C.N.R.S.
 
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     AFFAIRE     
FEW III facere
AFFAIRE, subst. masc. et fém.
[T-L : afaire ; GD : afaire ; GDC : afaire ; AND : afaire1 ; DÉCT : afaire ; FEW III, 349b : facere ; TLF : I, 817b : affaire]

A. -

"Ce que l'on a à faire, tout ce que l'on entreprend ; entreprise, occupation, besogne"

 

1.

Au sing. : Car il avoit un gros affaire Qu'il li convenoit a chief traire (MACH., Voir, 1364, 3083). De ceste chose se conseille Et prie moult chacun qu'il vueille Dire ce qu'en est mieulx a faire, Pour bien parfournir cest affaire. (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 60). ...et fu determiné Qu'il ne soit jamais d'eulx finé Tant qu'Ector soit ou mort ou pris (...) Ainsi jurerent cel affaire (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 85). ...devisons d'un aultre. J'ay ung affaire qui me touche beaucop, et a vous aussi. (C.N.N., c.1456-1467, 419). Item, dit que ceulx qui par mer veullent aller, soit en armée, ou en quelque aultre voyaige ou affaire quelle que elle soit, doivent singullièrement eulx pourveoir de bons mariniers expers et maistres en cellui office et que bien saichent congnoistre l'estre et la naissance de tous les vents et quelles choses leur peut nuyre et quelles non. (BUEIL, II, 1461-1466, 55). Mes pour quoy ara ce prophete Plus grant puissance que vous tous, Veu qu'il est seu et entre vous Estes plus de douze ensemble ? Plus peuvent douze, si me semble, Que ung tout seul en tout affaire. (Pass. Auv., 1477, 160).

 

-

[Avec un poss.] : Vien, si me sers con tu seulz faire, Ou trop mal ira ton affaire, Je te promet, en brief tempoire. (Mir. nonne, 1345, 343). Raoulet [le bourrel], je te truis bien a point. Vas, si apreste ton affaire, Car tantost fault justice faire (Mir. enf. ress., 1353, 52). Biau cousin, hastons nostre afaire, Car estre y deussions pieça. (Mir. chan., c.1361, 163). Par Dieu, seigneurs, dist Gieffroy, vous estes bonnes gens et loyaulx, et je vous mercie de vostre bonne voulenté, mais il n'est besoing quant a present, car j'ay assez gens sans vous traveillier pour acomplir mon affaire, au plaisir de Dieu. (ARRAS, c.1392-1393, 197). Que tu est long a ton affaire ! Advance toy, porte a manger ! (Pass. Auv., 1477, 91). Et le roy, estant adverty de ce, qui jamais ne fut endormy en son afaire s'en partit d'Orleans. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 200).

 

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Venir à son affaire. "Réussir dans son entreprise" : Si est dont mon opinion Que briefment le devez faire En bonne paix et union Pour mieulx venir a vostre affaire. (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 98).

 

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[Simple graphie pour à faire]

 

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Avoir qqc. affaire : [Le Jouvencel aux capitaines :] Messeigneurs, j'ay eu tout le bien et l'honneur que Dieu m'a donné en ce monde avecques vous et par vostre moyen ; et, pour ce, je vueil conduire tousjours tout ce que j'auray affaire par vostre bon conseil ; car j'ay esperance que, ès biens et ès maulx que j'auray jamaiz, vous aurez tousjours la vostre part jusques à la mort. (BUEIL, II, 1461-1466, 139).

 

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Avoir affaire : Et, ces choses ainsi faites et ouyes par elle qui parle, se trait arriere d'icelle chambre, et ala où elle avoit lors afaire par l'ostel de sadite marrine. (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 291). Mes enfans, je vous larrey tous Ung bien petit, car j'ay affaire. Pour la voulenté de mon pere Accomplir, m'en vaiz orer. (Pass. Auv., 1477, 157).

 

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Avoir affaire de qqc. / de qqn. "Avoir besoin de qqc. / de qqn" : ...et que quant elle vouldroit appeller icellui Haussibut, que elle prenist un tison de feu, et d'icellui feist un cercle tout environ elle, et auprès dudit sercle qu'il y eust de l'eaue benoite, par tele maniere que se elle en avoit afaire, elle en peust avoir et jetter sur elle. (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 292). ...le seigneur va hors de l'oustel a ses besongnes et amaine ung ou deux de ses amis avecques lui a sa meson, pour ce qu'il a affere d'eulx ou qu'ilz ont affaire de lui. (Quinze joies mar. R., c.1390-1410, 50).

 

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Avoir affaire d'une femme. "Désirer (une femme)" : Mais s'il avient que ceste dame vieult avoir robe ou aultre chouse de son mary (...), quant ilz sont en leur chambre en leur grant deliz et plaisances et que la dame voit qu'il a affere d'elle, elle lui fait si bonne chiere et si estrange que c'est merveilles (Quinze joies mar. R., c.1390-1410, 39).

 

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Avoir affaire à soi. "Avoir à se préoccuper de soi-même" : Et, ce nonobstant, lui getta il qui parle ladite pierre, et puis se eschapa ; et vit que ledit Jehan de la Ramée et ledit filz estoient entour ledit deffunt, mais que ilz lui faisoient ne avoient fait, dit que il ne scet ; car il dit qu'il avoit assez affere à soy. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 415).

 

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Avoir affaire de + inf. "S'occuper de" + inf. : ...je dy par mon oppinion qu'il n'y a à dire, sinon que le Roy veulle deliberer et conclure vostre secours. Je say qu'il a le voulloir, le savoir et le povoir de ce faire, quant il lui plaira. Et des diligences qui sont à faire en ceste matière, vous n'avez besoing, monseigneur le Mareschal de Crathor, d'en savoir riens. Et n'avez affaire, sinon de vous en aller, affin que ne perdiez temps. (BUEIL, I, 1461-1466, 173).

 

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Avoir assez / moult affaire : ...le royaume de France avoit moult affaire en son temps (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 184). Combien que vous ayez assez affaire sur les occupacions mondaines et sur le gouvernement de vostre terre et de vos subgiez, car n'est pas petite la charge d'un seigneur terrien lequel entre ses hommes doit tenir justice du fort au fieble, du riche au povre et du grant au petit (BOUVET, Appar. Meun A., 1398, 3). Ja n'est besoing de plus luy faire De mal, elle a assez affaire, Dieu la vueille reconforter (RÉGN., F.A., 1432-c.1465, 48).

