C.N.R.S.
 
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     FRUIT     
FEW III fructus
FRUIT, subst. masc.
[T-L : fruit ; GDC : fruit1 ; AND : frut ; DÉCT : fruit ; FEW III, 823b : fructus ; TLF : VIII, 1307b : fruit1]

A. -

Au propre

 

1.

"Production d'une plante qui succède à la fleur" : ...Car racine n'est tant diverse Qui a ce printemps ne s'aërse A geter, selonc sa nature, Fleur, fruit, feuilles, greinne ou verdure... (MACH., R. Fort., c.1341, 80). Je monteray ou paumier et prenderay du fruit de ly (Mir. st Guill., c.1347, 3). Mais de tous fruis, de toutes entes, De toutes fleurs, de toutes plentes Et de quanqu'on puet bon clamer, Soit deça mer, soit dela mer, Y estoient a grant planté. Ne say qui les y ot planté. (MACH., F. am., c.1361, 191). Li lieus d'entour est odorans, Par tout, est si souef flairans Qu'il samble à tous, n'en doutez mie, Qu'on soit en une espisserie Pour les fruis et pour les jardins, Plantés de mains de Sarrazins ; Car de tous fruis, de toutes antes De tous estos, de toutes plantes, De toutes herbes à racine Qui puelent porter medecine Trueve on là à très grant planté, Que Sarrasin y ont planté. (MACH., P. Alex., p.1369, 210). Tout mal arbre y est essarté, Et planté toute bonne plante. N'il n'est de precieux fruit ante Qui la ne soit nommeement (CHR. PIZ., M.F., I, 1400-1403, 118). Diverses herbes et maint fruit Corrompuz de jour ou de nuit En leur substance ou qualité (LA HAYE, P. peste, 1426, 48). Et cloux de girofle, un fruit chault (LA HAYE, P. peste, 1426, 91). Aussi prenez du fruit de pin, Mondifié, plaisant et fin (LA HAYE, P. peste, 1426, 156). LE PREMIER. (...) Je croy que le fruit en est doulx, Nonobstant il est assés hingre. Son non quel ? LE SECOND. Pommier de malingre, Franc, courtoys, doulx et amyable. (Feste roys, c.1475-1500, 309). ...De quoy seront tous fleurs et fruitz infectz (Cene dieux, c.1492, 120). Cestui predist sur la revolucion de l'an, qui fut le second du regne du roy Guillaume d'Angleterre, la tardité des fruiz et de leur maturacion, qui fut jusques à la feste saint André, avant que le blé se peust recuillir. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 114 v°).

 

-

Fruit à pierre. "Fruit à noyau" : Item, lesdiz coustumiers pevent prendre et cueillir les pommes de bosc, les melles et tout fruit à pierre aprés la saint Michiel, sans amende, quant il n'y a point de pasnage, sans deffens. (HECTOR DE CHARTRES, Cout. R., 1398-1408, 60).

 

-

Porter fruit : Car l'iaue qui chiet desseure La racine qui demeure Fait renverdir et florir Et porter fruit : Tout einsi mes cuers qui pleure Parfondement a toute heure Acroistre mon souvenir Fait jour et nuit. (MACH., L. plour, 1349, 284). ...se aucun ottroye à un autre usage en son bois, excepté nommeement IIII ou V arbres portans fruit, c'est assavoir chesne, couldre, foul, aubepin, tillot... (Cout. bourg. glosé P.M., c.1380-1400, 151). Et si [la semence] tumbe entre l'espine, L'espine la semence destruit, Qu'en bonne terre porte fruit. [Réf. à la parabole du semeur (Luc 8, 14-15)] (Pass. Auv., 1477, 137).

 

-

[Allusion biblique] "Le fruit de l'arbre de la connaissance du bien et du mal, que Dieu a défendu à Adam et Ève de manger" : ...par vous sont recreé Et par le fruit de vostre porteure Cil qui dampné furent par fruit veé. (Mir. chan., c.1361, 184). Las, pouvre, j'en pers ma coronne, Payent la somme Du fruit maulvaiz que tu [Adam] mangis ! (Pass. Auv., 1477, 246).

