C.N.R.S.
 
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     ACCUEIL     
FEW XXIV *accolligere
ACCUEIL, subst. masc.
[T-L : acueil ; GD : acueil ; GDC : acueil ; AND : acoil ; FEW XXIV, 79b : *accolligere ; TLF : I, 466 : accueil]

I. -

"Action d'accueillir, de recevoir"

A. -

"Action d'accueillir qqn"

 

1.

[Dans l'usage ordinaire]

 

a)

"Action, manière favorable ou non d'accueillir qqn" : Mais par Arragon passeray Ou grans Sarrazins trouveray. La trouveray je bel acueil, La trouveray feste sans dueil. Puys visiteray noble roy De Grenade puissant, ce croy (BOUVET, Appar. Meun A., 1398, 18). ...[ses chevaliers] com preux et sage, Par bel accueil les sçot avoir [Alixandres] (CHR. PIZ., M.F., IV, 1400-1403, 35). Puis la duchesse soubz gracïeulx acueil En son chasteau luy fist ung grant recueil. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 139).

 

-

Premier accueil. "Initiative d'une rencontre, d'une entrevue" : L'autre raison si est pour ce que, posons que subgiéz aient bonne voulenté vers prince et princepce, si n'auroient ilz jamais le hardement d'aler familierement vers eulz se ilz ne les mandoient, ne il n'apertendroit aussi. Si doit doncques venir le premier accueil du prince ou de la princepce (CHR. PIZ., Trois vertus W.H., c.1405, 71).

 

-

Au plur. "Démonstrations d'amitié à l'adresse d'un hôte, civilités" : Dont, après tous beaux acuelz et gracieulx parlers, lui demanda de son nom, de son estat et de ses affaires (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 93).

 

-

[En mauvaise part] : Il n'y ara ceens tourment Que nous ne li monstrons a l'ueil ; Ce sera le premier accueil Qu'ara de nous. (Mir. prev., 1352, 250). Je suy entre gent sans raison, Qui me font trespetit acueil (GARENC., Poésies N., 1389-1415, 91). La fault le grant chemin d'Orgueil. Grant Malice y a peu d'acueil (CHR. PIZ., M.F., I, 1400-1403, 127). Ja n'entrera [vostre dueil] dedens le sueil De mon penser, je le vous jure (...) Desconforté, la lerme a l'ueil, Ailleurs quiere son avanture, Plus ne vous mene vie dure ! Puisque mal vous fait son acueil, Vendez [autre part vostre dueil !] (CH. D'ORLÉANS, Rond. C., 1443-1460, 408).

 

b)

"Caractère d'une personne accueillante, faculté d'ouverture aux autres, sociabilité ; comportement, attitude manifestant ces qualités" : ...le conte d'Estampes, qui bel seigneur estoit, honourable, joyeux, bien parlant et bien festoiant, et de gracieux accueil à toute gent, aucunes foiz en certaines places et assietes representoit la personne du roy et moult estoit de bel parement à celle court. (CHR. PIZ., Faits meurs Ch. V, S., II, 1404, 87). ...de beauté, d'acueil et de prudence, De hault maintien et sage contenance, Remplie estoit par si grant habondance Qu'on n'en sauroit a la moitié parler. C'estoit des belles la fleur et l'excellence, Des desolez refuge et l'esperance (HAUTEV., Compl. H., c.1441-1447, 58).

 

-

Loc. adj. De bel accueil. "D'abord agréable, avenant" : PAULINE. Madame, merciés les dieux Qui nous ont ung fils envoiet, Net et propre de corps et d'ieux Sans rien avoir de desvoiet. FLOURETTE. Il est gent et bien adreciet, Doulz, riant et de bel acoeuil : Ce samble ung ymage dreciet, Tant est droit et plaisant à l'oeuil. (MOLINET, Myst. st Quentin C., c.1482, 10).

 

-

P. anal.

 

.

[D'une chose abstr. personnifiée] : ...esse ton vueil, Fortune, qu'aye douleur mainte ? De l'ueil me soubzris, mais c'est fainte, Et soubz decepte, doulx accueil.. (CH. D'ORLÉANS, Rond. C., 1443-1460, 414).

 

.

[D'une chose concr.] De bel accueil. "D'un aspect agréable" : La pomme d'or qui la tient a son voeul Resjoït l'oeul et coeur et pensement Et la grenade estant de bel accoeul Donne recoeul, de santé vif escoeul Et contre doeul grand esjoïssement (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 338).

 

-

P. méton. Bel accueil

 

.

"Personne accueillante, ouverte, sociable" : Chargiez vos yeulx de grosses larmes d'oeul, Menez grant doeul, barons et chevaliers ; Perdu avez vostre noble recoeul Et vostre escoeul et vostre bel acoeul ; Doulx sans orgoeul a tous ses familiers, Aux hostagiers, aux loingtains voyagiers, Aux estrangiers d'argent donna grans sommes : Cueur liberal plait a Dieu et aux hommes. (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 395).

