I. -

Empl. intrans. ou pronom.

A. -

"Se soustraire à qqc. (qui retient, qui contraint, qui est fâcheux...)

1.

[D'une pers.]

a)

(S')eschapper (d'un lieu, d'une chose ou d'une personne qui retient). "S'enfuir, s'évader, se sauver, se libérer de qqc./qqn" : Qui le menroit aus fourches pendre En celle heure, sans plus attendre, Si seroit il reconfortez Et soustenus et deportez En esperence d'eschaper ; Lors ne le porroient taper Male errour, ne desesperence, Tant comme il aroit esperence ; Qu'esperence le conduiroit Jusqu'a tant qu'il trespasseroit. (MACH., J. R. Nav., 1349, 211). Doulx Dieu, (...) De ce qu'eschapée suis hors De la chambre au roy vous gracy (Mir. Berthe, c.1373, 172). ...il fu trouvé par le varlet dudit maistre d'ostel, qui sur lui trouva tout ledit larrecin, et pour lequel il l'amena prisonnier en ladite ville de Panpelune, et que en le admenant par ycelle ville, il se eschappa dudit varlet, et se bouta en franchise à l'ospital de Ronceval (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 251). Item, requis à il qui parle comment il eschappa desdites prisons de la Ferté, dit que, environ huit jours après qu'il fu mis esdites prisons, compoingnons de ladite ville se combatirent ensemble (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 435). ...pour occasion de certeins prisonniers qui s'en estoient eschappez de ladicte Conciergerie (BAYE, I, 1400-1410, 157). ...et tuerent touz les prisonniers estans en ycelles prisons, exeptez aucuns en petit nombre qui eschaperent d'aventure. (FAUQ., I, 1417-1420, 136). ...[Orose] dist que, l'an de la fondacion de Romme IIII^cIIII^xx et troiz, apprès ce que les Rommains orent prins la cité de Messine et la cité de Agugnatun, ou Hanibal le viel estoit, quant il fut eschappé, il assembla, par l'ordonnance de ceulz de Cartaige, soixante et dix nefz et se prist a gaster toute Ytallie sur la mer. (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 32). Vous en yrez la et m'actendrez ; et tantost que je pourray eschapper je feray ma diligence de me trouver bientost vers vous. (C.N.N., c.1456-1467, 307). ...elle se laissa ferrer et vint, comme elle souloit, au lever et aux aultres heures qu'elle povoit eschapper, devers le chaperon fourré (C.N.N., c.1456-1467, 415). Oudit moys d'avril, ung nommé maistre Pierre Durant, qui estoit nepveu dudit cardinal d'Angers, lequel par long temps avoit esté detenu prisonnier ou chasteau de Mailly, eschappa des prisons dudit lieu et s'en vint jusques à Paris, où il y fut congneu par ung apoticaire nommé Chambetinx (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 237). ...il contempna les biens mondains et ainsi qu'il advint que le pays fut saysi par les adversaires et les hommes en fuite et lui eschappast nud, fut interrogié par autres s'il avoit tout perdu, respondit qu'il portoit ses biens (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 62 r°).

-

[Dans un contexte métaph.] : Je n'y puis vëoir nul retour. Ses cuers est fermez en la tour D'Amours, sous la clef de Tristesse, Ou elle sueffre grant destresse, Si que morir la couvenra Briefment ; ja n'en eschapera. (MACH., J. R. Nav., 1349, 205). Las ! et je n'en puis recouvrer, Qu'amours Secours Ne me vuet nul prester, Qui en ses las si durement Me tient que n'en puis eschaper ; Ne je ne vueil, qu'en atendant Sa grace je vueil humblement Toutes ces dolours endurer. (MACH., Motés, 1377, 483).

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"Assurer son salut" : ...il ayma mieulx confesser verité et son peché (...) et eschapper, que le celer et tenir clos et estre en dangier de perdre sa vie. (C.N.N., c.1456-1467, 220).

-

Eschapper à qqn. : "Sievez moy de loings et, si tost comme je vous feray signe sus ung homme que je voy querir, mettez y la main et gardez bien que il ne vous eschappe." (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 55). ...il i avoit toutdis sur li bonnes gardes, a la fin que il ne lor escapast ou fust emblés (FROISS., Chron. D., p.1400, 802).

