C.N.R.S.
 
Famille de humilis 
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     DESHUMILIER     
FEW IV humilis
DESHUMILIER, verbe
[T-L (renvoi) : desumilïer ; GD : deshumilier ; FEW IV, 512a : humilis]

"Faire sortir qqn d'une humble condition" : ...Et l'avoit fait de vacheron Grant bergier, non pas bergeron ; Mais tous ces grans biens oublia Quant convoitise lui pria, Qui oncques a bien n'entendy Et fist que son maistre vendy. Las ! pour quoy en lui se fia ? Pour quoy le deshumilia ? (Pastor. B., c.1422-1425, 255). [Seul ex.]
 

DMF 2020 - Lexique complémentaire 2007 Robert Martin

 Article 2/19 
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     HUMBLE     
FEW IV 511a humilis
HUMBLE, adj.
[T-L : umble ; GDC : humble ; AND : humble ; DÉCT : umble ; FEW IV, 511a : humilis ; TLF : IX, 978a : humble]

A. -

[D'une personne qui pratique l'humilité, d'une chose qui témoigne de l'humilité de qqn]

 

1.

[D'une pers.]

 

a)

"Qui fait preuve de déférence, de respect, de soumission"

 

-

[Envers Dieu] "Qui montre déférence, humilité face à Dieu" : Dieu regarde en priere cuer humble et devost et n'a cure de paremens ne de haulte maniere, comme font ces foles hardies qui vont baudement le col estendu comme serf en lande et regardent de travers comme cheval desréé. (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 45). Et entre pluseurs manieres de racheter et delivrer noz amis de la prison de purgatoire, la principale maniere est par prieres, et prier pour eulx en cuer humble et doloreux (GERS., Déf., 1400, 225). Et qui est chose qui tant empesche a avoir cuer humilié et devot, contrit et humble en oroison, comme est Plaisir mondain ? (GERS., Déf., 1400, 225). ...a present souffise auoir baillie la matiere de saincte meditacion sur soy mesmes par la quelle la personne deuote et humble pourra passer iusques a la ioyeuse et delectable contemplacion de Dieu et des choses diuines (CIB., p.1451, 192). Car envers Dieu il estoit très humble, magniffique envers son pueple et liberal à ses serviteurs (BUEIL, I, 1461-1466, 27). ...mais il s'entend que l'en doit, par humble et devot courage, marchander à Dieu la victoire et y mettre coer et fiance, pour avoir de luy confort et ayde. (LA MARCHE, Mém., I, c.1470, 66). Exemple de Saint Pol, qui estoit tempté continuelement de l'esperit malvais de vaine glore pour les miracles et les choses merveilleuses qu'il faisoit, pour quoy requist a Dieu qu'il lui ostast et Dieu ne le voult faire, afin qu'il fust tousjours sur sa garde et tant plus humble se tenist en humilité considerant sa fragilité. (Somme abr., c.1477-1481, 177).

 

.

Humble d'esprit. "Personne qui adopte une attitude d'humilité et se soumet à Dieu" : Humilions doncques nos ames soubz la main de Dieu en toute temptacion et tribulacion, car il saulvera les humbles d'esperit et les exaulcera. (Internele consol. P., 1447, 303). Ung orgueilleux et ung couvoiteux jamais ne reposent ; ung povre et humble d'esperit converse en multitude de paix. (Internele consol. P., 1447, 284).

 

-

[Dans une formule qui exprime la déférence envers une personne d'un rang supérieur, une personne respectée ou qui peut être utile...] Humble serviteur/sujet...de qqn : Donques, haute princesse, je, ton humble servant, meu de pitié et de loyale et vraie affection, comme dès pieça ceste present oeuvre je eusse encommenciée, dont l'excusacion de plus tost n'avoir achevé diray en la fin, mais, comme mieux vaille tart que jamais et qu'encores ne soit (dont il me poise) si comme sont faucilles après aoust, veu la male disposicion du temps qui adès continue (Dieu par sa grace y vueille brief remedier !) (CHR. PIZ., P.V.H., 1416-1418, 17). A la treshaulte et excellente majesté des princes, à la treshonnouree magnificence des nobles, circonspection des clers et bonne industrie du peuple françois, Alain Charretier, humble secretaire du roy nostre sire et de mon tresredoubté seigneur monseigneur le regent, lointaing immitateur des orateurs, salut en crainte de Dieu, humiliacion soubz sa justice, cognoissance de ses jugemens et retourner a sa misericorde soubz la pointure de sa punicion. (CHART., Q. inv., 1422, 1). De prince [François Villon] n'a ung denier empruncté, Fors de vous seul, vostre humble creature. (VILLON, Poèmes variés R.H., c.1456-1463, 50). Vostre très humble et très obéissant subject et serviteur, le Jouvencel. (BUEIL, II, 1461-1466, 133). Au devant de luy, le plus richement qu'ilz peurent, furent les seigneurs de la ville avec toute leur suyte luy faire honneur et reverence, en luy disant qu'il fust le tres bien retourné de son voyaige, en sa tres humble obeyssante et subjecte ville. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 274). A tres reverend pere en Dieu, Amé de Monfalcon, evesque et prince de Lausanne, Antitus, vostre tres humble chappellain et serviteur, approchant l'an de grace mille cinq cens, considerant que desirez veoir gracieuses inventions poethiques, adresse a vostre tres reverende paternité La Satyre Megere, laquelle se complainct et lamente de la trefve et preparative de paix pourparlee entre l'invictissime roy des Romains tousjours auguste et le tres chrestien roy de France. (ANTITUS, Poés. P., c.1500, 3). Vostre très humble et obéissans subget et serviteur : "Loys." (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 333). Et moy, comme vostre très humble serviteur et povre parent, me suis retiré en voz pays pour y vivre et mourir, sans espargner ma vie ne mes biens où il vous plaira m'employer pour vous. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 348). Soubzcriptes : "Vostre très humble et très obéissant subgect et serviteur : Anthoine de Chabanes." (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 363).

 

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[Dans le langage amoureux] : Fault il doncq faire touz onniz Les humbles servans et les faulx, Et que les bons soient puniz Pour le pechié des desloyaulx ? (CHART., B. Dame, 1424, 358). Voustre humble serviteur Alain Que Beauté print pieça a l'aim Du trait d'uns tresdoux rïans yeulx, Dont il languist, actendant mieulx. (CHART., E. Dames, 1425, 370). Qu'il vous plaise de voustre grace destourner vos yeulx de lire si desraisonnables escriptures et n'y donner foy ne audience, mais les faire rompre et casser partout ou trouver se pourront et des faiseurs ordonner telle punicion que ce soit exemple aux autres, et que voz humbles servans puissent leur queste parfaire a voustre honneur et a leur joye, et moustrer par euvres qu'en vous a mercy et pitié. (Lettres Chart., 1425, 362).

 

b)

"Qui fait preuve de modestie, de simplicité, d'une absence totale d'orgueil" : C'estoient une gent, pour voir, Dous, humble, courtois, amiable, Entreprenant et veritable, Po emparlé, fier et hardi. (MACH., D. Lyon, 1342, 206). ...c'est un saint homme : Ne se prise pas une pomme, Ains est humble, doulz et piteux (Mir. st Val., c.1367, 131). Alors Jehan de Saintré, comme humble, doulz et gracieux, incontinant devant le roy a genoulz se gecta et remercia du grant honneur qu'il lui faisoit. (LA SALE, J.S., 1456, 67). Dame du ciel, regente terïenne, Emperiere des infernaulx paluz, Recevez moy [la mère de Villon], vostre humble crestïenne, Que comprinse soye entre voz esleuz, Ce non obstant qu'oncques riens ne valuz. (VILLON, Test. M., 1461-1462, 79).

 

-

[D'un aspect de la pers.] "Qui témoigne de la modestie, de l'humilité de qqn" : ...d'umble cuer m'as enquis Quelle deffense il te faudra Avoir, quant elle t'assaudra (MACH., R. Fort., c.1341, 89). ...De cuer devost, a humble chiere, Encommensai ceste priere, En eaus merciant doucement De leurs biens tout premierement... (MACH., R. Fort., c.1341, 117). Vostre cueur soit devocïeux, Humble, courtois et amÿable Et, par ainsi, sedicïeux Ne vous pourra estre le deable. (LA VIGNE, S.M., 1496, 300).

 

-

[Un des aspects de la courtoisie] "Modeste, avenant et souriant" : Qui veult Noblesce esprouver, Ou nul vil homme n'attaint, Il la doit querre et trouver La ou Courtoisie maint, Qui tous ses envïeux vaint Par sa doulceur gracïeuse, Et n'est ennuyeuse, Fiere n'orgueilleuse, Mais humble et joyeuse, Et plaisant toudis En faiz et en dis. (CHART., B. Nobles, c.1424, 402).

 

-

[Qualité évangélique] : Et de humilité est dit : «Se chaschun ne se fait humble comme che enfant, il n'enterra ja ou royaume des chieulx». (DAUDIN, De la erudition H., c.1360-1380, 394).

 

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Estre humble à/envers qqn. "Être bienveillant, doux, généreux envers qqn" : Dieu et l'eglise Et loyauté aimme, et si bien justise Qu'on le claimme l'Espée de justise. Humbles et dous est et pleins de franchise A ses amis, Fiers et crueus contre ses anemis. (MACH., J. R. Beh., c.1340, 106). Et li bons rois, Qui moult estoit sages en tous endrois, Loiaus, vaillans, liberaus et adrois, Et envers tous dous, humbles et courtois, En moult grant joie Estoit assis sur un tapis de soie (MACH., J. R. Beh., c.1340, 112). N'est pas orgueilleuse ne fiére, Mais humble a touz. (Mir. ste Bauth., c.1376, 83). Envers nullui n'est orgueilleuse, A touz est humble et amoureuse, Doulce en parler et en faiz sage (Mir. ste Bauth., c.1376, 90). Chascun à bien faire attrait Par son maintieng et par son dous attrait, Humble envers tous et d'orgueil pure et munde ; Mais de son bien, certes, c'est tout le munde. (MACH., L. dames, 1377, 177). Soiez humbles et doulz aux bons. (ARRAS, c.1392-1393, 153).

 

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[De Dieu] "Doux et miséricordieux" : ...ces larrons orgoilheux L'ont la endroit occiz : le Pere vertüeux Soit a l'ame de luy humblë et amoreux ! (Flor. Octav. L., t.1, c.1356, 30).

 

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[P. oppos. à orgueilleux] : Orgueilleuse n'est point, ne nice, Mais sur toutes elle a le los Et le renom, bien dire l'os, Qu'elle est la plus humble c'on sache, Et la plus parfaitte sans tache De nesun vice. (Mir. ste Bauth., c.1376, 86). Ne humble, ne piteuse n'yere, Mais orgueilleuse de maniere Et de fait, vers gens si haultaine Qu'a nul deignast parler a peine. (CHR. PIZ., M.F., I, 1400-1403, 65). Et premiers, au regart du pechié d'orgueil : pour acquerir par l'amant la tres desiree grace de sa dame, se efforcera d'estre doulz, humble, courtois et gracieux (LA SALE, J.S., 1456, 17).

 

-

Humble comme colombelle/tourterelle : Pluseurs eglises a fondées, Qui sont moult richement doées ; Chartreus, mendians et chanoinnes, Nonnains emmurées et moinnes. Il n'est felons ne despiteus, Einsois est humbles et piteus, Plus que turtre ne colombele, N'amis vrais à s'amie bele. (MACH., P. Alex., p.1369, 31). Dame, que chacuns apelle, Par droit, tres bonne et tres belle, Douce, humble com turterelle, En qui grace se revelle, Com rose fresche et nouvelle, Recevés mon lay Où ma dolour renouvelle (MACH., Les lays, 1377, 313). Si ay advisay prestement Que je m'en yray promptement Presenter devant la Pucelle, A laquelle tout plainement Luy diray mon encombrement, Et me mectre a mercy d'elle, Laquelle est gracieuse et belle, Humble comme la torterelle (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 606).

 

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Humble comme un mouton : Avant ! or le faisons perir ; Il est humble comme ung mouton, Il n'a mais levre ne menton, Dent en gueulle ne de gencive. (Myst. st Laur. S.W., 1499, 229).

 

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Empl. subst. "Personne qui pratique la modestie" : Et, ainsi conme tu es aux povres et miserables pitieable et humain, aussi aux fiers et orgueilleux tu te monstres fort, fier, puissant et vertueux, et par ce tu portes assez l'ymage de Dieu, et l'ansieues, lequel lez orgueilleux abesse et lez humbles essauce. (Songe verg. S., t.1, 1378, 7). Et don de prophecie se assiet sur lez humbles et sur lez innocens, et l'office de messagerie divine n'est jamaiz commis a celui dont la vie est contraire a sainte doctrine. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 119). Aux humbles soyez honnourables, Aux orguilleux reprehensibles, Aux bienffaisans tresfavorables Et, entre toutes gens, paisibles. (LA VIGNE, S.M., 1496, 571).

