C.N.R.S.
 
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     RIRE1          RIRE2     
FEW X 395b ridere
RIRE, verbe
[T-L : rire ; GDC : rire1 ; DÉCT : rire ; FEW X, 395b : ridere ; TLF : XIV, 1165b : rire1]

Empl. intrans. ou pronom.

A. -

"Rire"

 

1.

Empl. intrans. : Je ne me puis tenir de rire Pour la coquardise de toy. (Mir. mère pape, c.1355, 393). Car aucuns qui les escoutent se delictent et rient quant ilz oient laides paroles et villainnes et les autres non, mais ont suspicion de mal sus ceulz qui les dient. (ORESME, E.A., c.1370, 271). À ce que je nommay Clayquin, le chevalier commença à rire et je luy demanday : "Sire, pourquoy riez-vous ?" - "Je le vous diray", dist-il, "pour tant que vous avez nommé Clayquin. Ce n'est pas le droit sournom d'eulx..." (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 8). "Ha ! cap de saint Anthoine", distrent-ilz entre eulx, "comment ceste ville de Clermont est bien prendable. Se nous y venons une nuit, nous l'airons, voires s'ilz ne font pas trop grand gait." - "Et puis", distrent-ilz tous en riant et en leur gascon, "nous le bargenons ; une autre fois nous l'accaterons. On ne puet pas bregaingnier ne accheter tout sur ung jour." (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 202). Or veez conment il euvre Doulcement, ma dame, la bouche En riant. (Mir. Clov., c.1381, 257). Comment, dist Remondin a l'ancien chevalier, que puet cecy estre ? Il me sembloit ores que je feusse bien prez de Lusegnen, mais il me semble que je y ay bien failly. Lors commence ly anciens chevaliers a rire. Comment, sire chevaliers, dist Remondin, vous vous truffez de moy ! (ARRAS, c.1392-1393, 77). Je sui Gieffroy au grant dent, et sui filz Remon de Lusegnen, qui te viens callengier les patiz des gens de monseigneur mon pere. Quant Gardon l'entendy, si commence de rire, et lui a dit : Par ma foy, folz, pour la grant haultesse et le grant hardement que tu as en toy et en ton cuer, j'ay pitié de toy. (ARRAS, c.1392-1393, 246). Mais pour neant [Remond] y pense [à Mélusine], car jamais il ne la rara, ne ne la verra en figure femmenine, combien que pluseurs lui ayent depuis veue. Sachiez que, non contretant que Remond eust esperance de la ravoir, si avoit il telle douleur au cuer que nulz ne le vous sauroit dire. Et ne fu puis homs qui le veist rire ne mener joye. (ARRAS, c.1392-1393, 262). Une fois l'amonnestera par devocion, autres foiz par pitié qu'il doit avoir d'elle, autres foiz en riant comme se elle se jouast. (CHR. PIZ., Trois vertus W.H., c.1405, 55). ...il compta son adventure a pluseurs gens de bien qui en risirent bien fort. (C.N.N., c.1456-1467, 119). Tous ceux qui oyrent ceste response commencerent a rire de grand cueur (C.N.N., c.1456-1467, 326).

 

-

Tout en riant : Lors le prent par la main et le tyre fort et ferme en disant : Sire vassaulx, dormez vous ? Et Remondin [fremist] tout ainsi comme uns homs qui s'esveille en seursault, et met main a l'espee, comme cil qui cuidoit que les gens du conte lui venissent courir sus. Et quant la dame l'appercoit, si scot bien qu'il ne l'avoit pas encores apperceue, et lui dist tout en riant : Sire vassaulx, a qui voulez vous commencier la bataille ? Voz ennemis ne sont pas cy present. Beau sire, je suis de vostre partie. (ARRAS, c.1392-1393, 24).

 

-

Faire rire : L'autre [maniere] est pour souslacier et faire rire ceuls aveques qui l'en converse. (ORESME, E.A.C., c.1370, 390).

 

-

Rire de qqc. : Moy, dist le druceman, a l'eure et au jour que je l'approucheray [Geoffroy au grant dent], que je puisse, qu'il n'ait une grosse riviere ou les tours et les murs de Damas ou de quelque autre lieu fort, me puist Mahon confondre ! Et lors se prist chascun a rire de ce mot. Mais telz s'en rist qui puis ce en eust plouré s'il eust peu. (ARRAS, c.1392-1393, 224). ...leur demanda, aprés ce que les tables furent levees, que le petit Saintré leur avoit dit de quoy elles rioient tant. (LA SALE, J.S., 1456, 11).

 

-

Rire dessous son chaperon. "Rire sous cape"

 

Rem. Tristan Nant. S., c.1350, 13090.

