A. -

"Entourer qqc., envelopper qqc." : En celle année, le roy Philipe enchaint la ville de Paris de murs. (Renart contref. R.L., t.1, 1328-1342, 287). Et plein de si trés bonne odour Que nuls n'en aroit la savour, Tant fust ses cuers desconfortez, Qu'il ne fust tous reconfortez ; Et tant estoit de joie pleins Li lieus dont il [l'arbre] estoit enseins Et a vëoir si gracieus, Si nobles et si amoureus, Car, quant je l'os par bon loisir Resgardé tout a mon desir, Je ne say que ce pooit estre Fors que le paradis terrestre. (MACH., D. verg., a.1340, 15). Estoille journal sanz estaindre Qui ciel, terre et mer peuz ensaindre Et secours mettre en touz perilz... (Mir. parr., 1356, 30). Par foy, mon tres chier seigneur, dist Remondin, se cilz qui ont esté avec moy ne vous en ont compté fors ce qu'ilz en ont veu, il est tout vray de la place que ly cuirs de cerf enceint au roont. Et quant des deux hommes qui l'ont mesuré et du ruisseau qui y est sours soubdainement, c'est toute verité, monseigneur. (ARRAS, c.1392-1393, 35). Siche, ou depuis regna Sinope, Seoit vers la fin d'Eüroppe, Selon la grant mer qui enceint Le monde, qui est d'elle ceint... (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 6). ...le sommellier de l'eschansonnerie doit porter en sa personne une tasse, et dedans icelle tasse ung pain ; et doivent estre enveloppez en une serviette dont le sommellier doit estre enceinct, et à son archon doit porter le gobellet du prince et deux bouteilles, l'une de vin et l'autre d'eaue (LA MARCHE, Mém., IV, Pièces annexées, 1474,,, 40-41).

Rem. Ex. début XIVe s. ds TLF.

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Au fig. : Douce dame dont je porte l'empreinte Dedens mon cuer figuree et empreinte Que fine amour y a mis et empreinte A un pincel De souvenir, mais tout entour enseinte [var. de sonneur mais tour entour enpreinte] De loyauté l'a qui garde l'enseinte, Qu'autre n'i soit figuree ne peinte, Dont trop m'est bel - Par souvenir vois tost a son appel ; Quant je l'aeur, mon dieu terrien l'apel. (MACH., F. am., c.1361, 179). Mais cils mauls est sans nulle peinne ; Car, quant j'en suis plus fort ateins, Bonté, valour, biauté souvreinne, Dont vos gentils corps est enceins, Font que je chant de joie pleins Pour vous, dame, à qui je sui tous, Comment que soie long de vous. (MACH., L. dames, 1377, 30). Mais tant ne me puet destreindre Li desirs, qui ne se feint De moy grever, que refreindre Face mon cuer ; eins m'enseint De loyauté qui tout veint. Et si me fait tant doloir Que j'en muir en desespoir. (MACH., L. dames, 1377, 47). Je suis en l'amoureuse ençainte, De tous les costez si ençaint Que je ne puis estre desçaint De ma douloureuse desçainte ! (GARENC., Poésies N., 1407, 95). Le ciel cristalin est cy sus, Et encore tout par dessus Le hault ciel est, ou sont les sains Et les angelz qui sont encains De gloire (CHR. PIZ., Chem. estude P., 1402-1403, 88).

B. -

"Ceindre, serrer"

