C.N.R.S.
 
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     FORMER     
FEW III formare
FORMER, verbe
[T-L : former ; GD : former ; GDC : former ; AND : former1 ; DÉCT : former ; FEW III, 716b : formare ; TLF : VIII, 1099b : former]

A. -

"Créer, faire exister"

 

1.

Empl. trans.

 

a)

[Le créateur est Dieu/Dieu et Nature] "Créer, donner l'existence et une certaine forme à qqn/qqc." : Mais ce fist elle, La traïtre, toudis preste et isnelle De ceaus traïr qu'elle met dessous s'elle, Pour ce que Dieus et Nature la belle, Quant il formerent Celle que j'aim, si fort se deliterent En la trés grant biauté qu'il li donnerent Que loyauté a mettre y oublierent. (MACH., J. R. Beh., c.1340, 83). Envoie nous ton filz en terre (...) Si qu'avoir puissons l'eritage Pour quoy, sire, tu nous formas. (Mir. nat. N.S.J.C., c.1343, 220). ...il scet des arainnes le nombre Et combien la mer a de goutes Et le nom des estoiles toutes. C'est cils qui nulle fois ne faut Aus siens, car de riens n'ont deffaut ; C'est cils qui le monde forma De nient et qui sa fourme a Pris de li seul, sans autre aïe. C'est li sires qui tout maistrie. (MACH., C. ami, 1357, 48). ...Conment de la vierge nasqui Homme qui est Diex, voire, et qui Toute chose forma de nient (Mir. Barl. Josaph., c.1363, 263). Li princes de Galles ouvri ses yex, en regardant vers le ciel et joindi ses mains et dist ensi : "Vrais pères Jhesu Cris, qui m'avés fourmé, consentés par vostre benigne grasce que la journée d'ui soit pour mi et pour mes gens." (FROISS., Chron. L., VII, c.1375-1400, 35). Si m'ara guerredonné La santé, Que j'ai lonc temps desiré, Et donné De toute joie à plenté, Qui ne me faudroit, Et mis en si haut degré Qu'à mon gré, Se quanque Diex ha formé Et creé M'estoit tout abandonné, Tant ne me vaudroit. (MACH., Les lays, 1377, 335). Et posé que nul corps ne fust, encore est ce simplement impossible et enclot contradiction que Dieu feist et formast une chose corporele qui eust plus ou moins de dimensions si comme chascun de cler entendement puet legierement ymaginer. (ORESME, C.M., c.1377, 56). ...en conclusion de tout, je determinoye que ville chose fist Dieux quant il fourma femme (CHR. PIZ., Cité dames C., c.1404-1407, 619-620). Et ainsi, ma redoubtée dame, en concluant ce que devant est dit, me semble, et il est vray, ces choses veues, que Dieu nostre Createur, qui maintes creatures a fourmées à son ymage, aussi bien comme toy et neantmoins des devant dis .III. biens et aussi des autres, leur a ottroié en ce monde petit ou neant et qui leur vie passent en maintes miseres et grant povreté de santé et d'avoir, t'a donné de grans dons. (CHR. PIZ., P.V.H., 1416-1418, 40). En icellui paradiz furent creez et fourmez noz premiers parens, Adam et Eve, de la main de nostre vray Dieu Createur. (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 138). Dieu a voulu tout pour l'homme former Et soubz ses piez toutes choses commettre... (Cene dieux, c.1492, 111). ...en apprés je veulx dire Que Dieu le Pere Adam premier forma Et, quant au corps, a luy le conforma Si bien parfaict que mieulx n'estoit possible. (LA VIGNE, S.M., 1496, 336).

 

-

Ne pas estre formé. "Ne pas avoir été créé" : Et a ce confermer dist Saint Bernard : Dieu n'est pas formé, il est forme (Somme abr., c.1477-1481, 148).

