A. -

"Fait d'être vigilant, de veiller, de guetter"

1.

"Vigilance" : S'il [le lièvre ]] sent les chiens, lors s'en fuit sur les haulx, Dont sa vie est par son aguet sauvée ; Mais homs qui voit s'aveugle et se desrée Quant a touz maulx par son vouloir se lie (DESCH., Oeuvres Q., t.6, c.1370-1407, 5).

-

Gens d'aguet. "Gens capables d'exécuter une mission de surveillance, en utilisant tous les moyens" : Il nous fault trouver gens de taille, Gens adventureulx, gens d'aguet Pour faire jour et nuyt le guet Autour du sepulcre. (MICHEL, Myst. Pass. J., 1486, 438).

2.

Loc.

a)

Loc. adv. En/à aguet

-

Estre en/à aguet. "Être aux aguets, à l'affût (pour surveiller ou pour surprendre)" : Soiez tous en agait en la salle pavee ; Ce je corne ceu cor a moult haulte allenee, Si me venez aidier san nulle demouree. (Lion Bourges K.P.F., c.1350, 896). Aultrement convient faire au respondant contre le curieux inquisiteur ou demandeur, aultrement contre chelui qui est en aguet ou qui veult tempter ou qui est faulx accuseur, aultrement contre chelui qui enquiert verité, autrement contre le heretique et decepveur. (DAUDIN, De la erudition H., c.1360-1380, 152). Geronnet et les siens estoient toudis à agait à l'uis de l'ostel de la Couronne, pour savoir quant le gait retourneroit (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 209). Et ainsi qu'il vaucroit par la marine et cuidoit bien estre eschappez du peril des mains des crestiens ; mais de ce que fol pense la plus grant part en demeure le plus de foiz ; car le grant maistre de Rodes estoit en aguet sur la mer, o tout ses gens et ses galees. (ARRAS, c.1392-1393, 139). ...Dangier, Reffus, Jalouzie, les mesdisans, Honte et Crainte estoient tous leans en aguet et (...) ilz se fordoubtoient (...) de leur venue. (RENÉ D'ANJOU, Cuer am. espris W., 1457, 187). Plaisant, beau filz, et vous, Muget. Partons nous, soions en aguet. Allons recouvrer ceste perte. (MOLINET, Myst. st Quentin C., c.1482, 272).

.

[D'un bateau] : ...ne il n'estoit vaissel de Sarrasins, (...) qui tantost ne fust happez par ces galees qui tous jours estoient en agait (Bouciquaut L., 1406-1409, 153).

.

[D'un animal] : En grant agait sus les chemins Estoit [le milan] [,]a fin(,) quant pelerins Passoient, tantost assifloit Et aval descendre faisoit Touz les escouflaus des .III. nis (GUILL. DIGULL., Pèler. J.-C. S., 1358, 148).

.

En partic. "Être moralement vigilant, être sur ses gardes" : La mort nous vient soudainement, Si devrions estre en aguet De conscience et tous jours net (DESCH., Oeuvres Q., t.2, c.1370-1407, 275).

.

Estre en aguet de + inf. "Être prêt à" : Adont ilz nous commanderent monter sur ces chevaux et de les vous amener en vous certiffiant de par eulx qu'en ceste nuit ilz prenderont ceste place, ou ilz morront en la paine ; si soiez en aguet d'entrer en la porte quant il vous appelleront. (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 258).

b)

Loc. verb.

-

Aller d'aguet. "Avancer avec précaution" : Item, au Chevalier du guet, Le Hëaulme luy establis, Et aux pietons qui vont d'aguet Tastonnans par ces establis, Je leur laissë ung beau riblis, la Lanterne a la Pierre au Let, Voire, mes j'aray les Troys Lis, S'ilz me mainent en Chastellet. (VILLON, Lais R.H., c.1456-1457, 20).

-

Avoir l'aguet (sur qqc.). "Guetter qqc." : Et certes, à ce ne faudrez, si vous continuez en ceste erreur ; car on y a l'agguet dessus plus d'en cent lieux, par envye, là où riens ne vous pourra nuyre si vous vous tenez bien ensemble. (CHASTELL., Chron. K., t.4, c.1456-1471, 330).

-

Faire l'aguet. "Faire le guet, monter la garde" : Et faisoient les dits abellétriés le xaway toute la nuit au long des murs ; et mist on plusieurs soldoier au gaige. (AUBRION, Journal L., 1465, 6). ...sus chacune porte, XVJ hommes, pour warder et pour faire le xawait par nuit. (AUBRION, Journal L., 1473, 57).

-

Mettre (son) aguet (sur qqn). " L'épier, le guetter" : Et quant les galans voient une belle jeune fille mariee a ung tel homme ou a ung sotin et ilz voient que elle est jolie et goye, ilz mectent leur aguet, car ilz pensent bien qu'elle devroit mieulx y entendre que une aultre, qui a mari jeune et abille. (Quinze joies mar. R., c.1390-1410, 102). Et la premiere qui jadis les mist avant [les Evangiles des Quenouilles] fut une demiselle de village nommee Transeline, ja toute vielle et, comme l'en dist, jalouse de son mary bel et jenne sur qui maint aguet jour et nuit mettoit et maint preschement en vain lui presentoit. (Ev. Quen., II, c.1466-1474, 117).

-

Mettre ses yeux en aguet. "Les mettre en alerte" : Lors n'eus je talent de dormir, Car je mis mes yeus en agait Qui faisoient adès le gait (MACH., D. Aler., a.1349, 270).

-

Se mettre en aguet. "Être vigilant" : Maintez bonnes dames se mirent en agait sur le soir de la bataille aournees d'enchantemens pour sauver leurs amys, et je fus avec la Rouine Faee qui emmena le roy Perceforest (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 732).

-

Se tenir en aguet. "Guetter, se tenir à l'affût (pour observer ou surprendre)" : ...et toutdis nous nous tenrons sus èle etentre nos batailles en agait, pour veoir comment il se maintenront. (FROISS., Chron. L., VI, c.1375-1400, 122). En aguet se tient Bel Acueil, Et se par puissance, ou orgueil, Une foiz en ses mains te prent, Tu fineras piteusement Tes jours en la prison de Dueil (CH. D'ORLÉANS, Rond. C., 1443-1460, 502).

3.

P. méton.

a)

"Celui qui guette, sentinelle " : Or met aguetz, espïes et escoutes (CHART., D. Fort., 1412-1413, 185).

b)

"Groupe de gens qui font le guet, vont en reconnaissance ou montent en embuscade" : [Geronnet donne l'alerte] Tantost l'entendirent ceulx qui estoient en son agait (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 212). ...et devoient chevauchier en trois routes et en troix agais pour plus secretement faire leur emprise (FROISS., Chron. R., IX, c.1375-1400, 112). Alors l'aguet des chevaulx rommains et leurs pyons derriere eulx saillirent hors (LA SALE, Sale D., 1451, 187).

B. -

"Embuscade ; piège"

1.

Au sing.

a)

"Lieu où on se cache pour guetter ; embuscade, attaque surprise, guet-apens, piège" : LE LARRON. (...) J'estoie orains tout en ce point Con me veez en mon aguet. (Mir. march. larr., c.1349, 116). Puis que il n'y avoit bourc ne cité, tentes ne chevauchie qui peust soustenir la puissance rommainne ne resister a l'ost qui tant povoit en armes, touz les princes du paÿs ont eu leur conseil que il usassent contre les Rommainz d'aguais et d'embuches et de pourveoir d'aucun lieu couvenable se par aventure l'ost rommain s'allast esgaiant et s'espandist pour cause de proie et de pillier, si que il peust estre souspris. (BERS., I, 9, c.1354-1359, 31.6, 56). ...le cas qui est de très-mauvais fait appensé, de traïson et aguet de nuit et par force et hayne machinée de grant temps ; que freschement, c'est assavoir le lendemain du cas avenu, ladite Perrete se vint complaindre à justice de la force dessus dite (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 513). Jehan dist a noz barons : "Seingneur, je vous conduiray que nulz ne vous mefface." Ilz en vont jusques l'aga[i]t de IIIm hommez. Quant Jehan vint la, sy escrie noz barons : "Faux trahitours françoys, tous vous convient morir ! Vous ne veiréz maiz Charles, le vilhart sodoiant !" Respont Rollant : "Tu mens, faux trahitre !" Atant trait Durendal, sy broche vers Jehan, maiz il musat en bois : il savoit la voie. Et Aloris salt del agait a IIIm hommez sur noz barons (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 214). Et les convenoit (...) envoiier auqunes escoutes (...) pour savoir se chil archier faisoient nul agait ne asamblee. (FROISS., Chron. D., p.1400, 122). La ramille et li espinois espes empeschoient si les Rommains qu'ilz ne se pouoient plainement gaitier de leurs adversaires qui leur sailloient des agais ou ilz se fichoient quant ilz avoient fait leurs cours. (Faits Romains M., c.1400-1500, 263). ...Hanibal, par sa soultinetté, ochist en ung aguet deux tresvaillans conssulles de Romme (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 39). Et cheaz de Blise et de Hourle et de là entour issirent fours en eaux resiwant et cachant, tant qu'ilh vinrent sour ledit await ; et là oit belle skermuche, et y eut del partie de cheaz de Blise et de Hourle pris que mors le nombre de VIIxx et X. (STAVELOT, Chron. B., a.1447, 114). ...vous, ambassadeurs d'icellui seigneurs, vous estes tenus contens de mectre la congnoissance de ladicte prinse et aguet de chemin publique faiz ou royaulme devant mondict seigneur et pere et hors du royaulme. (Lettres Ch. VIII, P., Pièces justif., t.1, 1483, 368).

b)

"Vol à la sauvette" : Tous lesquelx, veues lesdites confessions, perseveracions et continuacions par lui faites, la multiplicacion d'iceulx larrecins et aguez par lui faiz, et l'estat d'icelli, furent d'oppinion que l'en ne le povoit espargnier qu'il ne feust excecuté comme larron, et qu'il estoit un très-fort larron. (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 39).

c)

Loc. En aguet

-

Estre en aguet. "Être posté en embuscade (avec des intentions hostiles)" : ...et que bon gait Face chascuns, car en agait Sont Sarrazins pour eaus destruire, S'il veoient leur queue luire. (MACH., P. Alex., p.1369, 96). Et en ce point le deable, quy jamais ne dort pour tant qu'il puist mal faire, se mist a l'ouvraige en aguillonnant un sien menistre qui estoit en aguet pour murdrir le vaillant comte. (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 170).

.

[D'un animal] : Car nous trouvons que l'ours est en aguet contre l'homme et le lyon se caiche affin qu'il ravisse l'omme. (ROB. HERL., Déb. fauc. lévr. H., c.1470-1500, 35). Les bestes que nous prenons, sont contraires et nuysibles, comme sont lyons, loups et autres bestes devant dictes, qui sont tousjours en aguet contre humaine nature (ROB. HERL., Déb. fauc. lévr. H., c.1470-1500, 38).

-

Mettre en aguet. "Placer en embuscade une personne, un animal" : ...aucuns leonceaux ravissans, mis en aguet pour esgrattiner le gardin et tourner l'arbre en hideuse gastine, voians ses hardies emprinses, retournerent en leurs duyeres, comme fort honteux et camus (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 246).

d)

Sans aguet. "Sans piège, sans risque" : De la parfaicte et bonne congnoissance, Qui tost aprés, sans aguet de desroy, On vit regner par grant benivolence Entre le pape et le vertüeux roy. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 232).

e)

Loc. verb.

-

Faire aguet (sur qqn). "Monter une embuscade (contre lui)" : ...le dit Martin fist pluseurs aguez sur le dit suppliant pour le tuer et mettre à mort, et finablement tant l'espia et aguetta que, un jour (...) ainsi que le dit suppliant cuidoit aler en sa marchandise, ycellui Martin (...) comme provocant et aggresseur, envay le dit suppliant (Doc. Poitou G., t.5, 1380, 129).

.

Faire faire un aguet. "Faire dresser une embuscade" : Or oiez de Gombert le traytour lanier : Pour le boin duc Herpin occire et detranchier Ait fait faire ung agait deden ung boix plennier. (Lion Bourges K.P.F., c.1350, 638).

-

Mettre embusche et aguet sur qqn. "Lui tendre un piège" : Sy entra le déable au coeur de cestui et lui donna volenté cruelle et la plus inhumaine des autres, et voulut ainsi la malheureuse aventure de tous deux, que ainsi que l'un plein de venin et du conseil de l'ennemy un jour avoit mis embusche et aguet sur l'autre (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 435).

