C.N.R.S.
 
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     DÉPARTIE     
FEW VII partire
DEPARTIE, subst. fém.
[T-L : departie ; GD : departie ; AND : departie1 ; FEW VII, 685a : partire ; TLF : VI, 1136a : départie]

A. -

[Idée de fractionnement, de division ; correspond à departir I]

 

1.

"Division"

 

-

Au fig. "Distinction" : Guillaume, le musage Avez bien paié ci endroit, Par dehors la voie de droit, Au mains en aucune partie. S'en vorray faire departie, C'est assavoir, devision Par voie de distinction Des choses qui ne font a croire Et d'aucunes qui la victoire Puelent avoir d'estre creües... (MACH., J. R. Nav., 1349, 216).

 

2.

"Partage"

 

-

Sans (faire) departie. "Sans partage" : Car cils l'amera loiaument Et se la croira fermement Sans erreur et sans nulle doubte, Car il cuidera s'amour toute Avoir acquis toute sa vie, Sans jamais faire departie. (MACH., J. R. Nav., 1349, 171). Qu'adès croistera l'ardour Qui sejour Fait en moy sans departie... (MACH., Ch. bal., 1377, 608). ...sy m'en doy tenir Pour heüreuse et maintenir Que puisque j'ay bonne partie En Amours et sans departie Je le doy loyaulment amer De tout mon cueur (Livre amour. all. F., c.1398-1430, 63). Puis qu'Espoir s'est de moy party Pour plus ne tenir ma partie, Dueil et Soucy, sans departie, Desormais tendront mon party. (Au grey d'amours F.-H., c.1400-1500, 255). Quant on a son cuer bien assis En bonne et loyale partie, Il doit estre entier et rassis A tousjours mais sans departie. Si tost qu'amours est mypartie, Tout le hault plaisir en est hors ; Si ne sera par moy partie, Tant que l'ame me bate ou corps. (CHART., B. Dame, 1424, 353). Du monde la riche partie Est vostre [à Dioclétien] et a voz sourvenanz, Car vous estes sans departie Roy des rois, regnant des regnans. (MOLINET, Myst. st Quentin C., c.1482, 13).

B. -

[Idée d'attribution (d'une chose divisée en parts) ; correspond à départir II] : Dieu grant solas en fit a l'homme [de la femme], Au premier qui manga la pomme, Quant luy bailla par compagnie. Estrange n'est la departie : Toute chose tent a sa fin Pour quoy est faicte jusques a fin Que deffaillir il peut Nature (GARIN, Compl., 1460, 119).

 

-

[En compl. d'objet interne] : Vierge, com doulce departie Dieu scet de ses biens departir ! (Mir. enf. diable, c.1339, 41).

 

-

Faire sa/ses departie(s) (de qqc.). "Répartir qqc. (entre des personnes)" : Et de tous les biens qu'Amours donne, Plaisance les lieus en ordonne, Tant qu'il sont net et affranchi Et des dons d'Amours enrichi. Et en faisant sa departie Affranchist chascune partie, Premiers ceuls de qui li dons viennent, Puis ceuls qui riches en deviennent. (MACH., D. Aler., a.1349, 324). La tient elle [Bonneürté] honneur en ses mains. A l'un plus et a l'autre meins En fait ses larges departies ; S'en donne les plus grans parties A ceuls qui tiennent mieus l'adresse Ou Bonneürtez les adresse. (MACH., J. R. Nav., 1349, 272).

C. -

[Idée de séparation spatiale ou de rupture dans le temps ; correspond à departir III]

 

1.

"Séparation, départ"

 

a)

