C.N.R.S.
 
http://www.atilf.fr/dmf/definition/bailler1 
StructureSans exempleCompletFormesExemples
FamilleTextesSourcesImpressionAide à la lecture
     BAILLER1          BAILLER2     
FEW I bajulare
BAILLER, verbe
[T-L : baillier ; GD : baillier1 ; GDC : baillier ; AND : bailler ; DÉCT : baillier ; FEW I, 206a : bajulare ; TLF : IV, 34b : bailler]

I. -

Empl. trans. [Sens vieillis et rares]

A. -

"Prendre en main"

 

1.

"Saisir, attraper qqn" : Encore me vuelt ochire, se il me puet balhier (JEAN D'OUTREM., Geste Liège B.B., t.5, a.1400, 690).

 

2.

"Prendre qqc." : "Prenez [la patène], je ne prendray pas, dame. - Si ferez, prenez, douce amie. - Certes, je ne le prandray mie ; L'en me tendroit pour une sote. - Baillez, damoiselle Marote. - Non feray, Jhesuscrist m'en gart !" (DESCH., M.M., c.1385-1403, 110).

 

-

"Prendre (un médicament)" : ...il me feront boire tisaine ; A grant poine vivrai quinzaine. Et quant plus ne pourai baillier, Adonc me feront il baillier Aucun sumptueux lectuaire Qui nul bien ne me poura faire. (LE FÈVRE, Respit Mort H., 1376-1380, 22).

B. -

"Diriger, gouverner"

 

1.

Empl. abs. "Exercer la fonction de bailli" : Six manieres sont de baillis, Dont l'un est baillis bailliens, Qui se fait craindre a ses subgis Et redoubter de pluseurs gens, Qui prant qu'i puet puis hors, puis ens (...) Autre bailli y a qui baille, Afin que son fait soit porté : Chascuns pour avoir se travaille. (DESCH., Oeuvres R., t.8, c.1370-1407, 206).

 

2.

"Avoir en sa baillie, gouverner qqn/qqc." : A Dieu se commanda, qui tout a à baillier (Baud. Sebourc B., t.1, c.1350, 212). La premiere citeit que porai(t) gaingnier Vous ferai(t) chaistellain, si que l'arez a baillier. (Lion Bourges K.P.F., c.1350, 476).

 

-

En partic. "Avoir à son service (des amoureux)" : "Dame", dist Aiglentine, "par Dieu le droiturier, Je ne l'aimeray ja ; n'ay pas ceur lozenger D'avoir a une fois deux amans a bailler." (Tristan Nant. S., c.1350, 140).

 

3.

"Prendre qqc." : Abuz gouverne hault et bas ; Abuz donne, ne baille riens (Abuzé D., c.1450-1470, 88).

 

4.

"Conduire, diriger" : Le roy Gaufroit s'en alat aux noiches de son nepveur, et, au revenir, luy prinst ung vent sur mere que ["qui"] le b(a)alhay tant par mere qu'il l'at geteit a Bolongne. (JEAN D'OUTREM., Myr. histors G., a.1400, 20).

C. -

[D'une chose personnifiée] "Traiter qqn (de telle ou telle manière)" (synon. baillir) : Ceste mort qui nous fu moult dure, Passames nous en la saison. Encor aloie en la maison Ou ma dame avoit son retour. G'i fis mainte voie et maint tour, Maint aler et tamainte faille, Ensi qu'Amours ses servans baille. (FROISS., Espin. amour. F., c.1369, 150).

 

-

Bien baillé. "Bien loti" : Diray de l'autre enfant qui molt fu eslongnés (...) Et ot a on Florent, beau fu et bien ballés (Flor. Octav. L., t.1, c.1356, 42).

 

-

Bien baillé à + inf. "Bien pourvu pour, capable de" : Nous cuide tu faire nuysance ? Par Dieu, tu y es bien baillé. (Sav. serg. D.L., c.1480-1490, 34).

II. -

Empl. trans. [Sens général de "donner"]

A. -

Bailler qqc. (à qqn)

 

1.

[Une chose concr.]

 

a)

[Qu'on peut mettre entre les mains de qqn]

 

-

"Donner, remettre (un objet, de l'argent, une chose quelconque)" : Demande li cui il bailla La clef que sa femme et s'amie Li bailla (Mir. femme roy Port., c.1342, 196). Dit Jhesu Crist que ung pere ne bailleroit jamais a son enfant, qui demanderoit a mengier, ung serpent en lieu de pain (GERS., Purif., 1396-1397, 59). Et a maistre Robert Valee, Povre clergon en Parlement Qui n'entent ne mont ne valee, J'ordonne principalement Qu'on luy baille legierement Mes brayes, estans aux Trumillieres, Pour coyffer plus honnestement S'amye Jehanne de Millieres. (VILLON, Lais R.H., c.1456-1457, 17). ...avant que oncques elle le voulsist guider par la chambre de son maistre en la sienne, il bailla tous les dix escuz contens. (C.N.N., c.1456-1467, 122). Ledit duc de Bourgongne luy bailla d'entrée quarante mil ducatz pour aller faire en Italie quatre cens lances qu'il payoit par sa main. (COMM., II, 1489-1491, 136).

 

.

Bailler en change. "Donner en échange" : Item, vueil que le jeune Marle Desormaiz gouverne mon change, Car de changer enviz me mesle, Pourveu que tousjours baille en change, Soit a privé ou a estrange, Pour troys escus six brectes targes, Pour deux angelotz ung grant ange, Car amans doivent estre larges. (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 104).