 

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Avoir assez affaire de + inf. "Être fort occupé à" : A ce propos, dit Job (...) viendra ung temps que Dieu exaulcera les pouvres, et les grans et mauvaiz riches auront assez affaire de mauldire l'eure que oncques eurent richesse et tresors mauvaisement acquiz. (BUEIL, II, 1461-1466, 76).

 

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Avoir moult affaire à + inf. "Avoir fort à faire pour" : Moult furrent en grand effroy les crestiens, quant ilz se virent ainsi environnés de leurz adversairez, et moult eurent affaire a soubstenir et porter lez grans travaulx que leur fist de nuit et de jour le vaillant Turcq Salhadin (Saladin C., c.1465-1468, 30).

 

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Avoir autre chose affaire : ...j'ay bien autre chose affaire. (Sav. serg. D.L., c.1480-1490, 31).

 

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Avoir un pou affaire : Mais Gieffroy dist a ses trois freres qu'ilz feissent l'avant garde, et qu'il avoit un pou affaire. (ARRAS, c.1392-1393, 285).

 

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Avoir plus affaire : Par Dieu, seigneurs, dist Gieffroy, vous estes bonnes gens et loyaulx, et je vous mercie de vostre bonne voulenté, mais il n'est besoing quant a present, car j'ay assez gens sans vous traveillier pour acomplir mon affaire, au plaisir de Dieu. Par foy, sire, font ceulx, vous avez plus affaire que vous ne pensez, car voz ennemis sont fors et de merveilleux et fier couraige (ARRAS, c.1392-1393, 197).

 

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Estre affaire : Pour ce je di, Monseigneur, que vous devez laisser partir et aller devant ces gens icy. Se vous voyez à l'oeil que vous leur doyez courrir sus dès le despartir, vous le ferez, ou en chemin, si vous voyez qu'il soit affaire. (BUEIL, I, 1461-1466, 200). Vray est qu'ilz avoient de l'artillerie que le roy Amydas avoit de piéça et de celle que le Regent avoit amenée quant et lui ; mais elle n'estoit pas souffisante pour mettre en subgection la ville du Sap. Ainsi le roy Amydas fist ce qui lui fut conseillé [faire forgier artillerie à puissance] et ses diligences de toutes pars. Et, quant ilz eurent ordonné ce qui estoit affaire, le Regent dist au roy Amydas... (BUEIL, II, 1461-1466, 208).

 

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Estre bon affaire : Vous qui nous avez mis ceste querelle avant, dictes nous qu'il est bon affaire. Par foy, dist il, je le feray voulentiers. S'il vous semble bon, vous me baillerez deux de voz autres, et en yrons a Luseignen veoir se nous pourrons trouver chose qui nous soit prouffitable. Par foy, dient ceulx, nous le ferons tres voulentiers. (ARRAS, c.1392-1393, 148).

 

2.

Au plur.

 

a)

"Entreprises, occupations, démarches" : ...si conseil, et si afaire estoient demenet sagement et secretement (FROISS., Chron. R., XI, c.1375-1400, 249).

 

-

[Avec un poss.] : Or, alez hardiement, et ne ressoingniez rien, car Dieu vous aidera en tous voz affaires. (ARRAS, c.1392-1393, 51). Enfans, je vous encharge que en tous les lieux que vous serez, que tous les jours vous oyez le service divin tout premierement que vous faciez autre chose. Et en tous voz affaires reclamez l'aide de vostre Createur, et le servez diligemment, et amez et creniez comme vostre Dieu et vostre Createur. (ARRAS, c.1392-1393, 84). ...tu te leueras en pensee a mediter les benefices de dieu en toy, les bons desirs, les bons mouuemens, les secres conseilz quil te donne en tes affaires quant tu es en doubte et tu as recours a luy (CIB., p.1451, 187). Or sus, quelque chose sera A la fin de tous noz affaires. (Pass. Auv., 1477, 215).

 

-

Aller à ses affaires. "Vaquer à ses occupations" : Et devez sçavoir que le roy manda plusieurs fois à Mons. le grant maistre qu'il s'en povoit aller à ses affaires. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 380).

 

-

Faire ses affaires de qqc. "Se charger de qqc." : Cher et poisson avons en mise. C'est bonne viande ad commissaires ; Nous en ferons bien nous afferes Pour le disner de se prophete. (Pass. Auv., 1477, 147).

 

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Mener les affaires de qqn. "Diriger les entreprises, les activités de qqn" : ...pour mener les affaires du roy son maistre autant et plus qu'il n'a fait les sciennes. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 204).

 

b)

En partic.

 

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"Activités politiques, militaires..." : Et là il fist et ordonna plusieurs choses touchant les afaires de son royaume. (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 30). Car l'empereur a tousjours des affaires En ce pays, pour lesquelz exploiter Il envoye par deça commissaires Pour les choses faire et executer. (SAINT-GELAIS, Eurial. Lucr. R., c.1490, 50). ...vous plaise benignement recevoir et en excusant mon petit entendement, si je n'ay pas partout traictié, ne en si hault stille, comme je deusse, ce que bien conviendroit à vostre excellante et très illustrée, sacrée et royalle Majesté, et par maniere de recreacion entre vos haulx, nobles et ardues negoces et affaires en passe temps vous plaise le veoir et considerer (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 1 v°). ...comme le prince d'Orange, qui y estoit de nouveau arrivé et à qui le roy donnoit de grant credit ès affaires de la guerre (COMM., III, 1495-1498, 221).

 

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"Activités commerciales, économiques..." : ...[les prêtres] se sont souillez et occupez es affaires citoyens et aux negoces et cures temporelles. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 177). Le maistre, lyé et joyeux de la nouvelle garde de sa femme, laisse l'ostel et en la ville a ses afaires va entendre. (C.N.N., c.1456-1467, 96). ...son mary, qui (...) alloit souvent es affaires de sa marchandise (C.N.N., c.1456-1467, 289). Et, par lesdictes lettres, estoit contenu l'aliance faicte du roy et du roy Henry d'Angleterre, en mandant par lesdictes lettres tous Anglois laisser venir et descendre en ce royaume pour leurs afaires et marchandises, sans saufconduis ne autre seureté, comme les subgetz de France (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 247).