 

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Le fruit d'enfer. "La pomme (?)" : ...Comment dou roy d'enfer l'outrage Li fist savoir Arethusa ; Comme Elchalaphus encusa Proserpine qu'il vit mengier Dou fruit d'enfer en un vergier ; Comment elle fust retournee, S'elle n'en fust desjeünee. Mais je t'ai compté la rapine Que Pluto fist de Proserpine, Si com l'istoire le raconte. (MACH., C. ami, 1357, 89).

 

-

P. métaph. : [En parlant de Fortune] C'est l'arbre d'inhumanité, Enraciné seur fausseté ; L'estoc est qu'en sa verité Soit mansongeuse ; Les fleurs sont de desloyauté, Et les feuilles d'iniquité, Mais li fruis est de povreté Dure et crueuse. (MACH., R. Fort., c.1341, 42). Adont le fruit cueil D'espoir, se vrais estre vueil Vers vous, dame nette et pure. (MACH., L. dames, 1377, 185). Je fu en fleur ou temps passé d'enfance, Et puis aprés devins fruit en jeunesse (CH. D'ORLÉANS, Ball. C., c.1415-1457, 130).

 

Rem. Dans un contexte métaph. et grivois, où fruit peut désigner le sexe masculin : MOLINET, Serm. st Billouard K., c.1460-1500, 112

 

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Porter fruit : [Fortune] Promettre assez puet de ses biens, Mais tu yes trop fols, se tu tiens Qu'il en y ait nul qui soit tiens. En sëant fuit ; Son droit lés est dous, l'autre cuit ; Le droit porte fleur, fueille et fruit, L'autre est desert, brehaingne et vuit Des biens terriens... (MACH., R. Fort., c.1341, 41).

 

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RELIG. Fruit de vie. "Le fruit de l'arbre de vie" : Sathan (...) par sa cautelle Et par sa favelle Fist perdre nostre querelle, Quant dou fruit De vie enduit Adam le cruel morsel. (MACH., Les lays, 1377, 399). Et par ainsi, se l'omme n'eust pechié, il ne eust pas receu mort, mais eust esté tramsporté en felicité eternelle ; et a ce Dieu lui avoit donné en paradix terrestre le fruit de vie. (CRAP., Cur Deus, De arrha B.H., c.1450-1460, 208).

 

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RELIG. Fruit de vie. "Jésus, le Christ" : Ou paumier de la croiz queult on le fruit de vie (Mir. st Guill., c.1347, 3). Glorieuse vierge d'onneur, Mére au glorieux fruit de vie... (Mir. ev. N.D., c.1348, 78). Et la fist telz miraicle li doulz fruit de vie Que... (Lion Bourges K.P.F., c.1350, 431). [Autres ex. p.29 et 844] Glorïeuse roÿne, je vous requier et prie Qu'il vous plaise prïer le digne fruit de vie Qui se lessa pener en la grant Croix fichie (Tristan Nant. S., c.1350, 515). Tresdoulce vierge honnoree, Qui le fruit de vie portastes... (Mir. enf. ress., 1353, 5). Hé ! Vierge qui portastes le tres doulx fruit de vie... (Flor. Octav. L., t.1, c.1356, 29). Car j'oseroie bien jurer le fruit de vie Qu[e]... (CUVELIER, Chans. Guescl. F., c.1380-1385, 98). Le tresdoux fruit de vie quil nous vient visiter (...) Appella ses apostres puis sil leur dict : "Mes freres, Par desir de soupper avec vous sopperé" (Pass. Semur D.M., c.1420 [1488], 121). Sa personne est bien disposee En Jhesucrist, le fruyt de vie, Quant, par requeste proposee, A mys ce corps de mort a vie. (LA VIGNE, S.M., 1496, 383).

