C.N.R.S.
 
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     ÂME     
FEW XXIV anima
AME, subst. fém.
[T-L : ame ; GD : ame ; GDC : ame ; AND : alme ; DÉCT : ame ; FEW XXIV, 581-583, 584b-585a : anima ; TLF : II, 715b : âme]

A. -

"Principe premier de vie et de mouvement"

 

1.

Au propre "Principe de vie qui anime l'homme et les êtres organisés, animaux et plantes (lié au corps, il disparaît avec lui)" : ...car je te voy Sanz ame en ce lit jesir mort. (Mir. st Alexis, 1382, 366). ...le corps humain n'est pas moins a louer s'il exerce les operacions de vie quant il est conjoint a la vie, c'est a dire a son ame, car aultrement ne les porroit accomplir (GERS., Dial. spirit. G., c.1407, 166). Et puis que Dieu et Nature vous ont creez plus parfaiz des autres choses qui ont ames, ne soiez pas plus desordonnez que les mendres besteletes, ne plus negligens ou mains enclinez a vostre commune salvation, utilité et defense, que sont les mouchetes a miel, que chascune en leur essaim gardent leurs offices et leurs ordres et mectent leur vie pour deffendre et entretenir leur assemblee (CHART., Q. inv., 1422, 64). Il doit estre entier et rassis A tousjours mais sans departie. Si tost qu'amours est mypartie, Tout le hault plaisir en est hors ; Si ne sera par moy partie, Tant que l'ame me bate ou corps. (CHART., B. Dame, 1424, 353). Tant de mal me fault sentir Et suis en tel pestilence Que l'ame s'en veult partir Se brief je n'ay delivrance. (RÉGN., F.A., 1432-c.1465, 20). ...les bestes apres leur mort n'ont point de peine car cest leur condicion de tourner en terre corps et ame (CIB., p.1451, 200). [L'ame] donne vie au corps, et par ce elle est ditte ame, et est la plus basse condition [des deux conditions de l'âme], car ainsi les ames des bestes vivifient leur corps (...) ; elle a operacion spirituelle et intellectuelle, et pour ce est elle appelle esperit (CIB., Ame raisonnable, c.1452-1458, f° 227 v°). Pareillement un chascun cristien doit respondre au dyable, qui est le tres ancien serpent et le plus cauteleux de toutes autres creatures ayans ame qui soient soubz le ciel (COLART MANS., Dial. créat. R., 1482, 156).

 

-

[Envisagé dans ses facultés]

 

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Ame sensible / sensitive. "Principe qui fait croître, mouvoir et sentir les animaux" : La seconde partie de l'ame, c'est l'ame sensitive, qui fait vivre les bestes et sentir ; pour ce est elle plus parfaite et plus noble que la premiere n'est, car avec la vertu vegetative elle comprent la vertu sentitive qui congnoissance et sentement leur donne. (EVR. CONTY, Eschez amour. mor. G.-T.R., c.1400, 229). L'ame de beste est sensitive ; L'ame d'omme est intellective. L'ame de beste, sans ressort, Est morte, quant le corps est mort. Mais l'ame d'omme dessevree Du corps ne sera ja finee. (Cycle myst. prem. mart. R., c.1430-1440, 105). L'ame vegetable qui est ez arbres et ez plantes et l'ame sensible donnant sentement, qui est ez bestes, ne doit pas estre apellee ame en l'homme aprez la venue de l'ame raisonnable (Somme abr. M., II, c.1477-1481, 110). Ne aussi composition de gendre, comme en cest gendre animal aiant ame sont contenues diverses especes, c'est a scavoir homme, cheval, beuf, asne et toutes bestes, qui ont ame sensitive par les sens corporelz, voyant, oyant, flairant, goustant, tastant. (Somme abr., c.1477-1481, 147).

 

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Ame vegetable / vegetative. "Principe qui fait vivre les plantes" : La siziesme partie parle de l'ame, de sa nature et de ses proprietés et de ses diversités. Pourquoy nous devons savoir qu'il est troiz manieres ou poissances d'ame, dont la premiere et la mains parfaite est l'ame vegetative, qui fait vivre les plantes ; et ceste ame leur donne troiz poissances, c'est assavoir poissance de norrir, poissance de augmenter et de croistre, et poissance de engendrer leur semblable. (EVR. CONTY, Eschez amour. mor. G.-T.R., c.1400, 229). L'ame vegetable qui est ez arbres et ez plantes et l'ame sensible donnant sentement, qui est ez bestes, ne doit pas estre apellee ame en l'homme aprez la venue de l'ame raisonnable (Somme abr. M., II, c.1477-1481, 110).

 

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Loc.

 

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Expirer / rendre l'ame. "Mourir" : "Hé ! douce mere, je m'en vois. A Dieu vous commant, douce dame !" Et droit a ce point rendi l'ame. (MACH., J. R. Nav., 1349, 206). Je te di de ta femme : Pour verité rendue a l'amme (Mir. Theod., 1357, 123). Comment aussi fut circoncis Et, puis, les innocens occis Par Herode, le fel tyrant, Qui ainsi les fut martirant Soubz umbre du sauveur haultain Qu'il cuidoit trouver pour certain Lors et luy faire expirer l'ame (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 136). ...la pucelle (...) se trencha la gorge et rendit l'ame. (C.N.N., c.1456-1467, 553). ...et le trouvoit-l'on couché sur une pouvre paillasse, dont jamais ne partit jusques il eust rendu l'ame (COMM., III, 1495-1498, 307).

