I. -

Empl. subst.

A. -

[Titre nobiliaire]

1.

[Terme générique s'appliquant à un membre de la noblesse et recouvrant des réalités assez diverses (selon l'époque et la région)]

a)

[Dans les textes à caractère épique] "Membre de l'aristocratie militaire et vassalique"

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Baron/ber : Ung jour estoit li rois sur son destrier gascon, S'estoit aléz voler et o luy si baron. (Flor. Rome W., c.1330-1400, 138). Cent et quatorze contes erent pour voir sui homme, Deux dan et quatre bers et III delphin par somme (Gir. Ross. H., c.1334, 115). ...Oncles fut a Ernault, filz Garin le baron (Hern. Beaul. D.B., c.1350-1400, 21). Seigneurs, or faites pais, chevaliers et barons (...) Et prelas et bourgois, gens de religions, Dammes et dammoiseles et petiz enfansons, Clers et lais, toutes gens vivans fois et raisons (Renaut Mont. B.N. V., c.1350-1400, 199). Lendemain se leva, n'y fist ariestison ; Et se fist convoyer de maint noble baron. (God. Bouillon R., t.2, c.1356, 11). La receust Galien hommaige et feaulté De trestous les barons qui sont ens ou regné (Galien D.B., c.1400-1500, 120).

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En appos. le baron/le ber : Li hostes est venu a l'escuier coston Maistre Ernault le nobile baron. (Hern. Beaul. D.B., c.1350-1400, 5). Des .IIIJ. filz Aymon je vous voudray conter, (...) Si comme il guerrioyerent Charlemainne le ber (Renaut Mont. B.N. V., c.1350-1400, 199). Tant furent ly enfant doctriné et apris, Que Godefroy, ly bers, ot XV ans acomplis. (God. Bouillon R., t.2, c.1356, 4-5). Ainsy Huez ly bers à son oncle disoit. Ly bourgois souffisant doucement en rioit (Hugues Capet L., c.1358, 24). Et Hulin souspira pour Malabron li ber (Huon Bordeaux B., c.1400-1450, 7).

b)

"Membre de la haute noblesse d'un pays, d'une région ; vassal direct qui accompagne son suzerain à la guerre et vit à la cour" : Et tant fist le conseil que les barons du pays furent mandez a un certain jour pour faire hommage a leur jeune seigneur et relever leurs terres et leurs fiefz. (ARRAS, c.1392-1393, 29). Par ma foy, beaulx freres, premierement je rens graces a Dieu, a vous et au roy qui cy est, et a tous les barons de cest pays de ceste haulte honneur (ARRAS, c.1392-1393, 190). Maiz ses barons tant l'ennorterent [le marquis] Par leur senz qu'a ce l'amenerent Qu'il s'accorda a femme avoir (Gris., 1395, 4). Et se n'i avoit prince ne baron tant fust grans sires ne proçains de linages au duc de Normendie, qui osast parler dou deslogier (FROISS., Chron. D., p.1400, 671). Cedit jour, est venus ceans le duc de Bourgoigne, conte de Flandres, accompaignié de pluseurs barons et seigneurs (BAYE, I, 1400-1410, 202).

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Barons de France. "Ensemble des vassaux du roi qui l'accompagnent à la guerre ; membres de la noblesse française" : Li homs del monde qui plus aida le roi Phelippe a parvenir a la couronne de France et a l' iretage, ce fu messires Robers d' Artois qui estoit li uns des plus haus barons de France et le mieuls enlinagiés et estrais et descendus des roiauls (FROISS., Chron. D., p.1400, 196). Par l'acort des barons de France la garnie Fu li dus poursiévis à grant chevallerie (Geste ducs Bourg. K., c.1410-1419, 309). Quant la nouvelle fut a la court de l'empereur que dix barons de France venoient et portoient emprise d'armes, le bruit a qui les delivreroit fut grant. (LA SALE, J.S., 1456, 264). Luy regardant que nul ne venoit, a haulte voiz commence crier : "Roy de Paris, cohart sans hardiesse, envoye jouster contre moy aulcuns de tes barons de France, des plus fors et les plus hardis, comme Roland, Olivier, Tierry ou Ogier de Dannoys, et je te jure mon dieu Mahon que je ne feray reffuz jusques a six ou sept qu'ilz ne soyent par moy soustenuz. (BAGNYON, Hist. Charlem. K., c.1465-1470, 29). Et nonobstant Roland jura que jamais ne tourneroit jusques les barons de France seroient deslivrez de la main de leurs ennemys (BAGNYON, Hist. Charlem. K., c.1465-1470, 67).

