C.N.R.S.
 
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     SOUVENIR1          SOUVENIR2     
FEW XII subvenire
SOUVENIR, verbe
[T-L : sovenir ; GDC : souvenir ; DÉCT : sovenir ; FEW XII, 376a : subvenire ; TLF : XV, 824a : souvenir1/souvenir2]

I. -

Empl. intrans. ou pronom. (Se) souvenir de qqn/ de qqc. "Avoir de nouveau présent à l'esprit, se souvenir de" : Ceste proprieté ou condicion a la magnanime selon la disposicion de ceste vertu et non pas selon son eleccion, car souvent recorder et souvenir de une chose la fait plus tenir en memoire. (ORESME, E.A.C., c.1370, 253). Et bien souvenoit le viel homme dessus dit de toutes ces coses (FROISS., Chron. L., III, c.1375-1400, 86). ...oncques ne feis le signe de la croix, mais souvenant du saint sacrement dessusdit, me suis hardyment defendu (C.N.N., c.1456-1467, 429). Or, bien, bien, je suis en vostre dangier, sire, et ne me puis encores venger. Mais ung jour viendra que je vous feray souvenir ! (C.N.N., c.1456-1467, 506). MATHATIEL. De ces trompeurs Crestiens a qui les cent escus Prestates. LE JUIF. Ne m'en souvenoit plus. (Mir. st Nic. juif, c.1480-1500, 105).

 

-

[En tournure injonctive ou optative] : Jhesus (...) quant tu tiendras a ta main Ton reaulme comme souverain, Veulhe toy de moy souvenir. [Parole du bon larron sur la croix (Luc 23, 42)] (Pass. Auv., 1477, 219). BOURREAU. (...) Mon amy, au temps advenir Ne pencez plus, mais du passé Veillez vous present souvenir, S'en bien vous l'avez compassé. Tantost vous serez trespassé Et ataché cy hault et court. (LA VIGNE, S.M., 1496, 319).

 

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(Se) souvenir que : ...vous me faictes souvenir que c'est la maniere des chevaliers d'en ce point faire adouber leurs dames. (C.N.N., c.1456-1467, 280).

 

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Faire souvenir qqn de qqc. "Rappeler qqc. à qqn" : "Ha ! par ma foy," dist la royne, "vous dictes tres bien : faites m'en souvenir quant le verrez." (LA SALE, J.S., 1456, 91).

 

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Estre souvenant de : De ce mot sui bien souvenant. (Mir. emper. Romme, 1369, 271).

 

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Estre souvenant + inf. "Garder en mémoire de" : Je ne suis point souvenant avoir leu ne oÿ parler que nul soit mort de male mort qui ait voulentiers acomplies les euvres de misericorde (LA SALE, J.S., 1456, 39).

II. -

Empl. impers.

