C.N.R.S.
 
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     CRIER     
FEW II-2 quiritare
CRIER, verbe
[T-L : crïer1 ; GD : crier ; GDC : crier ; AND : crier1 ; DÉCT : crïer2 ; FEW II-2, 1484b-1487a : quiritare ; TLF : VI, 490a : crier]

I. -

Empl. intrans.

A. -

[D'une pers.]

 

1.

"Pousser des cris (pour exprimer une émotion forte, pour appeler, interpeller...)" : Messagiers et garsons d'estables Dressent fourmes, trestiaus et tables. Qui les veïst troter et courre, Herbe aporter, tapis escourre, Braire, crier et ramonner Et l'un a l'autre araisonner, François, breton et alemant, Lombart, anglois, oc et norment Et meint autre divers langage, C'estoit a oïr droite rage. (MACH., R. Fort., c.1341, 144). LE SERGENT. Oïl, non Dieu ! Savoir vueil bien Qu'avez ceens a cy crïer. (Mir. enf. ress., 1353, 33). Si tost comme il les vey, il commença à crier. L'un deux sailly tantost avant et le prist par la gueule et luy dist : "Villain, tu y es mors se tu sonnes mot." (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 213). ...et conmenchierent a criier et a huier et a faire signe que on parlast a euls. (FROISS., Chron. D., p.1400, 692). Les autres fuioient à la ville en grant bruit en criant : "À l'arme !" L'eschauguette sonnoit à tout ; chascun crioit pour son cheval ; quelque bon homme de la ville fut priz ; les vieilles crioient. (BUEIL, II, 1461-1466, 16).

 

-

[Formule redondante] Crier et braire : A jeu de dez, ou pis, souvent s'amusent Ou a suÿr quoquars qui les abusent, Ou a chacer corps, temps et robes usent. Le corps leur sue D'aler aprés la povre beste mue ; L'un crie et brait, l'autre l'espieu lui rue, Et la fin est que en un laz on la tue, Ou el s'enlace. (CHART., D. Fort., 1412-1413, 177). Tantost les nouvelles furent a l'admiral que Gallafre estoit mort et que la cité de Mautrible estoit prinse par l'empereur, et tous les cytoiens et habitans estoient mors, dont il se pasma de dueil et commence a crier et a brayre comme homme hors de sens. (BAGNYON, Hist. Charlem. K., c.1465-1470, 152). On orra parler, crier et braire. (Sots triumph., c.1475, 38). GABRIEL [à Sathan]. En Enfer va braire et crier. Dieu si luy fait misericorde. (Mir. st Nic. juif, c.1480-1500, 146).

 

-

[Dans une compar.]

 

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Crier comme un enragé : BEAUCOP. Entre le challit Et la couste, tout bien couché, Et quant le paillart y saillit Il crioit comme ung enraigé. (B. veoir, p.1480, 20).

 

.

Crier comme un homme ivre : Il crie comme ung homme yvre. Maulgré Dieu, qu'il a dure vie ! (Myst. st Laur. S.W., 1499, 259).

 

-

En partic. [D'un petit enfant] : Lors cria haut a sa vois clere L'enfant entre les bras sa mere... (MACH., C. ami, 1357, 12). Puis s'en va coucher et oyt les enfans crier la nuitee, et la dame et la norrice les lessent a l'aventure crier tout a escient par despit du bon homme. (Quinze joies mar. R., c.1390-1410, 32). Dont un enfant, quant est sailli Du corps sa mère, est si failli Qu'il n'a puissance, à dire voir, à soy drecier ne soy mouvoir, N'autre chose ne peut-il faire Fors peu crier, plorer et braire (LA HAYE, P. peste, 1426, 67).

 

2.

"Faire entendre une plainte, une protestation, se lamenter en criant" : Moult a crié, moult a huchié Quant il a le corps approchié ; N'est creature, S'il veÿst le mal qu'il endure, Son brait, son plaint, sa grietté dure (...) Qui n'en plorast a larme sure (MACH., Voir, 1364, 532). Et tant ala [Mélusine transformée en serpent] qu'elle vint a Lusegnen, et l'avironna trois tours, et crioit moult piteusement, et se lamentoit de voix femmenine, dont ceulx de la forteresse et de la ville furent tous esbahiz et ne scorent que penser, car ilz voient la figure d'une serpente et oyent la voix d'une dame qui yssoit de lui. (ARRAS, c.1392-1393, 260). Qant il oirent ce raport, il conmenchierent tout et toutes a criier et a plorer si tenrement et si amerement que il ne fust si durs coers ou monde, se il les veist et oist euls demener, qui n'en euist pité. (FROISS., Chron. D., p.1400, 842). Jamés ne ferons que lainguir, Que ne vault tant crier ne braire, Faisons du pis que pourons faire, Jamés autre plessir n'aray Que faire du pis que pouray. (Pass. Semur D.M., c.1420 [1488], 11). Le medicin ne baille pas a boire au malade a l'apetit de sa soif, maiz choisit et atant l'eure au prouffit de sa santé ; et se le patient crie et se guermente de la durté de son mire, qui le laisse en telle chaleur essever, pour tant n'est meu le sage phisicien a le lui ottrier. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 51). ...il en y eut ung (...) qui dit (...) que "Peuple tousjours crye et se plaint et tousjours paye" (JUV. URS., Verba, 1452, 271). Elle crie, elle plore, elle se demaine, c'est grand pitié que de la veoir. (C.N.N., c.1456-1467, 300).

 

-

Inf. subst.

 

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"Plainte, lamentation" : Fay bonne chiere Et lay ton crier et ton braire. Que vaut uns homs de tel affaire ? (MACH., F. am., c.1361, 231).

 

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"Cri de protestation" : ...ce pelerin que la oy Semble que contre ceste loy Vueille venir par son crier Et par la court toute exciter, A quoi ne me puis consentir (GUILL. DIGULL., Pèler. âme S., c.1355-1358, 42).

 

3.

