C.N.R.S.
 
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     HAUTEMENT     
FEW XXIV 372a altus
HAUTEMENT, adv.
[T-L : haut (hautement) ; GD : hautement ; GDC : altement ; AND : haltement ; DÉCT : hautement ; FEW XXIV, 372a : altus ; TLF : IX, 726b : hautement]

A. -

Au propre [Dans l'espace]

 

-

"Dans une position élevée" : Devers oriant droitement En [des sieges] y ot assis haultement Plusieurs d'estranges estatures (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 11).

 

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[Ds une métaph. obscène] : Il porte deux pierres jumelles, Mon coullart ; jamais n'en a moins. Et dames de joindre les mains quand ilz virent donner l'assault. Les ungs s'i servoyent du courtault Si dru, si net, si sec que terre. Et puis, quoy ? Parmi ce tonnerre Vous eussez ouy sonner trompillez Pour faire dancer jeunes filles Au son du courtault haultement. Quand g'y pense, par mon serment, C'est vaine guerre qu'avec femmes ! (Fr. arch. B., c.1468-1480, 35).

 

-

"À une grande hauteur, à une grande altitude" : Qu'onques mais n'avoient veü Nul oisel si bien esleü En quanqu'on pooit deviser, Tant y sceüst on près viser. Et fu getez premierement, Et il vola si hautement Qu'on ne sot quel part il tourna. (MACH., D. Aler., a.1349, 356). Je di que les dames Ont honneur, et hors de diffames Sont de pris grandes et petites ; Et de plus grant les plus eslites En honneur, et non autrement, C'est l'aigle volant hautement. (MACH., D. Aler., a.1349, 364).

 

-

P. métaph. : Dont Guillaumes est deceüs, Quant il ne s'en est perceüs. Car trop hautement commensa, Dont petitement s'avansa, Pour bien sa cause soustenir ; Eins est assez pour lui punir. (MACH., J. R. Nav., 1349, 261).

B. -

P. anal.

 

1.

[Sur l'échelle des degrés d'intensité (concr. ou abstr.)] "Abondamment, fortement, intensément" : Car bonnement Et doucement, Procheinnement, S'Espoirs ne ment, M'iert ma peinne trés hautement A cent doubles merie. (MACH., R. Fort., c.1341, 24). La fu il hautement loés, Et fu cis moult bien avoués Qui le loa premierement. (MACH., D. Aler., a.1349, 294). Et quant il se verront ensamble, Moult hautement s'esjoïront Et par regart le moustreront. (MACH., D. Aler., a.1349, 400). ...en tout le crestïen demeinne N'a homme, s'il la congnoissoit, - C'est bon a croire qu'einsi soit - Qui hautement ne l'onnourast Et qui de lui ne mesurast Humble et courtoise petitesse Au resgart de sa grant noblesse. (MACH., J. R. Nav., 1349, 261). Car d'Amours est tels li usages Que s'aucuns des dames mesdit, S'il ne s'en refreint et desdit, Amender le doit hautement Ou comparer moult chierement. (MACH., J. R. Nav., 1349, 268). Le don prisa moult hautement Et le reçut courtoisement En disant : "Vesci riche don. Bien est dignes de guerredon". (MACH., F. am., c.1361, 184). Moult hautement la mercia Dou confort que donné li a Et dit qu'il li fera service, Oblation et sacrefice En un temple qu'il fondera Ou sacrefice li fera. (MACH., F. am., c.1361, 234). L'AVUGLE. Touz mes pleurs sont muez en joies, Car je voy tresparfaittement, Dont Jhesu mercy haultement (Mir. st Panth., 1364, 328). Si que toute la nuit pensa, Et landemain contrepensa, Qu'il feroit ne qu'il devenroit, Et quel fin la chose penroit. Si s'avisa finablement Pour lui vengier plus hautement, Pleins de forsen et de desroy, Qu'en champ appelleroit le roy, Pour lui combattre corps à corps à li ; là fu tous ses accors. (MACH., P. Alex., p.1369, 227). Et se ma dame plaisant Qui d'onnour est garnie Savoit qu'amoureusement Me muir, à chiere lie, Pour li servir loyaument, Ma peinne, vraiement, Bien et hautement Tenroie amenrie. Dou mal qui m'a longuement Fait languir (MACH., Ch. bal., 1377, 590). Mon cuer, qui mis en vous son desir a, Morra, s'à lui ne vous voit desirée ; Car en tous lieus vers vous adès ira, Mon cuer qui mis en vous son desir a. Et s'en vous trop hautement desira, Pardonnés li, tres douce desirée. Mon cuer, qui mis en vous son desir a, Morra, s'à lui ne vous voit desirée [desira (éd. desir a) : correction proposée par E. Hoepffner (Literaturblatt für germ. und rom. Philol. 31, 1910, 23) ; elle évite la rime du même au même]. (MACH., L. dames, 1377, 80). De celle parolle hot grant dueil Le pere, et des larmes si oeil A mouller pristrent haultement (CHR. PIZ., M.F., IV, 1400-1403, 21). Pensez qu'elle fut haultement merciée, doulcement escoutée, et de bon cueur obeye (C.N.N., c.1456-1467, 49). GUILLEMETTE. Par mon serment, il se mourra Tout parlant. Comment il escume ! Vëez vous pas comme il estime Haultement la divinité ? El s'en va, son humanité : Or demourray je povre et lasse. LE DRAPPIER. Il fust bon que je m'en alasse Avant qu'il eust passé le pas. (Path. D., c.1456-1469, 136).