 

-

[De Nature] : Et vraiement, j'estoie mors, Sans avoir de vie remors ; Mais Douce Esperence acouri Qui au besoing me secouri Et vint en trop plus belle fourme Mil fois, que Nature ne fourme. Car, a briés mos, elle fu telle Qu'elle sambla esperituele, N'onques mais riens si bel ne vi, Ne si cler... (MACH., R. Fort., c.1341, 133). Après je li dis a briès mos : "Paris, Paris, bien vanter m'os Que la plus belle creature Qu'onques sceüst former nature Te donray en ta signourie, Qui sera ta dame et t'amie, Dont tu aras joie et deduis. Fols seras, s'ad ce ne te duis..." (MACH., F. am., c.1361, 218). Et avec ce Nature l'avoit fourmee sy gracieusement de chief, de viaire et de tous autres membres que nulz ne savoit que amander, et estoient tuit si membre compassé par art de mesure. (Bérinus, I, c.1350-1370, 163). N'il n'est homme qui vers li aille Qui par tout ce non ne li baille ; Qu'onques si humble creature A tous ne pot former nature Selonc son scens et sa richesse, Sa grant puissance et sa noblesse. (MACH., P. Alex., p.1369, 31). Et qui diroit a vostre mere Que ne feussiez filz vostre pere, Il auroit grant fain de tancer. Sans faulte, je ne puis pencer Comment Nature, en ses ouvraiges, Forma deux si pareilz visaiges... (Path. D., c.1456-1469, 62).

 

-

Se former en telle apparence. "Se donner, prendre telle apparence" : Marie (...) En laquelle, selon sainte escripture, Se fourma Diex en humaine figure (Mir. ev. arced., c.1341, 144).

 

-

[D'un être céleste] Se former corps de qqc. "Prendre une forme corporelle à partir de qqc." : ...et le bon ange quant il se veult monstrer, il se fait ou forme corps du haut aer, et le mauvés du bas aer. (ORESME, C.M., c.1377, 290).

 

b)

[Le moteur de la création est la nature ; de l'embryon]

 

-

Estre formé. "Se développer" : Item, et pour ce que aprés la generacion, l'enfant est fourmé ou ventre de la mere et nourri de son sanc et aprés de son lait. (ORESME, E.A.C., c.1370, 442).

 

-

Estre formé de qqc. "Parvenir à l'existence à partir de qqc." : Embrion est une masse qui est ou ventre de la mere, de laquelle masse sera formé l'enfant ou la beste (ORESME, E.A.C., c.1370, 142).

 

c)

[D'une pers.] "Créer, fabriquer, produire, faire, concevoir, imaginer qqc." : C'est un jouel qui fu formé, Forgié et fait et charpenté De mon pere, sans coup ferir Et sans noise faire en ouïr (GUILL. DIGULL., Pèler. vie hum. S.C., c.1330-1331, 274). Dou tiers temps, selonc la besongne Qui parmi trois temps l'embesongne. Des .III. dis prouverai je fin Commencement, moien et fin. De ces .III. se doit enfourmer Qui bon ouvrage vuet fourmer. Et s'aucuns pense mauvaisté, Gart bien, selonc la verité, Que commencemens ne li tart ; Car il n'i puet venir trop tart. (MACH., D. Aler., a.1349, 240). Or vueil parler de ma besongne Qui au cuer me touche et besongne. Il est vray c'un propos formay, Et dedens mon cuer l'enfermay, De l'alerion que j'amoie, Qu'a personne ne requerroie Qu'il me fust vendus ne donnez ; Mais s'il m'estoit abandonnez De lui vëoir a mon loisir, S'i penroie moult grant plaisir Et se tenroie la plaisence, Quant a present, a souffissance. (MACH., D. Aler., a.1349, 310). Et li dit par ceste maniere : Je, Nature, par qui tout est fourmé Quanqu'a ça jus et seur terre et en mer, Vien ci a toy, Guillaume, qui fourmé T'ay a part, pour faire par toy fourmer Nouviaus dis amoureus plaisans. Pour ce te bail ci trois de mes enfans Qui t'en donront la pratique, Et, se tu n'ies d'euls trois bien congnoissans, Nommé sont Scens, Retorique et Musique. (MACH., Prol., c.1377, 1). ...je vous renvoye du tout a la gieste que j'en ay formee (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 3).