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Au fig. : Einsois est toudis l'amour greindre Qui en moy maint, Ne riens ne la porroit esteindre ; Car quant elle me fait plus teindre, Dementer, gemir et compleindre, Tant plus m'enseint. (MACH., R. Fort., c.1341, 52). ...Se li dieus veut Et Morpheüs, qui fera tout certein Son cuer dou mien et li dira de plain Comment toudis pour s'amour me complain, Et qu'il m'estuet Morir pour li, estre autrement ne puet, De la doleur qui m'enseint et aquet, Se par pité Amours si ne la muet Qu'a mon cuer vein Face secours... (MACH., F. am., c.1361, 169). A Venus en ferai la plainte, Qui scet que ma coulour est tainte Et que j'ai plouré larme mainte Par son desroi, Car elle m'a par sa contrainte Enyvré d'amour et ençainte : Si devroit oÿr ma complainte En bonne foy. (MACH., Voir, 1364, 528). Amis, t'amour me contreint Si qu'il me convient descrire Le martyre Qui empire Mon corps et mon cuer esteint Et de grietés si m'enseint Que je ne saroie eslire Le meins pire... (MACH., Les lays, 1377, 352).

C. -

"Contenir dans certaines limites" : (...comme la terre d'icelluy cymetiere fut aportee de Jerusalem par le commandement de Constantin, empereur de Romme.) (...) En grossez nefz (...) Fut apportee pour plaisir voluntaire, Toute la terre qui est leans ensaincte De Hjerusalem ou autre terre saincte, Et mesmement du hault mont de Calvaire (LA VIGNE, V.N., p.1495, 206).
 

Enceindre une femme. "Faire un enfant à une femme" : ...sa mere dist que le dieu Mars l'avoit ensainte, elle dormant a la fontaine, venue pour laver les entrailles des bestes sacreffiees. (LA SALE, Sale D., 1451, 249).

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Part. passé en empl. adj. Enceinte. V. enceinte2
 

"Enclos, enceinte" : Fondemens larges et parfons, Pour les murs asseoir au fons, A fait de marbre maçonner, Et d'ençaint fist avironner .III. grans journees de pays (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 58). ...toutes me vouloit monstrer Les merveilles de la cité, Comme en maint lieu est recité : De marbre vi l'encaint des murs De grant circuit (CHR. PIZ., Chem. estude P., 1402-1403, 52).
 

"Qui porte un enfant" : Or escoute, Calandrin, en parlant avec toy cleremant ainsi come ami, tu n'as aultre maladie se non que tu es enceint et engroissié d'enfant vif. (PREMIERFAIT, Décaméron D., 1414, 1027). [Masc. non attesté ds FEW]
 

A. -

"Espace enceint par qqc." : La l'ordre ot de chevalerie Et a moult noble compaingnie Se combati par tel maniere Eu milieu d'une grant riviere Que l'eaue en fu vermeille et teinte Une demi lieue d'enseinte [var. deseinte]. (MACH., C. ami, 1357, 106). Douce dame dont je porte l'empreinte Dedens mon cuer figuree et empreinte Que fine amour y a mis et empreinte A un pincel De souvenir, mais tout entour enseinte De loyauté l'a qui garde l'enseinte, Qu'autre n'i soit figuree ne peinte, Dont trop m'est bel - Par souvenir vois tost a son appel ; Quant je l'aeur, mon dieu terrien l'apel. (MACH., F. am., c.1361, 179). Chascuns avoit l'espée ceinte Et tenoient moult grant enceinte [var. ensainte], Tant estoient serré et joint L'un devant l'autre et si à point Qu'estre ressambloient IJ. murs. (MACH., P. Alex., p.1369, 196). ...la sourdy uns ruisseaulx, de quoy pluseurs moulins meulent et ont moulu depuis ; dont cilz qui livroient la place furent moult esbahiz, tant du ruissel qu'ilz virent courre soubdainement comme de l'enceinte que ly cuirs de cerf tenoit, car il comprenoit deux lieues de tour. (ARRAS, c.1392-1393, 34).

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P. métaph. : Je suis en l'amoureuse ençainte, De tous les costez si ençaint Que je ne puis estre desçaint De ma douloureuse desçainte ! (GARENC., Poésies N., 1407, 95). Si priie à Dieu qui le m'otroiet Et qu'il me met en bone voie, Par coy mes cuer puis estre en ioie Et ensainte de penitance [Ou est-ce enceindre "et que je puisse être enveloppée de pénitence" ?] (Sept péchés C., c.1300-1350 [p.1478], 232).

