meurs de son pays de Grece pour ensievyr les meurs de Perse et des marches d'Orient. (FILLASTRE, Traité Conseil H., c.1472-1473, 243).

C. -

[À propos d'une chose] "Manière, nature"

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Au sing. [À propos de musique] : Et de armonie ou musique doriste tous confessent qu'elle est aussi comme tres estable et qu'elle a en soi meur virile, ce est a dire appartenante a homme. (ORESME, Pol. Arist. M., c.1372-1374, 357).

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Au plur. [À propos d'une maladie] : ...qui n'est pas de la maniere ne des meurs des autres fievres (SAINT-GILLE, Comment. A.Y. L., 1362-1365, 304). ...mais pires sont les meurs de la [lèpre] leonine et de l'elephancie que des aultres. (PANIS, Guidon, 1478, tr.VI, doct.1, chap.2).