C.N.R.S.
 
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     ATTRAIRE1          ATTRAIRE2     
FEW XXV 740b attrahere
ATTRAIRE, verbe
[T-L : atraire ; GD : atraire ; AND : atraire ; FEW XXV, 740b : attrahere ; TLF : III, 879b : attraire]

I. -

[Avec une valeur factitive ; le sujet grammatical désigne ce ou celui qui provoque un déplacement, un mouvement chez qqn ou qqc.] "Faire que qqc./qqn se déplace vers qqc./qqn"

A. -

[D'une chose]

 

1.

Attraire qqc.

 

a)

"Faire que qqc. se déplace vers qqc., attirer qqc." : ...l'aïmant le fer attrait. (MACH., R. Fort., c.1341, 11). La partie dollent pourra atraire les superfluitez des humeurs, et ainsi causer apostume es corps qui sont en convalescence. (SAINT-GILLE, A.Y., 1362-1365, 75). ...le fruit ne peut atraire suffisant quantité de sang pour soy nourrir (SAINT-GILLE, Comment. A.Y. L., 1362-1365, 234). Car Beauté a en lui vertu d'attraire Le coer veant par nature plus forte, Quant en ce fait Plaisance le conforte, Que l'aymant n'ait d'attraire le fer. (FROISS., Orl., 1368, 86). Exemple de l'ayment qui attrait le fer : ainsy fait Dieu l'ame. (GERS., P. Paul, a.1394, 498). ...l'une bonté doit attraire L'autre et eschever le contraire (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 36).

 

-

P. métaph. : Et son trés dous plaisant regart Attraioit mon cuer de sa part Tout aussi, par son dous attrait (MACH., R. Fort., c.1341, 11).

 

-

Attraire qqc. à qqn : ...le bon sens naturel que Dieu vous a donné vous attraira et donra le remenant quant a ce second article. (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 11).

 

-

Attraire qqc. à qqc. : En pensant de laquelle il diroit, ainsin que nature desire et actrait les cuers a son semblable, se appensa de nommer une josne fille de la court en l'aige de dix ans (LA SALE, J.S., 1456, 15).

 

b)

"Entraîner qqc." : Doleur atrait face ridee. (DUPIN, Mélanc. L., c.1324-1340, 213). ...car la passion n'est pas faite tant comme la science qui est principal soit presente, tele science universele n'est pas actraicte ne vaincue par la passion. (ORESME, E.A., c.1370, 375). ...il savoit assez que le trop mengier et boire actrait le dormir. (ARRAS, c.1392-1393, 303). ...lez pechiés du clergié provoquent si avant l'indignation de Dieu, et attraient sa haine et mesprix (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 58). ...A Dieu la richesse mondaine, A Dieu tous hommes convoiteux Des biens qui n'atraient que paine, A Dieu ma fame et mon demaine (DU PRIER, Roy Adv. M., 1455, 248).

 

-

[D'une maladie] : ...car, aussi comme l'une maladie atrait l'autre, ainsi viennent les afflictions des hommes d'une mutacion. (CHART., Q. inv., 1422, 30).

 

.

[Dans un cont. métaph.] : ...jalousie est maladie de Sainct Amant, fort furieuse, ung petit caducque, engendree en la region de Rains, par extreme challeur, attraiant mauvaises humeurs, pour causer tremblement de membres (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 885).

 

c)

Attraire que. "Avoir pour effet que" : Et aucune fois long demour Engendre souvent et attrait Que dame d'amer se retrait. (MACH., Voir, 1364, 584).

 

2.

Attraire qqn. "Attirer, séduire qqn" : Car c'est la chose (...) Qui plus joune homme decevoir Peut et attraire. (Mir. Barl. Josaph., c.1363, 289). Mais si comme nous avons dit devant, teles choses attraient par plaisance et par maniere du [de] musique ceulz a qui elles sont dites (ORESME, C.M., c.1377, 470). Et son plaisant attrait L'a si attrait Que siens est sans retraire (MACH., Les lays, 1377, 323). Chascun est attrait par sa volupté, c'est a dire par son plaisir (GERS., Déf., 1400, 222). Vostre doulceur m'a sceu si bien atraire Que tout vostre je suis entierement (CH. D'ORLÉANS, Ball. C., c.1415-1457, 37). Car elles firent ung lay ouquel chascune mist ce qu'il lui sambla qui y serviroit pour atraire son amy (Percef. III, R., t.1, c.1450 [c.1340], 237).