 

c)

[D'une pers. aimée] "Qui manifeste de la réserve, de la modestie, de la douceur, de la générosité..." : Et bien pensoie qu'escondire Ne me vorroit pas ma requeste, Car tant fu courtoise et honneste, Bele, bonne, sage, honnourable, Humble, sans orgueil, raisonnable, Douce, debonnaire, po fiere, D'atour, de port simple et de chiere, Que je me commensay a traire Vers son dous gracieus viaire. (MACH., D. Lyon, 1342, 184). ...de dame humle, gaie et lie, De tous biens faire apparillie, Seroie fort enamourés. (FROISS., Joli buiss. F., 1373, 77). Et quant elle vous sentira Humble, secret et bien amant, Par Dieu, son cuer s'adoulcira. (CHART., D. Rev., a.1424, 316). Si a dit que "toutes lairoit Pour ceste, qui tant estoit belle, Humble et courtoise damoiselle." (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 263).

 

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[D'un aspect de la pers. aimée] : Douce et serrée Avoit la char, tendrette de rousée, Mais de maniere humble et asseürée Et de trés biau maintien estoit parée. (MACH., J. R. Beh., c.1340, 72). Son biau maintieng, son venir, son aler, Son gentil corps, son gracieus parler, Son noble port, son plaisant regarder, Et son viaire Qui tant estoit dous, humble et debonnaire Que de toute biauté fu l'exemplaire. (MACH., J. R. Beh., c.1340, 79). Car elle avoit moult gracieus attrait Et le maintien humble, dous et parfait, Et cheveus blons, Les yeus rians, plus vairs que nuls faucons ; Et ses corps fu gens, joins, gentils, et lons, Et plus apers que nuls esmerillons. (MACH., J. R. Beh., c.1340, 104). S'il a esperance Et humble souffrance Et a sa dame acointance, Donc lui puet il dire, S'il voit sa semblance, Que Pitié s'avance De mectre bonne alegance En son dur martire. (CHART., L. Plais., c.1412, 152). Puis qu'il faut que point ne le voie, Au moins se lectres recevoie, Qui presentassent Reconfort et se guermentassent Des maulx que noz deux cuers entassent, Son doulz parler representassent, Humble et humain, Au moins congneusse je la main Qui tant m'a escript soir et main Doulz mos de demain en demain (CHART., L. Dames, 1416, 251).

 

-

[De la femme mariée] "Modeste, discrète, d'une humilité qui inclut la soumission" : Le ..VIme.. article de la premiere distinction dit que vous soiez humble et obeissant a cellui qui sera vostre mary, lequel article contient en soy quatre membres. (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 70). Ainsi elle fut vraye, humble, obeissant, et par son humilité et obeissance grant bien nous est venu. (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 75). Mais avoir vueil femme benigne, Humble, simple, po enparlée, Bien besongnant, pou eslevée, Juene et chaste de bouche et mains, Saige et gente, et qui ait du mains De .XV., .XVI. ou a vint ans, Qui soit riche et de bons parans, Qui ait bon corps et qui soit belle, Et doulce comme columbelle, Obeissant a moy en tout (DESCH., M.M., c.1385-1403, 27). La noble princepce qui en toutes choses vouldra suivre la regle d'onneur se maintendra vers son seigneur, soit vieil ou joenne, en toutes les manieres que bonne foy et vraye amour en tel cas commande, c'est assavoir se rendra humble vers lui en fait, en reverence et en parole, l'obeira sans murmuracion et gardera sa paix a son pouoir soingneusement, par la maniere que tenoit la sage et bonne royne Hester, si comme il est escript en la Bible ou premier chapitre, - et pour ce estoit tant amee et honnouree de son seigneur qu'il n'estoit chose que elle voulsist, qu'il lui veast. (CHR. PIZ., Trois vertus W.H., c.1405, 53).

 

d)

[D'un personnage important] "Qui sait renoncer aux prérogatives que lui confère son rang, renoncer à l'orgueil, se montrer bienveillant, attentif aux autres..." : ...j'ai veu en mon temps que j'ay travailliet le monde CC haulx princes ; mais je n'en vey oncques plus humble, plus debonnaire, ne plus traittable (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 159). A quoi es çou bon que il ont mis hors d'Engleterre la roine qui est serour dou roi de France et une vaillans dame, sage, humle et devote, et son jone fil nostre hiretier, et aussi le conte de Qent, un vaillant honme et de bonne consience ? (FROISS., Chron. D., p.1400, 54). Lequel seigneur roy Loys, avec le consentement de Pappe Martin Ve, comme humble, doulz et gracieux, oubliant toutes choses passees, manda Sforce, son grant connestable, avec grant souvencion de finances, que soubitement la fust secourir. (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 196). Et entre tous ceulx que j'ay jamais congneu, le plus saige pour soy tyrer d'un mauvais pas en temps d'adversité, c'estoit le roy Loys unziesme, nostre maistre, et le plus humble en parolles et en habitz, qui plus travailloit à gaigner ung homme qui le povoit servir ou qui luy povoit nuyre. (COMM., I, 1489-1491, 67).

 

e)

[Avec une valeur plutôt négative] "Complaisant" : Et pour ce, tous ceulz qui sont blandisseurs, humbles et serviables, et veulent a chascun plaire, il sont flateurs et de servile condicion. (ORESME, E.A., c.1370, 255).

 

2.

[D'une chose concrète ou abstr.] "Qui marque de la déférence, de l'humilité" : Premierement, après tres humbles recommendacions, soit remonstré au Roy l'estat de la Court, la charge, la grant utilité et neccessité d'icelle (FAUQ., II, 1421-1430, 364). "Messire Enguerrant, nous avons oy vostre humble et honorable requeste, laquelle pour l'onneur et amour de vous, aussi du noble escuier qui porte l'emprinse, nous le vous accordons..." (LA SALE, J.S., 1456, 104). Or, monseigneur, mon prince et mon maistre, pour mettre conclusion au premier volume de mes memoires, je vous [ en ] fais humble present. (LA MARCHE, Mém., I, c.1470, 177). La conclusion dudit duc Philippes fut fort humble et saige, suppliant au roy ne vouloir legierement croire contre luy ne son filz et l'avoir tousjours en sa bonne grace. (COMM., I, 1489-1491, 8). Il fist humble contenance du corps, mais sa geste et sa parolle estoit aspre, demandant au roy s'il vouloit tenir le traicté de paix qui avoit esté escript et accordé et si ainsi le vouloit jurer. (COMM., I, 1489-1491, 143).

 

-

"Qui témoigne de la modestie, de l'humilité de qqn" : Quant elle a son amy perdu Par mort, le cuer si esperdu A, que jamais n'avera joie, Eins quiert lieu, temps, et gens, et voie, Ou il ait tout adès tristesse, Humble habit en lieu de richesse, Tenebres en lieu de clarté, Et en lieu de joliveté Pour porter chapelès de flours Ist de son chief larmes et plours (MACH., J. R. Nav., 1349, 194). Et lors commensa sa priere Humble et devote en tel maniere : "Sires Dieus, qui es tous puissans..." (MACH., C. ami, 1357, 52). Ceste science doit estre humble, non eslevee, autrement ne seroit ce pas vraie sapience, selon le dit de Salomon es Proverbes el .XIe. chapitre : «La ou est humilité, la est sapience». (DAUDIN, De la erudition H., c.1360-1380, 16). Et le landemain, par matin, vint a Saint Pierre, et la trouva le pape Benedic, qui pour lors regnoit, et se tira par devers lui. Et cil lui fist moult humble recueillete quant il ot senty qui il estoit. Et Remond se confessa a lui, au mieux qu'il pot ; et quant de ce qu'il s'estoit parjurez envers sa femme, le pape lui charga tel penitence qu'il lui plot. (ARRAS, c.1392-1393, 270). Escoute comme paciaument en cremeur de Dieu se maintint le benoist saint Leu de Troyes contre Athilla le roy des Huns, ou temps de ces mesmez persecutions, et tu y trouveras doctrine de humble et proufitable obeissance. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 145). ...et se elles le consideroient elles en seroient aussi plus belles, car tant a une femme plus humble abit, tant plus est plaisante. (JUV. URS., Verba, 1452, 280). Le mien seigneur et prince redoubté, Floron de lis, roialle geniture, Françoys Villon, que Travail a dompté A coups orbes, a force de batture, Vous supplie par ceste humble escripture Que luy faciez quelque gracïeux prest. (VILLON, Poèmes variés R.H., c.1456-1463, 50). Ma seur, puis qu'avés telle entente D'aler au prophete Jhesus, Vestés vous - et n'actendés plus - De draps humbles en penitence. (Pass. Auv., 1477, 150). Ladicte damoyselle estoit en son habit de dueil et n'avoit que ung couvrechef sur la teste, qui estoit habit humble et simple, et pour leur faire pitié par raison (COMM., II, 1489-1491, 202).

 

-

En partic. [D'une requête] : Ouvrez doncques les oreilles espirituelles de vostre cuer, tendez les en hault, et escoutez leur humble requeste et leur plainte doloreuse, pour les aydier, secourir et delivrer. (GERS., Déf., 1400, 226). Et quel plaisant chose cuides tu que ce soit au subgiet de quelque faculté ou estat qu'il soit quant il sent son seigneur si humain et tant debonnaire qu'il n'ara pas en desdaing d'ouir son humble requeste, supplicacion ou complainte de quelque grief se on lui fait, ains l'escoutera benignement, et le vouldra entendre, et doulcement lui en respondra ? (CHR. PIZ., Paix W., 1412-1413, 116). La grant bonté et bellez paroles de la dame d'Artois furent tant agreablez et plaisantez a la bonne maistresse de la fille du roy de Castille que, toutez craintez gettez au long, elle luy acorda sa tres humble requeste (Comte Artois, c.1453-1467, 126). -- "Et quant le roy entend sa requeste, comme saige prince, avant qu'il feist response se tira a part et appella pluseurs seigneurs et autres chevaliers et escuiers anciens de conseil qui la estoient, a laquelle ne demeura gueres qu'il l'appella et publiquement lui dist: "Messire Enguerrant, nous avons oy vostre humble et honorable requeste, laquelle pour l'onneur et amour de vous, aussi du noble escuier qui porte l'emprinse, nous le vous accordons et donnons jour a voz armes le XVme jour aprés sa venue, si vraiement que Dieu vous ait tous deux en sa bonne garde. (LA SALE, J.S., 1456, 104). «Vous soyez le tresbien trouvé, Gent poursuivant bien aprouvé, Mon doulx amy Humble Requeste ! Dictes moy ou allez en queste, S'il vous plaist, et quel vent vous maine Dont d'aler vous prenez tel paine...» (RENÉ D'ANJOU, Cuer am. espris W., 1457, 70). Et combien que monsr.. le chancelier de ses matieres ne ait fait aucune mencion, toutesvoye semble il conme dit est que on les peut aplicquer a donner conseil au roy, et au fort se seroit bien fait de en faire au roy requeste et humble supplicacion. (JUV. URS., D. Tours, 1468, 443). De l'avoir plus ne fault parler, Car, si Dieu l'eust volu bailler A nous, comme a eulx il a fait, Ains que d'icy nous devaller, Nostre cas eust esté parfaict Et si eust sorty son effect Maintenant nostre humble requeste. (LA VIGNE, S.M., 1496, 584).

B. -

[Domaine social, politique]

 

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"Qui est d'une condtion sociale modeste, inférieure" : Dont dist Lactanche : "Non pas au nobles", c'est au riches et puissans ou siecle, "doit estre ouverte la maison du juste et du sage, mais aux humbles et aux deboutéz." (DAUDIN, De la erudition H., c.1360-1380, 316). Dont dist Boece ou second livre de Consolation : "Mort despite haulte gloire et envolepe ensamble hault estat et humble, elle fait tout ung des choses esleveez et des abaissees". (DAUDIN, De la erudition H., c.1360-1380, 347). ...mais querir et vouloir estre honoré des humbles ou moiens ou petis, c'est une chose charchant et qui n'est pas a loer. (ORESME, E.A., c.1370, 254). Ilz pristrent une maniere de eulz vestir plus simplement et plus vilement que il n'appartenoit a leur estat, afin que eulz semblassent plus humbles et plus moderés. (ORESME, E.A.C., c.1370, 269). L'umble commun obeit et endure Fains protecteurs lui faire adversité (BAYE, II, 1411-1417, 220). ...ou fut jadis le riche palais du cruel empereur Neron, est a present la devote eglise du tres debonnaire et humble pescheur saint Pierre. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 32). La vie oultrageuse est tournee en miserable mort, vague et voluptueuse vanité en estroite prison, et fierté orgueilleuse en tres humble et ploiant servitude. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 75). ...et pour ce, mon ame, tu ne porras estre plainement consolee ne parfaictement recree fors en Dieu, le consolateur des povres et le recepveur des humbles. (Internele consol. P., 1447, 115).