-

Eschapper de la main/des mains de qqn : Et dist, en gettant un grant plaint : "De toutes pars me tient engoisse Qui mon cuer destreint et engoisse. Se ce fais, je sui a Dieu morte, Et, se dou faire me deporte, De vos mains ne puis eschaper, Car ce n'est mie per a per..." (MACH., C. ami, 1357, 7). ...[il] dist que il fist serment en la main dudit seigneur d'estre Englès et de tenir la partie des Englès ; le fist pour ce qu'il ne savoit comment eschaper ne issir de la main des Englès (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 387). Cestui Fabius presta le conseil au cardinal Gilles d'eschapper de la main de Polido, le cruel tirant (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 86 v°).

b)

"Se tirer d'une situation fâcheuse, en réchapper" : Sont tuit li vent contraire pour ma mort, Si qu'il n'i a confort ne garison, Merci n'espoir, ne d'eschaper ressort, Ne riens de bien pour moy, car sans raison Je voy venir la mort amere à tort Preste de moy mettre à destruction (MACH., Motés, 1377, 498). De ma dolour confortés doucement, De mon labour meris tres hautement, De grant tristour en toute joie mis, De grief langour eschapés et garis, De bon eür, de grace, de pitié. (MACH., Motés, 1377, 510). ...nous veons que le phisicien du corps, a qui est donee auctorité et puissance d'anseigner et de ovrer selon l'art de medicine, et de juger dez malades lezqueulx deveroient eschaper et lezquelx morir, est ordené a celle fin que lez gens vivent sobrement et que ilz se retraient et gardent des choses nuisibles, pour la santé de leur corps garder, ou pour la santé acquerir et la mort eschiver. (Songe verg. S., t.1, 1378, 84). Et dois entendre que sanie qui est en la concavité du pis deçoit souvent le medecin, car il semble le plus qu'ilz soyent ptisiques et incurable et quant la sanie est mundifié ilz eschappent (GORDON, Prat., c.1450-1500, IV, 6). ...a esté Antoine de Lussay (...) emporté comme mort ; et dit-on qu'il n'échapera point. (Lettres Louis XI, V., t.2, 1465, 326). ...a la requeste de Dieu, de Notre Dame de Beaumont et de madame sainte Katherine de Fierbois il [le blessé] est eschappé, et si est gari tout sain et net, et s'est rendu ledit Charlot ceans en bon point (Mir. ste Cath. Fierbois C., 1470-1483, 120).

-

"S'enfuir (pour éviter un danger)" : Puis yssy le maistre de Rodes de la mer a cent freres de la religion, et s'en vint au logeiz, et compta au roy et a son frere et aux barons l'aventure et comment payens furent mors et leurs vaisseaulx admenez au port, et comment le gallaffre et l'admiral de Bandas estoient eschappez en la galleotte. De quoy le roy fut moult doulent et ses barons. (ARRAS, c.1392-1393, 139).

c)

"Se soustraire à la volonté de qqn" : Longuement vous estes tenus De moy viseter et vëoir. Mais puis qu'estes en mon pooir, Foy que je doi sainte Marie ! Einsi ne m'eschaperez [var. ne chapperes mie], Ains me direz de vos nouvelles, Car je croy bien et pense qu'elles Sont courtoises et aggreables, Beles, douces et honnourables. (MACH., F. am., c.1361, 188). Ostez ce procés, dit monseigneur, et soyez seure que vous ne m'eschaperez (C.N.N., c.1456-1467, 156). Je voys bien que je ne puis de vous eschapper que je ne face ce que vous voulez (C.N.N., c.1456-1467, 387). ...il aura sa compaignie avant qu'elle luy eschappe, veille ne daigne. (C.N.N., c.1456-1467, 552).

2.

