A. -

"Mort, mortalité, destruction" : ...Ung yver est froit et pluieux, Ly aultre est moins anuieux, Mortoires de bestes communes Et grant naissance de aucunes (Renart contref. R.L., t.2, 1328-1342, 131). ...et au retour du roy, il et se gent eurent grant pestilence de maladie et moult de grant mortoire, et plus sour les josnes que sour les vieuls. (Hist. chron. Flandres K., t.1, c.1342-1383, 150). Dieus monstre se courouc partout appiertement Par wières, par mortoires, par tempiès vraiement (GILLES LE MUISIT, Poésies K., t.2, c.1347-1353, 157). Il [Dieu] l'a monstret [qu'il est en colère] par wières, par fautes, par tempiestes, Par mortoires de gens et mortoires de biestes. (GILLES LE MUISIT, Poésies K., t.2, c.1347-1353, 273). "Oncles," dist li dansiaus, "vous savés bien comment Vous estes maintenus moult desguiséëment Envers les enfans Rose, la royne au corps gent ; Le gerre et le débat et le défiëment, Le mortoire qui est dessus le bonne gent Venue tout par vous, du droit commencement..." (Baud. Sebourc B., t.2, c.1350, 349). ...On voit croistre erreur et doleurs, On voit guerre, mortoire et doubte, On voit tout et on ne voit goute. (Recueil galant. V.-B., c.1350-1400, 78). [Barbaquant, un vieux roi païen, regarde le ciel pour voir l'avenir] Mais quant che sort faly, il vit a l'autre lés Estoilles de mortoires et de mortalités Dessus les Sarrasins et vit que la cités Seroit a cest enfant avant qu'il fust finés Et que les hoirs de droit en seront hors boutés (Ami et Amile en alexandrins, c.1400-1500. In : T. Matsumura, R. Ling. rom. 56, 1992, 481). Mortalitas (...) : mortalités, mortoire (LE VER, Dict. M.E., c.1420-1440, 311).

B. -

En partic.

1.

"Maladie épidémique" : ...et là luy vindrent nouvelles que toutte l'armée des Anglois et Portingalois estoit retraitte et passée, et que messire Jehan de Hollande estoit en Navairre, lequel en ramenoit la greingneur partie de leurs gens, et que entre les Anglois avoit eu très grant desconfiture de mortoire, et que son cousin le duc de Lancastre gisoit moult deshaittiez en la ville de Compostelle, et ja courroit renommée en pluseurs lieux qu'il estoit mort. (FROISS., Chron. L., III, c.1375-1400, 121). "Une pestillence de mortoere très grande et très espoentable se bouta en son host." (FROISS., Chron. M., XII, c.1375-1400, 267). "Le roy de Castille (...) levé s'estoit du siege de Luscebonne par l'incidence de la pestillence et du mortoiere qui fu entre ses gens..." (FROISS., Chron. M., XII, c.1375-1400, 278). ...uns si grans mortoires se bouta en l'ost que des cinc en moroient les troix. (FROISS., Chron. R., IX, c.1375-1400, 69). Item, l'an VII^c IIII^xx et VII fist une grant galée ["gelée"] qui durat bien III mois sens relaier, si vient à point à peuple, car il fist le mortoir estanchier. (JEAN D'OUTREM., Myr. histors B.B., t.2, a.1400, 526). Sire, che dist Andas, vous ovreis follement, De teil forche saveis vo chasteal qui resplent, Qu'il ne seroit par forche pris, se enchantement, U famine, u mortoir n'y mettoit son consent. (JEAN D'OUTREM., Geste Liège B.B., t.2, a.1400, 722). Lues (...) : tache, soullure ou pestilence, mortoire, espedimie, boche (LE VER, Dict. M.E., c.1420-1440, 284). Morticinus (...) : che qui est mort par morille, par mortoire, par maladie (LE VER, Dict. M.E., c.1420-1440, 311).

Rem. FROISS. (éd. Kervyn) ds GD V, 419a-b.

2.

"Massacre" : ...La doulce riviere, c'on clamoit autrement, Fut appellee Marne par Marfuné le gent, Que l'yaue fist sanglante par mortoire de gent. (Lohier Malart M., c.1325-1350, 486). La peuÿssiés veïr tel mortoire aparant Que du sanc qui aloit des Sarrasins coulant, Entrent jusqu'aux chevilles cil qui furent vivant. (Tristan Nant. S., c.1350, 476). La firent tel mortoire de ches païens puans Qu'il n'est nulz hons ou monde, s'il les fu perchevans, Que d'iaux a regarder ne li muast li sans (Renaut Mont. B.N. V., c.1350-1400, 888).