 

.

"Visage souriant, sourire" : Viens, Neptunus, prince des mers sallees, Par gallees amaine larmes d'oeul, Venés, Nymphes, monstres hideux et fees Reschaufees, de pluye bien lavees, Par navees, arrivés a mon doeul ; Viens a mon soeul, Aurora, car je voeul Mon bel accoeul chargier de tes rousees : Plaindre et gemir sont toutes mes risees. (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 39).

 

2.

[Dans le lang. de l'amour courtois]

 

a)

"Traitement bienveillant accordé à la personne que l'on aime ou de qui on est aimé" : Se pour amour et fëaulté Je pers l'acueil qu'estranges ont, Doncq me vauldroit ma loyauté Moins qu'a ceulx qui viennent et vont Et qui de rien voustres ne sont ; Et sembleroit en vous perie Courtoisie qui vous semont Qu'amours soit par amours merie. (CHART., B. Dame, 1424, 345). ECHO. Il le me fault arraisonner Et atraire [Narcisse] par bel accueil, Pour veoir se le pourray tourner A moy aucun confort donner De la douleur que je recueil. (Narcissus, p.1426, 290). Plusieurs y treuvent chiere lie Maintesfoiz, et plaisans acueulx (CH. D'ORLÉANS, Rond. C., 1443-1460, 324).

 

b)

[D'une dame à l'égard de son amant] "Disposition favorable, bienveillante ; comportement, attitude manifestant cette disposition" : ...elle me fait desperer, Et s'est a tous de dous acueil Fors a moy qui pour li me dueil (MACH., D. verg., a.1340, 18). Et je qui fui boutez dedens le brueil Vi qu'a ce mot la dame au dous acueil Cheï com morte. (MACH., J. R. Beh., c.1340, 65). Pardonnés moi, pour Dieu, ma dame chiere, Se j'ai pensé [plus haut qu'a moi n'afiere] ; Car vostre aquoel et vo frisce maniere Et vo gent corps m'ont donné ce desir (FROISS., Rond. B., c.1365-1394, 72). Et quant il [li vrais amoureus] ra d'autre part cognissance, Et qu'il perçoit que sa dame honnourable, A doulç samblant et regart amiable, Et se le troeve aussi, quant il s'avance, De bel accoeil et de bele acointance (...) Il doit penser et croire, sans doubtance, Qu'amours y a grant part et grant puissance (FROISS., Orl., 1368, 94). Et vostre simple chiere Et vostre gracieus accueil Plein de plaisant maniere (MACH., Ch. bal., 1377, 581). Le dous attrait de son tres bel accueil Au commencier me volt tant enrichir Que j'estoie de tous biens en l'escueil, Et me tenoit en l'espoir de joïr. (MACH., L. dames, 1377, 69). Plaisant accueil et gracieus attrait Me font amer ma douce dame gente (MACH., L. dames, 1377, 114). Pour la plus belle et la meins fiere Que nulz amans puist regarder Et qui plus ha douce maniere Et bel accueil pour embraser Cuer d'amans et mettre en voie D'onneur. (MACH., L. dames, 1377, 124). Plaisant dame de noble accueil, Que nuls ne porroit trop loer, Plus loyaument que je ne sueil Vous vueil servir et honnourer (MACH., L. dames, 1377, 150). S'un jour Amours abandonnoye, Bien say q'un gracïeux acueil Me retrairoit par un doulx oeil ; Et puis je recommenceroye. (CHART., R. Bal., c.1410-1425, 378). Car je pense que ja n'aura povoir De se garder, mais changera vouloir Quant Plaisance lui monstrera a l'ueil Gente Beaulté plaine de doulx acueil, Jeune, sachant, et de maniere lye (CH. D'ORLÉANS, Ret. am. C., 1414, 4). Tu veuls Narcisus resembler Et, a la fontaine d'orgueul, Ainchois morir que t'assembler A femme par humain accueul. (MARTIN LE FRANC, Champion dames I-II, P., 1440-1442, 223).

 

-

P. allég. [Personnification d'une des qualités idéales que l'amant s'attend à trouver chez sa dame : présence accueillante, aptitude à répondre favorablement à son attente] Bel-Accueil : Et d'autre part Bel Acueil m'appelloit, Son Dous Regart riant m'asseüroit, Et Dous Espoirs doucement me disoit En loiauté Et m'affermoit qu'onques si grant biauté Ne pot estre, qu'il n'i eüst pité. (MACH., J. R. Beh., c.1340, 74). ...je trouvai la Biel Aquel Qui faisoit capiaus de flourettes, Et avoec lui deus pucelettes Qui servoient des fleurs quellier. (FROISS., Par. am., c.1361-1362, 76). Les aultres douse aussi, qui sont moult beles, Sont Doulç Samblant, Dous Regart et Jonece, Humilités, Bel Acueil et Lïece, Et d'autre part Delis et Seürtés, Amours, Venus et Franchise et Pités. (FROISS., Orl., 1368, 93). Ce portier fut appellé Compaignie Qui nous receu de maniere si lye. De nous party, a Amour s'en ala ; Briefment aprés devers nous retourna Et amena Bel Acueil et Plaisance, Qui de l'ostel avoient l'ordonnance. (CH. D'ORLÉANS, Ret. am. C., 1414, 5). ...avroient actente de voustre secours et que Bel Acueil et Doulx Actrait les remeissent sus (CHART., B. Dame, 1424, 361).

