C.N.R.S.
 
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     APPRÊTER     
FEW IX praesto
APPRESTER, verbe
[T-L : aprester ; GDC : aprester ; AND : aprester1 ; DÉCT : aprester ; FEW IX, 317b-318a : praesto ; TLF : III, 325b : apprêter]

I. -

Empl. trans.

A. -

Apprester qqc.

 

1.

[L'objet préexiste à l'action]

 

a)

"Rendre qqc. prêt à l'utilisation" : Le champ est ordonné, aprestez et bastis (Hern. Beaul. D.B., c.1350-1400, 75). Lors a fait crier a la trompette que chascun appreste son harnoiz, et que chascun parte le matin, au tiers son de la trompette, en ordonnance, dessoubz sa banniere, et sieve la bataille de l'avant garde. (ARRAS, c.1392-1393, 94). Ne me creez pas se je ne vous monstre, par le texte de l'euvangile presente, que le saint ange Gabriel, qui estoit comme fourrier de Dieu pour apprester son logeis, trouva ces trois pucelles, chamberieres ou damoiselles ou chambellaines, pour elle servir. (GERS., Annonc., a.1400, 232). Mais nature le corps ordonne Et appreste pour recevoir L'ame (CHR. PIZ., M.F., I, 1400-1403, 30). ...il ne demourra gueres a t'enferrer, et j'aray appresté a l'environ de ton devant le las jolis ou il sera attrappé. (C.N.N., c.1456-1467, 456). Si fist sa bonne femme l'ostel apprester, tendre, parer, nectoyer et orner au mieulx qu'il fut possible. (C.N.N., c.1456-1467, 462).

 

b)

"Préparer, rassembler (un ensemble de choses)" : Or faictes que les veneurs et les chiens soient prestz demain, et nous yrons a la chace. Monseigneur, dist le forestier, a vostre plaisir. Ainsi se party du conte, et appresta tout ce qu'il appertenoit pour la chasse au jour que le conte lui avoit ordonné. (ARRAS, c.1392-1393, 18). Je vous ay dit devant comme ceste armée de monsr de Warvic et ce que le roy avoit appresté pour le conduyre estoit prest à monter (COMM., I, 1489-1491, 200).

 

-

Apprester qqc. en qqc. "Utiliser, faire servir qqc. à qqc" : ...le noble seigneur de Croy, chevalier de bon âge, vert et vineux alors et en son premier venir, fit de grands et de hauts faits de sa main ; sy féroit, mailloit de l'espée, d'estocq et taille, rompoit mailles et charnières, et ne donna repos à son bras, ains l'apprestoit en la mort de chacun, fust devant, fust de costé, là où il pouvoit attaindre. (CHASTELL., Chron. K., t.1, c.1456-1471, 264).

 

c)

Empl. abs. "Faire des préparatifs" : ...moult fu le roy d'Ausaiz doulent de la mort de son frere. Mais le dueil en convient passer quant il plaist a Dieu. Il fist apprester pour faire l'obseque moult honnourablement, et fut tout prest a la grant eglise. (ARRAS, c.1392-1393, 186). Venés tous ; je vaiz aprester. La maison est cy pres de nous. (Pass. Auv., 1477, 148).

 

d)

Apprester qqc. pour + inf. "Préparer, disposer qqc. à" : Vray est que ton corps [saint Georges] esprouvas, Quant la pucelle delivras Contre le serpent merveilleux, Et de plusieurs tormens crueux Souffrir voulz ton corps aprester Pour avec Dieu es cieulx monter. (Prières saints R., t.2, c.1400-1500, 246).

 

2.

[L'objet est le résultat de l'action] "Rassembler, préparer ce qu'il faut"

 

a)

[Pour apprêter un mets] : ...que la viande Soit aprestée, Car il estoit ja près de la vesprée. (MACH., J. R. Beh., c.1340, 132). Vez ci table et mès appresté, Sire, pour vous. (Mir. Oton, c.1370, 362). Belle niepce (...) Alez faire aprester diner (Mir. Berthe, c.1373, 239). Damp Abbés, tout plain de joye, fist grant foison toctees appareillier, et apprester ypocras et vins estranges de diverses façons (LA SALE, J.S., 1456, 257). ...leur disoient qu'ilz feissent bonne chere et qu'ils apprestoient leur desjeuner. (C.N.N., c.1456-1467, 355). Le diner est tout appresté. (Pass. Auv., 1477, 185). ...toutesfois luy firent aprester à disner (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 171).