 

-

[D'une position sociale] : Si a pris en mariage une fame de haut lieu que on appeloit Tanaquil, laquele estoit bien de si grant cuer car elle ne pooit souffrir ne soustenir plus humble estat que sa [nativité] ne requeroit. (BERS., I, 1, c.1354-1359, 34.4, 59). En celuy an meismez Cn.. Flavius filz de Cn.. Flavius, qui estoit noctairez et filz de pere de condicion libertine et nez de humble fortune, mes autrement cauteleux homs et moult eloquens, fu fais edilez curulez (BERS., I, 9, c.1354-1359, 46.1, 86). Advise donc l'humble estat dont tu vins Et que tes ans envix sont quatre vingtz, Dont, en jeunesse, les services divins Du tout refuses (MESCHIN., Lun. princes M.-G., c.1461-1465, 83).

 

-

Empl. subst. : Pas n'estoit en anui de veoir auchun humble, pas ne se rioit du feble, pas ne fuioit le povre. (DAUDIN, De la erudition H., c.1360-1380, 400).

 

-

[Idée d'infériorité par rapport à qqn] Se trouver humble envers qqn. "Se savoir, se sentir inférieur face à qqn" : Toutesfois y vindrent de grans personnaiges, comme le duc de Bourbon, son frère le cardinal de Bourbon, le conte de Sainct Pol, connestable, qui en riens ne s'estoit meslé de ceste venue [du roi], mais luy en desplaisoit, car pour lors le cueur luy estoit creü et ne se trouvoit pas humble envers ledict duc [de Bourgogne] comme autresfois, et pour ceste cause n'y avoit nulle amour entre les deux. (COMM., I, 1489-1491, 125).
 

DMF 2020 - MAJ 2020 Pierre Cromer

 Article 3/19 
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     HUMBLEMENT     
FEW IV humilis
HUMBLEMENT, adv.
[T-L : umble (umblement) ; GDC : humblement ; AND : humblement ; DÉCT : umblement ; FEW IV, 511b : humilis ; TLF : IV, 979a : humblement]

A. -

[Employé particulièrement dans des rapports inégaux, de l'inférieur au supérieur, du solliciteur au sollicité, de l'obligé au bienfaiteur...] "Avec respect, déférence, humilité"

 

-

[Avec des verbes qui expriment une demande, une requête] : ...et le fief des choses desseur dites, douquel ledit monseigneur Guillaume estoit entrés en nostre foy et homage, le nous a rendu et soi desvesti d'icelui nuement, en nous suppliant humlement que nous ledit Jehan vausissiesmes rechevoir pour lui en foy et en hommage (Trés. Reth. L., t.4, 1334, 195). NOSTRE DAME. Doulx chier filz, (...) Si te pri de cuer humblement Que par ta debonnaireté Aies de cest enfant pité (Mir. enf. diable, c.1339, 49). Quant vint a la demande faire, Je moustray chiere debonnaire, Si qu'umblement le demanday, De quoy ma besongne amenday, Car la cause d'umilité Trait gens a debonnaireté. (MACH., D. Aler., a.1349, 375). ...très redoubtez sire, en la presence de vostres oncles, nous vous supplions humblement, ainsi que subjetz doivent prier à leur seigneur, que vous ouvrez à ces besoingnes (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 26). ...et ainsi comme il ot esté un petit sur ledit grant tresteau, requist humblement que d'icelle l'en le meist hors, et il diroit verité des crimes et delis par lui fais et commis (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 280). ...et dist que c'est le premier larrecin qu'il feist oncques ou commeist, en requerant humblement que à sa delivrance ledit mons. le prevost voulsist proceder, et avoir de lui pictié et compassion. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 399). Thomas Le Chevalier (...) presenta audit mons. le prevost certaine supplicacion contenant ceste fourme. A mons. le prevost ou à son lieutenant. Supplie humblement en pitié Thomas Chevalier povres homs et anxiens de l'aage de LXX ans ou environ (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 431). Et commencay ceste hystoire a mettre en prose le mercredi devant la Saint Cleyment en yver l'an de grace mil CCCIIIJxx et XIJ. Et suppli humblement a tous ceulx qui l'orront lire ou le liront, se je y mespren a leur gré en nulle maniere, qu'ilz le me veuillent pardonner, car certainement je l'ay fait au plus justement que j'ay peu, selon les croniques que je cuide estre vrayes. (ARRAS, c.1392-1393, 2). Et après ce ledit Drouart s'excusa envers la Court et supplia très humblement que on lui voulsist pardonner ladicte offense (FAUQ., I, 1417-1420, 223). Pou devoient de leurs requestes s'efforcer ne fier, quant ilz supplioient humblement a ceulx a qui eulx seulx attribuoient la faculté de ottroier, et attendoient recepvoir les biens en vertu de ceulx qui sans eulx n'avoient aucune vertu. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 114). ...et feïrent les princes et les seigneurs leurs demandes humblement, le genoul en terre, en baillant par requeste ce qu'ilz demandoyent, dressèrent conseil où ilz se feïrent compaignons de douze qui y furent nomméz. (COMM., II, 1489-1491, 221).

 

.

[Formule de modestie ou de fausse modestie dans un exercice littéraire convenu] : ...combien que je ne vueil ne n'entens point les choses cy apres` escriptes estre appellées, dictes ou nommées Croniques, pour ce que à moy n'appartient, et que pour ce fayre n'ay pas esté ordonné et ne m'a esté permys, mais seulement pour donner aucun petit passe temps aux lisans, regardans ou escoutans icelles, en leur priant humblement excuser et supployer à mon ignorance et adresser ce qui y seroyt mal mis ou escript (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 2).

 

.

En partic. Se recommander humblement à qqn : Ma tresredoubtee et souveraine dame, a vostre tresbonne grace, si humblement que je puis me recommande par maistre Julien de Broy vostre secretaire. (LA SALE, J.S., 1456, 260). ...et, sur ce, furent faictes lettres dont la teneur s'ensuivent : "Mon souverain seigneur, je me recommande à vostre bonne grace tant et si très humblement comme je puis. (BUEIL, II, 1461-1466, 132). En telle ordonnance vindrent lesditz officiers d'armes et ledit Thoison d'or avecques le faisant, jusques devant monseigneur le duc, auquel ilz firent le reverance, puis luy dist ledit Thoison d'or en ceste façon : "Très hault et très puissant prince, et mon très redoubté seigneur, veez les dames qui très humblement se recommandent à vous, et pour ce que c'est la coustume, et a esté anciennement, que aux grans festes et nobles assemblées on presente aux princes, aux seigneurs et aux nobles hommes le paon, ou quelque aultre oyseau noble, pour faire veuz utiles et valaibles, elles m'ont icy envoyé avec ces deux damoiselles pour vous presenter ce noble faisant, vous priant que les vuillez avoir en souvenance." (LA MARCHE, Mém., II, c.1470, 366). Mais ledit grant maistre congneut leur cautelle et, pour chose qu'il luy peussent dire, ne cessa de son entreprinse et en escripvit au roy unes lettres, la substance et teneur desquelles estoit telle : "Sire, le plus humblement que je puis à vostre grace me recommande..." (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 236).

 

-

[Avec des verbes qui expriment un remerciement] : Et nientmeins humblement vous merci Par plus de fois qu'on ne porroit nombrer (MACH., Prol., c.1377, 5). Par foy, dist Melusigne, enfans, cy fault pourveoir tant pour le fait de la mer comme cellui de la terre, et j'en ordonneray tellement que vous m'en saurez gré, et ce feray je bien brief. Adont s'en vont les deux enfans agenoullier, et l'en remercient humblement. (ARRAS, c.1392-1393, 83). Pour quoy je vous averty que se Madame vous en parloit par quelque façon que ce fust, affin que je ne fusse pas trouvee manssongiere, que tres humblement vous l'en remerciez. (LA SALE, J.S., 1456, 65). Pour quoy je vous averty que se Madame vous en parloit par quelque façon que ce fust, affin que je ne fusse pas trouvee manssongiere, que tres humblement vous l'en remerciez. (LA SALE, J.S., 1456, 65). Humblement je vous rens mercy, Mes bons seigneurs et bons amis, Du service fait a mon filz. (Pass. Auv., 1477, 265). Ledit embassadeur mercya le roy bien humblement et luy sembla bien qu'il n'estoit point roy avaricieux (COMM., II, 1489-1491, 111).

 

-

[Avec des verbes qui expriment une salutation] : Treshumblement la saluai, Mais au saluer tout muai ; Lors elle me prinst par la main (MACH., Voir, 1364, 230). Li contes de Montfort se mist en genouls devant le roi et dist moult humlement : "Monsigneur, vous m'avés mandé, et je sui venus a vostre mandement." (FROISS., Chron. D., p.1400, 485). Et lors [le roi Elinas] regarda la dame qui ot laissié le chanter, et la va saluer tres humblement en lui portant le plus grant honneur et reverence qu'il oncques pot. (ARRAS, c.1392-1393, 7). Salué je l'os humblement. (CHR. PIZ., M.F., I, 1400-1403, 38). ...quant je fus a l'entree je encontray un tresbel de corps chevalier et bien acompaignié, nommé messire Enguerrant de Servillon, lequel en passant je humblement saluay. (LA SALE, J.S., 1456, 101). Il ne demoura gueres que le pouvre Escossois amoureux fist tant de tours qu'il vit en place nostre merciere, qui fut par luy humblement saluée, et de rechef d'amours si doulcement priée que les requestes du paravant devoient bien estre enterinées par la conclusion de ceste piteuse et derreniere (C.N.N., c.1456-1467, 49).

 

-

[Avec des verbes qui expriment l'idée de soumission, d'obéissance] "Avec docilité, humilité" : Conmandez moy conme a novice Et j'humblement obeiray. (Mir. Theod., 1357, 89). La .IIIIe. chose est qu'il se submette humblement a son maistre. (DAUDIN, De la erudition H., c.1360-1380, 55). «Le .VIe. degré est obeÿr humblement», c'est de la forche de nostre euvre ne nous eslevons, mais quant tout aurons bien fait, disons que «nous sommes serviteurs inutiles" (DAUDIN, De la erudition H., c.1360-1380, 243). Chascun vers Dieu humblement s'umilie A celle fin, que quant la mort viendra, Que l'ennemy qui sur tous a envie Ne leur puisse reproucher de leur vie : Dieu par ce point a luy les retiendra. (RÉGN., F.A., 1432-c.1465, 186). Et desormés en son obeissance Tres humblement tous ilz se maintiendroyent, Son nom gardroyent, ses armes deffendroyent (LA VIGNE, V.N., p.1495, 208). Lesquelz voyans sa grande lascheté, Et des François le grant povoir notté, Tantost aprés eulx mesmes sans attendre, Tres humblement au roy se vindrent rendre Luy apportant des portes de la ville Et du chasteau, en maniere serville, Toutes les clefz: luy suppliant aussi A joinctes mains qu'il les print a mercy. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 247). Ne en ce cas ne feray la commere N'aultre manyere, car la chose premyere, Tressinguliere pour avoir saulvement, C'est d'acomplir vostre bon mandement Soubdaynement, de bon cueur, humblement (LA VIGNE, S.M., 1496, 146). Ma douleur par vous esclarcye A esté tout soubdaynement, Dont desormais ne me soucye Fors que Dieu servir humblement. (LA VIGNE, S.M., 1496, 470).

 

-

[Plus rarement dans des rapports de supérieur à inférieur] "Sans abuser de son pouvoir, en respectant l'inférieur" : Et se aulcun le blasmoit ou disoit mal de luy (...), il [Tibère] le reprenoit humblement et amiablement (LA SALE, Sale D., 1451, 22).

 

.

"Avec amabilité, bienveillance" : DIEU [à Gabriel et Raphaël]. (...) A luy [Saint Martin] moult doulcement parlez Quant vous le verrez en la face Et humblement le consollez, Disant qu'il est tout en ma grace. (LA VIGNE, S.M., 1496, 533).

B. -

[Dans le langage amoureux] "Avec discrétion, patience, docilité, soumission..." : Si me moustra la droite voie, Comment ma dame amer devoie, Servir, oubeïr, honnourer, Humblement croire et aourer Et cremir seur toute autre rien Com m'amour et mon dieu terrien, Et que toudis eüsse l'ueil A faire son bon et son vueil, En gardant s'onneur et sa pais (MACH., R. Fort., c.1341, 6). Mais la teste encline comme ours Recevoie son dous voloir, Fust de joie, fust de doloir, Humblement comme amis parfais Amoureus par dis et par fais. (MACH., R. Fort., c.1341, 15). Car ensement Vueil liement, Joliement Et gaiement, En ma dame amer loyaumen User toute ma vie Si franchement, Que vraiement, Se j'ay tourment, Aligement N'en vueil, fors souffrir humblement Ma douce maladie. (MACH., R. Fort., c.1341, 23). Vous savez aussi qu'humblement L'aim, serf, crein, desir loyaument Plus qu'autre, ne moy proprement, Et que siens sui si ligement Que c'est sans nul departement Et sans muence. (MACH., R. Fort., c.1341, 122). Car il vaut mieus, et s'est plus grand honnour, Morir à joie humblement pour amer, Qu'einsi languir sans merci esperer. (MACH., L. dames, 1377, 114). Pour ce humblement, sans atendre, Vueil pour li la mort atendre, Quant elle ne deingne entendre à ce qui me fait doloir. (MACH., Les lays, 1377, 321). Nompourquant, tant com vivray, Vous seray Loyaus, sans penser folour, Et vostre gentil corps gay Serviray Humblement et à s'onnour (MACH., Ch. bal., 1377, 603). Car quant ne peuent aler dire A leurs dames leur grief tourment, Ce leur est moult d'alegement Quant par escript peuent mander Les maulx qu'ilz portent humblement Pour bien et loyaument amer. (CH. D'ORLÉANS, Ball. C., c.1415-1457, 39).