 

-

Empl. abs. : Et toutes ces choses attraient et aleichent. (Mir. st Panth., 1364, 308).

 

-

Attraire qqn à qqc. "Amener, attirer qqn à qqc." : C'est la premiere raison a la conclusion maintenant mise, car vertu nous doit actraire a bonnes oeuvres et retraire de mauvaises (ORESME, E.A.C., c.1370, 152). Vous vollés que je aie le gouvrenement de la ville de Gaind ; l'amour que vostre predicesseur eurent à mon père vous i atrait (FROISS., Chron. R., X, c.1375-1400, 86). ...les aultres oïent paroles attraihans a mal et qui boutent le feu mauvais es maisons Dieu (GERS., Pent., p.1389, 79). Tu, Melusigne, qui es l'ainsnee et celle qui deusses estre la plus congnoissans, c'est par toy, car le scay bien, que ceste dure chartre et prison a esté donnee a ton pere, et pour ce en seras tu la premiere punie. La vertu du germe de ton pere toy et les autres eust attrait a sa nature humaine, et eussiés esté briefment hors des meurs, nimphes et faees, sans y retourner. Mais desormais je te donne le don que tu seras tous les samedis serpente du nombril en aval. (ARRAS, c.1392-1393, 12). Une autre raison y est, car penitence garist les personnes des mauvaises temptacions et inclinacions qui l'attrayent a pechié (GERS., Déf., 1400, 243). Le Createur pour homme excerciter a vertu a baillé lez pointures adverses, et pour le exciter a perseverance y a adjouxté l'oingture d'esperance. La pointure le retrait dez delitz transitoires, et l'oingture l'atrait aux biens meritoires. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 95). Et, quant elles [les richesses comparées à des épines] ont attrait l'homme jusques au pechié, elles l'ensenglantent par une venimeuse playe. (COLART MANS., Dial. créat. R., 1482, 136).

 

.

Empl. abs. : ...et toutes choses qui a ce pueent mouvoir et attraire. (ORESME, E.A.C., c.1370, 174).

 

-

Attraire qqn à soi : O mon Dieu (...), tourne moy en amertume toute consolation chernelle qui me abstrait de l'amour des choses eternelles et me atrait a soy mauvaisement (Internele consol. P., 1447, 148).

 

3.

Attrayant

 

a)

"Qui attire, qui a une grande force d'attraction" : Celle face est ainsin com pierre d'aÿmant, Qu'elle est fort pour souffrir et est moult atraysant. (Pleur ste âme B., c.1375-1425, 67).

 

-

Attrayant à qqc. "Qui suscite, qui provoque qqc." : ...puis encommença a chanter une chansson dont le chant estoit plus actrayant aux larmes que a leesse (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 534). Si tost comme la saige rouyne eut entendu les mots de la chansson (...) et ouy le chant qui estoit piteux et actraiant a devotion, elle se mist a genoulx sur le sueil du portail (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 554).

 

b)

"Séduisant, attrayant" : La douce et attraiant parole Qui t'a mis d'amer a l'escole (MACH., C. ami, 1357, 77). Delectacion nous est si doulce et si amiable, si atrahant, blandissant et decevant que tantost et presentement nostre appetit, qui ad ce est enclin, la prent et poursuit senz actendre que raison ait espace de considerer et deliberer et jugier se c'est bien ou mal, qui ne s'en guecte et n'y prent garde soingneusement. (ORESME, E.A.C., c.1370, 173). Par un acqueil attraiant (MACH., Ch. bal., 1377, 620).

 

-

En partic. [Des yeux, du regard] : Et trop doucement m'apaisoit Li regars dous et atraians D'uns yeus bruns [et] sés et rians (ACART, Prise am. H., 1332, 41). Simple et plaisant sont si vair oel, Sans fierté et sans orgoel Et si doucement atraiant Qu'il me donnent moult grant esquoel D'avoir le bien que j'en requoel (FROISS., Dits Débats F., 1363-1393, 138). ...vos yeus attraians, amoureus, Dous et plaisans (MACH., L. dames, 1377, 107). ...les regars doulx et atrayans des pucelles (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 145).