 

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Jusqu'à l'ame rendre / jusqu'à / au rendre l'ame. "Jusqu'à la mort" : Le comte, fort prudent et attempré, respondy moult sagement qu'il lui monsteroit qu'il seroit yssu de bonne maison et, combien qu'il ne veoit apparence n'esperance de vaincre les ennemis, se la victoire ne venoit de main celeste, il lui tenroit fidelité, se besoing estoit, jusques à l'ame rendre. (MOLINET, Chron. D.J., t.1, 1474-1506, 164). Ceulx que j'acolle et tiens en mon escolle Si bien recole et en amour enflamme, Qu'ilz ne m'oublient jusques au rendre l'ame. (Cene dieux, c.1492, 108). Laquelle [fin du Seigneur de Vendosme] fut la plus belle, la plus constante et la plus saige, voire jusques a rendre l'ame qu'on vit jamais ne qu'il est possible de voir pour mort de prince. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 312).

 

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Remettre une ame au corps. "Rendre vie au corps" : S. NICOLAS. Pour faire a mon serviteur [le juif] joye, Ceste ame [du chrétien mort] remettray au corps. (Mir. st Nic. juif, c.1480-1500, 147).

 

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Rendre l'ame à un mort. "Ramener qqn à la vie" : Or ça, ça, il n'a en Surie Tel ongnement qu'ay apporté. Il est fin, je l'ay esprouvé, Il n'a meilleur jusqu'a Damas ; Droit en la cyté de Bandas [l. Baudas] L'aloy querir, ou croist le balsme, Il renderoit a ung mort l'ame, N'a plus fin jusqu'en Orient. (MARCADÉ, Myst. Pass. Arras R., a.1440, 118).

 

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Reprendre son ame. "Revenir à la vie" : La Mors ne vous puet plus tenir, Corps qui par li estes passé, Levez suz, trop estes lassé De sa jus en terre gesir. Or suz, sans panre autre respit, Trestuit voz amez reprenez, Et avec moy vous en venez Au jugement le Tout Puissant. (Jour Jug. R., c.1380-1400, 247).

 

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Sans ame. "Sans vie" : ...et les romaines legions, aussi comme se il fussent sans ame, toute esperance mes non pas toute cure deguerpirent et lessierent (BERS., I, 1, c.1354-1359, 25.6, 42). ...et quant ilz virent la charoingne du dit Abel senz ame, le corps gisant sur terre et baingnié de chault sang, ou quel aulcun sentement n'estoit (PREMIERFAIT, Cas nobles hommes G., 1409, 99).

 

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[Formule de jurement pour renforcer une affirm.] Par l'ame de mon cheval. "Sur la vie de mon cheval" : ...et pour ce dit Galien que, par l'ame de son cheval, il n'en dira autre chose que il en a dit ou comment de cel amphorisme Vesicam incisam, et aussi n'en diray je plus. (SAINT-GILLE, Comment. A.Y. L., 1362-1365, 174).

 

2.

Au fig. "Principe qui anime une chose abstraite, qui lui donne vie" : ...Phoroneus ou temps dez Grecs, et depuis Justinien et lez aultres empereurs romains ourent establi lez loys, ilz reserverent aux princes le povoir de les interpreter et soustenir. Aultrement ellez eussent esté faittes en vain. Car la loy escripte est de soy morte et sans vigour ; mais le prince est la loy vive, l'ame et l'esprit des loys, qui leur donne povoir et vertu, et par son sens et adrecement lez vivifie. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 74). ...et est le roy l'ame de la chose publicque, la quelle ne se peult abdicquer du corps et luy baillier aultre (JUV. URS., T. crest., c.1446, 52). ...nous veons le plus communement advenir que le prince qui est le chief, mais l'ame, du corps politique, de la chose publique, est sans lettres et sans science. (FILLASTRE, Traité Conseil H., c.1472-1473, 155).

B. -

"Principe spirituel constitutif de l'être humain"

 

1.

"Partie spirituelle de l'homme considérée comme unie au corps" : Mais nature le corps ordonne Et appreste pour recevoir L'ame (CHR. PIZ., M.F., I, 1400-1403, 30). Le plus du temps, je semble ung corps sans ame, Hors de povoir d'accorder ou desdire (Au grey d'amours F.-H., c.1400-1500, 173). FOY. O tu, Entendement, fait au patron de la Trinité par ces troys puissances, Congnoissance, Volenté et Memoire, unies en la substance d'une seulle ame, qui par les creatures faictes en ce visible monde congnoys par reflection, comme en ung mirouer obscur en lumiere de foy, lez invisibles oeuvres de Dieu, que aprés la glorification verras face a face, as tu memoire du sacrement que tu me feis en la reception du saint baptesme, ou tu renonças aux pompes et deceptions de l'ennemy de char humaine (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 30). L'ame est creature spirituelle, de nature intellectuelle, de vie perpetuelle, qui ne peult viellir ou mourir, ains vit d'elle et donne au corps vie naturelle et sensuelle. Elle n'est longue ne large, haulte ne basse et n'a quelque forme ou figure corporelle, mais est simple et indivisible, toute partout le corps et en chascune partie d'iceluy (Disc. amour divine, 1470, 189). ...maintenant disons de lui [l'homme], comme composé de l'ame et du corps (Somme abr. M., II, c.1477-1481, 138). Encores en Dieu n'est aucune composition de substance corporele et incorporele, comme en l'homme, qui est composé du corps et de l'ame (Somme abr. M., II, c.1477-1481, 148). Et est le cueur, de toutes les vertus du corps, instrument et parfait lieu de l'ame. (PANIS, Guidon, 1478, tr.I, doct.2, chap.5).

