I. -

[Objet concret rectiligne]

A. -

"Cordeau"

1.

Au propre : ...la ligne qui est atachiee a la lesse du faucon (HENRI FERR., Modus et Ratio, Livre deduis T., c.1354-1377, 186). Et en milieu de chel archon ara lié une ligne (HENRI FERR., Modus et Ratio, Livre deduis T., c.1354-1377, 278).

-

[Utilisé dans divers métiers] : Fevre, charpentier et maçon, Paintre, manouvrier, escripvain Ne puelent par juste façon Faire ouvraige qui ne soit vain, S'esquierre n'ont ou ligne en main (DESCH., Oeuvres R., t.7, c.1370-1407, 203).

-

"Règle de maçon" : ...pour 3 asselles dont on fist formes de 4 piés de long servant a taillier toutes manieres de pierres de grez et pour faire trois lignes servans aus dis machons (Doc. 1457. In : Y. Coutant, Terminol. du moulin médiév. dans le comté de Flandre, 1994, 728).

-

Aussi / plus droit que ligne / droit comme ligne : Mais li lyons me convoia, Sans moy laissier, et m'avoia Tout droit par devers la nacelle Par une petite sentelle, Pour laissier le lieu a senestre Ou les bestes soloient estre. Si me mena plus droit que lingne, Com cils qui se joint et alingne, Polist, deleche, amenevist, Si qu'onques mais ame ne vist Beste plus gente ne plus jointe, Plus esveillie ne plus cointe. (MACH., D. Lyon, 1342, 233). Item, comme il soit verité que aucune chose est saine et profitable as hommes qui n'est pas saine ne bonne as poissons, et aucunes choses sont qui tousjours et par tout sont unes si comme ce que est blanc, il est blanc a tous et par tout, et ce qui est droit comme une ligne ou un reglet, il est droit par tout, - semblablement, estre sage est une chose par tout et tous le diroient estre d'une meïsme maniere. (ORESME, E.A., c.1370, 342). Je tyre [à l'arc] ausi droit que lignie Je luy ay rompu la forcelle (Myst. st Sébast. M., c.1450-1500, 230). Aussi laissés habillemens Qui font l'homme droit comme ligne (Amant cord. M., 1490, 64).

-

En partic. [Outil du charpentier ou du scieur de long] "Corde frottée d'une substance colorée permettant de marquer la trace que la scie doit suivre" : Et auxi pevent esquarrir leur boiz en ladicte forest sanz mettre chantier, sanz la plate hache, sans lingne et sans sye. (HECTOR DE CHARTRES, Cout. R., 1398-1408, 223). [Sens absent de FEW V, 350 : linea ; mais attesté sous lineola]

2.

P. méton.

a)

[À propos du bois d'oeuvre] "Face équarrie suivant la dimension tracée à la ligne ; côté" : Item, se aucuns des coustumiers avoit boiz prins en ladicte forest et icelui boiz dollé à quatre linguez en sa maison, il seroit acquis à icelui sans amende. (HECTOR DE CHARTRES, Cout. R., 1398-1408, 260).

b)

"Mesure agraire" : Soixante dix quarres y olt, Ainsi le compassa Nembrot, Et en chascune quarreüre Avoit dix lignes de mesure ; Et la ligne, ne doubtez pas, Avoit quatorze mille pas (Renart contref. R.L., t.1, 1328-1342, 85). ...le surplus montant à deux lines XLVIII verges en la parroisse de Heille, icelle terre advenue à monseigneur à cause de bastardie, par la mort de feue Bettekin, fille bastarde de Jehan Vrancx (Comptes Etat bourg. M.F., t.3, 1416-1418, 115).

3.

Loc. fig.

-

À ligne et à compas. "Très régulièrement et parfaitement" : Et s'avoit environ planté D'aubres qui y furent planté, Assis a ligne et a compas (Je les mesuray pas a pas) : Caurriers, figuiers et chastingniers, Amendeliers et frans meuriers Qui moult bel la haie paroient, Pour ce que trés bien y paroient. (MACH., D. Aler., a.1349, 393).