 

.

"Qui cherche à séduire" : Mopsus estoit souvent avec Jason, (...) il vey pluseurs attrayans regars qu'elle donnoit a Jason et se perceupt tresbien que amer le vouloit. (LEFÈVRE (R.), Hist. Jason P., c.1460, 172).

 

4.

Attrait

 

-

Attrait par ordre. "Mis en ordre" : Celle [rhetorique] nous enseigne ordener Noz parolles et raisonner Par mesure et par ordre attraict, Selon le propos qu'on retrait (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 131).

 

-

Bien attrait. "Bien amené, bien réussi" : ...Comment son ymage ot pourtrait Par pourtraiture bien atrait (Renart contref. R.L., t.1, 1328-1342, 183).

B. -

[D'une pers.]

 

1.

Au propre Attraire qqn/qqc. (à qqc.)

 

a)

Attraire qqn. "Faire venir qqn, attirer, amener qqn" : Si [Pierre de Lusignan] fist une ordre pour attraire Les chevaliers de bon affaire (MACH., P. Alex., p.1369, 11). Si seroit neccessaire que pour attraire peuple (...) le roy voult et ordonnast que tous ceulx et toutes celles qui vouldroient venir en son royaume se peussent marier franchement (JUV. URS., Nescio, 1445, 545).

 

-

Attraire bataille. "Rassembler les troupes" : Les Infernaulx, remplyz de malle rage, Envers luy ont leur bataille actraite Encontre ceulx qui ont mis leur courage Pour decorer la joyeuse fleurette. (ROBERTET, Oeuvres Z., c.1450-1500, 98). Les infernaux, fort meusde malle rage, Pour le ravir, ont leur bataille attraite Conre tous ceux qui ont mis leur courage Pour decorer la joieuse florette. (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 715).

 

-

"Entraîner qqn" : Lors s'en vinnrent entredonner telz coups que la forest en retenti et eut Passelion le heaume emporté, le nez et le front escorcié jusques au sang, combien qu'il ne bouga de la scelle, mais tel actraÿ son jousteur qu'il porta lui et son cheval en un mont, et lors fut Passelion aucun pou sancié de son courroux. (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 848).

 

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Attraire qqn à l'encontre de qqn. "Entraïner qqn contre qqn" : ...les habitans de nostre ville d'Aucerre ne se sont soubzstraictz de nostre obeÿssance, desquelz à ceste fin avez faict venir aucuns pardevers vous, qui depuis nous ont faict sçavoir les parolles que leur avez dittes, tant en appert que en secrect, comme aussi ont fait autres noz feaulx, lesquelz, par promesse, le roy a voulu faire atraire et esmouvoir à l'encontre de nous (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 260).

 

b)

Attraire qqc. "Inspirer (de l'air)" : Et, combien qu'il soit évident Que chascun homme, résident En terre où court épidémie, Soit en grant péril de sa vie Pour l'air infect qu'il fault attraire, Toutesfoiz n'est pas nécessaire Que tous ceulx de celle partie Meurent de celle maladie (LA HAYE, P. peste, 1426, 58). Courant le temps d'épidémie, Ne doit traveillier tèlement Qu'il lui faudroit aucunement Abondance ou foison attraire De l'air venimeux et contraire, Car l'air mauvaiz ainsi attrait Grève le cuer et le deffait (LA HAYE, P. peste, 1426, 84).

 

-

Attraire qqc. à soi. "Faire venir qqc. à soi, amener qqc. à soi" : ...li Englois marceant, liquel avoient sus le Qai a Londres et ailleurs pluisseurs nombres de sas de lainnes, en desiroient a avoir lor delivranche, pour atraire a euls les deniers. (FROISS., Chron. D., p.1400, 280).

