C.N.R.S.
 
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     ASSUFFIRE     
FEW XII sufficere
ASSUFFIRE, verbe
[T-L : assofir ; GD : assoufir/assoufire ; FEW XII, 404b : sufficere]

I. -

Empl. trans.

A. -

Assuffire qqn

 

1.

"Combler, satisfaire qqn" : Seigneur, dist Abilans, je vous asouffiray ; Car au roy Bauduin demain envoieray. (God. Bouillon R.B., t.3, c.1356, 392). Venus sont au palaix pour Charles asouffir (Huon Bordeaux B., c.1400-1450, 20).

 

-

[D'une chose] "Combler entièrement, rassasier" : L'ung en puissance temporele La quiert [la félicité], l'aultre en grande ricesse, L'aultre en puissance corporele, Chascun a son plaisir la cherse. Cilz de felicité largesse Cuide avoir qui son desir a. Heureux se dist, mais comment esse ? Tel bien ja ne l'assouffira. (MARTIN LE FRANC, Champion dames I-II, P., 1440-1442, 133).

 

2.

"Apaiser qqn" : Et le raison qui m'i tire, Tempre et tart, C'est pour monstrer par quel art Je sui sus le desconfire Et pour mon coer assouffire, Qui a toute heure souspire (FROISS., Pris. am. F., 1372-1373, 160). Pere qui tout peuple assoufis, Regarde ton bieneuré filz Et la tristesse de son ame Qui tres humblement te reclame A son besoing tres singulier. (MICHEL, Myst. Pass. J., 1486, 284).

 

3.

Assuffire qqn de qqc.

 

-

"Satisfaire qqn en lui fournissant qqc. en suffisance" : Divine bonté et increee Trinité ou est mucee la raison de toutes choses, qui appaise et assouffist l'ame devote de toutes choses (Disc. amour divine, 1470, 145). En grant dangier Languirons, sy qu'il m'est advis, Se estre ne poons assouffis D'autres vivres que ne trouvons, Consideré que nous avons Nos provisions despenseez En ce long chemin. (Myst. process. Lille K., t.1, a.1485, 480).

 

-

"Satisfaire qqn en lui fournissant (la réponse à une question)" : ZENON [qui cherche à savoir où est son fils]. Or assouffis me De ma demande, est il en voye ? (MOLINET, Myst. st Quentin C., c.1482, 60).

 

-

"Donner satisfaction à qqn par qqc." : Sy prist congé au duc, lequel avecques ce qu'avoit vu et oy, l'assouffy de response et de recommandation humble, ainsi qu'il séoit au cas, et partit le dit bailli content hautement du duc et lui attribuoit toutes les hautes louenges du monde. (CHASTELL., Chron. K., t.4, c.1456-1471, 28).

B. -

Assuffire qqc.

 

1.

"Accomplir (une volonté)" : ...cescuns me renoie, Fors li papes tant seulement, Mais enviers moi si se deffent, Que il n'a volut escouter Nes l'entree de men parler, Et se m'en sui mout esforciés, Car se de lui fuisse acointiés, J'euïsse asouffi mon voloir. (BRIS., Plait Ev. Dr. K., a.1340, 65). Ilz ont le coeur tant endurcy En Dieu qui morut en la croix, Qu'ilz ne veullent prier mercy A tous les dieux en qui je crois : Il convient qu'il croient en no lois Pour nostre command assouffire (MOLINET, Myst. st Quentin C., c.1482, 92).

 

2.

"Apaiser (un sentiment)" : Vous avés par provision D'une part mon ire assouffie, Dont grandement vous remercye (MOLINET, Myst. st Quentin C., c.1482, 116).

 

3.

"Satisfaire (un désir)" : Et pour vostre plaisance assouffir et la matere dou dit songe acroistre et moi acquiter envers vous en toutes coses (...), je sui apparilliés que dou faire. (FROISS., Pris. am. F., 1372-1373, 150).

 

4.

"Réaliser, terminer (une entreprise)" : Et pour ce fol est qui plus emprent qu'il ne peult assoufir, car il pert bien souvent l'un pour l'autre. (Percef. I, T., c.1450 [c.1340], 148). Jehan Pillot, paintre, a nagaires fait et assouffy plusieurs ouvrages de son dit mestier... (Arch. Nord, 1466, B 93, pièce 63, IGLF).

 

Rem. Le sens de "réaliser, mener à bien qqc." appartient au verbe assouvir : la confusion entre les formes en "v" et les formes en "f" est courante dans certains textes. Pour les rapports entre assouvir et assuffire, cf. FEW XXV, 568a : *assopire.

II. -

Empl. trans. indir. Assuffire à qqc. "Satisfaire à qqc." : ...pour assouffire a la sainte petition que je fais a moy mesmes (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 319).