 

-

"Donner une forme à qqc. à qqc, finir, achever qqc." : ...Voel mon dit parfaire et fourmer D'une grant dame en qui trouver Puis toutes ces condicions Des dames dont parlé avons (Dit prunier B., c.1330-1350, 43).

 

-

Former qqc. de qqc. "Transformer qqc. en qqc." : ...quant il fut formeiz du chasteau une eglise de Sainte Croix (...), sy fut la chappelle ordinee parrochial englise. (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 63).

 

-

Se faire former et tailler. "Se faire représenter en statue" : "Et là le trouverez et verrez com grant de corps et com puissant de membres il fut, car en son vivant en biau leton il se fist fourmer et tailler." (FROISS., Chron. M., XII, c.1375-1400, 72).

 

-

"Installer, mettre en place qqc." : Nous convient de l'autre cousté Aller former ung siege clos, Les tenir en captivité Et comme prisonniers a nous (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 231).

 

-

Empl. factitif "Aider qqc. à se construire, à se développer" : Des bonnes meurs qu'il convient former en l'adolescent. (DAUDIN, De la erudition H., c.1360-1380, 289). Pour che contre les trois vices dessus dis de adolescence, trois vertus principalment convient en eulx former, asscavoir contre orgueilleux corage humilité, contre luxure chasteté, contre mignoitise ou legiereté meureté. (DAUDIN, De la erudition H., c.1360-1380, 293). Samblablement chasteté convient former par deulx aultres choses, asscavoir par vergongne et sobrieté. (DAUDIN, De la erudition H., c.1360-1380, 295).

 

2.

Part. passé en empl. adj.

 

a)

[D'une pers.] "Constitué d'une certaine manière" : ...fors hommes, vigoureux et bien fourmez (SAINT-GILLE, Comment. A.Y. L., 1362-1365, 283). Mais nous dison que il [les hommes] sont bien fourmés, bien mesuréz ou bien couloréz, et ne dison pas que il sont biaus. (ORESME, E.A., c.1370, 248). Cils bastars estoit uns escuiers durs et appers et trop mieulx fourmés de tous membres que li Englès ne fust. (FROISS., Chron. R., X, c.1375-1400, 36). Après ce que la feste fu departie, Melusigne, qui estoit moult enceinte, porta son terme, et, au plaisir de Dieu, elle enfanta un filz masle, qui fu de toutes figures bien formez, excepté qu'il ot le visage court et large au travers, et avoit un oeil rouge et l'autre pers. (ARRAS, c.1392-1393, 47). L'ystoire tesmoingne que, ou cinquiesme an après, ot Melusigne un filz qui fu nommez Anthoine. Grant fu et bien formez de tous membres. Mais il apporta en la senestre joe une pate de lyon, et, ains que il eust VIIJ. ans, elle fu velue et les ongles trenchans, et fist cel Anthoine moult a doubter. (ARRAS, c.1392-1393, 79). Il estoit grans chevaliers et fors bien fourmés de tous membres. (FROISS., Chron. L., VI, c.1375-1400, 165). De corsage estoit hault et bien formé, droit et lé par les espaules, et haingre par les flans. (CHR. PIZ., Faits meurs Ch. V, S., I, 1404, 48). Celluy payen estoit grant et fourmé hideusement et de telle representacion qu'il sembloit mieulx ung deable que ung homme (BAGNYON, Hist. Charlem. K., c.1465-1470, 143). Elle estant despoullee se monstra tresbelle, blanche et bien formee et sy plaisante et amoureuse par la formosité de sa personne que c'estoit merveille. (BAGNYON, Hist. Charlem. K., c.1465-1470, 170). Sy pouvez croire et savoir que de maintes [dames] il fut jalousé ; car, pour certain, plus bel escuyer, mieux fait, ni formé de tous membres, on n'eust sçu trouver, ni querre, comme autres fois a esté dit. (Faits Lalaing K., c.1470, 83). ...et de sa personne il estoit grant chevalier, moult beaul et moult bien formé de tous membres. (LA MARCHE, Mém., I, c.1470, 194). Ce corps [de Jésus] est formé proprement Et si bien qu'oncques fut personne. (Pass. Auv., 1477, 260). Cy gist Pierre de Baugé, filz très sage, De grant lignage, bien formé de corsage, Beau personnage et advenant de mesme, De la Bazoche Roy de noble parage, Franc de courage, begnin, doulx, courtois, large (LA VIGNE, Compl. roy Bazoche M.R., 1501, 412).