 

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Prov. : Quar, comme le proverbe accorde, Chascun fruit attent sa saison. (Tomb. Chartr. Dix-huit contes K., c.1337-1339, 261). Bon fruit vient de bonne semence. (MIÉLOT, Prov. U., 1456, 192). N'est sy dur fruict qu'enfin ne se meurisse. (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 239). D'arbre fort bon coeulle on precieux fruit. (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 271). Tel fruict tel arbre et tel vin tel vignoble. (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 336). Le fruit est mal, si fut la fleur (ALECIS, Blas. faulses am. P.P., a.1486, 230).

 

2.

P. ext. "Tout ce que l'on récolte pour l'alimentation"

 

a)

[Au sing., avec valeur coll.] : ...Puis y faictes du fruict porter Qu'aval la chambre on jettera (Mir. fille roy, c.1379, 95). ...comme gens marchandoient et achetoi[en]t fruit, poires, frommages et autres choses, à une poroyere demourant assez prez de Sainte-Croix de la Bretonnerie, il seul copa à icelle poroyere sa bourse (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 71). ...[il] s'en estoit alez ès halles de Paris pour acheter du pain et du fruit pour son disner (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 9). ...[il] passa par devant un marchant qui menoit sur un cheval fruit pour vendre à Paris, auquel homme de sa tasse ilz osterent XIJ s. paris. (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 41). ...la femme feu Laurent Dubois, marchande de fruit (Comptes Paris V.L.D., t.1, 1424-1425, 21). À Isaac Jacob, clavaire de la viconté de Martigue, baillé V f. pour payer le fruict que monseigneur fist donner aux galléasses véniciennes (Comptes roi René A., t.3, 1479, 311). ...le champ fut en brief temps tellement conforté et cultivé qu'il aporta fruit au centiesme double (COLART MANS., Dial. créat. R., 1482, 126).

 

-

Le fruit de la forest. "Ensemble des produits comestibles que l'on peut ramasser en forêt" : Item, chacun doit un pain à Noël et une gueline pour avoir le fruit de la forest après la mi aoust, réservé glan et faine. (HECTOR DE CHARTRES, Cout. R., 1398-1408, 14).

 

-

Fruit centisme. "Centième partie de la récolte" : Plusieurs aussi des leur jonesse servent a Dieu et acquierent le fruit centisme qui est deu aux vierges, dont on list ou .XIIIe. chapitre des Euvangiles saint Mahieu. (DAUDIN, De la erudition H., c.1360-1380, 169). Virginitez a fruit centisme (Mir. st Alexis, 1382, 307).

 

b)

Au plur. : ...lui estant esdites hales de Paris, et au lieu où l'en vent les fruiz (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 12). ...apprès ce fait se lieve ung tempeste sy grant sur le païs, qui gaste tous les fruis et biens de la contree. (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 70). ...paiez loyaument les dismes a Dieu, comme de fruiz, de poulles, d'aigneaulx, de cochons, et aultres telz usages accoustumez. (C.N.N., c.1456-1467, 224). ...grant quantité aussi y avoit de fruiz nouveaulx de moult de sortes, violetes fort odorans gettées et semées tout parmy le basteau, et vin à tous venans y fut baillé et distribué tant qu'on en vouloit avoir et prendre (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 178).

 

-

Les fruits de terre : Et Dieu et nature ont telement disposee celle haute region pour la generacion ou inflammacion d'unes impressions qui sont fetes lasus comme sont cometes, et sont causes ou signes d'aucuns effés notables ici-bas, aussi comme la region moienne de l'aer est froide pour la generacion d'autres impressions profectables aus fruis de terre et a autres choses comme sont les pluies et telles choses. (ORESME, C.M., c.1377, 442). ...prier Dieu pour la conservacion des fruis de terre, qui estoient très fort diminuez et dommagiez par les froidures et par les pluyes continueles (FAUQ., II, 1421-1430, 235).

 

.

Les fruits terrestres : Tu es celle qui doibz infere Herbes et fleurs, grains, fruictz terrestres, Pour tous humains rompre et deffaire Par mortalités et par pestes (Cene dieux, c.1492, 130).

