C.N.R.S.
 
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     ENSEIGNE     
FEW IV insignia
ENSEIGNE, subst. fém.
[T-L : enseigne ; GD : enseigne ; GDC : enseigne ; AND : enseigne ; DÉCT : enseigne ; FEW IV, 714b, 715a : insignia ; TLF : VII, 1177a : enseigne1]

A. -

"Signe matériel, indice, trace, marque"

 

1.

"Traces visibles, concrètes, indice (de qqc.)" : Vaner faisoit sur la riviere Les blez, a la fin que la paille En contreval la riviere aille Qui va vers la maison son pere, Pour quoy la paille luy apere Ensengne qu'ou lieu dont ce vient A plus de blé qu'il n'y convient (Renart contref. R.L., t.1, 1328-1342, 44). Resgarde moy, et de moy te souveingne. Ne pense pas, bele, qu'en vain me plaigne : Voy mes cheveus, voy ma barbe grifaingne ; Voy mon habit Qui de ma mort te moustre vraie enseingne ! (MACH., F. am., c.1361, 167). Prince, je suis seure et certaine Que marier serre la vaine Et fait perdre force et coulour A pluseurs ; j'em porte l'ensaingne. Pour ce a non marier enseigne (DESCH., Oeuvres Q., t.6, c.1370-1407, 241). Lors repaira Gieffroy au navire et commande a traire ses chevaulx hors, car bien afferme que jamais ne s'en partira, pour en mourir en la paine, tant qu'il y aura fait telle enseigne que on congnoisse ens ou pays qu'il y ait esté. (ARRAS, c.1392-1393, 220). La tierce est Mathematique. Yceste science autentique La nature si nous enseigne Des choses, qui n'ont nulle enseigne De corps et si sont tout autour Des corporaulx choses entour (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 113). Et est non mie ymage, mais a l'ymage comme cest monde, qui proprement n'est pas dit ymage de Dieu, mais mireoir du createur et comme le pas du piet empressé en terre est ensigne du piet. (Somme abr., c.1477-1481, 111). Aucuns dient qu'il fut filz de celui homme, à qui par accident la main senestre fut ostée et ung an après lui fut restituée et, pour enseigne de ce miracle, ou lieu de la conjunction demoura une cycatrice en semblance d'une ligne de sang. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 109 v°).

 

-

"Signe de vie" : Comme doncquez m'as tu ainsy delaissé, et pour quoy m'as esté si lointaine que a poy suis succumbé en la fosse de desespoir, pour ce que tu t'es demucee de moy au besoing, ne n'ay eu ensaigne, signe ne apparence de toy par grant temps ? (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 90).

 

-

"Ce qui se donne à voir, ce qu'on peut voir"

 

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Outre l'enseigne. "Au-delà de ce qu'on laisse paraître, au-delà de ce que l'on peut dire ou penser" : Dou faudestoet savoir devés : Riches estoit oultre l'enseigne. (FROISS., Dits Débats F., 1363-1393, 98). Briefment l'amour, que je t'ensengne, Est delitable oultre l'ensengne (Echecs amour. K., c.1370-1380, 145). La matinee m'enfourmoit Qu'il feroit bel oultre l'ensengne. (FROISS., Joli buiss. F., 1373, 91). Si en y eut moult de navrés et de mal appareilliés ; et par especial, ou logeis dou connestable, fu occis uns siens escuiers d'onneur, que il amoit oultre l'ensengne. (FROISS., Chron. R., VIII, c.1375-1400, 86). Veu qu'ilz sont si oultre l'enseigne, Non pas assez nuysans, mais tres, C'est une dangereuse espergne D'amasser tresor de regrés. (CH. D'ORLÉANS, Rond. C., 1443-1460, 347). Ce gentil conte, de sa bonne et doulce nature estoit et fut tout son temps amoureux oultre l'enseigne (C.N.N., c.1456-1467, 154). ...il n'a pas esté seul entaché de ce mal ; mais toutesfoiz, car il le fut oultre l'enseigne, je ne le saroie passer... [D'un jaloux] (C.N.N., c.1456-1467, 255). Les delices font l'homme gourt ; Hanibal, se bien m'en souvient, Congneut jadis dont tel mal sourt Quant a Capuë, comme lourt, Print ses plaisirs oultre l'enseigne. (GAGUIN, Passe temps oisiv. T., 1489, 372).

 

2.

"Marque" : Pour revenir au lieu [dans la forêt] ou sa femme laissait tant fist le gentilz hons, le chemin raivisait ; L'ansaingne qu'il y mist moult trez bien ravisait, Maix femme ne anffan adont il n'y trouvait. (Lion Bourges K.P.F., c.1350, 16). En ce pays font les gens en leur front enseing[ne] d'ung chaut fier pour recognoistre (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 160). Et sur ce il ala a Nevers, sy trouva ses manieres a une vielle de pute affaire, quy fist tant pour luy qu'elle luy monstra une enseigne qu'elle avoit sur sa destre mamelle, laquelle home ne femme n'avoyent jamais vewe fors elle et moy. (Gérard de Nevers L., c.1451-1464, 140). Et les enseignes qu'ilz portent au visaige, ils les font d'un rasoir pour estre plus beaux (LA BROQUIÈRE, Voy. Outr. S., c.1455-1457, 147). Dame Abonde du Four dist que par ruer ou visage de la femme qui porte enfant aucunes cerises, frezes ou vin vermeil, l'enfant en aportera sur soy aucune enseigne. (Ev. Quen., I, c.1466-1474, 86).