[D'une chose]

a)

[D'un objet] "Échapper au contrôle (de qqn, pour une raison ou une autre)" : Et le gloux respondy a semblant d'estre moult courroucié, et dist que son cheval s'estoit abuchié tellement que l'escrin lui estoit eschapé des mains malgré lui. (Bérinus, I, c.1350-1370, 321). Et Remondin vint courant, et palmie l'espie, et cuide ferir le sengler entre les quatre membres, car le senglier estoit enversé du coup que le conte lui avoit donné, et l'actaint Remondin du taillant de l'espie sur la soye du doz. Et il venoit de grant randon. La lemelle et l'espie eschappa en glissant sur le porc, et vint actaindre le conte qui estoit versez a genoulx, par my le nombril, de part en part. Et Remondin retraist l'espie, et en fiert le porc tellement que il l'atterra tout mort. (ARRAS, c.1392-1393, 22). Et je m'en voys, par manyere d'esbas, Les cardinaulx, l'empereur et le pape Aussi aguillonner, aussi leurs vielz cabas Qui revestues sont de leur rouge chappe. Si de mes mains une seulle en eschappe, Je suis contant d'estre mys au chappitre ! (LA VIGNE, S.M., 1496, 225).

-

En partic. "Se soustraire à la vue (de qqn)" : ...avoient torches et flambeaulx pour mieulx choisir par tout, et que rien ne leur peust eschapper. (C.N.N., c.1456-1467, 382).

-

[D'un membre] "Cesser d'être en position stable, faire un écart, glisser" : Et sy vous certiffie que le meilleur de ces deux passaiges est souffissant a mettre paour au cuer qui puelt avoir paour pour nulle doubte mortelle, et souverainement au descendre ; car se par meschief le piet eschappoit, aultre puissance que celle de Dieu ne le porroit garantir (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 77).

b)

"Être perdu pour qqn"

-

[D'une chose] : ...ilz ne sont pas dignes d'avoir jamais bonne adventure, si ceste, qu'ilz n'ont pas pourchassée, par lascheté leur eschappoit. (C.N.N., c.1456-1467, 202).

-

[D'un animal] Ne pas eschapper à qqn. "Revenir à qqn" : ...s'en pensa le maistre d'ostel que s'il en povoit avoir bon compte, elles [des perdrix] ne luy eschapperoient pas (C.N.N., c.1456-1467, 581).

c)

HORLOG. [D'un élément mécan.] Eschapper (à qqc.)

.

"Se dégager (de qqc. pour un mouvement régulier de va-et-vient)" : Et est assavoir que en ladite roue du foliot doivent les dens estre toujours non per affin que au rencontre, quant elle fiert a une des dens, elle puisse eschapper par entre les aultres dens qui sont à l'opposite d'icy, a tant qu'elle eschappe a celle ou elle fiert, car adoncques fiert elle a l'aultre et passe come davent. (Traité d'horlogerie Z., c.1380, 276).

.

"Être libéré (d'un mécanisme de retenue pour retomber sur qqc.)" : Et si tu veulx faire une cheville en la croiz de la roe du mouvement pour lever la destente, tu la doiz moderer tellement qu'elle face a chacune heure ung tour precisement ; et ainsi fera 24 tours en ung jour naturel, et levera ladite destente a chacune heure, et quant elle luy eschappera elle cherra et frapera dessus la cloche, si fera destendre la sonnerie (Traité d'horlogerie Z., c.1380, 278).

3.

[D'un propos] "Être émis quasi involontairement" : ...si comme ceuls qui en leur parler dient, par inadvertence, aucune chose dont ilz ne se prenoient garde ou qui leur eschape et par ce se excusent. (ORESME, E.A., c.1370, 181). Et d'adventure, le lendemain après ceste veüe, comme il estoit en son retraict, que nous n'etions que trois ou quattre, il lui eschappa quelque mot de risée touchant ces vins et ces presens qu'il avoit envoyéz à l'ost des Angloys. (COMM., II, 1489-1491, 71).

B. -

"Éviter qqc. (qui menace, qui tend à s'imposer)"

1.

"S'enfuir (pour éviter un danger)"

-

[D'un animal] : Et quant il [l'alerion] se voloit lancier A sa proie pour lui haper, Elle ne pooit eschaper. Car quant proie prendre voloit, Si asprement après voloit Que jamais ne li eschapast, Qu'a son plaisir ne la hapast. (MACH., D. Aler., a.1349, 334). Il n'est beste que nous eschape, Mallegorge, a mon advis, Mes que nous ayons nous rects mys Ad se pas, car veez cy la fuicte. (Pass. Auv., 1477, 140).

2.

Eschapper à/de qqn.