.

À ligne et à esquerre : Conclusion, pour cent mille fleurins On ne sçauroit veoir ung tel appareil. Par carrefours, tauldis et eschauffaulx, Tous compassez a ligne et a esquerre Pour y monstrer la verité du faulx, Et d'autre part ung grant tas de briffaulx S'estoyent mis pour quelque bruyt acquerre. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 166).

-

À (la) ligne. "Exactement" : Mes on ne fait pas tout a ligne. Pardonnes moy l'offencion. (Mir. N.D. Rosarius K., c.1330, 23). Elle [la reine Ratio] garde justice a la ligne, elle veut que chascun ait che qu'il a deservi. (HENRI FERR., Modus et Ratio, Songe pest. T., c.1354-1377, 111). Aux bons promet tout bien, vie joieuse Et aux mauvais dolente et paoureuse Qui ses commans ne gardent a la ligne (DESCH., Oeuvres Q., t.1, c.1370-1407, 221). Ycest bon roy, gardant à la ligne la loy de Dieu... (CHR. PIZ., Faits meurs Ch. V, S., I, 1404, 63).

.

"En proportion (en tenant compte de ce qui est ?)" : Si praticque n'as ou science Lesse tout, prens en patience. Ou commence tes faiz a ligne (CHAST., Temps rec. D., 1451, 96).

.

Fait à ligne. "Bien proportionné" : Tu es de moult noble lignie et est ton corps fait a ligne, tres aptes et tres bien fourmé ; ton engyn s'enfourme et conprent de ligier, car tu es de tres haut et tres noble entendement, honestement as vescu et saintement, en parfaite charité (Songe verg. S., t.1, 1378, 5).

-

Par droite ligne. "Exactement, justement" : Pour ce devons par droicte ligne Boyre souvant coment qu'il aille. (Pac. Job M., c.1448-1478, 188).

B. -

[Pièges]

1.

"Fil muni d'un hameçon, destiné à la pêche" : ...en la mer peschier le vi ; Dedens avoit gete ses ains Et la ligne tenoit aus mains. (GUILL. DIGULL., Pèler. vie hum. S., c.1330-1331, 359). ...2 hoquereaux ["crochet (à poisson) ?"], 7 marteaux, 24 plons et lines (Clos galées Rouen M.-C., t.2, 1356, 145). Va tendre ta ligne, sy pesche. (Mir. ste Genev. S., c.1410-1420, 135). HUMEBROUET, en ferant : Avance toy, pescheur, avance ! Va pescher enmy celle vigne. MENJUMATIN, en ly monstrant une corde : Delivre toy ; vecy ta ligne ! (Mart. st Pierre st Paul R., c.1430-1440, 145). De la pescherie des grans fossez de ladicte ville, que Mesdits Seigneurs tiennent en leurs mains, (...) ils les ont fait pescher en l'esté de ce present compte par Raoulin de Hoctot qui y a mis des lignes, nasses et autres engins pour y prendre des tanches et des enguilles (Comptes Paris M., t.2, 1458-1460, 140). Lequel Frappier peschoit èsdictes pescheries et deffends avec cinq lignes. (Doc. Poitou G., t.12, 1482, 538).

Rem. ALENÇON, In : CH. D'ORLÉANS, Rond. C., 1443-1460, 30 ; Jourd. Blaye alex. M., a.1455, 685, v.17724.

-

Pescher à (la) ligne : ...es lieux qui sont bannaulx l'en peult pescher de jours à la ligne et à la main et non à autre engin (Chartes communes Bourg. G., t.1, 1371, 380). [date incertaine] Item, ilz peuent tendre et peschier en la riviere de Taute et autres eaues des dictes communnes et marests, hors temps de deffens qui est depuis la my aoust jusques à la my mars, de verveux laquelle aval, et peschier à lignes et lop, et à la brige (HECTOR DE CHARTRES, Cout. R.B., 1398-1402, 120). ...deux enfans de ladicte ville d'Argenton, peschoient en la rivière dudit lieu à la lingne (Doc. Poitou G., t.11, 1469, 180).