 

-

"Présenter, remettre (une lettre, un message)" : Le hyrault dessus nommé bailla au connestable le sauf conduit (FROISS., Chron. M., XIV, c.1375-1400, 103). Atant este vous venu le nepveu du cappitaine, qui bailla a son oncle la lettre que le roy lui avoit bailliee. (ARRAS, c.1392-1393, 98). Et avoech les dons on bailla les lettres toutes seelees dou seel dou roi, qui tesmongnoient et certefioient ces dons. (FROISS., Chron. D., p.1400, 105). A tout ce s'acorda assés li contes Derbi et escripsi lettres, qui devoient venir au roi, et les bailla a messire Gautier de Manni, liquels s'en carga de la porter. (FROISS., Chron. D., p.1400, 755). Le roy envoya tantost querre ung de ses secretaires et lui bailla les lectres, lesquelles il leut de mot à mot (Cleriadus Z., c.1440-1444, 557). A ces paroles, le roy bailla le brief a sa fille, qui contenoit les termes qui s'ensieuvent : "Se tu aymes ta vie et adventurer te voeulz a conquerre le mouton au veaurre doré, il est de necessité que tu ayes les habis que Appollo avoit vestus a l'heure que cest escrit luy fu baillié..." (LEFÈVRE (R.), Hist. Jason P., c.1460, 188). Il bailla ses lettres de creance (COMM., II, 1489-1491, 177).

 

.

"Délivrer (un document officiel)" : ...duquel examen et confession il bailla copie (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 54). Et ledit capitaine lui promist baillier, et de fait bailla un sauf conduit, lequel il print et accepta (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 123). En ladicte année (...) le roy bailla lettres de commission à maistre Jehan Avin (ROYE, Chron. scand., II, 1460-1483, 96).

 

b)

Bailler un lieu, un territoire, un domaine

 

-

"Donner, octroyer" : ...et lui donna et bailla le chastel de Pompet, en Viene, et un aultre lieu appellé Cheneaulx, et aussi le aagea, et supplea toutes choses, qui par enfance de aage pourroient donner empeschement pour ses graces et gouvernement obtenir au dit dauphin (CHR. PIZ., Faits meurs Ch. V, S., II, 1404, 130). ...après que le roy ot baillé ladicte duchié de Normendie audit monseigneur Charles, il fut après contraint de recompenser tous lesdiz princes et seigneurs (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 121). ...le duc d'Alençon, pour bien le remunerer de toutes ses graces et biensfaiz, bailla ou offrit bailler toutes ses villes et pays ausdiz Bretons et à monseigneur Charles (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 189). Comment le roy partit de Lieige pour s'en retourner en France et de l'appoinctement qui fut fait derechef par le roy avec monsr Charles de France, son frère, auquel il bailla la duché de Guyenne en partaige (COMM., I, 1489-1491, 168). Les deulx rois qui s'estoient fait batiser de l'ille de Fortauenture vindrent vers led. sr de Bethencourt, et pareillement led. seigneur leur bailla lyeu et plasse, ainsi que aucunement le requeroient et leur bailla ... chacun quatre chens acres que bois que terre (BÉTHENCOURT, Canarien G., c.1490, 178).

 

-

"Livrer, abandonner (à la suite d'une défaite)" : Le roy de France et le regent Durent renuncier au proufit Du roy anglois, par leur escript, Et des ses hoirs, et leur bailler, Sanz mal engin, comme heritier, Lez diz lieux (DESCH., M.M., c.1385-1403, 385). Predist aussi l'occision du duc de Bourgoigne à Montereau, qui fut cause que son filz bailla Paris aux Anglois (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 153 r°).

 

-

"Offrir (un gîte)" : Et lors furent ses chevaulx logiez, et leur bailla on belle chambre et bonne pour lui et pour ses gens (ARRAS, c.1392-1393, 272).

 

-

Bailler en garde un objet, un domaine.... "Confier aux bons soins de qqn" : ...un clerc (...) ballia à lui qui parle, en garde, un sac longuet (...) ouquel sac il avoit pluseurs choses (Conf. Jug. Parlem. Paris L.L., 1337, 134). Ensi eut li contes de Montfort le chastiel de Brest, et le rafresci de nouvelles gens et de pourveances, et le bailla en garde et sus son honnour un gentil honme des siens, ouquel il avoit bonne fiance. (FROISS., Chron. D., p.1400, 472). ...bien se comfioit li rois en li, qant il li bailloit en garde le jeuiel ou monde a ce jour que il amoit le mieuls : c'estoit la ville et le castiel de Calais (FROISS., Chron. D., p.1400, 856). ...et ne sçay ou temps advenir comment ilz rendront bon compte de ce qui leur est baillé en garde et gouvernement. (JUV. URS., Nescio, 1445, 509).

 

c)

"Asséner (un coup)" : Il y avoit un sien cousin Que bien congnoissent Sarrasin Aus grans cops qu'il leur donne et baille de son espée qui bien taille (MACH., P. Alex., p.1369, 144). Christofle Guillier me servoit Trestout au long de ce voyage, Mais son mantel vestu avoit De quoy depuis le tins a sage, Car baillé luy fut sur la naige Tel coup, certes, d'une guisarme, Le mantel luy fist advantage, Du corps luy fust partie l'ame (RÉGN., F.A., 1432-c.1465, 8). ...et Soulcy s'en vint a lui, le glaive abessé, les grans galopz du cheval, qui du pont estoit bien duit. Et quant le Cuer le vit, s'adreça a lui et lui bailla si grant coup sur l'escu qu'il plessa son glaive, car bien vit que par la le convenoit passer. (RENÉ D'ANJOU, Cuer am. espris W., 1457, 51). ...ce galant se despita si terriblement qu'i lui vint incontinent bailler deux grans souffletz. (MART. D'AUV., Arrêts Am. R., c.1460-1466, 213). ...et lui baillerent plusieurs coups orbes (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 8). ...et de laditte hache luy bailla sur son armet tel coup qu'il le getta tout mort à ses piedz. (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 293).