 

-

"Amplement, largement" : Ne riens qu'onneur ne desiroit. La ses cuers seulement tiroit. S'il avoit une cote grise De drap de Pouleinne ou de Frise Et un cheval tant seulement, Il li souffissoit hautement. Il n'avoit pas tous ses aviaus, Car souvent mangoit des naviaus, Des feves et dou pain de soile, D'un haran, d'une soupe a l'oile, Par deffaut de bonne viande. (MACH., C. ami, 1357, 104).

 

-

"Nettement" : Et donques convient dire des especes d'amistié plus hautement et plus parfaictement. (ORESME, E.A., c.1370, 415).

 

2.

En partic. [À propos de la voix] "Fortement, de manière sonore"

 

-

"À haute voix, fortement" : Et le gerfaut (mar fust il nez !) Y fu si forment encharnez Qu'il ne s'en pooit desaërdre. Par ce le me couvint il perdre, Car vers lui aler ne pooie. Mais hautement le rapelloie Selonc la guise dou mestier Qui par maintes fois a mestier. Et il estoit si entrepris Qu'il n'acontoit riens a son pris, Si ne volt vers moy revenir. (MACH., D. Aler., a.1349, 383). Li escuiers n'en failli pas, Eins vint a moy plus que le pas Et hautement me salua. (MACH., J. R. Nav., 1349, 156). Quant li escuiers ot compté De moy toute sa volenté, La dame dist tout hautement : "Or vëons un petit, comment Guillaumes est faitis et cointes..." (MACH., J. R. Nav., 1349, 157). La dame bien s'i acorda Et hautement li recorda : "Biau sire, bien avez ouvré D'avoir bon conseil recouvré." (MACH., J. R. Nav., 1349, 192). Quant le miracle et la merveille Vit li rois, forment s'esmerveille Si dist hautement en oye : "Misaël, et vous, Azarie, Il n'est plus de dieus vraiement Que le vostre qui telement Vous a garenti et sauvé. Venez, car vous estes sauvé." (MACH., C. ami, 1357, 24). Jossellin, dist le roy, il fault que vous respondez a ceste querelle. Lors, quant Olivier, ses filz, ouy ce que le roy disoit, si respondy haultement : Sire, il a grant paour qui tremble. (ARRAS, c.1392-1393, 59). En oultre, fu touchié par aucuns, et dit haultement, en la presence du Chancelier et de touz les assistens, que touz ceulz qui (...) pourchassent tel dommage contre la chose publique (...) sont indignes de demourer et d'estre beneficiez en ce royaume (FAUQ., I, 1417-1420, 267). A la premiere foiz qu'il rencontra le bon musnier, il le salua haultement (C.N.N., c.1456-1467, 47). LE PREMIER. Saint Jehan ! tu parles haultement, Cuides tu estre enmy la halle ? (Feste roys, c.1475-1500, 303). Sotouart, chantés haultement Une espitre de ses vielz fais. (Vig. Trib., c.1480, 228).

