C.N.R.S.
 
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     ACCOUTUMANCE     
FEW II-2 consuetudo
ACCOUSTUMANCE, subst. fém.
[T-L : acostumance ; GD : acostumance ; GDC : acoustumance ; AND : acustumance ; DÉCT : acostumance ; FEW II-2, 1091b-1092a : consuetudo ; TLF : I, 442b : accoutumance]

I. -

"Habitude"

A. -

"Manière habituelle d'un individu d'être, de sentir, de se comporter..., acquise volontairement ou non" : Acoustumance est forte a transmuer pour ce que elle ensuit nature et li resemble (ORESME, E.A., c.1370, 399). Pour miex entendre cest livre l'en doit savoir que science morale est pour reguler les operations humaines voluntaires et pour adrecier les a bien et a vertu. Et de ceste science .III. parties. Une est dicte ethique, de ethos en grec, qu'est meurs ou acoustumance (ORESME, Ycon. Arist. M., 1374, 807). Quant voir dit [le menteur] d'aucune aventure, On ne le croit, car sa nature Ou longue accoustumence croire Fait aux gens qu'il ne saroit voire Chose dire (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 49).

 

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Accoustumance de + inf. : Einsi deveroit amans faire Qui averoit en son affaire Tendu la prise de maniere, Tant en bel samblant comme en chiere, Drecie emmy acoustumance De porter adès reverence A sa dame especiaument (MACH., D. Aler., a.1349, 267). ...les autres sont empeschiez par habondance de vices et de mauvaise vie, et par deffault de bonne doctrine, et par acoustumance de ouyr mauvaise doctrine (GERS., Trin., 1402, 153). Ce chaint sera de magnanimité Que l'on constrint par force de couraige ; Il sera noir pour monstrer fermeté Contre les vices et leur auctorité Mectant pechié soubz les pietz en servaige. La ferrurë et l'or fin et l'ouvraige Signifie la riche ascoustumance D'avoir vertu tousjours en souvenance. (LA MARCHE, Triumphe dames K.-B., p.1488, 26).

 

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Accoustumance de + subst. : O tresredoutable et perilleuse acoustumance de voluptez et d'aises O envieillie et enracinee norreture de pompes et de delices (CHART., Q. inv., 1422, 14).

 

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Loc. adv.

 

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Par accoustumance. "Par habitude" : Beau filz, mieulx vault faire silence Que promettre ; li homs s'afole De mentir par acoustumance : Tien toudis vraie ta parole. (DESCH., Oeuvres Q., t.1, c.1370-1407, 127). Le Deable est philosophe : il scet l'estat et la maniere d'omme et sa complexion, et en quel vice il est plus enclin, ou par nature ou par acoustumance, et d'icelle partie il assault plus fort : le colorique de ire et discorde, le sanguin de joliveté et de luxure, le fleumatique de gloutonnie et de paresce, le melencolieux d'envie et de tristesse. (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 41).

 

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Par la force d'accoustumance. "Par la force de l'habitude" : Neron lui portoit reverence [à Sénèque] Par la force d'acoustumance, Quant son maistre vëoit venir. (Renart contref. R.L., t.1, 1328-1342, 30).

 

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Loc. verb.

 

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Avoir qqc. d'accoustumance. "En avoir l'habitude" : Quant les biens, qui sont en la ronde, Sont miens, et je [Fortune] les donneray Par grant largesse, dont j'abonde, Et aprés je les reprandray, Certes, a nul tort ne feray. Qui esse qui m'en blamera ? Je l'ay ainsi d'acoustumance. (CH. D'ORLÉANS, Ball. C., c.1415-1457, 177).

 

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Estre d'accoustumance à qqn. "Être habituel à qqn" : S'on rit, pleurer lui est d'acoustumance ; S'il peut, a part se met le plus souvent, Afin qu'a nul ne tiengne parlement (CH. D'ORLÉANS, Rond. C., 1443-1460, 313).

 

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Prendre accoustumance de + inf. "Prendre l'habitude de" : ...le curé avoit prins accoustumance d'aller estaindre le feu en son hostel comme paravant la defense. (C.N.N., c.1456-1467, 441).

