A. -

"Acier" : Et pour ce, ne acier ne verre ne pierre precieuse ne autre corps materiel n'est du tout sanz aucune asperité, combien que elle soit aucune fois imperceptible ou insensible, excepté tant seulement l'element du feu quant a sa superfice convexe qui est perfetement polie et sperique. (ORESME, C.M., c.1377, 398). Tresours est qui caveroit en terre ou en autre lieu et il trouvast miniere de fer, d'acier ou autre metal. (Cout. bourg. glosé P.M., c.1380-1400, 87). Le gros bout de celle masse est d'acier, et le manche est de fort bois (LE BOUVIER, Descript. pays H., p.1451, 77). ...je le nommeray Maximilian Cuer d'acier, et treuve que l'acier est plus noble chose que l'or, l'argent, le plomb ne le fer, pour ce que de l'acier, comme du plus noble metal, l'on fait les armures et les harnois, dont les plus grans du monde se parent et asseurent leurs corps contre la guerre et autrement ; et de l'acier se font les espées, les dagues et autres glaives (LA MARCHE, Mém., III, c.1470, 313). L'AUTRUSSE. Je digere assier et fer Sans me douloir de la poictrine (Comp. kal. bergiers C., 1493, 84 r°).

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Subst. + d'acier

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[Le subst. désigne un objet, un outil, un instrument] : Une eschiele de soie a li lerres sachie, Qui a gravais d'achier estoit entrelachie. Et quant sor le maison l'ot li lerres lanchie En la maison entra. (BRIS., Restor paon D., a.1338, 75). Le dos on te descirera A ongles d'acier bien tranchans (Mir. st Ign., 1366, 97). ...deux myroers d'assier, l'un grant, qui est environné de cuivre et de brodeure par derrière, et l'autre assiz sur boys. (Invent. mobilier Ch. V, L., 1379-1391, 233). Mais Remondin lui gette l'estrier par grant air, et attaint le cheval ou front de si grant force que le chanfrain d'acier fu effondré (ARRAS, c.1392-1393, 63). ...ung grant mirouer d'acier, ouvré et doré (Ch. VI, D., t.2, 1418, 307). Sur toute rien moult m'abelly Que Tristifer coler joly De fin achier, bien brunoiant, Ala a ce point ottroiant - Ne sçay quele chose pensoit - A Maret qui le miex dansoit (Pastor. B., c.1422-1425, 46). A ung fevre vous en alés, Et affin que s'aquiter, De par moy le saluer, Et que ly mande diligemment Que forgoit tost apertement Troys cloux grand et de fin acier Pour a Jhesu piez et main percier. (Pass. Autun Biard F., 1470-1471, 101).

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[Le subst. désigne le conditionnement de l'acier] : Item quattre caques de cloux (...), trois milliers de fer, .LX. garbes d'achier, soixante rasieres de charbon de terre (CHR. PIZ., Fais armes cheval., 1410, 61 r°). Item plus passé Mertin Guichon le XXIIIe jour dud. moys XV quartes de sal, cinq quintaux de fer, (...) XV cariaux d'acier, trois folies de fer blant et le deschargé ou port de Belle-ville, paié IIII bl. (Journal Bellev. H.D., 1424-1425, 100).

