C.N.R.S.
 
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     SURPRENDRE     
FEW IX 350b, 351a prehendere
SURPRENDRE, verbe
[T-L : sorprendre ; GDC : sourprendre ; DÉCT : sorprendre ; FEW IX, 350b, 351a : prehendere ; TLF : XV, 1184a : surprendre]

Empl. trans. [Composé de prendre]

A. -

[Sans idée de surprise]

 

1.

"Prendre, s'emparer de"

 

a)

Surprendre qqc. (à qqn). "Prendre, ravir, enlever qqc. (à qqn), s'emparer de qqc. (au détriment de qqn)" : [Charles "soi disant de Bourgogne" se substitue à son père] ...il a seurprins l'obeissance et auctorité de ses païs et seigneuries tellement que pour ses commandemens bon n'eust riens fait se led. Charles soy disant de Bourgoigne ne l'eust commandé, luy osta ses gens et serviteurs (...) et luy en bailla d'autres a sa poste ["à sa propre convenance"] (Doc. 1470. In : Bessey-Paravicini, Guerre des manifestes, 2017, 185). Grant don m'a donné Dieu, mon pere, A qui rien n'est qui ce compere ; Et ce que mon pere aura pris, Jamais ne luy sera sourpris, Car mon pere et moy sommes ung [Réf. à Jean 10, 29]. (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 470).

 

-

Surprendre la vie de qqn. "Faire mourir qqn" : Par sa faulseté et malice De Clery desroba l'eglise ; Mais Dieu en a fait la justice, Que sa vie a esté surprise. (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 205).

 

b)

Surprendre qqn/un animal

 

-

Surprendre qqn. "Prendre qqn, s'emparer de qqn" : Se Fortune si m'a fait prendre Et surprendre Sans attendre, Ne me vueilles habandonner, Mais te plaise moy reprendre Et deffendre De cueur tendre (RÉGN., F.A., 1432-c.1465, 16). LUCIFFER. Je congnois bien qu'il est plus dur que fer Envers le Dieu qu'en soy a volu prandre ; Mais pour trop mieulx a peché l'eschaulfer Et en noz las gayement le surprendre, Il te convient ta peau ridee estandre Et te bouter en forme de Venus, Car, par ce poinct, comme tu peulx entendre, En nostre enffer cent mille sont venus. (LA VIGNE, S.M., 1496, 479).

 

.

[D'un animal] Surprendre un animal : Or vëons comment ce seroit Qu'une dame ressambleroit L'esprivier qui l'oiselet prent Et vers le vespre le sourprent, Pour les piez tenir en chaleur, En signe d'aucune valeur. (MACH., D. Aler., a.1349, 286).

 

-

Surprendre un animal. "Prendre un animal (dans les rets)" : Mais la vanité de l'onneur mondain et le delit que l'erreur humain prent d'avoir povoir sur autrui aleche les folles pensees a tousjours vouloir rentrer en cest experimenté peril, comme l'oisel qui se fiert en la rethz ou il a veu les aultres surprendre et couvrir (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 8).

 

2.

Surprendre qqc. "Entreprendre qqc." : Comment fut la chose surprinse ? Sathan, dy nous tout par ton ame. (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 83).

B. -

[Avec l'idée de surprise] Surprendre qqn. "Prendre qqn au dépourvu, à l'improviste, par surprise"

 

1.

[D'une pers.]

 

a)

"Prendre qqn au dépourvu" : ...ilz mirent le feu en leurs propres maisons et, à l'advantage du vent, surprindrent, bruslerent et occirent plusieurs de nos gens, et la pluspart mirent en desroy et en fuyte (LA MARCHE, Mém., II, c.1470, 248).

 

b)

"Attaquer qqn (une troupe) par surprise" : Lors s'en vont logier tous ensemble a la fin que on ne les peust surprendre. (ARRAS, c.1392-1393, 110). Mais, en la fin, ceulx de ladicte ville de Dynan, par traïson et autrement, furent surprins, et entrerent lesdiz Bourguignons dedens icelle ville, qui d'icelle en gecterent et bouterent dehors hommes, femmes et enfans, et retindrent prisonniers les plus notables gens d'icelle ville, et puis la pillerent tellement qu'il n'y demoura rien. (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 164). Pour ce dist-on que l'homme propose et Dieu dispose, ainsi qu'il appert par le Jouvencel, qui cuidoit surprendre ses ennemys (BUEIL, I, 1461-1466, 63). Et nous irons là où sont les gens d'armes logiés, et ferons une grande traicte et, à la grace de Dieu, nous les surprendrons et les destrousserons. (BUEIL, I, 1461-1466, 150). ...c'est ung des plus grans dangiers qui soyt en la guerre que de aller surprendre gens loing (BUEIL, II, 1461-1466, 242). Par quoy les surprendroient de si près qu'ilz les tueroient ou prendroient avant que leurs gens fussent assembléz (COMM., I, 1489-1491, 154).