C. -

Au fig. [Sans valeur dépréciative]

 

1.

"Noblement, dignement" : Dieu m'envoie moult belle offrande : Loez en soit il haultement. (Mir. enf. diable, c.1339, 39). Si que les secrez garderoient D'amours, tant comme il viveroient, Qu'a Orliens fust amainnagiez, En France bien enlignagiez De gens si honnourablement Qu'on ne peüst plus hautement (MACH., J. R. Nav., 1349, 217). Car Dieu la voult sur toutes honnorer Et conme mére eslever haultement La ou elle est tresglorieusement D'anges et sains honnorée et servie (Mir. st Sev., 1362, 238). Mais la vertu de magnanimité avecques ce l'encline a faire son fait tres grandement et hautement , et ainsi est il es autres vertus. (ORESME, E.A.C., c.1370, 249). Atant et vous le maistre de Rodes qui descendy devant la tente du roy et le salua moult haultement. Et le roy, qui moult fu joyeux de sa venue, le conjoy moult et lui demanda comment Guyon, son frere, le faisoit. (ARRAS, c.1392-1393, 133). Péroraison Royne des cieulx glorieuse, Virge au jour d'uy tant dignement, tant haultement saluee, Vierge si excellemment nommee benoite et honnouree, nous vous supplyons (GERS., Annonc., a.1400, 239). Thideüs, plain de courtoisie, Salue le roy haultement (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 303). Se mut la roÿne et vers luy Ala haultement (CHR. PIZ., M.F., IV, 1400-1403, 52). Or, Dieu loué moult haultement, J'ay tant nagié et telement Que ma nef, par temps esgarée, Par force de vent et marée, Est arrivée droite voie À port de salut et de joie (LA HAYE, P. peste, 1426, 161). ...le roy m'a commandé vous dire que tous deux avez si haultement et vaillamment fait voz armes, voz devoirs et voz honneurs c'on ne pourroit mieulz (LA SALE, J.S., 1456, 128). "...mais tant est l'amour que je vous porte que vous vouldroie en tous endrois le plus vaillant et le meilleur, esperant en Dieu que il vous partira de l'onneur." Et quant Saintré entend Madame si haultement parler, ja soit que son cuer estoit ja conclud, lors a un genoul se met et treshumblement l'en mercia (LA SALE, J.S., 1456, 146). ...[il] se gouverna si haultement et si bien leens que le seigneur fut bien content de luy bailler sa fille a mariage (C.N.N., c.1456-1467, 332). Qui vouldroit au long racompter La legende de Triboullet, Il fauldroit bien la hault monter Pour haultement la mettre au net. Il faisoit tout ce qu'il vouloit Quant une fois ouvroit la bouche, Car il estoit le mig[n]onnet Du sot renommé maistre Mouche. (Vig. Trib., c.1480, 232). GLORIEULX. Mon tendre cueur, doulx et humain, Venez vous en avecques moy Et je vous logeray, je croy, Si haultement qu'il souffira. (P. Jouh. D.R., a.1488, 32). ...Puis des Luquoys prist haultement congé Les mercÿant de l'avoir hebergé. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 199).