 

-

Bailler (telle arme) à qqn. "Asséner un coup (de telle arme)" : Baillez lui la massue A celui qui cuide estre Plus subtil que son maistre (CH. D'ORLÉANS, Rond. C., 1443-1460, 384).

 

-

Bailler à qqn de (telle arme) : Lequel de la Vergne il trouva en chemise, en pourpoint, auquel il bailla de son espée dessur la teste (ROYE, Chron. scand., II, 1460-1483, 16). ...incontinent vint à lui ledit Jehan de Foing, qui lui bailla d'une javeline au travers du corps (ROYE, Chron. scand., II, 1460-1483, 59). ...et luy bailla de la hance de sa javeline sur l'estomac (Doc. Poitou G., t.12, 1479, 256).

 

-

Empl. abs. "Frapper" : ...baille luy, baille, Ma foy, il ne vault que de raille (Gaud. sot, c.1450, 9). Mais soubz l'ombre de ceste feste, On leur baille bien sur la teste. (Sots gard., a.1488, 107).

 

d)

"Offrir, exposer (une partie d'une armée à une attaque)" : Et, quant les ennemyz du Roy eussent marché pour venir gaigner et conquerir son artillerie, ilz se fussent myz hors d'alaine ; et n'y povoient venir en ordonnance de combatre, mais failloit qu'ilz baillassent le costé à leurs ennemyz sans fortification ou deffense nulle. (BUEIL, II, 1461-1466, 232).

 

e)

[D'un phénomène céleste] "Donner, transmettre (des effets lumineux)" : Aucuns dient qu'il fut devant Nembroth et le survesquit, et ay veu ou livre Clement que cestui Stram , alias dit Cam, fut moult intent à la speculacion des estoilles et, par aucun art, devant les simples gens faisoit apparoir que aucunes radiacions et sintilles des estoilles bailloient reverberacion à sa face, et, pour ceste merveille, lui fut, après sa mort, eslevé sepulcre merveilleux et lui donnerent ce nom Zoroastes (SIMON DE PHARES, Astrol. c.1494-1498, 15 v°). [Adjousta Abraham que ès jugemens des eclipses] que l'on eust principallement regard au Soleil, si elles advenoient de jour, ou à la Lune, si elles se faisoient de nuit, selon ce que les figures escheoient noturnes et diurnes, ce qui est encores observé et en usaige et aussi surtout que l'on regarde quant aucun des luminaires baille sa disposicion à autre planette, qui n'est pas de sa nature. (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 18 v°).

 

f)

Bailler la main droite à qqn. "Donner la main droite comme symbole d'engagement" : Le conte fit tirer les parties dehors et le prisonnier à part et demanda l'oppinion de tous, lesquieulx dirent tous qu'il estoit à cellui à qui il avoit baillé la main dextre, et que la main fait la foy, et cellui qui a la foy, l'emporte. (BUEIL, I, 1461-1466, 224).

 

-

[De deux pers.] Bailler les mains, l'une dans l'autre. "Se serrer la main (pour sceller un engagement)" : Pourparlerent ycellui Eustace et ledit Olivier de faire accort entre lui et ledit feu Cristot, et promistrent que le landemain matin ilz buvroient ensemble et seroient amis ; et de ce baillerent leurs mains, yceulx Eustace et Olivier, l'une dedens l'autre. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 417).

 

-

Bailler la main forte. "Fournir de l'aide" : Et ceulx qui y estoient entréz d'eulx-mesmes, comme le conte de Selanno, on bailloit la main forte pour les en gecter. (COMM., III, 1495-1498, 101).

 

-

JEUX

 

.

Bailler bois. V. bois

 

.

Bailler le bout. V. bout

 

2.

[Une chose abstr.]

 

a)

[Le sujet occupe un statut politique, social ou autre qui le met en position de donner]

 

-

"Conférer, octroyer (un titre, un pouvoir...)" : Et pour ce l'en baille et actribue les honeurs a celui qui donne et expose de ses pecunes pour la communité. (ORESME, E.A., c.1370, 450). ...le roy le fist son grant maistre d'ostel, et si lui bailla le bailliage et la cappitainerie d'Evreux (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 83). Je vous baille toute la puissance, toute l'auctorité et tout le droit que je puis avoir ou royaulme d'Amydoine (BUEIL, II, 1461-1466, 182). ...vous luy avés baillé l'appanaige et pays qu'il demandoit (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 221).

 

.

Bailler la charge de qqc./ d'une mission. "Confier le soin, la charge de" : Oudit temps, furent pris à Paris et contrains tous manouvriers de bras (...) de aler esdictes villes ainsi nouvellement reduictes au roy, dont on bailla la charge au regard desdiz pionniers à maistre Henry de la Cloche (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 255). Aprez fut baillée la charge et police de despartir les vivres au Maistre des arbalestriers (BUEIL, I, 1461-1466, 202). ...j'ay receu des lettres missives, dont la teneur s'ensuit : "Mons. le grant maistre, j'ay receu des lettres de Mons. le connetable qui m'escript qu'il vous a voulu baillier la charge de Beauvais..." (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 329).

 

.

Bailler la garde de. "Confier à garder" : [Le duc de Normandie manda à son maréchal] ...qu'il vint hastivement devers luy à Rouen, tant pour les logeiz que pour luy bailler la garde dudit chasteau de Rouen (LE CLERC, Interp. Roye, c.1502, 199).

 

.

Bailler en commission. "Donner pour mission" : Vous avés ma sentence ouye, Saturnus (...), Je vous baille en commicion La mettre a execution Incontinent et sans delay. (Cene dieux, c.1492, 123).

 

.

Bailler la jouissance de. "Donner la permission de se servir de, de profiter de" : Vous m'avez de vostre grace baillé la joyssance de vostre beau et gracieux corps tout entierement, et d'un petit baiser vous me faictes le refus ! (C.N.N., c.1456-1467, 317).