 

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"Marque (d'une blessure, de coups...)" : ...car soudainement il se frappa en la cité assise, ainssy comme se il craingnist les menaces, les injures et les bactemens de son pere, desquelx il monstroit aucunes enseignes qu'il avoit faictes de sa voullenté. (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 38). Et ilec dist audit Guillaume Maillaud et autres qui lors y estoient presens, que ledit Sabouraud et lui avoient hurté ensemble, et que il lui avoit en ce faisant fait une enseigne ou front, qu'il monstra ilecques, où il avoit ung petit de sang. (Doc. Poitou G., t.9, 1448, 63). ...vous portez enseigne de navreure sus vostre destre sourcil. (Percef. III, R., t.2, c.1450 [c.1340], 140). En ceste meslée fut très-aigrement blessé au visage le seigneur de Créqui, qui l'enseigne en porta jusques a la mort. (CHASTELL., Chron. K., t.2, c.1456-1471, 50). Et ledict conte fut en très grant dangier et eut plusieurs coups, et entre les autres ung à la gorge d'une espée, dont l'enseigne luy est demourée toute sa vie (COMM., I, 1489-1491, 30).

 

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"Marque (pour signaler qqc.)" : ...là fist on un banc ["ban"] (...) que cescuns, selon se ordenance, fesist son ensaigne à son ostel et que nuls ne se logast l'un sus l'autre (FROISS., Chron. R., IX, c.1375-1400, 189).

 

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Faire enseignes. "Signaler, noter au moyen d'une marque" : Mais je vous pri si chier comme vous m'avés que vous ne moustrés le livre que a gens qui soient trop bien de vostre cuer ; et, s'il y ha aucunes choses a corrigier, que vous y faites ensengnes... (MACH., Voir, 1364, 558).

 

-

"Cible" : Et tout pour ce qu'il ne te chaut Ne de son froit ne de son chaut Ne de pointure ne d'assaut Que li las sente, Eins en fais einseingne et bersaut, Où Dangiers jour et nuit assaut, Et mes si c'on ne le consaut Toute t'entente. (MACH., Compl., 1340-1377, 248). Il regarde le blanc qui luy est enseigné et, par ce regart, il adresce sa main et conduit la flesche droit a l'ensengne a laquele il a son regart. (FILLASTRE, Traité Conseil H., c.1472-1473, 188). ...il mettoit souvent loing ung enfant qui tenoit la palme de sa main dextre estendue pour enseigne et il tyroit ses sayettes par les intervalles des dois par tant grant art qu'elles passoient oultre sans le blecer. (MAMEROT, Romuleon D., 1466, 352).

 

-

Au fig. "Empreinte" : O crestiens que Dieu a eslevez parçonniers de vie pardurable, et qui aportastes du saint baptesme la merche et l'enseigne de Jhesu Crist, vostre Dieu et vostre maistre, comme osez vous violler ce qu'il vous a laissié ça jus yci bas pour vostre sanctification et pour sa memoire ? (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 60).

 

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"Marque distinctive du seigneur, que l'officier des eaux et forêts appose sur certains arbres, pour les repérer" : Item, que le dit marchant coupera et avera a son prouffit tous les bois quelconques qui est et sera en sa dicte prinse et marchandise, excepté que nous avons retenus et retenons la moitié des gros chesnes tant seulement a partir a l'encontre de lui par nostre dit gruier ou autre qui portera nostre martel et ensengne. (Comté Porcien R., 1395, 204).

 

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"Statue" : Aprés fut commis aux consulz qu'ilz destruisissent les bachanailles a Romme premierement et aprés par toute l'Ytalie, sinon qu'il y eust ancien autel ou enseigne. (MAMEROT, Romuleon D., 1466, 71).

 

3.

"Symbole" : Sy trouva [le chevalier] au chief une aulmaire mout richement ouvree ou milieu de laquelle pendoit une lampe ardant, et au dessoubz avoit un tableau ou estoient escrips mettrez qui disoyent : "Cy aour l'on, nul ne s'en feigne, Le Dieu au bon roy de Bretaigne Preceforest, le preu, le saige. Pour lui faisoit de feu ensaigne..." (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 815).

 

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ALG. "Symbole" : Les tiers sont nommez cubicz dont lenseigne [l. l'enseigne] si est... (NIC. CHUQUET, Triparty M., 1484, II, 737).

B. -

"Tout ce qui permet de reconnaître, d'identifier, objet ou signe de reconnaissance"

 

1.

"Objet constituant un signe de reconnaissance, ou de ralliement"

 

a)

[Un objet quelconque] : Et si ay la moitié d'un annel que le bon larron me bailla a son departement, afin que, se jamaiz nous pouyons retrouver ne veoir l'un l'autre, ou que nous voulsissions mander aucunes besoingnes l'un a l'autre, que ce feust l'enseigne plus certaine. (Bérinus, II, c.1350-1370, 17). Sire prestre, quelle enseigne ont Ceulx qu'esconmenier voulez Plus que ceulz que vous absolez ? (Mir. parr., 1356, 13). Ce sera la secrée enseigne Que nous deux l'un a l'autre arons. (Mir. Oton, c.1370, 339). Ceste oriflamble est une mout disgne banière et enseigne (FROISS., Chron. R., XI, c.1375-1400, 53). Orendroit est temps que je face A chascun apparoir m'ensaigne [la croix] (Jour Jug. R., c.1380-1400, 251). Deux chapeaulx, l'un noir l'autre pers, A court poil en façon d'Almaigne Avecques deux beaulx plumeaulx vers Mis de costé pour faire enseigne. (HAUTEV., Invent. biens B., c.1441-1447, 62). Mais ce matin, au deslogier de leurs logis, les gens d'armes dudit Sforce lui demanderent : pour nous congnoistre les ungs des aultres, quelz ensseignes porterons nous ? (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 197). Chescun ung froc vous fault pourter, Lequel je vous vouldray poser, L'enseigne de religieux. (Myst. st Bern. Menth. L., c.1450, 149). Et oultre, les femmes donnerrent tous leurs joyaulx d'or et d'argent qu'elles avoyent, et les enfans lyement donnoient les ensengnes de leurs noblesses. (LA SALE, Sale D., 1451, 150).

 

-

Au plur. "Ornements" : Et Gueus Pompee vaincquit les Picenates par tresgriefve bataille, pour laquelle victoire print le Senat toutes les enseignes de dignité. (MAMEROT, Romuleon D., 1466, 109). ...par ce qu'il [Dioclétien] estoit grevé de viellesse et se veoit estre inhabile a gouverner l'empire, il se voult reduire a la vie privée et delaisser les enseignes imperiaulx avec Hercules Maximilien (MAMEROT, Romuleon D., 1466, 452).