-

"Se mettre hors de la portée de qqn" : Lors prist ses cheveus a tirer, Et puis sa robe a dessirer. Quant sa gent einsi le veïrent, Isnelement avant saillirent, Dont chascuns forment l'agrapa ; Mais par force leur eschapa. Aval la ville s'en fuï (MACH., J. R. Nav., 1349, 215). Et Berinus demoura tout seul, lui dementant et de triste cuer, car il ne savoit mettre conseil en lui ne quel tour tourner ne en quel part aler, afin qu'il se peüst eschapper et delivrer des tricheurs. (Bérinus, I, c.1350-1370, 51). Et quant Jossellins le perceut, si dist au damoisel : Or est il temps de vous vengier ; il est tous desarmez, sans coustel et sans espee ; il ne vous puet eschapper ; et aussi, se nous veons qu'il vous soit besoing, nous vous aiderons tuit. (ARRAS, c.1392-1393, 58). Avant, seigneurs, sergens de Crist, nous eschapperont ainsi ses ennemis ? Par foy, ce sera grant faute a nous. Qui lors veist gens mettre en ordonnance et courir sus a Sarrasins et gecter de canons et traire d'arbalestres, c'estoit horribleté a veoir. (ARRAS, c.1392-1393, 139).

-

"Se soustraire, échapper (à des puissances plus ou moins personnifiées)" : Je [Dieus d'Amours] suis comparez a la mort, Car je pren le foible et le fort, Que nuls ne m'en puet eschaper, Qu'il ne le couveingne passer Par mes las ou par mi mes mains. (MACH., D. verg., a.1340, 24). Aussi a morir avoit elle : Nuls contre ce point ne rebelle, Cui la mort ne veingne haper ; Nuls ne li porroit eschaper. (MACH., J. R. Nav., 1349, 207). Eins [Vénus] estoit vestue et parée, Com deesse, royne et dame, En corps, en biens, en cuer, en ame, De tous ceaus qui par amours aiment, Voire et, par Dieu, de ceaus qui n'aiment, Car homs ne li puet eschaper Puis qu'elle le deingne atraper. (MACH., P. Alex., p.1369, 2). ...ceulx qui schaparent de mort s'en fuÿrent et yssirent hors du royaume. (Cardenois C., c.1380-1400, 68). Se de la mort alés aujourduy eschapant, Faictes messes chanter et [les] dictes devant ! (Galien D.B., c.1400-1500, 59). ...disent les maistres qu'elle eschappa de mort a cause d'avoir senty des biens de ce monde. (C.N.N., c.1456-1467, 351).

-

"Éviter qqn" : LE LARRON. Je ne sçay se c'est un bourgois Ou un clerc que voy la aler ; Mais il ne me peut eschaper, Puis que je le voy sus ma marche. (Mir. march. larr., c.1349, 102).

-

Eschapper des mains de qqn. "Réussir à ne pas tomber entre les mains de qqn" : ...mais deables y admenerent bien IJc. crestiens, qui toutes noz gens mirent a destruction. Et quant je vy ce, je me party coyement de la bataille. Par mon chief, dist le gallaffre, il vous est bien cheu d'estre ainsi eschappé des mains d'un tel ennemy. Et tous les autres dirent que c'estoit voir. (ARRAS, c.1392-1393, 234).

.

Eschapper les mains de qqn : Si s'enfuy et a grant paine eschappa les mains d'icellui nouvel venu, qui l'eust voulentiers derenu (COLART MANS., Dial. créat. R., 1482, 201).

3.

S'eschapper (hors) de qqc.

-

"Éviter qqc. de menaçant, se tirer, se sortir de qqc." : Helas ! dolens ! or est bien autrement, Quant ma dame aimme autre nouvellement. Et puet on pis, dame, s'on ne se pent ? Certes, nennil ! Car c'est pour mettre un amant a essil ; N'eschaper hors de si mortel peril N'en devroit pas un d'entre cinq cent mil. (MACH., J. R. Beh., c.1340, 96). Josephus nous dist et raconte Que pour le pechié(s) et la honte De ceulz de Sodome et Gomorre Dieus les vault tous confondre en pourre. Par souffre ardant les confondi, Et la terre environ fondi, Si que puis n'i pot habiter Homme ne fame ne heriter ; N'onques n'en pot eschaper ame Fors Loth, ses enfans et sa fame. (MACH., Voir, 1364, 492). Conment autrement peust il Avoir eschapé du peril Qu'a ja passé ? (Mir. st Ign., 1366, 94). Si comme eschaper d'une forte maladie. (ORESME, C.M., c.1377, 188). Justice soudainement te lença et tresbuscha en l'orrible prison d'enfer, de si hault si bas. Adam n'en eschapa mie, car, aprés la premiere desobeyssance, Justice tantost le despouilla de son noble vestement de innocence, amena Rebellion en son royaume espirituel, le chassa hors de son propre heritaige (GERS., Purif., 1396-1397, 61).

