C.N.R.S.
 
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FEW VI-1 malus
MAL, adj.
[T-L : mal1 ; GD : mal1 ; AND : mal1]

I. -

[Correspond à mal1 >I] "Qui est cause de désagrément, de dommage, de souffrance, de difficulté"

A. -

[D'une pers.]

 

1.

"Méchant, malfaisant, mauvais"

 

a)

[Attribut] : Se male est et de durs accors, Et qu'elle me riote et tance, Ce sera trop dure sentence, Paine et travail non supportable, Vie a moi et a lui dampnable, Car Salemon dit en appert Que mieulx vault il vivre en desert Qu'avec male femme habiter. (DESCH., M.M., c.1385-1403, 25). Je vous prometz qu'il [Danger (personnification)] semble bien mau sire ; A tous propos il est prest d'escondire (GARENC., Poésies N., 1389-1415, 100). Trop male et perilleuse fu celle roine de France (FROISS., Chron. D., p.1400, 182). Comme au roy Richart fus tu male, A qui longtemps esté amie Avoyes, mes ne faillis mie De le destruire, a dure honte ! (CHR. PIZ., M.F., IV, 1400-1403, 75). ...si Dieu luy eust donné ung souhait a choisir, il eust demandé la mort de sa femme, "laquelle, disoit il, estoit tant male et obstinée en malice que, si je la savoye en paradis, je n'y vouldroye jamais aller" (C.N.N., c.1456-1467, 490).

 

b)

[Épithète] : "...Murdry a vo mouller par sa grant tricherie ; Espoir que vous cuida aussy tollir la vie ; C'est une malle femme et de mauvaise vie." (Tristan Nant. S., c.1350, 193). Je te conjur, mal felon, de par Dieu omnipotent et de par le Pere et de par le Fil et de par le Saint Esperit et de par tous les sains... (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 141). "...il i ot une male roine en ce pais, qui tout nous tolli." (FROISS., Chron. D., p.1400, 108). Une bonne femme vieille prioit tousjours à haulte voix que les dieux lui donnassent longue vie, et comme il l'oist dire, demanda et voult savoir qui la mouvoit : "Certes, dist-elle, j'estoie pucelle chieux mon pere, si avoit un roy en ceste terre moult mal et qui trop grevoit le peuple..." (CHR. PIZ., Faits meurs Ch. V, S., I, 1404, 78). Tant fut loyale Que Fortune si dure et male Ne puet amenrir son cuer pale Vers s'amour tresespecïale. (CHART., L. Dames, 1416, 297). Mais c'estoit grant pitié comme de voir le povre Bethidés qui se sentoit et voioit deceu par sa male femme (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 600).

 

-

Males gens/male gent : ...car nous avons a faire a moult male gent, qui maint preudomme ont mis a douleur et a tourment, et toute leur entente si est a gens conchïer et rober. (Bérinus, I, c.1350-1370, 62). Et disoient couvertement qu'il ne se acquittoient mies bien envers le roy de France, quant il n'aidoient à bouter hors ces males gens dou dit royaume. (FROISS., Chron. L., VI, c.1375-1400, 184). "Je ne venrai pas aisse à men entente de ces blans capprons : che sont male gent et fourconsilliet." (FROISS., Chron. R., IX, c.1375-1400, 217). Onques si malles gens que Escos sont en un païs il ne veïrent, ne trouvèrent si faus ne si traïtres, ne de si petite congnissance. (FROISS., Chron. R., XI, c.1375-1400, 278). Lors dist Gieffroy a Thierry : Beau, tres doulz frere, encores vous faut il demourer icy, car sachiez que je vueil aler veoir noz deux freres en Alemaigne, le roy Regnault de Bahaigne et le duc Anthoine de Lussembourc. Mais je n'y yray pas desgarny de gens d'armes, car il y a males gens en ce pays la, et qui voulentiers desrobent le trespassans. (ARRAS, c.1392-1393, 279). Il n'est plesir Que desplesir Ne rue bas en peu de temps ; Je voy courir Et decourir En ce monde de male gens. (Pass. Auv., 1477, 110).

 

c)

Empl. subst. "Personne méchante" : Nom recouvré [Marie d'Orléans porte le nom que la Vierge a paré de grâces], joye de peuple, Confort des bons, des maulx retraicte ["refuge contre les méchants" (Éd.)], Du doulx seigneur [Charles d'Orléans] premiere et seule Fille de son cler sang extraicte, Du dextre costé Clovis traicte, Glorïeuse ymage en tous fais, Ou hault ciel creee et pourtraicte Pour esjouyr et donner paix. (VILLON, Poèmes variés R.H., c.1456-1463, 40).

 

2.

Mal parleur. "Personne qui fait du mal par ce qu'elle dit, personne qui médit, qui calomnie" : Il [le magnanime] ne loe pas moult les gens et n'est pas mal parleur et mesmes de ses ennemis et ne dit nul mal se n'estoit pour cause d'aucune grant injure. (ORESME, E.A., c.1370, 255). ...si a mandé la Court les prevost de Paris et des Marchans et leur a enjoint que se informent et enquierent de telx malx parleurs et en facent bonne justice, et se il ont mestier de la Court, elle s'est offerte et offre à eulx ayder à faire bonne justice. (BAYE, II, 1411-1417, 20). Que bon accors Tu ensuyves pour saulver ame et corps, Car envye ne poursuyt que discords Et souvent vient par mansongiers records Que Male Bouche S'en va semant, faisant aultruy reproche : Fuy son venin, ta personne ne touche, Et mal parleur de ton hostel n'approche, Car aultrement Temperance n'auroit gouvernement De ton affaire (MESCHIN., Lun. princes M.-G., c.1461-1465, 84).

B. -

[D'une chose]

 

1.

"Mauvais, néfaste"

 

a)

[Avec un subst. désignant une chose concrète] : Sy veult que on le nomme Roy du pays de toute Ytale, Si leur fera guerre moult male. (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 265). A vous parle, compains de galle, Mal des ames et bien du corps : Gardez vous tous de ce mau halle Qui noircist les gens quant sont mors ; Eschevez le, c'est ung mal mors. Passez vous au mieulx que pourrez, Et, pour Dieu, soiez tous recors : Une foyz viendra que mourrez. (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 132). A vous parle, compains de galle, Mal des ames et bien du corps : Gardez vous tous de ce mau halle Qui noircist les gens quant sont mors ; Eschevez le, c'est ung mal mors ["morsure"]. Passez vous au mieulx que pourrez, Et, pour Dieu, soiez tous recors : Une foyz viendra que mourrez. (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 132).