"Clamer, parler haut et fort" : Ce cheval, comme chascun crie, Fut engendré treschaudement Ou royaume de Trinacrie, Soubs le mont Ethna proprement, De Chaudecolle la jument (MARTIN LE FRANC, Champion dames I-II, P., 1440-1442, 36). Bon Droit pour moy tant criera Qu'aux cieulz fera sa vois ataindre Ou Loyaulté ma payera Dez services qu'ay fais sans faindre. (MARTIN LE FRANC, Champion dames I-II, P., 1440-1442, 340). "Ne sçay qui vous meut, vassal", fet (...) [la royne] "de refuser ce qu'en ma vie ne voulus a nul homme ottroyer, mais puisque d'amer ne me daigniés requerir et qu'ensy suis deceue, sachiés que d'Amours et de vous je me vengeray, car je crieray, si ques mal aurés aujourd'huy impetré..." (Saladin C., c.1465-1468, 97).

 

-

Au fig.

 

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[Dans une forme proverbiale] "Avoir le verbe haut, être sûr de soi" : Pour ce dit ung parler que tel va hault crïant Au matin, bien souvent, Qu'enchois vespres sonnant A le coeur de son ventre monlt triste et monlt dolant. (Enfances Doon de Mayence P., c.1450-1500, 401).

 

.

[D'une chose abstr.] "Exiger, prétendre" : Messeigneurs, quant il vous plaira, Nostre esbatement fera fin. S'il n'est si soubtil ne si fin Que vostre capacité crie ["si le débat qui a eu lieu n'est aussi fin ni subtil que votre compétence l'exige" (Éd.)], Il ne fault pas en pastorie Demander sans si tres parfont Comme les philozophes font (Moralité cincq pers. B., 1484, 107).

B. -

[D'un animal] "Émettre les sons caractéristiques de l'espèce" : Il n'y a beste ne oyseau, Qu'en son jargon ne chante ou crie : Le temps a laissié son manteau ! (CH. D'ORLÉANS, Rond. C., 1443-1460, 308). Ainsi chevaucha jusques à son embusche, et là commanda que chascun tenist la bride de son cheval et que on gardast bien que nul cheval ne hennist ne criast. (BUEIL, II, 1461-1466, 128). Le ..Ve.. chappitre Quant le seigneur ou la dame d'un hostel est malade et un corbauld vient crier dessus la cheminee ou la maison ou le pacient gist, c'est grant signe qu'il morra de ceste maladie. (Ev. Quen., I, c.1466-1474, 96). Quant les anettes sentent la tempeste esmouvoir en l'air et qu'elles volent et crient sur l'eaue en bas, c'est signe qu'il plouvera sans tempeste. Mais quant elles se taisent, elles redoubtent fort le tonnoirre. (Ev. Quen., I, c.1466-1474, 97). ...et, luy estant près dudit Saint-Morise, son cheval commença fort à cryer, parquoy le guet qui estoit sus le portail de la basse court vit icelluy Voyau et le congneut, et tantost descendit en bas et ouvrit la porte, en disant par eulx que ledit conte venoit après. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 181).

 

-

[D'un chien de chasse] "Donner de la voix" : ...s'il [le chien] assent d'aucune beste et y crie, toutes les bestes qui sont ou païs en sont effrees (HENRI FERR., Modus et Ratio, Livre deduis T., c.1354-1377, 25). Il [les chiens] queurent, il crient, il braient Et samble que de sens point n'aient, Et lievres saillent comme ras (LA BUIGNE, Rom. deduis B., 1359-1377, 408). Quant on la quiert [la lièvre] et chiens crient, elle s'en fuit de la paour qu'elle a des chiens. (GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, 79). Je vueil bien maintenir sur tous chiens bien menez Avoir esté de ceulx qui ont eu plus haulx nez, Avec le pied, la gueulle longuement foysonnant, A route de mon droit tout le jour bien criant (BRÉZÉ, Chasse T., c.1481-1490, 53).

II. -

Empl. trans.

A. -

"Dire d'une voix forte"

 

1.

Crier + syntagme nominal

 

a)

"Pousser (tel cri de ralliement, tel cri de guerre)" : "Et quel cry cryerent-ilz ?", demanda le chevalier. "En nom Dieu, sire, ilz crierent La Trimoulle." (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 194). Et lors part le rampin, et vint jusques prez de la bataille, et oyent ceulx de dedens le rampin hault crier : Cordes et Anthioche, et d'autre part : Lusegnen et Saint Jehan de Rodes. Lors vindrent dire a Gieffroy : Sire ce sont d'un costé Sarrasins, et d'autre costé, crestiens qui crient Lusegnen et Saint Jehan de Rodes. (ARRAS, c.1392-1393, 217). Et furent sus le point li François que de estre souspris, qant on cria : "A l'arme ! Monjoie Saint Denis !" (FROISS., Chron. D., p.1400, 178). Trescrestien, franc royaime de France ! Souviengne toy comment [Dieu] voult ordonner Que criasses Montjoye, par liesse (CH. D'ORLÉANS, Compl. C., 1433-p.1451, 259). Incontinent que l'autre ouyt Ce bruit, il me print a la gorge : Se je n'eusse crié "Sainct George !" (Fr. arch. B., c.1468-1480, 30).

 

-

P. méton. "Avoir tel cri de ralliement ou telle devise" : Sire, s'enseingne Crie Lembourc [cri de guerre, de ralliement de Jean de Luxembourg], et est roys de Behaingne, Fils de Henry, le bon roy d'Alemaingne, Qui par force d'armes, qui que s'en plaingne, Comme emperere Fu couronnez a Romme avec sa mere. (MACH., J. R. Beh., c.1340, 107). ...qui estoit do gentilh sanc de Lemborch, de Dyest et d'Oudenarde, et portoit de de geules à on lyon d'argent à cowe forchuwe, et crioit Lemborch. (HEMRICOURT, Miroir Hesb. B.B., 1353-1398, 96).

 

.