-

CHASSE Traire à aguet. "Tirer (sur l'animal) en étant posté en embuscade, en prenant toutes les précautions pour ne pas être perçu" : Item, archier qui veut traire a aget doit querre les bestes a pié bien matin ou la relevee, a heure que bestes sont relevees, et doit aler tout seul, son arc en sa main, et doit aler contre le vent, de voie en voie, tout bellement, et doit aler les sentes couvertes parmi les fors ou il cuide miex trouver les bestes. (HENRI FERR., Modus et Ratio, Livre deduis T., c.1354-1377, 133). Et se doit tous jours tenir au dessous du vent, et doit avoir a la bouche un petit foullet pour couvrir son visage, et ainssi doit aprochier la beste a quoi l'en veut traire a aguet. (HENRI FERR., Modus et Ratio, Livre deduis T., c.1354-1377, 134).

f)

Prov. Pire est (r)encontre qu'aguet. "Quand on croit avoir échappé à un danger, il en survient un plus grand" : D'omme ne se doubtoient qui fust de mère vis. On eschape d'agait, mais encontres vault pis. (Baud. Sebourc B., t.2, c.1350, 218). "Baron," che dist Gaufer, "vous estes mi parent, Car j'ai, à che jour d'ui, par vous tous sauvement ; Mais s'à Nimaie vieng, je vous ai en couvent Que chascuns en ara .J. loïal païement !" Chil chevauchent à joie, ne se doubtent noient, Mais pis vault li encontres que li agais souvent. (Baud. Sebourc B., t.2, c.1350, 378). Pour c'on dit ung proverbe qui est bien a dobter : Aultretant d'un encontre que d'un agait paisser. (Lion Bourges K.P.F., c.1350, 363). Tremblés, mutins, mamelus et Liegois, Courés, vollés que bougons empennés, Tremblés, cités, villes, chasteaux et tois, Prenés exemple aux orguilleux Gantois, Comment ils sont riflés et ramonnés ; Ainsy serés des meures ramenés, Se riens avés venu de mal acquest : Aujourd'huy vault pis rencontre que aguet. (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 231).

Rem. Cf. J. Morawski, Prov. fr., 1925, n° 1635, 59.

2.

Au plur.

a)

"Piège, traquenard, embûche " : Temptez est homs par maintz aguez, Combien qu'il soit saillant et guez ; Mais le plus si sont decheü, Se Dieu me [l. ne] doint bonne vertu, Par bourdes et par fol semblant (Renart contref. R.L., t.2, 1328-1342, 78). Nulz aguetz ne sont si repot Com ceulx qui se voeullent tappir Soubz couverture de servir. (Renart contref. R.L., t.2, 1328-1342, 102). Et d'autre partie il sunt plus seurement et vivent plus sans peril que ne funt les autres ; car l'en ne fait pas contre eulz communelment agaes ne machinations ne il ne se estudient a faire fraudes et deceptions. (ORESME, Pol. Arist. M., c.1372-1374, 187). ...ilz ne fussent par les agais Des femmes prins, mors ou desers. (DESCH., M.M., c.1385-1403, 182). ...quans aguetz d'ennemis, dangiers des servans (...), ligues et riotes entre les siens, prince menant guerre est tenu d'escouter (CHART., Q. inv., 1422, 46). Et de ce dist Vallerius que la force punicque fut instruite des agaitz et trischeries d'Auffricque (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 48). Qui voeult eschever les aguets et perilz de son chat quant il est mascle, si lui coupe tout jus une paulme de sa queue ; car aprés que il a quatre ans, il pense nuyt et jour comment il pourra son maistre estrangler. (Ev. Quen., II, c.1466-1474, 137). Et combien que la fortune tournast contre luy, ce ne fut pas sa faulte d'emprandre ne de faire, et osa accomplir en sa personne ce que tant de princes abaient et menassent, et dont les ungs demeurent en negligence de la foy, pour leurs aises et delisses mondainnes et d'aultres pour leurs aguectz diaboliques, querans les pertuys et les voyes pour surprendre leurs voisins à la desmarche, pour les destruyre (LA MARCHE, Mém., I, c.1470, 200).

b)

En partic. "Piège tendu à l'homme par le diable" : ...que descendre Vostre grace faciez en my, Que des agaiz a l'ennemy Et des assaulx que tempre et tart Me fait souvent, vierge, me gart (Mir. st J. Paulu, c.1372, 95). Jhesus, qui tant souffris pour nous, je te requier pour la pitié dont regardas ta Mere quant lui baillas pour toy Saint Jehan a fils, disant, "Femme, voy ci ton fils," et au disciple, "Voy cy ta mere," que tous tes serfs justes tu vueilles conserver en estat de grace jusques a la fin, et deffendre des agais de l'ennemi. (CHR. PIZ., Psaumes allég. R., 1409, 143). Et, contre les agais nuisables Des diables, escus profitables Me soies pour m'ame garder. (Prières saints R., t.2, c.1415, 287). ...car d'autant que les personnes sont plus dignes et plus hautes en divine commission, d'autant contendent plus et mettent subtils aguets les déables pour les faire perdre confusément. (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 249).

c)

"Préparation frauduleuse, mets empoisonné" : Pense illec venins (...) Enchantemens, poisons, agays De toriaux, (...) Qu'elle puist lors pour soy vengier A son mary faire mangier (DESCH., M.M., c.1385-1403, 64).

C. -

"Attention, intelligence appliquées à un projet"

1.

[Avec une valeur positive] "Habileté, disposition, ruse" : Thamaris, qui fu de sens plaine, De grant agait se pourpensa (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 206). ...mais le vaillant mareschal, par son sens et par son agait, leur estoit sur le col ains que ilz s'en donnassent de garde (Bouciquaut L., 1406-1409, 99). ...se (...) ressourdre et oster la victoire de la main du vainqueur. Telle oeuvre avons nous a mener, en quoy plus chiet d'aguet et de sens que d'ouvraige de chaude colle. (CHART., Q. inv., 1422, 35). ...la constance et courageuse amonicion du roy Preamus redoubla la proesce du vaillant Hector, les aguaitz et advisé gouvernement de Hannibal firent a ses gens passer les Alpes et les grans maraiz et merveilleux passaiges sans grans dommaiges (CHART., Q. inv., 1422, 62).

2.

Loc. [Avec une valeur positive ou nég.]

a)

[Faire qqc.] d'aguet/par aguet

-

"En utilisant la ruse, la surprise, la fourberie" : Si la prist [la cité] assez de legier Par aguet et par tricherie, Quar l'autre duc n'y estoit mie. (Tomb. Chartr. Trois contes S., c.1337-1339, 76). Sire, en Gombaut a grant malice, Car nulles foiz assault ne fait Ne pongneis fors par aguait (Mir. Amis, c.1365, 11). L'un est tué par aguet et envie, L'autre en guerre, l'autre muert par rumour, L'un muert par feu, l'autre muert par navie (DESCH., Oeuvres Q., t.2, c.1370-1407, 18). Ainsi avez vous le troisiesme exemple, qui est comment convoitise de honneur vaine, qui n'est autre chose que concupiscence et voulenté désordonnée à tolir à autrui sa noble dominacion et seigneurie, fist ladicte royne estre murdrière, faulse et desléale, pour obtenir par force tirannique la couronne et seigneurie du royaume de Jhérusalem. Et si avez oy comment par agaiz et espiemens elle fut occise. (Doc. 1408. In : MONSTRELET, Chron. D.-A., t.1 c.1425-1440, 202-203). ...la court defent (...) que aucun (...) ne die, publie, afferme ou enseigne en la signeurie du Roy qu'il soit loisible à quelque vassal ou subgiet ou autre occirre aucun par aguet, blandices ou deceptions (BAYE, II, 1411-1417, 270). ...aucuns noz adversaires, d'aguet et par traison machinée au desceu dudit Pierre Glé, entrerent oudit chastel (Chancell. Henri VI, L., t.1, 1424, 76). Ce pendant ladicte mauvaise royne [Athalie] régna par l'espace desdiz sept ans, par tyrannie et desloyaulté. Et la huitiesme année le vaillant évesque la fist espier et occire de fait d'aguet, et fist couronner le petit enfant [Joas]. (Doc. 1408. In : MONSTRELET, Chron. D.-A., t.1 c.1425-1440, 202). ...lui meismes de agait le prist et lui trencha la teste (LA SALE, Sale D., 1451, 250).

-

"En utilisant les ressources de son intelligence" : ...qu'il avoit entencion et entreprinse de prendre par substilité et d'aguet la dite place... (Chron. Mt-St-Mich. L., t.2, Pièces div., 1442, 140).

-

"En cherchant à tromper, à jouer au plus fin" : Aucuneffoiz avient que elle ne se lieve point, mes, davant le jour, el se plaint et mignote tout a escient et d'aguet et le bon homme, qui l'a ouye, lui demande : "Qu'avez vous, m'amye ?" (Quinze joies mar. R., c.1390-1410, 36). Car avec son amy l'en ne doit mye besongner par aguet ou malice, maiz plainnement et rondement cuer a cuer. (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 91).

-

"De propos délibéré" : ...les incontinens de concupiscences sont plus injustes en tant comme il sont plus couvers et font leurs choses par agueit et par appensement. (ORESME, E.A., c.1370, 384). Si comme celi qui de certain propos et par agueit fiert, il est plus a pugnir que celui qui fiert par chaleur de yre, ceteris paribus. (ORESME, E.A.C., c.1370, 292). ...comme non pensant ad ce qu'elle faisoit, tout d'aguet et a propos entra dedans la garderobe ou son mary encores estoit dedans le bahu clos. (C.N.N., c.1456-1467, 187).

b)

D'aguet + part. passé

-

D'aguet apensé. V. apenser

-

D'aguet précogité. V. précogiter

c)

P. métaph. Prendre qqn en/par aguet. "Le surprendre, le piéger" : ...fait l'umble et le doulx Pour prendre dames en aguet (CHART., B. Dame, 1424, 358). Et Bel Acueil lui raconte tout de bout en bout, comment il avoit esté emprisonné par la vielle Jalousie et comment par aguet l'avoit pris et baraté mauvaisement (RENÉ D'ANJOU, Cuer am. espris W., 1457, 53).

d)

Coup d'aguet. "Coup destiné à surprendre l'adversaire, feinte" : ...à la cinquiesme venue, le seigneur de Ternant, qui marchoit et feroit à coup d'aguet, surprint ledit Galiot, et luy donna si grande atteinte ou haut de la piece, qu'il desmarcha ledit Galiot. (LA MARCHE, Mém., II, c.1470, 73). Il avoit l'espée au poing et monta jusques au plus hault, et contendoit de copper ladicte picque dont ledit Gantois deffendoit moult fierement la porte. Plusieurs cops d'aguet et d'avis rua le Gantois de la picque, pour cuyder l'escuyer atteindre, qui se soubstenoit vaillamment et contendoit d'entrer en la tour et de gaigner l'entrée à son povoir. (LA MARCHE, Mém., II, c.1470, 306).

e)

[Personne] de mauvais aguet. "[Personne] capable de ruse, capable de tendre un piège à qqn" : Sommes-nous gens de malice et de mauvais aguet pour faire venir le fils d'un roy de France en nostre ville, ensemble nostre naturel prince et seigneur, soubs ombre de paix, et de leur vouloir faire révérence et solempnité, et puis les tuer et murdrir ? (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 410).
 

"Avec ruse ; à la manière d'un espion" : Insidiose : (...) espiamment, agaitamment (LE VER, Dict. M.E., c.1420-1440, 243).
 

I. -

"Guetteur, espion" : Car ne prise pas une once Le Jaloux, ne ses agaites : Ja ne feront si grans gaittes Que moult bien ne les deçoive (CHR. PIZ., Duc vrais amans F., a.1405, 133). Mais oncquez ne sceut leurz secours si tost venir que le souldan Salhadin et lez payens qui avoient tousjours leurz aguetez sur lez champs, n'en fussent advertis (Saladin C., c.1465-1468, 42).

II. -

"Lieu où l'on est aux aguets ; piège tendu"

A. -

"Lieu où l'on est aux aguets"

-

Se tenir aux aguettes. "Monter la garde, être vigilant" : Et pour tant est il bien besoing De penser a tous telz baguetes Et de nous tenir aux aguettes ; Au moins, s'on le vient deffermer [le tombeau de Jésus], Que nous puissons bien affermer Que ce n'est pas nostre lacesse. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 369).

-

"Guérite élevée où se fait le guet"

Rem. BERS. ds GD I, 170a.

B. -

"Piège tendu, embûche" : Sans nulle doubte surquerir et environner les diex immorteulz et invisibles et leur faire appareillier aguectes et las de fallace est plus grief courpe et greigneur pechié pour ce que de eulz la forge et l'espere et l'habitacion des diex visibles est soustenue et gouvernee (FOUL., Policrat. B., III, 1372, 241). Ulixes si trespassa par batailles, par lances, par feu, par divers pas de mer, par tant de commocions, par tant de traïsons et guerres et tant de aguettes de gens, par Cille, par Caribde, qui sont grans perilz de mer, a fin qu'il retournast en son paÿs, au moins en sa viellesce. (FOUL., Policrat. B., VII, 1372, 344).
 