 

c)

P. ext. [Désignant un aliment fabriqué, en partic. un fromage] : Et puis faictes que vous ayés ung quintal de flours de tresbon fromaige de Crampone ou de Brie ou flour de meilleur fruict que finer se pourra, et puis prennés ledit fromaige et le parés et nectoyés tresbien (CHIQUART, Cuis. S., 1420, 157). [Autre ex. p.153]

B. -

P. anal.

 

1.

"Enfant considéré comme produit de sa mère" : LA DAME. (...) je donneray aus maufez Le fruit, se de vous je conçoy. (Mir. enf. diable, c.1339, 9). ...le premier bien du mariage corporel est fruit en lignie, pour laquelle mariage est principalment establi (Mir. femme roy Port., c.1342, 149). ...par vous sont recreé Et par le fruit de vostre porteure Cil qui dampné furent par fruit veé. (Mir. chan., c.1361, 184). Par la foy que je doy a Dieu, je croy que ce ne soit que fantosme de ceste femme [Mélusine], ne ne croy pas que ja fruit qu'elle ait porté viengne a perfection de bien ; elle n'a porté enfant qui n'ait apporté quelque estrange signe sur terre. (ARRAS, c.1392-1393, 253). ...nous vous saluerons du salut que le benoist fruit au jour d'uy nez vous anonca par l'ange, et dirons : Ave Maria. (GERS., Noël, p.1404, 292). ...quant de par [vous] sur les sains fons de baptesme lui [à Dieu] fut presenté vostre premier fruit (LA SALE, Reconf. De Fresne H., 1457, 3).

 

2.

En partic.

 

a)

"L'enfant qu'une femme porte, le foetus" : Et, se fame me huche au destroit d'enfanter, Que le fruit et le cors, Sire, veulliez saver (Vie st Eust. 1 P., c.1350-1400, 165). Quant les menstrues decourent en fame grosse, le fruit ne peut estre sain. (SAINT-GILLE, A.Y., 1362-1365, 87). ...la mort du fruit ou ventre de la mere (SAINT-GILLE, Comment. A.Y. L., 1362-1365, 285). Il fu jadis un noble baron en Israhel, riche et poissant et doubtant Dieu en dignité de prestre, apellé Johachin ; et ot une compaigne et espouse pareille a ses condicions, appellee Anne, laquelle estoit brehaigne et ne portoit point de fruit, dont il estoient a grant dolour (MÉZIÈRES, Vertu sacr. mar. W., c.1384-1389, 127). ...or est advenu que, le prouchain jour après la dicte bateure, ycelle Thiphaine qui n'estoit enceinte que de deux mois ou environ, si comme aucunes matrones en ce congnoissans l'ont tesmoingné, avorta de son fruit. (Doc. Poitou G., t.5, 1388, 364). Duchesse, pensez de vous et de vostre fruit ; et, se Dieux donne par sa grace que ce soit un filz, si le faictes baptisier, et vueil qu'il soit nommez Bertran. (ARRAS, c.1392-1393, 174). O dame, tu es beneuree Sur toutes les femmes du monde Et le fruit benoist qui se fonde en ton saint ventre convenant... (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 53). Et confessa tant de maulx que ce fut merveilles ; entre lesquelz la mort de sa femme toute grosse et le fruit dedans elle (GRUEL, Chron. Richemont L., c.1459-1466, 49). Tous deux yvres dormons comme ung sabot. Et au resveil, quant le ventre lui bruyt, Monte sur moy, que ne gaste son fruyt, Soubz elle geins, plus q'un aiz me fait plat ; De paillarder tout elle me destruyt, En ce bordeau ou tenons nostre estat. (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 125). ...et disans que le fruit de mon ventre est fruit de fornicacion (CHASTELL., Temple Boc. B., 1463-1464, 99). ...de prime face elle a nyé ledit cas, et après s'est efforcée le fulsir et palier, en disant que bien estoit vray qu'elle avoit esté grosse d'enffant, mais que ainsi qu'elle estoit alée querir du myl en ung four audit lieu de la Beliardière, par certains compaignons de guerre qui estoient audit lieu avoit esté mis le feu devant la goulle dudit four où elle avoit souffert grant tourment et destresse, tellement que depuis elle n'avoit senty sondit fruit (Doc. Poitou G., t.11, 1473, 345).