 

-

[P. oppos. à pleurer] : LA MARQUISE [à ses enfants]. Ha ! mes doulz enfans, ne puis rire, Mais de joye pleure et souspir, Car tant ay joye que souffrir Ne me puis de vous faire feste. (Gris., 1395, 95).

 

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[Dans un passage où est tournée en dérision la versatilité de la jeunesse] : Jamais jeunesse n'est bien seure ; Maintenant rit, maintenant pleure, Maintenant jure, Puis se repent d'avoir juré. (Pass. Auv., 1477, 117).

 

-

Rire du bout du dent. "Rire d'un rire mauvais" : Mon faus visage sai mectre [dit Trahison], Et moi tresbien entremectre De la boiste et de l'oignement, Et de rire du bout du dent (GUILL. DIGULL., Livre pèler. vie hum. E.M., 1355, 746). ROILLART. Il rit. DENTART. Voire du bout du dent : Tel risee est d'un antenois [de quelqu'un de stupide] (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 270).

 

-

[P. litote] N'avoir cause de rire. "Se trouver dans une situation très désagréable" : ...Seigneurs, que plus ici ne demeurons, Alons crucifier le larrons, Faison qu'i n'a cause de rire ; Maintenent le debvons octire. (Pass. Autun Biard F., 1470-1471, 106).

 

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N'avoir talent de rire : ...un chevalier tous forcenez (...) y survint a tout un pou de gent et crie : Lusignen ! et n'est nul qui a lui se puist tenir. Veez le la ou il se combat a voz gens, et s'est feru ou havre emmy les plus druz, et quanqu'il attaint est destruit et mis a fin. Quant le soudant l'entendy, si n'ot talent de rire, mais dist : Par Mahon, on m'a dit de pieca que j'auroye, moy et pluseurs autres de nostre loy, moult a faire par les hoirs de Lusegnen. (ARRAS, c.1392-1393, 220).

 

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P. iron. [Dans la bouche d'un bourreau s'apprêtant à supplicier un condamné] Garder qqn de rire. "Empêcher qqn de rire" : Tres voulentiers, Et bien le gardarey de rire. Et ung et deux ! Ton cas s'empire ! Et trois et quatre ! Est il mort ? (Pass. Auv., 1477, 229).

 

2.

Empl. pronom. Se rire. "Rire" : L'ABBEESSE. (...) De quoy fut ce que vous riés Entre vous deux et chuchetiés ? (Mir. abbeesse, 1340, 64). Lors de la grant joye qu'il avoit d'estre eschappé, peu a peu sa promesse oblia, fors de tant que quant il veoit Madame et ses autres femmes il fuioit, dont elles se rioient par grant delit. (LA SALE, J.S., 1456, 11).

B. -

P. ext.

 

1.

"Se moquer, railler"

 

-

Rire après qqn : Madame (...) vist d'aventure devant elles le petit Saintré, et vist aussi comment elles rioient aprés lui (LA SALE, J.S., 1456, 11).

 

2.

"Se réjouir, sourire" : Traittiez doulcement et saigement et le ramenez à voye de raison ; et lui dictes que le roy et moy et biau frere de Bourgoingne ne luy voulons que tout bien et toute amour, et là où il vouldra demourer dalez nous, il nous trouvera toudis appareilliet. Et aussy de ces chastiaulx qu'i tient du connestable, remonstrez luy doulcement et en riant que à petite ocquoison il les a saisis et que il luy plaise à rendre, se fera grandement son honneur, et que le roy l'en donra et rendra des aussy biaulx et aussy bons comme sont ceulz-cy, en quel lieu qu'il les vouldra choisir en son royaulme. (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 232). LE LADRE. (...) Las, rirai ge D'avoir cliquecte ne barry ? Mal suis nourry, Dont pas ne ry, Ains suis marry De dire : arry ! (LA VIGNE, S.M., 1496, 463).

 

-

Rire à qqn. "Sourire à qqn, lui manifester son plaisir" : Mes je les dechuc par leur rire. (FROISS., Pris. am. F., 1372-1373, 76). Egar ! ces enfans ci me font Feste et me rient par accort. (Mir. roy Thierry, c.1374, 263). ...je seray bien hors du sens, Se fas mal a ces ynocens Qui me rient et belle chiére Me font. (Mir. roy Thierry, c.1374, 313).

 

-

Rire aux anges

 

Rem. HAUTEV., Conf. Test. am. tresp. B., c.1441-1447, 894.