B. -

NUMISM. "Bordure de l'avers ou du revers d'une pièce de monnaie portant une légende" : Chascun ung denier portera Lequel en valeur montera Dix aultres, ainsy le voulons Et expressement commandons, Ou quel denier sera emprainte Nostre ymage, et puis en l'enchainte De ce denier tout environ Sera escript tout notre nom. (MARCADÉ, Myst. Pass. Arras R., a.1440, 17).

C. -

CHASSE "Tour qu'on fait dans le bois avec le limier pour découvrir où reste un animal" : Pren ton limier a bien haute heure que toutes bestes seront demourees, et t'en va, ton limier devant toi, et fai une grant enceinte bien loing de la ou il entra au fort (HENRI FERR., Modus et Ratio, Livre deduis T., c.1354-1377, 33).
 

"En état de grossesse, enceinte" : La dame enchainte se senty, De quoy tout le coeur luy fremy Pour le roy qu'elle moult doubtoit (Renart contref. R.L., t.1, 1328-1342, 102). ...puis avint que celle dame acoucha enchainte (LE BEL, Chron. V.D., t.1, 1352-1356, 91). Se en fame qui est ensainte, viengne en la marriz herisipille, c'est chose mortelle. (SAINT-GILLE, A.Y., 1362-1365, 85). Et demora la roine ençainte et priés que sus ses jours : ce fu de une fille qui ot nom Issabiel (FROISS., Chron. D., p.1400, 286). ...et souvent faloit que les bonnes gens et pitéables tirassent les enfans nouveaulx nez des femmes ençaintes qui estoient en leurs fossez, en penniers, amont, pour faire baptiser et après les rendre aux mères (MONSTRELET, Chron. D.-A., t.3, c.1425-1440, 299). ...par ses euvres elle devint grosse et enceincte. (C.N.N., c.1456-1467, 68). Si laissa madame la princesse ensaincte et eust ung filz, mais il ne vesquit pas longuement (LA MARCHE, Mém., III, c.1470, 317). Et en maints lieux grosses femmes ensaintes A deux genoulx devant vierges et sainctes Tres humblement retourneront leur face, A celle fin que Jesucrist luy face Soit par priere, par offrande ou par don, Entierement de ses pechez pardon, Car trop auront de luy necessité. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 316).

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[Avec un adv. d'intensité] : Après ce que la feste fu departie, Melusigne, qui estoit moult enceinte, porta son terme, et, au plaisir de Dieu, elle enfanta un filz masle, qui fu de toutes figures bien formez, excepté qu'il ot le visage court et large au travers, et avoit un oeil rouge et l'autre pers. (ARRAS, c.1392-1393, 47). LA SECONDE DAME. (...) [Griseldis] avra hoir De mon seigneur prouchainement, Qu'enceinte est ja grandement Dieu l'en face a joye delivre (Gris., 1395, 42). ...Kateline (...) estoit si enchainte que sus ses jours (FROISS., Chron. D., p.1400, 398). ...et la roine d'Engleterre qui moult ençainte estoit, sievi le roi son signeur. (FROISS., Chron. D., p.1400, 846). ...la noble roine d'Engleterre (...) estoit durement enchainte (FROISS., Chron. D., p.1400, 848).

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Enceinte de (d'un enfant) : Il a la Une femme d'enfant enceinte (Mir. nat. N.S.J.C., c.1343, 212). Enchainte estoit la damme de Yvonet le menbré (Renaut Mont. B.N. V., c.1350-1400, 303). ...ceste haulte dame sainte Qui du fruit divin fut ençainte (Mir. parr., 1356, 62). Quant Ecuba estoit enseinte De toy, dont elle ot dolour mainte, Un trop divers songe songa Et a Priant dit son songe a. (MACH., F. am., c.1361, 213). Or advint qu'elle fu enceinte de trois filles et les porta son terme et delivra au jour. (ARRAS, c.1392-1393, 9). ...la roine Issabiel (...) estoit enchainte d'enfant (FROISS., Chron. D., p.1400, 185). Le temps vient que dire vous pourréz : Les femmes soient beneictes Quil d'anffant ne seront ansinctes. (Pass. Semur D.M., c.1420 [1488], 210). ...femme ensainte d'enfant (Paris domin. angl. L., 1426, 204). Dont par ainssy fust chascun certain que elle estoit enchainte d'enffant et que l'enffant estoit de son corps nez. (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 170). L'ANGE. Ta femme Rebecque est enssaincte De deux enfans qu'el sentira De bref (Myst. Viel test. R., t.2, c.1450, 110).