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[Le subst. désigne une arme, un équipement milit.] : Chascuns tint le bon branc d'acier (MACH., P. Alex., p.1369, 168). Lors en son lit sus li coury Et IJ. cos ou IIJ. le fery, En son bras d'un coustiau d'acier (MACH., P. Alex., p.1369, 269). ...vostre pere despassa et lui donna du pommeau de l'espee qu'il lui avoit tollue si grant coup en la temple, a ce que la coiffe d'acier qu'il avoit affublee n'estoit pas forte, qu'il le rua tout mort sur la terre. (ARRAS, c.1392-1393, 50). Et n'alerent pas si desgarniz que chascun n'eust la cotte d'acier, et le pan, et la piece, et le harnoiz de jambes es bouges. (ARRAS, c.1392-1393, 51). ...les fers des lances vindrent joindre sur les pieces d'acier, de si grant force que il n'y ot si bon cheval qui ne chancellast et ploiast l'eschine, et la lance du soudent vola en pieces. (ARRAS, c.1392-1393, 231). Gieffroy (...) monta a cheval, et demanda l'escu, puis le pent au col, puis prent une mace d'acier et la pent a l'arcon (ARRAS, c.1392-1393, 245). ...il li perça (...) la plate d'achier (FROISS., Chron. D., p.1400, 393). Adont n'yert armeure nesune De fer, ne d'acier (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 178). Si n'y avoit il qui cachier Les peust a la pointe d'achier (CHART., L. Dames, 1416, 284). Le cop fut grant sy va descendre sur le heaulme et luy coppe le cappel d'achier (Percef. I, T., c.1450 [c.1340], 177). Ilz ne portent nulles armures de fer ne d'acier, pour la grant chaleur qu'il fait en leurs païs (LE BOUVIER, Descript. pays H., p.1451, 77). ...sy fery le Saine ung sy mervelleux et tant grant cop sur son healme que oncques le cercle d'or ne la coiffe d'achier ne le pot garantir de mort (Gérard de Nevers L., c.1451-1464, 60). ...il vey ung Sarazin soy efforcyer pour cuidier monter sur la barcouse ; il luy bailla ung cop d'espee sy grant sur le healme que oncques la coiffe d'achier ne le chercle du healme ne le pot garantir que jusques es dens ne fust pourfendu, et chey mors dedans la mer. (Hist. seign. Gavre S., c.1456, 66). ...le roy d'armes d'Arragon, qui vestue avoit sa tresriche cocte d'armes et a son col portoit une moult luisante et ligiere targe d'acier (LA SALE, J.S., 1456, 113).

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Prov. : Pis vault le coup de langue que d'espee d'assier ! (Renaut Mont. B.N. V., c.1350-1400, 219).

B. -

P. méton.

1.

"Objet en acier"

a)

"Outil, instrument en acier" : ...l'en acorde et donne l'en son divers aux aciers, aux fers, aux boys et aux metaulx, par diverses infusions interposées d'estain, de plomb, d'arain et de cuivre, si comme il puet apparoir es sons des cloches (DESCH., Art dictier R., 1392, 270). ...au moïen de la pluye, ledit sel se augmente et croist et devient si très dur que nul acier trempé à peine le peut rompre. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 85 r°).

b)

"Arme, armure en acier" : En la char l'on navré de leur achier tresfrois (Flor. Rome W., c.1330-1400, 166). Car il avoit ung haubert tel que il n'a en tout le monde, ne fer ne acier qui le peust empirer vaillant ung denier (Chev. papegau H., c.1400-1500, 46). ...le sixiesme [cheval estoit] bardé d'assïer. (LA MARCHE, Mém., I, c.1470, 319). Dame Palas, vostre escu de cristal Avoit porté ce grand chef que je di, Faisant reluire maint acier et metal En ost rengé, comme preux et hardi. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 395).

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Loc.

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(Au fer et) à l'acier. "Par les armes" : La conta Baptamur a Regnaut le guerrier Comment ilz ont conquise le cité a l'achier (Renaut Mont. B.N. V., c.1350-1400, 723). Et aussi je croy que vous ne faictes cecy que par truffe. Par mon chief, damp roy, dist le chevalier, qui fu moult courroucié, se vous ne faictes promptement ce que messeigneurs vous mandent, la truffe vous sera monstree au fer et a l'acier dedens trois jours. (ARRAS, c.1392-1393, 158). Ainsi sont accordés les frere droicturier Pour l'endemain matin faire leur gent rengier Pour assaillir Franchois au fer et a l'achier (Cip. Vignevaux W., p.1400, 96).

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Au brant et à l'acier : Il est bien verité par Dieu le droiturier, Que la dame est ma mere qui tant fit a priser, Et je la veul deffendre au branc et a l'acher. (Galien D.B., c.1400-1500, 110).

c)

"Équipement (?)" : Pour le plaisir ma dame faire Et son commandement parfaire De tout, je me vueil appointier D'escripre le livre et pourtraire Et le miracle au long retraire Qu'elle me commanda l'autr'ier, Quant la trouvay sur son destrier Ou champ d'or, en tres grant acier (LE PETIT, Champ d'or L., c.1388-1392, 148).