 

-

Mal oeil : Trop les regarde de mal oeil [d'Envie] Et, se nullement accrochier Les peut, jus les fait trebuchier. (CHR. PIZ., M.F., I, 1400-1403, 113).

 

-

Prov.

 

.

Male herbe croist volontiers : Mal herbe croist volentiers. (E. LEGRIS, Anc. prov. fr., p.1400. In : Bibl. Éc. Chartes 60, 1899, 587).

 

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C'est à la fin qu'on peut voir quelle est la chose bonne ou male selon son effet : Or est le temps de venir au terme de mon euvre, de laquelle, ainsi que veult dire le proverbe cy dessus, tousjours à la fin puet on veoir quelle est la chose bonne ou male selon son effect. (CHR. PIZ., Paix W., 1412-1413, 181).

 

-

[Avec un sens affaibli] "De mauvaise qualité" : Turquer denrees et changier Mauvais pour bon, par losangier, Et par jurer, et par promettre Que chose ["marchandise"] ne pourroit mieulx estre, Qui estoit male et contrefaite, Et, tout pour decevoir gent faite, Vendre a terme par faulx contras. (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 71).

 

-

[D'un phénomème astronomique] "Qui porte malheur ; funeste" : De laquele [mortalité], sans contredit, Fut principale occasion Une faulse conjonction De Jupiter, Saturne et Mars, Avecquez autres maulx regars D'aucunes des autres Planètes Et éclipses lors eschéetes, Qui sont deffaulx espéciaulx De certains Corps Célestiaulx (LA HAYE, P. peste, 1426, 24). Que Jupiter, l'estoille clère, Et Saturnus, son triste père, Par leur male conjonction Et triple permutation Gastent maint règne, en vérité, Par guerre et par mortalité. (LA HAYE, P. peste, 1426, 26). Et disoit aussi estre signe de paix quant Saturne ne regardoit de mal aspect Jupiter ne Mars, et touteffois que Mars estoit receu regardant Saturne debille, disoit estre les guerres et contrarietés (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 29 r°).

 

-

[D'un phénomène atmosphérique] : Arrestons sanz plus faire nage, Tant que soit passé cest orage Et ce mal temps. (Mir. emper. Romme, 1369, 286). ...il attendit dessoubz quelque auvent que le maulx temps fust passé et la pluie cessee. (MART. D'AUV., Arrêts Am. R., c.1460-1466, 206). Males de[s]tinees Les puissent trestous craventer, Et mal vent puist contre eulx venter ! (S. fol, c.1480-1490, 8). Sortez dehors, que la malle tempeste, La malle rage et malle mort aussi, Villaynement, ains que partez d'icy, Vous puisse a tous fouldroyer corps et teste ! (LA VIGNE, S.M., 1496, 137).

 

b)

[Avec un subst. désignant une chose plus abstr.]

 

-

[Avec un subst. à valeur neutre ; mal est souvent opposé à bon] : En la denudacion de l'oz, herisipille est mal signe. (SAINT-GILLE, A.Y., 1362-1365, 98). Et pour ce, elle qui parle, en entencion de bien faire, pour cuider refresner l'ire, courroux et male volenté de ladite Marion, li dist que elle se appaisast (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 355). Et ne vy je leur mere, le samedy que mon frere de Forests m'acointa les males nouvelles, en forme de serpente du nombril en aval ? (ARRAS, c.1392-1393, 253). L'avoir d'aucun, sanz raison, prendre, La voye d'Enfer fait apprendre, Et si n'est garde se pou non, Hayne engendre et mal renom. (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 28). ...moult doubta et se pensa Que c'iert male signifïance (CHR. PIZ., M.F., IV, 1400-1403, 44). ...s'en retourne a l'ostel pour entendre a la cuisine, que le humet ne soit espandu comme par male garde il avoit esté la nuytée (C.N.N., c.1456-1467, 369).

 

-

[À propos d'une pers.] De mal(e) affaire

 

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"De mauvaise conduite" : Je scey bien qu'elle a le cuer autain Et qu'elle est bien de mal affaire (Pass. Auv., 1477, 134).

 

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"Naturellement mal disposé (en l'absence d'éducation ou de lumière religieuse)" : Femme plainne de mal affaire Fait en tout par tout le contraire De quant c'on li prie et deffent. S'aulcuns hons la cuide retraire Pour chastïer de folie faire, Adonc en a plus grant talent. (DUPIN, Mélanc. L., c.1324-1340, 149).

 

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"De mauvaise réputation" : Vezla le duc de mal affaire. (Mir. st Guill., c.1347, 16).

 

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"Qui a de mauvaises intentions" : LA PELERINE. Maistre, vez la qui nous regarde Trop malement ; j'ay grant paour Qu'il n'y ait gent illec entour De mal affaire. (Mir. emper. Romme, 1369, 287).

 

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Male aventure : Il ne prent pas ici pechié pour vice et pour culpe, mais pour erreur et male aventure. (ORESME, E.A.C., c.1370, 307). ...et avoit fait pourveir et rafresqir tous les castiaus de Cambresis de bonnes gens d'armes, a la fin que il ne fuissent souspris de nulle male aventure. (FROISS., Chron. D., p.1400, 313). Si leur pourra, par aventure, De ce venir male aventure (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 124). L'autre, tresdesplaisant de ceste male adventure, conforte le chevalier au mieulx qu'il peut (C.N.N., c.1456-1467, 77). ...son mary donna le tresdoulx advertissement de sa dure cheance et male adventure, convertie (...) en joye non pareille (C.N.N., c.1456-1467, 184).

 

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Male cause

 

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À male cause. "À tort" : "Nanil [le conte refuse l'offre de ne pas se battre], par Dieu, felon chevalier," respondy le conte, "se tu ne veulx ycy recongnoistre que a male cause tu az acusee le bonne pucelle..." (Comte Artois S., c.1453-1467, 57).

 

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Mal chef

 

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Aller à mal chef. "Connaître une mauvaise fin" : Et de ces nobles Dieux consent, Et tout le monde si assent Que par toutes les nacions Du monde ou gent ont mansions, Le plus noble si soit le chief De tous, autrement a mal chief Yroient toutes seignouries Et moult tost seroient peries, Se noblece ne les gardoit. (CHR. PIZ., Chem. estude P., 1402-1403, 150).