[À propos d'une pers.] : Certes, il le faudroit partir, Se de li se vëoit partir, Car autre nulle en li ne part Fors celle qui en tous biens part. Pour ce n'en quier faire partie, Car trop seroit grief departie De ma trés douce dame chiere... (MACH., D. verg., a.1340, 54). ...j'aim tant vostre compaignie Que dure m'iert la departie (MACH., F. am., c.1361, 241). Il les ouvri [les lettres] et prist à lire, Et puis commensa à sousrire, Et dist qu'il ne li en chaloit Se plus servir ne le voloit, Et qu'aussi ne le vuet il mie : Si que bonne est la departie ; Mais ce forment li desplaisoit Que rudement li escrivoit Et qu'il li disoit villenie, Ce que faire ne deüst mie. (MACH., P. Alex., p.1369, 231). BLANCHEFLOUR. (...) A Dieu, chier sire ! LE ROY. Dame, je ne vous say que dire : Vostre departie me griéve Tant qu'avis m'est le cuer me créve (Mir. Berthe, c.1373, 225). Remondin print congié du roy et des barons, et mercia moult le roy de la bonne justice que il lui avoit faicte en sa court, et se party moult honnourablement d'eulx tous. Et sachiez que le roy et pluseurs des barons furent doulens de sa departie. (ARRAS, c.1392-1393, 68). Sa departie fu si brieve Qu'on ne sçot onques qu'il devint. (CHR. PIZ., M.F., IV, 1400-1403, 44). Or est vérité qu'en ce temps, Charles, roy de France, partant de Paris acompaigné des roys de Cécile et de Navarre, de la Royne, sa femme (...) fut conduit et mené en la cité de Tours en Touraine, pour là faire sa demeure et sa résidence. Laquelle départie despleut moult aux bourgois et habitans de Paris et en furent fort troublez et esmeuz, et tant qu'ilz tendirent leurs chaynes. (MONSTRELET, Chron. D.-A., t.1, c.1425-1440, 390). Quant vins a congié demander, Trop mal me fist la departie Et ne cessoye de pleurer. (CH. D'ORLÉANS, Songe compl. C., 1437, 114). Adont s'entracollerent les deux amans et se commencerent a mener grant duel. Pour ce qu'il convenoit que la departie se feist, la pucelle lui dist... (Percef. III, R., t.1, c.1450 [c.1340], 121). Longuement parlerent ensemble de ceste departie que trop seroit longue a racompter. A la fin, après plusieurs parolles, pleurs et regretz, prinrent congié les ungs des aultres. (Jehan de Paris W., 1494-1495, 93). Et ainsi partit de la ville, comme bien conseillé, o l'aide dudit Paul Orsin, qui fut une piteuse departie pour luy, car en puissance et en biens il avoit esté esgal aux grans princes, et luy et ses predecesseurs, depuis Cosme, qui fut le chief. (COMM., III, 1495-1498, 63). Et devez savoir que alors que le duc de Berry se partit de Poictiers, le roy estoit allé en pelerinage à Nostre-Dame du Pont en Lymosin, et avoit laissé à Poictiers sondit frere Mons. de Berry. Et, quant le roy sceut la departie de sondit frere, il en fut merveilleusement marry, et tost après sceut la conspiration que les seigneurs de son royaulme avoient faicte contre luy, lesqueulx s'en estoient tous retournés en leurs païs pour faire leur amast et tachoient de attraire à eulx tous les autres seigneurs du royaulme. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 164).

 

-

Prov. Il n'est si grieve departie que celle d'ami et d'amie : Car il n'est, pour voir l'affie, Nulle si grief departie, Com c'est d'ami et d'amie. (MACH., Motés, 1377, 488).

 

-

Faire (la) departie de qqn. "Se séparer de qqn, quitter qqn" : Quant de ce point ci les remort, S'en metteront il a la mort ? Je di qu'il feroient folie ; Mais facent d'elles departie, Plus qu'il puelent, courtoisement. (MACH., D. Aler., a.1349, 389). La rentra Honoree qui estoit courroucie Qu'i lui convint de Guy fere la departie (Tristan Nant. S., c.1350, 101). Ha, Fortune, c'est tout party Qu'il [Espoir] a fait de moy departye, Dont tel doulleur m'est departie Qu'a peu que mon cueur n'est party. (Au grey d'amours F.-H., c.1400-1500, 255). Serviteur plus de vous, Merancolie, Je ne seray, car trop fort y traveille. Se de vous puis faire la departie, Et il seurvient quelque estrange merveille, Legierement passera par l'oreille ! (CH. D'ORLÉANS, Rond. C., 1443-1460, 446).

 

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[D'une chose] "S'éloigner de qqn, abandonner qqn" : Mais honneur, chevalerie Et tes renons qui s'espart Par le monde en mainte part Ont fait de nous departie. (MACH., L. plour, 1349, 291).

 

-

[D'une personnif.] Faire (la) departie de personnes. "Séparer (des personnes)" : ...et [Raymond et Mélusine] s'entrebaisent, et orent entre eulx deux si tres grande douleur qu'ilz cheirent eulx deux pasmez sur l'aire de la chambre. Et qui lors veist dames, damoiselles, chevaliers et escuiers plourer et mener douleur, et disoient tous de commun : Faulse fortune, comment es tu si faulse et si perverse que de faire la departie de ces deux loyaulx amans ? (ARRAS, c.1392-1393, 257). Et quant ly hons avec ce la voit telle qu'il la juge a ly propice et convenable, adonc est ce sa rose especial, a laquelle il se arreste et y met sy son cuer aucunesfoiz et s'amour et s'entente, et elle aussi par avanture en ly, qu'il n'est riens en ce monde, fors la mort seulement qui en peust la departie faire. (EVR. CONTY, Eschez amour. mor. G.-T.R., c.1400, 580). LA MORT. Jeune femme, entendez à my, Laissiez vous fault joie mondaine, Car de vous et de vostre amy Feray departie soudaine. (Ex. 1468. In : F.- Ed. Schneegans, Romania 46, 1920, 568).