 

b)

"Descendance" : L'aisnée des filles fut mariée au duc de Guerles, et dont il issit génération aussy, un fils et une fille, laquelle fut mariée au roy d'Escoce, et en yssit fruit. La seconde fille fut mariée au prince de Navarre, qui trespassa sans hoir ; et la tierce au duc d'Orléans, qui en tira fruit aussy, un fils tant seulement. (CHASTELL., Chron. K., t.5, c.1456-1471, 237).

C. -

Au fig.

 

1.

"Bénéfice, profit" : ...devant ce que il ait nule possession des fruiz et des yssues de point de mon heritaige (Test. Besanç. R., t.1, 1338, 3). ...pour respondre des fruiz et levées que euls en ont fait, contraignez chascun en droit soi, par prise de corps et de biens, sanz faveur, et aussi ceuls que vous trouverez usant ou avoir usé de contraiz usuraires, trespassement de monnoies, comme groux marchanz, orfevres, changeurs et autres faisanz grans gains, les notoires, tabellions, auditeurs et jurez du seel des diz lieux et ressort (Doc. Poitou G., t.2, 1340, 168). Item, il est puissant de avoir et veult plus avoir possessions qui soient bonnes et honorables et ou il ait moins de fruit ou de gaing que celles qui aportent plus grant fruit et plus grant gaaing (ORESME, E.A., c.1370, 256). ...et seront restituez à ladicte defenderesse les fruis perceuz par ladicte demanderesse pour la moitié desdiz heritages (BAYE, I, 1400-1410, 273). La Court (...) a ordonné que la somme de XXXIJ libvres tournois soit baillée au capitaine du chastel de Confflans sur son salaire sur les fruis et revenues dudit chastel et chastellenie qui estoient en la main du Roy (BAYE, I, 1400-1410, 350). ...pour les fruis, usfruis, rentes et revenues de la maison et terre de Thouligny. (Trés. Reth. S.L., t.2, 1408, 564). Et, ce pendant, sera à mondit seigneur de Bourgongne les fruis siens de toutes lesdictes cités, villes, forteresces et seigneuries, tant des demaines comme des aydes et aultrement, sans en riens déduire ne rabatre du principal. (Doc. 1435. In : MONSTRELET, Chron. D.-A., t.5 c.1444-1453, 171). ...le roy fut content avecques eulx que ladicte ville d'Arras seroit mise en sa main comme souverain et par defaulte d'omme, droiz et devoirs non fais et que les fruiz et revenues de ladicte ville et appartenances seroient recueillis par ses commissaires ; laquelle revenue se pourroit prendre par lesdiz commissaires et soubz la main du roy par icelle damoiselle de Bourgongne (ROYE, Chron. scand., II, 1460-1483, 45). ...n'osa comparoir ledit nepveu [favori du roi de France pour l'évêché de Tournai] ou lieu de son benefice ne prendre possession d'icellui, non obstant la faveur du roy, ne ycellui de Saint Bertin [favori du duc de Bourgogne pour ce même évêché] soy trouver en Tournay, la ou tout lui estoit contraire, non obstant que tout le dehors estoit en sa main et en son nom conduit et gouverné, mes tout l'argent des escheances, explois et fruis appartenans a la prelature mis en main sequestre au proffit du possessant dernier. (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 271). ...et l'autre dit qu'elle n'en a nul a avoir, pour ce que son marit li a vandus par escript d'airche et que les fruits sont moibles. Il fut dit que li feme ait a avoir les chaiptei. (Jug. maître-échev. Metz S.M.S., t.1, a.1494, [1366], 427).