 

-

"Procurer (une possibilité d'action, une aide, un répit...)" : ...la ou je saroye je ne vous en vouldroye pas bailler l'occasion (C.N.N., c.1456-1467, 234). ...lequel trouva moien que le roy bailla et donna trefve entre lui et monseigneur de Charrolois (ROYE, Chron. scand., I, 1460-1483, 191). [Les habitants d'Arras] ...trouverent leur moien d'envoier devers le roy pour de lui obtenir sa bonne grace et misericorde, lequel la leur bailla et donna (ROYE, Chron. scand., II, 1460-1483, 48). ...il envoya ung poursuivant de le sommer et requerir de vuyder le pays du roy Amydas et qu'il lui feroit bailler passage pour s'en aller en son payz. (BUEIL, II, 1461-1466, 247). ...mais que seullement il voulsist prendre Eu et Sainct Vallery et se y loger pour partye de l'yver, car, avant qu'il fust deux moys, il feroit par telle manière qu'il seroit bien logé ; sans luy bailler autre seürté, mais très grant esperance. (COMM., II, 1489-1491, 56). Ledit seigneur des Cordes, se tenant à deschargé du service de sa maistresse par ce consentement que avoient baillé ces embassadeurs qu'il mist le roy dedans ladicte cité d'Arras, se delibera de faire le serment au roy (COMM., II, 1489-1491, 184). On leur demanda seullement qu'ilz baillassent passage et cent hommes d'armes à la soulde d'Itallie (COMM., III, 1495-1498, 41).

 

.

RELIG. "Accorder (un bien, une récompense)" : Dy pourquoy Jhesu Crist ne baille plain pardon a tous, comme pape a sa creacion ? (GERS., Annonc., a.1400, 230). Pense quelle cure il [Dieu] a de toy, comme il te baille les remedes salutaires. (CIB., p.1451, 188). Le sacrement de foy qui est une fois baillié, n'est jamais perdu. (Sacr. mar., c.1477-1481, 66).

 

.

"Infliger (une punition)" : Se je fais me [l. ma] penitence qui me sera baillee en confession, en seray je quitte ? Response : Se elle est bien baillee et discretement, oy, et se elle est faicte en estat de grace (GERS., Déf., 1400, 237). Je demande a Justice, puisque elle veult les loys estre gardees, se nostre Dame sera point comprise en la generale loy et maudisson que bailla Dieu aux femmes pour le pechié de Eve, c'est que en tristesse enfenteront et en engoisses ? (GERS., Concept., 1401, 402).

 

b)

"Concéder, accorder (qqc., à qqn qui est en mesure de l'exiger)" : Par quoy myeulx povoient adjouster foy à ce qu'il leur disoit : en somme que, s'ilz vouloient parvenir au bien de paix et saulver leur pays, qu'il failloit que ilz feïssent, après avoir baillé l'ouverture de la ville, comme ilz avoient promis, des choses contenues en certain mémoire. (COMM., I, 1489-1491, 112).

 

c)

"Transmettre (un savoir, une information)"

 

-

"Exposer, expliquer, enseigner" : D'autre partie, une science qui est forte quant est de soy ne puet pas estre bailliee en termes legiers a entendre. (ORESME, E.A., c.1370, 100). Pour tant disoit il [saint Paul] que il avoit esté comme la nourrice qui gouverne ses enfans en toute doulceur et humilité en baillant doctrine selon leur capacité. (GERS., P. Paul, a.1394, 507). Le premier enseignement est lequel bailla saint Louys, vostre predecesseur, a son ainsné filz : Monstrez vous tel que on vous ose dire verité, sans ce qu'il faille que on use de dissimulacion entour vous. (GERS., Noël, p.1404, 310). Ceste leçon icy leur baille [aux filles de joie] La belle et bonne de jadiz. (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 59). Il avoit mal estudiée la leçon que bailla Aristote à l'empereur Alexandre le Grant, son disciple, par laquelle il l'admonestoit de non riens faire, s'il lui estoit possible, sans le conseil de quelque homme expert en la science des estoilles (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 7 v°).

 

.

Empl. pronom. à sens passif GÉOM. [D'une abstraction] "Être représenté" : Commant aulcunes racines tierces, ou cubiques, se pevent representer et bailler par lignes. (NIC. CHUQUET, Géométrie H., 1484, 290).

 

.

[D'une chose abstr.] "Révéler" : Et avoient li Juis sorti bien cent ans en devant que, quant une manière de gens apparoient au monde qui venir devoient, qui porteroient flaiaus de fier, ensi le bailloit leurs sors, il seroient tout destruit. (FROISS., Chron. L., IV, c.1375-1400, 101).

 

-

"Formuler, exprimer" : ...Com Neptunus, dieu de la mer, Et Mars, que lors souloient clamer Pour sa valeur, dieu de battaille, Si commë Ovide le baille (COURCY, Chem. vaill. D., 1406, 60). ...je leur racompteray assez nuement l'ordonnance de la chose faicte si comme elle a esté baillee et recitee par gens notables dignes de foy et de toute credence. (RASSE BRUNH., Flor. Elvide Vat. C., a.1456, 2).

 

.

Bailler qqc. par écrit. "Mettre par écrit" : Adont se leva messires Thomas Wage (...) et recorda tous les fais des desus dis et les bailla par escript (FROISS., Chron. D., p.1400, 86). Sur ce, partirent les cappitaines des nefz et dirent qu'ilz avoient presque assez nefs et qu'ilz bailleroient par escript quantes nefs ilz avoient et de quel port. (BUEIL, II, 1461-1466, 170).