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En acier ou en fer : : Se tu es clerc, noble ou marchant Et vas mainte terre marchant Pour tousjours acquerir richesse, Dy moy quel prouffit ou riche esse Gaigner en acier ou en fer Sy son ame chiet en enfer ? (MESCHIN., Lun. princes M.-G., c.1461-1465, 46).

2.

"Partie en acier d'un outil, d'une arme" : Il entoise la hache dont ly achier fu sains, Et le payen luy vient qui pas ne fu loingtains (Flor. Octav. L., t.1, c.1356, 96). Huez se boute en yaulz san point de l'alentir, Sy qu'il en fist lez .III. à la tiere quéyr, Et le quartime fist son riche branc sentir Sy que dou sanc de lui en fist l'achier rougir. (Hugues Capet L., c.1358, 207). Mais les hocs de fust, Dont l'achier est au bout fichiés, En seront encore esclichiés (Pastor. B., c.1422-1425, 226).

C. -

[Comme terme de compar.]

1.

[Sous le rapport de la dureté, de la solidité, de la résistance]

a)

[À propos d'une chose concr.] : Es piés orent [les boeufs sauvages] deux ongles fors A samblance de calipors, Longs, fors et agus que d'achier ; N'est riens ne peüssent perchier. (Renart contref. R.L., t.1, 1328-1342, 158). Sus plus forte roche qu'axier Fist le noble chastel drecier d'Ylÿon (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 59).

b)

[Pour évoquer l'invulnérabilité d'un combattant] : La char avoit plus dure que n'est fer ne acier, Ne povoit on son corps de rien adommaiger. (Galien D.B., c.1400-1500, 55). "Folïe," dit Pinart, "ycy vous amena, Je suis le roy Pinart qui le chief vous toldra, Car ja la vostre espee si ne me mesfera ; Car plus ay la char dure qu'acher c'om trempera." "Par Dieu," dit Gualien, "qui le monde estora, Floberge que je tien si l'amoliera Que de tous les costés le cler sang en sauldra !" (Galien D.B., c.1400-1500, 72). Comment, ce dist Richart, faulx diables Burgifer, Tu es plus dur assés que n'est assier ne fer. Je croy qu'as faict tes armes forger dedans enfer ; Pour puissance que j'aye, ne les puis entamer. (Rom. Richart C., a.1496, 61).

c)

[Pour évoquer l'insensibilité, la cruauté] : Verité les angles ne quiert, Le franc cueur se veult solacer Quant temps et heure le requiert A plaisans motz entrelacer. Il n'est jamais comme l'acier Cueur tant dur ou il n'en demeure Entre deux vertes une meure. (CHAST., Temps rec. D., 1451, 53). Soeuffre espuisier au coeur plus dur qu'achier, Pour le perchier, de tes larmes la disme : Car mort sus mort nous menroit en abisme (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 40). L'idolatre, dur qu'achier, Vous fit, pour vous effachier, De cailleaux tondre et frochier La bouce qui replicqua : "Tu me cuides despoullier, Mais tu me fais habillier D'habit que ne puis soullier, Que Dieu fit et fabricqua." (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 516).

d)

[À propos de la violence d'un coup, d'une atteinte] : Quant je parti des verges d'ignorance, Je cuidai bien estre issus de dangier, Mais depuis ai senti aultre poissance, - Quant je parti des verges d'ignorance - Car Amours m'a donné cops de plaisance Qui sont plus dur que de fier ne d'achier. (FROISS., Ball. B., c.1362-1377, 59). O sainctz chrestiens appellez, Que ceste vile exaction Et indiscrete paction, Lance poignante plus que acier, Et que n'est le bec d'ung ausier Parfore pauvres des coustez (RIVIÈRE, Nef folz D., 1497, 602).

e)

[À propos d'un esprit obtus, borné] : Aussi tost en une enclume [Si] enterroit (une) mole plume Com (mes) paroles enterroient En li [Rude Entendement] ne (ne) profiteroient ; Plus dur est que n'est aïmant, Plus dur qu'acier ne dyamant. (GUILL. DIGULL., Pèler. vie hum. S., c.1330-1331, 176).