 

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Male façon. "Mauvaise action" : ...Amours me moustra par feauté Qu'il estoit des oiseaus assez, Et que point ne fusse lassez D'entre les oiseaus pourquerir Aucun qui me peüst garir, Et loe qu'einsi le face on, Car point n'i a male façon, Dès qu'on ne puet, par bien ouvrer, Ce qu'on a perdu recouvrer. Et dès qu'Amours le me loa, J'eus droit, se mes cuers l'avoua. (MACH., D. Aler., a.1349, 292). ...Maix Longis n'ot pas cuer de Judas le griffon, Car quant vit qu'il ot fait si mallefaisson [l. malle faisson], Per devant Jhesu Crist se mist a genoillon (Lion Bourges K.P.F., c.1350, 882). ...item, doivent garder les bestes qui sont prinses es malles fachons [ici, "délit de pâturage illicite"] d'icelle forest (HECTOR DE CHARTRES, Cout. R., 1398-1408, 45). En ce temps avoit grant ranqune entre le roi d'Engleterre et les Espagnols, pour auqunes malles façons et pillages que li dis Espagnols avoient fait sus mer as Englois. (FROISS., Chron. D., p.1400, 880). ...pour quoy en toutes choses communement, se faultes y sont, on les peut amender, excepté en fait de chevalerie, car la male façon ne se peut jamais reparer de ceulz, qui sont mors (CHR. PIZ., Faits meurs Ch. V, S., I, 1404, 210).

 

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Male fin/male issue : Faire puist elle male fin ! (CHR. PIZ., M.F., I, 1400-1403, 112). Car, contre les princes crueulx, Qui n'ont misericorde en eulx, Dit un aucteur que cruaulté De prince, en especiaulté, Destruit le regne, et male fin En a lui meisme en la parfin. (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 25). Elles sont clamees Influences et destinees, Qui a ce sont predestinees Que aussi tost que l'omme naist Ou la femme, ja si grant n'est, Ceulx yci de sa vie ordenent Et sa droite fin lui assenent, Bonne ou male, selon les cours Ou les planetes ont leurs cours A l'eure que l'enfant est né. (CHR. PIZ., Chem. estude P., 1402-1403, 92). ...et predist à Hieroboam qu'il resneroit sur Israël, tant qu'il seroit bon, mais il fut par traict de temps très mauvais et induisit le peuple à ydollatrie et resembla son pere, de beau commancement et malle fin, combien que je estime la fin Salomon par penitence estre bonne, mais de Hieroboam aucuns le configurent à Machomet, comme Anthiochus à l'Antecrist. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 34 v°). Cestui Hugues prenostica qu'il y auroit neutralité ou concille de Balle, dont l'effect monstra assez tost l'experience et dist raison, c'est assavoir pour ce qu'il fut principié ou signe de l'Escorpion, dont le comancement et chef a beau semblant et la fin laide et de malle yssue. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 154 r°).

 

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Male fortune : Et quant il li vendra bonne fortune, il n'en sera pas moult joieus ne pour male fortune moult triste. (ORESME, E.A., c.1370, 251). Item, il ne s'esjoïst de bonne fortune ne n'a tristece de male fortune fors bien peu. (ORESME, E.A.C., c.1370, 252). LE PREMIER BARON. (...) Durement vous a assailly La male fortune a ce tour. (Gris., 1395, 84). Mais Remondin qui estoit eschauffez, et qui ne ressoingnoit sa vie, ne fortune bonne ne male qui lui peust avenir, le suit asprement, et il estoit bien montez, et tousjours le suit le conte qu'a trace qu'a veue. (ARRAS, c.1392-1393, 19). Tollir ne le peut Meseür, Ne male Fortune, n'Envie, Tant comme cellui soit en vie, Qui monte par ycelle voye, Qui es haulx estages l'avoye. (CHR. PIZ., M.F., I, 1400-1403, 119). ...se sa male fortune n'est digne d'estre ou dit livre de Boccace, j'en fais juges tous ceux qui l'orront racompter. (C.N.N., c.1456-1467, 191). Et, le jour Saint Jehan Baptiste, XXIIIIe jour de juing, aucuns qui se baignoient à leurs plaisances en la riviere de Seine, par male fortune, se noierent. (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 49).

 

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Mal gré

 

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Bon gré mal gré. "Qu'on le veuille ou non" : ...comme aulcuns incitoient le roy de le faire ployer [le duc de Bourgogne] bon gré maugré [l. mau gré] (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 157).

 

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Encourir le mal gré de qqn. "Déplaire à qqn" : Prince amoureux, des amans le greigneur, Vostre mal gré ne vouldroye encourir, Mais tout franc cueur doit, par Nostre Seigneur, Sans empirer, ung povre secourir. (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 84).

 

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Savoir mal gré à qqn de qqc. "Reprocher qqc. à qqn" : Et ne cuidiez pas qu'il m'anoye Se mettre volez vostre cure En my sur toute creature : Ja mal gré ne vous en saray Ne en men coeur ne vous harray, Mais m'amisté pas nen arez Conme escuier, n'y entendez ! (Dit prunier B., c.1330-1350, 68). Car il m'est vis, se par Fortune sui Jus dou degré ou jadis montez fui Par li en qui je ne me fi, n'apui, A dire voir, Que nul mal gré ne li en doy savoir, Car elle fist dou faire son devoir (MACH., J. R. Beh., c.1340, 85). Doulce mére Dieu debonnaire, Ne me vueillés mau gré savoir De ce fait (Mir. femme roy Port., c.1342, 175). "Nennil, dist li princes, je ne vous en sçai nul mal gré, fors ceulz qui chi vous envoient." (FROISS., Chron. L., VII, c.1375-1400, 97). Mais si aucun m'en vouloit demender de bouche, je lui en diroie mon avis, mais orendroit je me tais, pour ce que aucune dame, damaiselle ou aultre m'en savroit mal gré, combien que, en bonne foy, tout est a la louenge des femmes, comme j'ay dit (Quinze joies mar. R., c.1390-1410, 115). ...combien que je ne pense avoir dit ne fait chose dont me devez savoir mal gré, je ne sçay, moy, qu'on vous a rapporté. (C.N.N., c.1456-1467, 156). ...vous requier que ne m'en sachez nul mal gré, et me veillez pardonner le maltalent qu'avez vers moy conceu. [Une jeune fille a refusé tous les partis que lui proposait son frère] (C.N.N., c.1456-1467, 359).