 

d)

"Édicter, fixer, imposer (des normes)" : Ayme ton visin comme toy, Ainsin vivras selonc la loy Que Jhesucrist nous a baillie. (DUPIN, Mélanc. L., c.1324-1340, 176). Et n'est pas legiere chose de baillier regles ou determiner quelles choses ou operacions sont a eslire pour les autres laissier. (ORESME, E.A., c.1370, 178). La science orent toute plainne, Par eulx mesmes se conseilloient, Et les loix aux peuples bailloient (DESCH., M.M., c.1385-1403, 268).

 

-

Empl. pronom. à sens passif "Être édicté, être valable" : ...dit mon disciple Aristote es Politiques que les loys se baillent universelment, non pas que en cas particuliers il n'y puisse et doye avoir raisonnablement excepcion (GERS., Concept., 1401, 403).

 

-

[D'une norme] Bailler que. "Prescrire que" : Regardez se vostre loy baille Que vous faictes tel jugement (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 303). L'aultre commendement nous baille Qu'on n'emble rien (Fr. arch. B., c.1468-1480, 43).

 

e)

"Fixer (un terme temporel, un lieu)"

 

-

"Fixer (un temps)" : Si se tira par devers la justice du dit Londres, devant lequel fut baillé jour a nostre homme dessus dit. (C.N.N., c.1456-1467, 37). Si se prepara de son costé pour icelles fournir, au temps et au jour qui luy fut assigné et baillé (LA MARCHE, Mém., I, c.1470, 315). Le chevalier fit touchier l'escu de Lancelot du Lac et luy fut jour baillé pour combattre, selon le contenu des chappitres (LA MARCHE, Mém., II, c.1470, 121). ...et que plus ne pouvoient tenir que dix jours, et puys huyt, et telle heure les veïs à trois ; mais avant passèrent les termes qu'ilz avoient baillé. (COMM., III, 1495-1498, 222).

 

-

Bailler (un temps) de + inf. "Fixer (un temps) pour" : La belle merciere (...) bailla journée a l'Escossois au lendemain au soir de comparoir personnellement en sa chambre (C.N.N., c.1456-1467, 49). Sur ce, fut dit que on bailleroit jour de combatre et que on les fist appeller. (BUEIL, II, 1461-1466, 106). ...mais au jour qu'ilz avoient baillé de revenir, ilz ne revindrent point, ne ne manderent aucune chose (LA MARCHE, Mém., II, c.1470, 283).

 

-

Bailler lieu à qqn. "Fixer un lieu de rendez-vous à" : ...affin de bailler lieu a son serviteur, fist son mary bouter en ung bahu (C.N.N., c.1456-1467, 7).

 

f)

[Syntagmes verbaux qui pourraient être paraphrasés par un verbe simple formé à partir du complément]

 

-

Bailler ajournement. "Ajourner (une requête)" : Et, après longue deliberacion eue avec tous les dessus nommez, a esté conclu que encores ne sera mie baillé adjornement en cas d'appel par ladicte Court (FAUQ., III, 1431-1435, 94).

 

-

Bailler audience à qqn. "Écouter, prêter attention à" : Il y avoit d'autres chevaliers plusieurs qui se retraioient devers Estonné et l'enhorterent d'estre joyeulx. Mais il les eslongoit et se tiroit puis a ung bout, puis a l'autre, sans leur baillier audience affin qu'ilz se partissent. (Percef. III, R., t.3, c.1450 [c.1340], 117).

 

-

Bailler assurance de qqc. à qqn. "Assurer (qqn) de (qqc)." : Le grant pastour courage luy donna, Et de secours luy bailla asseurance. (DU PRIER, Songe past. D.-M., c.1477-1508, 99).

 

-

Bailler courage à. "Encourager" : ...la baisa deux ou trois fois tres doulcement ; elle l'endura voluntiers, qui bailla courage au chevalier de proceder au surplus (C.N.N., c.1456-1467, 269).

 

-

Bailla charge à qqn de + inf. "Charger de" : Le roy (...) luy bailla charge de conduyre son avantgarde, et aussi les guydes, pour ce qu'il vouloit eviter ceste bataille (COMM., I, 1489-1491, 21).

 

-

Bailler conseil à. "Conseiller" : ...et, sur ce, demanderent conseil les deux parties ; et fut debatu si on leur devoit bailler ou non. Il fut dit que oil, et leur fut baillié conseil d'une part et d'aultre. (BUEIL, II, 1461-1466, 107).

 

-

Bailler empeschement à. "Empêcher" : ...telz espousailles qui n'ont esté d'aucune valeur prestent, donnent et baillent empeschement a ceulz de consanguinité (Sacr. mar., c.1477-1481, 72).

 

-

Bailler fin à. "Finir" : ...car je voeil selon ma premiere intencion terminer et bailler fin a mon present chincqiesme volume (WAVRIN, Chron. H., t.4, p.1471, 386).

 

-

Bailler qqc. à oubliance. "Oublier" : Sire roy, trop sui merveillié S'a oubliance avez baillié Ja lez fez du temps ancïen. (Vie st Evroul S., c.1350, 117).

 

-

Bailler requeste. "Requérir" : ...et sur ce ont baillé requeste, et ancor requierent, attendu le temps d'aoust et vendenges, que puissent revenir en leur couvent servir Dieu. (BAYE, I, 1400-1410, 200).

 

g)

[Syntagmes verbaux dont le complément est déterminé]

 

-

Bailler tel assaut. "Livrer telle attaque" : ...et estoient fort amenries lors pourveances et lors artellerie, pour les grans assaus que on lor avoit bailliet et livrés (FROISS., Chron. D., p.1400, 222). Nous les trouverrons tous dormant Quant viendra a bailler l'assault, Qu'i ne sauront quoy ne comment On les aura pris en sursault. (Mist. Siège Orléans H., c.1480-1500, 595).

 

-

Bailler telle delivrance. "Donner telle délivrance" : Sy vueil a ce point pervenir Que tel prince pourroit venir En humaine habitacion, Qui en prenroit compassion Par baillant bonne delivrance. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 46).