Crier son enseigne : Mais le roy Selodus crie son enseigne a haulte voix, et joint l'escu au pitz, et brandist le fust de lance et broche le destrier des esperons ; au doz le vont suivant Xm. Sarrasins. (ARRAS, c.1392-1393, 184). Si descendirent toust et hastivement des navires et entrairent en la ville et comancerent a crier leur enseigne des mescreans. Et quant ceulx de la ville vidrent le grant pan qui y estoit, ilz furent moult esbahis que plus ne peurent. (Charles de Hongrie C., c.1495-1498, 2).

 

-

[Objet interne] Crier un cri : [Parmi les choses qui déstabilisent les gens d'armes] Tiercement, quant le secours [envoyé contre eux] crie Cri redoubté de leur partie (LA BUIGNE, Rom. deduis B., 1359-1377, 262). Là eurent-ilz parlement pour savoir quel cry ilz crieroient. On vouloit prendre le cry de messire Bertran, mais il ne voult (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 6). "Et quel cry cryerent-ilz ?", demanda le chevalier. "En nom Dieu, sire, ilz crierent La Trimoulle." (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 194).

 

.

Empl. pronom. à sens passif : Le cri qui regarde la communaulté des dits seigneurs en la ville de Chastillon se crye par le cryeur. (Chartes communes Bourg. G., t.1, 1371, 358).

 

b)

Loc.

 

-

Crier à l'aide. "Appeler au secours" : Et quant l'autre vit ce grant coup, il commença à fuyr et à cryer à l'aide (Doolin de Mayence V, P., a.1500, 40).

 

-

Crier à l'arme/alarme/aux armes. "Appeler aux armes, au secours, donner l'alerte" : Et ly fuiant vindrent en l'ost, criant : A l'arme ! La veissiez Sarrasins armer et mettre en bataille au dehors des logeis. (ARRAS, c.1392-1393, 103). Et quant vint a primsomme les deux freres firent crier a l'arme moult effreement tout parmy l'ost. Lors veissiez grant toilliez, et se arma chascun de toutes pars, et se mist en bataille par dessoubz sa banniere. (ARRAS, c.1392-1393, 156). Ceulx qui furent eschappez des vaisseaux vindrent courant a l'ost, criant alarme a haulte voix, et dirent comment crestiens avoient assailli le navire. (ARRAS, c.1392-1393, 133). ...et alerent les aucuns garder la porte de Bordelles, lez murs et autres portes de Paris et firent crier alarme par la Ville (FAUQ., I, 1417-1420, 136). ...elle commence a cryer alarme, tant que les voisins s'i assemblerent, qui demanderent que c'estoit. [Un mari bat sa femme] (C.N.N., c.1456-1467, 544). ...je m'en iray devant et trois ou quatre hommes avecques moy et, se je puis, je gaigneray le bastardeau et entreray jusques au pié du pal, et là parleray au guet ; ou, se je ne puis mieulx faire, je criray à l'arme sur le bort du fossé et menray si grand bruit que ceulx de la place me orront bien et sçauront bien qu'il y aura gens, s'ilz ne sont bien sours. (BUEIL, I, 1461-1466, 68).

 

.

[D'un instrument de musique] Crier alarme. "Sonner l'alarme" : ...dont oissiés tronpetes et claronciaus retentir et bondir et criier alarme, et toutes gens sallir sus et euls armer. (FROISS., Chron. D., p.1400, 553).

 

-

Crier aux chevaux. "Donner l'ordre de seller les chevaux" : Et puis si dist Butor : "Faites delivrement Tost crier as chevax, sans nul arestement, Car je vueil chevauchier au devant de ma gent." (Brun de la Mont. M., c.1350-1400, 16).

 

-

Crier au feu/le feu : ...en la rue du Sac, où l'en crioit le feu en l'ostel d'un chevalier (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 92). Si print après une poignée d'estrain, et en bouta le feu en la maisonnette (...) et s'en fuyt en la rue crier au feu. (C.N.N., c.1456-1467, 495).

 

-

Crier aux queux. "Appeler pour le dîner, l'annoncer à haute voix" : Or allons disner ; car j'ay ouy maistre Alinot le medecin, qui dit qu'il est temps de crier aux queulx. (BUEIL, I, 1461-1466, 174).

 

-

Crier au vin. "Appeler (au service) du vin, pour se faire servir à boire" : ...le prince mange publiquement et (...) est regardé de tous, (...) et ne seroit pas bien seant de crier souvent au vin pour le prince ; pour ce fut ordonné par les anciens saiges ung autre nom pour servir à iceluy service. (...) et pour quelle cause fut donné en cest estat nom d'eschanson et non autrement. Je croy que ce fut un nom joyeulx donné par deliberation, qui tient du nom de chanter, pour ce que les anciens ès convives et ès grans chieres et esjoissemens se sont resveillez et resjoys par vin, et la premiere et principale joye se monstre en chanter ; pourquoy le nom d'eschanson se monstre sus la chanterie. (LA MARCHE, Mém., IV, Pièces annexées, 1474,,, 32-33).

 

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Crier baptesme. "Demander à être baptisé" : Et cilz sont inspireiz, sy crient baptesme a ung cris. (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 139). Aatant ont tous les paiens crieit baptesme (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 141).

 

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Crier bourgeoisie sur qqn. "Exciter la population contre qqn" : Elle avoit cryé le murdre, violence et bourgeoisie sur lui et les autres suplians (Arch. Nord, 1475, B 1698, f° 23, IGLF).

 

-

Crier haro. "Crier pour appeler au secours" : ...elle ot effrayeur et paour, et commença à crier Haro ! auquel cri vindrent plusieurs personnes (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 502). ...iceulx Collemart et sa femme, de leur voulenté desraisonnable et sans cause nulle, se prindrent a crier haro a haulte voix, c'est assavoir ledit Collemart en pleine rue devant ledit hostel et sadicte femme en icelui hostel (Chancell. Henri VI, L., t.2, 1432, 187).