 

.

[Lorsque la dame dédaigne l'amant, ou que celui-ci est moins assidu, Bel-Accueil se présente sous un jour menaçant] : Detri d'ottri que moult compere, Bel Acueil qui de moy se vange Amour marrastre et nompas mere (...) M'ont ad ce mis que pour amer morray (MACH., Bal., 1377, 539). Retrait me suis de vie si peneuse, Comme lassé de la guerre amoureuse. Et non pourtant, j'ay esté advisé Que Bel Acueil a fait grant aliance Encontre moy, et qu'il est embuschié Pour me prendre, s'il peut, par decevance. (CH. D'ORLÉANS, Ball. C., c.1415-1457, 172).

 

-

P. méton. [Bel-Accueil désigne la femme aimée elle-même] : Tuit mi desir Sont et seront en servir Vo bel accueil, Chiere dame, et d'acomplir Vostre dous vueil. (MACH., Ch. bal., 1377, 599). Vostre bouche ce que plus veul Me reffuse, dont je recueil Plus de mal qu'on ne saroit lire, Et si ne sçay lequel eslire De tous ces deux [votre bouche ou votre oeil], mon doulx acueil : Qui est plus [cause de mon dueil ?] (Rond. poés. XVe s. R., c.1400-1500, 58). Prince invaincu qu'on ne poeult trop amer Ne reclamer, humble et sans point d'orgueul, Le gratieux, le tres doulx fruict d'amer Te fut amer, quand tu veys entasmer, Choir et pasmer, par mort, ton bel accoeul, Ton coeur, ton voeul, ton amoureux recoeul Et de ton oeul la pasture anoblie : Car qui bien sa dame aime, tard l'oublie. (MOLINET, Faictz Dictz D., 1467-1506, 172).

B. -

[Corresp. à accueillir I D 1] "Action d'accepter qqc., de se laisser entraîner à qqc." : ...les grans conquereurs en la grant gloire de leur victoire ont esté avillez et amendriz par acueil de voluptez (CHART., Q. inv., 1422, 15).

 

Rem. Cf., p. 14 : elles [les voluptez] vous perdent et si ne les voulez perdre (...) vous les entretenez et accueillez.

II. -

"Réduit, retraite" : Je n'ose pas passer le sueil Du premier huys de ma maison. Il y a un traistre garçon Qui me fait arragier de dueil. Il me ferme l'uis au courr(u)eil Et me laisse en une prison. Je ne puis avoir se mal non, Tant que je soye en cet aqueil. (GARENC., Poésies N., 1407, 91). O, mes enfans, ainsi par grant orgueil Vostre Suppin mectrez en son droit vueul, Et voz haynneulx chasserez en accueul, Loing de ressource. (MICHAULT, Doctr. temps prés. W., 1466, 72).

 

Rem. Pour le deuxième ex., cette déf. semble préférable à celle de l'éd., reprise par FEW : "situation".

III. -

[Corresp. à accueillir I B] "Action de rassembler et d'enlever les troupeaux de l'ennemi" : ...aprèz qu'il obtint la licence et ottroy du bon evesque, il delibera d'acoeullier aucun bestail estant à l'entour de Massefort et, de fait, mit sa deliberation à effect. Ceulx de Massefort, veans cest accoeul, widèrent de leur fort, environ .VIIc. hommes armés au cler de crevices, salades et picques, menans grant bruit et faisant mines de tout emporter devant eulx. (MOLINET, Chron. D.J., t.1, 1474-1506, 348).

IV. -

[Corresp. à accueillir I E 1] "Action de joindre, d'assembler deux éléments"

A. -

"Lien, noeud, boucle" (Éd.) : Or ça, lier par les costez A ceste estache ci vous vueil ; Et puis referay un acueil Par le col et par la poitrine (Mir. femme, 1368, 213).

B. -

Tout d'un accueil. "D'un seul tenant" (Éd.) : Telles berilles jamais n'as tu veu d'oeil, Car qui les a ne pourroit avoir dueil. Prudence est l'un qui est au coté destre, L'autre Justice a nom, dont ne me dueil : Cests deux tousdiz avec moy tenir sueil Qui enchassées en Force doibvent estre ; Temperance ne va pas a senestre Mais est le clou du meilleu qui congnoistre Faict les lunettes estre tout d'un acueil. [Il s'agit des deux verres d'une paire de lunettes, assemblés par un rivet central] (MESCHIN., Lun. princes M.-G., c.1461-1465, 29).
 

DMF 2020 - Synthèse Jean-Loup Ringenbach

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