 

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Mal heur. "Mauvaise chance, mauvaise destinée" : Ou mieulx te plaist qu'onneur ceste meschance : Que respondras a ceste consequence ? - J'en seray hors quant je trespasseray. - Dieux ! Quel confort ! Quelle sage eloquence ! Plus ne t'en dis. - Et je m'en passeray. [Le coeur de Villon :] - Dont vient ce mal ? - Il vient de mon mal eur : Quant Saturne me fist mon fardelet, Ses motz y mist, je le croy. - C'est foleur (VILLON, Poèmes variés R.H., c.1456-1463, 71).

 

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Mal(e) oeuvre

 

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"Mauvaise action, méfait" : ...Et chacun pense a son cuidier : Par lui [Fortune] sont tous cheüz Templier, Mais Fortune n'a pas ce fait, Ains leur malle oeuvre et leur malfait. (Renart contref. R.L., t.1, 1328-1342, 31).

 

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Bastir mal oeuvre pour qqn. "Mal se conduire envers qqn" : ...la royne Vasti, Qui mal oeuvre pour lui basti. (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 262).

 

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Mal port. "Mauvaise destination" ; au fig. "mauvaise situation" : Je suis arivé a mal port. (Pass. Semur D.M., c.1420 [1488], 232). Et les negligens a mal port Arriveront, n'en doubte mie. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 62). Nous serions bien a mal port Au moins sil estoit ytel (Myst. st Martin K., a.1500, 368).

 

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Male soudee. "Mauvais salaire ; ici au fig. punition" : Si leur rendi male souldee De ce qu'ilz s'ierent rebellez ! (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 237).

 

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Male veuillance. "Animosité, hostilité" : ...non pas qu'ilz s'en voulsissent vengier par mal voeillance, ains le faisoient pour esprouver le hardement et fierté de lui (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 282).

 

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Male voulance. "Animosité, hostilité" : ...monseigneur de Berry (...) vous prye que vous vueilliez (...) que duc de Bretaingne doit avoir à son naturel seigneur, le roy de France ; pour quoy vous n'entrez en son indignation et mal voulense. (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 235).

 

c)

En partic. [Souvent dans des formules d'imprécation, de malédiction, de menace] Mal + subst. désignant une période

 

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Mal an. "Mauvaise année ; au fig., "malheur" : Maiz ceulz que Hastivet afaite, Que Dieux en grant malen [l. mal en] le mette, Sont diffamés a grant pechié, Car il les fait mal enteichié. (LA BUIGNE, Rom. deduis B., 1359-1377, 360). Biaux seigneurs, que pourrons nous faire ? Veez ci Sathan, nostre adversaire, Qui nostre malen [l. mal en] renovelle. Contre nous esmuet la querelle Et remettre nous veult arriere En la maison d'enfer chartriere ! (Myst. Adv. N.D. R., c.1360-1365, 62). ...va t'en. Que Mahon te mette en mal an ! (Mir. Barl. Josaph., c.1363, 256). Dieu mette en mal an qui en ment, Oncques nul ne vint au devant Sinon deux malastrus racletz. (Gaud. sot, c.1450, 12). ESTONNÉ. Nostre maistre est douleur plain d'ire ; Je ne sçay que deable il luy fault. MALCUIDANT. Et c'est pour ce villain marpault A qui Dieu doint senglant mal an ! (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 282). Dieu mecte en mal an l'orde beste qui m'a encusé, dist le bon seigneur. (C.N.N., c.1456-1467, 213). Sil vient il souffrira mal an (Myst. st Martin K., a.1500, 246). Ne te conseille par merdaille, Qu'il ne valent rien en bataille, N'a garsons, quar, se tu les crois, Je te jur sur toutes les croix Qui furent en Jherusalem, Il te mettront en si mal an Que tu n'i porras conseil mettre Par cop d'espee ne par lettre. (MACH., Voir, 1364, 482).

 

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Male semaine

 

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"Période critique; mauvaise passe" : Deffendez leur le mentir, jouer a jeux illicites, de laidement jurer, et de dire parolles qui sentent villenies ne parolles deshonnestes ne gouliardes comme aucunes mescheans qui maldient de males senglentes fievres, de male senglente sepmaine, de male senglente journee. (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 129). LE DRAPPIER. Male sepmaine M'envoye Dieu se vous ne l'avez [mon drap] ! (Path. D., c.1456-1469, 162). Or ça, que la male sepmaine Vous envoie huy Dieu le pere ! (Myst. Pass. Amb. R., c.1474-1500, 59). Dieu le met[e] en male sepmaine ! Fault il maintenant la troter ? Que c'estoit bien pour moy froter, S'il m'eust ja cela oÿ dire ! (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 692).

 

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Estre dans une mauvaise semaine/avoir une mauvaise semaine. "Être dans une mauvaise passe" : Et quant j'ay tout regardé, Ceulz sont en male sepmaine Qui ont cuer enamouré, Car c'est vie trop grevaine, Quant mort y gist si prochaine ; Et pour ce ensement conclus Que longue vie m'est saine. (MACH., App., 1377, 638). Ilz avront tresmale semainne, Celle quocardaille de Parthe ! Ilz seront galez, tout acerte, Sy bien qu'i n'y avra que dire, Puisque l'empereur nostre sire Leur court sus par tresgrant fureur. (Myst. st Adr. P., c.1450-1485, 55). Il sera en mal sepmaine S'une foiz je le puis happer (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 363).

 

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Mal jour/male journee/mal(e) nuit. "Mauvais jour, mauvaise nuit" ; au fig. "malheur" : Morel, beste de grant pris, comme nous avons entre toy et moy souffert mainte grande destresse et mainte male journee, que onques sur toy ne mis selle. (Bérinus, I, c.1350-1370, 260). ...Que malle nuit puist il avoir [le fauconnier malhabile] (LA BUIGNE, Rom. deduis B., 1359-1377, 339). Tu dys vrai, Robin, turelure. Que le maul jour te soit donné ! (Pac. Job M., c.1448-1478, 187). Mieulx te voudroit estre en infert, Palliars, quar tu auras mal jour. (Myst. st Bern. Menth. L., c.1450, 130). LE VALET, à l'aveugle. Mal jour dont Dieu, qui t'a les yeulx Anssy gariz ; dolent j'en suis Ne resteray de querir huy, Tam que je treuve ung aultre orbache (Myst. st Bern. Menth. L., c.1450, 183). Sa, ribaudaillie, que mal nuyt Et mal jour et malle tempeste Vous puisse choer dessus la teste. (Myst. st Sébast. M., c.1450-1500, 209). ...après tantes males nuictz et jours doloreux, Amour, qui ses serviteurs loyaulx aide et secoure quand bien luy plaist, leur appresta ung jour tresdesiré (C.N.N., c.1456-1467, 434). [Des rois et des reines]...ont fait de necessité vertu et ployé dessoubz fortune (...), ont fait de mal jour feste (CHASTELL., Temple Boc. B., 1463-1464, 141).

