C.N.R.S.
 
Article complet 
StructureSans exempleCompletFormesExemples
FamilleTextesSourcesImpressionAide à la lecture
     GABER     
FEW XVI 3a gabb
GABER, verbe
[T-L : gaber ; GD : gaber ; DEAF, G14 gab (gaber) ; AND : gaber ; DÉCT : gaber ; FEW XVI, 3a : gabb ; TLF : IX, 4a : gaber]

I. -

Empl. trans.

A. -

"Moquer"

 

1.

Gaber qqn. "Railler qqn, se moquer de qqn" : Galaffre d'Ermenie estoit en ce tref la Loyés a une atache la ou on le gaba. Aiglentine le gaba et dist : "Roy, es tu la ?..." (Tristan Nant. S., c.1350, 277). Robert, ne scé se tu me gabbes Ou se le diz par moquerie (Mir. Rob. Dyable, c.1375, 33). Plusieurs souvent si le gaboient Et de parolles l'assailloient (Mir. st Alexis, 1382, 361). "Ha, maulvais nain, recreux et faillis, me gabés vous ?" - "Ja estez vous gabés de dieu et du monde" (Chev. papegau H., c.1400-1500, 79). ...Ses .II. filz, plains de males meurs, Qui par trop avoient durs cuers, Le douloureux pere gaboient, En sa viellece, et le moquoient (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 295). ...a ce s'acorderent que c'estoient deux luittons qui se retrouvoient illecq pour elles decepvoir et gaber. (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 247). Or suis je le roy des meschans : mes[me]ment les bergiers des champs Me cabusent. Ores le mien, A qui j'ay tousjours fait du bien, Il ne m'a pas pour bien gabbé : Il en viendra au pié l'abbé, Par la benoiste couronnee ! (Path. D., c.1456-1469, 138). Et ne lui chault s'on le gabbe ne mocque, Mais qu'on vuelle ses bourdes escouter. (Coquards P., a.1481, 187). [[Jesus]] Il fut trahy, il fut vendu, Il fut loié, il fut batu, Il fut gabé, il fut moquié, Il fut jugié, il fut pendu, Il fut en fin crucificié. (MOLINET, Myst. st Quentin C., c.1482, 49).

 

-

Gaber qqn un peu. "Le taquiner" : ...luy tant seullement vint en la chambre de sa fille. Et pour le ung pou gaber luy dist : - Ma tresamee fille, se a vous ne tient, ceste nuit serés fyancee, et demain espousee... (Hist. seign. Gavre S., c.1456, 174).

 

-

Prov. : Bien gabés est que gabés gabe. (Doc. 1400-1450. In : E. Langlois, Bibl. Éc. Chartes 60, 1899, 577).

 

2.

Gaber qqc. "Se moquer de qqc." : Laquelle question les infeaulx souvent opposent a nous en gabant et derisant nostre simplesse crestienne (CRAP., Cur Deus, De arrha B.H., c.1450-1460, 165).

B. -

"Tromper" : ...et tuit li Rommain en estoient desconforté et se dementoient li uns a l'autre de ce que Gieffroy les avoit laissiez, car il cuidoient estre tuit gabé et moquié (Bérinus, I, c.1350-1370, 88). Par ma foy, il nous a gabez et moquez, et ce qu'il a fait a esté pour nous decevoir, car il est sagies et soubtilz et de bonne vive raison. (Bérinus, I, c.1350-1370, 91). PREMIER DYABLE. Touz jours nous jeue Dieu soubz chappe, (...) Que touz jours nous sommes gabé Et perdons tout. (Mir. Pierre Changeur, c.1378, 249). ...et tant vinrent près qu'ils cognoissoient clèrement qu'ils estoient gabés, et que c'estoit encores renforcement d'ennemis qui leur survenoit. (CHASTELL., Chron. K., t.1, c.1456-1471, 181). Fut toutefois le premier déçu et gabé, et ses propres gens l'abandonnèrent et tournèrent contre luy (CHASTELL., Chron. K., t.5, c.1456-1471, 487). Scez tu que c'est d'estre gabbé ? C'est a dire deux fois menty. (Est., p.1460, 22). Dy moy : Que signifie gabbé ? Il signifie deux fois menty. (Menus propos P., 1461, 67).

II. -

Empl. intrans.

A. -

"Plaisanter" : Orgueul vint qui pareil gaba Et lors l'un l'autre desroba. (Renart contref. R.L., t.1, 1328-1342, 37). On cuidoit qu'[il] gabast et qu'il feist par essay, Mais oncq puis ne revint (Gir. Vienne D.B., c.1350-1400, 211). "Nous quidons que vous gabés." Respondirent li hirault : "Mais nous enparlons tout acertes." (FROISS., Chron. R., XI, c.1375-1400, 77). LA MOUNYERE. Et ! se sont nos deulx Gentilz Hommes, Qui viennent ceans pour gaber. LE MOUNYER. A ! y me veulent desrober. Je soustiens la querelle apoinct. (Gent. moun. T., c.1500, 389).