A. -

"Action d'observer, d'espionner" : Speculamen (...) : regard ou agaitemens (LE VER, Dict. M.E., c.1420-1440, 470).

B. -

"Aguets, embuscade" : Vous arés gens au pas mis en agaitement Et aux portes ossi avironneement Que, ce Regnaut y entre que vous haés forment, Qu'il y soit atrapez et prins isnelement (Renaut Mont. B.N. V., c.1350-1400, 286). Et Dieu scet se l'orgueil du roy de Cordonne fu humiliee, lequel naguerres cuidoit tresperchier les chieux d'un seul regard, quant il se vey environné d'ennemis quy par divers aguettemens luy procuroient sa mort. (Jehan d'Avennes F., c.1465-1468, 166).

-

[Dans un contexte métaph.] : Hellas ! lasse moy ! la mort plus que familleuse, ou est ton dart ? Que ne l'apointez tu ["mettre en mesure de"] par divers aguettemens a trespercier l'adollé cuer du plus aggrevé dez maladies et persecucions d'Amours que nulle ame ? (Jehan d'Avennes Q., c.1465-1468, 161).

-

En partic. "Piège (tendu par le diable)" : Mais la Vierge Marie, nostre defenseresse, nous deffend jour et nuit des agaittemens du diable, et aussi nous deffend des temptations de ce monde. (MIÉLOT, Spec. hum. salv. L.P., 1448, 155). Nostre tres reverend pere saint Josse, attendant et pensant non pas ce que par avant il avoit fait, mais quelle chose il devoit faire, tousjours esleut et print vie solitaire pour combatre contre les agaittemens du dyable. (MIÉLOT, Vie st Josse J., c.1449, 39).

C. -

"Ruse, machination" : ...son pourpos et intencion est seullement pour veoir s'il pourroit entrer par violence ou force ou par aucunes mauvaises manières et agaisemens [l. agaitemens ?] malicieux, en nostre dicte ville de Paris (Doc. 1414. In : MONSTRELET, Chron. D.-A., t.6 c.1444-1453, 157).
 

I. -

Empl. trans.

A. -

Aguetter qqn

1.

"L'attendre dans un endroit caché pour l'attaquer, lui tendre une embuscade" : Renart escoute l'orison Que le preste a Thiebert depart. Pour ce tout maintenant an part, Paour a d'estre agaitiez. (Renart contref. R.L., t.1, 1328-1342, 324). O ly sont bien quairante traytour lanier Pour le boin duc Herpin occire et detranchier, Qui la c'estoient mis pour le duc agaitier. (Lion Bourges K.P.F., c.1350, 638). DIEU. (...) Sy ne sui je pas mauvais hom Ne dez gens en bois essautierres, Et sy ne sui murdrier ne lerres. Oncques je ne fiz mauvaisité ; Et vous m'avez si agaistié. Par nuit obscure pris m'avez. (Myst. Pass. N.S. R., c.1350-1370, 142). Et pour ce leur final ordenance fu de occire le roy. Si se metent en paine de l'agaitier a point. (BERS., I, 1, c.1354-1359, 40.4, 68). ...le dit Martin fist pluseurs aguez sur le dit suppliant pour le tuer et mettre à mort, et finablement tant l'espia et aguetta que, un jour (...) ainsi que le dit suppliant cuidoit aler en sa marchandise, ycellui Martin (...) comme provocant et aggresseur, envay le dit suppliant (Doc. Poitou G., t.5, 1380, 129). ...vint a Hervy, le filz Alain, un homme trespassant, qui venoit de Guerrande, et avoit passé par le recept ou ly chastellains estoit, et avoit entendu par aucuns des varlez d'icellui chastellain qu'ilz actendoient gens a qui ilz ne vouloient point de bien. Mais il ne lui avoit pas descouvert qui ilz aguettoient. (ARRAS, c.1392-1393, 69). "Or penseiz bien de vous, car vous estiez trahis et agaitteiz a IIIm hommez", et les dist toute la trahison. (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 213). Sy advint qu'ung jour je aguettay sur la Fontaine Venimeuse le preu Estonné ton pere et le occis par trahison, dont ce fut dommaige et pitié, puis m'en fuis en un myen chastel ou je me garnis (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 749). ...voz ambassadeurs, envoyez devers mon trés redoubté seigneur et pere pour la delivrance de mes ambassadeurs agaitiez sur chemin publique et prins es metes de vostre prevosté de Peronne (Lettres Ch. VIII, P., Pièces justif., t.1, 1483, 370-371).

2.

"Guetter qqn, le surveiller" : Il a passé deux mois qu'ailleurs ne volt coucher Qu'en la chambre ma dame pour lui mieulx agaitter ; Mais les brebis contees voit on du leu menger. (Tristan Nant. S., c.1350, 367).

-

[Du diable] "Guetter qqn, lui dresser des pièges" : Pour ce decreta et voult Dieu creer le humain lignage, affin que par lui peust estre restaure le tresbuchement et ruine de Lucifer et de ses complices. Pourquoy le diable eut envie a l'homme, et dela en avant le agaitta toudis et s'efforca de l'induire à transpasser le commandement de Dieu. (MIÉLOT, Spec. hum. Salv. L.P., 1448, 1).

3.

Empl. abs.

a)

[D'un mari jaloux] "Surveiller, espionner" : Telz viellars est trop merencolieux Et d'agueter trop soutil et trop cault ; A leurs femmes font trop le dangereux Car ilz cuident qu'om leur face l'assault Comme faisoient quant ilz furent en sault (DESCH., Oeuvres Q., t.5, c.1370-1407, 60).

b)

"Guetter, être sur ses gardes" : Ambicieux tousjours se doubte, Et tousjours aguette ou escoute. Jamais adventurer ne se ose A faire ne a dire chose Qui doyve a nul homme desplaire (ALECIS, Passe temps P.P., 1480, 231).

c)

[D'un animal] "Être à l'affût" : Il signifie en grec le huart qui agaite pour ravir les entrailles des bestes es boucheries. (ORESME, E.A.C., c.1370, 270).

B. -

Aguetter [un animal]. "Être à l'affût pour le surprendre" : Le cerf aussy se delicte a merveilles tant qu'il est moult souvent deceu et s'en fait prendre quant les veneurs chantent ou fleutent. Car il s'en merveille et se delicte en ce, et pour ce il s'y arreste et s'i amuse si aucunefois qu'il se treuve feru de la sayette de l'archier qui l'agaitte. (EVR. CONTY, Harm. sphères H.P.-H., c.1400, 91).

C. -

Aguetter qqc.

1.

"Surveiller, contrôler (un compte)" : Prince, toudis est la mort aprestée, Chambre d'enfer qui noz comptes aguette ; Comptons a Dieu, soit nostre ame acquittée : Qui ne paiera, il sera mis en debte. (DESCH., Oeuvres Q., t.2, c.1370-1407, 17).

2.

"Guetter qqc. pour en profiter" : "Oublye, oublye, laisse aler, Dïent nos amoureux leaulx, Elle est morte ; en fault il parler ? (...)" Ainsy leurs dames il regrettent, Les traitres, les tres desleaulx qui le seul bien du corps aguettent. (MARTIN LE FRANC, Champion dames III, F., 1440-1442, 101). [Aussi MARTIN LE FRANC, Champion dames III, D., 1440-1442, 105 : aquettier, l. aguettier] Par Lactea vindrent du hault estage Pour commencer le noble mariage De Zephirus qui le doulx temps aguette, Et de Flora, dame de hault parage, Pour decorer la joyeuse fleurette. (ROBERTET, Oeuvres Z., c.1450-1500, 96).

D. -

Aguetter que/à ce que

1.

"Guetter afin que " : Tousjours aguette comme uns leux (...) A ce qu'elle puist prandre proye (DESCH., M.M., c.1385-1403, 199).

2.

"Guetter que, attendre que " : Car du desir qui me deshete N'ay plus de biens que bons souhais, Et nonpourquant tousdiz agaite Que mon maintien soit liez et gaiz. (GRANDSON, Poés. P., c.1360-1397, 233).

II. -

Part. prés.

A. -

Part. prés. en empl. adj.

1.

"Enclin à tromper, à tendre des pièges" : ...il [Tibère] fust, en la fin de son empire, le plus malvais et crueulx de tous les aultres, et fut arrogant, aguettant et engigneux, faignant et simulant de voulloir ce qu'il ne voulloit mie et de non voulloir ce qu'il voulloit et desiroit. (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 67).

2.

[Avec une valeur positive] [D'un animal personnifié] "Vigilant, qui a l'esprit alerte" : Ainsi gouvernoient entr'aulx .IIII. chas et .II. renardeaulx Celle chambre, et a petiz gaiges, Et la mettoit l'en des plus saiges Bestes et des plus aguetans, Qui la gouvernoient leur temps (DESCH., Oeuvres R., t.8, c.1370-1407, 259).

B. -

Part. prés. en empl. subst. Agaitant de chemin. "Brigand qui vole les voyageurs" (synon. aguetteurdechemin) : La septiesme raison (...) est fondée ès lois civiles, qui disent estre trois manières de hommes lesquelz occire est chose licite, c'estassavoir, ceulx qui délaissent chevalerie, les agaitans des chemins, et les larrons de nuit trouvez ès maisons. (Doc. 1408. In : MONSTRELET, Chron. D.-A., t.1 c.1425-1440, 300).
 

A. -

"Observateur ; espion" : : Speculator (...) : agaiteur (Aalma R., c.1380, 390). Speculator (...) : agaiteur .i. inspector, superintentor, qui in alto stat vel qui ex alto prospicit (LE VER, Dict. M.E., c.1420-1440, 170). Espieur, agetteur : insidiosus (Gloss. gallico-lat. M.M., c.1425-1450, 217). Mais ainsi advint qu'ung paige de la compaignie dudit messire Philippe queroit son maistre, qui estoit devant du nombre des chevaucheurs. Ledit paige faillit de trouver son maistre et passa tout oultre lesditz chevaucheurs, et trouva les aguetteurs des Gantois qui le prindrent et luy couperent la gorge ; et le trouverent mort sur le chemin les gens dudit messire Philippe, et congneurent bien que les Gantois estoient aux champs. (LA MARCHE, Mém., II, c.1470, 291).

-

Aguetteur de qqc. "Celui qui épie qqc." : Ch'astoit [Tibère] li plus beais cleir en parleir de noble faconde et eloquenche de monde ; mains tout voies ilh fut fel et crueux et avaritieux agaiteurs de parolles ; et se soy findoit qu'ilh voloit une chouse dont ilh n'avoit cure (JEAN D'OUTREM., Myr. histors B.B., t.1, a.1400, 384). [L'éd. propose de comprendre que Tibère épiait les discours des autres en étant ménager de ses propres paroles]

Rem. ORESME [Daudin], Remede Fort., a.1374, ds GD I, 157a.

B. -

"Celui qui se met en embuscade pour attaquer, voler qqn" : Entendu avons de nouvel, De quoi ne nous est mie bel, Quë un vilain mal savoureus, Lourt et enfrun et dangereus Qui par son non se fait clamer Rude Entendement et nommer S'est fait espieur de chemins Et agaiteur de pelerins, Et leur veut leur bourdons oster Et leur escherpes descherper, (En) euz abusant de frivoles Et (de) mencongables paroles (GUILL. DIGULL., Pèler. vie hum. S., c.1330-1331, 163). ...pour sauver celluy me trouvay contrainte de le mettre en la main d'ung murtrier, en la main d'ung bringant, agaitteur de gens en une forest, lequel, recongnoissant l'oir d'Angleterre, divinement inspiré, ensemble la miserable mere menee a ceste fin, le rechupt reveramment (CHASTELL., Temple Boc. B., 1463-1464, 97).

-

Aguetteur de chemin. "Brigand qui opère sur les routes" : Saint Marcel fu monlt redoubtés Comme cil qui se fu boutés En toutes dissolucions, Larecins et ochisions, Et agaitteur de chemins fu. (Renart contref. R.L., t.2, 1328-1342, 37). De Haulx vint à Guise, où le seigneur de Fontaine, commis par le roy de France, lui apporta mandement de donner remission de tous cas, synon trois, c'est assçavoir, bruleurs d'eglise, violeurs de femmes et aguaiteurs de chemin (MOLINET, Chron. D.J., t.2, 1474-1506, 489).

C. -

"Sentinelle" : Excubitor (...) : agaiteur, awaiteur .i. les gaites, les veilleurs (LE VER, Dict. M.E., c.1420-1440, 154).
 

"Qui est aux aguets, inapaisé, inquiet" : Implacatus (...) : agaiteux ou souspeçonnez (Gloss., c.1400-1500. In : P. Nobel, Lexique 4, 1986, 168).
 