C. -

[Avec des verbes d'action]

 

-

"Discrètement, sans pompe, comme il convient pour une personne simple" : Sa bonne mere, dont dit é, Fina ses jours en vie saincte A Paris, et par tout fut plainte Et plourée piteusement ; Apportée fut humblement A Maubuisson, et la repose. (DESCH., M.M., c.1385-1403, 311). Pour l'autre homme qu'il delivra Son corps en servage livra Au gendre au tirant de Cartage, Et fist long temps son courtillage ["jardin"] Plus humblement que nul bergier. (Tomb. Chartr. Trois contes S., c.1337-1339, 114).

 

-

"Respectueusement, dans un esprit altruiste" : "Biaulx seigneurs, vous veés devant vous toutes vos pourveances ; si les vuelliés bellement departir l'un à l'autre, ensi que frères, sans faire nuls outraiges (...)" A ces paroles se ordonnèrent il mout humblement, et furent les chars deschargiés. (FROISS., Chron. R., X, c.1375-1400, 223).
 

DMF 2020 - Synthèse Pierre Cromer

 Article 4/19 
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     HUMBLER     
*FEW IV humilis
HUMBLER, verbe
[AND : humbler ; *FEW IV, 511b : humilis]

"S'humilier ?"

Rem. Cf.  ; AND : humbler.
 

DMF 2020 - DMF/AND 2015 Robert Martin

 Article 5/19 
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     HUMBLESSE     
FEW IV humilis
HUMBLESSE, subst. fém.
[T-L : umblece ; GD : humblece ; AND : humblesce ; FEW IV, 511b : humilis]

(Synon. de humilité)

A. -

[Domaine des attitudes, des manières d'être] "Abaissement volontaire, renoncement à l'orgueil, attitude de réserve, de retenue..."

 

1.

"Déférence, respect, état d'esprit empreint de soumission" : EVE. Dieu, mon crëateur en mercy [d'avoir eu deux enfants en bonne santé] De bon cueur et de vraye humblesse. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 22).

 

-

En (toute) humblesse. "Avec une grande déférence, avec respect, avec un esprit de soumission" : Le dieu d'Amours remercye en humblesse, Quant c'est le vueil de sa haulte noblesse Que mon las cueur, par douleur obscurcy, Est de present en soullas esclercy (Au grey d'amours F.-H., c.1400-1500, 225). Premierement, a la haultesse Du Dieu d'Amours donne et envoye Mon esperit, et en humblesse Lui supplie qu'il le convoye En son Paradis et pourvoye (CH. D'ORLÉANS, Ball. C., c.1415-1457, 96). Adonc seray en l'eaue de Liesse Tost refreschi, et au souleil de France Bien nettié du moisy de Tristesse ; J'attens Bon Temps, endurant en humblesse. Car j'ay espoir que Dieu ma guerison Ordonnera ; pour ce, m'a sa haultesse Mis pour meurir ou feurre de prison. (CH. D'ORLÉANS, Ball. C., c.1415-1457, 131). Devant vostre persone vien Moy presenter en grant humblesse Comme au droit chief de gentilesse, Crain et doubté sur toute rien. (Pouvre peuple H., c.1450-1492, 163). Dieu infiny, (...) Mercy vous rens de cueur en toute humblesse, Pour vostre nom sur tous aultres auctentique. (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 8). Servir vous vueil en toute humblesse Et secourir de mon pouoir, Puis que Dieu, par sa grant noblesse, M'a mis en vostre presçavoir. (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 122).

 

-

Au plur. "Témoignages d'humilité, de modestie" : Dist il : Huguenin, j'ayme trop mieulx faire reverence a dix filles communes que avoir failly a une femme de bien. Or, advisez quelle responce de homme d'honneur comme luy, estant en telz offices pour le roy, et monstrer telles humblesses. (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 12).

 

2.

"Modestie, absence totale d'orgueil, humilité" : NOSTRE DAME. Mon ame magnifie Dieu Et mon esperit se resjoye En Dieu, mon salu et ma joye, Car il a regardé l'umblesse De son ancelle et sa simplesse. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 53). Celle de qui le seigneur s'accompaigne Est sa compaigne, exemplaire d'humblesse ; Fille du roy de Castille et d'Espaigne, Point n'est brehaigne, elle est fertile et gaigne D'honneur l'espargne et le fruict de noblesse (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 369).

 

3.

"Vertu qui fait qu'on oublie ses prérogatives, le sentiment de sa valeur" : Quant vint a la demande faire, Je moustray chiere debonnaire, Si qu'umblement le demanday, De quoy ma besongne amenday, Car la cause d'umilité Trait gens a debonnaireté. Debonnairetez par humblesse Est uns poins de noble largesse Qui appert par ouevre de fait. (MACH., D. Aler., a.1349, 375). Prince royaulx doit avoir congnoissance D'orgueil fuir, d'umblesce avoir le sens ; Par orgueil pert, et l'autre point l'advance : Humilité attrait le cuer des gens. (DESCH., Oeuvres Q., t.5, c.1370-1407, 283). Moy confians en vostre tresgrant humblesse et valeur de chevalerie, et pour le tresgrant et parfait desir que j'ay d'avoir l'acointance de cieulx de vostre roiaume, me prent a presant volenté d'escripre et faire savoir a vostre seigneurie unne partie de mon desir (WERCHIN, Corresp. G.-W., 1408, 163). Pour ce, nompareille Princesse, Quant ainsi devant vous seray, Vueilliez, par vostre grant humblesse, Me pardonner, se je ne sçay Parler a vous comme devray (CH. D'ORLÉANS, Ball. C., c.1415-1457, 74). Ains ta noblesse Qui nul ne blesse En ma foiblesse, Par vray humblesse, Mon cueur prandra. (LA VIGNE, S.M., 1496, 475).

 

-

[À propos d'un être céleste] : GABRÏEL. O chiere maistresse, O haulte princesse, Dame souveraine, Pour ta grant humblesse S'esjoye et reeslesse nostre court haultaine (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 54). S. JAQUES MAJOR. Sire, que faictes vous ? Voulés vous en si bas office Nous faire si humble service Et abesser votre haultesse Devant nous en si grande humblesse Que nos pieds vous voulés laver ? (MICHEL, Myst. Pass. J., 1486, 265). Mon Dieu, mon roy, qui par humblesse As voulu du hault ciel descendre Pour chair humaine en vierge prendre Et rachepter le grief humain Qu'Adam, le pere primerain, Dampna par innobedience (Myst. st Laur. S.W., 1499, 228).

 

4.

"Réserve, modestie, bienveillance, absence de prétention... (de la femme aimée)" : Et vraiement bien dire puis Que d'umblesse est fonteinne et puis ; Qu'onques turtre ne turterelle, Aingnaus, coulons, ne coulombelle, Damoiselle, ne pucelette Ne pot estre d'orgueil plus nette, Ne plus pleinne d'umilité, Acompaingnie de pité, En tous cas et en tous endrois, De li. (MACH., R. Fort., c.1341, 8). Son joyeux regart plain d'umblesce, Son plaisant maintieing seignory, Son doulx parler qui en tristesse Ne me laissat jour ne demi... (Cent ball. R., c.1388-1396, 39).

B. -

"État d'infériorité, de médiocrité dans la hiérarchie sociale" : De la grant joie, de la solemnité, Du hault vouloir, de la grant unité De nos seigneurs d'eglise et de noblesse, De bourgeoisie, du commun et humblesse Le recepvant, a paine est il escript. (Entrées roy. G.L., 1485,,, 242).

 

-

"État d'infériorité par l'âge" : JAPHET (.III. enfant). Exalton la redemption De nostre humblesse ! ABEL. (.IIII. enfant). Disons tous l'exaltation De tel haultesse ! (MICHEL, Myst. Pass. J., 1486, 221).
 

DMF 2020 - Article revu en 2015 Pierre Cromer

 Article 6/19 
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     HUMBLET     
FEW IV humilis
HUMBLET, subst. masc.
[GD : humblet ; FEW IV, 511b : humilis]

"Homme de rien" : Et va tousjours quelque humblet qui a quelque marché à part. (COMM., I, 1489-1491, 92).
 

DMF 2020 - Lexique complémentaire 2007 Robert Martin

 Article 7/19 
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     HUMBLETÉ     
FEW IV humilis
HUMBLETÉ, subst. fém.
[T-L : umbleté ; GD : humbleté ; AND : humbleté ; FEW IV, 511b : humilis]

"Humilité"

Rem. Cf.  ; AND : humbleté.
 

DMF 2020 - DMF/AND 2015 Robert Martin

 Article 8/19 
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     HUMILE     
FEW IV 511b humilis
HUMILE, adj.
[T-L : umile ; FEW IV, 511b : humilis]

"Humble" : Dieu vous crea gracieuse et humile, Saige entre ung mile (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 341). [1497] Sire, recepvés a mercy La deprecation humile De Zenon, tres saige entre ung mille (MICHEL, Myst. Pass. J., 1486, 257).
 

DMF 2020 - MAJ 2020 Robert Martin

 Article 9/19 
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     HUMILEMENT     
FEW IV 511b humilis
HUMILEMENT, adv.
[T-L : umile (umilement) ; GD : humilment ; GDC : humblement ; FEW IV, 511b : humilis]

"Avec humilité" : Je cognois ma deloyaulté Et ma tres deshonnete vie Don humilemant te supplie S'il toy plait que tu me pardonne (OUDIN, St Genis M.S., c.1490, 66).

REM. Ex. d'a. fr. et doc. 1393 (requerant humillemant) ds GDC IX, 775a. Cf. aussi GD IV, 527c (humeliement2).
 

DMF 2020 - MAJ 2020 Robert Martin

 Article 10/19 
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     HUMILIABLE     
FEW IV humilis
HUMILIABLE, adj.
[T-L : umelïable ; GD : humeliable ; FEW IV, 512a : humilis]

"Humble" : Unques du riche en hault levé N'eu la cause plus acceptable Que du povre homme humiliable Qui n'eut entour li fil de lange (Tomb. Chartr. Dix-huit contes K., c.1337-1339, 274). Soies courtois et amiables Envers tous et humiliables (JACQUES BRUYANT, Voie pauvreté richesse P., 1342, 17). Et le humble [var. humiliable] Jehan ne s'en couvrit oncques aultre fois [d'un manteau qu'il possédait], mais, tantost au matin, il fist vendre et donner le pris aux povres. (BATALLIER, Lég. dorée D.-L., 1476, 257). [Var. ds VIGNAY, ms BNF fr. 241, a.1348] Ce siege fut a ung des princes qui tresbucha et il est maintenant appareillé a l'umiliable [sans var. du ms. 241] François. (BATALLIER, Lég. dorée D.-L., 1476, 954). Mon bas service humiliable Ne vous est-il plus agréable ? (Myst. ste Barbe P., 1493, 31).

 

-

Humiliable à qqn. "Bienveillant envers qqn" : Soyez aussi, sans estre varïable, Cruel aux fiers, aux doulx humilïable (LA VIGNE, S.M., 1496, 174).
 

DMF 2020 - Synthèse Robert Martin

 Article 11/19 
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     HUMILIABLEMENT     
FEW IV humilis
HUMILIABLEMENT, adv.
[GD : humeliablement ; FEW IV, 512a : humilis]

"Avec humilité, humblement" : Et quant l'annee fut passee et le jour de la cene vint, il prist le corps de Nostre Seigneur et vint jusques a la rive du fleuve Jourdain et vit celle femme qui estoit sur l'autre rive. Et fist le signe de la croix et vint par dessus l'eaue a l'omme ancien. Et quant il vit ce, il s'esbait et se agenoulla humiliablement aux piés d'icelle. (BATALLIER, Lég. dorée D.-L., 1476, 410). [Seul ex. ; VIGNAY, ms. BNF fr. 241, a.1348 : humblement]
 

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 Article 12/19 
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     HUMILIANCE     
FEW IV humilis
HUMILIANCE, subst. fém.
[T-L : umelïance ; GD : humeliance ; AND : humiliance ; FEW IV, 512a : humilis]

"Attitude humble, courtoise" : Mais Tristan a parlé par droite humilïance (Tristan Nant. S., c.1350, 467). [Autres ex. v.1358, 8111] Huëz s'agenoulla par grande humilïance (Hugues Capet Lab., c.1358, 110). Adont li dist par grande humilianche cuens Olivier qu[e]... (JEAN D'OUTREM., Myr. histors B.B., t.3, a.1400, 142). Et se Hulin a fait envers vous ygnorance, Voeullés lui pardonner par droitte humelïance (Huon Bordeaux B., c.1400-1450, 324). Hé ! Dieus, qu'à l'aprochier y ot grant humilianche ! (Geste ducs Bourg. K., c.1410-1419, 313).