 

c)

"Prendre qqn sur le fait" : ...elle fut bien esbahye, et encores plus monseigneur et Jehannette, qui se trouverent ainsi sourprins. (C.N.N., c.1456-1467, 272). ...l'aultre, qui se trouve surprins et en meffait present achopé, ne savoit sa contenance (C.N.N., c.1456-1467, 290). ...ne se donnerent garde que le mary les surprint (C.N.N., c.1456-1467, 435).

 

2.

[D'une chose] "Prendre qqn au dépourvu"

 

a)

[D'une chose nég., maladie, faim, défaut, péché...] "Prendre qqn au dépourvu, se saisir, s'emparer de qqn" : Dame, sauf vostre reverence, De mon ombre n'ai pas doubtance. Mais je ne say quele chalour Qui s'est convertie en froidour M'a seurpris et me tient au cuer Si soudeinnement qu'a nul fuer Ne porroie dire en quel point Sui, ne comment elle me point, Car j'ay chaut et froit si ensamble Que tout a un cop sue et tramble (MACH., R. Fort., c.1341, 114). Mais il est bien tout autrement : Car avant que homs son sens perde, Ne que forsens a lui s'aërde, Le prent et seurprent maladie Qui le trait a forcenerie. Si vueil faire un po d'argument Qui vous moustrera vivement Comment m'entente prouveray Dou droit que pour moy trouveray. (MACH., J. R. Nav., 1349, 227). ...Toutes foiz que je t'ay monstré Les offenses et les pechiez Dont surpris es et entechiez (Mir. parr., 1356, 12). Car se j'y vois en verité J'ay grant doubte d'estre tempté Et que pechié ne me surprengne (Mir. st J. Paulu, c.1372, 113). ...il, par fain de dormir qui le surprint, s'en ala coucher dormir sur un siege estant auprès de l'autel et en la chappelle Nostre-Dame (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 364). Et se vous donnez par plaisance, gardez que fole largesce ne vous surpreingne, tant que on s'en puist escharvir de vous, car ceulx qui auroient desservy que vous leur feissiez bien, s'en tendroient pour mal contens, et les estrangiers vous en blasmeroient en derrier. (ARRAS, c.1392-1393, 85). En ce temps la, Herculés fu seurpris d'une griefve pestilence (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 160). Tel maladie le surprist, Dont tost aprés la mort le prist. (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 242). ...et par especial en la chambre de Parlement, aux jours des Plaidoiries, a telle tousserie de touz costez que à peinne le graphier, qui a esté surpriz de la dicte maladie à VIIJ heures, puet enregistrer au vray. (BAYE, I, 1400-1410, 90). Et moy mesme fu hier au vespre en venant de Nostre Dame surprins de ladicte maladie telement que je ne me puiz soustenir (BAYE, II, 1411-1417, 173). ...elle se trouvera en pou d'espace si adicte et de mal souprinse que la mort luy sera derrain remede. (C.N.N., c.1456-1467, 140). Y pert bien de leur faulx abus, De penser estre remis sus Par une fille mal aprise, Qui de faulceté est reprise Et de paillardise surprise. (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 549). A peine que le cueur me fault, Tant de doleur je suis surpris (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 561). Mais gardons nous que le sommeil Ne nous surpreingne ! (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 820). ...par quoy la fain Nous commence fort a supprendre (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 997). ...mais il fut tant surprins de maladie qu'il vesquit peu et mourut (COMM., III, 1495-1498, 90). SAINCT MARTIN. (...) Mes freres de vouloir parfaict, Notez bien ce que vous viens dire : Quelque chose prandra effect Que l'on ne pourroit contredire. Pour ce, ne soyez surpris d'ire Si le cas ung petit vous touche (LA VIGNE, S.M., 1496, 557).

 

-

Se laisser surprendre : Priéz par grant devocïon Que n'antrés en temptacïon, Car la char est enferme et tendre Et se laise tretost surprandre. (Pass. Semur D.M., c.1420 [1488], 176). [Réf. à Marc 14, 38]

 

.

Estre surpris. "Être pris au dépourvu" : Avec ce pris dou tout la cure De li amenistrer pasture [à l'épervier], De baillier par condition De certeinne proportion, A point et ordenéement, Ne trop ne po, rieugléement, Une fois plus, une autre meins, Et tout passer par mi mes mains. Mais de piessa l'avoie apris, Se ne pooie estre sourpris. Et il de sa propre nature Se metoit a sa norriture Si a point que riens n'i failloit. (MACH., D. Aler., a.1349, 276).