2.

"Sorte de piège à oiseaux" : A morselez d'un raisin de vigne, Au laz, à l'arc ou à la ligne [les oiseaux] S'enlaçoient parmi le coul (LE FÈVRE, Vieille, trad. De vetula H., a.1376, 69).

II. -

"Suite continue de points, trait continu, réel ou imaginaire"

A. -

Au propre

1.

[GÉOM. et langue courante] : Et doit faire le juge en la maniere que fait celui qui veult ramener et reduire a equalité une ligne qui est divisee en parties inequales (ORESME, E.A., c.1370, 290). ...il traient et mainent une ligne ymaginaire de pol artique jusques a l'entartique, qui sont comme les .ii. pyvoz du ciel (FOUL., Policrat. B., II, 1372, 162). Mesures et lignes trouverent [les Egyptiens] Lors, dont leurs terres mesurerent (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 118).

-

Ligne courbe. "Courbe" : Celles qui se mesurent par une dimension sont toutes quantitez qui ont longueur sans largeur, comme une ligne, dont il en est de deux manieres, c'est assavoir ligne droicte et ligne courbe. (NIC. CHUQUET, Géométrie H., 1484, 101).

-

Ligne droite. "Droite" : Celles qui se mesurent par une dimension sont toutes quantitez qui ont longueur sans largeur, comme une ligne, dont il en est de deux manieres, c'est assavoir ligne droicte et ligne courbe. (NIC. CHUQUET, Géométrie H., 1484, 101).

-

En partic. "Ligne droite" : Le mouvement oblique, tortu ou de travers est composé du reond ou du droit. Car pour tant qu'il se reploie, il a ce du circuler, et de tant qu'il procede selon la line, cellui vient du droit mouvement. (Somme abr., c.1477-1481, 145).

-

"Segment de droite" : Tous triangles sont constituez par troys lignes droictes dont l'une est prise pour la base et les deux aultres pour les deux ypothenusses ; et la ligne descendant perpendiculierement de l'angle des ypothenusses sus la base est dicte cathetuse. (NIC. CHUQUET, Géométrie H., 1484, 110).

.

En partic. "Côté (d'un triangle)" : [Des triangles] aulcuns sont inequilateralz, et ce en deux manieres, car aulcuns ont deux lignes egales tant seulement, et les autres les troys lignes inegales. (NIC. CHUQUET, Géométrie H., 1484, 110).

.

"Rayon d'un cercle" : Exemple de ce nous avons ez nombres, car nous veons que toutes les lignes du cercle se ressamblent en ung ou centre, c'est a dire ou point indivisible qui est ou moyen du cercle, et toutevoies en departant et eslongant dudit centre, ilz se divisent l'un de l'aultre. (Somme abr., c.1477-1481, 158).

2.

"Contour, forme de qqc." : ...car en ce point la vertu et la propriété d'une figure que l'en appelle sarcofegia ou sarcografia est comprise et commise, la quelle est quant l'en attribue proprement et justement les lignes d'un corps aus choses corporelles. (FOUL., Policrat. B., VII, 1372, 492-493).

3.

ASTR. "Suite imaginaire de points ou sa représentation graphique sur l'astrolabe"

a)

Ligne ecliptique. V. écliptique

b)

Ligne de midi. "Demi-cercle céleste allant d'un pôle à l'autre en passant par le zénith du lieu" : Il peut assez clerement apparoir par le Soloil de jour, qui au matin se lieve en orient et depuis monte tant qu'il vient juques a la ligne de mydi et la se depart et descent tant aprés qu'il vient en occident et va tant dessoubz Terre qu'il revient oultre arriere en orient. (EVR. CONTY, Harm. sphères H.P.-H., c.1400, 9). Et supose ceste que le commencement du Cancre soit en la ligne de midy, et le commencement du Capricorne soit ou point opposite en la ligne de mienuit, le commencement du signe du Mouton soit ou point d'occident, et le commencement de la Livre ou de la Balance soit ou point d'orient. (EVR. CONTY, Harm. sphères H.P.-H., c.1400, 14). Car experience monstre que le Souleil, les autres planettes et estoilles se lievent plus tost, et plus tost viennent en la ligne de mydi, et se couchent plus tost a ceulx qui habitent vers orient que ilz ne font a ceulx qui habitent vers occident (FUSORIS, Traité cosmogr. G., 1432, 8).