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Enceinte de (de tel ou tel géniteur) : Dont elle [Didon] morut a dolour Pour amer, et par sa folour. Mais elle ne morut pas seule, Einsois a deus copa la gueule, Car d'Eneas estoit enceinte, Dont moult fu regretée et plainte. (MACH., J. R. Nav., 1349, 209). Se je sui de dire contrainte De qui c'est que je suis enceinte... (Mir. Theod., 1357, 103). Je sui de vous grosse et ençainte... (MACH., Voir, 1364, 702). Si cuida ençainte d'un dieu Estre (CHR. PIZ., M.F., IV, 1400-1403, 31).
 

Empl. trans. "Rendre (une femme) enceinte" : ...Ly chevalier ly crie : "Traÿtrez dollereus, Me fille as enchainté, dont je suis moult honteus, Par vos mauvais parlers faus et malicïeus, S'en serés mis a fin, car mes dolleurs est teus ["tel"]." (Hugues Capet Lab., c.1358, 84). Maiz à l'autre chevalier ne avint pas ainsi [de tomber malade], car il entra dans les courtines et ençainta la fille ainsnée de l'Empereur. Et quant l'Empereur sceut qu'elle fut grosse, il la fist noyer par nuit et le chevalier fist escorchier. (LA TOUR LANDRY, Livre pour l'enseign. de ses filles, éd. A. de Montaiglon, 1371, 8). Si fist tant, par sa grant cautelle (...) que (...) Jut avec elle et l'ençainta D'Alixandre (CHR. PIZ., M.F., IV, 1400-1403, 30). Phebus (...) accointa par amour la belle Coronis et si l'enceinta d'un filz (Ovide mor. B., 1466-1467, 95). En celle saison plaisante et delictable estoit Phebus monté au signe du Mouton, et que par le regard de ses yeulx radyeulx avoit empreigné et ensainté s'amye Sibellés tellement que de son ventre commançoit a naistre herbes et fleurs de diverses manieres et que les arbres, qui par la rigueur des vents impetueux avoient esté despeulliez, commançoient a eulx revestir de fueilles verdoyans (Hist. prem. destruct. Troie R., c.1470-1480, 96). L'on dit qu'elle [Hélène] fut hosteliere, mais elle fut conjointe avecques Constant le veil qui aprés fut ensaintee [Var. ds VIGNAY, ms BNF fr. 241, a.1348 ; var. emperiere (lat. regnum adeptus est)] (BATALLIER, Lég. dorée D.-L., 1476, 483).
 

"Tour qu'on fait dans le bois pour détourner la bête ou retrouver la trace quand on l'a perdue dans un défaut" (Éd.) : Et d'ilec il pourra prendre ses tours et essainz jusques atant qu'il l'ait drescié (GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, 174). Donc doit il traire arriere par la ou il est venu chassant et mettre ses chienz devant luy et prendre tourz et essainz le plus pres qu'il pourra de la menee (GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, 198). Et, quant les limiers et vallez seront venuz, il doit fere acoupler touz ses chienz et demourer en un lieu et fere prendre aux vallez de chienz a touz leurs limiers, l'un d'une part, l'autre d'autre, grans tours et essainz hors du fouleïz et des reüses, et einsi li uns ou li autres des limiers le devront drescier. (GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, 204). [Autres ex. p.205, 207, 224]

REM. Cf. GD III, 86c, s.v. enceint.