 

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"Départ en voyage, déplacement" : Madame, quand eust oÿes ces parolles, tresgrandement se couroussa et ne le voult plus approuchier, puis lui dist : "Avez vous levee emprinse et departie ça et la, sans mon sceu et congié ? Jamais tant que je vive de bon cuer ne vous ameray." (LA SALE, J.S., 1456, 233).

 

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En partic. "Mort" : Je meurs a juste jugement : J'ay tres bien la mort desservie. Pour moy, Jhesus, doulx fruit de vie, Qui ton paradis me prometz, A ceste dure departie, Mon ame en ta garde commetz. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 354). Et quant venra la departie, Qu'il faura a Dieu l'ame rendre, Et le corps retourner en cendre, Puissiens avoir remission, Par la vostre intercession (Prières saints R., t.2, 1400-1500, 463).

 

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La derraine departie : A la desrainne departie Mon esprit voeulliés recepvoir (Prières saints R., t.2, 1400-1500, 333).

 

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Faire departie de ce siecle : Aprés a moult bonne esperance Fist de ce secle departie. (Tomb. Chartr. Trois contes S., c.1337-1339, 99).

 

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[De plusieurs pers.] Faire departie. "Se séparer (et partir chacun de son côté)" : JOSEPH (à Marie) ...Nous ferons icy departie : Vous en yrez d'une partie Et je yray d'autre part sçavoir. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 125).

 

-

Faire departie d'un lieu : Et se la guerre est faillie Departie Fay tost de cellui païs (Cent ball. R., c.1388-1396, 25). Atant ont tous les oust de là fait departie (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 492). Mes amis, faisons departie D'icy et faisons nostre allee Oultre la mer de Gallilee (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 169). A ta requeste si sera entendu Ains que d'icy je face departie, Car du manteau qu'est sur moy estendu Tu en auras la plus grande partie. (LA VIGNE, S.M., 1496, 197).

 

b)

[À propos d'une troupe] "Dispersion, débandade" : Car quant les anemis voient ainsi la dite proie et le gaing derriere demourer, et que cil qui la mainent ne vont pas bien ordeneement, et voient la fole et vile departie, desconvenable et mal ordenee, il s'enforcent et s'estudient a faire leur domage (VIGNAY, Théod. Paléol. K., c.1333-1350, 77).

 

c)

[À propos d'une chose] Faire departie. "Sortir, ici s'écouler, jaillir" : Celle verge de char poissant et pure Fu jusqu'a mort ploiée en la croiz dure, Dont rouge mer de sanc fist despartie (Mir. st J. Paulu, c.1372, 150).

 

2.

P. ext. "Fin, issue (de qqc.)" : Diex nous doint a la departie [du combat] L'onneur avoir. (Mir. Rob. Dyable, c.1375, 55). Et atant se taist l'ystoire a parler d'eulx, et parole de Remondin et de sa femme, comment ilz firent aprez la departie de la feste. (ARRAS, c.1392-1393, 45). Ainsi comme je vous racompte s'aprivoiserent les deux amans de tant parfaitte amour que oncques depuis n'en fut departie. (Percef. III, R., t.1, c.1450 [c.1340], 115).

 

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Faire departie à qqc. "Mettre fin à qqc." : Quant tu verras faire folie, Se n'y puis mettre departie, Senz arrester t'en dois saillir. Cilz qu'est present a l'estoutie, L'on presume senz garantie Qu'il l'a voulu ou consentir. (DUPIN, Mélanc. L., c.1324-1340, 188).

 

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"Rupture (de qqc.)" : Et se celui qui reçoit ne retribue semblablement, l'autre le complaindra et l'acusera comme celui qui est cause de la dissolucion ou departie de tele amistié. (ORESME, E.A., c.1370, 447).

 

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[D'une chose] Faire departie. "Cesser, prendre fin" : Et aussy fera departie Guerre d'entre eulx, je l'adevine ; Et puis Paix par grace divine Avecques les bons adherens Sera entre amis et parens (TAILLEV., Moral. D., 1435, 94).

 

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Faire departie de + inf. "Cesser de" : Helas, humblement vous requier Que je l'aye de ma partie [mon enfant] Et ja n'en face departie de le baisier et acoller tant que mon cueur se puist saouller (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 361).
 

DMF 2020 - Synthèse Pierre Cromer

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