-

P. méton. "Axe vertical de l'astrolabe qui représente cette ligne (l'est se situant à gauche de cet axe) ; ligne méridienne" : Et sont les tables trenchiees de 2 trais drois a guise d'une crois parmi. Et le bras de la crois venant de annel ou chascune table a un dentelet par le quel elle se tient a un trou dessoubz l'annel, le dit trait jusques a milieu de la table est appelé "lingne de midy". Et l'autre mutet du milieu de la table jusques au bort est appelé "lingne de minuit". Et l'autre trait travers lonc parmi la table est nommé "lingne de vrai orison" ou "vray orient et occident". (PÈLER. PRUSSE, Astrolabe L.F., 1362, 36). Et pour ce se vous voulez savoir premierement le nadair d'aucun degré du soleil mectez icellui degré sur la ligne de midi et vous trouverez son nadair sur la ligne du minuyt (FUSORIS, Astrolabe P., c.1407-1412, 113). Soit mis le degré du soleil sur sa haulteur entre les almicantharaz (...). Or prenez par exemple que nous la trouvons en la quarte qui est entre orient et midi par 20 degrez de la ligne du midi ; ordonnez doncques l'alidade de l'astralabe a 20 degrez pres de l'armille vers orient, et puis couchez l'astralabe tout equidistant a l'orizon et le tournez tant que l'ombre de l'armille chié tout droit sur son costé de l'alidade, et adoncques vous avez les 4 parties du monde par la croysée qui est au dos de l'astralabe ; car la ligne qui descent vers la cheville de l'armille monstre le midi. (FUSORIS, Astrolabe P., c.1407-1412, 119). [Cf. rem. de l'éd., p. 119 ; H. Michel, Traité de l'astrolabe, 1947, 50]

c)

Ligne de minuit. "Demi-cercle céleste allant d'un pôle à l'autre en passant par le nadir" : Et supose ceste que le commencement du Cancre soit en la ligne de midy, et le commencement du Capricorne soit ou point opposite en la ligne de mienuit, le commencement du signe du Mouton soit ou point d'occident, et le commencement de la Livre ou de la Balance soit ou point d'orient. (EVR. CONTY, Harm. sphères H.P.-H., c.1400, 14). Et pour ce se vous voulez savoir premierement le nadair d'aucun degré du soleil mectez icellui degré sur la ligne de midi et vous trouverez son nadair sur la ligne du minuyt (FUSORIS, Astrolabe P., c.1407-1412, 113).

d)

Ligne obscure. "Ligne peu visible, légèrement tracée" : ..fay une ligne obscure depuis le dit degré jusques au centre, laquelle ligne tu partiras en 12 parties egalles. (FUSORIS, Astrolabe P., c.1407-1412, 106).

Rem. Sens non att. dans les dict. fr. mais cf. OED, s.v. obscure, sens 4 : «without clearness of form or outline (...) hardly perceptible to the eye» suivi d'un ex. «Draw an obscure or light line from A. to B.» (1593) ; dans le même champ sém., se situe l'attest. de FUR. 1690, s.v. occulte : «Occulte, en Geometrie, se dit d'une ligne qu'on a peine d'appercevoir, et qu'on tire avec la pointe du compas, ou avec du crayon (...) qu'on efface quand l'ouvrage est achevé».

4.