"Chef des guetteurs de nuit" (GD I, 381a) : ...et congnurent que la muraille estoit sans galerie et sans allée et n'y pouvoit arrester le guect de la ville, et que, l'archeguect passé, ligierement l'on pourroit entrer en nombre souffisant pour rompre celle poterne. (LA MARCHE, Mém., II, c.1470, 36). [Seul ex.]
 

A. -

"Guet qui s'ajoute, en temps de guerre, à l'obligation ordinaire"

Rem. Doc. 1410 (arriere guetz) ds GD I, 410a.

B. -

"Soldats d'arrière-garde, chargés de faire le guet"

Rem. DESCH. (ms.) ds GD I, 410a.
 

"Sentinelles (qui s'ajoutent à d'autres)"

REM. BERS. ds GD II, 274c.
 

Empl. pronom. "Se mettre en garde, être en garde" : ...affin que celle moquerie ne adviengne, il convient soy plus contreguester (PREMIERFAIT, Vraye amistié D., 1416, 453).

Rem. Ex. d'a. fr. et doc. 1400 ds GD II, 274c. Cf. aussi TLF VI, 89b : contre-guet.
 

A. -

"Guet"

-

Se mettre en esgait : ...Par quoy je me mis en esgais [var. esgaais] Ou maint gentil oisel estoient Pour savoir se mi oueil porroient Aucun gentil oisel choisir... (MACH., D. Aler., a.1349, 370).

Rem. PREMIERFAIT, Décaméron, 1414, ds GD III, 463a.

B. -

"Aguet" : Quant on va de nuyt par les rues Et l'on n'ose clarté porter, Il se fault guider par les nues Qu'on voit au ciel courre et troter, Et les estaux qu'on deust tater, En tenant la main a l'esguet, Sans l'uys de la dame hurter (Amant cord. M., 1490, 35).

C. -

"Embuscade" (synon. aguet) : ...icellui roy Jehan (...) fist prandre par esguet a Mirebeau le conte Artus de Bretaigne (JEAN DE MONTREUIL, Traité Angl. III, G.O.O., 1416, 310).

Rem. Doc.1459 (esguet) et Flave Vegece, a.1500 (esguaitz), ds GD III, 463a.
 

"Fait de guetter, d'être aux aguets" : Speculatio : esguetance (Abavus IV, R., c.1350, 480).
 

Empl. trans. "Épier, surveiller" : Speculari : esgueter (Abavus IV, R., c.1350, 480). Et en eulx en alant apperceurent ledit Fuisel qui s'estoit targé d'une chesne au trou d'une haye, qui esguectoit ledit Morel (Chancell. Henri VI, L., t.1, 1425, 232).

-

"Faire garder par des sentinelles"

Rem. FROISS. (et fut leur ost bien gardé et esguetié) ds GD III, 463b.
 

"Celui qui est aux aguets, sentinelle" : Speculor : esgueteur (Abavus IV, R., c.1350, 480).
 

"Garde de nuit effectuée aux abords de la ville" : Tous sont d'assentement que l'on facet l'estiguet par ordenance de la ville et en oustre que l'on met chescune nuyt deux homes, un de soir [sic] et l'autre devers le matin, aux despens de la ville (Doc. 1375. In : P. Rézeau, R. Ling. rom. 78, 2014, 417). [Archives hist. de la Saintonge et de l'Aunis] ...l'on fera les estigaitz par la manere qu'on le soloit fere (Doc. 1379. In : P. Rézeau, R. Ling. rom. 78, 2014, 417). [Archives hist. de la Saintonge et de l'Aunis] Sont d'assentement (...) que monsieur le maire puisse desgaigner celi ou ceux qui deffaudront a la garde porte, au guayt et reguayt et estierguait, pour chascun deffaut deux souls six deniers (Doc. 1381. In : P. Rézeau, R. Ling. rom. 78, 2014, 414). [Archives hist. de la Saintonge et de l'Aunis] Lesquelx ont ordenné que chacun face a la garde de la ville obeissance, c'est assavoir au guet, rereguet, esteguet et garde portes, ainsi qu'il leur sera commandé (Doc. 1412. In : P. Rézeau, R. Ling. rom. 78, 2014, 417). [Archives hist. de la Saintonge et de l'Aunis]
 

"Échauguette" : Item que la barbacanne... soit repparée et levée à son estat deu, garnie de gachils (Doc. 1355. In : DU CANGE IV, 121a).

REM. Autre doc. 1355 (Soient les murs et gachils et foisses apparelhez) ds GD IV, 199b.
 

A. -

[Domaine de l'art militaire et des devoirs féodaux ou civils] "Action d'observer pour surveiller ou pour surprendre"

1.

[Pour surveiller]

a)

"Action d'exercer une surveillance attentive pour se prémunir d'un danger ( dans une ville, un château, un camp...)" : ...lors luy alla dire comment il convenoit que son mary, lendemain au soir, allast au guet (C.N.N., c.1456-1467, 389). Il n'est soing que quant on a fain Ne service que d'ennemy Ne mascher qu'ung botel de faing Ne fort guet que d'homme endormy Ne clemence que felonnie (VILLON, Poèmes variés R.H., c.1456-1463, 56). ...mais nous sommes Tousjours, entre nous gentilz hommes, Au guet dessus la villenaile. (Fr. arch. B., c.1468-1480, 36).

-

"Poste de guet" : Si m'en alai jolis et gais Et passai les gués et les gais De l'Archeprestre et des Bretons (Qui ne prisoie .II. boutons) Tant que je vins en une plaine De tous biens et de bon air plaine (MACH., Voir, 1364, 374). ...il trouva là quatre povres hommes qui veilloient et engelloient de froid. (...) cilz se departirent de leur gait et retournerent en leurs maisons. (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 209).

-

[Dans une compar.] : ...l'autre, aussi voluntiers qu'on va au guet, devers monseigneur s' avance. (C.N.N., c.1456-1467, 59).

-

Arriere guet. "Surveillance de nuit" : ...pour la dessus dicte despense de feux et pour lanternes livrées à ceulx qui font larriere [l. l'arriere] guet dedenz ledit chastel (Compte Navarre I.P., 1367-1371, 257).

-

Faiseur de guet. "Guetteur" : Puis apres vient a la Pucelle un faiseur de guet (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 492).

-

Guet de cheval. "Surveillance faite à cheval" : Et, après que ledit siege ot esté ainsi mis devant ladicte ville de Riom, et voiant à Paris que lesdits Bourguignons approuchoient de ladicte ville, fut ordonné et establi en icelle ville de Paris ung grant guet de cheval, qui aloit toutes les nuiz sur les murs et en ladicte ville, depuis l'eure de mienuit jusques au jour apparant, pour la conduite duquel guet y avoit cappitaines ordonnez par icelle par chacune nuit de gens de façon d'icelle. (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 53).

-

La cloche du guet : ...au vespre, après ce que la cloche du guet avoit esté sonnée (C.N.N., c.1456-1467, 389).

-

Asseoir son guet/se lever de son guet : ...quand il fut a l'endroit ou il devoit asseoir son guet, il se tappit au coing d'une forte haye (C.N.N., c.1456-1467, 442). ...quand il perceut tout ce qui fut fait, se leva de son guet, et s'en alla sonner sa trompette (C.N.N., c.1456-1467, 442).

-

Estre au guet : ...il n'estoit point hier soir au gait, mais son filz y fut. (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 214). ...elle luy avoit mis heure pour se trouver avecques elle, tantdiz que son mary seroit au guet (C.N.N., c.1456-1467, 394).

-

Faire le guet : ...les hommes et subgiez (...) des forbourgs de nostre ville de Rennes et d'environ, viengnent pour faire les guetz et garde de nostre dicte ville et du pays d'environ, pour les doubtes et périlz qui pourroient avenir (Cartul. Laval B., t.2, 1354, 254). ...Car il [le roi] n'avoit pas avec li, Si com dire oy l'ai celi Qui y estoit, plus de L. Hommes d'armes ou de LX. ; Toutevoie il fu qui li dist ; Dont il reprist moult et maudist Ceus qui le gait faire devoient, Quant de ce fait riens ne savoient. (MACH., P. Alex., p.1369, 98). Et que tout bourgois et tout manant de ceste ville qui ordené sont et seront de estre et wetier as portes de ceste ville et as quarfours, wetent et fachent leur wet de leurs personnes, armez et ordenez bien et souffissement, cascun selon son estat. (Arch. Lille, 1388, BB1 n° 373, f° 3, IGLF). Et sachiez que, celle nuitiee, commanda Uriiens a faire le guet a un de ses barons, a Vc. hommes et a cent arbalestriers. (ARRAS, c.1392-1393, 95). Uriien trouva son paveillon tendu, et ly autre qui furent avecques lui a la poursuite, leur logeiz tous prests. Si se logierent et aaisierent bien celle nuit et firent bon guet. (ARRAS, c.1392-1393, 104). Celle nuit, faisoit le gait uns chevaliers de Normendie qui se nonmoit Guillaumes, sires de Gauville, et avoecques li mesires Pieres de Praiaus. Et estoient establi en lor ordenance environ cent armeures de fier. (FROISS., Chron. D., p.1400, 376). Par dela Rainchevaulx (...) Apparceüst les hostez de France le royon. Le guet de jour faisoit Gondebeuf le Frison (Galien D.B., c.1400-1500, 31). ...les Anglois (...) monterent par eschieles sur les murs d'icelle ville, entre IIII et V heures au matin, après ce que les gens qui avoient fait le guet furent departiz. (FAUQ., I, 1417-1420, 309). ...il convient qu'ilz se partent de l'eglise de la ville dudit Mesnil (...) et qu'ilz se voisent logier en l'ostel d'icellui segneur pour le garder (...) et qu'ilz facent guet et garde en ladicte maison. (FAUQ., II, 1421-1430, 356). ...il convient que chascun chief d'hostel face une foys la sepmaine, en personne, le guet par nuyt, sur la muraille de la dite ville. (C.N.N., c.1456-1467, 387). Et, après ladicte lecture ainsi faicte, furent faictes en l'ostel de ladicte ville plusieurs belles ordonnances pour la tuicion, garde et seureté d'icelle ville, comme de faire guet et de garder les portes d'icelle (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 41). Et, le lundi second jour de juillet, oudit an, maistre Jehan Balue, evesque d'Evreux, fist le guet de nuit parmy ladicte ville, et mena avecques lui la compaignie dudit Joachin Rouault, avecques clerons, trompetes et autres instrumens sonnans, par les rues et sur les murs, qui n'estoit pas acoustumé de faire à gens faisans guet. (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 53). Harou, je doys faire le guet Au jourd'huy avec une pusse, Pour ce qu'elle fait une musse A bouter dedens son tresor, Avec Nabugodenosor Qui vient a tout dix mille mouches Trestous un vi(a)reton en leur bouche... (S. fol, c.1480-1490, 7). Et à ceste cause le roy escripvit par toutes les bonnes villes de son royaulme qu'ilz feissent bon gueit et qu'ilz se donnassent garde, en les advertissant de ce que dit est, en les priant qu'ilz luy fussent bons et loyaulx. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 164).

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Faire bon/demi/double/grand/pauvre/simple guet : ...Et que l'autre partie veille Parmi la ville et se traveille De bien gaitier ; et que les gardes Ne soient lentes ne couardes, N'endormies, et que bon gait Face chascuns, car en agait Sont Sarrazins pour eaus destruire, S'il veoient leur queue luire. (MACH., P. Alex., p.1369, 96). Et tous les soirs faisoient bons gais, car il se doubtoient moult à estre resvilliet des Escos. (FROISS., Chron. L., IV, c.1375-1400, 157). Si se gardèrent les cités, li chastiel et les bonnes villes plus priès que devant, et fisent grans gais. (FROISS., Chron. R., VIII, c.1375-1400, 105). "...Se nous y venons une nuit, nous l'airons, voires s'ilz ne font pas trop grand gait." (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 202). ...cette ville de Montferant (...) est la ville où on fait le plus simple et plus povre gait qui soit ou royaulme de France. (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 206). ...li Hainnuier (...) [devoient] tenir ensamble et faire doubles gais toute nuit, pour la doubtance des archiers de Lincole (FROISS., Chron. D., p.1400, 136). Celle nuit fist on en l'oost le dit duc, tres grant get, pour la cause de ce que il (...) fissent doubte que il ne fuissent resvilliet (FROISS., Chron. D., p.1400, 389). ...il ne fera que ung demy guet, et entens qu'il le doit faire jeudy prochain, depuis la cloche du temps au soir jusques a la mynuyt. (C.N.N., c.1456-1467, 387). ...il ne feroit que demy guet, c'est assavoir depuis la mynuyt jusques au matin seulement (C.N.N., c.1456-1467, 389). Je croy qu'ilz feront si bon guet que ceste nuyt n'entrera riens en la ville qu'ilz n'en sachent bien respondre, se Dieu plaist. (BUEIL, I, 1461-1466, 87). Une trompette sonna : faictes bon guet, mais aultre chose ne fut sonné à se desloger, et croy que aussi n'en estoit-il nul besoing. (COMM., III, 1495-1498, 201).