 

c)

Attraire qqn/qqc. qq. part

 

-

Attraire qqn qq. part. "Attirer, amener, faire venir qqn qq. part" : ...et [Geoffroy] dist : Et comment ! Monseigneur mon pere et ma dame ma mere n'avoient ilz pas assez pour Frommont, mon frere, faire riche et donner de bons pays et de bonnes forteresses, et de lui richement marier, sans le faire moyne. Par les dens Dieu, ces lecheours moynes de Malleres le m'ont enchanté et attrait leans pour mieulx valoir. (ARRAS, c.1392-1393, 250). O desesperance, helas, La celle as Ou la mort me vueult atraire ! (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 292). Mauvaise garce, comment as tu ozé ceans atraire Passelion sans mon sceu ? (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 724). Mais une jeune pucelle le regardoit en l'espiant s'aucunement le pourroit attraire en son manoir dont elle n'estoit pas loing. (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 909).

 

.

Attraire qqn fors de qq. part. "Amener qqn hors de" : Cilz sont Françoys qui ont pris teillez armez pour nous attraire fours de la cité. (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 99).

 

-

Attraire qqc. qq. part

 

.

"Lancer qqc. (des flèches) qq. part" : Ne jamais jour ne seront traictes [ses fleches] De tel main, n'en tel lieu attraites, Ou feu se lança par grant rage. (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 24).

 

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"Amener qqc. qq. part" : ...pour occasion des finances que on a depuis aucun temps transporté et que pluiseurs s'efforcient de atraire et transporter en Court de Romme (FAUQ., II, 1421-1430, 144).

 

2.

Au fig.

 

a)

Attraire qqn (son coeur, son courage, son amour...)

 

-

"Gagner qqn" : Or prens en gré, George, mon epistre (...), Je suis sans plus un simple secretaire Qui desire moult ton amour attraire Pour te servir quant te semblera bon Des biens que j'ay en l'ostel de Bourbon. (ROBERTET, Oeuvres Z., c.1450-1500, 127).

 

-

"Solliciter qqn" : Puis volz Bouciquat atraire Pour parfaire, Et Cresques raconduiz, Qui leur respons volentaire Pensse estraire De leur bouches (Cent ball. R., c.1388-1396, 198).

 

-

"Convaincre qqn" : ...[les Flamands] eurent plus chier que leurs sires presist a fenme la fille dou roi d'Engleterre que la fille au duch de Braibant. Et en requissent et priierent affectueusement leur jone signeur et li remonstrerent pluisseurs belles raisons pour lui atraire (FROISS., Chron. D., p.1400, 798).

 

-

"Séduire qqn" : Par si plaisant atraiance M'a volu Amours atraire Que ja ne m'en quier retraire. (ACART, Prise am. H., 1332, 3). Par vos dous iex, vairs entrüis, Rians, plains de toute douchour, M'aves [l. m'avés] atrait, frans coers gentis (Dame Lycorne G., c.1349-1350, 370). ...ce que j'en feis lors estoit pour la grand amour que je vous portoye, esperant aussi par ce moyen vous attraire plus legierement. (C.N.N., c.1456-1467, 416). ...une fole pecheresse moult belle a merveilles qui tantost commença a taster ses playes et sa chair et doulcement l'attraire par blandices parolles... (COLART MANS., Dial. créat. R., 1482, 135). Je la cuide tous jours atraire Par beau parler et debonnaire, Mais sans cesser el tensera. (P. Jouh. D.R., a.1488, 38).

 

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"Séduire, tromper qqn." : Et [Raison] a dit aussi que Rigueur, Que je tieng pour un bon seigneur, De tiex cas ne se doit mesler, Mais Grace les doit demesler, Si m'est avis tout le contraire, Car nulz homs ne pourroit atraire Rigueur. (LA BUIGNE, Rom. deduis B., 1359-1377, 142). ...Veu que l'avez voulu attraire Et vous servir de sa personne ; Vostre benigne grace ordonne Dessus le cas provision En licite tauxation Pour contenter vostre servant. (Abuzé D., c.1450-1470, 90).

 

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Empl. abs. : Et cilz Atrais, en atraiant, En aloit Doute retraiant. (ACART, Prise am. H., 1332, 49).

 

-

Part. passé Attrait en qqc. "Élevé, éduqué en qqc." : En touz bons meurs est si atraitte, Qu'en li n'a rien qu'en peust blasmer. (Mir. ste Bauth., c.1376, 86).