 

b)

"Drapeau" (Il n'est pas toujours possible d'établir la différence entre enseigne, banniere, estendart, mais l'enseigne désigne souvent le drapeau d'une compagnie (unité de base) alors que l'estendart est le drapeau d'une armée et de son chef) : "...Contre Esmeret yray, drois est que je le fiere, Car m'ensengne abati par daléz le ghasquiere..." (Flor. Rome W., c.1330-1400, 232). En l'arriereguarde fut le comte Roulans, (...) La fut l'estandart et l'ensaigne des Frans (Galien D.B., c.1400-1500, 47). Par bel arroy saillent dehors Li conroy, ou reluit li ors Sus enseignes et sus escus. (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 75). La grosse bataille vient aprez avecques les bannières et enseignes (BUEIL, II, 1461-1466, 35). ...pour la fasson et cornetes de bleu, viollet et gris, à X deniers la piesse, vallent IIII liv. III s. IIII d.. Item, pour la fasson de une enseigne et le guiton (Archives servit. Louis XI, T., 1467-1472, 20). Et neantmoins, par [ la ] grant force des Sarrazins, toutes les ensaignes, estandars, banieres, tant de l'archiduc Jaspar comme de Frederick, son frere, furent abbatues et reversées au grant dangier et peril de la fortune. (LA MARCHE, Mém., I, c.1470, 23). En l'avant garde furent bannieres desployées, et toutes enseignes et parures, à qui mieulx mieulx (LA MARCHE, Mém., II, c.1470, 317). ...les enseignes doivent reverence ... l'estandart, comme font les petiz batteaux en la mer devant une carracque ou une grant nef. (LA MARCHE, Mém. IV, Pièces annexées, 1473, 60). ...à l'assemblée, ledit sire de Brezé ordonna qu'on donnast aux enseignes des Anglois : car ilz sont de telle nature, ainsi qu'on dit, que, quant leurs enseignes sont ruées et portées par terre, ilz sont tous esbays et ne se ralient plus. (TRING., c.1477-1483, 286). ...et luy, fort sanglant, se retira à eulx comme au millieu du camp, et estoit l'enseigne du bastard de Bourgongne toute despecée, tellement qu'elle n'avoit pas ung pied de longueur, et l'enseigne des archiers dudict conte. (COMM., I, 1489-1491, 31). L'autre portoit son escu et ses armes, ung autre sa cotte d'armes, son espee, et autres portoient son estendart, son guydon, son enseigne et toutes autres choses ad ce appartenantes (LA VIGNE, V.N., p.1495, 312).

 

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Desployer son enseigne. "Dérouler son drapeau"

 

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Desployer son enseigne sur qqn. "Faire la guerre à qqn" : Et de ce temps que le roy Charlemaigne Dessus les Turcs desploya son enseigne, Et qu'au pays la guerre maintenoit, Illec dedens pour seurté se tenoit (LA VIGNE, V.N., p.1495, 246).

 

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À enseignes desployees. "Les drapeaux déroulés, c'est-à-dire, l'armée disposée en lignes de bataille" : Et avec ce quatre mille Suysses et Allemans qui estoient a la ville, soubdainement commencerent a sonner flustes et tabourins et marcher au champ a tout leurs enseignes desployees, qui estoit la plus merveilleuse chose qu'on avoit encores veu de pieça pour ung alarme. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 307).

 

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Au fig. : As tu ce jour ma mort juree, Soussy ? je te pry, tien te quoy, Car a tort ma douleur, par toy, Est trop souvent renouvellee. A belle ensaigne desploiee, Me cours sus, et ne sçay pourquoy (CH. D'ORLÉANS, Rond. C., 1443-1460, 330).

 

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P. méton. "Troupe, compagnie rangée sous une enseigne" : Vous le eussiez destroussé, luy et ses enseignes, et puis ses gens, comme ilz retournoient de courre, chargez comme herissons, les ungs aprez les aultres (BUEIL, II, 1461-1466, 93). Si fit le conte ouvrir les portes devant le jour et marcha l'enseigne de messire Anthoine, bastard de Bourgoingne, la premiere (LA MARCHE, Mém., II, c.1470, 254). Bien fut vray que le mareschal de Bourgoingne manda au seigneur de Beauchamp et au seigneur d'Espiry qu'ilz reculassent leurs enseignes et leurs compaignies pour plus avant attraire les Gantois (LA MARCHE, Mém., II, c.1470, 320). La place fut prinse d'assault et y entra l'enseigne du sire de Bueil, mon maistre, la première, laquelle porte ung rangier en son estandart, qui est bien congneu d'Anglois et de Françoys. (TRING., c.1477-1483, 274). ...et desja y avoit cinq ou six enseignes du roy qui estoyent arrivées au long d'un grant fossé qui estoit entre les deux bandes. (COMM., I, 1489-1491, 22). ...et en une trouppe tuèrent quatre ou cinq cens hommes en ung moment, et branloient toutes noz enseignes, comme gens presque desconfitz. (COMM., I, 1489-1491, 105).

 

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Sous l'enseigne de qqn. "Sous l'autorité de" : Ledit conte de Dampmartin avoit à ladicte journée soubz son enseigne six ou sept vingtz hommes d'armes, sans d'aultres qu'il envoya querir par vingt de ses archiers, qui estoient à une forte tour près dudit Balle. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 142). Si vaillamment et sans y espergner ne corps ne biens, car c'estoit ung très saige et bon chef de guerre et vaillant homme d'armes, et estoient contens de luy tous les grans hommes estans soubz sa charge, et menoit soubz son enseigne ungne belle grosse armée, et estoit avec luy le seigneur de Bressourez... (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 390).