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DR. FÉOD. "Droit qu'a le seigneur d'exiger de ses sujets un service de garde au château" : Dune aide levée en la viconté d'Orbec sur les gens du plat païz pour estre exens de venir au guait (Compte Navarre I.P., 1367-1371, 42). ...volons et ottroions auxdis marchands que ilz (...) seient francs et quites, desoubs nostredit seigneur, d'ost, de chevauchiés, de gayt, de garde de chastel et de villes, de toutes tailles, prieres (...) et mortemain. (Trés. Reth. S.L., t.2, 1378, 254). ...ou royaume de France, nous devenismes de francs, serfz, voire a l'espee des Anglois noz ennemis, et a noz seigneurs et seigneuries terriennes, par gabelles, par tailles, par imposicions, par guetz et pilleries et servitudes, ausquelz nous tous avons este soubmis. (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.1, c.1386-1389, 455). Item se charge la dite Jehanne du Vain ["cinq"] soubt pour le guet du terme escheu a la feste de la chandelour (...) ; et assavoir que sur chacun feu l'en leve V s. pour chacun demi an (Comptes Lamballe C.-L., 1393-1394, 338). Item, ledit parquier est franc de fouage, du guet, du branquage et de boues. (HECTOR DE CHARTRES, Cout. R., 1398-1408, 66). Nous Guillaume Biotte (...) commis a recevoir le guet du chastel de Caen, certiffions (...) que (...) icelle recette se puet bien monter (...) environ deux cens quatre vings dix livres tournois. (Actes norm. H., t.1, 1429, 68).

b)

P. méton.

-

"Ensemble de ceux qui sont chargés de surveiller, de protéger, de faire le guet" : Geronnet et les siens estoient toudis à agait à l'uis de l'ostel de la Couronne, pour savoir quant le gait retourneroit. (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 209). "...Le gait est passé, nous n'avons huymais garde de cela." (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 209). ...il [le neveu du capitaine] ne scet quelle part traire pour entrer en la ville ; et la fu grant temps en ceste pensee. Or advint ainsi que, sur le point du jour, que environ IIIJxx. bacinez de estrangiers de pluseurs nations yssirent par une poterne de la cité et s'en vindrent tout quoyement devers l'ost. Le guet se departoit, et en estoit ja le plus repairié au logeiz. Et ceulx entrerent en l'ost avecques aucuns du guet, qui oncques ne s'en donnerent garde, et vindrent presques jusques a la tente du soudant. (ARRAS, c.1392-1393, 95). Atant devalerent la montaigne et passerent par derriere l'ost ; mais, quant ilz deurent passer, le guet les ravisa, et virent bien que ce n'estoient pas de leurs gens ; et lors se commencent a effreer et crier : A l'arme ! Quant Uriien ouy ce, si commanda au cappitaine qu'il tournast sa banniere sur le gait, et qu'il les combatist, et il si fist. La ot grant perte a l'assembler. Et Uriiens et les autres IIJ. batailles se mirent entre le guet et ceulx qui assailloient la ville. (ARRAS, c.1392-1393, 111). Lors regarde a dextre, sur une petite montaigne, et voit le guet ou il ot bien Vc. hommes d'armes et voit les coureurs descouvrir tout autour de l'ost. Par foy, dist l'escuier, qui moult avoit veu en son temps, ce sont tout adroit gens d'armes et de conqueste. (ARRAS, c.1392-1393, 178). ...li Alemant n'entrerent point de ce lés ou li gais estoit, mais bien en sus. (FROISS., Chron. D., p.1400, 381). Petit y dort la nuit le gait, Ains brayent, crient, cornent, huient Et villenies s'entredient (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 315). D'une petite loge couverte de tuille estant près dudit Chasteau de bois, neant, pour ce que le guet se y loge de nuit (Comptes Paris V.L.D., t.1, 1440-1441, 194). ...l'orfevre retint au couscher son chareton, doubtant la rencontre du guet, qui l'eust en Chastellet logié (C.N.N., c.1456-1467, 65). Et quant le guet apparceut noz gens il sonna à tout, et les Angloys saillirent à l'escarmouche. (GRUEL, Chron. Richemont L., c.1459-1466, 114). Je ouy le guet arriver, Je me cuidoie aller musser... (B. veoir, p.1480, 17). Nous avons du guet sof conduit Car il ne nous vient point chercher, Sergens n'ont garde d'approcher Car il n'y a point de praticque, S'il viennent, on leur fait la nicque Car ilz n'y peuent trouver acquest. (Sots gard., a.1488, 104). Aprés le disner, l'avantgarde marcha en moult bel ordre, son guet devant elle avecques ses esles, et les Allemans a coutiere de la greve. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 282).

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"Escorte" : J'estoie couché en la chambre dudict duc de Bourgongne, qui estoit bien petite, et deux gentilz hommes, qui estoient de sa chambre ; et au dessus y avoit douze archiers seullement, qui faisoient le guet et estoient en habillement et jouoyent aux dez. Son grand guect estoit loing de luy et vers la porte de la ville. (COMM., Mém. B., 1489-1491, 147).

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Chevalier du guet. "Chevalier du guet ou chef des vingt sergents à cheval et des quarante sergents à pied qui assuraient la police nocturne de Paris" : L'AN DE GRACE MIL TROIS cens quatrevins et dix, le samedi IXe jour de juing, par devant mons.. le prevost, lui estant en jugement sur les carreaux, presens noble homme messire Baude de Vauviller, chevalier du guet (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 277). ...Jaques de Helli, qui pour le tans estoit Des cevaliers du gait, vint à luy fort et roit. (Geste ducs Bourg. K., c.1410-1419, 366). Pierre Roussel, escuier, lieutenant du chevalier du guet, s'est opposé et oppose que nul ne soit receu en bailly de Esvreux sans le oïr es causes de son opposition. (BAYE, II, 1411-1417, 45). Defense fu faicte à peine de Vc mars d'argent à messire Bertran d'Enfernet, chevalier du guet à Paris, qu'il ne mefface ne mesdie par lui ne par autre à Colin de la Chapelle, sergent à verge (BAYE, II, 1411-1417, 193). Item, au Chevalier du guet, Le Hëaulme luy establis, Et aux pietons qui vont d'aguet Tastonnans par ces establis, Je leur laissë ung beau riblis, La Lanterne a la Pierre au Let, Voire, mes j'aray les Troys Lis, S'ilz me mainent en Chastellet. (VILLON, Lais R.H., c.1456-1457, 20). Et, le mercredi IIIIe jour dudit moys de juillet, oudit an LXV, le roy, estant devant ledit lieu de Riom, escripvy à messire Charles de Meleun, son lieutenant audit lieu de Paris, audit Joachin, et ausdiz habitans de Paris, par sire Jehan de Harlay, son chevalier du guet audit lieu de Paris (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 53). Et y estoient à le mener dudit Louvre jusques audit hostel ledit sire Denis Hesselin, Jaques Hesselin son frere, sire Jehan de Harlay, chevalier du guet, et autres personnes en armes, et devant ledit seigneur estoient portées quatre torches. (ROYE, Chron. scand., II, 1460-1483, 4). Item, au chevallier du guet Je donne deux beaux petiz paiges, Philebert et le groz Marcquet [deux vieux sergents royaux], Lesquelz servy, dont sont plus saiges, La plus partie de leurs aages, Ont le prevost des mareschaulx. (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 139).

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Capitaine du guet : ...le cappitaine du gait de Montferant, pour le cremeur du lait temps, n'yssi oncques hors celle nuit de son hostel (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 208).

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Connestable du guet. "Magistrat municipal chargé du guet" : Entroes que ces paroles estoient dou connestable dou gait as gardes de la porte, François Acremen et si compaignon faisoient leur fait (FROISS., Chron. R., XI, c.1375-1400, 139).

-

Guet de nuit : "...li gais de nuit (...) avoit fait son tour et en raloit couchier." (FROISS., Chron. R., XI, c.1375-1400, 138). L'ystoire dit que les CCCC. combatans vinrent en l'ost et se ferirent dedens, a cours de chevaulx, en criant : Lusegnen, et vont occiant et abatant tout ce que ilz encontrent devant eulx, et en vont pour venir a la tente du roy. Chascun fuit devant eulx. Mais le guet de nuit n'estoit pas encore desarmez, mais estoit devant la tente du roy. Lors, quant ilz oyent le cry, si se trayent celle part. La ot a l'encontrer grant frosseiz de lances, et tourna grant la perte sur ceulx du siege. (ARRAS, c.1392-1393, 160). Beaulx seigneurs, quelle noise est ce ? Par foy, sire, ce dit un chevalier, ce sont gens d'armes qui se sont despourveuement feruz en vostre ost et crient : Lusignen, et vous ont ja fait grant dommage, et se le guet de nuit ne feust, ilz le vous eussent fait greigneur, car ilz leur sont venus au devant et les combatent fort et ferme au dehors des logeiz, ou ilz les ont reboutez par force. (ARRAS, c.1392-1393, 160).

-

[P. oppos. au guet du roi] Guet des mestiers. "Groupe de commerçants qui pennent un tour de garde par roulement" : ...Colin de la Chapelle, sergent à verge et collecteur du guet des mestiers de Paris (BAYE, II, 1411-1417, 193).

-

Guet du roi : ...[il] requist au guet du roy nostre sire estant en ladite eglise de Saint-Lorens que ledit prisonnier feust prins et arrestez, et, à sa requeste, admenez prisonnier oudit Chastellet (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 364). ...mais il fu prins et arresté par icellui de La Rue, avec le guet du roy, qui illec survint. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 367).

-

Mettre guet qq. part : Et, ce fait, bailla ledit conte son prisonnier en garde à Guynot Vigier, et puis, sur la nuyt, ledit Voyau s'en alla en laditte ville par devers ung nommé Thienon Gillet, qui avoit en garde les clefz de ladite ville, et luy ordona fermer les portes de laditte ville et mettre guect et garde sur les murailles d'icelle, et print les clefz et les aporta audit chastel. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 180).

-

Resveiller le guet. "Crier très fort (pour appeler à l'aide le guet)". P. iron. "Crier de façon intempestive" : CUIDER. Argent m'y fault ! Argent m'y fault ! Sa, mes enffans, sa, mes minos, Venez achapter dorellos, Sa, venez ! ains qu'il soit plus tart. BRUYT. Et qui est se maistre cornart Qui reveille le guet ainsi ? (Pipée R., c.1470-1480, 160).

2.

[Pour surprendre]

a)

"Embûche" : Franchois expers au fait du jeu d'exés Samblablement ont mattés les Bretons, Mais nous, par force et sans nuls mauvais ghés, Au droit du jeu, nos palmes aprestons (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 257).

b)

"Gens placés en embuscade" : Charles (...) prent XX^m homez, sy les vat embussier et en fait V^c alleir devant Romme. Quant les Sarasins lez veirent, sy s'en vont armeir X^m, sy en von[t] courir sus les V^c ; sy les guioit Danement. Et les V^c s'en vont deffendant et reculant vers le gait. Ata[nt] sailhit le gait sur les paiens et les encloirent. (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 54).

B. -

[En dehors du domaine militaire]

1.

"Action d'observer pour surveiller ou pour surprendre"

a)

[Pour surveiller, épier]

-

Guet (sur qqn.). "Surveillance exercée sur qqn" : ...et qu'el est si bonne qu'il n'y fault ja guet sur elle (C.N.N., c.1456-1467, 172). ...tant subitement et subtilement les luy bailla que oncques le guet de la vieille serpente n'en eut la cognoissance. [Un homme transmet une lettre à une femme que surveille de très près une vieille servante] (C.N.N., c.1456-1467, 257).

-

(Estre) sur son guet. "(Être) sur ses gardes" : Ainsi que le chevalier erroit sur son guet par le plain chemin de la forest, en regardant devant lui il vey une merveilleuse beste (Percef. III, R., t.2, c.1450 [c.1340], 62).

-

Faire le guet. "Observer les alentours, veiller, épier" : En après, ce mist [à] deffense, et, pour ce, le despouillerent tout nu, nonobstant qu'il criast. Lequel qui parle estoit lors un po arriere d'eulx, et faisoit le guet, que nul ne venist ; et lors fu par l'un desdiz compaignons, n'est record lequel, jetté en la riviere de Saine, et illec fu noyez. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 368). ...je m'en suis donné garde, et si ay bien fait le guet que je l'ay veu venir vers vous hier (C.N.N., c.1456-1467, 234). ...il envoya [un ami] pour faire le guet et escouter a l'entour de sa maison pour veoir si quelque larron y viendroit. (C.N.N., c.1456-1467, 442).