 

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"D'une manière solennelle et respectueuse" : ...que l'esclipse faicte le jour de la Passion de Nostre Saulveur et Redempteur Jhesu Crist à l'eure de midi n'estoit pas naturelle, ne le tremblement de terre, ne les autres choses merveilleuses qui advindrent, disant et publiant celui jour haultement ou qu'il failloit que le Dieu de nature souffrist, ou que toute la machine du monde se disolvist. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 79 r°).

 

-

"Parfaitement, excellemment" : Et quant je sui bien avisee Et je pense a ta renommee, A droit de tous trop plus loee Qu'onneur mondeinne, Ceste pensee tant m'agree Que je sui hautement paree, Quant m'amour est toute enfermee En ton demainne. (MACH., F. am., c.1361, 225).

 

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Parler hautement / deviser hautement de qqc. "Parler excellemment, savamment de qqc." : Cestui parla haultement des petites conjunctions et, entre autres choses, dist que touteffois que Mars et le Soleil ce joingnoient en signe de feu que l'an devoit estre rampli de maladies chauldes et seches (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 79 r°). Jaques de la Forest, evesque de Paris, ayma aussi, en son temps, l'estude de astrologie et souvant l'en ay oy deviser bien haultement. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 163 r°).

 

2.

"En haut lieu" : Et s'en seroit trop meins prisie Ma signourie et amenrie, Dont j'aroie damage grant : Car vraiement, d'ore en avant, Jamais povres homs n'ameroit Hautement ["une personne haut placée"], car il n'oseroit, Dont ce seroit trop grans dommages ; Car de tous, quanque j'ay d'ommages, Tant soient haut, a mon devis, Je ne suis gueres mieus servis Com dou povre qui aimme haut (MACH., D. verg., a.1340, 27). Dame, donnés moy desservir L'amour vostre filz (...) Si qu'il me vueille (...) recevoir en paradis Ou si haultement estes mise (Mir. st Alexis, 1382, 335).

 

-

Marier qqn hautement. "Fournir à qqn un parti avantageux, d'un rang social élevé" : Haultement vous marieray, Et de toute ma royauté Serez a vostre voulenté Dame emprès moy. (Mir. femme roy Port., c.1342, 183). Le conte de Haynnau (...) a donné Marguerite, sa aisnée fille, de nouvel au roy d'Alemaingne Loys de Baviere. Encoires en a-il trois, mais touttes les mariera bien et haultement (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 145). ...[messire J. de Montaigu] avoit marié ses enfans si hautement, comme son filz de l'aage de X ou XJ ans à la fille de messire Charles de Lebret (BAYE, I, 1400-1410, 291).

 

-

[À propos d'une femme] Si hautement assignee. "Si bien mariée" : Lors s'encline la royne devant son pere et le salua moult doulcement. Et il lui dist : Ma fille, vous soiez la tres bien venue. Je suiz bien joyeux quant Dieu m'a fait tant de grace en mon vivant que je vous voy si haultement assignee ; sachiez que je mourray plus liement de ce que je suiz asseur que vous et mon pays serez hors de doubte des Sarrasins ; car vous avez bon garant et tres vaillant prince et bachelereux, qui bien vous garantira contre eulx. (ARRAS, c.1392-1393, 122).

D. -

Péj. [À propos d'une pers., de son attitude, de ses paroles...] "De manière hautaine, avec arrogance" : PREMIER CHEVALIER ALFONS. Dya ! que tu parles haultement ! Et si es en nostre dangier (Mir. Oton, c.1370, 322). ...il qui parle, le plus doulcement et amoureusement qu'il pot et sceut, pria ladite Marion que se elle avoit prinses lesdittes patenostres, vendues ou engaigées, que elle le deist et il les raimbroit voulentiers et li paieroit son vin, icelle Marion parla moult haultement et dist plusieurs parolles injurieuses à lui qui parle et à sa femme (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 426).
 

DMF 2020 - MAJ 2020 Robert Martin

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