I. -

Empl. trans. Qqc. adoule qqn. "Faire souffrir, attrister, affliger qqn" : Car je tieng fermement cecy Que moult les adole et les blesce Ma mort, et met en grant tristesce (Mir. femme, 1368, 214). ...la preux Panthaselee (...) d'Ector mort fu adoulee (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 12).

II. -

Empl. intrans. "Souffrir moralement, se livrer à la douleur" : O Dieux ! Comment voions nous les jeunes gens adouler et entrister quant correction, quoyqu'elle leur soit salutaire, leur est presentée (CHR. PIZ., Faits meurs Ch. V, S., I, 1404, 24-25).

III. -

Empl. pronom. S'adouler de qqc. "S'affliger de qqc." : Ma dame (...) Sanz cause bien vous affolez. Ne scé de quoy vous adolez (Mir. Amis, c.1365, 65).

IV. -

Part. prés. en empl. adj. "Qui cause de la souffrance" : Si pouvreté desmesuree Jeune m'a esté adolente Et que fortune amesuree Viel ne porte sur mon dos lente, Que me vault une vie dolente ? Car quant jeunesse me deffault Rire en lieu de plorer me fault. (CHAST., Temps rec. D., 1451, 57).

V. -

Part. passé en empl. adj. ou subst.

A. -

Empl. adj.

1.

[D'une pers.]

a)

"Marqué par une souffrance morale, affligé" : Et a son hostel s'en revint Triste, ploreuse et adoulee. (Tomb. Chartr. Dix-huit contes K., c.1337-1339, 21). Que, quant je m'en vi esseulés, Je me trouvay si adolez Que je ne savoie que faire, Ne riens jugier de mon affaire, Fors que tristeces et dolours (MACH., D. Aler., a.1349, 290). Il estoit pour sa fame trop forment adoulez. Sez enfans regarda, qui li sont demourez ; De la pitié qu'il out fu forment esplourez, Puis dist piteussement : "Dous Dieu, de moy penssez !..." (Vie st Eust. 1 P., c.1350-1400, 144). ...ilh fut si adoleis et sy afflis qu'il cheyt en male santeit, et onkes puys ne s'armat. (HEMRICOURT, Guerres Awans B., c.1398, 48). Misérable chétive femme, parée au dehors d'un haut resplendissant titre, et par dedans la plus douloreuse qui vive, malheurée fille de roy, triste créature adolée, chartrière d'annuy et esclave de fortune (CHASTELL., Chron. K., t.1, c.1456-1471, 52). Certes ien suis moult adole Portons lay au lict le plus bel Il conuient monseigneur loyal Enuoyer querir cyrurgiens. (Myst. st Martin K., a.1500, 307).

-

[Du coeur] : ...Dont le cuer ay en grant esmay Et adolez. (Mir. pape, 1346, 394). ...douloureux soupirs qui de cuer adollé lui mouvoient (CHART., Q. inv., 1422, 10). ..."O ma dame, aurez vous jamais pitié de mon povre et adollé cuer qui ne vous poeut par reffus ne ruidesse mettre hors de son desir, qui de fort en plus vous ayme, qui ne quiert qu'a vous complaire, qui ne scet soy travaillier assez pour faire la treuve de vostre bienvoeillance et qui, voeille ou non, ou qu'il soit est a vous..." (LEFÈVRE (R.), Hist. Jason P., c.1460, 140). Car, en voz doloreux recors, Veult mon dolent cueur adeullé De doleur estre tout saoullé Et en doloreux reconfort Conforteray mon desconfort Don[t] je suis tant desconfortee (MICHEL, Myst. Pass. J., 1486, 298).

-

[Du visage] "Qui exprime de la douleur" : ...sa chiere devenir adoulee, Gresse et couleur en trois jours escoulee (CHART., D. Fort., 1412-1413, 183).

b)

"Marqué par une douleur physique, meurtri" : "...Car du grief mal que sans me sant bien saoulé." Adonques li vassal si s'en sont retorné, Et ont laissié Bruiant en son lit adolé, Et puis sont a Butor erranment retorné ; Si li ont le grief mal de Bruiant raconté. (Brun de la Mont. M., c.1350-1400, 80). ...sy luy donna tel cop au plus hault de son healme que tout estonné le porta ou milieu dez siens ; et ne sçavoit s'il estoit jour ou nuit tant fu adolé et mal atourné (Comte Artois S., c.1453-1467, 77).

2.

[De représentations mentales] "Qui est inspiré par la douleur" : ...comme (...) la memoire des choses passees, l'espoventement des disposicions presentes et l'orribleté des perilz advenir eussent reveillié tous mes douloureux regrés, mes adolees ymaginations (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 3).

B. -

Empl. subst.

1.

"Celui qui souffre moralement, personne frappée de douleur" : Par quoy, comme a ung adoulé ne siet de le ensievir en sa tristeur par mesmes le complaindre, ainsy, qui n'a mal aussy sy non par mol courage, on le doit renvoyer petit plaint, et par ainsy les dessus alleguez qui n'ont eu que mal de morsure non mortele et sont sanez et garis, toy aussy qui es morse, mais non a mort, tu en gariras comme eulx et seras mise en leur compte. (CHASTELL., Temple Boc. B., 1463-1464, 125).

-

Au plur. : ...duquel nombre des adoulées à ceste cause, redoubtée princesse, ma dame Marie de Berry, duchesse de Bourbon et d'Auvergne, tu n'as pas, dont il me poise, esté, ne n'es exempte ne exceptée (CHR. PIZ., Ep. de la prison de vie humaine, 1418. In : S. Solente, Bibl. Éc. Chartes 85, 1924, 282). ...source de confort et refuge des adolés. (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 89). Hee, benoitte Fortune, que tu disposes tez fais secretement ! (...) tu envoiez quant il te plaist en une heure plus de doulceur c'on ne pourroit en cent jours souffrir de doleur ; tu garis lez adolez et mesaisiez, tu fais lez poures enrichir, tu relieves les impotens, tu donne joye aux desconfortez, tu ez dame de tous lez biens mondains (Comte Artois S., c.1453-1467, 130).

2.

"Celui qui souffre physiquement, personne malade" : ...monseigneur le curé en pourpoint, qui bien contrefaisoit l'adolé... (C.N.N., c.1456-1467, 405). Ainsi parloit l'adollé, De mal et douleur foullé, Aux medicins qui estoient Autour du corps desollé, De parolles consollé, Mais remede n'y mettoient. (DU PRIER, Songe past. D.-M., c.1477-1508, 106).

VI. -

"Affliction" : ...a brief parler, Leur tourment et leur adouler Et regrais, que trouvay escrips, Me firent plourer (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 109).