 

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Male heure

 

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De male heure/à/en (la) mal(e) heure. "Pour son malheur" : Et cilz est nez de moult male heure Qui de cuer vous servir n'entent. (Mir. nonne, 1345, 316). Si li prist volenté et plaisance d'aler ou royaume de Navarre veoir sa mere et son oncle ; ce fut bien à la maleheure [l. male heure] pour luy et pour ce pays. (FROISS., Chron. M., XII, c.1375-1400, 81). Et s'en vint vers la prison où son filz estoit, et tenoit à la male heure ung petit long coutelet, dont il appareilloit ses ongles et nettioit. (FROISS., Chron. M., XII, c.1375-1400, 88). "Par Dieu, Jehan Lion nous destruira tous. A mal heure fu, quant vous ne m'en laiastes convenir, car, se je l'euisse occis, j'en fuisse trop legierement venus sus." (FROISS., Chron. R., IX, c.1375-1400, 173). Le roy meismes, qui de neant S'estoit vantez, en la male heure, Sur un destrier fuit grant aleure (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 7). ...nous, chetifz et de male heure nez, Avons estoy a naistre destinez, Quant le hault pris du royaulme dechiet, Et nostre honneur en grief reprouche chiet, Qui fut jadis franc, noble et beneuré. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 2). Se la faulte par toy si vient Tu l'auras faictë a mal heure, J'en ay le cueur plus noir que meure, Toute douleur en soy contient, Se tu es sage, si labeure Pour moy commë il appartient. (RÉGN., F.A., 1432-c.1465, 54). SECOND SERGENT (a celluy qu'i tient.) Ne souffit il pas une fois C'on vous a laissier barbeter ! Alez devant et cheminez En la male heure ! (Myst. st Adr. P., c.1450-1485, 76). Quand je vous prins en mariage a la male heure, vous ne apportastes gueres avecques vous (C.N.N., c.1456-1467, 420). Comme il fut dit il fut fait, en la male heure, et vint trouver monseigneur et madame, et fist son personnage (C.N.N., c.1456-1467, 480). Sil enchanteur, né de malle heure, S'a fait, affin qu'il ne honnore Les dieux et craingne les tourmens Lesquelz sont devant luy presens, Et les princes courcer vers luy. (Myst. st Laur. S.W., 1499, 233).

 

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Mal temps. "Période funeste" : ...pour entretenir paix et concorde en ce mal temps de guerre (FAUQ., III, 1431-1435, 62).

 

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Au fig. Se donner mal temps. "Se faire du souci" : ...ne se donnerent garde [deux amants] que le mary les surprint ; dont ne se donnerent nul mal temps (C.N.N., c.1456-1467, 435).

 

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Faire la male vie. "Faire beaucoup de bruit, pousser des cris (ici pour exprimer la souffrance)" : Et bon curé de cryer, et de faire la plus male vie que jamais fist homme. [Il vient d'être châtré par surprise] (C.N.N., c.1456-1467, 405).

 

d)

[Avec un subst. à valeur positive ; inverse la valeur du subst.]

 

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Male aise : Et m'est avis que vous m'avés escript plus briément que vous n'avés acoustumé : si ne sai se vous avés loisir ou se vous le faites pour ce que je vous escrive plus briément ; mais c'est une chose que je feroie a mal aise, car quant je commence, je n'i puis faire fin. (MACH., Voir, 1364, 592). Se Dieu plaist, n'arez se bien non ; N'en soiez de rien a mal aise, Dame (Mir. abbeesse, 1340, 76).

 

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Faire qqc. à mal aise. "Faire qqc. avec déplaisir" : Et m'est avis que vous m'avés escript plus briément que vous n'avés acoustumé : si ne sai se vous avés loisir ou se vous le faites pour ce que je vous escrive plus briément ; mais c'est une chose que je feroie a mal aise, car quant je commence, je n'i puis faire fin. (MACH., Voir, 1364, 592).

 

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Vivre à mal(e) aise. "Avoir une existence pénible, désagréable" : Ung gentilhomme [avait] (...) sa mere bien ancienne et tresfort debilitée de maladie, plus languissant et vivant a mal aise que nulle aultre de son eage (C.N.N., c.1456-1467, 458).

 

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Male amour : Par voie de disimulation il dist que il i escriroit, car il n'i voroit mie nourir toute le haïne ne male amour que il poroit bien. (FROISS., Chron. R., X, c.1375-1400, 280). Ne de la hayne du roy Perceforest ou de la male amour des chevaliers du Francq Palais avecq toute la vueillance mauvaise du lignage de Estonné n'en donroie ung poys, fors de son filz Passelyon qui me doit occire (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 224).

 

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Mal engin. "Ruse, tromperie" : Mais toutes pas teles n'estoient, Car maintes dames le faisoient Einsi comme Amours le devise, Sans mal engien et sans feintise, De fin cuer loial, sans meffaire, Dous, humble, courtois, debonnaire, Par franche liberalité Et de fine pure amité. (MACH., D. Lyon, 1342, 218). Mais en la fin, Com fins loiaus amoureus, de cuer fin Espris d'amer, sans penser mal engin, Moult humblement li dis, le chief enclin, Et sans effroy... (MACH., J. R. Beh., c.1340, 81). ...promettons par ces presentes lealment et en bonne foi, sens mal engin tenir fermement (Trés. Reth. S.L., t.2, 1366, 81). Et fu la aresté (...) que casquns sires (...) venroient (...) devant Tournai, et la tenroient le siege tant que ordenance dou tenir se porteroit, sans fraude, mal enghien ne dissimulation. (FROISS., Chron. D., p.1400, 415). Dieu les me doint bonnes et belles, Et qu'elles puissent estre telles Sans mal engin et sans cautelles Par qui j'aye delivrance. (RÉGN., F.A., 1432-c.1465, 32). ...pensant (...) que trente jours [de jeûne] n'arresteroient gueres, elle promist de les faire sans fraude ne mal engin. (C.N.N., c.1456-1467, 576).