 

b)

[Pour accomplir qqc. (une cérémonie, une expédition, une affaire...)] : Nus d'eux n'avoit ne soif ne fain, Quant il durent aler couchier. Lendemain firent aprester Unne messe c'on leur canta. (Dame Lycorne G., c.1349-1350, 246). Raoulet [le bourreau], je te truis bien a point. Vas, si apreste ton affaire, Car tantost fault justice faire (Mir. enf. ress., 1353, 52). Yris tantost a son oirre aprestee ; Ses eles prent ; en l'air s'en est volee (MACH., F. am., c.1361, 164). Remondin appresta son erre et prist congié de Melusigne, et se party a moult noble compaignie de chevaliers et d'escuiers, le nombre de bien deux cens gentilz hommes. (ARRAS, c.1392-1393, 51). ...Melusigne fu moult curieuse de apprester l'affaire de ses enfans. (ARRAS, c.1392-1393, 83). Alixandres a appresté Son erre, a grant host, pour conquerre Entierement toute la terre. (CHR. PIZ., M.F., IV, 1400-1403, 36). Mes amies et voisines, il est jeudy qui est jour de recreation et le plus cras de la sepmaine. IL m'est avis qu'il seroit bon que feissons un petit banquet pour recreer noz esperis (...) Or sus donques, chascune se mette en ses devoirs, dist l'une, et je feray tout aprester. (Ev. Quen., I, c.1466-1474, 105). Tresorier, est tout appresté Ce qu'il fault pour dire la messe ? (LA VIGNE, S.M., 1496, 543).

 

3.

[La chose, concr. ou abstr., est tenue prête pour qqn, lui est donnée, réservée] Apprester qqc. à qqn

 

a)

[Une chose concr.] "Fournir qqc. à qqn" : Si en furent occis jusques a vint mille hommes et li Rommain victeur s'en coururent a la proie, laquelle li ennemi leur avoient aprestee tout de leur volenté. (BERS., I, 9, c.1354-1359, 31.16, 57). ...mes ce luy commenderent il dire au consul car, se il osoit mener son ost celle part, il apresteroient a l'ost romain vivrez de .XXX. jours (BERS., I, 9, c.1354-1359, 36.8, 66).

 

b)

[De l'argent]

 

-

"Prêter à qqn" : ...le dit C. ad aprestés al oeps del avantdit nostre seignur le Roy as ditz T[homas] de L[enne] et J. S., cessante et quinsze nobles, et nostre treschier et bien amé E. N. leur ad apprestéz semblablement cynqua[n]te francs, pur ent avoir repaiement de vyngt et cynk nobles (Lettres agn. L., p.1412, 227).

 

-

"Donner à qqn" : ...l'Evesque de V. ad apprestéz V. [C] li. par seuretee de deux tailles, l'un de CC. li. a H., et l'autre de CCC li. a C., et de l'apprest d'autres personnes n'est pas resceuz puis vostre departir outre la somme de C. li (Lettres agn. L., c.1399, 461).

 

c)

[Une chose abstr.] "Réserver qqc. à qqn" : Et tel estoit Cellui ou mon cuer s'arrestoit, Qui tant de joie m'apprestoit (CHART., L. Dames, 1416, 224). Mes jours si sont tournez en nuys, Mes plaisirs muez en ennuys Et j'ay iver en lieu d'esté, Si ne sçay plus la ou j'en suis, Si non que je chace et poursuiz Le maleur qui m'est apresté. (HAUTEV., Conf. Test. am. tresp. B., c.1441-1447, 23). ...Amour, qui ses serviteurs loyaulx aide et secoure quand bien luy plaist, leur appresta ung jour tresdesiré (C.N.N., c.1456-1467, 434). Elle luy appreste du ris, Qui en brief tornera en pleurs. (Pass. Auv., 1477, 183).

B. -

Apprester [un être animé]

 

1.

[Une armée] "La mettre en état" : ...il vint en l'ille de Rodes. Quant il y vint, il s'arresta, Lui et sa gent bien apresta, Et longuement se reposa (MACH., P. Alex., p.1369, 52). Cil d'Alixandre bien savoient Que li roys seur la mer estoit, Et que son armée aprestoit, Si qu'il estoient sus leur garde. (MACH., P. Alex., p.1369, 204).

 

2.

[Le coeur] "Le disposer (à faire qqc.)" : Et a l'amer tout apprestay Le cuer que de fendre prest ay, Que je lui donnay et prestay (CHART., L. Dames, 1416, 222).

 

3.

[Un animal] "Le rendre prêt à être utilisé" : Vraiment, je l'acheveray Ou de tous pions y demourray, Se vo blanc cheval me prestez. Or faites qu'il soit aprestez. (MACH., D. Aler., a.1349, 316).