 

-

"Bien fait" : ...Il est si grand, si espaullu, Si formé et si potelu, Que à peine pourroit-il entrer. (Maistre Mim. T., c.1480-1490, 260). Cy gist Pierre de Baugé, filz très sage, De grant lignage, bien formé de corsage, Beau personnage et advenant de mesme, De la Bazoche Roy de noble parage, Franc de courage, begnin, doulx, courtois, large (LA VIGNE, Compl. roy Bazoche M.R., 1501, 412).

 

-

[D'un jeune homme] Tout formé. "Parvenu à son plein développement" : ...sy furent plains, plourez et moult regretez de toutez pars et souverainement de leur filz qui estoit tout fourmé et parvenu en force d'omme, lequel succeda par droitte lignié leur seignourie et pour l'ame d'eulx fonder de belle fondacions qui seroient longuez a raconter. (Comte Artois, c.1453-1467, 153).

 

-

[Du corps, d'une partie du corps] : ...la femme d'un laboureur (...) enfanta une fille gemelle, ou deux filles joingnans ensemble en ung seul ventre, ayans tous autres membres feminins entiers et formez hault et bas doubles (FAUQ., II, 1421-1430, 310). Plus la voy, et tant me plaist mieulx : Son visaige est tant precïeux, Tant amoureux, si bien formé Qu'oncques Nature, se m'aist Dieux, Ne forma plus bel soubz les cieulx, Se je ne suis mal informé. (Narcissus, p.1426, 308).

 

-

Estre formé à + inf. "Être constitué de façon à pouvoir + inf." : Il est d'usage en France, que quelconques dame, com fille de hault signeur que elle soit, que il convient que elle soit regardée et avisée toute nue par dames, à savoir se elle est propise et fourmée à porter enfans. (FROISS., Chron. R., XI, c.1375-1400, 224).

 

-

Formé de qqc. : ...les corps humains sont fourmez de IIII ellemens (SAINT-GILLE, Comment. A.Y. L., 1362-1365, 283). ...et puissance sans sens est comme ung arc sans corde, et comme ung beau bras paralitique, bien formé d'os et de chair et de nerfz, et desgarny de sensitif esperit. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 74).

 

-

Formé pour qqc. : Et quant Sansorins, qui ot corps Fourmé pour faire une bataille, Si s'arreste et puis si s'apoie Sus sa lance, et dist... (FROISS., Méliad. L., t.2, 1373-1388, 187).

 

b)

[D'un animal] "Parvenu à la fin de sa croissance" : Saichiez aussi que quant il a esté longuement sur le poing et qu'il a tous ses .VIJ. mercqs -- ja soit ce que j'aye bien veu tel qui avoit .VIIJ. -- et aussi quant le ..IIJe.. noir mercq du balay passe le bout des elles, il est adont tenu pour fourmé. (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 150).