 

-

Part. passé en empl. adj. Surpris (de vin). "Ivre" : Et burent de ce vin tant qu'il furent sourpris (Hugues Capet Lab., c.1358, 163). ...ilz (...) entrerent en une taverne, pour illeuc prandre leur refection, et illuec burent si largement de vin que ilz furent surpriz et chargiez de vin (Doc. Poitou G., t.5, 1384, 214). ...le dit exposant qui estoit yvres et seurprins forment du dit vin, courroucié de ce que le dit Perrot par force lui avoit voulu oster en la dicte taverne un grand coustel qu'il avoit, dist au dit Perrot que il avoit battu tellement sa femme que elle avoit eu deux enfans senz baptesme (Doc. Poitou G., t.6, 1391, 55). ...ledit Jehannin Morisse hastivement, come surprins de vin, respondi que oncle ne compere n'y serviroit de riens. (Chancell. Henri VI, L., t.2, 1434, 278). ...lequel Laem, qui lors estoit fort chargié et surprins de vin... (Doc. 1467. In : Ch. Petit-Dutaillis, Doc. nouv., 1908, 212).

 

-

[Plus rarement d'une chose perçue positivement, comme la joie, l'amour, la beauté d'une femme, le rire...] : S'estoit mes cuers certeinnement Seurpris si amoureusement De joie, quant penser pooie Et quant appertement vëoie Qu'Amours, pour moy plus amender, Me fait servir et honnourer Loyaument, sans penser folour (MACH., D. verg., a.1340, 17). L'ONCLE. Certes, niepce, se sceussiez Conment de vostre amour forment Sui surpris, je croy qu'autrement Respondissiez. (Mir. marq. Gaudine, 1350, 133). Mais onques vo vueil ne repris, Ains ay apris, Com bien a pris, De vous une noble apresure, Qui telle est que ma peinne dure Aveuc m'ardure, Qui moult me dure, De cuer endure, Pour vo biauté qui m'a sourpris. (MACH., Les lays, 1377, 281). Et ad ce propos dit un sage qu'il n'est chose qui tant surprengne les cuers de subgiéz ne tire vers leur seigneur, comme quant ilz treuvent benignité et doulceur en lui (CHR. PIZ., Trois vertus W.H., c.1405, 71). ...si ne se peut elle contenir (...) que force de rire ne la surprint, qu'elle cuida longuement retenir. (C.N.N., c.1456-1467, 35). Le roy, de prime face, fut tant surprins de la joye qu'il eut de ceste nouvelle, que à grant peine sceüt-il quelle contenance tenir. (COMM., II, 1489-1491, 159).

 

b)

[De la nuit, du jour, du temps qu'il fait...] "Prendre qqn au dépourvu, se présenter à qqn sans qu'il s'y attende" : ...retraiez vous tandis que la lumiere du jour avez et ains que la nuit vous surpregne (CHR. PIZ., Trois vertus W.H., c.1405, 212). Car lui estant en chasse apprès son tresgrant sengler, la nuit tout seul le sousprinst, sy ne sceut plus ou aller. (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 166). ...le jour les sourprenoit si largement qu'elles ne savoient comment saillir de l'ostel (C.N.N., c.1456-1467, 373). Pource qu'aprés l'yver froit nous surprent... (MESCHIN., Lun. princes M.-G., c.1461-1465, 31). Une tempeste la surprent (FILLASTRE, Traité Conseil H., c.1472-1473, 141). Et la nuyct les surprint, qui saulva la vie à beaucoup de Liégeoys (COMM., I, 1489-1491, 106).

 

3.

[D'une pers. ou d'une chose] "Susciter la surprise, l'étonnement" : Il fut tant joyeux et tant surpris, quand il vit sa dame si belle et en si bon point, qu'il perdit force, sens et advis (C.N.N., c.1456-1467, 194).

 

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Part. passé "Stupéfait" : Tandis que ma povre fantasie tormentee de diverses considerations recuilloyt lez parolles en la prose dessus recitees, debatant a par moy tous ces partis, et que cha ne la je ne trouvoye fors espoventement et contrarieté, je demouray tout suspens et surprins, et mes pensees vagues et esgarees, sans ordre et sans certaine fin, ne vraye election (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 17). Seigneurs, je reviens tout surpris Et saichés que, puis le partyr, J'ay eu grant peine de bastir Mon fait pour eviter dengiers. (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 673). Mais incontinent que les Françoys arriverent devant la dicte tour, ilz furent bien esbahiz, et non sans cause, car ilz n'avoient pas adverty de veoir tant de testes armees devant, ne si grosse artillerie qu'on leur monstra de prime face ; parquoy comme gens estonnez et surpris pour chose qu'on sceust dire ne faire, parler ne voulurent, mais firent les sours (LA VIGNE, V.N., p.1495, 293).

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DMF 2020 Robert Martin

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