 

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"Pousser de grands cris, se mettre en colère" : Et a grant paine a celle place, Afin que bonne paix se face, Gist a elle li bons eurez, Li cornuz empeliçonnez Dont li deduis ne plaist c'un po. Lors commence a crier haro, Et dit pour ce qu'elle se doubte D'un autre qui souvent la boute: " Ha ! sire, Dieux bon gré en ait ! Hui m'avez vous un enfant fait ; Certes, je croy que suys ensainte. Louez soit le saint et la saincte Ou j'ay tant esté pelerine, Amen ! et saincte Katerine !" (DESCH., M.M., c.1385-1403, 124).

 

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Crier merci/misericorde à qqn. "Implorer la grâce, la pitié de qqn" : LA DAME. Mon seigneur, je vous cri mercy : Menez moy a l'ostel briefment. Je travaille certainementx (Mir. enf. diable, c.1339, 12). Puis s'en vint Oursaires a l'empereur et lui cria mercy et dist: "Je vous pry et requier que vous me faciez droit et amender l'oultrage et le grant despit que on a fait de mon filz voyant tous..." (Bérinus, I, c.1350-1370, 374). Adont Florimons se dressa Et aus espices s'adressa. Le dragier prist et la touaille, Au bon roy vint et se li baille ; Et à un genouil le servi Et encor li cria mercy. Et li bons roys qui bien perçut Son cuer en grace le reçut. (MACH., P. Alex., p.1369, 245). Et il si fist, et dès si loing qu'il vit son pere, si se gecte a genoulx en lui criant mercy, et lui dist : Chier pere, veulliez moy pardonner vostre yre, et je vous jure que je feray refaire l'abbaye plus belle et plus riche qu'elle ne fut oncques, et y feray renter XX. moines plus qu'il n'y avoit. (ARRAS, c.1392-1393, 269). La Court a condempné ledit Gendreau à faire amende honorable audit Boschet, laquelle a faicte en icelle Court à genoulx en criant mercy audit Boschet (BAYE, I, 1400-1410, 170). Quant au regard du luminaire [pour mes obsèques], Guillaume du Ru j'y commectz ; Pour porter les coings du suaire, Aux executeurs [testamentaires] le remectz. Trop plus me font mal c'oncques maiz Barbe, cheveux, penil, sourcys ; Mal me presse, temps desormaiz Que crye a toutes gens mercys. (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 147). LE SERGENT. Las, vecy bien dure leçon, Je vous cry mercy, c'est assez. J'ay les membres tous cassez (Sav. serg. D.L., c.1480-1490, 35). LE CRESTIEN. (...) Tout droit yray en sa chapelle Me confesser publicquement De ma couvoitise cruelle, Aussi de mon parjurement Et crier mercy humblement Au juif, lequel avoye deceu, La justice subsequemment, De mon faulx serment apperceu. (Mir. st Nic. juif, c.1480-1500, 149). Chascun s'estoit ce jour la confessé Devotement (...) Et tout le peuple qui la fut amassé A haulte voix crioit misericorde. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 237).

 

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Crier (le) meurtre : Icelui deffunct cryoit le murdre, disant ces motz : l'on me tire hors du ventre de ma mere (Arch. Nord, 1475, B 1698, f° 4, IGLF). Elle avoit cryé le murdre, violence et bourgeoisie sur lui et les autres suplians (Arch. Nord, 1475, B 1698, f° 23, IGLF).

 

-

Crier Noël. "Pousser des cris d'allégresse à l'occasion de la naissance d'un prince, de la venue d'un souverain ou de tout autre événement heureux" : ...et a l'en crié Noë par toutes les rues où a passé. (BAYE, I, 1400-1410, 261). ...et jurerent les seigneurs et autres assistens lesdictes ordonnances, en crierent in signum leticie ["en signe de joie"] : Noe. (BAYE, II, 1411-1417, 116). Confesse maintenant ce que tu ne peus denyer et bat ta coulpe de tes mauvais pechiez et ramentoy a toy mesmes que tu crias "Noël" de grant feste et joieuse leesce du douloureux fait pour lequel tu dis maintenant "Helas" cent fois le jour, et requier Dieu qu'il te pardonne ton aveuglement et ta folie (CHART., Q. inv., 1422, 28). Et, incontinent après ledit cry, tout le populaire, oyant icellui, crioient de joye et de bon vouloir Noel. (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 77). Lors yci y a grant pause et grant bruit en la ville, de joye et resjouyssement, toute nuyt sonner, trompiller et cryer Noé. (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 479). Cryez Noel, grans et petis, Devons pour vous tous, noble dame, Et sommes tous a vous soumis, De voz servir de corps et d'ame ; Que vous estes celle qu'on clame La reduction de la ville, Et ung chacun de nous l'afferme ; Le vray est comme l'evangille. (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 522).

 

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Prov. Tant crie l'on Noël qu'il vient. "À force de désirer un événement, il finit par se produire" : Car tant cri on Noël tout contreval l'anee C'on en troeve le fieste. (Jourd. Blaye alex. M., a.1455, 808). Tant mauvais est qu'on le desprise ; Tant crie l'on Noël qu'il vient. Tant parl'on qu'on se contredit (VILLON, Poèmes variés R.H., c.1456-1463, 52).

 

-

Crier secours : Grant tourment a, puis que si fort de plaint ; Je l'oy crier piteusement secours. (CH. D'ORLÉANS, Ball. C., c.1415-1457, 45).

 

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Crier vengeance (à Dieu) (de qqc.) (encontre/sur qqn)

 

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[D'une pers.] : ...et briefment chascun crioit vengence a Dieu encontre luy. (GERS., Annonc., a.1400, 236). Tu te plains de moy et cries a Dieu venjance des maulx que tu mesmes t'as pourchacé, mais tu ne te juges pas de ta mesmes coulpe, ainçois faiz la clamour et le bruit des presentes pertes et afflictions sans ramentevoir tes faultes passees qui en sont la cause. (CHART., Q. inv., 1422, 25). Et quel est le jugement des povres qui destruisent ce que tous les jours ilz maudissent, ceulx qui se dient a vous, en criant a Dieu vengance (JUV. URS., Loquar, 1440, 413). On criera sur vous vengence, Se souffrez murdrir en rigueur, Ainsi a tort, ung povre cueur (CH. D'ORLÉANS, Rond. C., 1443-1460, 410).