 

-

Bailler tel nom à. "Nommer de telle ou telle façon" : S'amie vous veuil apeller, Trop simple nom vous bailleroye (...). De ma dame nom vous donner, Orguilleuse je vous feroye ; Maistresse point ne vous vouldroye (CH. D'ORLÉANS, Rond. C., 1443-1460, 352).

 

-

Bailler telle promesse. "Faire telle promesse" : ...a cause de la prommese que j'ay baillée d'estre a la journee a l'encontre du Blancq Chevallier (Percef. III, R., t.1, c.1450 [c.1340], 118).

 

-

Bailler telle response (à). "Donner telle réponse" : ...ceste response bailla, Dont li roys moult se mervilla (MACH., P. Alex., p.1369, 102). ...la nonnain (...) jasoit qu'elle fust bien courtoise, luy bailla tresdure et aspre response (C.N.N., c.1456-1467, 105).

 

h)

Bailler à qqn à + inf.

 

-

"Donner la possibilité de" : ..creature qui vive ne lui pourroit baillier a entendre qu'il n'y eust aucun mal. (Percef. III, R., t.1, c.1450 [c.1340], 95). ...vostre grant ratelée (...) a la verité dire, me baille a cognoistre que je n'ay pas esté si sage que je deusse (C.N.N., c.1456-1467, 235).

 

-

"Être pour qqn la cause, l'occasion de" : ...incontinent que femme a conceu enfant masle, pour les trois premiers mois, elle porte assez bel, mais les autres six mois, moult en a grant doleur plus que d'une fille. Toutesfois les trois premiers mois, la fille lui baille plus a souffrir. (Ev. Quen., I, c.1466-1474, 102).

 

-

"Donner qqc. à qqn à" : Au queux le baurray a plumer [le héron] (Gris., 1395, 6). Messeigneurs, vous me baillez prou à besongner et eussiez bien fait cecy sans moy (BUEIL, II, 1461-1466, 89).

 

3.

DR.

 

a)

Bailler qqc. à cens et rente/à loyer. "Accorder (un bien), moyennant le paiement d'une redevance" : ...ouquel temps ordenasmes lesdiz murs avec les tours estans en iceulx, estre baillez à nostre proufit à cens et rente perpétuelment ou aultrement. (Ch. VI, D., t.1, 1384, 53). La grant court veult tout devourer Et baille a loyer ou a cense Pour son estat, pour sa despense, Aux gens lais, c'est grant maleurté, Ou patronnaige ou prieurté A pris d' argent ou a censive. [L'auteur critique les pratiques de certains prélats] (DESCH., M.M., c.1385-1403, 164).

 

b)

Bailler qqc. à ferme. "Céder par contrat la jouissance d'un bien, d'un office... à un tiers, pour une durée et un prix fixés" : ...Monseigneur avoit baillié à ferme environ 13 arpens et demi, que prez que faussoyes (RAPONDE, Comptes La Trémoille L.T., 1396-1406, 6). Les balences et poiz du dit Chastel, ausquelz toutes les denrées vendues a pois en icelle ville, qui sont dites grosses et de gros pois, doivent estre pesées et non aillieurs, et peuent avoir les habitans d'icelle ville balences pour peser en leurs hostelz, et doit on pour le pesage de chascun cent pesant IIII d. et au dessoubz au pris, et sont baillez a ferme pour le present a LX s. pour an (Comté Porcien R., 1400, 218). Lesquelz (...) ont esté d'accort (...) que monseigneur baillast la dite clergise a ferme ou ainsy que bon lui sambleroit (Comté Porcien R., 1400, 219). ...vous savez les procès qui sont pendans (...) à cause des greffes, seaulx et geolles (...) qui nagueres (...) ont esté baillez à ferme (Lettres Louis XI, V.M., t.10, 1483, 117).

 

-

Empl. pronom. à sens passif : ...travers, winages et autres semblables qui se baillent à ferme (Comté Porcien R., 1400, 218).

 

c)

Bailler en apanage. "Donner en apanage, apanager" : ...ne povons entendre que pour avoir esté iceulx pays d'Anjou et du Maine baillez en apanaige, ilz doyent avoir plus grant previlege que les dessusdiz leurs voysins. (Lettres Louis XI, V.M., t.10, 1483, 118).

 

d)

Bailler en gage. "Donner en gage" : ...et sont toutes ces choses baillées en gaige audit Berart pour la somme de... (Reg. crim. Chât., II, 1389-1392, 212).

 

e)

Bailler la chose d'une affaire à qqn. "S'en remettre à qqn, au jugement de qqn (qui a autorité pour en juger)" : Adont ung chevalier la estant print la parolle et dist : "Sire, le cas est piteux et la misericorde sur vous en gist. Et veu que le chevalier qui en a receu le blasme vous en a baillié la chose, aussi faisons nous, car il n'y a ne mort ne affolure. - Beaulx seigneurs , dist Zelland, il me plaist tres bien, mais Nervin en fera satisfaction, car je lui commande que il tiengne prison au chastel sans en partir, se n'est par mon congé..." (Percef. III, R., t.3, c.1450 [c.1340], 78).

 

f)

"Assurer l'exécution de qqc. (ici un testament)" : Et l'autre [exécuteur testamentaire, en plus des deux déjà nommés] ? Maistre Jacques James : Troys hommes de bien et d'onneur, Desirans de sauver leurs ames Et doubtans Dieu nostre seigneur. Plus tost y mecteront du leur Que ceste ordonnance ne baillent ; Point n'auront de contreroleur, Mais a leur seul plaisir en taillent. (VILLON, Test. R.H., 1461-1462, 146).

B. -

Bailler qqn (ou un animal)

 

1.