 

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Avoir sous son enseigne des hommes de troupe. "Commander" : Ledit conte de Dampmartin avoit à ladicte journée soubz son enseigne six ou sept vingtz hommes d'armes, sans d'aultres qu'il envoya querir par vingt de ses archiers, qui estoient à une forte tour près dudit Balle. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 142).

 

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[D'un homme de troupe] Garder son enseigne. "Ne pas quitter sa compagnie" : ...et à celle heure n'avoit on encoires riens pillé en ladicte ville, mais avoient gens d'armes, archiers et valetz tenu ordre, tellement que chascun gardoit son enseigne. (LA MARCHE, Mém., II, c.1470, 42).

 

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Lever enseigne. "Prendre les armes, ici pour se révolter" : Qui au premier eust bien serré la vaine, Sanz espargner, ilz fussent mal bailliz, Maiz mal pugnir fait la lever ensaigne (DESCH., Oeuvres Q., t.4, c.1370-1407, 284).

 

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Mettre sous son enseigne. "Soumettre à son autorité" : Pour s'exempter des faulx traistres mutins, Il luy promist mettre soubz son enseigne Une villette qu'on appelle Sarsaigne, Laquelle estoit subjecte aux Florentins. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 195).

 

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Porter l'enseigne de qqn. "Être partisan de qqn" : BELZEBUTH. Chascun d'eulx porte mon enseigne, Larrons, meurtriers, pilleux de gens (Pac. Job M., c.1448-1478, 227).

 

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Porter son enseigne sur qqn. "Faire la guerre à qqn" : ...Charles premier sera puissant et fort, Et le second l'empire d'Alemaigne Doit obtenir, et porter son ensaigne Sur Sarrasins, et ceuls doit subjuguer (DESCH., Oeuvres Q., t.6, c.1370-1407, 70).

 

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Planter son enseigne. "Installer son armée" : Il s'en alla pour son plaisant sejour Tres bien disner et coucher a Bressaigne Et la planta gayement son enseigne, Car il y a une belle petite ville, Et bon chasteau fort tirant a montaigne, Qui appartient a messire Virgille. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 228).

 

c)

"Drapeau, bannière (d'une corporation)" : ...chacun an, le jour Saint Bernabé, à heure de matin, les mayeur et eschevins, qui auront gouverné icelle année, et les mayeurs d'enseigne, qui sont communement en nombre quatorze, ou leurs lieuxtenans en leur absence, conparront en l'eschevinage de la dite ville (Hist. dr. munic. E., t.2, 1447, 624).

 

d)

"Armes d'une maison" : Là estoient encores sus ces mas ces estramières armoiies et ensegnies de leurs ensengnes qui baulioient au vent (FROISS., Chron. L., IV, c.1375-1400, 90). ...toutes les gens de l'ostel du Roy et des segneurs qui estoient demourez à Paris prindrent et porterent l'enseigne du duc de Bourgongne et la crois Saint Andry (FAUQ., I, 1417-1420, 128). Messager doit sur soy porter l'enseigne de son maistre, maiz celuy a de soy effacé le signal de Dieu, qui se souylle des taches de murtre et de tricherie. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 119). Sire, dist le chevalier, il porte ung escu d'or sans autre enseigne. (Percef. III, R., t.1, c.1450 [c.1340], 266). ...au jour de la reduction, tous les habitans d'icelle ville [Paris] portoient l'enseigne de Bourgoingne et non aultre (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 181). Item, et que mondit seigneur de Bourgoingne, et tous ses feaulx et subgiez et autres qui par cy devant ont porté en armes l'enseigne de mondit seigneur, c'est assavoir la croix saint André, ne seront point contrains de prendre ne porter autre enseigne, en quelque mandement ou armes qu'ilz soient en ce royaume ou dehors, soit en la presence du Roy, ou de ses connestable et mareschaulx, et soient à ses gaiges ou souldées, ou autrement. (LA MARCHE, Mém., I, c.1470, 231). La cruelle et fiere Attropos Commetz a porter mon enseigne (Cene dieux, c.1492, 129).

 

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"Devise" : Le bastart de Nanteul ot posé son blason Delez une fenestre par dessus ung perron. Oyés qu'il avoit fait, pour Dieu vous en prïon : Le drap ou fut trouvé ou bois lez le buisson Ot mis dessus l'escu et s'ot mis ou moillon Escript en perchemin, sy con lisant trouvon : "A ce povre trouvé qui n'a nul compaignon." Ainsy estoit s'enseigne, pour voir le vous dit on. (Tristan Nant. S., c.1350, 229).

 

e)

"Emblème" : As fenestres avoit mainte ensengne jolie, Hëaumes et pennons, mainte lance fourbie (Renaut Mont. B.N. V., c.1350-1400, 252). ...en la cité tost se fichent, Sur les murs leur enseigne affichent (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 50). L'ensaigne de Mahom fut contremont levee, Qui estoit de fin or, l'immaige figuree ; Ung crestien tenoit qu'il frappoit d'une espee. (Galien D.B., c.1400-1500, 52). Et toy mesmes te mocques, et encores faiz, de ceulx qui sont aliés avecques toy et qui firent ledit traictié en les appelant traictres, et en disant du bien de ceulx qui me soustiennent en les appelant bons et loyaulx françoys, et gens qui ayment leur honneur, et qui n'ont point laissié leur noble enseigne, c'est assavoir la croix blanche et droicte et leur cry, Nostre Dame saint Denis (JUV. URS., Aud. celi, 1435, 193). Celluy Roy Estienne augmenta moult la foy de Nostre Seigneur et eut la croix sainct Andrieu en tele devocion et reverence, qu'il la prist pour ensaigne, toutes et quantes fois qu'il yroit en gherre ou en bataille. (LA MARCHE, Mém., I, c.1470, 50). A quelle occasion les roys de France ont tousjours volentiers porté pour enseigne le cerf à dix rames et le liz semé sur champs, comme se peut encorre veoir à l'ostel de Saint Pol et des Tournelles et en plusieurs lieux par France (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 144 r°).