 

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[D'où procèdent l'esprit, l'intelligence] Ame intellective / ame de intelligence / ame raisonnable / ame rationnelle. "Principe de la pensée et des mouvements volontaires de l'homme" : Un homme n'est pas precisement ame intellective. Mais il est ame et corps. Et aucunement il est plus son ame intellective que autre partie, pour ce que c'est la partie plus principal. (ORESME, E.A.C., c.1370, 464). Tu (...) qui as ame intellective Perpetuel, saige et soubtive (DESCH., M.M., c.1385-1403, 9). Et la tierce ame, c'est l'ame raisonable ou l'ame intellective qui est deue as homes, et ceste ame est incomparablement la plus noble de toutes, car elle en soy comprent la vertu des deux autres et avec ce l'entendement humain dont la noblesce ne peut estre nombree, car par ceste vertu est ly hons resemblable aux angres et mesmez a Dieu, sy come il a esté par devant dit. (EVR. CONTY, Eschez amour. mor. G.-T.R., c.1400, 229). L'ame de beste est sensitive ; L'ame d'omme est intellective. L'ame de beste, sans ressort, Est morte, quant le corps est mort. Mais l'ame d'omme dessevree Du corps ne sera ja finee. (Cycle myst. prem. mart. R., c.1430-1440, 105). ...tout ainsy comme l'ame raisonnable avec le corps est dit ung homme, ainsy Dieu et homme ensanble est dit Jesu Crist. (CRAP., Cur Deus, De arrha B.H., c.1450-1460, 214). Quant l'ame de interligence Mit en ton corps pour toy conduire, Bien te fit noble creature (Myst. st Adr. P., c.1450-1485, 128). L'ame raisonable veult estre tres bien, et pour tant jamais ne repose jusques a ce qu'elle est conjoincte avec ce qui est tres bon. Et pour ce par force d'amour elle se moeut, tendant en Dieu comme au centre (...) et en icellui centre tres bon, qui est Dieu, souverainement se delitte et complest (Somme abr. M., II, c.1477-1481, 109). Toutesfoys sera icy commancé a la teste, especiallement au cervel et a l'oulle contenant icelluy pource que il est le lieu et l'abitation de l'ame racionelle (PANIS, Guidon, 1478, tr.I, doct.2, chap.1).

 

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[D'où procède la conscience morale] : ...mon maistre, vous mande que vous vous teniez bien en vostre bonne verité, et que, pour chose qu'il soit du monde, vous ne chargiez homme se il n'y a coulpe ; car petite chose est de la vie de ce monde. Sy devez bien regarder que vous ne chargez vostre ame pour chose qu'il soit, ne pour homme qui à vous parle, et gardez l'ame sur toutes choses. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 538). Et fut baillé audit Hardi, pour la conduicte de son ame et conscience, ung notable docteur en theologie, nommé maistre Jehan Hue. (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 309). ...pour le present (...) viendray à parler des corrupcions qui chargent l'ame et l'honneur de l'homme et sont pires que larrecin. [Suit l'évocation du comportement intéressé de l'homme de cour] (BUEIL, I, 1461-1466, 49).

 

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Selon son ame et conscience : Et ont juré les davant diz esleus sur sains evangiles que (...) il treteront, ordeneront et determineront les dites chouses selon leur ame et conscience (Doc. 1332. In : P. Rézeau, Cah. Lexicol. 56-57, 1990, 132).

 

-

[D'où procèdent les sentiments] : ...les accidens de l'ame, si comme joye, liece, doulour, tristece (SAINT-GILLE, Comment. A.Y. L., 1362-1365, 222). De rechief, mutacion de couleur se fait es choses sensibles, et en cuir et en yeux et en poueil, et en ungles et en moult d'autres manieres ; car la couleur du cuir se fait aucune fois par dedens : elle se fait aucune fois des humeurs, aucune fois elle se fait de passions de l'ame (CORBECHON, Couleurs S., 1372, 373). Et la bonne ame est noureture De joie et de perfection Et a tous jours affection, Ensi que dient li acteur (FROISS., Joli buiss. F., 1373, 229). E ! mon tresdoulx enfant, pour quoy Avez m'ame ainsi courroucié, Ne pour quoy mon cuer adressié Avez en si grant dueil et mis ? (Mir. st Alexis, 1382, 366). ...tous mouvemens de courage comprent en ly deux choses, c'est assavoir une mutacion qui en l'ame se fait premierement par l'apprehension d'aucun bien que elle avise ou d'aucun mal aussi, et oultre aussi une alteracion qui s'en enssuit ou corps, qui est samblable et proporcionnee a l'apprehencion de l'ame dessusdite. Et pour ce, selon ce que celle apprehension de l'ame est de diverses manieres, selon ce s'en enssuient diverses passions aussi et diverses mutacions et en l'ame et ou corps. (EVR. CONTY, Eschez amour. mor. G.-T.R., c.1400, 739). ...n'est point de mal de resjouyr la vertu qui gist en l'ame et en l'entendement pour recreer et reconforter aucunement la sensualité du corps, mais que il ne face point de pechié ne chose vicieuse ; ne il ne desplait point a Dieu, car n'est il pas escript mesmement que un saint preudomme hermite, quant il avoit esté une piece en oroison, il prenoit sa recreacion et son esbatement en petis oysellés que il nourrissoit ? (Bouciquaut L., 1405-1409, 435).