A. -

(Il) souvient à qqn (de qqn/ de qqc.). "Revenir à la mémoire de qqn" : Si vous doit de moy souvenir, Quant vous pourrez regne tenir De royauté. (Mir. femme roy Port., c.1342, 176). Vous souvient il de la promesse Que vous fis pieça (...) ? (Mir. nonne, 1345, 345). LE SERGENT. (...) Ce que vous dites ne m'avint ; Ne du faire ne me souvint, Ne je ne quier. (Mir. enf. ress., 1353, 29). LA DAME. (...) La douleur, que sa mort sentir Me fait, m'est grief tourment et rage. Lasse ! Je muir ! Lasse ! J'enrage, Quant m'en souvient. (Mir. enf. ress., 1353, 37). LA DAME. (...) Mere Dieu, de moy vous souviengne ! Dame, trop sui desconfortee ! (Mir. enf. ress., 1353, 41). A Dieu en vueille souvenir, Amis, si com je le desir, Qui me doint faire son plaisir De bien en miex. (Mir. femme, 1368, 222). L'EMPERERIS. (...) Gardez que riens n'aiez laissé Ne retenu. LE FRÉRE. Voir, de riens ne m'a souvenu Que n'aie dit. (Mir. emper. Romme, 1369, 308). Car par l'odeur des sausses, il leur souvient des viandes. (ORESME, E.A.C., c.1370, 220). ...il m'est si mal advenu Que du jour ne m'est souvenu Que devoie au juif paier Son avoir (Mir. march. juif, c.1377, 202). ...il ne fina de embler par tout le pays où il a depuis esté, et que ad ce faire il commença à Thouleuse la Gaillarde, et que, depuis ce, il a tant fait de larrecins que il ne lui souvient et ne sauroit nombrer. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 252). ...li pria que ladite mousse, pour l'amour de lui, elle gardast, et laquelle mousse il disoit avoir prinse auprès d'une fontaine où une vierge avoit esté decolée, afin que toutes foiz que elle verroit icelle mousse, qu'il lui souvenist de lui. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 332). ...et plusieurs autres parolles distrent dont il ne lui souvient (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 24). Lors se confessa Gieffroy moult devotement de tout ce qu'il lui pot souvenir. (ARRAS, c.1392-1393, 275). Et celle chante tousjours si doulcement que c'estoit grant doulcour a l'ouïr. Elinas en fu tous abusez et si oubliez que il ne lui souvint de nulle chose fors de ce qu'il voit et oit, et demoura la en cel estat moult grant temps. Et lors vindrent deux de ses chiens courans qui lui saillirent contremont, lui faisant grant feste, et il tressault comme uns homs qui yst de son dormir, et lui souvint de sa chasse... (ARRAS, c.1392-1393, 6). ...bien leur sovint des Beaulz vacellages Que avez fais pluseurs fois en voiages (CHR. PIZ., Dit Poissy R., 1400, 184). Qant li rois d'Engleterre, ... entendi que chil de Gant avoient ocis Jaquemon d'Artevelle, ... il fu courouciés et sancmouçonnés oultre mesure. Et ... rentra en mer en maneçant grandement les Flamens. Et dist et jura que jamais il n'entenderoit a aultre cose, si lor averoit si remonstré acertes que il lor en souvenroit a tousjours mais (FROISS., Chron. D., p.1400, 640). Qant messires Ainmeris de Pavie oy parler de messire Joffroi et des François, se li revinrent toutes angousses au devant ; et li ala souvenir dou vendage que fait avoit dou chastiel de Calais, et les avoit decheus. Si ne sceut que dire (FROISS., Chron. D., p.1400, 893). Mais tout ades me souvenoit Du bon mot qui vault en tel cas, Car quant j'estoie en un fort pas Ou a passer je fusse rude, Disant : Vaille moy long estude ! (CHR. PIZ., Chem. estude P., 1402-1403, 60). Si leur souvient de ce que ont esté maintes fois deceuz (CHR. PIZ., Paix W., 1412-1413, 74). Par Dieu, dit elle, il ne me souvenoit de vous ne de vostre lemproye (C.N.N., c.1456-1467, 266). ...je l'ay mis en devise, s'il vous en soubvient. (C.N.N., c.1456-1467, 291). ...je tien veritablement qu'il [le diable] m'eust estranglé et devoré, se a ceste heure ne me fust souvenu de mon baptesme (C.N.N., c.1456-1467, 429). Mon deulh croistra de jour en jour, Tant que vivré. Cy tout entour, Sens soubjour, En deul ma vie useré, Quant me souvendra de l'atour De faulx tour Ou voustre corps avons trouvé. (Pass. Auv., 1477, 104). Quant a moy ne m'en puis garder, Quant il me souvient de Marie, Laquelle ay veu si tresmarrie Qu'en terre tumboit sans cesser. (Pass. Auv., 1477, 271). MATHATIEL. Mon maistre a payé son offrande [en prêtant cent écus au chrétien] : Je l'apperçoy ou il revient. Quant de ses escus me souvient, Je ne me puis tenir de rire. (Mir. st Nic. juif, c.1480-1500, 94). LE PRESTRE [au prévôt]. Dea, seigneur, il me souvient bien De ce juif et ce crestien ; Dessus l'autel sainct Nicolas Vindrent tous deux. (Mir. st Nic. juif, c.1480-1500, 131). EMPEREUR. (...) Vous promectez de jamais ne meffaire Encontre moy, durant le temps qui vient ; Si, se pendent, quelque chose m'avient, Vostre prouesse ne me sera celee Et de l'espee, tandis qu'il m'en souvient, Je vous donray devant tous la colee. (LA VIGNE, S.M., 1496, 173). ...et le duc de Bourbon s'en partit pour aller en son logis, puis appella ledit Voyau et luy demanda s'il luy souviendroit bien de ce que le duc de Bourgoigne luy avoit dit, et il respondit que ouy (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 154).