 

b)

Attraire qqc.

 

-

"S'attirer, gagner, obtenir qqc." : ...pour grace attraire. (MACH., D. verg., a.1340, 30). Fors que j'espoir qu'elle est si debonnaire Que bien porray par loyaument servir, Sans etre [l. estre] amés, son bon samblant attraire (MACH., L. dames, 1377, 18). Que me pourroit ne aidier ne valloir D'ore autre part l'amoureux contrefaire, Quant pour mon vueil la plainement avoir Plaisir joyeulx je n'y pourroye atraire ? (LANNOY, WERCHIN, Ball. G.-W., c.1404, 340).

 

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Attraire qqc. de qqn : Assés de meschiés ha ci, Eins que joie en puisse attraire. (MACH., L. dames, 1377, 71). ...de qui merci ne puis attraire (MACH., L. dames, 1377, 118). Il est fol qui se veult retraire De toy requerir et prier, Quant il ne peult de toy atraire Sa volenté au cop prumier. (Prisonn. desconf. C., c.1488-1489,).

 

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Attraire qqc. à qqn. "Obtenir qqc. à qqn" : Si fist occire son fillastre Pour le regne a son fils attraire (Tomb. Chartr. Souvain S., c.1337-1339, 64).

 

-

"Entraîner, susciter qqc." : Espoirs attrait joie et bonne aventure (MACH., R. Fort., c.1341, 72). Donc la plus grant seüreté Est, pour toute plaisance avoir, Que de soy volloir et savoir Garder d'aucunement atrere Chose qui tourner a contrere Puist, par faute de sentement Et d'onnourable entendement. (Livre amour. all. F., c.1398-1430, 48). ...le sage roy anobli de nature par longue genealogie continuée en triomphe, avec ce de Dieu par grace doué de noblece de courage, laquelle lui fist delaissier ignorance en jeune aage, par vertu née d'admonnestement de grant discrecion, jugiant et cognoiscent les folz delis estre prejudiciables, dampnables et hors ordre de faame deue à digneté et trosne royal, desirant delaissier les choses et par quel maniere pourroit attraire et aluchier meurs vertueux par continuacion de vie salutaire (CHR. PIZ., Faits meurs Ch. V, S., I, 1404, 37).

 

-

"Amener, garantir qqc." : Cousine, qui ne mentiroit A le fois pour pais mieulz attraire, On n'aroit pas granment a faire, Les coses iroient trop bien. Il fault mentir pour .I. moiien Trouver, quant le requiert le cas. (FROISS., Méliad. L., t.1, 1373-1388, 64).

 

-

Attraire (des) raisons, (des) arguments. "Alléguer (des raisons, des arguments)" : Or, vueil autres raisons atraire Et argüer la part contraire. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 208). Cest argument icy attraire N'est de mestier, sire Jaspart (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 245).

 

-

Attraire à qqn que. "Faire admettre à qqn que" : Le philosophe nous actrait En parlant par dilection Que chascun qui est imparfait, Doibt entendre à sa perfection. (Bien avisé Mal avisé B., c.1487-1490 [1396], 49).

 

c)

Attraire qqn/qqc. + compl. second

 

-

Attraire qqn (son coeur...) à qqc. "Amener, attirer, inciter qqn à qqc." : ...touzjours paines d'atraire Le peuple a la foy crestienne (Mir. emp. Julien, 1351, 197). Et celuy qui est ainsi disposé, comment seroit ce possible de le actraire a bien par persuasion ? (ORESME, E.A., c.1370, 532). Li rois Phelippes (...) euist attrais ses gens à son acord (FROISS., Chron. L., I, c.1375-1400, 132). Li rois qui les voloit attraire à amour lor envoia (...) des vivres (FROISS., Chron. L., IV, c.1375-1400, 109). ...quant il vey son point et son heure, il entamma son procès en luy moult humiliant envers le duc, pour luy mieulx attraire à son amour (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 234). Car tu conformas ta doctrine a leur appetit et donnas loy familiaire a la chair, attraiant les cueurs a vanité decevant. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 125). "...[Médée à propos de Jason] Si vous requiers et prie que vous me aydiez a l'attraire a mon amour par vostre science et que vous faciez tant qu'il ne lui souviengne de nulle dame du monde que de moy..." (LEFÈVRE (R.), Hist. Jason P., c.1460, 200). Aprés, il me fault aussi faire Pour ces bourgeoises de Paris Quelque recipe, pour attraire A challeur leurs povres maris. (Dorib., p.1480, 245). [Il] amaine moy et me attraye a l'intelligence et acomplisement de tes comandemens (Psaut. Ludolphe le Chartreux D., c.1495, 25).