 

-

Loc.

 

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(Son) ame et corps / corps et ame. "Toutes les ressources de l'être" : A Dieu, seigneurs, qui corps et ame Vous gart de mal ! (Mir. chan., c.1361, 156). ...il puisera de corps et d'ame Joye devers Nostre Seigneur. (DESCH., M.M., c.1385-1403, 11). Et, toutesfoiz que pestillence Prent sa racine, ou sa naissance, De Divin vouloir seulement, Doit un chascun certainement Son ame et corps du tout commettre Dévotement au Roy Célestre Sans delessier remède querre Par les choses qui sont en terre (LA HAYE, P. peste, 1426, 62). Lettre de son sang proprement [Theophilus] Fist au dyable par grant diffame En luy donnant generalment Quant qu'il avoit, et corps et ame. (RÉGN., F.A., 1432-c.1465, 116).

 

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De coeur et d'ame / (de coeur), de corps et d'ame. "Du plus profond de l'être" : ...ma trés douce chiere dame Que j'aim de cuer, de corps et d'ame. (MACH., D. Lyon, 1342, 170). Susenne avoit a non la dame, Qui Dieu doubta de cuer et d'ame. (MACH., C. ami, 1357, 4). Grizeldis, nostre bonne dame, Qui si bonne est de corps et d'ame (Gris., 1395, 69). Il servoit Dieu de cueur, de corps et d'ame (LA VIGNE, V.N., p.1495, 314).

 

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En ame et en corps / en corps et en ame. "Dans tout son être" : Car s'il se fust converti, les deables l'eüssent perdu, mes car il le devoient avoir, il l'eürent tout entier en cor et en arme. (Veng. Nostre-Seign. F., t.1, c.1300-1400, 211). Elle [dame Charité] art et brulle en divin amour, ne quiert riens qui soit dehors, elle aime chascun comme soy mesmes, soeuffre tout par humilité, de riens n'a murmure, de riens envie ne dueil, de riens n'a angoisse ne clameur, for[s] de ce qui contourne a la gloire et a la sempiterne laudation divine, la ou elle pend en ame et en corpz. (CHASTELL., Temple Boc. B., 1463-1464, 183). Je prye Dieu que puissez trouver De dela en corps et en ame Tous [deux] ensamble, par mon ame, Le sergent et le savetier. (Sav. serg. D.L., c.1480-1490, 37).

 

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Le coeur et l'ame / le corps et l'ame. "L'être en entier" : Qu'a sapïence de nature A grand honeur se puet deduire, Le corps et l'ame vit en joie. (DUPIN, Mélanc. L., c.1324-1340, 81). Si vous dirai la maladie Qui me perse le cuer et l'ame : J'aimme par amours une dame (MACH., F. am., c.1361, 194).

 

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[Formule de jurement utilisée comme renforcement d'une affirm.] Par / sur mon ame : En nostre hostel n'a pire nonne, Par m'ame je le vous promet (Mir. abbeesse, 1340, 78). Sire, on li a fait grant ennuy, Sur m'ame, a tort. (Mir. abbeesse, 1340, 94). Sire, par m'ame, je feray Bon serement c'onques encore... (Mir. enf. ress., 1353, 29). A tresgrant joye yrons, par m'ame, Que nous l'eure moult desirons Que dame et marquise ayons (Gris., 1395, 33). Comment requerray je la chose Que je n'ay hardement d'escrire ? Au pouvre prisonner, ma dame, Donnez l'aumosne de lïece. J'ay du tout, en ceste destraisse Despendu mon plaisir, par m'ame. (CHART., R. Bal., c.1410-1425, 375). Tenez moy pour excusé Se ne vous voy, ma doulce dame, Car prisonnier suis, par mon ame, Fortune si m'a abusé. (RÉGN., F.A., 1432-c.1465, 37). Du peché d'envie me confesse, De ce que quant j'ay veu liesse Avoir a autre que ma Dame, Habit neuf, anneaulx ou richesse, J'en ay eue envie et tristesse Et m'en a despleu, sur mon ame. (HAUTEV., Conf. Test. am. tresp. B., c.1441-1447, 31). Mais ung estronc. Aussi tost que les gens l'orront Appeller macquereau, siffler, Par mon ame, ce sera f[er] ! Il n'en fault point parler du pris. (Obstin. femmes T., c.1480-1500, 49).