 

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[D'un acte, d'un crime] : Aucunesfoiz aussi nous mectons main sus les clers, pource que nostre juridicion, c'est assavoir noz juges seculiers, cognoissent clerement que l'espee, et temporelle et espirituelle, de l'eglise a trouve [l. trouvé] le sabbat et fait semblant de dormir sus une espece de misericorde, voire ou de replection secrete de la bource au prelat, non obstant les villains crimes et horribles qui ou millieu du marchie [l. marchié] crient a Dieu vengeance. (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.2, c.1386-1389, 305). C'est le pechié qui crie a Dieu vengence, qui put aux angels, voire a aucuns dyables, qui sur toutes choses empesche confession pour son horreur (GERS., Noël, p.1404, 297).

 

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Crier ville gagnee. "Annoncer (au gros des troupes) l'entrée d'un détachement dans une place, crier victoire" : ...et gaigna la porte et entrerent toutes les VIII dizaines dedens le chastel et vindrent rompre l'huys du chastel, qui ouvroit sur les champs. Et, en eulx escriant et menant grant bruyt, commencerent à crier ville gaignée. (BUEIL, I, 1461-1466, 91).

 

2.

Crier qqn/qqc./un animal

 

a)

"Appeler qqn/qqc." : A Persicolin s'en alla [Darius], Une ville ou souvent hantoit. Illec forment se dementoit ; Ou palais fu, si se detort, Et crye monlt souvent la mort. (Renart contref. R.L., t.1, 1328-1342, 131). Et environ le point du jour il [Jacques de Lalaing] se trouva droit devant la place ; et lui, voyant qu'il estoit jour, fit par l'un de ses gens crier le guet ; mais nul ne respondit (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 359). Tout a coup alla crier son parrin et luy dit... (MACHO, Esope R., c.1480, 181).

 

b)

"Regretter qqn en se lamentant" : Elle cria a haute vois : "Hé ! douce mere, je m'en vois. A Dieu vous commant, douce dame !" Et droit a ce point rendi l'ame. Elle fut de la gent criée, Et sa mere en fu tourmentée. (MACH., J. R. Nav., 1349, 206).

 

c)

"Célébrer qqn/qqc., faire l'éloge de" : Ensi estoit messires Jehans d'Evrues par sa chevalerie criés et renommés ou pays. (FROISS., Chron. R., VIII, c.1375-1400, 203). Certes, ceste benignité le rent si amant son dit seigneur que il mourroit pour lui se besoing estoit. Et par tout crie et renomme celle grant debonnaireté. (CHR. PIZ., Paix W., 1412-1413, 116).

 

d)

CHASSE "Pousser des cris en direction d'un animal pour lui faire prendre une certaine direction" : Et doit mettre deux ou trois chevaucheurs, que l'en doit apeller fortitreours, au commencement de l'entree du titre, au bout des premieres leisses, affin que, si un cerf venoit et se vouloit fortitrer hors de la ou les levriers seront, que ceulx qui seront a cheval le puissent crier et bouter dedanz les levriers. (GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, 194).

 

3.

Crier après/contre/sur qqn/qqc. "Protester contre, critiquer qqn/qqc." : Or se plaint le peuple de nous, or crient et murmurent les communes gens contre la seigneurie pour l'argent qui sur eulx est aucunesfois levé pour la defense du pays. (CHART., Q. inv., 1422, 32). ...se tout estoit pesé a juste balance, les travaulx et les perilz que nous souffrons, les fraiz, despenses et dommaiges que nous soustenons, et de l'autre costé les maulx que nous faisons, nous n'aurions mendre part de la douleur du peuple qui crie sur nous. (CHART., Q. inv., 1422, 33). Et tu, Dante, poete de Florence, se tu vivoyes adés, bien auroys matiere de crier contre Costentim, quant, ou temps de plus observee religion, le osas reprendre, et lui reprouchas en ton livre qu'il avoit getté en l'Eglise le venin et la poison dont elle seroit desolee et destruicte, pour ce qu'il donna premier a l'Eglise les possessions terriennes (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 56). Laquelle chose est et fait fort contre noz calumpniateurs, qui toujours crient et hurlent après ses graveures et sculptures et ne entendent pas ce qu'ilz cuident dire (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 25 r°).

 

-

Crier à/sur un être céleste. "Invoquer (un être céleste)" : Ad ce s'acorde David qui dit que lez josnes corbeaux crient a Dieu quant leurs peres par estrangeté de leur blanc poil follage les descongnoissent et laissent a paistre au commencement, et tesmoigne que Dieu a leur invocation et priere les pourvoit de viande a celui besoing. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 152). Et a l'en beau crier a Dieu et au roy paix et justice, car je doubte que nous ne soyons pas dignes ne disposés ad ce requerir ne obtenir, pour cause de noz pechiez (JUV. URS., T. rever., 1433, 61). Finablement le feu fut bouté partout et commença la flambe à monter horrible, et le povre pécheur, du premier coup que senti le feu, criant lamentablement sur la miséricorde de Dieu, fit un saut ou deux, dont du troisième il chey, et demora pendant en la chaîne, criant sur Dieu et sa glorieuse mère jusqu'à rendre l'âme (CHASTELL., Chron. K., t.3, c.1456-1471, 462).

 

.

Crier qqc. à un être céleste. "Demander qqc. à" : Et a l'en beau crier a Dieu et au roy paix et justice, car je doubte que nous ne soyons pas dignes ne disposés ad ce requerir ne obtenir, pour cause de noz pechiez (JUV. URS., T. rever., 1433, 61).

 

4.