 

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Au fig. : Viennent tous les aultres [diables] qui en enfer sont, tant que ceste enseigne demeure, je ne les crains [il s'agit du "bon escu de saincte foy" qu'est le sacrement de baptême] (C.N.N., c.1456-1467, 430).

 

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"Dessin, motif" : ...unes patenostres d'or, signées à ensaignes de tabliers et eschicquiers. (Invent. mobilier Ch. V, L., 1379-1391, 111). Drap d'or fut mis par despit a l'esvent, Soye requise estoit si drue au vent, Tant riche fust de figure ou enseigne Sans regarder de les mettre en espargne, Qu'on n'en faisoit mise, recepte ou compte Ne plus ne moins que de bureau d'Auvergne (LA VIGNE, V.N., p.1495, 220).

 

f)

"Médaille ; monnaie" : ...Nous avoir oye la supplicacion des povres gens demourans au Mont Saint Michiel, faisans et vendans enseignes de Monseigneur Saint Michiel, coquilles et cornez qui sont nommez et appellez quiencaillerie, avecques autre euvre de plon et estaing, getté en moule, pour cause des pelerins... (Ordonn. rois Fr. S., t.7, 1393, 590). ...enseignes d'argent pour faire une escharpe pour monseigneur (Comptes roi René A., t.1, 1478, 336). ...XX douzaines enseignes d'estain pour les autres escharpes pour les paiges (Comptes roi René A., t.2, 1478, 350).

 

Rem. Doc. 1363 (icellui Symon rompi une huche, prist et osta une enseigne d'argent et .XVII. solz et .VI. den. tournois), 1397 (lors ledit Toustain eut sachié de sa bourse une ensaigne d'argent, qui bien povoit valoir deux solz ou environ), 1407 et 1470 ds GD III, 230c.

 

g)

"Banderolle (portant des signes de reconnaissance) attachée à une arme, à une pièce de l'armure" : Adonc fut le destrier amené et une petite ensigne armoyee gentement attachee sur le hault du heaulme de Beufvon en signe ce congnoissance. (Beufves Hant. I., c.1499-1503, 31). Et bien apparut au departir qu'il [ledit le Groing] s'estoit trouvé là où les cops se donnoient, comme il povoit apparoir à saditte javeline aux enseignes qu'elle portoit. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 302).

 

-

P. méton. "Arme, lance" : ...Puis refiert [Jourdain] roy Fabur des Puis de Galilee Que l'ensaigne li met outre le pance lee (Jourd. Blaye alex. M., a.1455, 199).

 

h)

TOURN. "Objet porté par un chevalier (ou par son représentant), qui le tient de sa dame, comme insigne du défi formulé dans la lettre qui accompagne l'enseigne, et signifiant que ce chevalier se soumet à sa dame et se propose de combattre en l'honneur de celle-ci" (synon. emprise) : [Messire Jehan de Rebremettes :] Messire Henry, vous estes ung chevalier de bien, et me samble que vous portez enseigne a vostre bras (...). Je suis ycy venus devers vous pour y touchier a tel entendement que, se vous avez riens en ceur touchant ceste enseigne, je le vous accompliray a l'ayde de Dieu et pour l'onneur de vostre dame (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 137).

 

-

Toucher à l'enseigne de qqn. "Mettre la main à l'enseigne de qqn, l'enlever, l'arracher, signe d'acceptation du combat" : Si vindrent les nouvelles jusqu'au duc prestement, et luy vint on dire que messire Jehan de Rebremette avoit touchié a l'enseigne de messire Henry (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 138).

 

2.

"Signe de reconnaissance, signal"

 

-

[Gestuel] : JUDAS. ...Celuy que baisier me verrez, A l'entrer ens, me saisirez : C'est le signe que je vous don. BANNANÏAS. Et le signe est tres bel et bon Et qui tres bien la chose enseigne. Retendras tu bien ceste enseigne, Malcus ? (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 247). JUDAS. (...) Je feray bien ceste besoigne, Mais je vous veulx dire enseigne : Celuy que basier me verrés, Il est vostre, celuy tenés. (Pass. Autun Biard F., 1470-1471, 81).

 

-

[Sonore] : Au guicher buche par aÿr [Renart] ; Le presstre vint quant oit l'ensengne. (Renart contref. R.L., t.2, 1328-1342, 24). ...ceulx qui le leur devoient bailler avoient pour enseigne de le leur livrer à ung son d'un canon, et autres parolles qui estoient semblables en effet et substance (Lettres Ch. VIII, P., t.1, 1487, 178).

 

.

En partic. "Cri de ralliement" : Sire, s'enseingne Crie Lembourc, et est roys de Behaingne, Fils de Henry, le bon roy d'Alemaingne... (MACH., J. R. Beh., c.1340, 107). Quant la nuis (...) fu toute venue (...) on n'ooit mais criier ne jupper ne renommer nulle ensengne ne nul signeur (FROISS., Chron. L., III, c.1375-1400, 187). Quant il venront sur nous (...) cascuns escrie, quant il venra à l'asambler, l'ensengne de sen signeur desouls qui il est (FROISS., Chron. R., XI, c.1375-1400, 22). ...et à l'assembler oult grant noise tant des instrumens que des cris des ensaingnes (Chron. Valois L., c.1377-1397, 161). Moult bien si prouverent Poitevins et font grant occision des Sarrasins. Mais le roy Selodus crie son enseigne a haulte voix, et joint l'escu au pitz, et brandist le fust de lance et broche le destrier des esperons ; au doz le vont suivant Xm. Sarrasins. (ARRAS, c.1392-1393, 184). Lors crie le roy Selodus son enseigne, disant : Ferez, seigneurs barons, la journee est a nous, ilz ne nous pevent eschapper. (ARRAS, c.1392-1393, 184). Les heraulx crioient l'enseigne de leur maistre et ceulx de Cleriadus crioient : "Du tout à la belle !" (Cleriadus Z., c.1440-1444, 709).