 

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Prov. : Acoustumance est moult poissant (Renart contref. R.L., t.2, 1328-1342, 2). Pour ce que grant chose est d'acoustumance Quant on la prant et poursuit des s'enffance Dure chose est qu'om se puist retenir De la laissier (DESCH., Oeuvres Q., t.2, c.1370-1407, 203).

 

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[Sens moral]

 

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Bonne accoustumance. "Accoutumance au bien, persévérance dans le bien" : Ne te complains point doncques, o ame devote, des commandemens de ton amy, qui moult te seront legiers se parfaictement tu l'aymes (...) Et bonne acoustumance les te fera doulz et plaisans (GERS., Concept., 1401, 413).

 

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Mauvaise / meschant /, male accoustumance. "Accoutumance au mal, persévérance dans le mal" : L'en peut afflictions charnelles Par la tenre [le brou de noix] taignant entendre, Par l'escale froisser ou fendre Rompre malvaise acoustumance. (Tomb. Chartr. Trois contes S., c.1337-1339, 120). Desobeyssance l'envelope [l'âme] du linceul et du lien de mauvaise acoustumance. (GERS., Purif., 1396-1397, 66). Il n'est chose plus dangereuse que de user et perseverer en sa propre volunté maulvaise et meschante acostumance et ne s'en vouloir corriger (Trés. sapience G., a.1400, 358). Sy doivent toutes personnes les pechiez fuyr et mauvaise acoustumance car malice empesche a congnoistre Dieu et verité (GERS., Trin., 1402, 153). Tristifer en nes ung bien n'oevre, Ainchois s'acoustume en male oevre. Mais tres grant peril sans doubtance Y a en male acoustumance. (Pastor. B., c.1422-1425, 76). Et ainsi, sans autre confession, trespassa de ce siecle, ainsi parlant pour la mauvaise accoustumance dont il avoit en son temps usé et pour laquelle souvent les mauvais juges et advoctaz, a l'heure extreme et qu'ilz ont a faire de la plus grande sapience qu'ilz oncques eurent, meurent plus empeschiez du fait de leurs negoces acoustumees que de penser a faire le salut de leurs ames (COLART MANS., Dial. créat. R., 1482, 197).

 

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Retourner à ses premières accoustumances. "Retrouver ses mauvaises habitudes antérieures" : ...[les hommes] retournent des qu'ilz se sentent quelque peu deschargiez a leurs premieres acoustumances comme le chien a son vomissement. [Réf. biblique : Prov. XXVI, 11] (CHART., Q. inv., 1422, 50).

 

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[Dans un cont. jur.] "Récidive" : Mais s'elle en tuoit ung autre, elle seroit arse pour ce que ce seroit acoustumance, selonc droit escript ou code (Arch. Nord, c.1300-1400, B 13567, f° 62, IGLF).

B. -

"Coutume, usage d'une collectivité, d'un lieu" : Tu taulx aulx preudommes leur bien, A telz qui riens n'y ont dis : "Tien !" ; Tu fais noeufves acoustumances, Nouvelles loix et ordonnances ; Tu fais de vielz païs tous noeufs, Ne tu ne scez que tu te voeulx. (Renart contref. R.L., t.1, 1328-1342, 151). Et pour faire l'acoustumance du paÿs, le comte le porta [le nouveau-né] au temple du dieu Mars et luy donna autel nom comme il avoit, c'est a dire Pedracus. (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 406). Tant n'y sceurent regarder qu'ilz peussent voir que de droit deussent aucun treu, fors par usaige qui estoit une abusion et folle acoustumance. (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 415). ...pour l'ouvraige que chascun emporte, il est tenu de rendre loier, et par especial les chevaliers lui doyvent envoier leur anel. (...) Chiere damoiselle, dist Benuicq, ceste acoustumance ne vueil je pas rompre, mais tant ayme mon anel que pas voulentiers ne le lairoie pourter en sus de moy que present ne fusse (Percef. IV, R., c.1450 [c.1340], 1069). Vous congnoissez l'accoustumance De ce pays, c'est assavoir Comme l'en fait mari avoir Es filles qu'on a mis ceans, Quant vient qu'ilz ont attaint les ans De pouoir recevoir mary. (Myst. Incarn. Nat. L., t.1, c.1454-1474, 230).