REM. Percef. II, R., t.2, c.1450 [c.1340], 61/85.
 

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 Article 13/19 
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     HUMILIATÉ     
*FEW IV humilis
HUMILIATÉ, (?)
[GD : humiliaté ; *FEW IV, 511b : humilis]

"Humilité, signe de déférence" : Passez, faulx sorcier deshonneste ; Faictes ung humiliate (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 279). [Note : l. humiliaté ; leçon Faictes cy l'umilïaté ds MICHEL, Myst. Pass. J., 1486, 326]

REM. Ou faut-il lire humilia te (lat., "humilie toi") ; Eccl. 3, 20 ; 18, 21. On notera cependant que GD IV, 529a, enregistre humiliatez, rimant avec inclinatez, ds Eloy Damerval (éd. 1507).
 

DMF 2020 - Lexique complémentaire 2007 Robert Martin

 Article 14/19 
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     HUMILIATION     
FEW IV humilis
HUMILIATION, subst. fém.
[GDC : humiliation ; AND : humiliaciun ; FEW IV, 512a : humilis ; TLF : IX, 986a : humiliation]

A. -

"Humilité, attitude de soumission" : Car il est certain au contraire que Dieu pour les pechiéz du peuple sueffre hypocrite regner et que c'est chose impossible que celi qui trop s'esjoïst en humiliacion de son peuple et trop orgueilleusement se eslieve en sa propre hautesce si doie joïr longuement de l'onneur du royaume. (FOUL., Policrat. B., V, 1372, 81). Blanchandin vit venir (...) Qui le rain d'olivier portoit en abandon, Signifiance estoit d'umiliacïon. Quant les François choisirent ceste lamentacion (Galien D.B., c.1400-1500, 31). A la treshaulte et excellente majesté des princes, à la treshonnouree magnificence des nobles, circonspection des clers et bonne industrie du peuple françois, Alain Charretier, humble secretaire du roy nostre sire et de mon tresredoubté seigneur monseigneur le regent, lointaing immitateur des orateurs, salut en crainte de Dieu, humiliacion soubz sa justice, cognoissance de ses jugemens et retourner a sa misericorde soubz la pointure de sa punicion. (CHART., Q. inv., 1422, 1). Vez me cy, vez me cy venu a toy, pour ce que tu m'as invoquiét. Tes larmes et le desir de ton ame, ton humiliacion et la contricion de ton cuer me ont encliné et amené a toy. (Internele consol. P., 1447, 133). Je douray a Dieu penitance, contricion de cuer, humiliacion et abstinence et maintes manieres de labours de corps, misericorde en donnant et pardonnant, et vraie obbeissance. (CRAP., Cur Deus, De arrha B.H., c.1450-1460, 196).

 

Rem. STAVELOT, Chron. B., a.1447, 466.

 

-

P. méton. au plur. "Ce qui humilie" : Tu dois volentiers emprendre toutes choses pour l'amour de Dieu, c'est assavoir labeurs et doleurs, temptacions, vexacions, anxietés, necessitez, enfermetez, injures, obloquucions, reprehensions, humiliacions, confusions, corrections et despections. (Internele consol. P., 1447, 174).

B. -

ASTR. [À propos d'une planète] "Fait de descendre au plus bas degré de son orbite par rapport à la terre, périgée" : ...et les livres de Jehan Mansur Des retrogradacions et humiliacions et ung livre nommé en arabicq Asselcoc et ung autre livre, contenant les utilités de astrologie en vers (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 79 v°).

 

Rem. Pour la déf., cf. A. Le Boeuffle, Astr., 1987, 151, humilitas ; sens absent des dict. ; à rattacher à FEW IV, 512a : humilis.
 

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 Article 15/19 
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     HUMILIEMENT     
*FEW IV humilis
HUMILIEMENT, subst. masc.
[T-L : umelïement ; GD : humeliement1 ; AND : humiliement ; *FEW IV, 512a : humilis]

"Humiliation" : Fortune, qui Meduse avoit encroee en treshault degré de sa roe, deschevilla lors celle roe et consenty la prudence de Perseus estre cause de son humiliement. (LEFÈVRE (R.), Hist. Troyes A., c.1464, 241).
 

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 Article 16/19 
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     HUMILIER     
FEW IV 511b humilis
HUMILIER, verbe
[T-L : umelïer ; GD : humelier/humeliant ; AND : humilier ; DÉCT : umelïant ; FEW IV, 511b : humilis]

A. -

Au propre "Mettre au niveau du sol, s'approcher du sol"

 

1.

Empl. pronom. "S'incliner, se baisser" : Or ça ! Rommain, entens a moy : Il fault que ton corps s'umilie, A celle fin que je te lye Bien estroit en ycelle estache. (Myst. st Laur. S.W., 1499, 237).

 

-

[Dans un contexte métaph.] : La porte par qui on entre en vie beneureuse est petite, estroicte et penible, et se fault bessier, humilier et courber ses membres en mesaise, et en angoisse. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 26).

 

-

(Venir) s'humilier (contre/envers/vers qqn.). "S'incliner devant qqn en signe de déférence" : Et lors entra le roy ou Cruq et vint au chastel et la descendy, lui et la compaingnie. Lors monterent en la sale. Et Florie, qui moult desiroit leur venue, leur vint a l'encontre et se humilia moult contre son pere. Et le roy lui dist : Ma fille, faictes feste a ces nobles gens, et les bienviengniez, et especiaument au frere du mary de ma niepce de Chippre, vostre cousin. Et quant la pucelle l'ouy, si en fu moult liee. (ARRAS, c.1392-1393, 126). Si respondi en li humeliant : "Tres chiers sires, je ferai a mon pooir loiaument tout ce que vous me conmanderés...." (FROISS., Chron. D., p.1400, 599). ...et, environ V heures après midy, [le duc de Bourgoingne] entra dedens la barriere, où ledit Dauphin et ses gens estoient retrais, et, en entrant, se humilia moult envers ledit Dauphin et lui fist la reverence qu'il appartenoit. (FAUQ., I, 1417-1420, 317). Et le bon comte, qui se humilia jusques en terre, dist... (Percef. III, R., t.3, c.1450 [c.1340], 188). Et quant Troÿlus vey la dame de sy bel acoeil, il se humilia vers elle. (Percef. III, R., t.3, c.1450 [c.1340], 229). BAUDRICOURT [à Jeanne d'Arc]. Desplaisant suis pour le voir dire, Dont vous ay esté estrangier ; Vers vous me viens humilier. (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 354).

 

.

[D'un animal] : Le lyon vint s'umelyer Droit au Chevalier au Lyon (Dame Lycorne G., c.1349-1350, 301). ...du lyon qui se humilie envers vous m'esmerveille ung pou, sy vous requiers par la foy que vous devez a chevalerie que vous me dictes qui filz vous estes. (Percef. II, R., t.2, c.1450 [c.1340], 80).

 

.

[Devant les faux dieux, en signe d'adoration, de soumission] : L'EMPEREUR. Adrien, chevalier chetif, Revien toy et sy t'umilie Vers nos dieux, et celle folie Que tu tien laisse aval corir (Myst. st Adr. P., c.1450-1485, 127). [Sy] sont faulx qui les sacrifient, [Et] qui envers eulx [les faux dieux] se humilient. (Mart. st Pierre st Paul, fragm. Anholt R., c.1480-1500, 204).

 

-

Au fig. [D'une chose abstr.] "Baisser, diminuer" : Fay nous tous deux ensemble convenir ! Tantost l'ardeur de nous se humiliera, Et nous verras en santé revenir ; Tollerable lors nostre ardeur sera. (SAINT-GELAIS, Eurial. Lucr. R., c.1490, 107).

 

-

Part. passé en empl. adj. [D'une chose abstr.] "Penché, incliné" : ...nous vous avons tant et si loyalment servy que nostre arme est humiliee jusques a la pouldre, et nostre ventre est conglutiné jusques a la terre (JUV. URS., Loquar, 1440, 320).

 

2.

Empl. trans.

 

a)

Humilier qqn. "Saluer qqn avec déférence" : Ansinc fu con li rois le dist ; La beste nul samblant ne fist : Touz les ancline et humelie, Car fors a touz bien ne vost mie. (Renart contref. R.L., t.2, 1328-1342, 238).

 

-

Empl. factitif Humilier qqn vers qqn. "Faire incliner qqn devant qqn en signe de déférence" : LE PERE [à son fils]. (...) Cecy te dis comme a mon famillier : Vers l'empereur te veulx humilïer Qui tost apprés te fera chevalier Comme je suis. (LA VIGNE, S.M., 1496, 164).

 

b)

Humilier qqc. "Rendre une chose plate et unie" : ...et oultre plus la mere de Dieu du dit plonc bien fondu, humilié et applati, fait couvrir les esglises de la foy catholique. (MÉZIÈRES, Vertu sacr. mar. W., c.1384-1389, 325).

 

-

Humilier un édifice. "Abattre, raser (un édifice)" : A .IIcXX. et .VIII. advint, De ce milliare et ces ans, La reprint Hellius Adrians Et la cité redifia L'année qu'il l'umilia. (DESCH., M.M., c.1385-1403, 364).

 

-

Humilier un végétal. "Abattre, couper (un végétal)" : [C'est le chêne d'une fable qui parle] Et, pour ce, pour le plus sceur, il me vault mieux les humilier [les ptits arbres] et copper avant qu'ilz soient plus grans et plus haulz affin qu'ilz ne m'empeschent ma gloire ne honneur. (COLART MANS., Dial. créat. R., 1482, 140).

B. -

Au fig. [Idée d'abaissement de la personne]

 

1.

Empl. intrans. ou pronom.

 

a)

"Se montrer plein de respect, de déférence, d'humilité (devant qqn)" : Mais l'aide de Dieu et la vostre m'en a gectee [des mains des Sarrasins], dont je vous mercie, quant vous avez daigné prendre pour moillier si mendite pucelle que je suis. Et quant Regnault oït qu'elle se humilie ainsi, si lui respont. Par ma foy, ma doulce amour, vous avez trop plus fait pour moy que je n'ay pour vous, quant vous me avez fait le don de vostre noble corps et herite de vostre noble royaume, et avecques moy n'avez rien prins que mon corps. (ARRAS, c.1392-1393, 192). ...la li dist li rois : "Biaus fils, Dieus vous doinst bonne perseverance ! Vous estes mon hiretier, car vous vos estes wi vaillanment portés et acquités." Li princes, a ceste parole, s'enclina tout bas, et se humelia en honnourant le roi son pere, ce fu raison. (FROISS., Chron. D., p.1400, 736). Je viens devers vous, chiere dame [Marie], Humilïant de corps et d'ame, Requerre mercy de l'offense Que j'ay fait a vostre ignocence (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 61). Escript l'ay [mon testament] l'an soixante et ung, Lors que le roy [Louis XI] me delivra De la dure prison de Mehun Et que vie me recouvra, Dont suis, tant que mon cueur vivra, Tenu vers luy m'usmilier, Ce que feray jusqu'il moura : Bienfait ne se doit oublier. (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 28).

 

-

Part. passé en empl. adj. [D'une chose abstr.] "Respectueux, très humble" : Si presente mon petit livre audit treshault et tresredouté duc de Bourgoingne, non presumant mon inelloquence, mais presentant mon humilié service indigne. (LEFÈVRE (R.), Hist. Jason P., c.1460, 125).

 

b)

"Rabaisser son orgueil" : D'un rude couart mal apris Fais un sage et venir a pris, Et si le fais cointe et appert - Chascuns le voit tout en apert. Et le sage fais foloier Et le plus riche humelier (MACH., F. am., c.1361, 208). C'est cilz qui trop doucement Scet un cuer et soutieument Penre et liier Et contraindre telement Qu'il le fait tres humblement Humilier. (MACH., Ch. bal., 1377, 628). ...et lors nous entendrons bien comment saint Pol sans faintise se humilioit d'une part et sans vanité se louoit d'autre part. (GERS., P. Paul, a.1394, 506). Venez doncques toutes a l'escole de Sapience, dames eslevees es haulx estaz, et n'aiez honte pour voz grandeurs de vous humilier et descendre a seoir bas pour ouïr noz lecçons (CHR. PIZ., Trois vertus W.H., c.1405, 10). SAINCT MARTIN. (...) dont par raison je dis Qu'elle debvroit, plus fort entre ung millier, De plus en plus tousjours s'umillïer Si encourir ne vouloit arrogance, Tresgrant orgueil et folle oultrecuydance, Ainsi que fit jadis Lucïabel (LA VIGNE, S.M., 1496, 340).