 

-

Lever / recevoir les fruits. "Percevoir les profits" : Et quant du pere, pour ce que je [Remondin] le voy vieil et fresle, de ma part, sire roy, s'il vous plaist a faire lui grace, je vous en requier, par tant que je raye mon heritaige. Et des prouffiz et des fruiz que il en a levez, selon la mise d'argent que il y pourra avoir, soit distribué a en faire une prieuré et renter moines (ARRAS, c.1392-1393, 65). Quant aus fruis et finances que la court de Romme lieve... (Vote soustr. obédience M.P., 1398, 239). ...autres officiers pour l'exercice de la justice et jurisdicion du dit conté d'Artois et pour en recepvoir les fruys et revenues (Hist. dr. munic. E., t.1, 1477,,, 421). ...vous vueillez delivrer à nostredicte cousine sadicte conté et autres terres que lui avez fait empescher, et faire rendre les fruiz qui en ont esté levez (Lettres Ch. VIII, P., t.1, 1485, 98).

 

2.

"Résultat positif, réel ou attendu, effet de qqc. (en partic. d'une activité)" : Le premier fruit que li corps qui avra fait penitence recevra si sera clarté (Mir. st Guill., c.1347, 4). Joachim avoit un vergier Les sa maison, qu'onques bergier Ne fist, car trop fu delitables Et a tous fruis de delit ables. Pour ç'a grans tourbes y aloient Li Juïf et s'i esbatoient. (MACH., C. ami, 1357, 4). ...Et qu'il n'est riens en quoy je me deporte, Que ma dame soit si dure ou si forte Que pité l'uis De son franc cuer, qui de tous maus est vuis Et de tous biens li ruissiaus et li puis, De scens, de grace et d'onneur li dous fruis, N'uevre la porte A Dous Penser, qui si bien sera duis Qu'il li dira, et de jours et de nuis. (MACH., F. am., c.1361, 169). Selon aucuns philosophes, le souverain louier est le bien et le fruit de vertu en ceste vie (ORESME, E.A.C., c.1370, 302). Se la personne fait le bien en son nom, son pechié empesche le fruit. (GERS., Déf., 1400, 234). Quant on se donne a receuoir telles choses fantastiques qui lymaginacion, cest grant empeschement de toute bonne operacion intellectuelle et autre quelconques, specialment cest grant empeschement a lentendement studieux ou contemplatif, et souuent empeschent le fruict de oroison et la suauite de deuocion... (CIB., p.1451, 213). ...madame Fortune (...) aujourd'huy me donne tant d'eur et me fait percevoir le fruit du plus grand desir que je povoie au monde avoir (C.N.N., c.1456-1467, 574). ...son erre ne lui rendoit fruit (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 251). ...en ceste ville de Mons et tout sur une saison escheurent de bien haultes et de grandes matieres largement, dont les unes estoient de douleur et d'annoy (...), les aultres de gloire et de fame (...), et les aultres de necessité et de fruit, comme des ambassaeurs envoiéz devers le roy et, a l'aultre léz, devers nostre Saint Pere pour faire l'obeïssance qui y estoit requise. (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 213). ...ledit nostre Saint Pere, aiant grant ceur a la journee que avoit establie a Mantue, tousjours sollicitoit d'icelle et affectoit fort que fruit en peust venir a la crestienté par l'assistence que les princes lui donroient. (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 233). Vient apprès Justice qui t'aministre son fruit et te met en front droit naturel auquel... (CHASTELL., Temple Boc. B., 1463-1464, 173). ...et disans que le fruit de mon ventre est fruit de fornicacion (CHASTELL., Temple Boc. B., 1463-1464, 99). O pecheurs, laissés vanités Et voz puans charnalités Qu'empeschent fruit de penitence. (Pass. Auv., 1477, 138). Monstre de ton pouvoir le fruit Et nous oste de ceste plasse ! (Pass. Auv., 1477, 218). ...philosophie est une labeur et vertu de courage qui extrait et esrace les vices hors de l'ame et les enchasse du tout et si prepaire les coraiges a faire bon fruit. (COLART MANS., Dial. créat. R., 1482, 246). ...je lui demanderoi volentiers quel fruit ou utillité peut venir à l'omme de sçavoir seullement le cours du ciel et des corps celestes, quant ne à quelle heure et minute et par quelz signes ilz passent (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 4 v°). Cestui monstra bien aux Rommains le fruit qui povoit venir de la science des estoilles (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 62 r°). Très hault et puissant prince, pour vous faire responce touchant l'article de Conflans que vous appelliés le Bien public, et que veritablement doit estre appellé le Mal public, où j'estoie, dont vous dittez que je n'ay point eu moins de fruict, proffit et honneur que de ma vie, estat et chevance, vous entendés bien que à l'advenement du roy à sa couronne il ne tint point à moy que je n'entrasse en son service, et de ce faire fit mon leal debvoir (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 261). Et, pour respondre, vous sçavez que, par les traictiez faictz à Conflans, desquelz vous n'avés pas eu moindre fruit et prouffit que de voz vie, estat et chevance, le roy nous bailla, ceda et transporta laditte ville d'Amyens et autres villes et terres estans sur la riviere de Somme (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 258).