 

-

Se rire de qqc. "Se réjouir de qqc." : DEUXIESME DYABLE. Hahay ! hahay ! que je me ri De ce que l'as si bien trouvée ! (Mir. emp. Julien, 1351, 184). LE CAPITAYNE. De mon espee qui a plaisance taille, Si quelque sot en mes mains s'entretaille, Je suis bien seur qu'il ne s'en rira pas. (LA VIGNE, S.M., 1496, 229).

 

-

C'est pour rire. "C'est réjouissant" : Allons le dont mener, de tire, Devers messeigneurs les bourgeois ; Que s'il est vray, c'est bien pour rire Et prouffit pour tous les François. (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 192).

 

-

Le coeur me rit. "J'éprouve une grande joie" : Trestout le cueur me rit de joie, Je pense selon ma raisom Qu'il est dedans ceste maisom ; Entrons i(l), que le cueur m'y tire. (Pass. Semur D.M., c.1420 [1488], 87).

 

3.

"Plaisanter, s'amuser"

 

-

Se rire. "Plaisanter" : Si vouldra qu'elles s'esbatent a jeux honnestes, et non telz que hommes s'en puissent moquier ne tenir leurs paroles, si que font voulentiers de femmes, quoy que ilz se rient et jeuent avecques elles (CHR. PIZ., Trois vertus W.H., c.1405, 72).

 

-

(Se) rire de qqc. "S'amuser de qqc., en plaisanter" : Moy, dist le druceman, a l'eure et au jour que je l'approucheray [Geoffroy au grant dent], que je puisse, qu'il n'ait une grosse riviere ou les tours et les murs de Damas ou de quelque autre lieu fort, me puist Mahon confondre ! Et lors se prist chascun a rire de ce mot. Mais telz s'en rist qui puis ce en eust plouré s'il eust peu. (ARRAS, c.1392-1393, 224). ...li abbés de Crespin, ... porta les desfiances a Paris au roi. Li rois Phelippes n'en fist que rire et dist que son cousin estoit uns fols et que il avoit marceandé d'ardoir et essillier son pais. (FROISS., Chron. D., p.1400, 356). Si viseta li rois d'Escoce son pais, et mena ces chevaliers et ces esquiers de France partout avoecques lui, pour euls monstrer le roiaulme d'Escoce. Si veoient un povre pais raempli de bois et de bruieres ; si s'en truffoient et rioient li un a l'autre, et disoient : "Il ne puet estre riches homs qui est sires d'un tel pais." (FROISS., Chron. D., p.1400, 563). Il n'y aroit plus de quoy rire (CHART., L. Dames, 1416, 204). ...tant bien le baptise que tous ceulx de la chambre et luy avec s'en rioient bien fort. (C.N.N., c.1456-1467, 26).

 

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"Ne pas prendre qqc. au sérieux" : Et presentement je [Geoffroy] te deffie de Dieu, mon Createur. Quant le jayant l'ouy, si ne s'en fait que rire et dist : Fol, se vient a la bataille, tu ne pourras endurer un de mes coups sans voler par terre. (ARRAS, c.1392-1393, 246). Si delibera de descouvrir l'embusche a son maistre, qui n'en fist que rire, car assez s'en doubtoit (C.N.N., c.1456-1467, 454).

 

-

C'est pour rire. "C'est pour plaisanter" : Le jeune cuyde avoir sapience, Tant plus est fol et plus s'empire. C'est pour rire ; Car tant plus en conseil s'avance. (Pass. Auv., 1477, 118).

 

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Ce n'est pas pour rire : Toutesfois ce n'est pas pour rire Comment on nous maine a l'abloy (Feste roys, c.1475-1500, 307).

 

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Sans rire. "Toute plaisanterie à part" : GUILLEMETTE. En ung tel or villain brutier Oncq lart es pois ne cheut si bien. Avoy ! dea, il ne faisoit rien Aux dimenches ! PATHELIN. Pour Dieu, sans rire ! S'il venoit, il pourroit trop nuyre ; Je m' en tiens fort qu'il reviendra. (Path. D., c.1456-1469, 118).

C. -

Au fig. [D'une chose] Rire à qqn. "Être favorable à qqn" : ...l'en repute au jour d'ui avugles, boiteux et foibles ceulz a qui le monde ne rit onques (FOUL., Policrat. B., V, 1372, 445). ...et craincte qui nourrist Les repugnans si bien que paix nous rist Es environs (SAINT-GELAIS, Séj. honn. D., c.1490-1495, 344).

 

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Empl. abs. "Être agréable, chatoyant" : Et certes, combien que pierres precieuses si flamboient et que l'or resplendisse et que le monde si rie en toutes delectacions... (FOUL., Policrat. B., V, 1372, 380).
 

DMF 2020 - MAJ 2020 Robert Martin

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