 

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Male estrainne : Qu'or fust il a sa male estraine, Lez Marigny droit en la plaine, Nuz et deschaux com j'ay le doy, Et toutes femmes par la loy Mariées et sanz mari Fussent chascune delez li Atout un ramon de behourt ! (DESCH., M.M., c.1385-1403, 318). Jupiter vous doint malle estraine ! (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 307). ...et quant ses gens recognurent que c'estoit le seigneur de Saintré, "Dieu," dist elle, "vous mecte tous et toutes en male estrainne !..." (LA SALE, J.S., 1456, 273).

 

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Male grace

 

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"Disgrâce" : ...oy dire audit Guespin que une foiz mons. le connestable avoit esté en male grace et amour de nosseigneurs les ducs de Berry et de Bourgongne (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 516). ...aussi qui ne feroit declaracion des armes des ungs comme des autres, j'en pourroye estre en male grace (LA SALE, J.S., 1456, 218). ...elle fut ad ce menée que s'elle ne vouloit estre en la male grace de pere, de mere, de parens, de amys, de maistre et de maistresse, qu'elle ne tiendroit la promesse qu'elle avoit faite a Gerard son serviteur. (C.N.N., c.1456-1467, 170). Et reviendrons à parler comment se conduisit le filz en soy veant en la male grace de son pere, qui s'en alla à Termonde, luy et son estat, escoutant et attendant nouvelles de son pere (LA MARCHE, Mém., II, c.1470, 418). Tout n'en valloit pas ung festu, Nous fusmes bannis en tous lieux En la malle grace des dieux (Sots gard., a.1488, 104).

 

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"Malveillance, mauvaise humeur" : Jehanneton la Chapperonniere, Gardez qu'amy ne vous empestre ; Et Katherine la Bourciere, N'envoyez plus les hommes paistre, Car qui belle n'est ne perpestre Leur male grace mais leur rie, Laide viellesse amour n'impestre Ne que monnoye c'on descrye. (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 58).

 

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Male joie. "Malheur" : La manequine male joye Ara, se fas ce que queroie. (Mir. fille roy Hongrie, c.1371, 54). Si les peut on de legier prendre, Car, par les champs s'en vont fuyant, Et les Juïfs les vont huyant,Qui les occient a troppiaulx, Male joye y ont de leur piaulx Les Persens (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 228). Delivre toy ! que male joie T'anvoie Tavergant nostre dieu ! (Pass. Semur D.M., c.1420 [1488], 112). Et lors respondit la royne : "Elle fist sa male joye, que pour un moynne laissier cellui qui tant l'amoit." (LA SALE, J.S., 1456, 303). Lucifer luy dont malle joye, Sathan et le faulx Belezebust, Et l'etrangle d'une coroye, Puis es enfers soit son tribust ! (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 599). Ie puisse auoir malle iournee Mal an malle heure et malle ioye. Si plus tost me soustiendroye Sur la teste que sur les piedz. (Myst. st Martin K., a.1500, 191).

 

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Male paix. "Discorde" : ...si elle ne doubtast mettre male paix entre monseigneur et madame, il ne luy chauldroit guere de la desloyaulté de monseigneur (C.N.N., c.1456-1467, 116).

 

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Mal repos. "Absence de repos" : ...j'aymeroie mieulx vous veoir noyer que seans vous bouter. Allez couscher en mal repos dont vous venez. (C.N.N., c.1456-1467, 28).

 

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Male santé : ...Et aussi que malle santé Te doint celuy qui te forma ! (Obstin. femmes T., c.1480-1500, 38). Malle mort et malle santé Puisse avoir qui vous a mys cy ! (LA VIGNE, S.M., 1496, 507).

 

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Mal talent. "Irritation, colère, esprit d'hostilité" : Semblablement est de rancune et mal talent qui par armes c'est demonstrée fort à tost remectre et appaisier, et pour ce, en cestui fait destruisant comme le feu à l'estaindre convient grant continuacion de l'eaue de doulceur et benignité à getter sus, laquelle viengne et sourde de toy mesmes comme de droite fontaine de clemence, leesce et debonnaireté. (CHR. PIZ., Paix W., 1412-1413, 63). ...et sans nulles haynes, envies, ne mal talens, fors seullement pour acquerir honneur et bonne renommee et les tresdesirees graces de leurs tresbelles dames. (LA SALE, J.S., 1456, 125). Le mal talent de nostre bonne gouge, voyant son mary en bon ploy et a son droit, ne se monstra meshuy si aspry (C.N.N., c.1456-1467, 30). Car ou soit ly sains appostolles, D'aubes vestuz, d'amys coeffez, Qui ne seint fors saintes estolles Dont par le col prent ly mauffez De mal talant tous eschauffez, Aussi bien meurt que cilz servans, De ceste vie cy buffez : Autant en emporte ly vens ! Voire, ou soit de Constantinobles L'emperieres au poing dorez (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 48).

 

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Avoir male feste de qqn. "Être mal accueilli par qqn" : Hay, hay, la teste ! Des hommes ait on malle feste. Vous m'avez pres que descoeffee. (P. Jouh. D.R., a.1488, 25).

 

e)

[Avec un subst. à valeur nég. ; renforce la valeur du subst.] : L'ADVOCAT. (...) Et si est sanz nul mal reprouche (Mir. enf. ress., 1353, 15). A mal gibet les puist on pandre ! (DESCH., M.M., c.1385-1403, 282). Au pere et au filz a perfaictement L'Empereur grant chiere faicte, Qui nulle souspeçon vers eulx N'a, en riens, adont, l'un des .II. Enfens, ce fu Cassandor, parle A son frere de la tres male Trahison, qu'ilz ont ordonnee, Si couvient que tost soit donnee La poison, mes qu'il voye point, A l'Empereur ; (CHR. PIZ., M.F., IV, 1400-1403, 63). Tu riffles comme ung droit porceaulx. Esgar quel lanssiés de sangler ! Quant sera plain vostre peut ventre ? Que male fievre vous y entre, Et mal farsin et male guoute ! (Pass. Semur D.M., c.1420 [1488], 77). Item, donne [quelque chose, ici : un poème] a ma povre mere, Pour saluer nostre Maistresse, Qui pour moy ot douleur amere, Dieu le scet, et mainte tritresse - Autre chastel n'ay ne forteresse Ou me retraye corps ne ame Quant sur moy court malle destresse, Ne ma mere, la povre femme -. (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 78). Or meurs je les membres tous sains, Et tout en bon point se me semble : Je n'ay mal sinon que je tramble De peur et de malle froidure. (Fr. arch. B., c.1468-1480, 41). De malle fievre soit il oingt. (Sots, c.1480-1500, 277).