 

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Par mon ame et par mon corps : Il faut que vous i pourveés. - Par m'ame, et par mon corps, respondit li rois, voirement i sera pourveu. (FROISS., Chron. D., p.1400, 683). [Cf. aussi p.727 et 820]

 

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Prov. : [Var.] Et ainsi m'aït Dieu, j'ay plus chier ma desserete en ung gentil coeur qu'en ma bourse pour l'amour d'un vocable qui dist : mieulx vault povre ame que l'amassement d'un villain. (Percef. III, R., t.3, c.1450 [c.1340], 240). Nous tenons une fame a folle Qui son corps et son honneur vent Pour argent ; mais cecy m'afole, Car vous faictes pire souvent. Vos langues tornent comme vent Au plus donnant : c'est grant diffame. Il perd assez qui pert son ame. (MESCHIN., Lun. princes M.-G., c.1461-1465, 64).

 

2.

"Ce principe spirituel considéré comme incorruptible et immortel (p. oppos. au corps)" : ...c'est a dire la pardurable estableté de l'ame (Mir. femme roy Port., c.1342, 150). D'autre partie, il me semble, sauf meilleur jugement, que quant l'ame est separee du corps, la personne qui estoit devant ame et corps et qui estoit homme, elle n'est plus ame et corps ne homme. Mais elle est ame et non pas corps. Et aprés la resurreccion ceste personne qui fu homme et est ame resera homme (ORESME, E.A.C., c.1370, 465). ...dedans l'omme est une ame parfaicte, immortelle et digne quant elle est faicte a congnoistre la Divinité, pour la louer et honnourer. Pour ce elle est dicte faicte a l'imaige de Dieu et a sa semblance (GERS., Trin., 1402, 152). FOY. (...) Car tu ne sçais pour quoy fut faicte l'assemblee de ame pardurable a corps mortel, ainçoys veuls l'usage du corps chalengier par droit pour demeure seure et permanent ; autrement va : car le corps est ung herberge de ton pelerinage, et t'est baillié a excerciter ta vertu et ta constance esprover. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 33). C'est voirement grant semblance que ta voulenté a auecques l'eternité de dieu, car ta voulenté ou franc arbitre est incorruptible et immortelle et jamais ne fauldra, et pour quelconque misere ne peult estre destruit ne appetissé car l'ame est immortelle et incorruptible... (CIB., p.1451, 223). Talles de Milesie, cité très encienne, aultrement dicte Millete, fut l'un des plus notables de Phenice en Grece, lequel, pour la profondité de la science des estoilles, fut mandé et envoyé honnorablement querir par les Rommains, et fut très speculatif et devost, et fut le premier que j'aye veu escript, qui dist l'ame estre immortelle. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 39 r°). Du corps mon ame partira (LA VIGNE, S.M., 1496, 378).

 

3.

"Ce principe spirituel considéré dans son destin, une fois séparé du corps"

 

a)

[Chez les Romains] Ames des gens morts. "Les Mânes" : ...et aussi voloit il que au dit evesque apartenist enseignier, non pas seulement les cerimonies celestiaus, mes encorez celles qui appartenoient aus justes mortales, et a apayer les ames dez gens mors (BERS., I, 1, c.1354-1359, 20.7, 33).

 

b)

[Dans la relig. chrét.] "Ce principe spirituel qui, une fois séparé du corps, est destiné à être jugé par Dieu, selon les actes de la vie terrestre, pour être voué au bonheur éternel ou bien à la damnation" : Et puis se desespera et se pendi, et l'arme s'en ala en enfer. (Veng. Nostre-Seign. F., t.1, c.1300-1400, 49). Alons devers eulz tant bracier Que l'ame de chascun soit moie [dyable]. (Mir. enf. diable, c.1339, 6). Sainte Marie ou mon ceur c'est donnés, Convoiés m'arme es cieulx, ce s'est vo grés. Dieu, guerissez Tristan qu'i ne soit affinés. (Tristan Nant. S., c.1350, 438). Dame, deffendez moy d'annuy, Et me donnez grace de vivre, Si que m'ame s'en voit delivre De pechié, quant il avenra Que de mon corps departira, S'il vous est bel. (Mir. enf. ress., 1353, 3). ...le triste palais D'enfer ou mainte ame dolente Pleure, souspire et se demente. (MACH., C. ami, 1357, 81). ...l'en doit prandre tele fame Qui ne trouble du pere l'ame, C'est assavoir la bonneurté Du pais d'eternalité (DESCH., M.M., c.1385-1403, 225). Fut l'ame du corps departie Et couronnée au partement Ou ciel (DESCH., M.M., c.1385-1403, 325). Lors commenca Gieffroy fort a penser a ses pechiez. Et dist bien que, se Dieu n'a pitié de lui, l'ame de lui est en grant peril et en voye de dampnacion. Lors entra Gieffroy en une chambre, et commence a mener grant doulour et a plourer ses pechiez. (ARRAS, c.1392-1393, 274). ...l'office que doivent et devront faire perpetuelment lesdictz freres pour l'ame de ladicte Perrenelle (BAYE, I, 1400-1410, 10). ...ces troys enchanteresses maudites, car plus seroies digne de grant paine en les suivant, comme Dieu t'a plus donné de science pour les eschever. Leurs noms sont Indignation, Deffiance et Desesperance. Certes ellez furent nourriez es tenebres d'enfer, ennemies de la paix des consciences et adversaires du salut dez ames. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 23). ...et, selon sa grand repentance, il est à esperer que son ame est glorieuse en paradis. (COMM., III, 1495-1498, 86).