 

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Affaires humaines / publiques : ...et toutes choses, com haultes fussent, sachant conduire par labeur, dont sa dilligence et activité qui tout se convertissoient en affaires publicques et en choses de pourfit et de gloire a son maistre. (CHASTELL., Temple Boc. B., 1463-1464, 55). Il doit croire que de tout ce qui pend en sa sainte liberté inreprochable, il a fait et disposé a la congruité des choses temporeles - les causes y sont incongneues - et que toutes choses il fait en preveue salut du monde et des humains affaires. (CHASTELL., Temple Boc. B., 1463-1464, 155).

 

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"Actes (vus par Dieu)" : Combien qu'aucuns par fol cuidance Veulent dampner ceste sentence, Qui mettent leur estude et soign à plus sentir qu'il n'est besoign, Et dient que tous noz affaires Si sont par force nécessaires Pour la prescience divine, Laquelle ainsi les détermine, Maiz n'est pas ainsi, sauf leur grâce. (LA HAYE, P. peste, 1426, 69).

 

3.

"Ce que l'on entreprend contre qqn, pour se défendre"

 

a)

"Cause judiciaire, procès" : ...ung notable seigneur, preposé en office de judicature (...) lequel me dit que combien que il alast volentiers a conmis.. ou on le semonnoit, que toutesvoye il aloit tres envis avecques et a la requeste de ceulx qui avoient affaire devant luy. (JUV. URS., Aud. illos, 1432, 39). ...il [le roi] envoioit chascum an son procureur a comparoir en Parlement a Paris poursuivant ses causes et querelles et aultrez affaires. (JUV. URS., Aud. celi, 1435, 173).

 

b)

"Combat, lutte, engagement" : Sa lance prist, quant il fu droit, En point que pour jouster a yaus ; Ja sera li afaires biaus, Car il viennent esporonnant. (FROISS., Méliad. L., t.3, 1373-1388, 49). ...et en sa jonesse, veues les affaires qu'il [Charles V] eut, on peut bien dire qu'il fut garni de ceste vertu de force et vaillance (JUV. URS., Verba, 1452, 228). Ainsi marcha le Jouvencel à pié, lui et tous ses gens, fors ung petit tropelet de gens à cheval qu'il mist à part pour leur donner par derrière aucune affaire ou par costé. (BUEIL, II, 1461-1466, 248).

 

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En partic. "Guerre" : Helas ! J'ay eu tant a faire Depuis ton departement, Qui dira qu'a mon affaire Je n'ay eu grand perte, ment Mais a ton advenement J'ay tout plaisir obtenu. (Vie st Eust. 2 P., c.1400-1450, 212).

 

-

Avoir affaire à qqn. "Lutter contre qqn, affronter qqn ; avoir des différends, des démêlés avec qqn ; faire la guerre à qqn" : ...li bons rois Edouwars ses peres, qui tant ot afaire et de batailles as Danois et as Escos, et toutes achieva a l'onnour de li (FROISS., Chron. D., p.1400, 41). Silla, qui avoit affaire a Archillaüs, le prefect de Metridathès, fut au païs de Cappadoce par force de gens bouté en ung destroit, dont il ne pooit saillir (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 50). ...et aussi ceulx ausquelz je avoye affaire eussent peu avoir affaire a moy et a mon esglise plus grant dommage (JUV. URS., Nescio, 1445, 496). Encore, Monseigneur, je dy bien que ung homme, qui a affaire à ung aultre homme seul à seul, fera que saige de fraper le premier, s'il peut. (BUEIL, I, 1461-1466, 201). [Messire Jehan de Croy, ambassadeur du duc de Bourgogne au roi de France :] "...trop grant charge lui eust esté [à monsr] de faire guerre audis Anglois et avoir affaire aussi a voz gens..." (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 184).

 

-

Avoir affaire contre qqn. "Être en conflit avec qqn" : A laquelle chose devez, comme dit est, totallement resister et pourveoir contre leurs faulses entreprinses et conserver ceste science, car, si vous la perdez, soyez seur que les autres princes estranges ne la perdront pas, mais s'en sauront bien servir en temps et en lieu, s'ilz ont afaire contre vous, comme aucuns ont fait et font, puis deux ans en çà (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 7 v°).

 

4.

P. ext. "Relation avec qqn"

 

-

Avoir affaire à qqn. "Entrer, être en relation, en rapport avec qqn" : ...s'avoie afaire a lui Tost aroie ma pais (Renaut Mont. B.N. V., c.1350-1400, 321). De ton gouvernement, As tu point paour qu'on te bate ne fiere ? - Batre, pourquoy ? nenny certainement. - Non dea, tu as a faire a gent moult fiere (RÉGN., F.A., 1432-c.1465, 84). Si vesquirent depuis assez longtemps monseigneur et madame paisiblement ensemble, sans qu'elle sceust jamais qu'elle eust eu afaire au chevalier estrange. (C.N.N., c.1456-1467, 78). Que telz gens a moy n'ont affaire ! (P. Jouh. D.R., a.1488, 38). A, c'est ung usurier parfaict ! Je ne luy doybs rien en effect Ne jamais n'eux a luy affaire. (LA VIGNE, S.M., 1496, 517).

 

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P. euphém. "Avoir des relations sexuelles avec qqn" : Car espoir que sa mere, qui tant a les crins bloys, Ot devant vous afaire a prinche ou a bourgois. (Bât. Bouillon C., c.1350, 143). Ticius fu un geant luxurieus qui voult avoir afaire a Latone, et pour ce un voutour li runge le cuer. (FOUL., Policrat. B., III, 1372, 220).

 

5.

"Intention que l'on a d'agir ; projet, plan" : Cascune en soi moult recommande Hermondine et son noble afaire, Et dient que elle voet faire Bons chevaliers, preus et hardis (FROISS., Méliad. L., t.1, 1373-1388, 90). Leurs consaulx scevent, leur affaire Au long de degré en degré (DESCH., M.M., c.1385-1403, 267). Et vous, frere, joyeux soyez Et soyez du tout appaisiez Que celé vous ay mon affaire ; Car ce que l'en fait pour mieux faire Ne doit fors en bien avenir. (Gris., 1395, 97). ...tout par soy Chacun veult estre et a par soy Q'une dame de faulx affaire Leur conseille ce meschief faire (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 4).

 

-

Avoir grant affaire. "Avoir un projet important" : Monseigneur, le duc Oste de Baviere si m'envoye par devers vous savoir mon que vous querez en son pays et se vous lui voulez se bien non ; et aussi qui vous estes qui menez si noble compaignie comme je voy cy assemblee, car il scet bien que vous n'alez mie a tel route que vous n'aiez grant affaire. (ARRAS, c.1392-1393, 179).