II. -

Empl. pronom.

A. -

S'apprester (à/pour qqc.)

 

1.

"Se préparer (en partic. militairement)" : Et le cappitaine le manda tantost au roy Uriien, qui en ot grant joye, et s'appreste comme pour la bataille. (ARRAS, c.1392-1393, 132). Et chascun mist peine de soy aprester tellement que au jour fut prest chascun. Et, ce jour, en la presence du Jouvencel, les parties vindrent pour faire le serment sur le corps de Nostre-Seigneur. (BUEIL, II, 1461-1466, 107). Il est temps les persecuter [les Anglais], Que il ont leans trop esté ; Si vous vueillez tous aprester Et armer pour la seureté. (Myst. siège Orléans Ha., c.1480-1500, 496). Et fut ung peu long à s'apprester, ne croyant point tout ce qu'on disoit (COMM., I, 1489-1491, 176). Et ainsi ceste armée s'appresta de la part d'Allemaigne, qui fut merveilleusement grande, et tant qu'il est presque increable. (COMM., II, 1489-1491, 12).

 

-

"Se préparer moralement (à qqc.)" : Theodore, de ceste vie Mondaine ennuit trespasseras Et en gloire sanz fin venras. Apreste toy. (Mir. Theod., 1357, 118). Apreste toy maintenant a cete benoite journee, a ceste faiste sacree, a ce jubilé, pour le dignement recevoir a l'exemple des apostres qui hodie repleti sunt, qui au jour d'ui furent remplis par la venue de ce glorieux hoste. (GERS., Pent., p.1389, 72).

 

-

"Se préparer pour paraître en public, s'habiller, se parer" : Ma dame, apprestez vous bonne erre S'a temps voulez au sermon estre (Mir. mère pape, c.1355, 350). ...l'empereur (...) vous conmande Que vous aprestez et parez, Qu'en l'eure espousée serez D'un vaillant homme. (Mir. fille roy, c.1379, 84). Sans plus parler, sailli hors de mon lit, Quant promis m'eut ce que devant est dit ; Et m'aprestay le plus joliement Que peu faire, par son commandement. (CH. D'ORLÉANS, Ret. am. C., 1414, 4). Si vous prie et requier que vistement vous veillez apprester et habiller (C.N.N., c.1456-1467, 122).

 

2.

Empl. pronom. à sens passif. [D'un repas] "Être préparé" : ...tantdiz que le soupper s'apprestoit, la dame et le bon chevalier se deviserent (C.N.N., c.1456-1467, 478).

 

3.

[D'une réf. spatiale, d'une échéance] "Être proche" : Seigneurs, tant avez voyagié Que vostre terme fort s'apreste, Car je voy l'estoille qui reste Et ne s'est qu'en ung lieu monstree Puis que nous avons fait entree Dedens Bethlëem la cité. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 91).

B. -

S'apprester à/de/pour + inf. "Se préparer à, se mettre en état de" : Sire, chascun de nous s'apreste A faire quanque conmandez. (Mir. emp. Julien, 1351, 180). Cupido entent sa requeste, Si li ottroie et tost s'apreste Pour traire au dieu une saiette (MACH., C. ami, 1357, 85). ...on ne saroit souhaidier Comment de moi aidier s'apreste Et comment la belle est tost preste (MACH., Voir, 1364, 4910). ...gardez que vostre semonce Soit a toutes voz gens si faicte Que chascun s'apreste et s'affaicte De tost venir. (Mir. st Lor., 1380, 127). ...la roÿne (...) s'appreste D'aler vers la mer (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 17). ...lors s'apreste L'ost des Romains de assaillir Jherusalem (CHR. PIZ., M.F., IV, 1400-1403, 23). Je me vois donc aprester A faire faire les trois croix Ou ces gens seront a destrois, Si que n'i fauldra a nul rien. (Myst. Pass. Amb. R., c.1474-1500, 57). Il estoit jà sur le tard ; toutesfois on se apprestoit de les assaillir. (COMM., I, 1489-1491, 97). De sortir hors maintenant qu'on s'appreste ! (LA VIGNE, S.M., 1496, 222).

III. -

Part. passé en empl. adj.