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[Pour désigner un dignitaire de l'Église] : O vous, mes barons de l'Eglise, Qui monumens de foy tenez, En deliberation apprise Gouvernez et entretenez, Vous pry que les contenez. (RIVIÈRE, Nef folz D., 1497, 633).

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[Souvent précédé de haut grand] : Et le landemain, par matin, ouïrent messe, puis s'en vont armer. Et le roy et les haulx barons furent sur haulx eschaffaulx montez environ les lices. Et furent les gardes du champ establies bien et deuement, et les chayeres assises, et le soleil party a droit. (ARRAS, c.1392-1393, 61). ...il avoit esté à Vennes au parlement qui y fu, aveucques le seigneur d'Ansenis, ung sien cousin et ung grant barron de Bretaigne. (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 4). Tuit a lui se venoient rendre Les haulx barons, et les clefs tendre De leurs citez (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 216). ...chils rois d'Engleterre (...) avoit dalés lui un chevalier, grant baron en Engleterre et rice honme et son cousin, lequel on nonmoit messire Hue le Espensier. (FROISS., Chron. D., p.1400, 47).

2.

[Dans une énumération de titres nobiliaires classés selon leur importance, baron vient après duc, comte, vicomte et avant chevalier] : Avoecques le roy et son jone fil monsigneur Phelippe, eut pris dix sept contes, sans les barons, les chevaliers et les escuiers. (FROISS., Chron. L., V, c.1375-1400, 60). .De ducs, de contes, de barons, de clercs, de bourgois et de lais (DESCH., M.M., c.1385-1403, 292). ...presens à ce la royne de France, le duc de Bourgoigne (...) et pluiseurs autres ducs, contes, barons, chevaliers, nobles dames et damoiselles (FAUQ., I, 1417-1420, 367). Semblablement des princes temporelz, comme messrs, les duc d'Alencon, contes de Harcourt, d'Aumarle (...) avec plusieurs barons, chevaliers et escuiers (JUV. URS., Loquar, 1440, 423). ...ducz, contes et barons. (LA VIGNE, V.N., p.1495, 182).

Rem. Sur les cond. requises pour qu'un baron devienne comte, Cf. LA SALE, Salade, c. 1442-1444, 232-233.

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[Le terme de baron peut être accompagné du nom d'un fief, mais c'est très rare] : ...il segnefiierent lor venue (...) au maire et a la ville de Londres, au conte de Warvich, au baron de Stanfort, au signeur de Briane, au signeur de Manne, au signeur de Persi et a tous les barons, sus laquelle seureté il estoient venu en Engleterre. (FROISS., Chron. D., p.1400, 79). En celle anee avoit il fait et creé son cousin le conte Derbi, duch de Lancastre, et le baron de Stanfort, conte de Stanfort. (FROISS., Chron. D., p.1400, 880).

Rem. Le prince, le duc, le comte, le vicomte tiennent une principauté, un duché, un comté, une vicomté alors que le baron a très rarement un titre précis. Cf. Ph. Contamine, Guerre, État et société à la fin du Moy. Âge, 1972, 13.

3.

P. anal. [Sert à désigner des personnages importants de l'antiquité] : ...de tant de barons rommainz n'y ot il onques nul qui a Athenez, qui lors estoit une cité brisee et despeciee par les armes macedoniennes, osast mot dire contre Alixandre (BERS., I, 9, c.1354-1359, 18.7, 33). Cil Ulixes fu au siege de Troye X ans sans revenir, dont sa femme que nommé t'ay, qui trop belle estoit, fu par maintes fois requise et assaillie en pluseurs manierez des haulz barons de Grece. (THOM. SALUCES, Chev. errant W., 1394, 694). Thelamon Ayaulx, un baron De Grece, cil qui environ Les murs o son host fu cachié, Si com le palais a cerché, La fille au roy, qui moult fu belle, O mainte autre noble pucelle, Y trouva, dont il moult s'esjoye (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 52).

4.

P. ext.

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"Personnage important" : Revestés ung buisson D'honnourable parure, Il samblera barron. (Prov. rimes F.M., c.1485-1490, 62).

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"Maître de maison, seigneur"

.

Prov. Au seneschal de la maison peut on connoistre le baron : Il se dit en proverbe : Au seneschal de la maison peut on connoistre le baron. (MÉZIÈRES, Songe vieil pèl. C., t.2, c.1386-1389, 420).