 

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Sans grant affaire : Quant les deux chevaliers se furent esloingniez d'une veue de Remondin, si dirent l'un a l'autre : Par foy, veez la moult honnourable gent. Certes ilz ne viennent pas en ce pays sans grant affaire. Alons en par Quemeninguingant, et dirons leur venue a Alain. (ARRAS, c.1392-1393, 52).

B. -

P. ext. "Tout ce qui concerne qqn, qui présente pour qqn un intérêt quelconque ; situation de qqn"

 

1.

"Ce qui concerne qqn, sujet d'occupation" : ...oudit coffre elle print deux parisis d'argent, l'un doré et l'autre non, lesquelz elle a vendues, et l'argent appliqué à ses usage et affaire (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 196). Et pour sa beauté et doulce maniere estoit moult desiree de plusieurs grans seigneurs, et moult en avoit son pere grans prieres et requestes, et souvent lui en touchoit, mais elle comme pucelle de jeune aage n'entendoit fors que pou a telle afaire. (Guy Warwick, c.1400-1450. In : Chrestom. R., 93). ...mais la cause de son mal ne savoit elle pas ne ne peust ymaginer, comme celle qui pucelle estoit de jeune aage, et qui encore n'avoit oncques pensé a tel affaire comme est amours. (Guy Warwick, c.1400-1450. In : Chrestom. R., 96). Je ne croy pas que il y ait prelat qui voulsist faire prejudice a la jurisdiction temporelle, mais ilz vouldroient bien garder leur espirituelle par censures ecclesiastiques, et de ce vous, sire, soubz vostre correction en telles choses, ne les juges seculiers, ne vous en devez point mesler, car c'est affaire a nostre saint Pere dont ilz sont en ce subgetz (JUV. URS., Verba, 1452, 371).

 

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Apprester l'affaire de qqn. "Faire les préparatifs de qqn" : ...Melusigne fu moult curieuse de apprester l'affaire de ses enfans. Et fist arriver au port de la Rochelle grant et riche navire, tant de galees, comme de ranpins, comme de grosses nefs ; la mendre de deux couvertes, et les autres de trois. Et fu le navire si grant que pour bien mener trois mil hommes d'armes. (ARRAS, c.1392-1393, 83).

 

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[Avec un poss.] : Se vous depri devotement (...) Ma dame, qu'il vous vueille plaire Que je sache de vostre affaire Vostre nom et vostre venue, Et comment estes ci venue (MACH., R. Fort., c.1341, 77). Et ma dame m'arraisonna Et d'encoste li me mena, En demandant de mon affaire, Einsi comme elle soloit faire (MACH., R. Fort., c.1341, 129). Au penancier du pape irez, Si li direz tout vostre affaire. (Mir. mère pape, c.1355, 356). Car j'estoie ses secretaires En trestous ses plus gros affaires. (MACH., P. Alex., p.1369, 25). Si ay oÿ, Guillaume, je te di, Que Nature, qui tout fait par maistrie, T'a dit qu'a part t'a volu faire Pour faire dis nouviaus de mon affaire. Pour ce t'ameinne ici en pourvëance, Pour toy donner matere a ce parfaire, Mes trois enfans [d'Amour] en douce contenance : C'est Dous Penser, Plaisance et Esperance. (MACH., Prol., c.1377, 4). "Miroir des dames marïees", Que j'ay emprises a rigmer Affin que l'en s'i puist mirer, Et que pregnent en passïence Celles a qui vient pestillence ; Car qui bonne parole entent, S'a lui ne tient, il en attent Aucun prouffit en son affaire. (Gris., 1395, 2). Compains, pour certain ton affaire Est bon et bel, je m'y accort ; Si te confesse que j'ay tort Et tu as bon droit et raison. (Gris., 1395, 47). Car bien souvent on est deffait Par trop declairer son affaire. (RÉGN., F.A., 1432-c.1465, 199). ...sy se fist la noble dame de ce jour avant nommer Phlipot, et tant secretement conduissoient leurs affairez que jamais n'eussent esté recongneus, car de leur partement d'Arras ilz s'estoient frottez lez visagez (Comte Artois S., c.1453-1467, 105). ...au plaisir de Dieu et de sa glorieuse mère, à qui je recommande mon corps, mon ame et tous mes affaires. (Doc. 1454. In : ESCOUCHY, Chron. B., t.2, a.1465, 186). ...quand il vit son point, il donna la bonne nuyt a madame (...) et s'en retourne a son molin, pensant au surplus de son affaire. (C.N.N., c.1456-1467, 44). ...Amour, qui bande les yeulx de ses serviteurs, les bouscha si tresbien que la ou ilz cuidoient le plus secretement de leurs amoureux affaires conclure et deviser, chacun s'en parcevoit. (C.N.N., c.1456-1467, 163). Es tu fol ? Dy moy ton affaire. (Path. D., c.1456-1469, 170). Ainsi qu'il [le lieutenant général du royaume] voulust marchier, le cappitaine de Crathor, le Jouvencel, le sire de Rocqueton et le Mareschal prindrent congié de lui et luy dirent beaucoup de belles parolles et notables, en luy recommandant le païs et leurs personnes et leurs affaires, et en le remerciant très humblement de l'honneur qu'il avoit fait au Jouvencel. (BUEIL, II, 1461-1466, 6). Ainsi se despartirent d'une part et d'aultre, et s'en alla chascun à son affaire, le conte devers le Roy et les aultres à la ville. (BUEIL, II, 1461-1466, 7). Et le Roy donna audience à qui la voullut avoir, bonne et grande, affin que chascun lui peust parler de ses affaires ; et fut plus de XV jours ou trois sepmaines qu'il ne voullut entendre à autre chose que à les ouyr en leurs fais et affaires. Ainsi partirent bien contens du Roy et de tout son conseil. (BUEIL, II, 1461-1466, 172). Je vous diray tout mon affaire (Feste roys, c.1475-1500, 303). Maistre Symon de Perre Couverte, du diocese d'Orleans, appellé par les Gantoys pour conseiller leurs afferes, comme homme ellegand, grant astronomien et homme de bonne estyme, veritable en plusieurs ses jugemens generaulx et particuliers. à ceste cause, fut en ce temps esleu de la communité pour remonstrer au conte Loys leurs afferes et excuses et, pour ce qu'il estoit chevalier de nom et de fait, en print la charge (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, 158).