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Faire bon guet. "Regarder discrètement" : Bon guet feray, sus mon honneur, Afin que Dangier riens n'en sente (CH. D'ORLÉANS, Chans. C., c.1415-1440, 224).

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Faire le guet sur qqn. "Epier qqn" : Dangier grant guet sur lui fera, C'est une chose que fort doubte. (CH. D'ORLÉANS, Ball. C., c.1415-1457, 74). ...[elle] disoit en soy mesmes qu'elle fera le guet sur celle qui luy fait tort de son amy (C.N.N., c.1456-1467, 275).

.

Faire le guet quand... "Surveiller pour voir quand..." : Le bon hermite, faisant le guet quand la deceue veille sa simple fille amenroit, la voit venir (C.N.N., c.1456-1467, 99).

b)

[Pour surprendre]

-

À/de guet apensé. "Par une agression préméditée" : Car une espece de causes homicidialz est des homicides qui sunt faiz par premeditation ou a guet appensé, l'autre d'omicides voluntaires faiz par chaleur et par hastiveté (ORESME, Pol. Arist. M., c.1372-1374, 201). ...il l'avoit fait de guet apensé et propos deliberé pour parvenir a ses ataintes (MART. D'AUV., Arrêts Am. R., c.1460-1466, 48). Tous lesquelz quatre de guet apensé et propos deliberé vindrent assaillir ledit Petit Jehan, qu'ilz trouverent au coing de la rue de Garnelles (ROYE, Chron. scand., II, 1460-1483, 59).

c)

Au fig.

-

"Surveillance pour attendre un événement souhaité" : Lors n'eus je talent de dormir, Car je mis mes yeus en agait Qui faisoient adès le gait, Et mes corps estoit attendans, Mes cuers desirans et tendans De celle part ou je pensoie Que l'esprevier venir verroie, Par quoy mon resgart avansay. (MACH., D. Aler., a.1349, 270).

-

"Attention portée à qqc." : Et a ce doiuent bien prendre garde et bien faire le guet ceulx qui sont donnez et enclins a estude et a contemplacion quilz ne chargent pas trop leur ymaginatiue (CIB., p.1451, 213).

-

En guet de qqn. "En état de méfiance, d'observation à l'endroit de qqn" : Si demorèrent les coses en cel estat ; li dus en gait et en soupeçon de ses gens, et ses gens de lui. (FROISS., Chron. R., VIII, c.1375-1400, 107).

-

"Vigilance" : ...pour ce que tresfort doubtoit de le perdre [un oeil], mesmement que c'estoit le membre ou il devoit plus de guet et de soing, manda le cyrurgien (C.N.N., c.1456-1467, 502).

-

[D'une chose abstr.] Faire le guet à/contre qqc. "Être un obstacle contre qqc." : Contre ces deux maulx font le guet prohibition ou deffense et erudition ou doctrine par labeurs et doulceurs, qui viennent par la miseration ou gubernation divine qui ne veult pas du tout delaissier cheulx qui estoient en voie de dampnement. (DAUDIN, De la erudition H., c.1360-1380, 195). A ches deux choses doit faire le guet la discipline des enfans. (DAUDIN, De la erudition H., c.1360-1380, 198).

-

[P. métaph., pour évoquer les travaux d'approche amoureuse] Faire le guet et la porte. "Attendre en guettant, faire le pied de grue" : Je ne fais plus ne guect ne porte, Et sy ne paieray plus la taille. J'ay trop esté a la bataille (Au grey d'amours F.-H., c.1400-1500, 212).

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Faire le guet que. "Veiller à ce que" : Pour toutes ces choses dist saint Jerome a Athlete pour la doctrine de sa fille : "Se tu es songneuse et sage affin que ta fille ne soit serve de la langue du serpent, pour quoy dont ne fais tu le guet qu'elle ne soit serve du maillet de toute char, qu'elle ne isse de l'ostel avec Dyne pour veoir les fenmes d'aultre region, qu'elle ne voist des piéz jouer, qu'elle ne tire ses robes aprés soy et jamais ne soit en publicque sans toy ?" (DAUDIN, De la erudition H., c.1360-1380, 361).

2.

"Celui qui monte la garde"

-

Au fig. Le grand guet. "Dieu" : On me desprise, on court a ces finances Pour amasser, sans viser a quel bout. Mais le hault guet qui se tient en escout, Venu le temps de la retribucion, Sur mes fracteurs prendra punicion. (MICHAULT, Doctr. temps prés. W., 1466, 163).
 

"Qui est tenu au service du guet (d'une ville, d'un château)" : ...et moiennant VIIIc escuz qu'elle lui bailla content, que aussi qu'elle lui donna droit de chastellenie et seaulx aux contractz, et certains ses hommes pour estre gaystables à son chastel de la Blouynière (Doc. Poitou G., t.10, 1457, 34).
 

"Embûche préméditée consistant à guetter qqn pour l'attaquer par surprise" : ...à la journée que led. duc fut prins de sa personne par faulce et desloyalle trahison de guet à pend par Ollivier de Blais et Charles son frère.. (Actes Jean V Bret. B., t.3, 1420, 54). Denonciement ne doit estre fait pour raison de bapteures faictes à autry, sinon qu'il y ayt eu guet appens et propos deliberé. (Cout. instit. Anjou Maine B.-B., t.4, 1496, 465).

-

De guet-apens. "Avec préméditation" : ...Pierre Melin qui a fait tuer un homme de guect-appens, en la ville d'Aix (Comptes roi René A., t.2, 1478, 471).

REM. Voir aussi d'aguet, de guet, en aguet apensé sous apenser1 >III.B.4.
 

A. -

"Action de garder (une ville)" : As 2 wardes de par nuit pour leur waitage dou mois de may et de ghiskerech, parmy 26 s. 8 d. blans le mois en plakars pour 4 d., montent 53 s. 4 d. blans valent torn. 57 s. 2 d. (Comptes Mons P., t.1, 1330, 244).

Rem. Ex. d'a. fr. ds GD et DEAF au sens de "impôt pour la garde d'une ville".

B. -

Mettre en guettage. "Massacrer" (Éd.) (?) : Maix de la gens Mahon qui sont en son servaige Estoient si chergiér li champz et li paissaige Que se Jhesu n'an panse qui nous fist a s'imaige Que nos gens y ressurent ung si felon paiaige : Tuit y seront destruit et mis en lour guetaige. (Lion Bourges K.P.F., c.1350, 774).
 

"D'une manière insidieuse, trompeuse" : Insidie: (...) inde Insidiose, adverbium - espianment, gaitanment (LE TALLEUR, Vocab. E.M., c.1490, 174).

REM. Cf. FEW 454a : Judfr. agaitanz "attentif, soigneux" ; voir aussi aguettamment.
 

A. -

[Domaine de l'art militaire et des devoirs féodaux ou civils]

1.

"Action d'observer pour surveiller ou pour surprendre"

a)

"Poste de guet" : Si ne se fault point esbayr Pour une petite villete, Que quant vouldrons la recouvrir, En peu d'eure l'aurons retraicte ; Que Jargueau ne sert que pour guiecte Pour regarder les gens venir, Ne que soit ville de retraicte Point ne le voudrois soustenir. (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 572).

b)

"Guet, surveillance (?)" ou plutôt "embûche, embuscade (?)" : [LE ROI DE GAULE]. Encontre eux [les Romains] mettray tel guette Qu'ilz seront tous mors et confus. (Myst. st Laur. S.W., 1499, 135).

2.

"Guetteur, sentinelle" : ...et en pou d'eure elle oÿ la noise et le cry de la gaite qui crioit a haulte voix: "Or sus, or sus !" (Bérinus, II, c.1350-1370, 97). ...un roié vermeil de Gant, délivré aus trois guaictes du Roy pour leurs robes de Toussains (Comptes argent. rois Fr. D.-A., I, 1352, 151). La guette qui dormoit entendi le son du cor et s'esveilla (LE BEL, Chron. V.D., t.1, 1358, 279). ...2 guaites du chastel, 32 escuz. Le curé du chastel, 40 escuz. (Comptes argent. rois Fr. D.-A., I, 1359-1360, 269). Clere fu la nuit et serie. Li jours vint, la gaite s'escrie Dedens un cor sarrasinois : "Seigneurs, li Alexandrinois Sont tuit mis à desconfiture ; Armez vous tuit grant aleure, Et ociez le remenant..." (MACH., P. Alex., p.1369, 97). "Encores, y avoit une gueste en la hune, qui toute jour faisoit la garde que galees de coursayres et de larrons souldainement ne veinssent pour assaillir la nef..." (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.1, c.1386-1389, 542). ...qu'il convendroit que de nuyt, et à eschieles, l'en entrast XX ou XXX personnes en la basse-court dudit chastel, laquelle n'estoit aucunement gardée, ou au moins n'y avoit nulles guettes de nuyt qui veillassent icelle basse-court (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 191). Et [Mélusine] fist bastir entre le bourc et le chastel une forte tour, grosse, de tieules sarrasinoises, a fort cyment. (...) Et la fist faire si haulte que les guettes qui estoient dedens veoient de tous coustez qui venoit devers le fort en la ville. (ARRAS, c.1392-1393, 67). Puis [Remondin] s'en party, et s'en vint chevauchant tant qu'il approucha de Lusignen, et vit la Tour Trompe et le bourc. Et lors ne cuida pas estre la ou il estoit, car il mescongnoissoit le lieu pour la tour et pour le lieu du bourc, qui y fu fais depuis qu'il se party. Et moult se esmerveille quant il oït la guette de la tour tromper. (ARRAS, c.1392-1393, 76). La gette dou chastiel d'amont conmença de la trompete a mener noise et grant solas, et tant que chil de l'oost s'en perchurent. (FROISS., Chron. D., p.1400, 524). Si n'avoit l'ost nulle eschargaite, Ne si tost n'ot corné la gaitte Que ceulx leur furent couru seure. (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 248). Ypocras, qui gardoit Trainte, trouva une de ses gaictes endormie ; sy l'ochist. (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 60). ...une guette estant au dessus d'icelle tour, en l'echarguette, sonna un cornet moult hault (LA MARCHE, Mém., III, c.1470, 151-152). Dessus les champs mist ses guettes et gardes Et leur monstra de si bonne remise Que tost aprés vindrent les ambassades De Florence, de Sene et de Venise. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 207).

-

"Ensemble de guetteurs (?)" : Celle propre nuit (...) si resvilla la guette et chiaus dou fort. (FROISS., Chron. L., VII, c.1375-1400, 197). Ja estoit li gais de la nuit presque tous retrais, et la gaite montoit en sa garde, quant evous venu François et ces Gantois, esquielles à leurs cols, et entrèrent en ces fossés. (FROISS., Chron. R., XI, c.1375-1400, 219).

-

"Observateur, espion" : Jehans Lions (...), qui tous avisés estoit de cel afaire, et qui avoit ses gettes et ses escoutes semés aval la ville, sceut la venue dou baillieu. (FROISS., Chron. R., IX, c.1375-1400, 176). Là estoit li sires de Sempi qui trop loiaument s'aquita de estre gaite et escoutète des Flamens, car il estoit ou premier chief et aloit songneusement tout en tapissant veoir et imaginer leur convenant. (FROISS., Chron. R., XI, c.1375-1400, 20).

-

En partic. "Vigie, sur un navire" : ...la gaitte qui perchut la navie des Espagnols venir fillant aval vent, dist : "Ho ! je vois une nef venant, et crei que elle soit d'Espagne." (FROISS., Chron. D., p.1400, 883). ...il avoit mis une gette ou chastiel de sa nef, pour anonchier qant li Espagnol venroient. (FROISS., Chron. D., p.1400, 883).

3.

"Endroit d'où l'on surveille" : ...une piece de terre en la waite par devers le chemin, contenant II jour, ou environ (Trés. Reth. S.L., t.2, 1344, 46). ...la chambre de emprès la guete en ladicte prison (Comptes Archev. Rouen J., 1405-1406, 60). Eulx la doncques venuz et arrivez, disposerent de leur fait comme de guerre et ordonnerent une gaitte sur ung arbre (C.N.N., c.1456-1467, 451).

B. -

[En dehors du domaine militaire]

-

"Personne chargée d'exercer une surveillance, d'épier" : ...a cause de la grosse assemblée, et de l'empeschement que l'abbesse et ses guectes avoient, il eut bien loisir de dire a sa dame ses doleances [Un moine met à profit une fête pour déjouer la surveillance dont est l'objet une nonne] (C.N.N., c.1456-1467, 306).