Crier + phrase en disc. dir. : Car il menoient moult grant noise, Einsi com chascuns crie et noise : "Faites tost ; la messe est chantée, Et l'iaue est grant piessa cornée." (MACH., R. Fort., c.1341, 144). Li dus de Lancastre, assés priés de la, se combatoit a Espagnols et oy criier en englois : "Rescouse, rescouse au prince de Galles !" (FROISS., Chron. D., p.1400, 887). ...vous devez trop mieulz croire que les ames de purgatoire ont plus grant desir que nous soyons repentans de noz pechiez, et nous crient maintenant a haulte voix : Ceulz au monde sont bieneureux Qui les cuers ont doloreux. (GERS., Déf., 1400, 241). ...luy, qui sur l'eschelle estoit, cryoit a ses compaignons : "Prenez chula, prenez cestuy !..." [L'homme s'adresse à ses amis, entrés de force dans la ville]x (C.N.N., c.1456-1467, 452). ...et alors ledit bastard du Maine cria à ses gens et autres estans à ladicte porte : "Prenez ce ribault et le tuez !" Et incontinent fut couru sus audit archer, et ilec le tuerent tout mort. (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 90). Dessus la porte mille petiz enfans A haulte voix crioyent : "Vive le roy !". (LA VIGNE, V.N., p.1495, 184).

 

5.

Crier que

 

a)

"Dire à haute voix que" : Et à celle heure y ot dedens Paris gens affectez ou corrumpuz, qui esleverent une voix en toutes les parties de la ville deça et delà les pons, crians que tout estoit perdu, et que les ennemis estoient entrez dedens Paris (FAUQ., II, 1421-1430, 322). Quant sans argent s'en vient coucher Mergot ; Voir ne la puis, mon cueur a mort la het. Sa robe prens, demy seint et seurcot, Sy lui jure qu'il tendra pour l'escot. Par les costez se prent, c'est Antecrist, Crye et jure par la mort Jhesucrist Que non fera. Lors empoingne ung esclat, Dessus son nez lui en faiz ung escript, En ce bordeau ou tenons nostre estat. (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 125). ...lequel lincieul incontinent fut esprins si très fort que merveilles ne po souffler tousjours plus s'alumoit, et continua par trois jours icelui roy, tousjours brulant et criant que l'on n'y savoit que fere (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 151 r°).

 

b)

[Suivi du subj.] "Demander en criant que, réclamer que" : ...et, en ce faisant, avoit crié à haulte voix que pour Dieu il ne feust pas mené prisonnier ou Chastellet, et que s'il y estoit menez, il seroit mort. (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 457). ...et peut estre que vit l'un de ses gens qui wolt fraper un long vestus (...) et lui cria que ne le ferist, alias le feroit pendre (BAYE, I, 1400-1410, 106).

 

-

[D'une chose] : Les larmes quil sont sur sa face Crient que pardon je ly face. (Pass. Semur D.M., c.1420 [1488], 139).

 

6.

Crier + prop. inf. : ...le peuple s'assembla (...) crians tous ensemble le peuple crestien perir pour sa paresce et lacheté. (JUV. URS., T. crest., c.1446, 64).

B. -

"Annoncer, proclamer"

 

1.

"Annoncer, proclamer au nom d'une autorité (politique, militaire, judiciaire...), au nom d'un personnage important"

 

-

(Faire) crier qqc. "(Faire) proclamer officiellement qqc., annoncer qqc. (une décision, une trêve, une fête...)" : Pour l'amour de sa fille fait tournois estorer, Festez et ronde table en maint paÿs criier Et ces lanches brizier, chevaliers behourder (Flor. Rome W., c.1330-1400, 136). La paix feray noncier et vous la crierez (Gir. Vienne D.B., c.1350-1400, 213). Qu'encor le voloit honnourer Et, pour li faire demourer, Fist crier joustes et tournois, Et pluseurs autres esbanois. (MACH., P. Alex., p.1369, 45). LE ROY D'ESCOSSE. Or me dy, se Dieu te sequeure : Se fera il [un tournoi] ? LEMBERT. Puis que herault le crie, oil (Mir. fille roy Hongrie, c.1371, 33). ...icellui prisonnier est chargé d'avoir tué et occiz de sa main plusieurs François, puis le temps desdites treves criées oudit pays (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 203). Et lors la dame se loga dedens sa forteresse, et fist Remondin crier une grant feste et noble. (ARRAS, c.1392-1393, 46). ...[lui et ses sergens fieffés] doivent chevauchier deux fois l'an lesdictes forestz (...) et se ilz tiennent que par rason ilz doyvent avoir pasnage, ilz le doivent certiffier au verdier affin qu'il le face crier et publier. (HECTOR DE CHARTRES, Cout. R., 1398-1408, 139). Et fu la feste prononchie et criie et segnefiie par hiraus ens ou roiaulme d'Escoce, en Alemagne, en Flandres, en Hainnau, en Braibant et ens es marces d'Aquitainnes. (FROISS., Chron. D., p.1400, 597). ...l'en feroit mandement à tous bailliz et prevosts royaulx de faire crier l'ordonnance du Roy et commander à tous vassaulx et subgiez de soy mettre sus en armes (BAYE, II, 1411-1417, 264). ESTOURDI. Puis que la paix si est criee Je tournoyray bien le pays. (Est., p.1460, 23). Et le dit jour furent cryees les jouxtes en la grant place (LA VIGNE, V.N., p.1495, 258).

 

-

Crier qqc. à la clochette. "Annoncer qqc. à son de cloche" : ...octroions (...) que ilz [les cordoanniers] puissent fonder (...) et tenir la dicte confrarie en (...) Paris (...) le jour de la solempnité des diz sains et ycelle faire crier par la dicte ville à la clochete (Industr. Paris F., 1379,,, 283).

 

-

Crier/faire crier le/un ban. "Faire connaître une proclamation par criée" : Brighedans fist .j. ban crier appertement : Qui se voelt baptizier des siens, hasteëment Si oste son hiaume, qui reluist clèrement (Baud. Sebourc B., t.1, c.1350, 133). Or avient que sont faictes entreprinses ou sieges assis ou le ban des princes est crié et le jour souvent nommé pour les champs tenir (CHART., Q. inv., 1422, 56).