 

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De mon affaire. "En ce qui me concerne" : Ossy fay je de mon affaire, Saint Povoir Papal, moyennant Que ce soit en mon droit gardant Quant vous arés tout regardé. (TAILLEV., Moral. D., 1435, 105).

 

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Recommander à Dieu son affaire. "Se recommander à Dieu" : A vous, prince, me viens retraire. Las, ayés de moy souvenance ! En ceste doleur et gravance Vous recommande mon affaire. (Pass. Auv., 1477, 220). Lesquelles lettres receues par le roy, fist de grans dons et oblations en plusieurs eglises, en recommandant à Dieu son affaire et qu'il luy pleust avoir ses gens d'armes pour recommandés. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 392).

 

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Prov. : Chascun pence a son affere ! (Pac. Job M., c.1448-1478, 304).

 

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CHASSE Retrouver son affaire. "Retrouver la trace, la bête que l'on chasse" : Et, quant voit que lui ne son chien N'en ont, ne il n'en voit de rien, Et il a bien fait tout le tour, Adoncques se met au retour En brisant, ou voit qu'est a ffaire, Pour mieux retrouver son affaire. (LA BUIGNE, Rom. deduis B., 1359-1377, 371).

 

2.

"Situation de qqn" : Je me trouvay si adolez Que je ne savoie que faire, Ne riens jugier de mon affaire (MACH., D. Aler., a.1349, 290). Au setieme jour, li rois Daires Volt savoir comment li affaires De Daniel s'estoit portés (MACH., C. ami, 1357, 43). Si appellai mon secretaire Et li descouvri mon affaire, Comme fort estoie entrepris Et du mal amoureus espris (MACH., Voir, 1364, 1800). ...[on envoie des espions auprès des Anglais pour voir] une grant partie de leur afaire. (FROISS., Chron. L., III, c.1375-1400, 172). ...[Froissart se propose de parler de] l'estat de l'affaire et ordonnance du gentil conte Gaston de Foeis (FROISS., Chron. M., XII, c.1375-1400, 116). ...[recommandations à un diplomate envoyé traiter avec le duc de Bretagne] mettez bien en memoire tout son affaire, les responses et l'ordonnance de son estat. (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 232). Car nous nous garmentïons tous Comment au marquis, nostre sire, Pourrïons deprïer et dire Qu'a soy marïer s'assentist, Qu'a vis nous est qu'en avenist (...) Et tres a certes vous prïons Tant chierement com nous povons, Que pour nous lui vueilliez l'affaire, Si com vous le sarez bien faire, Moustrer familïerement (Gris., 1395, 10). Prince [Jésus], je cognoiz que foulie Tout ton cas est et ton affaire. Il fault que tu perdes la vie ! (Pass. Auv., 1477, 218).

 

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"Ce qui advient à qqn"

 

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Predire l'affaire de qqn : Predist aussi à messire Pierre des Essars son affere s'il sailloit de la Bastille, ce qui advint, car depuis il perdit corps et vie par le duc de Bourgongne. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 151 v°).

 

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Savoir de l'affaire de. "Être au courant de telle ou telle circonstance au sujet de" : Et, le XIIIe jour de septembre, ledit connestable estant à Tilhart, qui sceut de l'affaire desditz Bourguignons, envoya audit grant maistre unes lettres missives dont la teneur s'ensuyt (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 313).

 

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C'est bonne affaire : Une autre li feray avoir, Fille de roy ; au dire voir, C'est bon afaire. (Mir. femme roy Port., c.1342, 173).

 

3.

En partic. "Situation embarrassante, difficulté"

 

a)

"Adversité, tribulations, affliction" : ...je croy tu le doiz faire, Qu'anvers Dieu t'a aidié a passer ton affaire. (Gir. Ross. H., c.1334, 116). Pareillement aussi les autres, doubtans que affaire ne leur en advenist, envoyèrent devers le roy pour mettre barre aux complaignans et rompre leur fait par les prévenir. (CHASTELL., Chron. K., t.4, c.1456-1471, 106). LE CHRESTIEN commence : Consideré le cours du temps passé Que j'ay passé, de bon cueur trespassé, Mal compassé, d'honneur pou amassé, Tout bien pensé, ne sçay que doye faire. De Povreté me voy tout embrassé, Si enlassé que suis tout lassé, Si entassé, de honte et dueil cassé, Mocqué, farcé que plus ne me peux taire. Quant je pense en ce tres dur affaire, Sans plus braire, me vousisse deffaire, Car contraire voy Malheur sur moy traire Et atraire sans estre soulassé. Las, sans soulas voy l'orrible viaire Se pourtraire, que point ne me peut plaire ! (Mir. st Nic. juif, c.1480-1500, 73). S'i vous plaist, en vostre presence Vous reciteray mon affaire, Dont j'ay douleur et desplaisance, Qui a chacun est tout notoire. (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 224). Et sembloit bien, et m'en souvint, que frère Jheronime m'avoit dit vray que Dieu le conduist par la main et qu'il auroit de l'afaire ou chemin, mais que l'honneur luy en demoureroit. (COMM., III, 1495-1498, 176).

 

-

Au plur. : ...se le plus saige prince (...) estoit environné de pesans affaires et de cuisans poinctures, qui pour relever ceste seigneurie opprimee sourviennent en chascun jour, dur lui seroit a y pourveoir (CHART., Q. inv., 1422, 47). ...nous le servirons [le Roy] en tous ses affaires et obeyrons à ses commandemens, ainsi qu'il appartient et faire le devons, sans lever ou exiger aucune chose sur les habitans de ce païs icy. Et, s'ainsi est que, pour avoir d'autres affaires ou moyennant le conseil d'aucuns, il soit troublé et desconseillé en manière qu'il ne nous puisse donner provision de payement ou de gaiges, il nous faudra lever de nous-mesmes vivres et finances (BUEIL, I, 1461-1466, 95). Et, pour vous donner à entendre le cas, il est vray que le roy Amidas est très mal mené et a des affaires si grans qu'il a perdu sa seigneurie, se, par la grace Nostre-Seigneur, il ne la recouvre, et par le bon secours et aide du Roy, nostre souverain seigneur, qui cy est. Sa querelle est belle et bonne, comme chascun scet. (BUEIL, II, 1461-1466, 160). Or voyez ung peu comme les affaires ou brouilliz de ce royaulme sont grandz (ainsi qu'ilz se peuent bien appeller par aucun temps) (COMM., I, 1489-1491, 223).