 

-

Inf. subst.

 

.

"Fait de s'abaisser" : ...ains ton humilier t'eust esté exaltation, ton tort recongnoistre victoire mesmes en ta querelle, et ton requerir paix a qui estoit ton tout leal humble t'eust procuré tiltre certes plus glorieux que d'empire. (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 305).

 

-

[Point de vue religieux] "Prendre conscience de la faiblesse et de l'insuffisance de la créature humaine et se soumettre à Dieu" : On pourroit aussi dire que quant ly hons entend et considere bien sa nature et son estre, il se treuve estre fraille, miserable et mortel, come il a esté dit, et ceste congnoissance le fait humilier et entendre a vertu et a bonne oeuvre, qui est le droit chemin pour avenir au ciel et a Dieu. (EVR. CONTY, Eschez amour. mor. G.-T.R., c.1400, 298). Doncques a bonne cause nous nous devons humilier, et de nous non sentir oncques aucune chose de grant, puisque nous sommes tant frailes et instables. (Internele consol. P., 1447, 337). Certes lame [l. l'ame] raisonnable ne peult auoir plus conuenable moyen a soy humilier que par se congnoistre en verite [l. verité] et sans fiction, dissimulacion ou excusacion. (CIB., p.1451, 197). Or ie te pry considere se tu ne te dois pas humilier en ceste vraie congnoissance de toy quant tu vois clerement ton ame chargee de pechiez, aggrauee de la pesanteur de ce corps mortel, intriquee et enlassee de cures et sollicitudes terriennes, infecte et corrompue de desirs charnelz (CIB., p.1451, 198). Et n'y a personne, quelque qu'elle soit, que tant ait fait grant peschié et delit que se elle se humilie et congnoisse son peschié en cryant mercy et requerant pardon, que il ne luy ottroye (JUV. URS., Exort., 1458, 416).

 

-

[Prov.] Humilié est qui s'exhausse et exhaussé qui s'humilie : Humiliez est qui s'essausse, Et qui s'umilie essaussiez. (MACH., R. Fort., c.1341, 9). C'est dit pardurable que qui se humilie, il sera essaucié et au contraire cil qui s'essaucera sera humilié et forment abaissié. (FOUL., Policrat., IV, 1372, 69). Venez donques toutes a l'escole de Sapience, dames eslevees es haulx estaz, et n'aiez honte pour voz grandeurs de vous humilier et descendre a seoir bas pour ouïr noz lecçons, car selon la parolle de Dieu, qui se humiliera sera exauciéz. (CHR. PIZ., Trois vertus W.H., c.1405, 10). ...Il [le moine] doit estre souffrant, humble, scient, Discipliné du maistre et corrigiet ; Qui se humilie enfin est exauchiet. (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 603).

 

-

[Sentence proche] Si tu veux estre exhaussé au ciel humilie toi au monde : Se tu veulz estre exaulciés ou ciel, humilie toy au monde. (Internele consol. P., 1447, 249).

 

.

[Parole évangélique] : Du second dist Nostre Seigneur ou .XVIIIe. chapitre des Euvangiles saint Mahieu : «Quiconques se humiliera comme che petit enfant, che sera ou roiaume de Paradis le plus grant». (DAUDIN, De la erudition H., c.1360-1380, 173).

 

.

Qui s'humilie Dieu l'honore : Qui s'umilie Dieu l'onnoure (Tomb. Chartr. Trois contes S., c.1337-1339, 97).

 

-

[De Dieu] "S'abaisser (jusqu'à devenir homme)" : Respon maintenant, païen, ceste demande : qui est plus possible, ou que Dieu tant puissant se humilie a estre homme, ou que homme impotent se exalte a estre Dieu ? (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 116). ...pour quoy premierement monstrer tu dois la solidité raisonnable, c'est assavoir que tu pourvoyes que par neccessité pour pecié se voult Dieu humilier a prendre corps humain. (CRAP., Cur Deus, De arrha B.H., c.1450-1460, 169). Et pourtant, quant nous disons Dieu soy humilier en nature humainne ou pouoir souffrir et cetera, nous ne entendons pas de sa sublimité de divine nature impassible, mais selon le enfermeté de nature humainne qu'il portoit (CRAP., Cur Deus, De arrha B.H., c.1450-1460, 173). Considere comme il se humilia Quant il voulut se faire a toy semblable, Puis avec toy me mist et m'y lia Et ton ame des enfers deslya Qui luy cousta ung prix inestimable. (MESCHIN., Lun. princes M.-G., c.1461-1465, 25).

 

.

S'humilier sous soi : Qui te meult a fayre a Dieu tant de injure comme de voulloir destruire par desesperance son oeuvre qu'il a fait pour esperer en lui ? Il s'est humilié soubz soy pour t'eslever sur toy. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 97).

 

c)

"Se soumettre"

 

-

[Devant Dieu] : Car sachiez Dieu ne despit mie Cuer contrit quant il s'umelie, Ains l'a moult chier. (Mir. mère pape, c.1355, 356). Car, en ce cas et en semblables, le premier reffuge est retourner à Dieu et penser si en riens on l'a offensé et se humilier devant luy et congnoistre ses mesfaictz, car c'est luy qui determine de telz procès sans ce qu'on luy puisse proposer nulle erreur. (COMM., II, 1489-1491, 129).

 

-

"Se soumettre, se rendre à un vainqueur" : Par ceste façon fu le roy Pricus mort, et sa cité prinse d'Herculès. Aprés la tuison, quant les Calidoniens se furent humiliés, Herculès et Theseus s'n alèrent au palais (LEFÈVRE (R.), Hist. Troyes A., c.1464, 423).

 

.

[Avec une nuance de déshonneur] : ...si comme par aventure, se un grant seigneur estoit pris et il se humilioit devant son adversaire pour paour de mort. (ORESME, E.A.C., c.1370, 177).

 

-

Part. passé en empl. adj. Coeur humilié. "Coeur qui se soumet à Dieu" : En la chappelle sanz attente De la vierge (...) M'en vois de cuer humelié Agenoiller, car folié Ay assez (Mir. parr., 1356, 30). ...dit le prophete que Dieu ne mesprisera point cuer contrit et humilié. (GERS., Déf., 1400, 225). Et veult dire oultre, comme Nostre-Seigneur soit tout bon et tout poissant et ne desprise le cuer humilié du vray repentant et depriant, soit toute nostre fiance en lui, car sa misericorde, qui ne puet faillir, durera par tous siecles. (CHR. PIZ., P.V.H., 1416-1418, 28). Et qui est chose qui tant empesche a avoir cuer humilié et devot, contrit et humble en oroison, comme est Plaisir mondain ? (GERS., Déf., 1400, 225). SATHAN. Pour en avoir deux ou troys millions, Ains que soit nuyt nous nous humylions Au grant conseil que present nous envoye ; Et pour monstrer noz grans rebellions, Comme affamez et enraigez lyons, Sans plus de plait nous nous mectons en voye. (LA VIGNE, S.M., 1496, 139).

 

d)

[D'une personne importante qui malgré ses prérogatives sait faire taire son orgueil (pour parvenir à un arrangement, pour éviter un conflit...)] : ...Soiez d'umilité en vostre cuer manbrans, Car plus est dame haute et com plus est poissans Plus doit ses cuers a tous humelïans (Brun de la Mont. M., c.1350-1400, 37). Trop à envis et à dur y descendi le roy de France tant avoit il pris la cose en grant despit. Toutes fois, à le priière dou conte de Haynau, son serourge, li rois s'umelia et donna et acorda triewes au duch de Braibant, parmi tant que li dus se mist dou tout en l'ordenance dou propre roy de France. (FROISS., Chron. L., I, c.1375-1400, 102). Li dus s'umelioit et escusoit ce qu'il pooit, car bien veoit et sentoit que il avoit en aucunes manières tort. (FROISS., Chron. R., X, c.1375-1400, 42). [Le roi de France s'arrête chez le duc de Bourgogne] Sy luy a fait [le duc], et comme raison veut, toute honneur et service, toute humble et joyeuse administration, comme qui plus grand ne pouvoit recevoir, ce savoit bien, ne personne à qui il fust plus tenu. Et partant, d'autant que ledit roy alors s'est plus humilié endevers son serviteur humble par luy monstrer cet honneur, d'autant a esté tenu mon très-redoubté seigneur de luy monstrer amiable, tout joyeux et humble service (CHASTELL., Chron. K., t.4, c.1456-1471, 49). "...Dont vous prie et supplie que pitié puist entrer en vostre cuer et que de moy ayez mercy." - "Jason," dist la dame, "il n'est cuer de dame si dur qui par vos requestes ne fust humilié. Vous m'avez lealment et bien servy, je le confesse. Vous me requerez que je soye vostre dame: plus grant chose ne me pouez demander..." (LEFÈVRE (R.), Hist. Jason P., c.1460, 163).

 

-

Prov. Qui plus vaut plus s'humilie : Jo sai qu'elle s'enclinera Tant que par amor t'amera, Ensi com jo t'ai devisé ; Car ele a sovent reguardé Ço qu'ele m'a dit mainte fie, Que qui plus vaut plus s'umelie. (Songe vert C., c.1348, 527).

 

-

Inf. subst. "Fait pour une personne importante de se montrer bienveillante, attentive avec qqn d'inférieur" : "Ma dame," respondy Jason, "je suis un povre chevalier aux monstres envoyé, vous me faittes plus d'honneur que jamais ne vous pourray desservir. Neantmoins, quant vostre piteable humilier se voeut encliner vers ma povreté, je vous jure par tous les noms des dieux que, se aulcune chose me descellés, tant comme je vive il ne partira de ma bouche." (LEFÈVRE (R.), Hist. Jason P., c.1460, 197).

 

-

[De la femme aimée] S'humilier (à/devers qqn). "Se montrer bienveillant, doux, docile avec qqn, abandonner de son indépendance pour qqn" : Et celle parçoit sa bonté, Se s'atrait a humilité Et dou tout a lui s'umelie. Einsi Amours leurs cuers alie, Tant qu'il ont par ceste aliance Li uns a l'autre grant fiance. (MACH., D. Aler., a.1349, 327). Or supposons qu'Amours me vueille aidier Et que pité se vueille amollier Et le franc cuer de ma dame changier : Comment sera ce ? Il n'affiert pas qu'a moy doie envoier Ne qu'envers moy se doie humilier, Einsois li doy humblement supplier D'avoir sa grace. (MACH., F. am., c.1361, 161). Et quant vous plaist de tant humilier Que la douçour de vo parler reçoy, Vous me tenez en si amoureus ploy Qu'autre après vous jamais avoir ne quier. (DESCH., Art dictier R., 1392, 283).

 

-

S'humilier de + inf. "Consentir avec humilité de" : Le chevalier luy respondit : "M'amye treschere, puisque vostre bonté se veult tant humilier que de moy offrir ce que je n'oseroie requerir sans tresgrand vergoigne, je vous remercie." (C.N.N., c.1456-1467, 546).

 

2.

Empl. trans. Humilier qqn./une institution.

 

a)

"Abaisser qqn, faire perdre son statut social à qqn" : Tant avoit richesse et puissance, Terres, fiez, honneur et avoir Que trop estoit de tant avoir. Pour ce li pueple l'aouroient Et toutes langues le doubtoient ; Tous ceus qu'il voloit eslever, Nuls homs ne leur pooit grever ; Ceaus qu'il voloit humelier, Il les metoit au pain prier, Et ceaus qu'il haoit jusqu'a mort, Il estoient en l'eure mort. (MACH., C. ami, 1357, 29). Car le venin et l'infection de civille discorde fut ordonné de Dieu pour reprimer l'orgueil dez haultesses mondaines, et affin que ceulx qui surmontoient lez autres si esleveement que nul autre mondain ne les peult humilier, fussent par eulx mesme reprimés en humilité soubz Dieu, et ramenés a congnoissance de leur fraelle puissance. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 80).

 

-

Part. passé en empl. subst. : ...ne te souvient il a ce propos que il est escript ou livre de Ecclesiaste, au .X. chapitre, si que tu as ouÿ dire a ton beau pere, que Dieux a destruit les sieges des ducs orgueilleux, et a fait seoir les debonnaires pour eulx, et sechié les racines des arogans et a planté les humiliéz en leur lieu : qui n'est autre chose a entendre ne mais qu'il confont les orgueilleux et exauce les humiliéz. (CHR. PIZ., Trois vertus W.H., c.1405, 19). Encore te puis je dyre pour une persuasion recevable que lez humiliez par perverse fortune ont souveraine occasion d'esperance, pour ce que entre les extremez perilz se nourrist et efforce la haultaine vertu, et souvent desespoir de salut a forcé nature et fortune a sauver les perissans. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 139). Pensons que le povoir de Dieu infini peult donner fin es fraelles puissances dez terriens orgueilleux, et ressoudre la foeblesse dez humiliez. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 146).