-

"Personne ou qualité d'une personne qui surveille, défend et protège (qqn/qqc.)" : Et son humilité parfaite M'estoit escuz, deffense et gaite Qu'orguieus ne me peüst sousprendre, Qui mains maus norrist et engendre, Et qu'envers tous trés doucement Me maintenisse et humblement. (MACH., R. Fort., c.1341, 7). Je les tieng gais et envoisiez [les amants] ; Je rapaise les despaisiez ; Je les norri ; je les alaite ; Je leur sui mere, amie et gaite ; Je leur sui phisicienne et garde (MACH., R. Fort., c.1341, 78). Pren cuer et va seürement Vers ta dame, que vraiement Gaite, escuz, deffense et fortresse Te seray bonne, et la promesse Que je t'ay promis, te tenrai, Et sans priere a toy venray, Com celle qui serai tes chiés En tes biens et en tes meschiés. (MACH., R. Fort., c.1341, 116). Mais qui bien a a soy Sobresse actraitte, Elle est propice et de peu assouvie, Ayde de sens et de santé la gaitte, Garde de corps et concierge de vie. (CHART., B. Nobles, c.1424, 407).
 

"Fait de guetter, de surveiller, garde" : Ça sont .XX. chevaliers de mon estracïon Qui nuyt et jour me gardent en grande souppeçon ; Mais de leur guaittement ne donrroy ung bouton. (Tristan Nant. S., c.1350, 89).

-

Guettement de chemin. "Action de se mettre en embuscade sur les chemins pour détrousser les gens" : ...par les dictes guerres sont maintes foiz avenues batailles morteles, occisions de genz, pillemens d'eglises, destructions de corps et perils de ames, defloracions de pucelles et de vierges, deshonestacion de femes mariées et veves, arsures de villes, de manoirs et edifices, roberies et oppressions, guettemens de voies et de chemins, justice en est faillie et la foy crestienne refroidie (Doc. Poitou G., t.3, 1361, 311). "Par les dittes guerres sont maintes fois avenues batailles mortèles, occisions de gens (...) roberies et oppressions, guettemens de voies et de chemins." (FROISS., Chron. L., VI, c.1375-1400, 35).
 

A. -

[Domaine de l'art militaire et des devoirs féodaux ou civils] "Action d'observer pour surveiller ou pour surprendre"

1.

[Pour surveiller]

a)

Guetter. "Faire le guet, monter la garde" : Si commanda qu'on l'i herberge, Et qu'on y prengne là herberge, Pour herbergier une partie De sa milleur chevalerie ; Et que l'autre partie veille Parmi la ville et se traveille De bien gaitier ; et que les gardes Ne soient lentes ne couardes, N'endormies, et que bon gait Face chascuns, car en agait Sont Sarrazins pour eaus destruire, S'il veoient leur queue luire. (MACH., P. Alex., p.1369, 96). Mais la nuit pas bien ne gaitierent, Car bien X. mil dedens entrerent De Sarrazins, et reponnirent Par une porte qu'il ardirent... (MACH., P. Alex., p.1369, 96). Et que tout bourgois et tout manant de ceste ville qui ordené sont et seront de estre et wetier as portes de ceste ville et as quarfours, wetent et fachent leur wet de leurs personnes, armez et ordenez bien et souffissement, cascun selon son estat. (Arch. Lille, 1388, BB1 n° 373, f° 3, IGLF). Que nuls ne soit si hardis homs qui wethe pour argent, quant il ara wetiet une nuit ne weteche mais en apres qu'il n'y ait une nuit entre II, sur X sols de fourfait. (Arch. Lille, 1388, BB1 n° 373, f° 47 v°, IGLF). ...leurs prevostz et moniers sont quittes et frans semblablement. Et de ce sont subgets guestier au chastel de Breouse chacun une nuyt et un jour par an. (HECTOR DE CHARTRES, Cout. R.B., 1398-1402, 44). Qant il vint ou marchiet de Valenchiennes, il i avoit gardes qui gettoient au berrefroi ; si dist tout hault : "Sonnés, sonnés les cloces ! Esmouvés la ville !" (FROISS., Chron. D., p.1400, 353). Le sergent veult aler gaitier, Il (la) afuble son basinet... (Sav. serg. D.L., c.1480-1490, 33).

b)

Guetter qqc. "Surveiller qqc" : Et les convenoit toutdis, par nuit et par jour, gettier par connestablies les camps et les cemins de autour de la ville (FROISS., Chron. D., p.1400, 122). ...il (...) fisent songneusement garder et gettier tous les destrois et les passages, et tant que riens ne leur pooit venir par mer ne par terre. (FROISS., Chron. L., V, c.1375-1400, 142). ...par raison desquieulx lieux d'omosne croisiée consistans et exemps, les personnes qui y ont demouré et demeurent sont et ont esté, de tel temps qui n'est memore du contraire, frans et quites a foires et marchiés et quiconques [l. quelconques] autres lieux, tant villes, chasteaux, forteresses que aultres, de non paier coustumes, acquis, panages, subventions, redevances, fouage, aide de guet, ou de guetier chasteaulx et de quelconques autres servitures (Mémor. Echiq. Archev. S., Pièces justif., 1391-1404, 38). Puis arriva icellui cappitaine atout ses compaignons, ausquelz ilz dirent ce que le Mareschal leur avoit chargé et comment il avoit advisé qu'il estoit bon d'envoier quelque dix compaignons legiers, qui ne fussent pas chargiez de harnoys pour guetter les carrefours et les grans chemins (BUEIL, I, 1461-1466, 84).

-

Guetter que. "Prendre garde que" : Li roys et ses gens se tenoient Entre IJ. portes, et gaitoient Que Sarrasin n'ississent hors, Car ceuls de l'assaut fussent mors Se par derrier les encloïssent ; Pour ce gaitoient qu'il n'ississent (MACH., P. Alex., p.1369, 87). Pour Vc mille muis de baume Ne les devroit einsi traitier, Et si se doit moult bien gaitier Qu'il met sa vie en aventure, S'ame, s'onneur ; et c'est laidure Et pechié fait et mal aussi, Tous princes qui le fait einsi. (MACH., P. Alex., p.1369, 262).

c)

Guetter qqn. "Épier qqn" : Mais se logièrent, et le signeur de Couci en mi yaus, et par tel manière que, se il s'en vosist adont estre partis, il ne peuist, tant estoit il priès gettiés. (FROISS., Chron. R., VIII, c.1375-1400, 221). ...et l'avoient les gardes empris a garder (...) et le gettoient si priés que a painnes pooit il aler pissier. (FROISS., Chron. D., p.1400, 802).

2.

[Pour surprendre] "Tendre un guet-apens à qqn" : Mais il fust entrez en mal an, Se Dieus ne l'eüst secouru, Car si anemi acouru Y sont pluseurs qui le gaitoient Et qui mortelment le haoient, Si virent par une fenestre Qu'il aouroit le Dieu celestre (MACH., C. ami, 1357, 38). Ne sçay (...) s'il [Ninus] fu gaitié ou trahi (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 185). Hanibal refu en Ytale, Qui ja doubtoit Fortune male, Toutefoiz, au pié des monteignes, Gaita de Romme les compaignes Et les desconfit en bataille (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 226). Et cedit jour, au soir, environ deux heures de nuit, mons. l'evesque d'Evreux, Balue, fut guetté et acueilly par aucuns ses ennemis en la rue de la Barre du Bec, à l'environ de la porte de derriere de feu maistre Bureau Boucher, lesquelz chargerent sur lui et de premiere arrivée vindrent oster et souffler deux torches qu'on portoit devant lui. (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 112).

B. -

[En dehors du domaine militaire ; au propre ou au fig.]

1.

Se guetter de qqn/qqc.

a)

"Être sur ses gardes à propos de qqn, se méfier de qqn" : Marc out non, son filleul estoit, Si que de lui ne se guetoit Mes du tout en lui se fiout Pour la grant amour qu'a lui out. (Vie st Evroul S., c.1350, 86). "...se rois Danemons se veult de nous guetier (...), Toute crestienté nel poroit deffoukier." (Renaut Mont. B.N. V., c.1350-1400, 578). Car parce qu'il me fait mal, il peche comme un autre ; et ovec ce, il peche par ingratitude et si ne me guette pas de lui. (ORESME, Pol. Arist. M., c.1372-1374, 300). ...et puis vous trouverez sur vostre chemyn un grant boais ou yl y a grant cop des larrons, si comme l'en dit, et pour ce, mon signeur, gaitez vous bien de eux, car ils font biaucop de mals. (Man. lang. G., 1396, 52). Mais nonobstant toutes ces choses et ces grans dissimulacions, elle se gaitera d'eulx de tout ce que elle pourra, et sera adés sur sa garde. (CHR. PIZ., Trois vertus W.H., c.1405, 64). ...de flateurs qui ainsy saluent se doibvent les saluez plus soingneusement guetier que gré leur en sçavoir. (Curial B.-H., a.1447, 361).

b)

"Se méfier de qqc." : Chascun des gardez s'avala De la tour et souper alerent, Quer de rien ne se guetierent (Vie st Evroul S., c.1350, 111). ...et ainsi, puisque c'est fort de tenir le moien, il vault mieulx soy traire vers le mendre peril et plus soy garder et guectier du plus. (ORESME, E.A.C., c.1370, 173).

-

"Se garder de qqc." : Si me sembla lors si tresbelle (...) Que sa grant biauté convoitier La me fist. Ne m'en seu gaittier (Mir. emper. Romme, 1369, 307). Item, entre toutes autres choses l'en doit grandement et forment eschivier ce qui est delitable, et soy garder et gaitier de delectacion sensible (ORESME, E.A., c.1370, 173).

-

Se guetter de + inf. "Se garder de, éviter de" : ...pour quoy, s'il t'ouent souffler par aucune aventure, il te [courront] sus par tres grant aïr, et lors t'avront tost devouré : si te guette de hault souffler. (Bérinus, I, c.1350-1370, 66).

c)

Empl. abs. Se guetter encontre. "Être sur ses gardes" : Et convient soy bien garder et gaitier encontre et en ce mectre tres grant diligence, si comme il fu dit ou derrenier chapitre du secont (ORESME, E.A.C., c.1370, 229).

-

Sans guetter. "Sans faire de réserves, sans hésitation" : Li uns d'eaus dist que sans gaitier Traitassent amiablement, Pour pais avoir et pleinnement. (MACH., P. Alex., p.1369, 134).

2.

Guetter qqn/qqc.

a)

"Surveiller qqn, ne pas perdre de vue qqn (pour éviter un danger)" : Haiois Delehaye (...) avoec pluiseurs autres avoit waitiet aucunnes gens et ychiaus sermentés qu'il n'estoient point atenant a autres cui il wettoient. (Arch. Nord, 1359, B 10284, f° 4, IGLF). Item, fu uns capelains le signeur d'Esclerbes tant wetiez qu'il fu pris viers Sorre. (Arch. Nord, 1371, B 10312, f° 20 v°, IGLF). ...[ils] se partirent hors d'icelle chambre, et s'en alerent pour coucher en la chambre de leur hoste, en laquele chambre ilz qui parlent se tindrent toute la nuit tous vestuz, pour la doubte qu'ilz avoient d'icelli prisonnier et sesdiz compaignons ; et celle nuyt se firent guettier par leur hoste jusques au point du jour, qu'ilz se partirent dudit hostel (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 140). ...l'ostel de ceens est fort donné a aultre chose(s) que a nous guetter (C.N.N., c.1456-1467, 306).

-

"Attendre qqn, guetter la venue de qqn" : Car maintenant nous en yrons La endroit, et la gueterons [l'amie] Tant qu'elle viengne. (Mir. nonne, 1345, 333).

b)

"Surveiller, guetter qqn pour le surprendre, monter un guet-apens à qqn" : Vous vez que l'ennemy me gaite Et me suit pour mettre en ses las. (Mir. enf. diable, c.1339, 37). Li vieillart reponnu s'estoient Ou vergier, et la la gaitoient [Suzanne] Que seule la peüssent prendre. (MACH., C. ami, 1357, 6). Et cedit jour, au soir, environ deux heures de nuit, mons. l'evesque d'Evreux, Balue, fut guetté et acueilly par aucuns ses ennemis en la rue de la Barre du Bec, à l'environ de la porte de derriere de feu maistre Bureau Boucher, lesquelz chargerent sur lui et de premiere arrivée vindrent oster et souffler deux torches qu'on portoit devant lui. (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 112).

c)

Guetter qqc. "Surveiller qqc." : Par ma foy, je croy, puis qu'il demeure tant, qu'il soit retenus et qu'il ait la dedens aucuns sergens que on y ait mis pour le tresor guetier. (Bérinus, I, c.1350-1370, 394).

-

Guetter (le moment où...) "Faire attention pour ne pas laisser passer (le moment où...)" : Et adonc Milie la courtoise ne s'estoit pas mise en oubly, ains gaita l'eure que elle cuida que Aigres deüst venir, et envoia a l'encontre de lui une de ses chamberieres que l'en enmena si priveement que nuls homs ne se apperçeüst de lui. (Bérinus, II, c.1350-1370, 77).