 

b)

"Embarras ; souci" : Tres chiere dame, pardonnez moy l'injure et la vilenie que j'ay fait envers vous, car certes j'ay trop mesprins, et je vous jure ma foy que je ne vous avoye veue ne ouye quant vous me traïstes par la main. Et sachiez que je pensoye moult fort a un mien affaire qui moult me touche au cuer, et je prye a Dieu qu'il m'en aide a yssir. Par ma foy, sire, dist la dame, c'est bien dit, car en toutes choses doit on appeller Dieu en son aide. (ARRAS, c.1392-1393, 25). Item, a maistre Jehan Cornu, Autre nouveau laiz lui vueil faire, Car il m'a tousjours subvenu A mon grant besoing et affaire. Pour ce, le jardin lui tranffaire (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 86).

 

c)

"Situation délicate, dangereuse ; cas, ennui" : ...et maintenant, toy succombee en dangier et en chartre de merancollie, non toutesvoyes habandonnee de Dieu, ne foullee en ton honneur, tu es venue droit cy faire tes clamaces, estonner le ciel de tes regrés et vexer mon ame en repos pour te donner ascout, priant de responce sur tes peticions et de conseil en ton triste affaire, en quoy, par pité de ton cas et de ta personne, j'ay sattiffait et compleu d'autant qu'en moy a de sens et par argumens et par exemples et articles mis tout avant (CHASTELL., Temple Boc. B., 1463-1464, 189). Poinct ne flechira mon couraige De chose que me saichez faire, Car pour le Roy de hault paraige Maintenant suis en cest affaire. (LA VIGNE, S.M., 1496, 343).

 

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Avoir trop affaire à + inf. "Avoir beaucoup de difficulté" : ...et avoit ledit prevost de Paris trop affaire a gouverner les deux (JUV. URS., Nescio, 1445, 478).

 

-

Avoir fort affaire. "Avoir des difficultés, des démêlés ; s'engager dans une rude entreprise" : Or convient Sarrasins contre deux lés jouster ; Ils avront fort afaire s'il puent eschaper, Car tout la fleur du mont les vient advironner. (Lohier Malart M., c.1325-1350, 490). S'en publicque le pugnissiens Au peuple fort affaire ariens. (MARCADÉ, Myst. Pass. Arras R., a.1440, 144). Noz gens ont eu fort afaire, Et des Anglois bien deffendue ; Mes, Dieu mercy, avons eue Victoire allencontre d'iceulx, Que reschappé, ne pié ne queue, Y n'en n'est pas ung tout seul d'eulx. (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 439).

 

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À petit d'affaire. "Facilement ; sans peine" : "J'ai dormi un tamps ; mais il appert à petit d'affaire ["Il n'est pas difficile de comprendre que..."] que je me resvillerai, et meterai un tel tourble entre celle ville chi et le conte, qu'il coustera cent mille vies." [dit Jean Lion, révolutionnaire de Gand] (FROISS., Chron. R., IX, c.1375-1400, 166).

 

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Bailler / donner affaire à qqn / donner des affaires à qqn. "Causer du mal, des difficultés à qqn" : ...[des chevaliers ont à combattre des bandits] ilz nous donnaient moult affaire [mais des secours arrivent et ils ont le dessus] (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 7). ...il a corps et vie exposé Sans estre lasche ou reposé (...) Encontre ceulx qui assaillant Venoient France, en leur baillant De courage non defaillant Assez affaire. (CHART., L. Dames, 1416, 223). Mais la baniere du roy qui par tout le suivoit, a l'ayde des bons et vaillans François et des autres qui la conduisoient et faisoient de merveilleuses armes, donnerent de fors affaires aux ennemis (LA SALE, J.S., 1456, 218). La place, comme j'ay dit, estoit malement forte et bien garnye de bonnes gens. Sy n'estoit pas bien aisée à avoir, sinon par long siège et par donner beaucoup d'affaires aux assiégés. (CHASTELL., Chron. K., t.1, c.1456-1471, 103).

 

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De haut affaire. "De grave conséquence" : Vous ne demandez que raison, Car c'est chose de hault affaire Que d'homme humain voloir deffaire, Car sa mort jamais reparée Ne puelt estre ne restorée (MARCADÉ, Myst. Pass. Arras R., a.1440, 148).

 

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Être au dessus de ses affaires. "Avoir surmonté ses difficultés" : Et est le roy de Chippre en bon point, lequel se recommande bien cherement à vous en vous merciant du service que fait lui avez et est tout vostre et tout son royaume avec et vous asseure que il est tout au dessus de ses affaires par l'aide de Nostre Seigneur. (Cleriadus Z., c.1440-1444, 337-338).

 

4.

P. ext. "Situation en général ; circonstances" : ...il compterent tout l'afaire et conment li rois d'Escoce et la roine le venoient veoir (FROISS., Chron. D., p.1400, 238). [Les Français lèvent le siège d'Aiguillon] Li compagnon qui dedens (...) estoient, perchurent cel affaire que on se deslogoit (FROISS., Chron. D., p.1400, 750). [Dieu] Dispousa l'afaire aultrement qu'ilz ne cuydoient : car ilz ne croioient point que le roy vint en personne (COMM., III, 1495-1498, 29).

 

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Par quelle affaire. "Dans quelles conditions" : Ja savés vous par quel affaire Il furent premiers commenchiet (FROISS., Joli buiss. F., 1373, 224).

 

5.

Au plur. [Choses concrètes] "Biens personnels, vêtements, effets de qqn" : ABBE. Mes amys, il fault qu'on s'assemble A ce povre doulant pencer ; Du moins mectez vous deux ensemble Pour ses affaires dispercer. (LA VIGNE, S.M., 1496, 377).

 

-

"Équipement" : Vos [du roi] predecesseurs ont accoustumé, quant ilz avoient affaire pour la guerre, ilz faisoient assembler les trois estas (...) et y venoient et y faisoient notablement monstrer les affaires que il avoit pour resister aux ennemis, en requerant que ont voulsist adviser comment il pourroit sa guerre soustenir (JUV. URS., Verba, 1452, 268).

C. -

"Manière d'entreprendre, manière d'agir ; manière d'être"

 

1.