 

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Loc.

 

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Ame damnee / ame morte. "Âme damnée" : Nous sommes seigneur de touz hommes Et de toutes les ames mortes. (Jour Jug. R., c.1380-1400, 221). Et pluseurs ont veu visions des ames dampnees, qui ne s'en sont pas amendez. (GERS., Déf., 1400, 242).

 

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Damner son ame : : ...vous ne povez ignorer qu'en ce faisant vous ne damnez vostre ame. (C.N.N., c.1456-1467, 81).

 

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Donner son ame aux diables / à tous les diables : Les parolles dudit Robin, de prime face, furent jettées fort loingz, doubtant la piperie qui en advint, mais il jura, creancha, promit et donna son ame à tous les deables (MOLINET, Chron. D.J., t.1, 1474-1506, 357). Ilz ne font leur sanglante fievre, Les paillars pouacres infames, Ilz donroient aux dyables leurs ames Premier qu'ilz ne fussent larrons. (Rapp., c.1480, 62).

 

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Mettre son ame en danger : LE PREVOST. Faulx homme plain de convoitise, Ta mauvaistié icy se monstre. Or est ton ame en danger mise Par ceste fortuné rencontre. (Mir. st Nic. juif, c.1480-1500, 142).

 

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Perdre (son) ame : ...en peril, pour celle femme, De perdre corps, honneur et ame (DESCH., M.M., c.1385-1403, 184). Le Roy parla et demonstra les grans et bons services que ses gens d'armes lui avoient fais et que (...) se on ne les peust employer en bonnes euvres et charitables, qu'il ne vouldroit pas que aucunement ilz y allassent et qu'ilz perdissent ne corps ne ame. (BUEIL, II, 1461-1466, 158).

 

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Recommander son ame à Dieu : Lequel prisonnier (...) recommenda l'ame de soy à Dieu, à la benoite Vierge Marie et à toute la sainte Trinité de Paradis, en eulx requerant que ses meffaiz, torfaiz et peschez lui voulsissent pardonner (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 22).

 

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Rendre l'ame à Dieu : ...la croix entre ses braz bien serreement reposant, rendit l'ame a Dieu, sans plus mot dire. (C.N.N., c.1456-1467, 460). Et incontinent s'en ala getter dessus une couchete estant en la chambre, dessus laquelle il rendit l'ame à Dieu incontinent aprés. (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 49).

 

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(Au) salut de l'ame : Remondin ala ouïr messe a l'abbaye du Moustier, et la pria Dieu qu'il lui laissast son fait achever, au salut de l'ame et prouffit et honneur du corps, et demoura en sa devocion au Moutier jusques après heure de prime. (ARRAS, c.1392-1393, 33). ...il n'est que deux manieres de armes : les unes espirituelles, proffitables pour le salut de l'ame et du corps, "est asçavoir" la croix avecques les clouz et la lance ou Nostre Sr. souffrit mort et passion (JUV. URS., Aud. celi, 1435, 191).

 

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Le sauvement de l'ame : C'est que ligniee puisse avoir, Telle que vous et vo doulz hoir En puissez estre loez, dame, Et que le sauvement de m'ame Y puist estre, et non autrement. (Mir. enf. ress., 1353, 4). Et toute telle qu'elle [Mélusine] est, elle me plaist. Et sachiez que c'est ly sourgons de tous mes biens terriens, et aussi croy je que c'est la voye premiere du sauvement de l'ame de moy. (ARRAS, c.1392-1393, 44).

 

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[Dans des tours exclam. ou optatifs pour recommander le salut d'un défunt à Dieu] : Or en wueil commenchier et raison en wueil rendre De la noble bataille que on a dit dez trente ; Sy pri à celluy Dieu, qui sa char laissa vendre, Qu'il ait mercy des armes, quer le plus sunt en cendre. (Bat. Angl. Bret. B., a.1355, 36). ...le bon Roy de Behaingne, Dont Dieus ait l'ame en sa compaigne ! (MACH., F. am., c.1361, 148). Li roys Jehans, dont Dieus ait l'ame (MACH., P. Alex., p.1369, 24). Fils fu dou bon roy de Behaingne, Dont Dieus ait l'ame en sa compaingne (MACH., P. Alex., p.1369, 33). Tres chiers sires, je vous requier, en remuneracion de tous les services que je fiz oncques a monseigneur vostre pere, dont Dieux ait l'ame, qu'il vous plaise a moy donner un don, lyquelx ne vous coustera ne forteresse, ne chastel, ne chose nulle qui guerres vaille. (ARRAS, c.1392-1393, 32). Par foy, dist Alain, or est bien le pays de Bretaigne essarpez de la lignie Jossellin. Dieux en ait mercy des ames, combien que ilz ne nous amassent onques. (ARRAS, c.1392-1393, 74). Et celle lui respond : Sire, il ne me puet estre gueres bien, quant monseigneur mon pere est trespassé de ce siecle. Jhesucrist, par sa saincte grace, lui face pardon a l'ame. (ARRAS, c.1392-1393, 144). ...si tost que les moines sentirent le feu, ilz commencierent a faire piteux criz et tres amers et doulereux plains ; mais ce ne leur vault riens. Ilz reclament Jhesucrist et le prient devotement qu'il ait mercy des ames d'eulx, car des corps est doresenavant neant. (ARRAS, c.1392-1393, 251). Nostre Sauveur Dieu ait mercy de son ame. (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 22). Messire Pierre de Saint Vallerien, chanoine de Paris, expert en medicine et en astrologie, predist sur la revolucion de l'an mil IIIIcXXXV le grant yver et fut envoyé en Escosse avecques autres pour admener madame Margarite d'Escosse en France qui esposa Loys Daulphin de France, qui gueres ne vesquit. Dieu aye son ame ! (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 154 v°).