"Trait, trace, raie" : Et ne pueent estre plusseurs dimensions, quar selonc ymaginacion mathematique, se un point indivisible fluoit et aloit et il lessast apres soy son estrace, ce seroit une ligne, laquelle seroit divisible seulement selonc longitude. (ORESME, C.M., c.1377, 46). ...il est assavoir que les uns espreviers sont de plumage blanc et delyé [ ... ] a travers de petis [ ... ] tendres ou roux assiz en leur poitrine ainsi comme par ordre et a droite ligne (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 151). Et sur chascune plume ou lignes noires qui sont sur la queue a aucune tranchure. (TARDIF, Art faulconn., 1492. In : Chrestom. R., 236). Aucuns dient qu'il fut filz de celui homme, à qui par accident la main senestre fut ostée et ung an après lui fut restituée et, pour enseigne de ce miracle, ou lieu de la conjunction demoura une cycatrice en semblance d'une ligne de sang. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 109 v°).

-

Ligne de la main. "Trait sillonnant la paume de la main" : Les cyromancians se glorefient de dire les secréz par les lignes des mains. (FOUL., Policrat. B., II, 1372, 187).

-

"Trait graphique" : Des quels IX. signes le premier est dit Patha, et est figuréz comme une ligne droite, la quelle mise dessoubz Aleph, fait Aleph signifier autant comme .A. [a fermé] (LEGRAND, Archil. Sophie B., c.1400, 59).

.

ARITHM. "Trait (en partic. trait d'une opération)" : Si le nombre que lon veult partir est moindre que le partiteur, adonc lon doit mettre 0. entre les deux lignes (NIC. CHUQUET, Triparty M., 1484, I, 599). Telles racines de nombres composez se pevent lyer dune ligne et noter en ceste maniere comme la racine seconde de .14. plus R2.180. se peult ainsi mettre R2.14.plus R2.180. (NIC. CHUQUET, Triparty M., 1484, I, 655).

5.

Loc. fig.

-

Droite ligne. "Droite voie" : Mais a ceuls qui sont inobediens et desobeïssans a raison et qui forlignent ou sont hors de la droite ligne de bonnes moeurs, l'en leur doit mectre painnes et pugnicions. (ORESME, E.A., c.1370, 533).

-

Par droite ligne. "Directement" : O mon Ame, a dit icy Raison la saige, vrayement tu parles proprement ; mais je dy oultre que qui pourroit veoir bonté, vie et verité et charité, comme par droite ligne et sans miroir, on congnoistroit Dieu en ostant toutes imperfections que on treuve en creatures (GERS., Trin., 1402, 168).

B. -

P. anal. [Idée d'alignement]

1.

"Alignement"

-

À ligne. "En alignement" : Que les deux pieus qui sont es deus bous de vostre roi soient fichiés a ligne responnans aus deus bous de vos giellez (HENRI FERR., Modus et Ratio, Livre deduis T., c.1354-1377, 280). ...et les pieus qui sont es bous d'icelles doivent estre ferus a ligne endroit les bous des gielles par dedens (HENRI FERR., Modus et Ratio, Livre deduis T., c.1354-1377, 284).

.

À ligne de. "En alignement de" : La rois doit estre fichiee a ligne du pel du bout de la rois et des deus archons (HENRI FERR., Modus et Ratio, Livre deduis T., c.1354-1377, 292).

-

Ligne à ligne : Et quant ilz sont trop espars, les anemis (...). Et pour ce, tous combatteurs (...) estre obeïssans au chief, lequel les doit tous ordonner ligne a ligne et arrengier, et doit mettre les plus fors (...) les premiers, et les plus foibles (...) derriere (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 240).

2.

"Suite de mots disposés horizontalement dans une page écrite" : ...pour lesquelz le Roy en avoit escript en la Court lettres moult especiaulz, signées de sa main, et esquelles avoit escript une ligne de sa propre main (BAYE, I, 1400-1410, 8). ...monseigneur le Chancellier, pour ce present en la Court et par lui monstrée en icelle Court une cedule contenant IIJ lignes escriptes de la main du Roy (BAYE, II, 1411-1417, 8).