 

-

Bailler enseigne à qqn + sub. interr. ind. "Indiquer à qqn" : Mais depuis ilz conclurent que Voyau iroit au sacre, pour ce qu'il congnoissoit mieulx les personnaiges à qui il se failloit adresser et aussi que ledit de Balsac savoit myeulx les passaiges et chemins de Lymosin que ledit Voyau : ce qui fut fait ; et bailla enseigne audit Voyau où il le trouveroit, avec unes lettres qu'il escripvoit au duc de Bourgoigne. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 152).

 

3.

En partic. "Tableau figuratif mis sur une maison et servant à la distinguer" : ...[ils] vindrent au giste en icelle ville de Poitiers, en l'ostel d'une femme veufve demourant ou marchié, du nom de laquelle, et aussy quelle enseigne il a en son hostel, n'est record (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 532). On vent ycy devant du vin ; Je voys l'ansigne : la Croys blanche. Il fault que l'ung de nous s'avance Et amplir bien nostre boutaille. (Myst. st Bern. Menth. L., c.1450, 144). Des ayans cause de feu Martin le Seyneur, pour une autre masure, où jadis estoit maison où soulloit pendre enseigne de l'Imaige Saint Martin, qui tient au jardin dessus declairé, par an 1 d. (Comptes Paris M., t.2, 1457-1458, 23). Item, a Marïon l'Idolle Et la grant Jehanne de Bretaigne Donne tenir publicque escolle Ou l'escollier le maistre enseigne. Lieu n'est ou ce merchié ne tiengne, Synom a la grisle de Meun ; De quoy je diz : "Fy de l'enseigne [d'un lupanar], Puisque l'ouvraige est si commun !" (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 126). L'ostel est seur, mais qu'on le cloue. Pour enseigne y mis ung havet, Qui que l'ait prins, point ne m'en loue... Senglante nuyt et bas chevet ! (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 87). ...à cause de quoy le pappe fist disruer et abolir tous les ours qui furent trouvez en Romme en painture et en figuyure, tant aux enseignes des maisons que autre part. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 131 v°).

 

-

P. iron. [À propos d'une blessure sanglante] : Veéz, seigneurs, veéz mervoille, Ce truant m'a coppee l'oreille, Veéz com la face me saigne ! Seigné suis a la rouge enseigne ; Il m'a tout le jouaul fendu. (Pass. Semur D.M., c.1420 [1488], 179).

 

-

À l'enseigne de/du qqc. : ...les Portingalois (...) retournerent à leur hostel à Londres, à l'enseigne du Faucon ; là estoient-ilz logiez (FROISS., Chron. M., XII, c.1375-1400, 294). ...lui qui parle et ledit Mathelart estans logiez ensamble en la ville de Vernon, en l'ostel où pend l'enseigne de la Fleur de Lis (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 42). ...Pierre Pépin, hostellier, demeurant audit Orléans, à l'enseigne de l'Escu de Bourgoigne (Ch. VI, D., t.2, 1408, 30). ...l'ostel (...) séant en la rue Saint-Pol à Paris, qui fut à feu Jehan d'Orléans (...) auquel pend l'enseigne du Croissant (Ch. VI, D., t.2, 1418, 167). Trois chevaliers (...) Cy loigiéz sont en ces estaiges, A l'anseigne du liepart (Pass. Semur D.M., c.1420 [1488], 235). ...dont la premiere [maison], où pend l'enseigne des Conins, est joignant d'un costé audit Jehan Marcel (Rouen temps Jeanne d'Arc L., 1424, 67). De Jacques Compere, espicier, ou lieu de Jehan de la Porte, cordonnier, et de feu Jehan le Charron, pour une maison assize en ladite rue, devant l'eglise Saint Mathurin, où soulloit pendre l'enseigne du Barillet (Comptes Paris V.L.D., t.1, 1424-1425, 2). Item de VIIJ l. de rente sur ung hostel et tènement à Saint Maclou à l'ensaigne du bras d'or. (Invent. test. Surreau Foville F., 1435, 131). Et est à savoir que, le jour qu'il arriva, fut mené loger en la rue Saint-Honoré, à l'enseigne du Lion d'argent. (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 297). ...et d'illec fut amené et conduict dedens Paris et mené loger en la rue Sainct-Martin, à l'enseigne du Coq, où depuis il fut longuement logé et ses gens et compaignie (ROYE, Chron. scand., II, 1460-1483, 90). Cy fine le present livre nouvellement imprimé à Paris Par la veufve feu Jehan Treperel et Jehan Jehannot, Imprimeur et libraire juré en l'Université de Paris, Demourant en la rue neufve Nostre Dame, a l'enseigne De l'escu de France. (Mir. st Nic. juif, c.1480-1500, 159).

 

4.

[Ce qui permet d'authentifier]

 

a)

"Empreinte, signe distinctif"

 

-

"Sceau"

 

.

Donner de l'enseigne de la ville en la joue de qqn. "Marquer au fer, du sceau de la ville, la joue de qqn" : Lambert Luux est jugiet à estre mis en l'eschièle de le ville et là demourer jusques au reson de le clocke pour raler à l'ovre, et, quand il sera ostéz, on li donra l'ensengne de le ville en une de ses jauwes, et est bannis sept ans hors le pays de Flandres, sour le hart (Hist. industr. drapière Flandre E.P., t.3, 1360, 646).

 

-

DRAP. : ...que desorenavant on mette de par nous une ensengne et une loy de plonc à leur dras qui seront loyaus, dont li uns costés dou plonc aura l'ensengne d'un lyon et li autres costés de une merlete ; de quoy cis qui le mettera aura de chascun drap ainsi enseignié, pour mettre ladicte ensengne, 2 mittes ou 1 par pour nous et nient plus Et lequel metteur de ladicte ensengne sera mis par nous et de par le seingneur de Maldenghiem. (Hist. industr. drapière Flandre E.P., t.3, 1331, 46). ...s'il avenoit que li XIII Hons u drappiers qui seroient a che rewart trouvoient aucun drap, dont li ensengne ne fust encousue de blanke tille bien et souffissanment, chieus qui li dras seroit paieroit 2 s. a le halle de cascune pieche. (Drap. Valenc. E., 1344, 301). ...il nous pleuist à yeauls donner et ottroyer un seaiel, tel et de telle ensengne et enpriente qu'il nous plairoit et par espésial de nos armes, pour atakier et maitre à tous les draps (Hist. industr. drapière Flandre E.P., t.3, 1372, 403). Et que après le temps de leur dicte apresure expiré, ilz ne soient receu ne tenus pour frans saieteurs ne à baillier enseigne à le vingtaine, que leurs maistres, qu'il leur auront aprins ledict mestier (Hist. Lille T., t.2, 1500, 512).