B. -

P. ext. [Pour désigner un saint] : ...par la foy que doy saint Denis le baron, Je ne m'en partiray par nulle entencïon (Gir. Vienne D.B., c.1350-1400, 205). Or eurent-ilz affection et devotion d'aler en pelerinage au baron Saint Jaques, puisque ilz estoient venus ou pays, car les aucuns le devoient de devotion. (FROISS., Chron. M., XII, c.1375-1400, 302). Tandis c'onquez le conte d'Artois sejournoit en Parpingnan (...) passa par Parpingnan ung gentil homme de Picardie qui venoit de Saint Jaque le Baron (Comte Artois S., c.1453-1467, 47). Barons du ciel, assistans tresdiscretz Qui congnoissez les celestes secretz (Cene dieux, c.1492, 120).

C. -

"Mari" : Et les dames visiter vont [les frères prêcheurs] Que n'ont ne seigneur ne baron (DUPIN, Mélanc. L., c.1324-1340, 61). Adont vint a la bielle o coer avizion Que l'un de ces deus la aroit elle a baron (Flor. Rome W., c.1330-1400, 157). ...elle voulsist bien avoir a baron Le conte de Vïenne (...) Mais Girart par orgueil n'y ot pocessïon (Gir. Vienne D.B., c.1350-1400, 127). Je sui Regnault vous fieulx de droite estracion, Mais je croy bien qu'ayés oü plus d'un baron, Car le duc de Dordonne m'a apellé coitron. (Renaut Mont. B.N. V., c.1350-1400, 242). Là-endroit fu Flourie qui n'avoit se duel non De çou qu'avoir devoit Maradot à baron (God. Bouillon R., t.2, c.1356, 412). En ce pays nul ne peut dire: "C'est ma femme" ne nulle femme ne peut dire : "Cil est mon baron." (MANDEVILLE, Voy. L., p.1360, 330). Aussis semblablement occit Tresdeloyaument son baron Clithemestra Agamenon, Qui dix ans au siege de Troye Fut (DESCH., M.M., c.1385-1403, 85). Marcia, la fille Cathon, Puis qu'elle ot perdu son baron Et elle fut admonestée D'autre fois estre mariée Comme fille de jeune eage (DESCH., M.M., c.1385-1403, 178). ...ce duc Phelipe (...) Ot trois fieus et trois filles dont cascune ot baron. (Geste ducs Bourg. K., c.1410-1419, 267). Car toute femme par raison Doit reverence a son baron. (Mandel. T., c.1450-1475, 188). Se femme voeult certainement savoir se son baron se double, si advise se une plaine lune se passe sans elle approchier ; s'elle y a souspechon, ce n'est point sans cause. (Ev. Quen., II, c.1466-1474, 121).

-

Avoir baron à part. "Avoir un amant" : Jennes filles a marier aveuc jennes hommes ne autrement, jamaiz ne doivent mengier a le cacelouce ; car pour vray et par coustume, souvent advient que femmes en ont barron a part. Et ainsi en pourroit advenir aux hommes. (Ev. Quen., II, c.1466-1474, 120).

D. -

MAR. "Cordage employé pour gouverner le timon" : ...une corde pour ses barons pour tous ses gouvernaux appelee hoste de poupe. (Clos galées Rouen M.-C., t.2, 1359, 148).

Rem. Cf. FENNIS, Gal. , I, 254 qui signale que FEW XV-1., 71, n. 20 abandonne (à tort) l'étymon baro I, 254b pour *barra I, 255.

II. -

Adj.

A. -

[D'une pers.] "Valeureux" : Dont dient par la sale : "Cis estera moult ber ; S'est sage chevaliers moult puet longes durer." (Garin Lorr. M., c.1330-1400, 485). "Amis," se dist Girart, qui moult eust le cuer ber (Hern. Beaul. D.B., c.1350-1400, 9). Bien deux mille Lombars fist chieux dus apriester (...) pour grever le duc de Bourgongne au cuer ber (Geste ducs Bourg. K., c.1410-1419, 284).

B. -

[D'une chose] "Remarquable ; important" : Quant orent deviset assez à leur plaisance, Ly bourgois s'en allerent, en moult ber ordonnance (Hugues Capet L., c.1358, 39). Nous sommes trois contre ung, c'est avantage ber. (Cip. Vignevaux W., p.1400, 153).

REM. Seule la forme ber, anc. cas sujet, survivance ds les textes épiques, connaît l'empl. adj.