 

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[Dans des formules de serment solennel] (Jurer) par / sur (le peril de) son ame : Et je vous jure par mon ame Qu'avoir ne puet plus grant tourment. (DESCH., M.M., c.1385-1403, 35). Je le vous jure par ma foy Et sur le peril de mon ame (DESCH., M.M., c.1385-1403, 305). Atant estes vous venu un ancien escuier qui estoit au duc Oste : Monseigneur, par l'ame de moy, je vieng de devers les marches de Mellumge (ARRAS, c.1392-1393, 178). Mon chier frere, a ce ne fauldrez vous pas, car, par m'ame, je vouldroye qu'il m'eust cousté mil besans pour tous perilz eschever, et vous et vostre navire feussiez ensemble avec le monseigneur, car je scay bien que de vostre venue il aura grant joye, comme droiz est. (ARRAS, c.1392-1393, 216). Mon chier frere, par l'ame que j'ay a Dieu a rendre, il n'a personne ceans qui oncques le me conseillast (ARRAS, c.1392-1393, 251). Dieu preng a tesmoing sur mon ame Que tousjours me suis reputee Ta povre ancelle et demouree. (Gris., 1395, 81). ...car sur mon arme et par le serement que je vous ay fait je cuide bien dire et faire (JUV. URS., Verba, 1452, 187). Puis le conte l'embrassa et dit : "Jouvencel (...) Il fault faire ung coup aprez ho." - "Sur mon ame ! dit le Jouvencel, il est encores assez du jour, s'il vous plaist, pour faire beaucoup de choses." (BUEIL, I, 1461-1466, 193).

 

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Prendre sur Dieu et sur son ame que : Je prens sur Dieu et sur mon ame Que grandement vous avez tort Se vous pensés que je vous ame. (VAILLANT, Oeuvres D., c.1445-1470, 217).

 

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Jour des ames. "Jour des morts, jour consacré à des prières pour le repos de l'âme des défunts" : Lequel traictié fut fait le dimenche, jour des âmes, et le lundi ensuivant fut confermé (MONSTRELET, Chron. D.-A., t.2, c.1425-1440, 100). ...XL solz et six stiers de bled sur le moulin de Belleval pour donner aux povrez le jour des ames. (Trés. Reth. L., t.3, 1449, 267). Après icelles choses faictes, le duc s'en tira à Véselay, là où il séjourna jusques au jour des ames (LEFÈVRE ST-RÉMY, Chron. M., t.2, c.1462-1468, 283). Mais, environ le jour des ames ensieuvant, an mil .IIIIcLXXIX., une armée de Franchois de pluseurs guernisons rassamblées se mit sus, en nombre de .VI. à .VIIc. lanches, pour venir courre sur le Haynau (MOLINET, Chron. D.J., t.1, 1474-1506, 319).

 

4.

[Représentation de ce principe spirituel] : ...ung autre joyau ouvré de maçonnerie, où au dessoubz est le Trespassement Nostre Dame, et au dessus, en ung tabernacle, est Nostre Seigneur, en estant, tenant l'âme Nostre Dame, et tout au dessus, le Couronnement et plusieurs autres ymages à l'environ, lequel joyau est tout garny de grant foyson de perles, esmeraudes, saphirs et ballaiz (Invent. mobilier Ch. V, L., 1379-1391, 248). Nota que sainct Nicolas et Sathan et les anges tiennent l'ame l'ung contre l'autre. [Note qui suit le vers 1341] (Mir. st Nic. juif, c.1480-1500, 145).

C. -

P. méton.

 

1.

"Chrétien" : Si veez quel mal est de excommenier une ame, et comment pour riens je ne le feroye sans grande cause. Et dy aussy que la messe du bon vault en deux manieres, et celle du mauvais en une seulement, et puet nuyre en autre maniere pour son pechié. (GERS., Déf., 1400, 238). Certes les inclinacions des personnes sont moult diverses, et a vne ame qui veult prouffiter a vertu il est moult utile sauoir a quoy on est enclin par complexion, affin que on se convertisse a user de raison au contraire et que on ne se donne pas a ensuiuir la mauuaise inclinacion se elle est en la personne. (CIB., p.1451, 218).

 

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Au plur. Avoir cure d'ames. "Avoir la charge d'une collectivité ecclésiale" : ...quant il a cure d'ames A gouverner comme curez (DESCH., M.M., c.1385-1403, 302).

 

2.

P. ext. "Individu, être humain" : Ne cure n'ay par nul tour Des yeux Argus ne de joie gringnour, Car pour plaisance et sanz ayde d'ame Je voy assez, puis que je voy ma dame. (MACH., Bal., 1377, 561). Il servoit Dieu de cueur, de corps et d'ame Sans mauvais bruit ne hayne acquerir d'ame, Ains en tous lieux, et par terre et par l'er, Qui seullement oyoit de luy parler Aymé estoit et desiré de voir (LA VIGNE, V.N., p.1495, 314). Mons. le grant maistre, se vous savez ame qui voit à Guise, Bohain et Beaurevoir, si vous plaise leur faire savoir que noz gens d'armes sont venus. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 324).