"Conduite, comportement" : ...gens et debonnaires Et courtois en tous ses affaires. (MACH., D. Aler., a.1349, 302). ...dame debonnaire Qui a adressié son affaire A loyaument amour amer (MACH., D. Aler., a.1349, 350). Guillaumes qui en ses affaires Soloit estre si debonnaires, Si honnestes et si courtois (MACH., J. R. Nav., 1349, 260). ...c'est cil en qui tant de bien A (...) Que par grant sens le fol faisoit. Je le voy bien a son affaire. (Mir. parr., 1356, 52). L'en en [d'amer Dieu] vault miex en nature, En meurs, en sens, en affaire (Mir. st Sev., 1362, 203). Dame, qui je vueil obeïr, Je vous suppli que pardonner Me vueilliez et non imputer Ce dont je suis contraint au faire. Tressaige dame estes d'affaire Et assez savez par raison Que c'est d'estre en subjeccïon Et soubz puissance de seigneur, A laquelle, ne par rigueur, Ne par nul engin, resister On ne pourroit, ne contrester, Qu'exemples avez veü mains. (Gris., 1395, 53). Dame de treshaulte puissance, Plaine de vertueux affaire, Pour Dieu, ne vous vueille desplaire De ce que faire il me convient (Gris., 1395, 65).

 

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"Comportement, discours" : Ce qu'elles avoient dit me sembloient choses toutes sans aucune raison ou bonne consequence (...) Il n'estoit aincoires apparent que silence fust entr'elles, pourquoy je me mis en la veue d'elles affin que par mon regard, elles eussent aucune vergoingne et honte de leur affaire qui certes estoit moult desriglé comme d'une bataille faillie et vaincue. (Ev. Quen., I, c.1466-1474, 116).

 

-

Sus mon affaire. "Selon mon procédé" (Éd.) : Dame, di jou, un trop lonc jour Me faurroit il pour un lay faire, Et toutes fois sus mon afaire J'en ai un fait a ma plaisance. (FROISS., Par. am., c.1361-1362, 65).

 

2.

"Attitude, état d'esprit" : Charité les esmouvera A vostre nom magnifester. Mais, premier, pour eulx apprester, Ung grant son du ciel vouldray faire Pour mieulx disposer leur affaire A recevoir ce don parfait. (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 1055).

 

-

"État d'âme, émotion" : Car volentiers, se le pooie faire, Vous diroie mon coer et mon afaire Tout ensi que Desirs le me commande. (FROISS., Orl., 1368, 104).

 

3.

"Disposition, manière d'être" : ...s'estoit elle d'affaire Bel, bon, gent, dous et debonnaire. (MACH., R. Fort., c.1341, 55). Et devint homs de tel affaire Que ne le vueil mie retraire, Car li airs corront et empire De parler de si vil matyre. (MACH., C. ami, 1357, 92). Fay bonne chiere Et lay ton crier et ton braire. Que vaut uns homs de tel affaire ? (MACH., F. am., c.1361, 231).

 

-

C'est affaire à. "C'est le propre de" : C'est afaire a maistre enfumé (S. fol, c.1480-1490, 7).

 

-

De mal / mauvais affaire. "De mauvaise nature" : De ces officïers de rois L'un est sergent, l'autre bourgois ; Aspres sont et de mal affaire. (DUPIN, Mélanc. L., c.1324-1340, 99). Or sont d'aucuns apothicaires Qui font les malvais lectuaires, Faulses herbes, males espices. De ceulx ne me puis ge retraire, Quart tropt sont de malvais afaire. Par signes sont plains de malx vices. (DUPIN, Mélanc. L., c.1324-1340, 74). Quant li villain de mal affaire Trueve son signeur debonnaire, Forment le het et le desprise. (DUPIN, Mélanc. L., c.1324-1340, 142). Bien seras de mauvais affaire, S'il fault que par toy soit deffaicte Car ja mieulx n'en seras reffaicte. (Au grey d'amours F.-H., c.1400-1500, 254). Alors ilz cesserent de frapper sur lui et dist Troïlus : "Certes, seigneurs, il est de si mauvais affaire qu'il ne pourroit point mourir pour ceste fois..." (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 232). Je scey bien qu'elle a le cuer autain Et qu'elle est bien de mal affaire (Pass. Auv., 1477, 134).

 

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(Estre) de bon affaire

 

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[De pers.] "Loyal, honnête, serviable" : Si fist une ordre pour attraire Les chevaliers de bon affaire, Qui avoient devotion En terre de promission (MACH., P. Alex., p.1369, 11). En tout est de si bon affaire Com nature puet homme faire (MACH., P. Alex., p.1369, 218). Car se je sui humble et de bon affaire (MACH., L. dames, 1377, 172). Sage prince et de bon affaire Estoit [le roy Jehan], et moult chevalereux, Mais n'estoit pas moult eüreux En ses fais (CHR. PIZ., M.F., IV, 1400-1403, 76). Ainsi fait homme viel et riche Au moins s'il est de bon affaire. (TAILLEV., Passe temps D., c.1440, 147). Quant Loÿs, Organor, leur patron et Gerard oÿrent le Sarazin parler, advis leur fu qu'il estoit de bon afaire et homme de foy (Hist. seign. Gavre S., c.1456, 68). Par une famme qu'on cognoit Tout mal croit, Si elle non est de bon affaire. (Pass. Auv., 1477, 107). Il a esté de bon affaire Pour l'amour du souverain roy ; Il luy sera remuneray En la haulte gloire eternelle. (Myst. st Laur. S.W., 1499, 274).

 

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CHASSE "De bonne disposition/aptitude" : Car il me prist a souvenir De l'alerion debonnaire Qui tant me fu de bon affaire. (MACH., D. Aler., a.1349, 395). Faulcon pelerin est ainsi nommé, pour ce que on ne scet où il naist, et qu'il est prins en septembre faisant son pelerinage ou passage és isles de Cypre et de Rodes. Le bien bon [faucon pélerin] est de Candie. Il est hardi, vaillant et de bon afaire. Il est bon à la grue, à l'oyseau de paradis, (...) à l'oye sauvage, ostarde, olives, perdis, et autres menus. (TARDIF, Art faulconn. J., t.1, 1492, 17).

 

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De put affaire. "Déloyal, méchant" : Traïtres est de put affaire. (MACH., Compl., 1340-1377, 264). Moustre li ce que tu sces faire, Car il est de si put affaire Que signeur ne te vuet clamer. (MACH., C. ami, 1357, 85). Si qu'il est bien raison qu'il face Par leur conseil ce qu'il doit faire Contre la gent de put affaire [les Sarrasins]. (MACH., P. Alex., p.1369, 148). LE SECOND MARTIR. L'en se doit bien de tel parole Mocquer et derrision faire, O mauldiz hons de put affaire, Membre du dyable et satalite, Et vaisseaul ou le dyable habite (Myst. st Adr. P., c.1450-1485, 78).