 

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Attraire qqn à peché. "Faire tomber qqn dans le péché" : SATHAN. (...) Tous ses enffans ay mis a mort, Mes oncques n'ay peu tant fere Qu'a pesché l'aye peu actraire (Pac. Job M., c.1448-1478, 322).

 

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Attraire qqn à sa volonté : Chils Messires Hues et messires Hues ses peres avoient le roi si atrait a lor volenté que il ne faisoit riens fors par lor consel (FROISS., Chron. D., p.1400, 47). ...donnerent plusieurs beaulx presens au roy et a la royne, a la fille et aux barons et chevaliers d'Espaigne pour mieulx les attraire a leur voulenté. (Jehan de Paris W., 1494-1495, 18).

 

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Attraire qqn à + inf. "Inciter, amener qqn à" : A bien faire les atrait (MACH., P. Alex., p.1369, 14). Mes il se adheroient a leurs raysons et opinions et se efforçoient de les attraire a salver les experiences par aournemens de paroles. (ORESME, C.M., c.1377, 514). ...le duc de Bourgongne attrait et vuelt attraire à lui favorisier le peuple de ce royaume (FAUQ., I, 1417-1420, 31). Vertu et aussi bienfait sont de telle nature que, tant plus homme les poursieut et s'i mect avant, tant plus attrait son couraige à perseverer tousjours de bien en mieux. (BUEIL, I, 1461-1466, 60). ...je suis attraicte (...) a Dieu contempler, cognoistre et magnifier (Disc. amour divine, 1470, 272). Bien sçay oussi qu'elle a grant fain De veoir quelque miracle faire A ce prophete de bon aire, Que le cuer des gens admollist ; Et pour ce ne fault que l'atraire A aler ouyr ce qu'il dit. (Pass. Auv., 1477, 134).

 

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Attraire son coeur à + inf. : A Dieu servir son cuer attraie (Tomb. Chartr. Trois contes S., c.1337-1339, 120).

 

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Attraire qqn à soi

 

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"Faire venir, attirer qqn à soi" : Roy qui se tient si seulement Sans ses barons a lui attraire... (Renart contref. R.L., t.1, 1328-1342, 5). Et ne plaisoi[t] mie au pape, car il estoit hereticque, sy l'excomuigniat. Sy atrait tous les malvaiz a luy (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 69).

 

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"Se gagner qqn" : Li prevos des marchans avoit si attrais à lui toutes manières de gens à se cordielle, que nulz le l'osoit desdire de cose que il desist (FROISS., Chron. L., V, c.1375-1400, 107). Par ce point quide le conte d'Armignac toudis venir à ses ententes ; et les greigneurs cappitaines que il attrayeroit le plus voulentiers à luy, ce sont Perrot le Bernois (...) Guillonnez de Sainte-Foy qui tient Bouteville, et aussy Aymerigot Marcel (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 141). Comme doncques, en l'an mil IIIICXXII, je veisse le roy anglois, ancien adversaire de ceste seigneurie, soy glorifier en nostre ignominieux reproche, enrichir de noz despoilles et despriser noz faiz et noz couraiges et des nostres, qu'il a vers soy atraiz (...), j'ay conclut en ma pensee que la main de Dieu est sur nous et que sa fureur a mis en oevre ce flaiel de persecution (CHART., Q. inv., 1422, 4). ...et le dit Edouart par l'ennortement meismes du dit messire Robert les [les Flamands] voult attraire a luy. (JUV. URS., T. crest., c.1446, 36). Et depuis, faignant s'emploier à la pacification desdites divisions, suborna et atrahit à luy aucuns de noz principaulx et plusieurs familiers serviteurs (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 242). Et, quant le roy sceut la departie de sondit frere, il en fut merveilleusement marry, et tost après sceut la conspiration que les seigneurs de son royaulme avoient faicte contre luy, lesqueulx s'en estoient tous retournés en leurs païs pour faire leur amast et tachoient de attraire à eulx tous les autres seigneurs du royaulme. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 164).