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Empl. abs. "Sortir d'une difficulté" : ...car ceulz qui sont fors en telz cas ne ont pas esperance d'eschaper ou evader (ORESME, E.A., c.1370, 206).

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(S')en eschapper. "En réchapper" : Quant il furent tuit assamblé, Il a à chascun d'eaus samblé Que li sarrazin desconfi Fussent, et en disoient : "Fi, Mauvaise gent, mors y serez, Si que ja n'en eschaperez ; Ne ja pour lancier, ne pour traire, Ne porez à garison traire." (MACH., P. Alex., p.1369, 75). Messire Jehan de Hollande (...) veoit ses compaignons et ses amis entechiez de ceste maladie dont nul n'en eschappoit (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 99). Et quant vendra au soir, que le bon homme son mary est couché et se vieult esbatre avecques elle, elle, a qui il souvient bien de son amy que elle doit veoir demain a certaine heure, trouve maniere de s'en eschapper, et n'y touchera ja et dit qu'elle est malade (Quinze joies mar. R., c.1390-1410, 35). Et quant Sarrasins le sceurent, si tournerent en fuye. Et noz gens les suivent et vont occiant par my les champs et par les buissons ; et sachiez qu'il en eschappa moult petit. (ARRAS, c.1392-1393, 185). Par espicial il y ot occis ung des plus grans admiraux que le Soudan eut a sa court, lequel admiral avoit esté envoyez par le Soudam, lui cinquantiesme de chevalliers, pour iceulx robeurs prendre et destruire et en faire justice, mais icellui admiral et sa compagnie furent tous taillés en pieces sans ung seul en eschapper. (Voy. Jérus., c.1395, 75). Se n'en eschappa onques homme, Qui peüst rapporter a Romme Les nouvelles (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 243). N'y ait femme quil ce deffende ; A mort, a mort ! Nul n'an eschappe ! Cheux sont enffans en male grace, Mors seront sans misericorde, N'y ara nul quil en estorde, Que le roy le veul et ordonne. (Pass. Semur D.M., c.1420 [1488], 94). MERCURE. Et moy aussi, j'en ay lavé mes mains Et me consens qu'un tout seul n'en eschappe. VENUS (en pleurant). Je më oppose qu'a mort on les frappe Tant que nature y ait son cours parfait, Juste juge ! (Cene dieux, c.1492, 117). De humaine persecution Par mortelle execution De guerre, faminë et peste Sont tous parans et manifestes. LA VIE. Et n'en eschapperoit il nulz ? MARS. Tous les subjectz de Saturnus Povres mal complexionnés, Seront en brief empoisonnés (Cene dieux, c.1492, 136). Et avoient ordonné leur bataille si très bien que myeulx on ne sçauroit dire, et plusieurs jours devant, et en façon que, se fyans en leur grant nombre, ilz assailloient le roy et son armée tout à l'environ et en manière que ung seul homme n'en eut sceü eschapper si nous eussions estéz rompus ou pas où nous estions. (COMM., III, 1495-1498, 177).

-

[Dans une tournure impers.] : Et i fu mors lor chapitainne Clais Denneqin et, de sesse mille honmes que il estoient, il n'en escapa onques mille, que tout ne fuissent mort et ocis et abatu l'un sus l'autre, car il ne dagnierent fuir. (FROISS., Chron. D., p.1400, 179).

-

Eschapper de + inf. "Éviter de" : Sur cest article, dist dame Sebile Rouge Entaille que se un homme passe a pieds nuds sur le treffle a quatre fueilles, il ne puet eschapper d'avoir les fievres blanches, et se c'est une femme, elle sera wihotte. (Ev. Quen., I, c.1466-1474, 92).