 

b)

Impugner/vaincre et humilier un adversaire "Attaquer/vaincre et soumettre un adversaire" : ...et par l'aide d'iceulx, de tout en tout, avoit entencion de impugner et humilier ledit duc de Bourgongne, ses favorables et compaignons. (MONSTRELET, Chron. D.-A., t.2, c.1425-1440, 460). Et ne furent point François tant seullement affectéz a la royne [d'Angleterre] ne a son parti pour la remettre en sa couronne perdue, mes partie aussi, et principalement, sur espoir de vaincre et humilier l'autre partie adverse, a qui on donnoit grace d'estre bourguignonne (CHASTELL., Chron. IV D., c.1461-1472, 277). Quelle chose povoye tu plus a mon tres grant deshonneur et vitupere perpetrer, que par l'ung de mes desloyaulx subjectz me faire agresser et assaillir en champ de bataillez, estre finablement humilié et vaincu soubz sa main forte ? (ANTITUS, Poés. P., c.1500, 66).

 

c)

[Point de vue chrétien] "Faire prendre conscience à qqn/à une institution de sa place, de sa faiblesse face à Dieu" : Dame, ce pecheur que remors De conscience tient et lie Et devant t'ymage humelie, Si te plaist, en pitié regarde (Mir. pape, 1346, 376). "...Lors venront en place," dist la royne, "par la grace singuliere de mon Pere [c'est-à-dire Dieu], les beaux temps qui sont appellez dorez, quant les roys et princes seront reformez et l'eglise par soy mesmes sera humiliee, devote a mon Pere, et a Dieu dediee..." (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.2, c.1386-1389, 296). Secondement c'est pour nous humilier, pour humilier la fole presumpcion, le fol orgueil que prent personne humaine en ce monde, non contrestant qu'elle saiche bien, et doye scavoir, que tantost elle sera boutee en terre, et sa charoingne rongee de vers, et que en ceste langoreuse vie elle recoit peine, doleur, honte, afflictions, maladies et maleuretés sans nombre. (GERS., Noël, p.1404, 294). Se toutes tes miseres ne souffisent a toy humilier, regarde, je te prie, l'umilité de ton roy, de ton Dieu et ton Seigneur (GERS., Noël, p.1404, 295). Grant vtilite aussy est a soy congnoistre car telle science ne enfle point ains humilie la personne, et est aussy comme une preparacion a edificacion spirituelle (CIB., p.1451, 197).

 

-

"Abaisser (les orgueilleux)" : ...mais confie toy plus en la grace de Dieu qui aide les humbles et humilie ceulx qui se presument. (Internele consol. P., 1447, 286).

 

-

Empl. abs. "Abaisser l'orgueil (de quelqu'un)" : La tierche est humiliation a reprimer ou debouter l'enffleure du cuer, car plus humilie discipline recheue par aultrui que par soy meismes. (DAUDIN, De la erudition H., c.1360-1380, 203).

 

-

Humilier son cuer vers Dieu : Balthasar, tu qui es ses fils, N'as pas ton cuer, j'en sui tous fis, Encliné et humilié Humblement ne amolié Vers le souverein roy celestre Qui est dou ciel seigneur et mestre De l'air, de la mer, de la terre, Et de quanque la nue enserre (MACH., C. ami, 1357, 30). Qu'adès croistera l'ardour Qui sejour Fait en moy sans departie, Se ma dame de valour Que j'aour Vers moy son cuer n'humelie, Tant que s'amour qui me lie Soit onnie à tous fors à moy qui plour Pour doubte que ne m'oublie. (MACH., Ch. bal., 1377, 608).

 

-

Humilier son intelligence. "Faire taire son orgueil pour entendre la vérité de Dieu" : Ilz [les Juifs] ont descongnu le Sauveur, et si dient qu'ilz attendent Messias. Ilz esperent ce qui ja est advenu, et mescroient ce qui leur advendra. Pour quoy le desirent ilz quant ilz l'ont refusé, ne comment attendent ilz la venue de celui qu'ilz ont mesprisé venu ? Leur esperance est evacuee, et leur creance vaine, pour ce qu'ilz n'ont voulu humilier leur sens en vray entendement dez Escriptures. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 106).

 

-

[Sentence] Humilié est qui s'exhausse et exhaussé qui s'humilie : Humiliez est qui s'essausse, Et qui s'umilie essaussiez. (MACH., R. Fort., c.1341, 9). C'est dit pardurable que qui se humilie, il sera essaucié et au contraire cil qui s'essaucera sera humilié et forment abaissié. (FOUL., Policrat., IV, 1372, 69).

 

-

[En amour] Humilier son coeur vers qqn. "Rendre son coeur plus accessible, plus attentif, plus bienveillant" : Qu'adès croistera l'ardour Qui sejour Fait en moy sans departie, Se ma dame de valour Que j'aour Vers moy son cuer n'humelie, Tant que s'amour qui me lie Soit onnie à tous fors à moy qui plour Pour doubte que ne m'oublie. (MACH., Ch. bal., 1377, 608).
 

DMF 2020 - MAJ 2020 Pierre Cromer

 Article 17/19 
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     HUMILIEUX     
FEW IV humilis
HUMILIEUX, adj.
[T-L : umelïos ; GD : humelieus ; FEW IV, 511b : humilis]

"Plein d'humilité, humble" : Tele gent en sa compaignie Desirre avoir l'umble Marie ; Ne d'orgueileus ne d'orgueileuse N'a que faire l'umilïeuse. (Propr. choses Rosarius Z.S., c.1330, 76). [C'est Ypocrisie qui parle] Ce mantel pas seule ne vest (..). Pesresce en est viguereuse, Et (je) m'en fais humilieuse (GUILL. DIGULL., Pèler. vie hum. S., c.1330-1331, 251). [T-L XI, 42]
 

DMF 2020 - Lexique complémentaire 2007 Robert Martin

 Article 18/19 
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     HUMILIR     
*FEW IV humilis
HUMILIR, verbe
[T-L : umelir ; *FEW IV, 511b : humilis]

"Humilier" : ...s'il a esté de vie deshonneste et dissolue, il vive des oresmais atrempement ; s'il a esté orgueilleux, qu'il s'umilice (COURTECUISSE, Serm. D., 1397-1418, 171).
 

DMF 2020 - Lexique complémentaire 2007 Robert Martin

 Article 19/19 
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     HUMILITÉ     
FEW IV humilis
HUMILITÉ, subst. fém.
[T-L : umelité ; GD : humelité ; GDC : humilité ; AND : humilité ; DÉCT : umelité ; FEW IV, 511b : humilis ; TLF : IX, 987b : humilité]

A. -

[Domaine des attitudes, des manières d'être] "Abaissement volontaire, renoncement à l'orgueil, attitude de réserve, de retenue..."

 

1.

"Grande déférence, respect ; soumission"

 

-

En humilité. "Avec déférence" : ...on escriproit de par la Court et la Ville au roy d'Angleterre et au duc de Bourgoingne en humilité pour les advertir d'aucuns perilz et inconveniens qui pourroient avenir (FAUQ., I, 1417-1420, 374). Tousjours aura sa main a ferir estendue, tant que son peuple ait retourné sa face vers lui en humilité. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 75). ...après ce que luy eust esté dit par la bouche du premier president ce qui avoit esté deliberé d'estre dit en reverence et en humilité (FAUQ., III, 1431-1435, 26). ...je dessus nommé, en humilité, soubz correction et en reverence, ay voulu translater de latin en françois les fais du premeir preux de la loy des payens, qui fut nommé Hector de Troye, et de toute sa lignee, à la gloire et exaltatcion du piteux, eureux, noble (...) trespuissant, tresexcellent et trés chrestien seigneur, prince et gouverneur Charles VIIe roy de France (MILET, Épître épilogative, éd. M.-R. Jung, 1452. In : Trav. Ling. Litt. 16-1, 1978, 252). ...puis que (...) aultre presentement ne nous peut relever de ceste charge, nous vous supplions en toute humilité qu'en vostre benigne supportance il vous plaise parer et couvrir la rudesse de noz termes et manieres de parler (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 174). Leurs anciens termes et façons de parler estoient bien changéz, car ilz parloient bien bas et en grant humilité : non pas que je vueille dire que, le temps passé, eussent plus arrogamment parlé qu'ilz ne deüssent, mais est vray que du temps que je y estoye ilz se sentoient si fors qu'ilz ne parloient point au roy ny du roy en telle reverence qu'ilz ont faict depuis. (COMM., II, 1489-1491, 165). Et pour certaine et seure reverence, On luy porta les clefz par bon stille, Signifiant qu'il soubmettoyent la ville Totalement a son obeyssance, En luy offrant de tres singulier cueur Le cueur, les biens de toute la cité Pour le servir en toute humilité, Et qu'il luy pleust estre leur protecteur. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 197).

 

-

Faire humilité (et obeissance) à qqn. "S'abaisser devant qqn, se soumettre à qqn" : Je n'ay obeÿ nullement Ne a voisin ne a parent ; Humilité a nul ne fis. (Renart contref. R.L., t.2, 1328-1342, 6). Or s'estoient souffert vaincre ceux d'Utrecht et avoient conclu de faire humilité et obéissance au duc et à leur evesque David, et leur avoit-on dit les points et les articles sur lesquels le duc seroit content d'eux, mais qu'ils les accomplissent. (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 135).

 

-

Au plur. "Marques de déférence" : Dont, pour faire brief compe, nul ne pourroit croire les humilitez que les .II. jennes chevaliers firent au roy (Percef. III, R., t.3, c.1450 [c.1340], 33). En demonstrant leurs grans humilitez Parmy Thurin, grandes solempnitez Furent requises et mises en avant, Franches repeues, grosses urbanitez, Recueil joyeux, doulces humanitez (LA VIGNE, V.N., p.1495, 160).

 

2.

[Point de vue chrétien] "Sentiment de la faiblesse et de l'insuffisance de notre nature humaine" : Soy congnoistre en temps et en lieu Humilité nourrist et gendre (DESCH., M.M., c.1385-1403, 206). Pensez a elles, non pas a moy, et enclinez voz chiefs en signe de humilité, et entendez que dit la mere a son enfant, ou chascun mort a son heritier ou executeur (GERS., Déf., 1400, 226). La second vertu est humilité, sans laquelle se toutes autres aviez, ne pourriez a Dieu plaire. (CHR. PIZ., Trois vertus W.H., c.1405, 167). O sainte mere Eglise, tu fus fondee sur humilité, qui est la premiere pierre de l'edifice de Jhesu Crist, et par humilité gardee soubz la cremeur de Dieu es eslevee en exaltation sur le monde. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 56). ...quant tu penseras sur la iustice de dieu quil [l. qu'il] excerce en homme pour la cause de pechie [l. pechié] ; et leueras ta pensee a mediter en humilite [l. humilité] lestat [l. l'estat] de nature humaine qui a este [l. esté] nauree de pechie [l. pechié] (CIB., p.1451, 187).

 

-

[L'humilité peut cacher une forme d'orgueil]

 

.

[Quand elle est excessive] : Et ailleurs : "trop grant humilité si est tres grant partie d'orgueil". (FOUL., Policrat., IV, 1372, 75).

 

.

[Quand la personne n'attend rien de la bienveillance de Dieu] : Je te dy plus : que celuy qui ne s'attent a l'aide et secours de la hault par humilité descongnoist par orgueil son impotence ça bas. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 152).

 

-

[L'abaissement de soi ne doit pas aller jusqu'à se blâmer soi-même] : Venons a l'umilité saint Pol, laquelle aucuns ont voulu tourner a vice ou a menconge, et disons voirement que on ne se doit point blasmer sans cause : ce seroit folie ou vanité pire aucunes foys que n'est de soy louer. (GERS., P. Paul, a.1394, 503).

 

-

Sotte humilité. "Humilité excessive" : Car aussi est a fuir abjeccion et sote humilité comme elacion d'orgueil desmesuré. (FOUL., Policrat., IV, 1372, 69).

 

-

[Pas de vertu sans humilité] : Mais je ose dire que, sans humilité, la virginité de Marie ne fust pas a Dieu esté plesant. (DAUDIN, De la erudition H., c.1360-1380, 394). Car qui vertuz en lui assemble Sanz humilité, il ressamble A celui qui la pouldre amasse Au vent, et le vent la detasse Et la gaste : c'est chose voire, Et ainsi le dit saint Gregoire (Mir. st Ign., 1366, 92). Huet, biau filz, je te diray Puis qu'a bien faire s'acoustume Et de voir dire a la coustume Jeunes homs, c'est m'opinion Qu'il ne peut qu'a perfeccion Ne viengne et de Dieu et du monde, Mais qu'orgueil en son cuer n'abonde, Si que, biau filz, je te conseil, De toy du tout met hors orgueil Et te fonde en humilité, Car c'est la garde en verité Des autres vertuz, ce me semble, Et qui vertuz sanz elle assemble, Il fait con celui qui au vent Porte pouldre, je te convent. (Mir. st J. Paulu, c.1372, 103). ...car nulle ne puelt estre vertu, se elle ne est acompaignié de humilité et de doulceur (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 12). Saint Pol doncques qui avoit a enseignier toutes vertuz et par especial humilité qui est le fondement, et sans laquelle tout le monceau des vertuz n'est que ung trebuchement et poudre au vent, ne pouoit il et devoit en soy monstrer ceste humilité ? (GERS., P. Paul, a.1394, 503). La second vertu est humilité, sans laquelle se toutes autres aviez, ne pourriez a Dieu plaire. (CHR. PIZ., Trois vertus W.H., c.1405, 167).