Bailler qqn à qqn

 

a)

"Livrer (pour des raisons militaires, politiques ; par trahison)" : ...avez confessé Vostre Crist de femme estre né, Temté, lié et despoillié, Baillé et puis crucifié (Mir. st Sev., 1362, 228). Si l'ont baillié et presenté Au roy, contre sa volenté. (MACH., P. Alex., p.1369, 17). Lors [le roi] dist a Remondin : Sire chevaliers, bailliez ostages. (ARRAS, c.1392-1393, 61). Il leva son ost et tira à Thongre, qui attendirent le siège. Toutesfois la ville ne valloit guères, et aussi, sans se laisser battre, feïrent semblable composition et baillèrent dix hommes, entre lesquelz se trouva encores cinq ou six desdictz ostaiges. Tous dix moururent comme les autres. (COMM., I, 1489-1491, 110). Vous avez entendu par cy devant en ces Memoires le desloyal tour que ledict duc avoit fait peu de temps au paravant au conte de Sainct Pol, connestable de France, comme de l'avoir prins sur sa seüreté, baillé au roy pour le faire mourir, et davantaige baillé tous les séelléz et lettres qu'il avoit dudict connestable pour servir à son procès (COMM., II, 1489-1491, 139). ...ceste seulle craincte et ambicion de Nancy lui dist bailler ledit connestable, comme avez ouy (COMM., II, 1489-1491, 140). Et, de mal adventure, le jour que les Veniciens sceürent la mort du frère du Turc, que le pape avoit baillé entre les mains du roy, deliberèrent de le faire sçavoir au Turc par ung de leurs secretaires (COMM., III, 1495-1498, 104).

 

-

"Remettre, livrer (qqn qui est enfermé)" : Ce jour, maistre Gueroud Boissel (...) a requis que la Court lui baille et delivre Robin le Tardif, son escolier, prisonnier en la Conciergerie (FAUQ., II, 1421-1430, 242).

 

b)

"Mettre qqn au service, à la disposition de qqn" : Il leur devoit baillier dou mains un chevalier qui les devoit conduire et mener tout leur chemin parmi Bretaigne (FROISS., Chron. R., X, c.1375-1400, 47). ...et tantost le fist chevalier, et lui bailla cent hommes d'armes (ARRAS, c.1392-1393, 204). Et baillerent au Mareschal medecins, myres et barbiers pour faire garir ses playes. (BUEIL, I, 1461-1466, 111). Puis fut baillé au sire de Roqueton ung jeune homme entre les autres qui avoit grant voulloir et bon desir d'apprendre et faire ce que on lui commanderoit, nommé Guyon de Perrouse (BUEIL, I, 1461-1466, 202). Incontinent le roy luy bailla ung homme, avant que partir de là, qui le conduysit à Bordeaulx. (COMM., II, 1489-1491, 72). Strato Lampsacenus, souverain philozophe et astrologien, vint en fleur environ ce temps et pour sa grande experience fut baillié pour enseigner et instruire Ptholomée Philadelphe (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 58 r°). La maistresse benigne la mist en la plus belle chambre de leans et tres bien ordonnee et richement, et lui bailla quatre damoyselles pour la servir. (Charles de Hongrie C., c.1495-1498, 4).

 

-

Bailler qqn à/pour/en + attribut de l'obj. : Ces IJ., sus haute mer salée, Avoient la tierce galée. Ces IJ. au roy firent depry, Que monsigneur Jehan Monstry Leur baillast pour leur souverain. (MACH., P. Alex., p.1369, 139). ...et leur bailla deus gentils hommes à cappitaines (FROISS., Chron. R., IX, c.1375-1400, 230). Et pour acomplir celle convenance, il en bailla un sien fil en pleges (FROISS., Chron. D., p.1400, 558). ...et vous vueil bailler pour chief le Jouvencel, que vous comgnoissez tous. (BUEIL, II, 1461-1466, 170). Et, pour aucunement entendre la matière dont nous avons parlé touchant le champ du duc d'Ath et le conseil que le roy Amydas avoit eu de le combatre, je bailleray le roy de France pour exemple estant dedans Paris, les princes et seigneurs qui estoient devant, en grant discord desordonné par yceulx. (BUEIL, II, 1461-1466, 234).

 

c)

"Donner en mariage, en adoption, en tutelle..." : Car c'est la plus tres belle qui oncques mes feust nee, Et se seroit pitiés et euvre desguisee, S'a Gaudïon estoit baillee et accordee. (Tristan Nant. S., c.1350, 138). Et quant Jacob ot jeu [de gésir] a Lye, et il la regarda a la matinee, il dist a Laban: " Que est ce que tu as voulu faire a moy ? N'ay je pas servy a toy .VII. ans pour Rachel Pourquoy m'as tu baillé Lye ?" Laban respondi: " Nous n'avons pas de coustume en ceste contree de bailler aux nopces la plus jenne devant les ainsnees". (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 64). Cellui est arroginé qui est de son droit et qui n'a pere ne mere, ou se il a pere, il est emansipé et baillé et passe en la puissance de l'arrogant. (Sacr. mar., c.1477-1481, 60). Pourquoy desplaisoit bien aux roys dessusdits d'avoir baillé leur fille à homme qui ne seroit point agreable au royaulme (COMM., III, 1495-1498, 298).

 

d)

"Confier (aux soins, à la bienveillance...de) " : ...que elle congnoissoit bien ladite Margot sa seur, et que, puis demi an ança, elle lui a esté baillée par ses pere et mere, afin de la aprendre le mestier et euvre de broderie. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 42). Soit bailliez [l'enfant] a bonne nourrice Qui tressouëfment le nourrisse Si qu'il croisse fort et amende. (Gris., 1395, 60). ...mais je vous sens entré en tant noble queste qu'il ne puet estre que ne soiés de meilleur venue que ne cuidés. Et pour ce vous oze je hardiement bailler mes enffans. (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 829).