B. -

Gaber de qqc. "Se moquer de qqc." : Quant les huit vaillans princes eurent ouy Passelyon ainsy parler, ilz n'en eurent talent de gabber, ains receurent ses raisons en tres grant auctorité (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 288). Et en effet, le duc n'en fit que rire et gaber. (CHASTELL., Chron. K., t.5, c.1456-1471, 288).

 

-

Empl. pronom. "Se moquer" : Nulx ne se doit de povre homme gaber Ne d'autruy mort ne rire ne moquer Quar nulx ne scet comment il doit finer. (DUPIN, Mélanc. L., c.1324-1340 [c.1450], 233). Ne le dy pas en toy gobant ; Je croy que veulz faire bobant Et mettre coeffe par desseure. (Myst. Pass. N.S. R., c.1350-1370, 149). Cil chevalier estrange vous porte une moult estrange medicine. Advisez vous de respondre, car il vous est bien besoing. Et Jossellin lui respondy : Sire roy, je ne suis pas desoremais cellui qui doie respondre a telz choses, et aussi je croy que cilz chevaliers ne se fait que gaber. Lors respondy Remondin : Faulx traitre, le gaber tournera sur vous. (ARRAS, c.1392-1393, 59).

 

-

Se gaber de qqn/qqc. : "Par ma foy, damoiselle", dist li varlés, "je cuide que vous vous gabez de moy..." (Bérinus, I, c.1350-1370, 176). Einssi grant piece s'en janglerent Et de ces nons [des saints] ce gaberent. (Vie st Evroul S., c.1350, 122). "Comment ! messires li princes, je croi, se gabe et trufe de mi, quant il voet que je donne congiet maintenant huit cens lances, chevaliers et escuiers, lesquels à son commandement et ordenance j'ai tous retenus." (FROISS., Chron. L., VI, c.1375-1400, 231). ...comme il appert en la sainte escripture par les messaiges du roy David qu'il(z) manda par grant amour au roy des Amorreains, qui, pour gaber soy de David, fist roigner la robe desdiz messaiges jusques aux nages et leur fist rere la moitie de leur barbe par derision, et ainsi les renvoya... (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.2, c.1386-1389, 210). Je ne vouldroye jamaiz amer ung chevalier, car il vanteroit plus tost et gaberoit de moy, et me demanderoit mes gages a engager. (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 94). Et le Danois dist au paien qu'il wueil prendre baptesme et laissier la batailhe, maiz le Sarasin s'en gabe. (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 194). ...et les seigneurs et nobles hommes de son hostel, qui les virent et oyrent ne s'en faisoient que gaber et rire l'ung aveuc l'aultre. (ESCOUCHY, Chron. B., t.1, a.1465, 74). ...je pense que vous vous gabez de moy. (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 261). Plusieurs tels traictz furent appourtez à messire Symon de Lalain, mais incontinent luy mesme les portoit aux seigneurs et principaulx de ladicte ville, qui se rioient et gaboient des Gantois et de leur folie. (LA MARCHE, Mém., II, c.1470, 232). Ceste beste n'estoit jamaiz malade. Pour quoy elle se gaboit et mocquoit des autres (COLART MANS., Dial. créat. R., 1482, 231).

 

-

Empl. pronom. à sens passif : ...son engin et son souef langaige monstroient clerement que c'estoit une garche et une ribaulde toute faicte et toute frottee. Et (...) il n'estoit pas sy enffant que de soy laissier ainssy gaber et endormir par telles fictions menssongeuses (RASSE BRUNH., Flor. Elvide B.N. C., a.1456, 22).

III. -

Inf. subst. "Plaisanterie" : Par Mahon, dist ly rois, vous savés bien trouver, Oncques mes je n'oÿ telz bourdes controuver. Cuidés que je vous croye pour le vostre gaber ? (Tristan Nant. S., c.1350, 388). Et Jossellin lui respondy : Sire roy, je ne suis pas desoremais cellui qui doie respondre a telz choses, et aussi je croy que cilz chevaliers ne se fait que gaber. Lors respondy Remondin : Faulx traitre, le gaber tournera sur vous. Je vous requier, nobles roys, que vous me tenez en droit en vostre court et faictes bonnes justice. (ARRAS, c.1392-1393, 59).

REM. Assorti d'un commentaire explicatif : Galien Rethoré K.K., 1500, 186 : ...gabber, c’est a dire railler ou compter aucune chose pour rire et passer le temps ou a qui mentiroit le mieulx.
 

DMF 2020 - MAJ 2020 Hiltrud Gerner

Fermer la fenêtre