 

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Grand fruit : En contemplacion ny a pas si grant labeur et mieulx ny a point de labeur et si y a grant fruict. (CIB., p.1451, 181). ...messire Simon de Lalaing, qui depuis la venue du daulphin en la maison du duc avoit tousjours les ambassaddes devers le roy (...), maintenant avoit esté recoppé de ceste ambassadde (...) et ce a cause que pour plus grant fruit on l'avoit deputé a faire l'ambassadde devers nostre Saint Pere (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 213). ...et estoit renommé ledit seigneur de Gyé par les grans et saiges capitaines du royaulme de faire une fois grant fruit et service au royaulme (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 3).

 

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[D'une chose, d'une activité] Estre de fruit. "Être bénéfique" : Et faisant ses devises telles et telles, les tint en divers proupos qui moult plurent aux deux chevaliers, car estoient honorables et de fruit aux ascoutans. (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 17).

 

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Estre de bon / grand / pauvre / petit fruit : ...il fit un long périlleux voiage à povre fruit (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 6). Quant le seigneur de Simay ot finee sa raison, qui estoit belle et de bon fruit, le roy alors, non querrant que aultre respondist pour luy, commença a dire... (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 60). De laquele [une ambassade] maintenant il convient de parler, car estoit icelle de grant fruit et effect, et en estoient les personnes notables qui en avoient la charge. (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 213). Et parainsi, quant les chevaliers trouverent ceste responce si froide et que le roy ne se monstra gueires entalenté de les oÿr, jugerent bien que leur sejour droit la y seroit de petit fruit (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 274). ...la chasse (...) ne porta pas grant fruit, pour ce qu'ilz se trouverent peu de gens et nulz archiers (LA MARCHE, Mém., II, c.1470, 242).

 

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Il est de grand fruit que : ...considerees les opportunités des temps d'alors et des materes estranges qui se presentoient de divers léz avecques les perilleuses dependences qui en pouoient issir, certes il estoit bien convenable et de grant fruit aussi (...) que ceste feste et convention se feust tenue (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 276).

 

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(Faire qqc.) à fruit et à profit : Affin doncques que a fruit et a proffit nous puissons ouir la parole de Dieu pour faire noz ames belles et plaisans (GERS., Concept., 1401, 427).

 

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Sans (aucun) fruit : Chil qui doubte sapienche et discipline est meschant, et de telz l'esperanche est vaine, et leurs labeurs sont sans fruit. (DAUDIN, De la erudition H., c.1360-1380, 71). ...eulx oÿs [des ambassadeurs], les delivra et les envoya aveuques belles parolles, sans aulcun fruit toutevoyez en leur peticion (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 89). ...si n'y avoit il [dans une querelle] que vaine parolle sans fruit dont les conclusions estoient vuides (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 284). [Le roi Charles VII défunt] Avoit peu de jours vagues, peu de heures sans fruit, moult de cures en la chose publique (...). Avoit paix sans repos et felicité sans huiseuse. (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 321). ...et furent pluseurs journées tenues sans fruit et sans exploit (LA MARCHE, Mém., I, c.1470, 168).
 

DMF 2020 - Article revu en 2015 Robert Martin

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