 

-

Formé de membres. "Qui a des membres solides" : Et le faucon pelerin est le meilleur qui soit, et est le plus gros et le plus fourmé de menbres que tous. (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 168).

 

c)

[D'une chose concr.]

 

-

[D'un fruit] "Parvenu à son plein développement, à maturité" : ...quant fruit est parfait et acreu et fourmé (SAINT-GILLE, Comment. A.Y. L., 1362-1365, 283). Premierement vous prendrez .V. cens de nois nouvelles environ la saint Jehan -- et gardez que l'escorche ne le noyau ne soient encores formez, et que l'escorche ne soit encores trop dure ne trop tendre -- et les pelez tout entour et puis les perciez en troiz lieux tout oultre, ou en croix, et puis les mectez tremper en eaue de Saine ou de fontaine et la changier chascun jour. (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 267).

 

-

[Des fumées du cerf ou d'un autre animal sauvage] : Ilz [les chèvres sauvages] gietent leurs fumees en torches au commencement du nouvel temps, et aprés ilz les remuent fourmees, einsi que font les cerfs. (GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, 70). Aprés li vueill aprendre a conoistre et juger les fumees du cerf, quar aucunne foiz les getent en torche et aucunne foiz en plateaux, aucunnes foiz fourmees, aucunne fois aguillonnees, aucune foiz entees, aucunne foiz pressees et aucunne foiz debotees et en d'autres diverses manieres, comme j'ay dit devant. (GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, 151).

 

-

Formé de qqc. "Équipé de qqc." : La ville n'est pas grande maiz y a deulx tours sans chasteau, maiz est la mieulx formee de grosse artillerie que je cognoisses sur le chemin de Venize jusques la. (BARBATRE, Voy. T.-C. P., 1480, 121).

 

d)

[D'une chose abstr.]

 

-

"Qui est parvenu à son plein développement" : Mais neent moins telx enfans l'en dit estre beneurés en esperance, car encore ont il mestier quant a felicité de avoir vertu formee et vie parfaicte, si comme nous avons dit devant. (ORESME, E.A., c.1370, 130). ...mais quant il avient que il fault et que il voit autre plus avancié de lui, ou que il le cuide, ou qu'il a paour qu'il aviengne aussi hault, la est l'envie toute formee. (CHR. PIZ., Trois vertus W.H., c.1405, 135). On ne heet point de formee haine communement, se ce n'est a cause d'injure aucune receue d'auctrui ou que on la se repute avoir receue, soit a tort ou a droit (CHR. PIZ., Trois vertus W.H., c.1405, 141). ...quand le comte se vit en celuy danger, comme de perdre et abandonner la moitié du sien, et ses enfants de venir en rigueur telle contre luy, mut un grand estrif entre le père et les enfants et une controverse toute formée pour estre possesseur [de l'héritage de la comtesse] (CHASTELL., Chron. K., t.4, c.1456-1471, 219).

 

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Formé de/par qqc. "Composé, constitué de qqc." : Or ne me chaut de dire l'eure De cel jour, ne quel part tournay. Mais mon cuer si bien atournay Qu'il remaint en douce plaisance, Fourmée de douce attemprance, Que dedens mon cuer compassay, Par quoy le remenant passay Adès bien de celle journée... (MACH., D. Aler., a.1349, 265). En aprés, meureté samblablement doit par deulx choses estre formee, asscavoir par gravité ou pesanteur et par soy taire (DAUDIN, De la erudition H., c.1360-1380, 297).

 

-

Part. passé en empl. subst. "Femelle de certains oiseaux de proie" : Item, tercelet d'esmerillon est le masle et l'esmerillon est dit le fourmé et est la fumelle, et volent ensemble et sont reclamez au loirre. (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 166). Item, tercelet de hobé est masle : le fourmé est la fumelle. (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 166). Des faucons villains la fumelle est dit lannier ou le fourmé, et le masle est dit tiercelet. (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 168).