 

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Il est d'accoustumance. "Il est d'usage" : ...on ne leur voet faire raison par ceux de Franche, Ne aconplir justiche, sicomme est d'acoustumanche (Geste ducs Bourg. K., c.1410-1419, 397).

C. -

"Relation habituelle, familière, avec qqn" : Lors ne ferez pas long sejour De maint grant serement jurer Au contraire, car pour l'ardour D'amour que vouldrez savourer, Lui vouldrez trop faire plaisir [à votre amie]. Par lui vouldra Amours merir Vostre accoustumance premiere ; Celle seule pourrez servir, Autre de vous ne fera chiere. (Cent ball. R., c.1388-1396, 92). En ce lieu estoit mon filz avec ceulx qui amoyent Crisis, et tres souvent se donnoit garde du corps, tout triste, et aucuneffoiz plouroit, et touteffoiz cela me pleut bien, et pensoye ainsi : "Cest enfant pour cause d'un pou d'acointance et d'acoustumance porte la mort de ceste femme tant familierement ; que eust il fait s'il l'eust amee ?..." (RIPPE, Andrienne, a.1466. In : Chrestom. R., 208).

D. -

"Endurcissement, aguerrissement" : ...il est si mat, si las, si dompté du traveil et tourment de mesnage qu'il ne lui chault plus de chouse que sa femme lui die ne face, mes y est adurcy come ung veil asne, qui par acoustumance, endure l'aguillon, pour lequel il ne haste gueres son pas qu'il a acoustumé d'aller. (Quinze joies mar. R., c.1390-1410, 27).

E. -

"Pratique habituelle ; capacité acquise par apprentissage, par répétition" : Et de telx principes l'en a la cognoissance en diverses manieres ; car les uns sont cogneüs par induccion, les autres sont cogneüs par sens, les autres sont cogneüs par accoustumance et les autres en autre maniere (ORESME, E.A., c.1370, 123). ...l'en peut plus et mieulx eschiver desactrempance par acoustamance, car chascun a en sa vie tres souvent et moult de occasions et de oportunitéz a ce, et peut faire telz acoustumances sens peril ; mais en paours et couardies il est au contraire. (ORESME, E.A., c.1370, 227). Mais autres gens sont qui conversent civilement et qui font oeuvres politiques par une puissance, c'est a dire, par un habit acquis par acoustumance plus que ilz ne les font par science. (ORESME, E.A., c.1370, 537). ...c'est assavoir, se felicité est eüe par doctrine comme sont les sciences ou par acoustumance comme sont les vertus ou par excercitacion comme sont les arts manuelz ou par Dieu ou par fortune. (ORESME, E.A.C., c.1370, 128). La pericie, a droit juger, De bien parler se peut logier En .III. choses (...) En nature, quant en engin (...) En doctrine, quant a science ; Usage, quant a acoustumance. (CHR. PIZ., M.F., II, 1400-1403, 133).

 

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Accoustumance de + inf. : Car autrement il s'ensivroit que les genz ne seroient pas fais plus politiques et plus habiles a mectre loys pour acoustumance de vivre en policie. (ORESME, E.A., c.1370, 537).

 

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"Apprentissage, dressage" : Or vous diray d'acoustumance, Par quoy y ayez mieulx fiance, Ce qu'acoustumance fait faire, Comment a Nature est contraire, Et que ne diez que Nature Conserve ja tel nourreture. (Renart contref. R.L., t.1, 1328-1342, 66).

 

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[D'un animal] "Apprivoisement, dressage" : Un loup, un hours, un cerf et dain Pouez tant nourrir soir et main ; Delez le feu lez vous serra, (...) Pour vous laira et boiz et gaulx. Combien que boys est leur nature, Par acoustumer n'en ont cure Et par acoustumance héent Leur nature, et point ne y véent. A leur nature sont contraire ; Acoustumance leur fait faire. (Renart contref. R.L., t.1, 1328-1342, 66).

II. -

"Redevance due en vertu d'une coutume" (GD I, 81b ; doc.1372 et ex. de FROISS.)
 

DMF 2020 - Synthèse Jean-Loup Ringenbach

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