C.N.R.S.
 
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     DÉTRAIRE     
FEW XIII-2 trahere
DETRAIRE, verbe
[T-L : detraire ; GD : detraire ; AND : detrere ; DÉCT : detraire ; FEW XIII-2, 178a : trahere]

I. -

[Préf. de- à valeur intensive]

A. -

"Étirer, distendre, déchirer" : "Comment as non ?" dis jë a li. - "Detraction, dist elle, qui Detrai a mes dens et charpis La gent pour faire coulëis A ma mere qui'est malade. Pour humer comme potage..." (GUILL. DIGULL., Pèler. vie hum. S., c.1330-1331, 267). Vous cardinal, sans demourer, Levez sus, honmaige me faites, Ou vos chars en seront detraites. (Jour Jug. R., c.1380-1400, 237). J'ay souffert mes membres detraire De grans clox et parfons fichéz, Percer mes deux mains et mes piéz, Mon chef d'espines couronner, Mon corps tout de sang randonner, Mes nerfz tendre de la pesance Et mon corps percer de la lance (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 1078).

 

-

Detraire qqn (à chevaux). "Écarteler" : Et quant li amis vit s'amie Par sa gengle morte et perie, S'il s'ocist, il fist son devoir, Qu'autre mort deüst recevoir, N'il ne fist fors meins que justice, S'il s'ocist pour punir son vice ; Qu'avoir le deüssent detrait Chevaus enragiez pour ce trait. (MACH., J. R. Nav., 1349, 238). Et se par ung peu ne fut, je vous feisse escarteller ou a chevaulx detraire. (Nouvelles inéd. L., p.1452, 4). On te deust a chevaulx detraire, Lapider, brusler ou deffaire (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 465).

 

Rem. Guill. Orange T.H.G., p.1450, gloss. . Percef. I, R., c.1450 [c.1340], gloss. ; Cligès C.T., 1455, gloss. ; Jourd. Blaye alex. M., a.1455, gloss.

 

-

"Cribler de flèches"

 

Rem. Guill. Orange T.H.G., p.1450, gloss.

B. -

"Malmener, tourmenter" : Comment mettre a la mort le vuelent, Com le diffament, com l'abaient, Poingnent, espient et detraient, Comment il ne s'ose vangier, Comment il vit en tel dangier Qu'il li couvient feindre estre amis A ses plus mortels anemis... (MACH., D. Lyon, 1342, 178). ...toutes foiz qu'il m'encontroit, De mes oultrages me monstroit Le meschief qu'en pouoie avoir : Mais pas ne le tenoie a voir, Ains voulsisse c'on l'eust detrait (Mir. parr., 1356, 32). Ainsi Amours, mon cuer et Loyauté, Plaisant Attrait, Dous Accueil et Biauté Aveuc mes yex ont mon dolereus corps Destruit, detrait, hay et despité Et de tous maus martyré sans pité, Si qu'assés miex me vausist entre [estre ?] mort. (MACH., Les lays, 1377, 305). Helas ! si m'ont fait einsi Pour ma mort attraire, Com cil qui son anemi Meinne noier com amy, Les bras au col ; et tray M'ont par tel affaire. Car regars, pour moy detraire, En riant m'asseüroit Et merci me promettoit, Et samblans d'attraire Ma grant paour estraingnoit Et hardement me donnoit, (MACH., Motés, 1377, 507). Saches, si tu fais le contraire, Je te feray trés cruelment detraire. (MACH., Prol., c.1377, 4). Avarice ne s'i oublie pas, qui trayne et detrait ceste povre parrochienne, nostre ame, par mer, par terre, per feu, par pierres, par tous perilz de mort. (GERS., Purif., 1396-1397, 65).

 

Rem. GRÉBAN, Pass. J., c.1450, gloss.

C. -

Au fig. "Provoquer une très vive souffrance morale à, faire souffrir" : Ne la bele que j'aim tant et desir Ne scet quant prist mon cuer par son viaire, Ne ne sara par moy ; j'aim mieus morir. Car il n'est riens qui tant me puist detraire Com le refus dou haut don de merci (MACH., L. dames, 1377, 17). Nompourquant le plaisant attrait, Qui m'art, qui m'esprent, qui m'attrait, Qui tant me nuist, grieve et detrait Et nulle fois ne s'en retrait, Est grant cause de mon contraire (MACH., Les lays, 1377, 304). Si ne sçay, s'Amours m'essaie, Qui tant me grieve et esmaie, Ou s'il li plaist que je traie Toudis mal qui me detraie. (MACH., Les lays, 1377, 319).