B. -

"Donner un certain agencement à qqc."

 

1.

"Façonner, dessiner qqc. d'une manière précise" : Et la cause est, car nous ne faison pas doubte comme l'en doit former ou escrire les lectres, mais des choses qui peuent estre faites par nous en plus d'une maniere ou en pluseurs manieres dissemblables. (ORESME, E.A., c.1370, 190). Aucune fois un homme qui n'est pas expert en art d'escrire, il considere et apperçoit bien se la lectre est bien formee, mais il ne la savroit faire. (ORESME, E.A.C., c.1370, 539). Et soubz ledit blazon avoit en vers de lectre de court bastarde et bien formee escript ce que s'ensuit... (RENÉ D'ANJOU, Cuer am. espris W., 1457, 140).

 

-

[D'une figure géométrique] Se former. "Être construit" : Le centre du cercle est le moyen point du cercle, selon lequel le cercle se forme en reondeur, et aussi la droite moyenne d'une chascune chose. (Somme abr., c.1477-1481, 145).

 

2.

"Donner un ordre logique, une structure cohérente (à un raisonnement)" : Quar les choses mixtes sont meues selonc l'element qui habonde et a signeurie en elles, si comme il fu dit ou tiers chappitre, combien que en la masse dessus dicte aucunes choses mixtes aient certains lieus sus terre convenables a leur espesce et que aucunes aient autre mouvement par vertu d'ame si comme ont les oysiaus et les poyssons et les bestes. Apres il aplique a propos en formant sa rayson. (ORESME, C.M., c.1377, 138).

 

3.

"Produire (un son), articuler (un mot), formuler (un propos)" : Or est la court garnie et pleinne ; Se puet on bien par voie pleinne, Ce m'est avis, aler avant. Dame, vous parlerez devant, Se fourmerez vostre demande, Nom pas pour ce que je demande Que li fais me soit refourmez, Car j'en suis assez enfourmez ; Mais d'aucuns membres dou procès Me moustreroient les excès Qui vous en font doloir et pleindre... (MACH., J. R. Nav., 1349, 192). Lors en mon estant me dressay, Se vi, ou mes yeus adressay, Un oisel de proie volant, L'air devers midi acolant, Si haut vers les nues fichiez Qu'il y sambloit estre atachiez. Mais de ce moult bien vanter m'os Qu'eins qu'on peüst fourmer .VI. mos, Il fu sus mon poing descendus, De quoy je fu moult esperdus. Esperdus ? Mais ce fu de joie. (MACH., D. Aler., a.1349, 395). ...Dont c'est pour nous belle avenue, Biau sire, de vostre venue. Et vous en estes eüreus, Se de riens estes amoureus. Car de cause avons nostre plait Fourmé qui aus amoureus plaist : C'est d'amours, d'amant et d'amie, Et de leur noble signourie. (MACH., J. R. Nav., 1349, 189). Et je li dis : "Sire, sans faille Ma dame a bien, comment qu'il aille, Son fait moustré, et sagement, Et de soutil entendement Bien baillié par vives raisons, Pour fourmer ses comparisons Bien faites et bien devisées Et si justement exposées, Que qui amender y vorroit, Je croy moult bien qu'on ne porroit..." (MACH., J. R. Nav., 1349, 196). ...ilz baubient et ne fourment pas bien leur lettre (SAINT-GILLE, Comment. A.Y. L., 1362-1365, 283). "Sire", dist Gieffroy, "vous avez bien entendu comment Hanibal a fourmee sa peticion et la convenance qu'il a faicte a monseigneur..." (Bérinus, I, c.1350-1370, 94). Et lors ot le conte de Flandres conseil d'aucuns de ses amys, que il appelleroit du roy devant le sainct pere, et envoia à Romme pour fourmer l'appel. (Chron. norm. 14e M., c.1369-1372, 2). Li hiraus estoit ou regart De la roÿne de Bretagne Qui ne tient pas a trop estragne L'ordenance quant cilz parolle, Qui moult bien fourma sa parolle. (FROISS., Méliad. L., t.1, 1373-1388, 82). Et si humblement fourma se predicacion, que li rois de France, meus en grant pité, prist là le crois, et requist au Saint Père qu'il li volsist acorder. (FROISS., Chron. L., I, c.1375-1400, 116). ...li dis apiaus fu bien fais, escrips et fourmés, ensi qu'il apertenoit (FROISS., Chron. L., VII, c.1375-1400, 94). Et sont diz voyeulx, pour ce que sanz yceulx ou aucun d'eulx ne se peut former voix ne sillabe de lettre ne mot que l'en peust prononcer ne proferer a nul vray entendement. (DESCH., Art dictier R., 1392, 273). ...et à cause de quoy ledit evesque avoit formé une complaincte ceans contre l'arcevesque de Reins (BAYE, I, 1400-1410, 52). Cest exemple met saint Jeroime mon greffier ou prologue de la prophecie Abacuth, qui, en escripvant, a la persone dez chetifz desirs humains, contre la tardive et longue souffrance dez jugemens de Dieu, forma la demande pareille a la tienne (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 51). Et tu dois entendre par le piglot une eminence qui se aparoist en la gorge en la teste de la gorge laquelle eminence avec la figure qu'elle induyt ou lieu est necessaire a engendrer et former diverses voix (PREVOST, Cir. Guill. Salicet, 1492, IV, 1). Ledict seigneur entendoit bien peu de ce qu'on luy disoit ; mais de douleur il n'en sentoit point. Il me feït signe que je couchasse en sa chambre : il ne formoit guères de motz. (COMM., II, 1489-1491, 281).