-

En pleine ligne. "Dans le texte même" : Et ju, testateres desoirdis, voelhe que les superscriptions desoirescriptes vailhent aussi bien que chu qui stat en pleine lingne. (HEMRICOURT, Pièces div. B.P., 1364, 75).

-

En partic. "Vers" : Rondeaux sont simples lesquelz n'ont que 5 lignes (Règles sec. rhétor. L., c.1411-1432, 20). La taille des serventoys est ainsi comme il s'enssuit, excepté qu'il convient que la derraine ligne soit feminine et de 11 silabes, et la penultime ligne doit estre de 10. (Règles sec. rhétor. L., c.1411-1432, 26). Aultre taille de rondel double de lignes longues et courtes, et les peult on faire de lignes de .X. ou de .XI., qui veult. (BAUDET HER., Doctr. sec. rhétor. L., 1432, 190). Cy s'ensuit forme de vers douzains. Et s'appele vers douzains pour ce qu'il ne contient que douze lignes. (BAUDET HER., Doctr. sec. rhétor. L., 1432, 195). Vers alexandrins sont de .XII. ou de .XIII. sillabes pour le metre et n'a que une seule termination. Le nombre des lignes est a la volenté de l'acteur. Ilz sont nommez alexandrins pour ce que l'ystoire d'Alexandre fut traitie en ceste forme. (MOLINET, Art rhétor. L., c.1482-1492, 223). Aulcuns piét sont masculinins, Comme en ceste ligne premiere ; Les aultres sont femininins, Comme on voit en la derrainniere. (Traité rhétor. L., c.1482-1500, 253).

Rem. Très nombreux ex., cf. gloss. de l'éd.

III. -

[Domaine de la parenté, au propre ou au fig.]

A. -

Au propre

1.

"Suite des degrés de parenté, suite des générations"

-

Degré de ligne : ...la plus grant et saine partie d'iceus sont, li uns son frère, les autres ses oncles, serourges, cousins germains, remués de germain, et autres amis en mendre degré de ligne de lui qui parle, et de Marie, sa femme et espouse (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 209).

-

Ligne collaterale. V. collatéral "Suite des membres d'une famille descendant de la même souche, mais non les uns des autres" : ...en la succession ou hoirrie en ligne collatérale en matière de fief les fumelles ne heritent point avec les masles (Cout. Chât. O.-M., c.1480-1500, 419).

-

Ligne directe / droite ligne. "Suite des membres d'une famille descendant de la même souche et les uns des autres (de père ou mère en fils ou fille)" : Damoiselle, ne pucelette Ne pot estre d'orgueil plus nette, Ne plus pleinne d'umilité, Acompaingnie de pité, En tous cas et en tous endrois, De li. Certes, et c'est bien drois, Car il li vient de droite ligne ; Pour c'en ce cas pas ne forligne. (MACH., R. Fort., c.1341, 8). ...la nacelle entierement Fu faite par moult grant devis, Par grant scens et par grant avis. Car jadis uns Roys la fist faire Qui fu homs de moult grant affaire, Dou quel ceste dame est venue Par droite ligne et descendue. (MACH., D. Lyon, 1342, 189). Et se tu vues dire que tu ne Yès mie subjès de Fortune, Et que ta grant attration Affranchist ta condition, Et qu'elle donné ne t'a mie Ta richesse et ta signourie, Einsois te vient de droite ligne, Li sires qui droit regle et ligne Prent ses vengences si obscures Maintes fois sus les creatures Que nuls ne le porroit penser, Ymaginer ne recenser, Et par maniere trop diverse Trebuche l'un et l'autre verse. (MACH., C. ami, 1357, 67). ...par la coustume des nobles ce qui echiet de pere ou de mere, d'ayeul ou d'ayeulle, il n'y a point de rechat pour ce qu'il vient de droite ligne en descendant. (Cout. bourg. glosé P.M., c.1380-1400, 219). ...par quoy il convenist que la droicte ou directe ligne descendant de hoirs masles cessast et faillist (Ch. VI, D., t.1, 1400, 174). ...A celle generacion Qui de droicte lygne vendroit D'Aaron (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 132). ...filz de roy de droite ligne (CHASTELL., Temple Boc. B., 1463-1464, 115). ...descendans de lui en loyal mariage et ligne directe (Doc. 183. In : V. Carrière, Le Moy. Âge 9, 105, 193). Cestui, selon aucunes siennes escriptures, prenostica la translacion du resne de France de ligne en autre, c'est assavoir de ligne droite à colleteralle et dist vray, car Phelippe de Valoix, cousin des trois enfans du roy Phillippe le Bel, tous roys, il fut fait roy. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 128 v°).