 

-

(Faire) crier monnaie. "Faire connaître par une proclamtion publique la nouvelle valeur d'une monnaie" : Mais firent lesdiz gouverneurs (...) crier la monnoye, que trois doubles ou niquès ne vauldroient que ung blanc, qui devant valloient VI tournois (Journal bourgeois Paris T., 1405-1449, 189).

 

-

Faire crier/(ban et) arriere ban. "Mobiliser les vassaux et les vassaux indirects" : Vaz tantost et sanz detrier L'arriére ban faire crier (Mir. Rob. Dyable, c.1375, 55). Et pour ce que le Roy avoit fait crier son arrier ban à occasion des gens d'armes qui venoient par deça (BAYE, I, 1400-1410, 332). Pour lequel secours faire le Roy avoit long temps par avant mandé les chevaliers, escuiers et fiefvez de son royaume, et fait crier son arriere-ban par ses cités et bonnes villes (FAUQ., I, 1417-1420, 203). Et delibera lors le roy de faire guerre (...), et pour ceste cause, fist crier es villes de son royaume ban et arriere ban (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 167). Quant le roy de France oÿ proferer ces dures nouvelles, Dieu scet qu'il fu doullant en soy, sy jura qu'il y remedieroit briefment, assambla son conseil, par la deliberation duquel l'en cria par tout le roiaulme l'arriereban. (Jehan d'Avennes F., c.1465-1468, 109).

 

.

Faire crier son armee. "Mobiliser, convoquer son armée" : ...le Turc faisoit crier son ost, c'est assavoir que ceulx qui ont accoustumé de aler en l'armée, qu'ilz fussent pretz. (LA BROQUIÈRE, Voy. Outr. S., c.1455-1457, 208).

 

-

(Faire) crier que + subj. "Faire une proclamation pour ordonner, interdire... que" : Si fist crier, sans nul detry, Parmi son ost, à moult haut cry, Que toute maniere de gent, Grant, petit, seigneur et sergent, Le sievent tuit et sans faillir, Car il vuet la ville assaillir. (MACH., P. Alex., p.1369, 84). Je vueil que par les quarrefours Soit crié que nul ne remaingne Que tantost après moy ne veigne (Mir. roy Thierry, c.1374, 316). Et fist crier Uriiens que qui vouldroit boire un cop, qu'il beust, et donnast avoine aux chevaulx. (ARRAS, c.1392-1393, 98). ...faites a savoir et criier par toute la ville que casquns se loge et se tiengne en sa paix, car ja ont vostres gens tant conquesté que tout li plus povre sont rice. (FROISS., Chron. D., p.1400, 694). Et sera crié et publié de par le Roy et ladicte Court (...) que tous ceulz qui doivent ou devront aucune chose, ou vouldront contractier à cause dudit temporel, ilz paient et contractent doresenavant ausdis commis et non à autre. (FAUQ., II, 1421-1430, 113). Lesquelz supplians (...) n'oserent parler (...) par devers justice (...), ja soit ce que par avant eust esté crié et publié que, se aucuns avoient congnoissance de aucuns brigans ne que ilz eussent esté en aucunes places, que ilz les denonçassent a justice sur paine de pugnission. (Chancell. Henri VI, L., t.1, 1423, 10). Sus, Malque, en chesque contree De la cité alés crïer Que chascun vieignhe compaignher La justice bien enbastonné. (Pass. Auv., 1477, 179).

 

.

(Faire) crier à la trompe/trompette/ à son de trompe que : ...Que il soit a tous signifié Et a la trompete crié Qu'il banis soit d'aveques nous (LA BUIGNE, Rom. deduis B., 1359-1377, 208). Lors fist crier a la trompe que tout gentil homme, de quelque pays que ilz feussent, qui vouldroient aler aux gaiges d'Anthoine et de Regnault de Luseignen se traisissent dedens un jour nommé a Lusignen, et la seroient paiez pour un an de leurs gaiges. Et ainsi le fist crier par tout le pays de Poictou et des marches d'environ. (ARRAS, c.1392-1393, 151). Lors a fait crier a la trompette que chascun appreste son harnoiz, et que chascun parte le matin, au tiers son de la trompette, en ordonnance, dessoubz sa banniere, et sieve la bataille de l'avant garde. (ARRAS, c.1392-1393, 94). "...Faictes a tous signifier Et a son de trompe crier Que riches, povres mesléement Viennent au temple ordonnéement Sacrifier au dieu de Rome..." (Myst. st Adr. P., c.1450-1485, 70).

 

2.

Crier qqn/qqc. "Faire une proclamation au sujet de qqn/qqc."

 

a)

"Proclamer le bannisement de qqn" : Se monseigneur le duc banniz aucun senz terme de son païs, il le puet rappeller quant il lui plaist, car de son droit il puet faire grace ; et se un sire subgiéz banniz aucun, il ne le puet faire rappeller, car bannissement est execucion de haulte justice, se n'est par l'octroy de son souverain, tant comme la quarte assise dure. Se cellui qui est criéz vient, il sera receuz et oïz en ses deffenses (Cout. bourg. glosé P.M., c.1380-1400, 225). ...et li roy par desroy Commandat Ebroien, et si l'en fist otroy Que Hubier soit de Franche, hautement sans requoy, Forbanis et criés et osteis de leur loy : Crieir le fait de Franche par son malvais deloy (JEAN D'OUTREM., Geste Liège B.B., t.2, a.1400, 613).

 

-

Crier qqn à ban : Et envoya ledit Vigier ung saufconduit audit conte pour soy venir rendre en la Consiergerie pour estre purifié des charges à luy imposées, à cause qu'il estoit desjà cryé à ban par le royaulme, à la requeste de ses haigneux et malveillans. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 156).