 

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De rude affaire. "Dur, rude" : Car trop fustes de rude affaire, Quant la dame vous aprocha D'un fait qu'elle vous reprocha Que fait aviez ou temps passé. (MACH., J. R. Nav., 1349, 267). ...car la privée [femme] est de si rude afaire Qu'elle ne vault vers l'estrange [femme] j. denier, Ce dient ceulx qui femme ont en grenier. (MACH., App., 1377, 643). Et pour ce sont mi chant de rude affaire, Qu'il sont tuit fait d'un cuer plus noir que meure, Triste, dolent, qui larmes de sanc pleure. (MACH., Bal., 1377, 557). Et fut un nommé Jehan Coustain, homme brutal et de gros et rude entendement et affaire, natif de Bourgongne, jeusne nourry en la chambre du duc sous un nommé Ymbert Coustain, son oncle, bon vray preud'homme (CHASTELL., Chron. K., t.4, c.1456-1471, 235).

 

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De très petit affaire : Quant ma dame est noble et de grant vaillance, Et je me sen de tres petit affaire, Je n'en puis mais (MACH., L. dames, 1377, 212).

 

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Ne pas tenir d'un roi l'affaire. "Ne pas se comporter comme un roi" (Éd.) : Par Dieu il n'est pas bien mondain. Il ne tient pas d'un roy l'afaire : Il tient vie trop solitaire. (DU PRIER, Roy Adv. M., 1455, 436).

 

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P. ext. [D'une chose] "Sorte" : Ongles ot lons de telle affaire Qu'on en puïst lanternes faire, Mal rez et dedens mau curez (Dit prunier B., c.1330-1350, 49). Souvent regardoit son anel Et moult tenoit le don a bel, De fois a autre le baisoit Et a son coutel assaioit, Qui moult estoit de dur affaire, S'il y poroit le trache faire Ainsi que ly dyamant font Par dedens le fier quant vray sont. (Dit prunier B., c.1330-1350, 66).

 

4.

"Position sociale ; rang, dignité" : Se j'estoie de vostre affaire, Chier sire, et de vostre valeur (Mir. fille roy, c.1379, 80). Plusieurs y a oyseux (...) Dont je suppose qu'il couviengne, Maintes choses mal a point faire, Pour soustenir si fait affaire. (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 75).

 

-

De bas / bon / grant / pauvre / petit affaire : Mes sires estoit ly plus grans, Ly plus beaux et ly plus poissans Du païs ains qu'il me presist, Sy que moult grant honneur me fist, Ungs homs tous fais de grant affaire, Quant jone femme toute a faire Vault a sen bien acompagnier Et se veult faire parchonnier A me folle et nice ygnorance (Dit prunier B., c.1330-1350, 84). Et que, pour vous faire a savoir Comment li est de vostre amour, Je suppose ensi c'a nul jour Nulz povres homs de bas afaire N'euist osé tel cose faire. (FROISS., Méliad. L., t.2, 1373-1388, 346). A toutes ces parolles dire, Que li rois respondi par ire, Estoit Saigremor en present, Li filz dou roy certainnement, Uns damoisiaus de bon afaire (FROISS., Méliad. L., t.3, 1373-1388, 83). ...moult gentilz homs et de bon afaire (FROISS., Chron. L., V, c.1375-1400, 142). Car je ne sauroye pas estudier comme vous feistes jadiz, et sy ne seroye pas escoutés par aventure, se je disoie pluiseurs choses comme vous fistes, car je suy d'estrange pays, petite personne et de petit affaire. (BOUVET, Appar. Meun A., 1398, 8). ...uns aultres tres honestes bourgois de grant afaire (FROISS., Chron. D., p.1400, 843). Vous estes bien de pouvre afaire, De povre maleureux coraige, De lesser la guerre a parfaire A une garce de villaige. (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 436).

 

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De si haut / noble affaire. "De haut rang" : ...Charles le membrez A donnee la ville et les grans heritez, A ung scien chevalier (...) Qui est de hault affaire et bien enparentez (Ren. Gennes D.B., c.1350-1400, 95). ...uns sires de noble sanch et de hault afaire et de grant linage (FROISS., Chron. L., VII, c.1375-1400, 178). Et la fuist en ceste paix faire Lui Prince de tres noble affaire (HÉRAUT CHANDOS, Vie Prince Noir T., c.1385, 90). Mais sachiez que je ne cuidoie pas trouver logiee si prez de moy damoiselle de si hault affaire, ne qui eust tant de si nobles gens avec lui. (ARRAS, c.1392-1393, 38). ...après la bataille du soudant desconficte, le cappitaine se party des deux freres, avec lui XXX. chevaliers de noble affaire, et vint en la cité, ou on lui ouvry les portes liement (ARRAS, c.1392-1393, 113). ...cellui Gieffroy est chevalier de hault et puissant affaire, et si est terriblement crueulx. Il fait trop durement a doubter. (ARRAS, c.1392-1393, 207). N'y ot homs de si hault affaire, Qui grant honneur ne leur [aux gent qui se meslent de finance] portast (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 65). LE ROY DE PARTHE. Vaillans subgetz de noble affaire, Vous soyés les tresbien venus ! (Myst. st Adr. P., c.1450-1485, 26).

 

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De moult bel affaire. "De grande dignité" : Et comme il cuidoit aller celle part, il voit issyr une ancienne dame de mout bel affaire et devant lui avoit un jouvencel de prime barbe avecq deux pucelles eagies environ de vingt ans qui faisoient a la dame compaignie. (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 836).

 

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De tel affaire. "De très haut rang" : ...et la loiauté D'Abraham, a verité dire, Ne peüsse je pas souffire Pour dame amer de tel affaire (MACH., R. Fort., c.1341, 5).

 

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Se faire de grant affaire. "Faire l'important" (Éd.) : De telx se font de grant affaire Qui n'ont ne terre ne repaire Et si contrefont le riche homme. (DUPIN, Mélanc. L., c.1324-1340, 91). Li uns se tient escharsement, D'autres se tiegnent grandement, Et si se font de grant affaire. (DUPIN, Mélanc. L., c.1324-1340, 227).

REM. Subst. gén. masc. au sens C.
 

DMF 2020 - Synthèse Monique Haas

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