III. -

Part. passé en empl. adj.

A. -

[D'une pers.]

 

1.

Assuffi

 

a)

"Satisfait" : C'est tres subtillement trouvé ; Maintenant [nous, les docteurs de la loi, à propos de Jésus qui argumente] sommes assuffiz. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 119). Vous sçavez que m'avez promis : Je ne requiers or ne richesse ; Tant seulement vostre promesse Tenez et je suis assuffye. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 249). Pour tant ne suis pas assuffy : Il fault chanter d'autre martin. Ne te [St Pierre] veis je pas ou jardin Avec luy [Jésus] quant il fut saisy ? (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 261). A ceste responce elle non assouffie encore, mes tendant au plus fort, de meshuy lui demanda la tierce fois :... (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 312).

 

-

"Comblé" : Estes vous tant assouffy qu'il n'est rien qu'il vous faille ? - Sire, dist l'ancien preudhomme, il ne me fault sinon la grace du Dieu Souverain. (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 686). Pour tousjours nostre veul perfaire Sera une estoille crëé, Pour la naissance tres louee De Jesus, mon tres aymé filz, Affin que soyent assouffis Les cueurs des rois quilz le desirent (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 243-244).

 

b)

[Avec une idée nég. de cupidité ou de satisfaction mauvaise] "Rassasié, assouvi" : A glouton ne chault dont bien viengne, Ne qui le paist, mais qu'il le tiengne ; Oncques glout ne fut assouffis, Ne n'ot souffisance en lui mis. (Renart contref. R.L., t.2, 1328-1342, 58). Povres gens destruissoit, onques n'estoit asoufis. Tousjours voloit taillier les grans et les petis. (Geste ducs Bourg. K., c.1410-1419, 307). Le fu qui apete flamer, Le parfont gouffre de la mer Et coer d'avers dont je dy fy, Ne sont nulle fois assouffy. (Pastor. B., c.1422-1425, 45). [C'est Pilate qui parle] Ne faictes plus cy les coquars ; Dressez moy croix et crucifis Affin que soient assuffiz Ces Juïfz qui tant l'ont grevé. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 332).

 

2.

Assuffi de/par qqc.

 

a)

"Satisfait de qqc." : Mes, voyans que leur ceur n'estoit asouffi en aulcunes qualitéz de ladicte responce (...), prestement ariere retournerent devant le roy (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 209). ...par ycelle responce nous ne nous tenons point asouffiz ne assez fondéz pour oser retourner devers nostre maistre... (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 301).

 

b)

"Comblé par qqc." : Quiers les cieux aprés ton pere, Qui siet a ma main dextere, Par mystere, Seras de joye assoufis (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 57).

 

-

[Avec une idée nég.] "Rassasié de qqc." : Iceulx communs de Paris, non asouffis de celle occision, ne cessèrent, par pluiseurs jours après, d'aller ès maisons de ceulx qui estoient nottés avoir tenu le party d'Erminacq, et prenoient leurs biens et les occyoient sans mercy. (LEFÈVRE ST-RÉMY, Chron. M., t.1, c.1462-1468, 332). Et, oultre plus, iceulx, non assouffis de leur furibonde vengence, emportèrent par force d'armes le chasteau de Brayne-l'Aleue, appertenant au seigneur dessusdit (MOLINET, Chron. D.J., t.2, 1474-1506, 76).

 

c)

Assuffi de + inf. "Rassasié de" : Lors respondi Philozophie, Qui onques ne fu assoufie D'arguër par soutieues voies (FROISS., Joli buiss. F., 1373, 60). Et, que plus est, iceulx depredeurs, proterves sacrilèges, non assoufis d'avoir despoulée l'eglise de ses rices habis et saintes dignitéz, despendirent le crucifis d'icelle (MOLINET, Chron. D.J., t.2, 1474-1506, 347).

B. -

[D'une chose]

 

1.

[D'un sentiment] "Apaisé" : NOSTRE DAME. Jamais ne seront assouffis Mes regretz tant que je le voye [Jésus]. (MICHEL, Myst. Pass. J., 1486, 301).

 

2.

[D'un objet (un plat)] "Rempli, copieux" : Et en effet avoit fait appointier cent plats de viande d'ordinaire avecques les sieutes, et si estoffés et garnis que nuls oncques ne furent meilleurs, ne plus riches, ne mieux assouffis, ne plus hautement servis. (CHASTELL., Chron. K., t.4, c.1456-1471, 138).

REM. Cf. aussi FEW XXV, 568a : assopire, pour la proximité de assuffire et assouvir.
 

DMF 2020 - Synthèse Pierre Cromer

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