 

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Male faim : Et ce estoit pour nourrir l'autre part de ceste beste, comme j'ay dit qui estoit toute rungee jusques aux os ; et n'estoit riens qui y parust de tout ce que on luy bailloit né que a ung gouffre de mer, ainsoys mouroit de male fain comme les poetes faingnent de Eusutonnus. (GERS., Noël, p.1404, 309). Mais ou peult estre allee ma femme ? Je meurs de male faim, j'afemme, Elle me fait ronger mon frain. (P. Jouh. D.R., a.1488, 32).

 

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Mal feu. "Feu d'enfer" : Fortune dort pour nous quant a present, et a ja fait grant temps, mais elle veille pour les crestiens ; il y pert bien a nous quant a ore, et aussi bien a il paru a nostre cousin le soudant qui a esté mort et desconfit, il et toute sa gent, en ceste ysle. Que de mal feu soit elle bruye ! (ARRAS, c.1392-1393, 131). Que mau feu toutes les engloute ! (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 92). Je prie a Dieu que mal feu l'arde ! (CH. D'ORLÉANS, Chans. C., c.1415-1440, 2335). "Sire, alons nostre chemin et laissons ces vielles. Que mal feu les arde !" (Percef. III, R., t.2, c.1450 [c.1340], 183). Que du mal feu souy tu brulé, Orde villain detestable. (Myst. st Sébast. M., c.1450-1500, 16). Moynes, que le mal feu les arde Tant portent ilz la cuille verd (Rapp., c.1480, 64). Tost, Arsenicq, que mau fu t'arde, Va querir mortier et palette (MOLINET, Myst. st Quentin C., c.1482, 194).

 

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Male hart. "Corde de malheur (en partiC corde de pendu)"" : Et da, hay, que de malle hart Ou des loups soyes-tu [la bête (l'âne)] estranglée ! (Pont aux ânes T., c.1480-1500, 102). Qu'a malle hart soyez vous tous pendus ! (LA VIGNE, S.M., 1496, 223).

 

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Avoir la male sanglante hart. "Jouer de malchance (p. allusion à la corde du pendu)" : PREMIER DYABLE. (...) Dont viens tu ? ne te vi pieça. Tu as bien jetté ça et la, Je croy, ton dart. SECOND DIABLE. J'ay la male sanglante hart : Je n'ay fait qui vaille un festu. (Mir. ev. arced., c.1341, 135).

 

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Faire sa male hart. "Aller à sa perte" : Et il fera sa malle hart : Il a bien a penser ailleurs. (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 736).

 

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Male honte : Quant Hanibal ot finee sa raison, li aveugle, cui Dieu doint male honte, se presenta et se mist devant le seneschal et dist : "Seigneur, je me plaing de Berinus qui cy est, qui mes yeulx m'a tolus et emblez." (Bérinus, I, c.1350-1370, 83). Male honte ait le chevalier qui se depart de la bataille ains la fin de victoire, car a ceulz apertient la couronne de laurier qui perserverent. (CHR. PIZ., Trois vertus W.H., c.1405, 8).

 

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Male meschance : Se nous avons perdu Ippre ceste fois, une autre fois nous le recouverons à leur malle mescheance. (FROISS., Chron. R., IX, c.1375-1400, 194). Veulz tu avoir male meschance Et espargnier je ne scé quoy Pour autrui, et non pas pour toy Faire plaisir a ton vivent ? (DESCH., M.M., c.1385-1403, 281). Et ledit de La Ramée lui dist : Tu quiers ta male meschance. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 413). Ne me creez jamais s'il n'est icy venus pour nous faire quelque male meschance. Sachiez que je me mectray en tel lieu qu'il ne me trouvera pas, se je puis. (ARRAS, c.1392-1393, 276). Considere lez discors de l'infortune presente et tu y trouveras correspondence, combien que ce n'est pas m'atente de ramentevoir ceulx que leurs coulpes, selon le dit divin, ont semblablement tiré et tirent chacun jour notoirement a despourveue mort ou a publique male meschance. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 77). De riens ne sert a cueur en desplaisance, Chanter, danser, n'aucun esbatement, Il lui souffit de povoir seulement Tous jours penser a sa male meschance. (CH. D'ORLÉANS, Rond. C., 1443-1460, 312). Helas ! le povre chrestïen A assés de male meschance : Unze sepmaines sans laschance A esté illec, le povre homme ! (Path. D., c.1456-1469, 112).

 

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Male mort. "Mort cruelle, ignominieuse" : Sachiez que il n'y a si grant, se il ne veult obeir a mon mandement, que je ne face mourir de male mort. (ARRAS, c.1392-1393, 197). ...ensi (...) il en est esceu et pris au roi Edouwart, pere de cesti qui resgne en present, que si honme ont fait morir de male mort ens ou chastiel de Bercler (FROISS., Chron. D., p.1400, 221). Et ainsi furent li duy frere Occis par male mort amere, Dont cilz de l'ost tant s'esbahirent Que d'ambedeux pars s'en fuïrent, Mais ainçois tant y ot de mors Qu'on ne pot passer, pour les corps. (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 320). ...car aux autres qui estoyent malicieux ou qui se donnoyent a orde charnalité, Dieu ne se monstra pas sinon a leur horrible mort, comme dit saint Jerome que ceulz qui pour lors faisoyent le pechié abhominable de la cher, qui est tres cruel, et qui ne fait nez a nommer, morurent de male mort. (GERS., Noël, p.1404, 297). Et sur ce dit saint Gregoire en l'epistre A Nepontiam : Je ne suis point souvenant avoir leu ne oÿ parler que nul soit mort de male mort qui ait voulentiers acomplies les euvres de misericorde (LA SALE, J.S., 1456, 39). Le mal de monsieur saint Fiacre Vous puisse estraindre la bedaine, Et malle mort ! (P. Jouh. D.R., a.1488, 35). La nourrice qui m'alaicta La malle mort la puisse prandre, Ne qui aux boys me transporta Puisqu'au jour d'uy me convient pendre ! (LA VIGNE, S.M., 1496, 321).