-

Guetter + interr. indir. "Faire attention + interr. indir." : Donc la sage gouverneresse, qui tousjours sera pres de sa maistresse, prendra bien garde aux semblans et manieres de tous pour gaitier s'elle pourra apercevoir par quelque semblant que aucuns ou aucun y voulsist penser. (CHR. PIZ., Trois vertus W.H., c.1405, 97).

d)

"Rechercher qqn ou qqc., désirer qqn ou qqc., convoiter qqn ou qqc." : Quant Percevaus vit la retraite, Comme cils qui desire et gaite Le bien, le profit et l'onnour Et la grace de son signour, Il n'ot en li que couroucier. (MACH., P. Alex., p.1369, 86). Au larron vient et si lui giette Sa male qu'il convoitise et gaite, Et lui dit : Tien, maleureux, Si nous reposerons tous deux (CHR. PIZ., Chem. estude P., 1402-1403, 201). Se tu la prens, qu'elle soit belle, Tu n'aras jamais paix a elle, Car chascuns la couvoitera, Et dure chose a toy sera De garder ce que un chascun voite Et qu'il poursuit et qu'il couvoite, Car tu as contre toy cent oeulx, Et li desirs luxurieux Est toutes fois contre beauté, Qui est contraire a chasteté. (DESCH., M.M., c.1385-1403, 56). Car ceuls qui ainsis le feroient, Mariez, griefment pecheroient, Et encor puelent ilz pechier, Se l'un d'eulx a autre plus chier Et que homs femme autre convoite Que la sienne, et la sienne voite Autre homme et qu'elle l'aime mieulx Que son mari, si m'ait Dieux. (DESCH., M.M., c.1385-1403, 345).

3.

Guetter à qqc./à + inf./ guetter que

a)

Guetter à qqc. "Avoir qq. en vue, tendre à qqc." : En cuer ma dame une vipere maint Qui estoupe de sa queue s'oreille Qu'elle n'oie mon doleureus complaint : Ad ce, sans plus, toudis gaite et oreille. Et en sa bouche ne dort L'escorpion qui point mon cuer à mort ; Un basilique a en son dous regart. (MACH., L. dames, 1377, 184).

-

Guetter à + inf. "Viser à" : Et quant l'instruction fu faite, Li roys, qui ne pense ne gaite Fors à ses annemis destruire, Fist beccuit et vitaille cuire ; S'en fist leur galée garnir Largement jusqu'au revenir. (MACH., P. Alex., p.1369, 127).

b)

Guetter que + subj. "Veiller, faire attention à ce que" : ...Et le retins pour mon ami, Einsois qu'eüsse mon mari, Qui me deffent Et me gaite mout durement Que ne voie son corps le gent, Dont li cuers en .IJ. pars me fent ; Car il m'estuet Malgré mien faire ce qu'il vuet, Dont durement li cuers me duet. (MACH., Motés, 1377, 513). L'exposicion de ceste fable peut estre que aucun poissant homme ama une damoiselle que sa femme prist par devers soy pour gaitier que son mari n'i peust adeser (CHR. PIZ., Ep. Othea L., c.1400-1401, 199).
 

"Celle qui guette" : Ele fu bonne gueteresse [Marie], Quar en lui n'avoit nule peresse ; Quar la guete mout doit veillier Et diligemment espïer Qu'au chastel n'aproche nului Qui i face assaut n'ennui (Propr. choses Rosarius Z.S., c.1330, 69).
 

A. -

"Droit de guet ou de redevance remplaçant l'obligation du guet" : Item la gueterie que messire a sur chaque feu de ladite terre 1 boisseau excepté les femmes veuves et ceux de la ville d (Doc. 1338. In : M. Belotte, La Bourgogne au Moyen Âge, 1972, 98). [texte "adapté" à l'usage moderne]

B. -

"Garde"

-

Sans guetterie. "Sans être sur ses gardes, sans prendre garde" : Tousjours ay desiré a mengier a privee compaignie afin que moy et ceulx qui avecques moy seroient osassent dire leurs bons motz sans gueterie. (Percef. I, R., t.1, c.1450 [c.1340], 677).
 

"Celui qui fait le guet, la veille" : ...la simplesce se monstre plus largement aus guetteurs des environnans qui les considerent, et plus legierement est supplantee. (FOUL., Policrat. B., III, 1372, 231). ...sytost comme iceulx XX ou XXX hommes sauroient et verroient que ledit portier se seroit trait arriere et eslongnée la porte dudit chastel pour aler mettre hors yceulx gueitteurs, et auroit lessié l'uis ou guichet d'icellui ouvert, que ilz se boutassent, meissent et entrassent entre ledit portier et la maistre porte dudit chastel (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 191).

-

Guetteur de chemins. "Celui qui se met en embuscade sur les chemins pour détrousser les gens, voleur de grands chemins" : Sy ne demoura gueres que ilz trouverent larrons et guaitteurs de chemins qui tous les desroberent et leur osterent toute leur marchandise et avec ce les batirent et villainement navrerent, et telz y ot qui en furent occiz. (EVR. CONTY, Harm. sphères H.P.-H., c.1400, 35). Guecteurs de chemins, desrobeurs et desserpilleurs des trespassans doibvent estre pugniz corporellement, comme trainez, penduz, et confiscacion de meubles (Cout. instit. Anjou Maine B.-B., t.1, 1411, 434). ...et teillement que les gens marchans et autres du païs n'osoient aller par païs en leurs affaires pour l'effroy et commune voiz qui estoit au païs des dis larrons et des gietours de chemins (Actes norm. H., t.1, 1413, 53). LE PREVOST. Veu les faitz dont tu es coulpable Et la vie dont tu as vescu, Guetteur de chemin convaincu, Et, comme assez il t'est prouvé, Meurtrier et larron approuvé, Faulx accusateur criminel, Vïolateur de femmes tel (...) Te condampne a estre pendu (Myst. jeune fille L., c.1413-1445 [c.1530], 69). Pareillement vïolateurs, Vïolentement oppresseurs De filles, femmes sans respit, Selon les droitz et vray edit Encourent crime capital ; Et au cas semblable et esgal, Gens obstinez, felons, et fiers, Guetteurs de chemins et meurtriers De faict et d'aguet, loy et raison Si les privent de remission (Myst. jeune fille L., c.1413-1445 [c.1530], 69). Oyans lesquelles parolles, lesdiz supplians furent fort espoventez et esmeuz, cuidans que ce feussent guecteurs de chemins qui leur voulsissent faire desplaisir, attendu le parler dudit feu Jehan, l'eure et le lieu, qui estoient fort suspectz. (Doc. Poitou G., t.12, 1480, 311). ...c'est un maistre guecteur de chemins (Lettres Ch. VIII, P., t.1, 1488, 312).

REM. FEW : «guetteur de chemins (Est 1538 - Rich 1759)» ; DEAF : «gueiteor de voies "brigand, voleur de grand chemin" [(...) guetteur de chemins Est 1538 - Rich 1759]».
 

"Qui guette, qui tend des pièges" : Nous ne sommes point convoiteux, Ne l'un contre l'autre gaiteux (Renart contref. R.L., t.1, 1328-1342, 149). Guedaff (...). Inde insiduosus (...) g. gaiteus insidieux ou espieux (LAGADEUC, Catholicon G., 1499, 102).
 

"Sentinelle, garde" : De deus censisseurs deviers Haul pour nient avoir volut obeïr ou tamps de le wierre au waitier le ville de Haul (...) LXIII livres (Arch. Nord, 1367, B 10302, f° 12, IGLF). ...Jehan Beauvarlet, guettier, pour 32 s. p. (Comptes Paris V.L.D., t.1, 1424-1457, 159).
 

"Guet relevé ou contrôlé pendant la nuit" : ...que Bernart Courtault et Robbert Le Maire fassent la resserche par la ville de ceulx qui font guez et reguez et gardes portes (Doc. 1374. In : P. Rézeau, R. Ling. rom. 78, 2014, 431). [Archives hist. de la Saintonge et de l'Aunis] Tous sont d'assentement que Bernart Fradin et Roger Grolea purgent les prouffiz des deffaus des garde porte et de regaix et gaix pour les exequter, et les commandans des cinq quartiers leur sauront a dire, chascun soir, lesdiz deffauz (Doc. 1375. In : P. Rézeau, R. Ling. rom. 78, 2014, 431). [Archives hist. de la Saintonge et de l'Aunis] Que Pierre du Meslier le jeune, Bernart Gratemoyne (...) fassent la resserche chez touz les habitanz de ceste ville pour avoir croissance aux gaix, regaix et garde portes (Doc. 1380. In : P. Rézeau, R. Ling. rom. 78, 2014, 431). [Archives hist. de la Saintonge et de l'Aunis] Sont d'assentement (...) que monsieur le maire puisse desgaigner celi ou ceux qui deffaudront a la garde porte, au guayt et reguayt et estierguait, pour chascun deffaut deux souls six deniers (Doc. 1381. In : P. Rézeau, R. Ling. rom. 78, 2014, 414). [Archives hist. de la Saintonge et de l'Aunis] Jehan Douce et (...) Jehan Vallet (...), qui estoient accusez d'avoir laissé les murs de la ville ou ils fasoient le regait pour aler au vergier de Boursiquaut querre frustailhe par nuit (Doc. 1406. In : P. Rézeau, R. Ling. rom. 78, 2014, 421-422). [Archives hist. de la Saintonge et de l'Aunis]

Rem. Doc. 1367 (bourg., reguest), 1411, 1427, 1450 (orl., berr., reguet) ds GD VI, 732c.
 

A. -

"Guetter, surveiller" : ...et la fut parcevant les paiens qui des creteaulx aloient ses gens regaitans. (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 144). Hulin par le chastel a pris a regaittier Et a veü maint moignes ensamble tutiller (Huon Bordeaux B., c.1400-1450, 429).

-

"Guetter le retour de, accueillir à leur retour" : Blancheflour le roïne et se fille au cors chier Sont au degrez venus pour leur gent rewaitier (Hugues Capet Lab., c.1358, 126).

B. -

"Regarder, observer (avec attention)" : Quant en la ville entrait, moult se pot mervillier De la grande noblesse qu'ill i pot regaitier (Lion Bourges K.P.F., c.1350, 159). [Autres occurrences p.255, 371 (regaitier), 476 et 1040 (rewaitier)] Tristan yst de la tente, sy print a reguetier La cité d'Ermenie qui moult fist a priser. (Tristan Nant. S., c.1350, 394). Mais pour sa grant beauté fut souvent reguetie (Tristan Nant. S., c.1350, 594). La fut molt dez barons la belle reguettee, Pour sa grande beaulté estoit forment prisee (Flor. Octav. L., t.1, c.1356, 370).

Rem. Pour d'autres ex., cf. T-L VIII, 594, GD VI, 733a, et Scheler, Gloss. Geste Liège, 250 (s.v. regaitier et regartiet).
 

"Guet de nuit ou soldats d'arrière-garde chargés de faire le guet"

Rem. Doc. 1361 (Tours, rere-guet) ds FEW et doc. 1384, 1415, 1418, 1420, 1474 (riere guet, rere guet, ryere guet, rierre guet, rerre guet) ds GD VII, 192a. Aussi Reg. Poitiers F., t.2, 1453, 60 (rereguet) ; Reg. Poitiers F., t.2, 1465, 255 (rereguet, repris plus bas par arrere-guetz et arreguet).
 

"Garde de nuit, guet" : ...Guillaume du Bos, menestrel, demourant ou chasteau de Lens, a fait et corné le sourghait, ou dit chastel, journellement du soir et du matin (Comptes Lille L., t.2, 1469, 223).

Rem. Doc.1415-1416 (sourgais), 1424 (surgait), 1433 (sourguet), 1482 (surguet), 1486 (sorgait), 1487 (surgayt), 1492 (sourghet) ds GD VII, 532b.
 

I. -

"Action de faire la garde de nuit, guet" : Autres prinses et reprinses, par aguetz, pour sourguetz, par embusches et par muches furent faites et achevées (MOLINET, Chron. D.J., t.1, 1474-1506, 371).

Rem. Doc. 1415-1416 (Boulogne-sur-Mer, pour les sourgais et tours de la ville), 1424 (comme Colin Picardel ait esté commis...a faire le surguet pour la nuit sur murs de la ville de Bruieres, même ex. ds DU CANGE VII, 680a, s.v. surta), 1433 (Amiens, pour le guet ou sourguet), 1482 (Meurthe), 1486 (Dinant), 1487 (Liège, ghait ou surgayt)1492 (Amiens) ds GD VII, 532b.

II. -

"Sentinelle, garde" : Item, en le chambrette du sourguet, ung cheminel de fer qui est rompu (Arch. Nord, 1470, B 3533, n° 12566, IGLF).