A. -

[D'une chose] [Corresp. à supra I A 1 a] "Préparé" : Vostre commandement feray, Si que demain tout prest seray, Car nos naves et nos galées Sont garnies et aprestées (MACH., P. Alex., p.1369, 115). ...veu (...) le drap entier duquel icellui prisonnier fu trouvé saisi, contenant XIIIJ aulnes ou environ (...) qui est chose souspeçonneuse, consideré qu'il estoit et est tout mouillié et non apresté (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 174). ...je vous conseille de par le saige Zephir que vous recepvez l'ordre de chevalerie, et de celle heure en avant vous sarez mareschal du dieu Mars en sang espandre. Et adfin que n'aiez deffaulte de ce que a ce faire appartient, je le vous envoie en ce coffre tout appresté. (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 271). ...car ilz s'estoient serrez en bataille et par ordre et leur artillerie aprestée de laquelle ilz greverent fort les gens du roy et en tuerent plusieurs gens de bien (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 66).

 

-

[Avec une nuance de menace] Estre appresté à qqn. "Être réservé à qqn, attendre qqn" : Certes ilz estoient garnis de petit de confort et de mauvaise nuit qui leur estoit apprestee, car il n'arresta gueres quant un orage mauvais commença a lever, de vent, de pluie et de tonnoirre, tellement qu'ils se trouverent en l'eaue jusques au cul, dont ilz eurent grant doute de mourir. (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 243). La mort vous suyt, ayez a Dieu recours ; Puis qu'aux damnez enfer est appresté, Pourvoyez y, car vos jours seront cours ! (J. MESCHINOT, Trois ballades, 1493. In : Romania 49, 1922, 430).

B. -

[D'une pers.]

 

1.

"Habillé, préparé, équipé pour sortir" : Belle fille (...) N'es tu pas aprestée ? qu'est ce ? Temps est que nous aillons a messe. (Mir. st J. Cris., c.1344, 271). Et quant il fu bien consilliez, Bien aprestés, bien abilliez, Il fist nagier tout droit au port, Et là se combati si fort, Que maugré tous est descendus. (MACH., P. Alex., p.1369, 213).

 

-

"Équipé de qqc." : ...avant soleil levant, aprestés de tous habillemens nécessaires pour faire exploit, vinrent jusques au plus près dudit lieu ranger et ordonner notablement et en manière de gens de bien (CHASTELL., Chron. K., t.1, c.1456-1471, 127).

 

2.

(Estre) appresté à qqc. "(Être) préparé à qqc." : Pour ce, je me tiens apresté A deduiz, en champs et en bois, S'Amours y prent nulz de ses droiz, Quelque bien m'y sera presté (CH. D'ORLÉANS, Rond. C., 1443-1460, 511). L'omme fervent et diligent est apresté a toutes choses. C'est plus grant labeur de resister aux vices et aux passions que de suer aux labeurs corporelz. (Internele consol. P., 1447, 358).

 

-

Estre appresté à/de/pour + inf. "Être préparé, prêt, disposé à" : Alons, je suis touz aprestez De son gré faire. (Mir. enf. ress., 1353, 15). Devant son lit sont arresté De mal faire tuit apresté. (MACH., P. Alex., p.1369, 268). Qui a mestier d'avoir un bon servant ? Juenes homs suis, aprestés de servir. - De quoy sers tu ? - Je suis bien chevauchant, Je sçay trancher, moy en cuisine offrir, Male trousser et au besoing pestrir (DESCH., Oeuvres Q., t.5, c.1370-1407, 23). Et icy, oultre la louange et deffense saint Pol, nous avons enseignement de nous contregarder de cheoir en perilz ou tribulacions sans neccessités ou proffit, a nous ou a autrui, tant soyons apprestez de morir et que ne nous chaille de ce monde. (GERS., P. Paul, a.1394, 500). [Les Anglais, mis en difficulté par les Ecossais, décidèrent qu'ils] se departiroient, le bon matin, tout apresté pour tantos combatre, se il besongnoit (FROISS., Chron. D., p.1400, 774). A recommancer de plus belle, J'en voy ja les adjournemens Que font, vers vieulx et jeunes gens, Amours et la saison nouvelle. Chascun d'eulx, aussi bien lui qu'elle, Sont tous aprestés sur les rens A recommancer [de plus belle]. (CH. D'ORLÉANS, Rond. C., 1443-1460, 336). Soions aprestés de fort morir en la bataille, et ne inferons crieme a nostre glore ne ne fuyons point la croix. (Internele consol. P., 1447, 251). Quant a moy, je suis apresté, Mon chier pere, en temps et en lieu, De rendre sacrefice a Dieu Au mieulx que je le pourray faire. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 22).

REM. Apprester présente beaucoup de similitudes avec appareiller.
 

DMF 2020 - Article revu en 2015 Pierre Cromer

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