 

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(Il) souvient qqn (de qqn/ de qqc.) : Et à quelle fin, biau signeur, sejournons nous tant chi ?... Il ne souvient ore le roi ne ses oncles de nous. Faisons aucun exploit darmes (FROISS., Chron. R., XI, c.1375-1400, 91).

 

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Il souvient à qqn de + inf. : Je vous y mettray en tel tiltre Que vous devra bien souvenir De vous plus simplement tenir (Mir. abbeesse, 1340, 64). Mercy, dame, et ne vous ennuit S'il ne m'est si bien avenu Que de dire m'est souvenu Voz heures, si conme je sueil. (Mir. chan., c.1361, 166).

 

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Il souvient à qqn que : Si tost comme ilz seront mis oultre, vous partirez, je l'ay ainsi dit et ordonné, et il vous souviengne, Geronnet, que je vous fay bonne compaingnie. (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 201). ...il luy alla souvenir que folz, yvres et enfans ont de coustume de vray dire (C.N.N., c.1456-1467, 153). ...je ne sçay que vous avez fait ou songé, mais quant a moy il me souvient tres bien que aujourd'uy, au matin, vous feistes de tresbon appetit le jeu d'amours. (C.N.N., c.1456-1467, 266). Sy me souvient bien, Dieu mercis, Que je feiz a mon partement Certains laiz, l'an cinquante six, Qu'aucuns, sans mon consentement, Voulurent nommer testament (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 71).

 

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Il souvient à qqn + interr. indir. : Mais quant il lui souvint comment elle avoit fait le fort de Lusignen et chastel en si pou de temps, si ne s'en donna plus de merveille. (ARRAS, c.1392-1393, 78).

 

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Quand il m'en souvient./Si bien l'en souvient. "Si je me souviens bien, à ce qu'il me semble" : Je l'ay leu, se bien m'en souvient, En Aristote aucunesfois. (VILLON, Lais R.H., c.1456-1457, 29). LE PREVOST. Comment, dea, quant il m'en souvient, Ce juif si n'est point revenu Ne son homme ! Mal advenu Leur sera s'i faillent au jour. (Mir. st Nic. juif, c.1480-1500, 128).

 

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[En tournure injonctive ou optative] Souvienne vous de. "Souvenez-vous de" : Souvienne vous de la promesse, car nous sommes pleiges pour vous. (LA SALE, J.S., 1456, 10). O Dieu, souveigne toy de moy ! (Pass. Auv., 1477, 99). SECONDE PUCELLE. Et sur ce point par nous te sera mis Dessus le chief, ainsi qu'il est permis, Le chapellet comme le roy des dames. Et te souviengne de tous tes bons amys, Car de Jesus tu es en terre admys Pour estre dit seul empereur des armes. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 172).

 

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Empl. abs. Il souvient de. "Le souvenir de... se conserve" : Appellez Bon Temps et qu'il vienne Affin que de luy il souvienne. De le veoir icy je pretens. (Sots, c.1480-1500, 273).

 

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Il n'en souvient. "Le souvenir s'en perd" : Tant s'eslongne il qu'il n'en souvient (VILLON, Poèmes variés R.H., c.1456-1463, 52).

B. -

P. ext. "Venir à l'esprit de qqn"

 

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Il ne me/lui en souvient. "Cela ne me/lui vient pas à l'esprit, je n'en ai pas l'intention, il n'en a pas l'intention" : Sire, je suis cy revenu, Car il ne m'estoit souvenu De vous demander de l'argent... (C. Riffl., c.1480-1520, 61). MARC ANTHOINE. (...) Or viengne de ses papelars Cy hardyment une douzaine ! S'ilz eschappent male sepmaine, Oncques je ne fuz sy dolent. EMILÏUS. Venir ? Voire, ilz n'en ont talent ; Je croy qu'i ne leur en souvient. (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 765).