 

-

Au plur. "Actes d'abaissement, humiliations consenties" : ...elle [Sarah] en laissa son lit et le soulaz de son mary, et luy bailla Agar sa chamberiere et la fist dame [pour qu'elle donne un enfant à son mari], et elle treshumblement devint serviteresse et humble servant ; sans les autres debonneretez et humilitez cy dessus escriptes, et lesquelles je laisse pour ce qu'il me semble que ce seroit trop longue recitacion. (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 62).

 

-

[Du Christ] Temps d'humilité. "Temps de la vie terrestre (du Christ)" : Le chevalier distingue deux temps lezquelx furent en Jhesuchrist : le temps d'umilité et le temps de sa gloire (...) J'ay aultre fois, es Sains Docteurs de la Divine Escripture, leü que nous devons considerer et distinguer deux temps en Jhesuchrist, c'est assavoir le temps de humilité et le temps de sa puissance. Le temps de humilité dura juques a sa Sainte Passion. Le temps de sa puissance fust aprés sa Passion (Songe verg. S., t.1, 1378, 25). ...et devés cognoistre et confesser verité, que le vicaire de Dieu a seulement la puissance que Jhesuchrist exerça en l'estat et ou temps de humilité. (Songe verg. S., t.1, 1378, 27).

 

3.

[Chez des personnages importants, chez des personnes qui ont un certain pouvoir sur d'autres] "Vertu qui fait qu'on oublie ses prérogatives, le sentiment de sa valeur au profit d'autre chose (le pardon, l'indulgence, le compromis...)" : BLANCHEFLOUR. (...) Soiez plaine d'umilité, Fille, quant vous serez royne, Et envers touz doulce et benigne (Mir. Berthe, c.1373, 160). Mes qei me fait si hardy qe jeo osasse un soule foize penser et desirrer si haute chose ? Certes, beau douz Meistres, vostre grande humilité (HENRI LANC., Seyntz medicines A., 1354, 132). Ce furent les deux princes, en mon temps, de humilité et de larguesce et de bonté, sans nul mauvaix malice, qui sont le plus à recommander, car ilz vivoient largement et honnestement du leur, sans grever ne travaillier leur peuple, ne de mettre nulles mauvaises ordonnances ne coustumes en leurs terres. (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 159). Ouvrés de humelité: prenés la ville et le chastiel, et donnés tout le demorant congiet. (FROISS., Chron. D., p.1400, 840). Plus parlasse de ceste matiere, mais, comme en mon livre, que je intitulay Du Chemin de long estude, ay assez longuement dit et traittié de humilité, qui en bon prince doit estre, n'en diray plus à ceste fois. (CHR. PIZ., Faits meurs Ch. V, S., I, 1404, 74). Secondement que les povres ne doyvent point avoir de honte de leur povreté, ne les riches orgueil de leurs richesses : on puet bien tenir estat mais que ce soit par mesure et humilité et sans autruy injure. (GERS., Noël, p.1404, 296). ...mon dit songe, rudement et mains soufisaument conceü, represente tres humblement a Vostre Royal Majesté. Car, en verité, la fiance que j'ai de vostre humilité pour suppleer, de vostre noblesce pour excuser, de vostre subtiveté pour corriger, m'ont doné cuer et hardement de cest euvre enconmancer et aconplir (Songe verg. S., t.1, 1378, 10). Si vous requier par desir curïeux: Fuyez rappors faulx et suspicïeux ; Querez moyens doulz et concordïeux ; Vainquez rigour par vostre humilité ; Laissez aigreur et faiz contencïeux, Orgueil, fierté, vouloir ambicïeux (CHART., L. Paix, a.1426, 419). Il a renversé et evacué la mortel esperance et la vaine gloire temporeille de ceste vie, pour quoy lez autres se occioyent, et presché humilité et mespris de soy mesmez, et constance en infortune, pour exausser nostre esperance par dessus tout guerdon mortel, et plus hault que terrien honneur. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 99). ...Octovien Auguste fust en humilité le plus de tous les aultres qui oncques avoient esté (LA SALE, Sale D., 1451, 21). Estant Saintré en la grace du roy, de la royne, des Seigneurs et de Madame, et de tous autres, pour abregier, le plus amé, le plus honnoré escuier de France a cause de sa grant doulceur et humilité, et aussi de sa largesse, qui aide bien au jeu. (LA SALE, J.S., 1456, 187). Et luy feïst le roy obedience filialle en toute humilité que roy sauroit faire. (COMM., III, 1495-1498, 90). CHANTRE. En sa personne [de Saint Martin] humilité Avec paix et doulce concorde Se nourrist par transquillité : Pour quoy ma voix je luy acorde. (LA VIGNE, S.M., 1496, 396).

 

-

"Vertu qui consiste à se montrer bienveillant envers ceux qui sont inférieurs ou à se considérer comme leur égal" : ...aux plus grans estre subget par cremeur, aux samblables servir par charité, aux mendres estre samblables par humilité (DAUDIN, De la erudition H., c.1360-1380, 275).

 

.

[Vertu évangélique] : Et de humilité est dit : «Se chaschun ne se fait humble comme che enfant, il n'enterra ja ou royaume des chieulx». (DAUDIN, De la erudition H., c.1360-1380, 394).

 

-

[Sentence] Orgueil ne monta onques, mais humilité vainc avec belle raison : ...Car orgueil ne monta oncques, se me dit on, Mais humilité vaint avec belle raison (CUVELIER, Chans. Guescl. F., c.1380-1385, 421).

 

-

[À propos d'un être céleste] : Vierge, par vostre humilité, Secourez le, damme honnorée. (Mir. enf. diable, c.1339, 45). ...Tresdoulce vierge debonnaire De vraie humilité sejour. (Mir. nonne, 1345, 325). Quiconques donques aime le degré de propre hautesce si s'estudie tresdiligeaument de garder en ses meurs la souveraineté de vraie humilité. (FOUL., Policrat., IV, 1372, 69). Mais ceste trinité Est en eternité, En possibilité Et en toute autre chose, En scens, en qualité, En gloire, en verité, Une seule unité En Dieu le Pere enclose, Qui par douce pité, Par vraie humilité Nous ha tous respité, Quant en toy, douce rose, Prist nostre humanité Li Fils par amité. (MACH., Les lays, 1377, 409). Pour ce pri la trinité Et la dame d'umilité Qu'ilz me vueillent tel sens donner Qu'un livre puisse composer Qui soit d'aucune utilité (CH. D'ORLÉANS, L. péché C., 1404, 545). Pour ce voult la haultesse du Sauveur se apparoir en humilité et enseigner benignement, non pas forsablement, a le craindre. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 126). Et se les catholiquez treuvent que Dieu pardurable ait voulu soy faire homme pour homme sauver, ceste creance n'est pas derroguer a sa majesté, ains est exaulcer et glorifier son humilité et sa clemence. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 129). O roy des cieulx, ou roy de gloire, O puissant roy de magesté, Sire, vueilles avoir memoire De moy par ton humilité. (RÉGN., F.A., 1432-c.1465, 15).

 

4.

"Réserve, modestie, bienveillance, absence de prétention... (qualité appréciée chez la personne aimée)" : Et vraiement bien dire puis Que d'umblesse est fonteinne et puis ; Qu'onques turtre ne turterelle, Aingnaus, coulons, ne coulombelle, Damoiselle, ne pucelette Ne pot estre d'orgueil plus nette, Ne plus pleinne d'umilité, Acompaingnie de pité, En tous cas et en tous endrois, De li. (MACH., R. Fort., c.1341, 8). Et quant je me senti à ce mené, Par le pooir d'Amours qui tous cuers vaint, Que mi penser furent tout ordené En vous, ma dame, en qui tous mes corps maint, Je, confians de vostre humilité, D'ardant desir fort espris et contraint, à vous servir de bonne volenté M'offri, dame, moult de paour attaint. (MACH., Les lays, 1377, 468). Haa, Melusigne, dist Remond, dame de qui tout le monde disoit bien, or vous ay je perdue sans fin. Or ay je perdu joye a tousjours mais. Or ay je perdu beauté, bonté, doulcour, amistié, sens, courtoisie, charité, humilité, toute ma joye, tout mon confort, toute m'esperance, tout mon eur, mon bien, mon pris, ma vaillance, car tant pou d'onneur que Dieu m'avoit prestee me venoit de vous, ma doulce amour. (ARRAS, c.1392-1393, 243). Pour nous est bien tournez li plais Quant la pastoure Griseldiz, Qui tant fu en faiz et en diz Plaine de simple humilité, Et qui adez en charité Nous a tenue compaignie, A de meurs esté enseignie, Tant que par sa benignité Est advenue dignité D'estre marquise de Saluce. (Gris., 1395, 43). ...tout aussi tost qu'il me souvient de la grant beaulté, genteté, humilité et amiableté qui sont en elle, le corps me tressue de paine et de desir que j'ay d'estre avecques elle (Percef. III, R., t.2, c.1450 [c.1340], 105). ...un vray amoreux (...) par ainsin bannira ce tres desplaisant et abhominable pechié d'orgueil et toutes ses circonstances, et se compaignera de la tres doulce vertu de humilité, dont par ainsin il sera de pechié quicte et sauvé. (LA SALE, J.S., 1456, 18).

 

-

P. personnif. : Qui sont la gent qui dames gardent Et qui le vray amant resgardent En trés tous ses amoureus fais, Et li merissent ses biens fais ? C'est Amours tout premierement, Et Raison qui est hautement Trés tout decoste li assise, Grace, Pais, Honneur et Franchise, Mesure, Foy et Verité, Attemprance et Humilité, Et tant qu'on ne les puet nombrer, Qui trop ne s'en vuet encombrer. (MACH., D. Aler., a.1349, 323).

 

5.

"Réserve, retenue (dans le domaine intellectuel, dans les questions relatives à la foi catholique)" : ...soubz le voile de humilité et de la reverence de Dieu il imposent as choses une necessité faite et destinee, doubtans que par aventure sa disposition ne soit evacuee se la necessité de la venue des choses ne l'acompaigne. Aprés il se eslievent contre le privilege de la majesté divine quant il se dient avoir la science par la quelle il cognoissent les temps et momens par avant qu'il viengnent (FOUL., Policrat. B., II, 1372, 166). Et tout ce je di et met sans affermer a grant humilité et cremeur de cuer, salve tousjours la majesté de la foy catholique, et pour reprimer la curiosité ou presompcion d'aucuns qui, par aventure, la voudroient calumpnier ou impugner ou trop avant enquerir a leur confusion (ORESME, C.M., c.1377, 730). Veons en la parfin le miracle d'umilité en la matiere de la foy ou l'entendement se soubmet du tout en tout a elle, tant saiche et juge que c'est au-dessus tout son jugement de raison naturelle, et pour telles apparences quelconques ne se muet mu[e]t au contraire, supposé que l'entendement saiche bien que les raisons faictes pour la foy ne sont en riens cleres ou evidens et moins que les contraires, et si les croit plus fermement que principes ou veritez evidens par nature. (GERS., P. Paul, a.1394, 505).

 

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Humilité de pensée : Lisent et relisent souvent, chercent et estudient es fables du livre de Charmych, que ilz ont compillé a bourdes contre lez crestiens, neantmoins en lisant se treuveront vivre meschans, et mourir dampnés, se par humilité de pensee ilz ne retournent a congnoistre la vraye esperance, et gouster le sens espirituel de la lettre plus que le charnel. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 109).

 

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Prov. Là où est humilité, là est sapience : Ceste science doit estre humble, non eslevee, autrement ne seroit ce pas vraie sapience, selon le dit de Salomon es Proverbes el .XIe. chapitre : «La ou est humilité, la est sapience». (DAUDIN, De la erudition H., c.1360-1380, 17).

B. -

"État d'infériorité, de médiocrité dans la hiérarchie sociale" : Comment que il soit de ceci, c'est tout certain que cestuy [Cn. Flavius, tribun du peuple, fils de libertin] se debati contumacement contre ceulx qui mesprisoient l'umilité de son estat (BERS., I, 9, c.1354-1359, 46.4, 86). ...et se bien y pensons devotement, il n'est si dur cueur, ne tant incredule, qui ne doye estre ravy en l'admiration du merveilleux mistere de crestienne foy, par qui humilité des prescheurs a surmontee la majesté des roys, les simples ydiotes ont confundu les subtiz philosophes, lez tendres vierges et lez fraelles fameletes ont vaincu la felonnie des tyrans, et la sapience du monde est tournee en desprisable follie. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 32).
 

DMF 2020 - Synthèse Pierre Cromer

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