 

b)

Crier un corps. "Annoncer l'enterrement de qqn" : Pour deniers payez à Jehan Vint-Soulz, crieur de corps, pour li et 7 varlez crieurs de corps, pour leur salaire de sonner entour le corps dudit chevalier par 2 jours, et d'icelui crier au Palais et aillieurs à Paris (Comptes argent. rois Fr. D.-A., I, 1352, 184). A Milet Renaut et Perrin Liviant, crieurs de corps à Paris et VI autres crieurs qui ont crié le corps de feu mondit sgr. à Paris par IIII jours... (Doc. 1416. In : F. Lehoux, Bibl. Éc. Chartes 114, 1956, 83).

 

c)

"Proclamer la perte de qqc., d'un animal" : ...s'il [le crieur public] crye une chose perdue, il en a IIII deniers (Chartes communes Bourg. G., t.1, 1371, 358). ...à deux crieurs, qui avoient crié, par la ville de Paris, l'un des chienz de Mgr, appellé Castille, lequel a esté perdu... (Invent. mobiliers ducs de Bourg. P., t.1, 1374, 398).

 

d)

[D'une histoire (qui peut être écrite)] Comme l'histoire / la lettre crie. "Comme l'histoire le proclame, le fait savoir" : Millez fu li ainsnés, si con l'istore crie (Flor. Rome W., c.1330-1400, 155). ...li troi [rois sarrazins] furent d'acort, si con la letre crie, D'aourer Jhesucrist et le Vierge Marie. (Bât. Bouillon C., c.1350, 96). Et quant il jut o lui le primiere nuitie, .I. fil li engenra, qui moult ot seignourie, Gerart le Bel Armét, si con l'istoire crie. (Bât. Bouillon C., c.1350, 211). Ung mecredy matin, si com l'istoire crie (Hern. Beaul. D.B., c.1350-1400, 58).

 

3.

[Domaine commercial] (Faire) crier qqc.

 

a)

"Annoncer publiquement la vente aux enchères de qqc." : ...que ladicte contesse, se il lui plaist, puisse faire vendre, crier et subhaster la propriété de ladicte tierce partie (Cartul. Laval B., t.2, 1385, 326). ...et ce nonobstant a l'en crié l'edifice du pont, et a esté miz à priz à IJ vies, à XXXIJ libvres de rente (BAYE, I, 1400-1410, 255). Fu commendé par messrs les presidens delivrance estre faicte au sr des Quesnes du decret des douaires de madame Marguerite de Mailly, criez à la requeste de madame Jehanne d'Argones (BAYE, II, 1411-1417, 149). ...et trois maisons ou masures, assises es rues du Temple et des Rosiers, avec leurs appartenences et appendences, appartenans à Jehan Barrau, criées et subhastées à la requeste de maistre Pierre Guirault (FAUQ., II, 1421-1430, 337). ...il a certain procés de criées pardevant vous à l'encontre du seigneur de Cors, son frere, qui a fait crier les biens et heritages de nostredict conseiller, ausquelles criées se sont opposez la veuve de feu Loys de Culant et Charles Dauzon, tuteur et curateur des enfans de feu Jehan de Culant (Lettres Ch. VIII, P., t.3, 1492, 283).

 

-

Crier qqc. à vendre/(faire) crier qqc. en vente : ...ou quel jour et lieu les offices du roy avoient aussi esté criez à vendre ; ès diz jour et lieu, Huguet Gauvaing, de Frontenay, presens le dit seneschal et le procureur du roy, afferma à perpetuité de moi, par nom du dit nostre seigneur le roy, un molin à vent, (...) et la moitié de IJ. moulins à yaue (Doc. Poitou G., t.2, 1334, 106). ...la terre (...), la quelle vous avez fait crier en vente et subaster pour le dit seigneur, ou cas que deuement seroit criée et subastée, de laquelle chose nous n'estions pas acertenez, vous bailliés pour le pris à noble et puissant homme monseigneur le duc d'Athenez, ainsi comme ès dites lettres est contenu, et nous aions entendu que le procureur de nostre dit seigneur en Poitou ait la dite terre mise à fuer et fait crier en vente à mil et Vc livres (Doc. Poitou G., t.3, 1351, 98).

 

-

Crier qqc. à rabat : ...une taache de XLV perques de diqueries sur la riviere d'Ouve, alloée aus dessus dis par Martin l'Ours en la presence de Thomas Ventlove, procureur de Monseigneur, et de Thomas Ybert, sergent du lieu, à ce commis de Monseigneur le Captal ; et fut le dit alloage bany et crié à rabat, comme tout ce appart par le mandement de Monseigneur le Captal, lettre de tesmoignance des dis procureur et sergent (Compte Navarre I.P., 1367-1371, 220).

 

b)

[D'un artisan] "Proposer qqc. à la vente" : ...trois ou quatre jours avant la feste de la Chandeleur derrenière passée au soir, environ sept ou huit heures devers le soir, ainsi que ledit Moulin et son varlet alloient criant les oblies par ladicte ville de Poictiers, comme il et autres pasticiers de ladicte ville ont acoustumé faire (Doc. Poitou G., t.12, 1479, 275).

 

-

Crier le vin. "Faire savoir par des crieurs la nature et le prix des vins disponibles dans les tavernes" : ...s'il [le crieur public] crye vin en la ville de Chastillon, il en a une pinte ou quatre deniers, lequel qu'il plaist à cellui qui est le vin (Chartes communes Bourg. G., t.1, 1371, 358). HUMEBROUET. Denis crie le vin a X. Beauls seigneurs, alons en taster. (Jeu st Den. S., c.1380-1400, 105).

 

c)

Faire connaître qqc. : MAISTRE PIERRE DORIBUS, (aphoticaire, commence.) Or ça, ça, sans plus delayer Il me fault maintenant crier Mon mestier, pour dire le voir, Pour ung pou le faire valloir Soit [avecque] saiges ou sotz. (Dorib., p.1480, 245).
 

DMF 2020 - Article revu en 2015 Pierre Cromer

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