 

-

Bailler qqn en gouvernance à qqn. "Confier à des fins d'éducation" : Et ot quatre barons, que de Poictou que de Guienne, a qui elle bailla ses enfans en gouvernance. (ARRAS, c.1392-1393, 84).

 

-

Bailler qqn en garde à qqn. "Confier à la garde de" : Et tantost aprés la dame lui commença a dire qu'elle ne sçavoit que faire pourroit des deux jennenceaux qu'il lui avoit bailliez en garde (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 694). Le duc avoit une seur moult jone et belle. A Euryant la bailla en garde adfin de l'apprendre et monstrer a ouvrer d'or et de soye, car sur touttes les aultres femmes Euryant en estoit la maistresse. (Gérard de Nevers L., c.1451-1464, 82). ...il envoya Helayne en une cité de la terre actique nommee Amphidua, et la bailla en garde a Ethera, sa mere, et a ses parens qui la demouroient. (Hist. prem. destruct. Troie R., c.1470-1480, 225).

 

-

Bailler qqn en cure à qqn. "Confier aux soins médicaux de " : Et comme demy mort fut recueilly de ses circonvoisins ou de sa femme, qui le bailla en cure a Es[c]ulapius, lequel par sa diligence revocqua son ame d'enfer (Hist. prem. destruct. Troie R., c.1470-1480, 239).

 

2.

CHASSE [Du cerf] Bailler (un autre cerf) + aux chiens. "Heurter de ses cornes un autre cerf qui l'accompagne pour que les chiens poursuivent celui-ci à sa place" : ...s'il a un cerf qui soit son compaignon, il le baillera aux chiens affin qu'il se puisse garentir, et que les chiens aillent aprés l'autre (GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, 62). Et aucunne foiz sont bien deux cerfs ensemble, de quoy le grant cerf baille, comme j'ay dit dessus, le plus juesne aux chienz, et le grant ira demourer un pou plus avant. (GAST. PHÉBUS, Livre chasse T., 1387-1389, 176).

C. -

Loc.

 

1.

(La) bailler belle (à qqn)

 

-

"Se moquer, se jouer (de qqn)" : ...Cuidez vous estre sire et tenir la contree ? Par Dieu ilz l'a [l. la] vous ont a nuit [l. anuit] belle baillee. (Hern. Beaul. D.B., c.1350-1400, 12). Puis les secretz fault aler escoutant, Et en parlant l'ung a l'autre boutant. Par ce moyen vous la baillerez belle. (Hern. Beaul. D.B., c.1350-1400, 38). Ouÿl, il la nous baudront belle : Nous en serons tres bien reffaiz. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 402). [Même ex. dans Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 889] Puis les secretz fault aler escoutant, Et en parlant l'ung a l'autre boutant. Par ce moyen vous la baillerez belle. (MICHAULT, Doctr. temps prés. W., 1466, 38). Car quant l'ay priee pour dancer, Je vous l'ay appellee ma dame, Et devoie dire ma damoyselle. La ou j'ay failli, par mon ame, Pour quoy el la me bailla belle. (COQUILL., Oeuvres F., 1478-p.1494, 311). Tu luy baille belle, Michault, Si tu y vas sans beste vendre. (B. veoir, p.1480, 16).

 

-

P. antiphr. "Faire confiance à qqn (dont on se méfie)" : GROIGNART. Qu'esse cy, dea ? Que nous apporte Ceste morveuse ? Dieu la gart ! HERODE. Laisse l'esbatre, dy, Groignart ; C'est quelque finesce nouvelle. GROIGNART. Sus, de par Dieu, baille luy belle ; Elle nous fera beau sabbat. (GRÉBAN, Pass. J., c.1450, 163).

 

2.

La bailler chaude à qqn. "Jouer un tour à qqn" : Le paillard qu'il est trop se raulde De la finesse qu'ay apprise. Mais je la luy bailleray chaulde Se je ne faulx a mon emprise (LA VIGNE, S.M., 1496, 288).

 

3.

En bailler à qqn. "En faire accroire à qqn, tromper qqn" : Voy, mon seigneur fut renommé, Ung des meilleurs que l'on veist oncques. Vous avez tresbien sermonné, Mais le temps n'est pas tel qu'adoncques ; Vëez vous comme il nous en baille. (CHART., D. Her., p.1415, 423). Voyla la beste. A ! mort bieu, je leur en baille. Je prens argent à toutes mains. (Retraict T., c.1490, 229).

 

-

En bailler d'une à qqn. "En faire accroire à qqn, tromper qqn" : Et ce mesme jour, sur la brune, Fut oy, sans aller plus loingz, Quelq'un qui nous en bailla d'une, Maistre Mathieu de Hocheprune (COQUILL., Oeuvres F., 1478-p.1494, 105).

 

-

En bailler de belles, de vertes et de mures à qqn. "En faire voir de toutes les couleurs à qqn" : Et si elle est aultre, qui advient souvent, pensez qu'il a assez a souffrir et si el lui en baille de belles, de vertes et de meures ! (Quinze joies mar. R., c.1390-1410, 91).

 

-

Le bailler trop vert. "Dire une chose difficile à croire" : Or, qu'il n'y ait coing ne carriere D'enffer, que tout ne soit ouvert ! Ung tour nous a baillé trop vert ! (LA VIGNE, Munyer T., 1496, 241).

 

4.

Bailler Guillaume pour Gaultier/jaune pour vert. "Tromper" : Il est si beaul de savoir expliquer En une espitre ou ung vers du Psaultier Baillant aux gens Guillaume pour Gaultier. (MICHAULT, Doctr. temps prés., 1466. In : Chrestom. R., 138). J'ay veu bailler jaune pour verd. (Rapp., c.1480, 68).

 

5.

Prov. Bailler de tel fer tel coutel. V. fer
 

DMF 2020 - Synthèse Pierre Cromer

Fermer la fenêtre