 

-

"Calomnier, diffamer, médire" : Et, pour verité, l'estat de chevalerie ne puet ne ne doit plus croitre ne estre essaucé pour mal dire et detraire dez ministres de Sainte Eglise (Songe verg. S., t.1, 1378, 14). Tout ainsi se doivent amer et porter l'une l'autre comme suers, dames et femmes de court, non mie tencier ensemble es chambres des dames ne detraire en derriere come feroient harengieres, car telz choses sont trop malseans a court de princepce et ne le devroit on souffrir. (CHR. PIZ., Trois vertus W.H., c.1405, 147). ...pour oïr, enquerir, sercher et oriller s'ilz trouveront ou sauront aucuns murmurans, detraihens, disans ou faisans aucunes choses qui puissent estre cause de la turbation de ladicte paix (BAYE, II, 1411-1417, 154). Et doivent lesdis bourgeoys, marchans et laboureurs estre obéissans à leurs seigneurs, tant spirituelz que temporelz. (...) Et ne doivent les dessus diz detraire ne murmurer contre leurs seigneurs souverains et ne doivent voulloir entreprendre sur eux. (BUEIL, II, 1461-1466, 78).

 

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Detraire de qqc. : Il commencierent a detraire Des miracles que veoient faire Par Dieu et par sa bele mere. (Mir. N.D. Rosarius K., c.1330, 8). [aussi v.20]

 

-

Detraire à qqn. "S'opposer à qqn, mépriser qqn" : ...les grans clers ne doivent mie despiter ne detraire aux moins souffisans (JEAN GOLEIN, Rational B.D., c.1370-1372, 668). Ceulx qui retribuent maulx pour biens detrayoient a moy pour ce que je ensuivoie bonté. (CHR. PIZ., Psaumes allég. R., 1409, 103).

II. -

[Préf. de-/des- à valeur d'éloignement]

A. -

"Détourner qqn (du bien)" : Faulx ennemy, bien m'as detrait, Quant a pechié m'as ainsi trait (Mir. st J. Paulu, c.1372, 116).

 

-

"Tirer qqn (hors de)" : Helas ! pour quoy m'as tu trait Le dur trait, Pour moy tuer et occire ? Pour quoy m'a reffus destrait Ou atrait M'avoit Amours [éd. "Faire souffrir, martyriser"] (Narcissus, p.1426, 301).

 

-

Detraire de. "Arracher de, détourner de" : ...l'ennemi especial Qui par ses faulz biens nous detrait, Et par ses delis nous retrait De l'amour du regne celeste (LE FÈVRE, Respit Mort H., 1376-1380, 96).

B. -

"Retirer, enlever qqc." : ...sera chargié un de noz amis de char à lour accoistre et parfaire sur notre dite terre là où nous vouldron, si ils en avoient mains que lour droit, et aussi à lour deteire et amenuyser s'ils en avoint plus que ils ne deivent avoir (Cartul. Laval B., t.2, 1334, 185). Et que le aer et l'eaue aient pesanteur en leur region il appert, car pour ce que quant l'en detrait ou soustrait les corps qui sont sous eulz, il descendent en bas, ce est a savoir le aer en la region de l'eaue et l'eaue en la region de la terre. (ORESME, C.M., c.1377, 702).

 

-

Empl. abs. : Toutes lesquelles choses dessus nommées, à crois et à descrois, puent valoir par an quarante livres ou environ, et lesquelles je advoue à tenir de mondit tres redoubté seigneur en foy, hommaige et ressort, mouvans de sondit chastel de Rethest, et fais protestation que se en ce present denommement je mettoie peu ou trop, que il ne me tourne à prejudice et que je y puisse adjouster ou detraire, se mestier est. (Trés. Reth. S.L., t.2, 1400, 480). El scet les gens bel actraire, Sans retraire Ne detraire, Car a nully n'est contraire, Ains plaisant et sans faintises. (CHART., L. Plais., c.1412, 150). ...en le exortant qu'il die la verité et qu'il ne charge ne descharge personne pour quelque occasion que ce soit, si non ainsi que la verité est ; et que s'il a respondu plus ou moins, qu'il detraye ou adjouste en ses responses, ainsi qu'il luy semblera estre vray. (ESCOUCHY, Chron. B., t.3, Pièces justif., 1448, 312).
 

DMF 2020 - Synthèse Robert Martin

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