2.

[Dans un rapport hiérarchique] : Vostre excellence (...) devant aultres passer, Peult comme l'or contre plomb ou acyer. (LA VIGNE, S.M., 1496, 156).

D. -

P. métaph. [À propos des qualités phys. ou morales de l'homme]

1.

Estre d'acier

a)

"Avoir une grande résistance au combat" : Se nous estiens d'acier trempé Si seriens nous tui décopé (MACH., P. Alex., p.1369, 92). [Robert Salle se bat contre 40 000 émeutiers. Malgré toute sa vaillance, il a le dessous] il estoit tous desarmés, et, au voir dire, se il eust esté de fier ou d'achier, si convenist il que il fust demorés (FROISS., Chron. R., X, c.1375-1400, 116). Et toutesfoiz Sarrasins se departirent, car le roy de Chippre si resbaudissoit tellement ses gens que ilz ne doubtoient les cops ne que se ilz feussent de fer ou d'acier. (ARRAS, c.1392-1393, 107). Il [Glaudes de Sion] est alez combatre Gieffroy au grant dent, nostre ennemy, que lui et Giron, nostre frere, ont encloz en celle montaigne que vous veez la. Et sachiez que Gieffroy ne leur puet eschapper, et feust de fin acier trempez, qu'il ne soit mort ou affollez. (ARRAS, c.1392-1393, 203). S'il y vient je vous certifie Que de ce gravet jusqu'au fie En sa pance le bouteray, Trestous les diables hucqueray Qui sont serviteurs Lucifer, S'il estoit d'acier ou de fer Se n'y acoute [l. aconte] jou deux aux. (MARCADÉ, Myst. Pass. Arras R., a.1440, 238).

b)

Ne pas estre d'acier

-

"Être vulnérable, sensible à la souffrance" : Et Job, quant il faiset le duel de la grant persecucion que il souffret, disoit en ceste maniere : "Nec fortitudo mea fortitudo lapidis, nec caro mea enea est" [p. réf. biblique à Job VI, 12] : "ma force n'est mie la force de la pierre ne ma char n'est mie de metal, de fer ou d'achier", ainssi come se il vousit dire que il estoit honme humain et avoir le cuer tandre, et fallet que nature le descharjat de sa douleur. (Songe verg. S., t.2, 1378, 267).

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"Être vulnérable et mortel" : Et puys que departir me fault Et du retour ne suys certain (Je ne suys homme sans deffault, Ne qu'aultre d'assier ne d'estain ; Vivre aux humains est incertain Et aprés mort n'y a relaiz) - Je m'en vois en pays lointain -, Si establis ce present laiz. (VILLON, Lais R.H., c.1456-1457, 14). La blanche chair et deliées mains, Riz amoureux, oeillades d'ameurettes, De vous ay fait eschange et siremains [l. ser[r]e mains ?], Chassé d'espoir et banny d'amourettes, Certes, je fuz tout tel comme vous estes, Gens de loisir et vous n'y pensez pas Si fauldra il que vous passez le pas, De fer, n'estes, ne d'acier, ne de cuyvre, N'en plus que moy pour en estre delivre. (SAINT-GELAIS, Séj. honn. J., c.1490-1495, 266).

2.

Estre tout fer et acier. "Faire preuve de ténacité, d'opiniâtreté" : : ...mais son cuer estoit entre les autres tout fer et achier. (LA SALE, J.S., 1456, 2).

3.

Gens de fer et d'acier. "Guerriers invincibles" : Helas, dist l'espie, maleur me fist cy venir ! Je croy que ces gens sont tous de fer et d'acier. (Galien Rethoré K.K., c.1450, 30). Bithinïens, gens de fer et d'achier, Hardis Flamens, vigoreux leoncheaux, Il n'est canon, ne traict de franc archier, Ne Franchois nul qui vous puist desmarchier, Ains devant vous fuyent comme pourcheaux (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 130).

Rem. Cuer d'Acier : Percef. III, R., t.2, c.1450 [c.1340], 246 ; LA MARCHE, Mém., III, c.1470, 313...