 

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Déterminant + ame : J'ameroye miex a mourir, Que ce que je vous encusasse Ne qu'a nul ame j'en parlasse (Mir. femme roy Port., c.1342, 176). Vous doubtez vous d'estre en peril Contre nul ame ? (Mir. enf. ress., 1353, 55). Se Dieu plaist, assez tost venra Aucune ame qui nous fera Gaingner monnoie. (Mir. femme, 1368, 185). Dame royne, or tost bonne erre Envoiez me voz deux filz querre Par aucun ame. (Mir. ste Bauth., c.1376, 110). Or revient aucune ame estrange : Si fault aprester a mangier (DESCH., M.M., c.1385-1403, 62). Lors [Dieu] fist le deluge venir Et par tout grans eaulx courir ; Tout le monde cy fut noyé, Il ne demora fors Noé, Sem, Caym, Jaffet, ses drois enffens, Des ames quil couroient les champs. (Pass. Semur D.M., c.1420 [1488], 4).

 

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[En tournure nég. ; empl. comme pron. indéf.] "Personne" : Mais de ce fu trop eüreus Qu'ame n'i avoit, fors nous deus, Qui s'en peüst apercevoir, Ne qui riens en peüst savoir. (MACH., R. Fort., c.1341, 28). Mais je ne vi ame laiens (MACH., R. Fort., c.1341, 29). Si qu'onques mais ame ne vist Beste plus gente ne plus jointe, Plus esveillie ne plus cointe. (MACH., D. Lyon, 1342, 233). Puis que vous avoir la [fille] voulez, Ja pour ame ne la lairez : A vous en est. (Mir. femme roy Port., c.1342, 168). Ne le vueillez sur ame mettre. Car en verité j'en descoulpe Tout le monde. Moye est la coulpe, Ne nulz fors moy coulpe n'y a. (Mir. enf. ress., 1353, 36). Ne fu vaillans Lancelos pour sa dame, Tristans, Paris et Perchevaus, qui ame Ne congnoissoit de bien ? oÿl, par m'ame (MACH., Voir, 1364, 6105). Sevestre, il est bien matinet. Egar : encore ame n'y est Qu'entre nous deux. (Mir. femme, 1368, 185). Ainsi Raimondin s'excusa, Ame du fait ne l'accusa, Car jamais homme n'eüst creu Que le fait lui fust avenu (COUDRETTE, Mélus. R., c.1401-1402, 134). Au pouvre prisonner, ma dame, Donnez l'aumosne de lïece. C'est pour trop craindre et doubter blame Que si dure prison me blesse. Faites ycy voustre largesse, Car oncques mais [je] n'en requis ame (CHART., R. Bal., c.1410-1425, 375). Si le crocqua si simplement qu'il ne fut de ame apperceu. (C.N.N., c.1456-1467, 44). Mon frere, c'est tout ce que j'aime Que de mener vie joyeuse, Amoreuse, Sans faire domacge a arme. (Pass. Auv., 1477, 135). Le cas est tel : Marcus juiz se veult faire baptizer. Il ne treuve ame qui le baptise, ne eaue aussi. A scavoir s'il puet contraire mariage avec Geneviefve cristienne. Response : il ne puet, car baptesme est la porte de tous les sacremens, et sans icellui nullement ne puet. (Sacr. mar., c.1477-1481, 68). Il en fut fort esbahy, car il ne cuydoit point qu'il y eust plus ame de deffence, et tourna à costé pour gaingner le champ (COMM., I, 1489-1491, 30).

 

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Ame nee : Lever n'oseray mais le chief Contre ame nee. (Mir. enf. ress., 1353, 63). Sire, ou est le Roy et la Roigne maintenant ? Par Dieu, dame, Dieu le scache, je ne scay. Sire, ou tiendront ils leur nouel ? Vraiement, sire, alme nee ne scait encore. (Doc. 1399. In : E. Stengel, Z. frz. Spr. Lit. 1, 1879, 14).

 

3.

[Terme d'affection] : Adieu, mon ame ; Adieu, mon filz (Pass. Auv., 1477, 240).

D. -

P. anal. [À propos d'une chose concr., partie considérée comme essentielle d'une chose située à l'intérieur de cette chose]

 

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"Billet inclus dans une lettre" : ...j'ai receu voz lettres et veu bien à plain le contenu en icelles, aussi en la petite ame qui estoit dedens (Lettres Louis XI, V., t.4, 1470, 110). Nous vous envoyons cy dedens enclos le double d'une ame qui estoit en unes lettres que ledict seigneur Desqueurdes nous a escriptes (Lettres Ch. VIII, P., t.1, 1486, 119-120).

REM. GD I, 254c (doc. de 1430) enregistre le sens de "partie d'un moulin" ; sans doute à lire alve ou avle pour aube (GDC VIII, 68c : albe3 ; cf. Y. Coutant, Terminol. du moulin médiév. dans le comté de Flandre, 1994, 486).
 

DMF 2020 - Synthèse Edmonde Papin

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