 

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Male rage : Bien est mauldit de male rage Qui tel oultrage A la chrestienté procure, Car destruit en est maint lignage De grant parage,Villes, chasteaulx et maint village, Et maint passage, Et le surplus en adventure. (RÉGN., F.A., 1432-c.1465, 62). Les Infernaulx, remplyz de malle rage, Envers luy ont leur bataille actraicte Encontre ceulx qui ont mis leur courage Pour decorer la joyeuse fleurette. (ROBERTET, Oeuvres Z., c.1450-1500, 99). LA FEMME. Esse tout ? Que [l]a malle raige Te doint Dieu, villain malostru ! (Obstin. femmes T., c.1480-1500, 37). Hay avant ! hay ! lasche journee, La malle rage forcenee Tressanglante le cueur vous hape. (P. Jouh. D.R., a.1488, 35). Sortez dehors, que la malle tempeste, La malle rage et malle mort aussi, Villaynement, ains que partez d'icy, Vous puisse a tous fouldroyer corps et teste ! (LA VIGNE, S.M., 1496, 137).

 

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Male tache. "Vice, défaut" : Li fil enforcierent et crurent, Qui maintes males taches eurent. (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 293).

 

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Mal vice : Et en tout ce n'a nul mal vice, Mais toy trop pou as de malice Pour t'en engraissier ne nourrir, Car ton delit est de courir Par ces biaux lieux (CHR. PIZ., Chem. estude P., 1402-1403, 42).

 

2.

P. ext. "Difficile" : Item de Canilho a l'Espital de sainte Suzanne III lieues et l'on passe ung grant port de neges et de males montees et d'avalhees moult dangereuzes de passer. (CAUMONT, Voy. N., p.1420, 77).

 

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Mal à/de inf. "Difficile à" : Et devez savoir que le demourant de cest chapitre est mal a entendre (ORESME, E.A.C., c.1370, 113). ...la rivière est grosse et parfonde et trop malle à passer. (FROISS., Chron. R., IX, c.1375-1400, 286). L'unne s'apelle vive roigne, qui poile le chien et li fet fendasces ou cuir, et se fet le cuir gros et espés. Et ceste ci est bien male de garir, quar, si le chien garist, elle li revient voulentiers. (GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, 117).

II. -

[Correspond à mal1 >II ; idée de norme morale, religieuse, sociale...] "Mauvais (au regard de telle norme)"

A. -

[Au regard de la morale]

 

1.

[D'une pers.] De males moeurs. "Qui vit dans l'immoralité" : ...que maniere tenissent les dis princes que les mauvais fussent pugnis sans nulle espargne de faveur qui qu'ilz fussent selon les cas de leurs deliz et non par hayne nullement mais en droituriere justice, et les vicieux et de male meurs et non vallables deboutéz, quelque grans ou riches qu'ilz fussent conte n'en fust fait ne a court bien venus (CHR. PIZ., Paix W., 1412-1413, 101).

 

2.

[D'une chose] "Moralement repréhensible, mauvais" : Item, l'incontinent scet bien que il fait males oeuvres (ORESME, E.A., c.1370, 365).

 

-

Mal acquest/mal gain : ...je ne reprouve que l'excez et l'abuz et l'orgueil et le mal acquest. (GERS., Annonc., a.1400, 238). Les uns, pour estre diligens, L'ont gaigné par aucune office, Aultres par tenir benefice, Aultres par sens et bon conquest, Aultres par fraude et mal acquest (CHR. PIZ., M.F., I, 1400-1403, 141). Et d'autres marchans, vous plevi, Faulx et mauvais assez y vi, Par couvoitise si menez Que l'avarice, ou sont donnez, Peut estre les fera ancors Perdre, se Dieu n'en a recors, Tant sont fort ahers a mal gaing (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 72).

 

-

Prov. Les males oeuvres menent à mauvaise fin : ...les males euvres amainnent à male fin. (FROISS., Chron. M., XII, c.1375-1400, 189).

 

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Male voie. "Mauvaise voie, voie de la perdition" : Or veons, se li homs refuse Sa femme a aucun qui la ruse Plus grant de li, et n'en scet rien, Ou a un prince terrien, Pour aler a jouste ou a feste, Ou a un sien parent honneste Qui sera de ce fait requis, Il sera de pluseurs hais, Et dira l'en qu'il est jaloux, Et qu'il est felon et estoux, Et met sa femme a male voye. (DESCH., M.M., c.1385-1403, 59). Et tel gourmanderie envoye Souvent maint d'eulx en male voye, Car c'est un vice trop grevable ! (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 75). ADAM. (...) Tantost comme j'enn euz mangier, Et je recogneu mon pechier, Las, je vis bien que deceuz estoye, Et que m'estoye mys en male voye. Mon oultraige ay bien comparer : Helas, long temps a cien [en enfer] demeurer ! (Pass. Autun Biard F., 1470-1471, 139).

 

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Aller le mal chemin : Flateur porte la lumiere de science ou de conseil a la volenté de ses seigneurs, tant saiche bien qu'ilz vont le mal chemin. "Il fault temporiser, dit il ; il faut dissimuler ; tel me veulent, tel me prenent". (GERS., Annonc., a.1400, 235).

B. -

"Au regard de la norme religieuse" : ...je ne scé que faire de parler affin que les innocens s'en gardent, soient grans ou petis, et celles personnes qui en auront esté deceues s'en repentent et confessent. Car je leur afferme que mangier cher le grant vendredi n'est pas si mal, et que mieulx devroient souffrir que on les despellat membre a membre que souffrir telles injures, et plus y devroient resister que ne feroit une noble pucelle qui la vouldroit violer ou par force despuceler. (GERS., Pent., p.1389, 78).

 

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Male vie. "Vie dans le péché" : Je sçay bien qu'elle se mourra De dueil, par vostre male vie. (DESCH., M.M., c.1385-1403, 122). Ung homme fut, qui fut de male vie, plain de pechiez.. (MIÉLOT, Mir. N.D. W., 1456, 7).

C. -

"Mauvais, inférieur d'un point de vue social" : Et la doulereuse royne, Qui les enfens de male orine Porta, si ot du dueil assez Tout son temps en elle amassez (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 295). ...Se la femme serve contrait avec l'homme qui est franc et non pas serf, et l'homme cuide qu'elle soit de franche condition, le mariage ne tient pas. Au contraire conclusivement a parler, erreur de condition deteriore ou male et servile empesche le mariage, mais erreur de condition de pareille ou meilleur condition ne l'empesche pas (Sacr. mar., c.1477-1481, 50).
 

DMF 2020 - Synthèse Pierre Cromer

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