 

b)

P. méton. "Cachet dont l'empreinte sert à authentifier" : ...consentons pour nous et pour nous hoirs desore en avant perpetuellement, le seel ou enseigne et la loy de la draperie à tenir, maintenir et user en nostre dicte ville aveucques tels estatus, cures et ordenances comme il est ou sera acoustumé ès autres bonnes villes de Flandres (Hist. industr. drapière Flandre E.P., t.3, 1336, 19).

C. -

[Au plur.] "Signes servant de preuve (ou d'engagement)"

 

1.

"Preuves matérielles, éléments de preuve concrets" : En vous est adjoustée foiz, Quant telx enseignes m'aportez. (Mir. enf. diable, c.1339, 36). "Par ma foy", dist Romaine, "le filz d'un poissant roy le me dist et me donna unes telles enseignes que j'ay encores en mon doy". (Bérinus, II, c.1350-1370, 69). ...Vraies ensengnes me raporte : Un anelet d'or tous massis, Ou un rubis avoit assis, Et lettres que bien recongnui. (FROISS., Pris. am. F., 1372-1373, 141). ...chevauciés à grant esploit devers (...) monsigneur Jehan Chandos (...) Lors trait un aniel d'or hors de son doi et dist : "Donnés li de par moy, il recognistera bien ces ensengnes que elles sont vraies." (FROISS., Chron. L., VII, c.1375-1400, 176). Et Gieffroy fait sonner ses trompettes et armer sa gent, et s'en va pour assaillir la ville, qu'onques ne le voult laissier pour le roy Uriien ne pour le roy Guion, ses freres, et jura que il y monstrera telles enseignes que l'en congnoistra bien qu'il aura esté en Surie. (ARRAS, c.1392-1393, 223). Se le fist desfouir et prendre les os et mettre en un sarqu et aporter en l'eglise des Cordeliers, que on dist Saint François, a Valenchiennes, et de rechief la ensepvelir moult reveranment, et encores en voit on les ensengnes. (FROISS., Chron. D., p.1400, 629). [Lequel de la Fontaine] ...lui bailla pour enseignes une petite piece de parchemin où estoit son seing manuel sans autre escripture (Paris domin. angl. L., 1426, 224). Et comme elle eust mis sa main sur les yeulx d'Entendement, la veue luy esclarcy, tant que en la vertu d'elle mesmez, et par les divines enseignes et aornemens celestieux qu'elle portoit, il la choisit, et congnut visiblement que c'estoit Foy. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 27). ...l'escu despessé, le heaume froissé, le glaive ebetté, le visage tranchié : a ces ensengnes congnoit on le vaillant homme d'armes. (JUV. URS., Verba, 1452, 254). Suis je donc devenu ane ? Je en porte bien les ensenhes : Je ay la cue et les aurelhes, Ne plus ni meyns, come ung ase ! (Fol Mari A., a.1470, 510). Des autres eglises qui estoient en grant nombre (car j'ay ouy dire à monsr de Humbercourt, qui congnoissoit bien la cité, qu'il s'y disoit autant de messes pour jour que à Romme), la pluspart furent pillées sous couleur de prendre prisonniers. Je n'entray en nulle eglise que en la grande ; mais ainsi me fust-il dit et en veïz les enseignes (COMM., I, 1489-1491, 161). Ceste adventure desespera fort ledit duc et luy sembla bien que tous ses amys l'abandonneroient, aux enseignes qu'il avoit veües de sa première perte de Granson, dont il n'y avoit que trois sepmaines jusques à celle dont j'ay parlé. (COMM., II, 1489-1491, 122).

 

-

"Objet que l'on rapporte d'un lieu en guise de preuve de passage en ce lieu (notamment lors d'un pèlerinage)" : "Pere, dist Jhesus, retourné Sui a toi, et ai consommé Ce que faire me commandas Quant jus u monde m'envoias, (...) Ensegnes t'en ai aporte [l. aporté] Si com autres pelerins font Qui en estrange terre vont..." (GUILL. DIGULL., Pèler. J.-C. S., 1358, 335).

 

-

"Informations, indications (qui peuvent servir de preuves)" : Et oultre tout ce fist il dyables, Qu'enseignes apporta creables, Dont me merveil. (Mir. Oton, c.1370, 353). ...je vous creant Que, quant de chi vous partirés, Vraies ensagnes en dirés A cheuls qui oïr les vorront (FROISS., Joli buiss. F., 1373, 155). Mais, selon son advis, devoit estre des parties de Gascongne ou de Languedoc ; car lui et le plus de ses gens disoient oc, la langue que l'en parle quant on va a Saint Jacques. Aultres ensseignes ne m'en dist. (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 122). Et lui bailla enseignes telles que l'homme d'armes de Crathor le sercha tant qu'il le trouva dedans la ville de Crathor et pareillement prist sa foy. (BUEIL, II, 1461-1466, 95). Heber, duquel print le nom la langue hebraïcque, qui ne fut point muée pour ce que lui, ne nul de sa lignée, ne furent consentens de fere icelle tour, vivoit encores en ce temps, homme très perit en la science des estoilles qu'il avoit aprinse de Ionicus, et encores en ont les Hebrieux bonnes enseignes en aucuns de leurs livres. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 16 r°). N'a gueres aussi que vous envoyé ung homme, pour de bouche vous advertir de mes nouvelles, et luy ay baillé enseignez telles que y pouvez adjouster foy, car de lettres ne se osa charger. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 309).