-

Ligne de femme / ligne femelle / ligne masle / ligne de la mère / ligne du père : Tiercement, une loy dit que, se lez enffens descendens de la ligne de fame, conme sont lez enffens de la fille, sont obliés ou testament, le testament est nul, (...) ja soit ce que la mere de ces nepveus fust prochaine du pere, ou temps que le testament fust fait, afin que, en la ligne du pere, la persone laquelle est ou meillieu n'enpechie pas aultre, plus lointain, a ronpre le testament, ne en la lygne de la mere aussi (Songe verg. S., t.1, 1378, 244). Donques, ce priviliege qui est, par la coustume que lez mallez seulement puissent succeder ou royaume, doit estre entendu dez malles de quel costé que ilz soient, de la lygne malle ou de la lygne femelle. (Songe verg. S., t.1, 1378, 245). Car, combien que ledit Charles, roy de Navarre, feust nepveu dudit roy Louys Hutin, touteffoiz estoit il descendu par lignie feminine. (Droiz Cour. Fr. H., 1460, 406). [Ou est-ce le mot lignee ? Peu probable dans ce texte]

-

De ligne en ligne. "De génération en génération" : ...ci endroit devise Le commencement et la guise Comment les amasones vindrent, Et comment leur royaume tindrent De ligne en ligne (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 12).

2.

"Lignée, lignage" : Tu qui donnes fausse sentence, Tu es issus de la semence De Chanaam, qui fu maudite Pour ce qu'en li tous maus habite. Tu n'iès pas de la bonne ligne De Juda qui droit regle et ligne Et qui fu de Dieu beneoite, Pour ce qu'elle estoit juste et droite. (MACH., C. ami, 1357, 14). ...à cause de Katherine de Machecoul, sa femme, il deust estre heritier seul et pour le tout des biens, possessions et heritages de Marguerite de Bauçay, venans et descendens de la ligne et du costé d'icelle Marguerite (Doc. Poitou G., t.3, 1369, 382). ...Que no ligne ne soit dampnée Qui d'Eve fut et d'Adam née (DESCH., Oeuvres R., t.7, c.1370-1407, 144). Car lui et ses enfens vesquirent Tant que de leur ligne nasquirent Maintes grans generacions (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 142). ...pour raison de la succession de feu Agnez, femme de feu Jehan Chevalier (...),venue du costé et ligne de feu Meline Constant, grand-mere de ladite deffuncte (Sent. Chât. Paris M., II, 1406, 507). Item, il est son parent de sa ligne, si prochain comme son cousin germain (Doc. 1408. In : A. Coville, Bibl. Éc. Chartes 72, 1911, 85). Pour ce que de l'attraction Et fréquent inspiration Se corrompent les assistens, Si font mesmes les existens D'une ligne et affinité ; Car iceulx par droite amité Les hantent plus, à dire voir, Et servent, s'ilz font leur devoir (LA HAYE, P. peste, 1426, 140). ...par bastardie ou distaince de lingne (Chron. Mt-St-Mich. L., t.2, Pièces div., 1436, 96). C'est a dire, mon ami : se tu es noble de ligne tu dois estre plus noble de vertus, car la noblesse des bonnes meurs vault trop mieulz que la noblesse des parens (LA SALE, J.S., 1456, 21). Et a chascun des lees du gonffolon estoient de tres riches brodures, les quatre blasons des quatre principales lignes de Saintré. (LA SALE, J.S., 1456, 111). De cestui [Énée] est vostre lingne esveillee. (Epître Romains M., c.1475, 178). LUCIFER. Sathan, tu iras brefvement (...) Tempter l'homme par faulx semblant, (...) Sy fault pour saouler mon envie Qu'i passe son commandement [de Dieu], Tant que la ligne en soit ravye Avec nous en peine et torment (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 47). Qui desprime gens d'anciennes lignes Et esleve ceulx qui n'en sont pas dignes, Dont il se sourt aujourd'huy tant d'excès, Fors seulement le peché des mauvais ? (Cene dieux, c.1492, 120).