 

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P. métaph. [À propos d'une chose plus ou moins personnifiée] Il souvient à qqc. de : Touttez yauwez, flueve et fontaine, A la mer emplir mettent paine, Et de cesser ne leur souvient Tant que cascune en la mer vient (THOMAS MAILLET, Prov. Alain H., c.1375-1400, 68).

III. -

Inf. subst.

A. -

"Mémoire" : Fille, (...) De plourer ne me puis tenir, Quant il me vient en souvenir Du doulx parler qu'a touz faisoies... (Mir. st J. Paulu, c.1372, 137). Les ambassadeurs du duc de Bourgogne auprès du roi de France aians bien en leur souvenir leur recueil qui avoit esté estrange... (CHASTELL., Chron. IV, D., c.1461-1472, 152).

 

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P. personnif. : Saches qu'elles sont appellées Grace, Pitié et Esperance, Souvenir, Franchise, Attemprance. (MACH., D. verg., a.1340, 34). Et seur ce que Douce Pensée S'est dedens mon cuer enfermée, Souvenirs et Bonne Esperance Et Loiauté, ou ma fiance Ay si toute qu'ailleurs ne l'ay, Fis je ce dit qu'on claimme lay (MACH., R. Fort., c.1341, 16). Neis se d'amer se voloit repentir, Se ne poet il, car Souvenirs le point, Qui li remet sa besongne en bon point, Desir premiers, Beauté et puis Plaisance, Secondement Paour et Attemprance Et aussi Pourveance sans moiien Et Doulç Penser, qui li fait moult de bien (FROISS., Orl., 1368, 106). Car Souvenir en mon cuer fault, Plaisance acourt, Vouloirs m'assault. (Mir. emper. Romme, 1369, 254). Deux ruisseaulx d'amoureuse sourse, Penser et Souvenir, leur course Vers moy prenoient. (CHART., L. Dames, 1416, 243). Nommé suys Souvenir, avec Pensee aussi, Qui forgeons sans cesser, comme voyez icy, Fleurectes d'ancolies et soucïes tousjours Sur l'enclume de paine, de marteaulx de labours, Pour aux dolans amans qu'ont dame sans mercy Faire des chappelez avec fleurs de rebours. (RENÉ D'ANJOU, Cuer am. espris W., 1457, 176).

B. -

"Ce qui revient à la mémoire, image gardée en mémoire" : Se ne fust le doulx souvenir De la royne glorieuse, Morte fusse de mort honteuse (Mir. enf. diable, c.1339, 20). Or y a autres oiselès, Biaus, gais, jolis et gentelès, Qui n'ont pas en eaus hardement D'aler avant si baudement Vers l'alerion debonnaire, Quoy qu'il soit dous et debonnaire : Ce sont souvenirs et pensées, Plaisirs et joies tost passées (MACH., D. Aler., a.1349, 331). Cil souvenirs me ramentoit souvent Le dous viaire et la maniere coie Dont je ne puis attraire aligement. (MACH., L. dames, 1377, 58). Et tandis qu'il fu en ceste forest, eut maint souvenir de la belle (Jehan d'Avennes F., c.1465-1468, 78).

 

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[Mot de tendresse pour désigner la personne aimée] : LE VIELLARD [LE VILLAIN]. Belle soeur, à Dieu vous comant. Je m'an vois faire resjonnir. LA FEMME. Je prie à Dieu du firmament Que ce soit donc sans revenir. LE VILLAIN. à Dieu tout mon embrassement (,) D'amours [,] adieu mon souvenir (ARCEL., Vieill. C., c.1480-1520, 603). A Dieu vous dy, mon souvenir. (P. Jouh. D.R., a.1488, 33).

C. -

P. ext. "Impression, sentiment" : LE FRÉRE. Elas ! frére, j'ay grant doubtance D'avoir fortune si contraire C'on ne puist cette dame attraire A cy venir. L'EMPERÉRE. Or n'aiez plus tel souvenir, Qui ne vault preux. (Mir. emper. Romme, 1369, 299).
 

DMF 2020 - Synthèse Robert Martin

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