 

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Attraire qqn à sa partie : Et toutes fois par sa poisance, Qui de jour en jour prent croissance, A ja atret a sa partie Des signeurs une grant partie. (FROISS., Pris. Am. F., 1372-1373, 118).

 

-

Attraire qqn avec qqn. "Associer qqn à qqn" : Et pour l'attrait de l'euvre faire Voult il [le souverain maistre ouvrier] avecques nous attraire, Pour les matieres atistrer Et a nous les administrer, Prudencë avec Attrempance (COURCY, Chem. vaill. D., 1424-1426, 170).

 

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Attraire qqn avec soi. "Attirer, amener qqn à soi" : Helas, Confort, vueilliéz Deduit attraire Avecquez vous pour parler au clousier (Recueil galant. V.-B., c.1350-1400, 139). ...Lequel [le parfait artificïen], du commandement sien, Commist moy, Foy et Esperance A faire nostre demourance Ou jardin, et nostre repaire Pour les bons avec nous attraire (COURCY, Chem. vaill. D., 1424-1426, 69).

 

-

Attraire qqn de qqc. "Amener qqn à se prononcer sur qqc." : Et qui ja t'en vouldroit attraire, Mon amy, quel chose en dys tu De ce Jhesus ? (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 454).

 

-

Attraire qqn en qqc. "Attirer, amener qqn vers qqc." : Et semblablement, ilz honorent ceuls qui font bonnes operacions, aussi comme se ilz vousissent par ce les bons atraire et conforter en bien et les mauvais retraire de mal faire et leur deveer. (ORESME, E.A., c.1370, 197). Vos me poriés a le mort traire Par moy en cel estat attraire Oultre mon gré (FROISS., Méliad. L., t.1, 1373-1388, 48). ...pour cueurs amoureux atrere En parfaite et douce plaisance (Livre amour. all. F., c.1398-1430, 74). ...d'une vierge tres benigne Naistera virginallement Le roy qui de ce tenement Puissanment nous vendra fourtarire et en la haulte gloire atraire (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 35). ...qui promirent a une deshonneste femme donner une somme de pecune se elle pouoit attraire a elle le couraige du philosophe en luxure. (COLART MANS., Dial. créat. R., 1482, 272). ...ce paultonnyer Hillaire Qui, tous les jours, deçoit le popullaire, Pour en la loy de ce faulx Jhesucrist Tous les humains incontinant actraire (LA VIGNE, S.M., 1496, 224).

 

-

Attraire qqn que. "Convaincre qqn de" : ...et l'autre demoura encores à Tournay, faisant plusieurs prédications, en attrayant tousjours iceulx que bien ils s'entretenissent ou parti du Roy. (MONSTRELET, Chron. D.-A., t.4, c.1444-1453, 179).

 

-

Attraire qqc. à qqc. "Amener qqc. à qqc." : ...se Dieux les roys n'enlumine (...) Cest scisme durera long temp. France a commencé de faire Son devoir pour le faire atraire A la vraye conclusion. (BOUVET, Appar. Meun A., 1398, 55).

 

-

Attraire qqc. pour qqc. "Amener qqc. à qqc." : Et, se il advient que le oeil attraire Veulle pour luy chose contraire Comme le soleil regarder, Ou que il voye le feu arder, Telz choses sont a l'eul perilz. (COURCY, Chem. vaill. D., 1424-1426, 15).

 

-

Attraire (qqc.) à qqn. "Attirer qqc. à qqn" : D'une chose trop m'esbaïz : Que ceulx qui veullent dominer Sur vous ne scevent terminer Vos maulx, et non a vous attraire ["plutôt que de vous en attirer d'autres" (Éd.).] (Concil Basle B., 1434, 94).