 

-

Prendre enseignes ensemble/avec qqn de + inf./que + prop. sub. "S'entendre avec qqn, décider d'un commun accord avec qqn que" : Le soir avant la prinse avoit esté deliberé de assaillir le lendemain au matin, qui estoit à ung jour de dymanche XXXe d'octobre, l'an mil quatre cens soixante huict, et prins enseignes avecques ceulx de nostre avantgarde que, quant ilz orroient tirer ung coup de bombarde et deux grosses serpentines, incontinent après, sans autres coups, qu'ilz assaillissent hardiement, car ledict duc assauldroit de son costé. (COMM., I, 1489-1491, 152). Et prismes enseignes ensemble, ledit providateur et moy, de pouvoir envoyer l'ung vers l'autre, s'il en estoit besoing, pour traicter quelque bon appoinctement (COMM., III, 1495-1498, 140).

 

-

Enseignes de + inf. "Signes qui permettent de déduire l'intention de" : Thamaris, qui fu de sens plaine, De grant agait se pourpensa, Car Cirus plus avant laissa Entrer es destrois des montaignes, Ains que montrast nulles enseignes De lui combatre, ne mal mettre. (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 206).

 

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"Document écrit" : ...comme vous ne poviez croire qu'il eust dit lesdictes paroles de par moy, attendu qu'il n'avoit nulles lettres ni autres enseignes, et que si je vouloys aucune chose envers vous, que j'y envoyasse homme qui s'adressast à vous avec lectres et instructions de ce que je voudrois (...) que vostre plaisir est que je m'adresse à vous. (Lettres Louis XI, C., t.1, 1460, 134).

 

-

"Renseignements d'ordre militaire" : Et jà estoient aucun compagnon coureur, de le partie des François, venu jusques as Englès, li quel en reportèrent vraies ensengnes au roy de France. (FROISS., Chron. L., III, c.1375-1400, 162).

 

-

"Nouvelles (de qqn)" : Mon tresdoulz cuer, uns clers vint a mi, n'a pas granment, qui me pressoit trop fort que je vous escrisisse, et ne m'aportoit lettres ne vraies ensengnes de vous ; et pour ce j'en tins po de compte, et li respondi estrangement (MACH., Voir, 1364, 572).

 

-

"Instructions" : "Chevauciés hasteement vers Poitiers, et vous boutés dedens le ville et ne vous en partés jusques à tant que nous vous remanderons sus certainnes ensengnes." (FROISS., Chron. R., VIII, c.1375-1400, 61). Et leur dist que il les couvenoit aler à Bourdiaus, et leur donna certainnes ensengnes pour parler au signeur de Labreth (FROISS., Chron. L., IV, c.1375-1400, 104).

 

-

Loc.

 

.

En/par telles enseignes que/à ces enseignes que. "La preuve en est que, à preuve que" : Au juif as paié moult bien Quanques tu avoies du sien Et a jour nommé, c'est la fin, A ces enseignes que l'escrin Est en son lit a tout l'avoir Que je pour toy li fis avoir, Tout tel conme en mer mis l'avoies La nuit que paier le devoies, Dont l'endemain il le trouva Ou a ses piez li arriva, Si le prist quant le vit a port. (Mir. march. juif, c.1377, 219). "...Si vous mande, par moy, que vous ouvrez la porte ou que vous me bailliez les clefz et je l'ouvriray, à ces enseignes que ceste nuit il n'a point esté au gait, mais son filz y a esté." - "C'est verité", respondirent-ilz (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 215). ...hier du jour me vint une femme messagiere qui ceans vous cuida trouver, mais en vostre deffaulte elle me dist que vous deisse a vostre revenue que Canifre, que vous concquestastes sur le Chevalier au Chiennet comme le plus dur chevalier et le moins amans femmes, vous salue plus de cent fois et vous envoie un filz que vous en elle engendrastes, par telles enseignes que vous retournastes avecq elle pour ravoir ses gans qu'elle jecta tout a escient dessoubz le couldre. (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 882). ...il demanda a Gaudine qui estoit mere de l'enffant. "Sire, dist elle, vous l'engendrastes en Morguanette, en telz enseignes que vous habandonnastes son lit plus tost que ne voulsissiez pour la doubte de Morgane sa mere et que Zephir vous empourta de la fenestre..." (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 884). Le lendemain a Marigné disna, Puis, luy disné, tout son fait ordonna Et s'en alla coucher dedens Belistre, Un moult beau lieu qui a nom de tel titre, En telz enseignes que toute la journee La pluye au dos nous fut habandonnee. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 241).

 

.

En toutes enseignes (...) que : ...ainsy le destina Oberon le mien sire, qui a toy m'envoya A toutes ces ensaignes c'ung hanap te donna (Huon Bordeaux B., c.1400-1450, 83).

 

2.

[Domaine judiciaire]

 

-

"Indice matériel servant de preuve" : ...survint ung homme (...) qui se disoit (...) avoir eu bien congnoissance de la femme dudit suppliant, lequel asseura audit suppliant et afferma [ladite femme] estre allée de vie à trespas, et lui en donna de grans enseignes, dont ledit suppliant creut que ainsi feust. (Doc. Poitou G., t.11, 1473, 350).

 

-

"Faits rapportés par des témoins, qui ont valeur de preuve" : ...audit chappellain d'icellui sire de Nouvion, elle lui dist que il deist les parolles hardiment audit son maistre que dites lui avoit, aus enseignes qui s'ensuivent, c'est assavoir : que environ le temps dessus desclairé que icellui sire de Nouvion arriva audit lieu de Caudebec, environ heure de vespres, il trouva elle depposant qui se esbatoit par l'ostel avec plusieurs autres jeunes filles, print icelle et l'embrassa (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 122). Le premier venu, quand il oyt si vives enseignes tant notoires, il ne sceut que dire [Un homme reçoit la preuve de l'existence d'un rival heureux] (C.N.N., c.1456-1467, 229).
 

DMF 2020 - Synthèse Pierre Cromer

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