Rem. GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 133 (v.9806) ; Myst. Viel test. R., t.2, c.1450, v. 12877 ; t.4, v. 60088 ; 34083 ; VILLON, Test. R.H., 1461-1462, v. 1246 ; MICHEL, Myst. Pass. J., 1486, v.2543...

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"Lignée noble" : Au regard des defendans du dehors le nombre est incongneu, car c'estoit a tous venans, pourveu que ce fussent gentilz hommes, et de toutes lignes. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 261).

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Ligne royale : Il n'est pas de ligne royale Et ne pretend ne ne vouldroit Avoir en nostre regne droit (MICHEL, Myst. Pass. J., 1486, 200). Ysmahel de Maphat, Juif, fut en ce temps de ligne royal, c'est assavoir du roy Sedechias, moult souverain et de grande specullacion en la science des estoilles. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 45 r°).

3.

P. ext. "Suite, compagnie" : Je cognois bien Bourbon, et il est à beau-frère de Charolois ; je l'ai vu tirer souvent de l'arc avecques luy, et sy est de sa ligne. (CHASTELL., Chron. K., t.5, c.1456-1471, 98).

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"Espèce, race (ici de buveurs)" : Jadiz extraict il [maistre Jehan Cotart] fut de vostre ligne, Lui qui buvoit du meilleur et plus cher (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 102).

4.

Humaine ligne. "Genre humain" : O doulz Jhesus, qui passion Souffraz pour la redempcion D'umaingne ligne, Envoye nous ta grace divine, Affin qu'elle nous enlumine Et face digne De ta gloire et fruicion ! (Myst. st Adr. P., c.1450-1485, 81).

5.

"Espèce (animale)" : Le faucon est de VII lignes dont la premiere est faucon laynier la seconde lignye est appellee pellerin la tierce est nommee mo[n]tis la quarte faucons gentilz la quinte gerfaulx la VIe. est sourpoint la VIIe. breoton. (Best. hérald. H.E., c.1435-1450, 477).

B. -

P. anal. "Appartenance fondée sur une identité d'idées, de buts"

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Estre de la ligne de qqn. "Appartenir au groupe, au parti de qqn" : ...[aucuns brigans] le menacerent de le destruire en corps et en biens, s'il ne aloit avecques eulx et estoit de leur ligne et sorte. (Chancell. Henri VI, L., t.1, 1426, 392).

C. -

Au fig. "Direction que prend une chose, sens dans lequel vont les choses" : Et se tu vues dire que tu ne Yès mie subjès de Fortune, Et que ta grant attration Affranchist ta condition, Et qu'elle donné ne t'a mie Ta richesse et ta signourie, Einsois te vient de droite ligne, Li sires qui droit regle et ligne Prent ses vengences si obscures Maintes fois sus les creatures Que nuls ne le porroit penser, Ymaginer ne recenser, Et par maniere trop diverse Trebuche l'un et l'autre verse. (MACH., C. ami, 1357, 67).
 

"Petit vaisseau de mer, chaloupe" : Si fu durement esbahis et tant couri sus le sabelon que il vint jusquez à .I. ligne, .I. vaissiel qui siens estoit. (FROISS., Chron., [Amiens] D., t.2, c.1375-1400, 232). [Même ex., éd. Kervyn, ds GD IV, 782c]