-

"Se soustraire, se dérober (à une chose obligatoire)" : Par tout et especiaument à Sur, à Baruth, à Sajette, à Alixandre, à Damiette, à Triple ; et en Jherusalem Et à Damas le paie l'en [le droit sur les échanges]. De ce Xme. nuls n'eschape, Tant ait grant cote ou longue chape, Car chascuns y va à l'offrande D'ou qu'il soit, puis qu'il marcheande. (MACH., P. Alex., p.1369, 173).

-

[D'une chose] "Cesser d'être menacé par qqc. : Alors il fist soubitement courre toutes ses gens sur la prouve ; et ainssy le contrepoix d'eulx la haulsa devant et puis la rabaissa tant que la nave passa la chayenne et eschappa de ce peril. (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 50).

II. -

Empl. trans.

A. -

Eschapper qqc.

-

"Éviter qqc." : Secourue au besoing seras Et eschapperas ceste paine A t'onneur, soies ent certaine. (Mir. marq. Gaudine, 1350, 152). ...saige, qui son fait entend, Eschappe la mort quant il puet. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 337). ...j'ayme vielesse, qui signifie fin de vie, pour eschapper les tribulations qui le cuer me appesandissent (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 541). Augustin parlant a Dieu dist : qui te delaisse ou va il se non te [l. de] toy apaisiet, a toy courrouciet ? Car nous ne pouons eschapper la main de Dieu. Comme dist David le prophete : "Se je monte es cieulz, tu y ez. Se je descens en enfer, tu y ez present." (Somme abr., c.1477-1481, 139). ...celluy a grant prudence qui de deux maulx eschappe le plus grant. (MACHO, Esope R., c.1480, 224). L'escrevice, voyant que la bataille ne pouoit eschapper, se retourna vers la renouille et de ses griffes l'empoigna (COLART MANS., Dial. créat. R., 1482, 159). PREMIER. A mort, a mort ! SECOND. Plus avant vous ne passerez. PREMIER MARCHANT. Hellas, regardez que ferez, Messieurs, nous vous cryons mercy ! (Ilz les tuent.) TIERS. Jamais la mort n'eschapperez ; Il vous convient demeurer cy. (LA VIGNE, S.M., 1496, 272).

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"Échapper aux conséquences de qqc., s'en libérer" : Ha ! mon bon mari, conme en diz Et en faiz de nuit et de jour Je travaille et ay de labour, Afin qu'eschaper le meffait Puisse que j'ay contre toy fait Et conceu ! (Mir. Theod., 1357, 92).

-

Eschapper que + complét. "Éviter que" : Eschaper ne peut nullement Qu'il [le cerf] ne soit pris. (Mir. st J. Paulu, c.1372, 102). Ceulx qui estoient entechiez de la morille, quoyqu'ilz terminassent et quesissent nouvel air et nouvelles medicines, ne peurent fuir ne eschapper qu'ilz ne morurent. (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 111). ...si ne puis eschaper Qu'outre le gré d'Amours n'aie briefment La mort que j'ay desiré longuement. (MACH., L. dames, 1377, 64). Auquel servir, pour eschaper qu'il ne païast aucune rençon, pource qu'il estoit povres homs, il se accorda. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 123). Par gehine congnut quancqu'on vouloit rouver. Et quant il estoit hors s'en vouloit excuser, Mais pour son escondire il ne pot eschapper Que Robert le traïtre ne le fesist finer. (Cip. Vignevaux W., p.1400, 85). ...lesquelx, veans que bonnement ilz ne povoient eschapper qu'ilz ne feussent prinz, se mistrent en deffense et renyerent Dieu que, s'il y avoit homme qui mist la main à eulx, ilz le tueroient (Doc. Poitou G., t.7, 1408, 150).

B. -

Eschapper qqn. "Sauver qqn" : (Or parle LOT a Pylas.) Barrabam doit estre echapé ! (Pass. Autun Roman F., c.1400-1500, 192).

-

Eschapper qqn de qqc. "Sauver qqn de qqc." : ...laquelle pitié [la charité envers les pauvres] eschape l'omme de mort en moult de manieres (VIGNAY, Théod. Paléol. K., c.1333-1350, 50). Ce .XXIII^e. chappittre traitte de la vraye Amour que Scipio le premier Affrican heust, quant il eschappa de mort son pere. (LA SALE, Sale D., 1451, 150).