 

4.

Former qqc. sur qqc. "Rendre qqc. conforme à qqc." : ...les nobles du royaulme (...) avoient le roy à conseillier et à garder son honnour, à touttes ces choses remettre à point et à fourmer sus droit et que le roy ne le royaulme n'y eust point de blasme (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 229).

 

-

Se former sur qqc. "Se conformer à qqc., adapter sa conduite en fonction de qqc." : ...et parla ung pour eulx tous, ung bourgois de Londres, qui s'appelloit sire Symon Susbery, saige homme et bien enlanguaigiet ; et se fonda et fourma en sa parolle bien et saigement et vivement du tout, sus le conseil et information que le duc de Glocestre leur avoit dit et donné. (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 29). Bien savoit li rois de France aucuns des secrés des Englès et sus quel estat il estoient, et quel cose il proposoient à faire. Si se consilloit et fourmoit sur ce, et faisoit pourveir ses cités, villes et chastiaus moult grossement en Pikardie. (FROISS., Chron. R., VIII, c.1375-1400, 34).

C. -

Former qqn / les aptitudes de qqn. "Développer (les aptitudes de qqn) par un enseignement" : A l'autre escole j'ensengnoie L'entendement et le fourmoie A argüer, a desputer, A jugier et a discerner Entre le bien et le mauvois (GUILL. DIGULL., Pèler. vie hum. D.-M.-S.-T., c.1330-1331, 41).

REM. Quid de barbe de former ds l'ex. suivant ? "Formule de serment (?)" : FLATERIE. J'avoye peur de l'amander Ou d'estre pris de la justice. ENVIE. Hé ! que tu es couhart et nice ! Amander ? Pourquoy ? Pour le batre ? Et qui se fust osé embatre De prandre ung des serviteurs Qui sert en l'ostel de Pluseurs ? Oy, dea, oy ! c'est bien dit, Gauthier. Sy hardy, barbe de former, De t'en dire pis de ton non ! (Pouvre peuple H., c.1450-1492, 174).
 

DMF 2020 - Article revu en 2015 Pierre Cromer

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