A. -

Au propre "Faire sortir la cervelle hors de la tête brisée, briser le crâne à qqn, assommer qqn" : Mais Orchas aherdi un estal qu'il trouva devant lui, et puis s'en vint a cellui qui la hache tenoit et lui donna un tel coup qu'il l'abati a terre tout escervellé, si que la hache lui volla hors des poings. (Bérinus, II, c.1350-1370, 91). Regnault lieve la perche si feri le premier, Si que jus a la terre le fist esservelier (Renaut Mont. B.N. V., c.1350-1400, 223). Mais se j'amoie une chetive, On me devroit dessus la rive Jetter en une yaue parfonde, Ou esserveler d'une fonde (MACH., Voir, 1364, 324). Et dient les docteurs que Dieu leur fit grant cortoisie, car leurs parens lez eussent tirez a mal. Ainsy puet estre dez mortalitez qui viennent sur les enfans. Vrayment ce seroit meilleur a plusieurs enfans que leurs parens les esservelassent contre I mur, que lez traitier comme ilz les traitent. (GERS., Pent., p.1389, 80). Les uns de sa main furent escervelés. (LEFÈVRE (R.), Hist. Troyes A., c.1464, 378).

-

Escerveler une teste : Là entendoient gens d'armes à abatre Flamens à pooir, et avoient li aucun haces bien acerées, dont il rompoient bachinès et escherveloient testes. (FROISS., Chron. R., XI, c.1375-1400, 55).

-

Escerveler comme cochons./Escerveler comme moutons. "Assommer" : ...et couchoit l'un devant lui et l'autre derriere à gueulles bees et les escervelloit comme cochons (Doolin de Mayence V, P2., a.1500, 210). ...et vit aussi Roboastre qui javeloit et escerveloit ces Sarrazins comme moutons (Doolin de Mayence V, P2., a.1500, 254).

-

Empl. pronom. : ...trop plustost se fust ecervelé et rompu la teste pour la reprendre que luy faire tenir le derriere coy. [Le mari d'une femme lubrique] (C.N.N., c.1456-1467, 520).

-

[P. exagér., d'une pers. qui a reçu des coups ou qui a fait une chute] : J'ay esservelee la teste ; Encor m'a il pis advenu, Qu'il m'a entré ou trou du cul, Le poitron Dieu, une dan d'arche. (Pass. Semur D.M., c.1420 [1488], 155). J'en sui tres toute escervellée Des coups qu'il m'a volu donner. (MARCADÉ, Myst. Pass. Arras R., a.1440, 181).

.

Avoir la teste escervelee. "Avoir la tête brisée" : Il est vray, car j'ay la teste Toute rompue et esservellée De crier et mener tempeste Pour avoir robe ! (Sav. Calb. T., c.1475-1500, 151).

B. -

Au fig.

1.

Escerveler qqn. "Faire perdre les esprits à qqn" : Saint Esprit ne lui revela [à Mathieu le bigame] Ce qu'il dist contre mariage. Certes ainsy l'escervela Ennuy, dessepoir ou la rage. (MARTIN LE FRANC, Champion dames I-II, P., 1440-1442, 220).

-

S'escerveler. "Se creuser la tête" : Hui toute jour me sui pour vous escervelée, J'ai vo besoigne tant forgie et macçonnée Que vous avrés briesment amie et bien amée. (Brun de la Mont. M., c.1350-1400, 133).

2.

Part. passé en empl. adj. au fig. "Sans cervelle, dépourvu de jugement, de bon sens" : Pour che veons nous chaschun jour les enfans qui ne veullent aprendre estre constrains par baptures et par manaces, lesquelz aprés, quant congnoissent le fruit de doctrine, de leur bon gré sont comme tous escervelés d'estudier, comme on voit, a Paris. (DAUDIN, De la erudition H., c.1360-1380, 88). Si font ensemble une charue Mal atelee Et vont la teste escervelee. (CHART., L. Dames, 1416, 285). ...Noz grans gentilz hommes mondains, Volaiges, estourditz, legiers, Esservelez comme beaulx dains (COQUILL., Oeuvres F., 1478-p.1494, 200).

Rem. Nom d'un personnage de farce ou d'un fou de cour : PATHELIN. Beau sire, or vous tenés. Je vous diray, sans plus attendre, Pour qui [c'est que] (vous) me cuidés prendre : Est ce point pour Esservelé ? (Path. D., c.1456-1469, 184).