 

d)

Inf. subst. "Attrait, charme" : Or m'est trop fort necessaire Pour mon esperit refaire, Que bellement voelliés traire Viers celi Qui feri Tout parmi Mon coer par son douls atraire, Et li sagement retraire Ma dolour et mon contraire. (FROISS., Par. am., c.1361-1362, 70). Dous ris, regart debonnaire, Biau parler et gent attraire (MACH., Lays, 1377, 386).

II. -

[Le sujet grammatical désigne la personne ou la chose qui se déplace, qui tend vers qqn/qqc.]

A. -

Attraire à/en/sur qqn/qqc.

 

1.

[D'une pers.]

 

a)

Attraire à qqn

 

-

Attraire à femmes. "Se porter vers les femmes, courir après les femmes" : ...veu le peril de joennesce, la legierté et la grant convoitise que hommes ont communement a attraire a femmes (...) est le plus seur (...) n'estre coustumieres de tant troter ça et la (CHR. PIZ., Trois vertus W.H., c.1405, 182). [Seul ex.]

 

b)

Attraire à soi. "Se replier sur soi" : Filz, ne atrai point a toy se tu voies les autres estre honnourés et eslevez et toy humilier et despites. Dresce ton cuer a moy ou ciel (Internele consol. P., 1447, 189).

 

c)

Attraire à amende. "Être passible d'une amende (?)" : ...il est assavoir, se il [celui qui a la preuve à faire] n'est de ce garanti de dilligence ou qu'il ne ensaigne deuement, il pert sa cause pour la reprinse que sa partie lui en donne et dont il atrait a amende. (Instr. ensaign. B.G., c.1386-1390, 64). [Seul ex.]

 

2.

[D'une chose]

 

a)

Attraire en qqn. "Venir, se répandre en qqn" : Et Esperance fait atraire Joie en mes gens et mon service plaire. (MACH., Prol., c.1377, 4).

 

b)

Attraire sur qqn. "Tomber sur qqn" ( (Éd.)) : LE CHRESTIEN. (...) Quant je pense en ce tres dur affaire, Sans plus braire, me vousisse deffaire, Car contraire voy Malheur sur moy traire Et atraire sans estre soulassé. (Mir. st Nic. juif, c.1480-1500, 73).

 

Rem. Peut-être s'agit-il de la constr. attraire qqc. sur qqn. "attirer qqc. (le malheur) sur qqn"

B. -

S'attraire à/vers qqn/qqc.

 

1.

S'attraire à qqn. "Se rendre auprès de qqn, s'adresser à qqn" : Sçavés vous qu'il vous fault faire ? Au prophete vous fault atraire Pour grace demander et pardon, Car il est bien de si bon aire ; Pas ne vous reffusera ce don. (Pass. Auv., 1477, 138).

 

-

S'attraire vers qqn. "Diriger son attention vers qqn, s'occuper de qqn" : ...adonc doit il [le prince] s'atrere - et especialment - vers ceulz qui ont chevaux, qui du tout en tout doivent estre assemblez en un lieu establi et a un certain jour (VIGNAY, Théod. Paléol. K., c.1333-1350, 98).

 

2.

S'attraire qq. part, vers qqn. "Se diriger vers qqn" : A iceste parole sault le lïon avant, Vers le marchant se trait [var. sa trait, s'atrait ?], sa pate va hauchant (Lion Bourges K.P.F., c.1350, 38).

 

3.

S'attraire à qqc.

 

a)

"Tendre vers qqc." : Et celle parçoit sa bonté, Se s'attrait a humilité Et dou tout a lui s'umelie (MACH., D. Aler., a.1349, 327).

 

b)

"S'adonner à qqc." : Gens qui ne sevent nul mestier, Qui d'argent ont souvent mestier, Gens qui bien mestier saivent faire, Maiz ilz ne s'i veulent atraire (LA BUIGNE, Rom. deduis B., 1359-1377, 126). Le bon ne doit a mal s'atraire. (MESCHIN., Lun. princes M.-G., c.1461-1465, 61).

 

4.

S'adonner à + inf. "Tendre à" : Ci après vous diray un conte Ou prendre pourrez exemplaire De vous a Dieu amer attraire (Tomb. Chartr. W., c.1337-1339, 7).
 

DMF 2020 - MAJ 2020 Pierre Cromer

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