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C.N.R.S.
 
Dictionnaire du Moyen Français (1330-1500)
Lexique de Jean Froissart, Chroniques
Jacqueline Picoche

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 Présentation 

La longue vie de Jean Froissart (vers 1337 - après 1404) couvre une partie importante du XIVe s. et dans son œuvre foisonnante, les quatre livres de ses Chroniques ont largement éclipsé sa production de poète mondain. Il s’agit d’une œuvre immense, de plusieurs milliers de pages, qui constitue – même si les historiens modernes ont tendance à se méfier de ses méthodes – l'une des sources les plus importantes de l’histoire d’une grande première partie de la guerre de Cent Ans, et un document de premier ordre sur les modes de vie et les mentalités de l’époque.

Écrites à la demande de grands personnages qui tenaient à y voir relatés leurs hauts faits, elles ont immédiatement connu un grand succès tant en France qu’en Angleterre. C’est dire que les manuscrits sont extrêmement nombreux et que les éditeurs ont vraiment l’embarras du choix, d’autant plus qu’on possède trois rédactions du premier livre, espacées dans le temps et passablement différentes les unes des autres.

Deux éditions des quatre livres parues au XIXe siècle : celle de Buchon, puis celle de Kervyn de Lettenhove, semblèrent insuffisamment scientifiques à la Société d’Histoire de France qui en mit une nouvelle en chantier en 1869 sous la direction de Siméon Luce. Celui-ci eut pour successeurs Gaston Raynaud, puis Léon Mirot et enfin Albert Mirot, qui, cent six ans plus tard, en 1975, vint à bout du livre III, laissant le livre IV jusqu’à présent sans éditeur.

Sur ces entrefaites, le médiéviste américain George Diller avait publié chez Champion en 1972 sa propre édition, celle de la troisième et dernière rédaction du livre I, la plus tardive, transmise par un manuscrit conservé à Rome, alors que Siméon Luce avait fixé son choix sur un manuscrit de la première rédaction conservé à la bibliothèque nationale de Paris. C’est l’édition Diller du manuscrit de Rome (1010 p.) qui a été saisie par l’INALF et qui est la source principale de mon lexique.

Toutefois, j’ai profité aussi de l’édition Luce-Raynaud-Mirot grâce au travail de Lucien Foulet. Il faut savoir que, quelques années avant la guerre de 1939, Mario Roques avait mis en chantier un “inventaire général de la langue française” qui, à l’époque, n’était réalisable qu’au moyen de fiches-papier manuscrites ou dactylographiées. Le relai, après la guerre, fut pris par la mise en chantier, avec des moyens informatiques, du Trésor de la Langue Française. En 1931 Léon Mirot avait atteint, avec le volume XII, la fin du livre II, et c’est sur cette édition en 12 volumes des deux premiers livres des Chroniques, que Lucien Foulet, à la demande de Mario Roques, réalisa à partir de 1936 un très important fichier qui fut mis à ma disposition. J’eus accès à sa version manuscrite, au moment où je travaillais à ma thèse sur le vocabulaire de Froissart, et, pour le présent lexique, à la version dactylographiée, recopiée par des secrétaires sur fiches de carton, qui était alors conservée à Besançon. Je suis encore aujourd’hui confondue d’admiration quand je repense à la lisibilité de son écriture, à la précision de sa copie et de ses références, et à l’intelligence avec laquelle il choisissait ses exemples.

Le livre IV était, à l’époque, inaccessible, ce qui ne serait plus le cas aujourd’hui, P. Ainsworth et A. Varvaro ayant publié en 2004 à la fois le livre III et le livre IV dans la collection des Lettres Gothiques (Le Livre de Poche, 1023 p.). Mais au moment de mon travail, le livre III était accessible, et afin de ne pas le laisser entièrement à l’écart, j’obtins de l’INALF la saisie du volume XIV paru en 1966 (240 p.). Mon lexique est donc fondé sur une partie significative des Chroniques, mais non sur une saisie exhaustive, matériellement irréalisable, et qui n’aurait sans doute apporté que des mots rarissimes, peut-être présents dans d’autres textes de la même époque.

C’est en 1991 que récemment nommé à l’INALF, Robert Martin commença à mettre en chantier le Dictionnaire du Moyen Français et à solliciter la collaboration de tous les universitaires qui avaient travaillé sur les auteurs du XIVe et du XVe siècle, ce qui était mon cas, puisque j’ai à mon actif les deux volumes ci-dessous :
- Le vocabulaire psychologique dans les Chroniques de Froissart, vol. I, thèse de doctorat d'état, Paris, Klincksieck, XV-254 p. – 1976
- Le vocabulaire psychologique dans les Chroniques de Froissart, vol. II : Le plaisir et la douleur, Publications du Centre d'Etudes Picardes de l'Université de Picardie, Amiens, 426 p. 1984

C’est donc au début des années 90 que j’ai accepté de me charger de ce lexique que j’ai mis de longues années à réaliser. C’est que je menais de front ce travail avec une autre œuvre lexicographique dans une perspective bien différente, d’orientation pédagogique et non érudite, consacrée à la langue française moderne dans ce qu’elle a de plus “standard” :
Jacqueline Picoche et Jean-Claude Rolland, Dictionnaire du français usuel - 15000 mots utiles en 442 articles, Bruxelles, Duculot-De Boeck, 2002, 1064 p.

C’est la concomitance de ces deux travaux lexicographiques qui est à l’origine de l’unique mais importante liberté que j’ai prise à l’égard des normes imposées aux rédacteurs. Je ne pouvais pas penser le français du XIVe siècle autrement que le français du XXe siècle. En ce qui concerne les définitions, il m’était intellectuellement impossible de les formuler d’une façon traditionnelle pendant que, en français moderne, je les exprimais en contexte, dans une phrase constituée au présent de l’indicatif. Je mettais en valeur, en ce qui concerne les verbes, leurs actants, autrement dit, les catégories de noms pouvant remplir les places offertes par leur combinatoire syntaxique, et en ce qui concerne les noms, les verbes auxquels ils pouvaient servir d’actants.

On trouvera un exposé détaillé de cette méthode sur mon site internet http://jpicochelinguistique.free.fr/ si on veut bien y lire, la préface du Dictionnaire du français usuel. Je suis encore aujourd’hui convaincue qu’en procédant ainsi on aboutit à des définitions claires et pratiques ouvrant plus de perspectives syntaxiques et de possibilités pédagogiques de manipulations que la méthode traditionnelle. J’espère que les utilisateurs éventuels du présent lexique me pardonneront ce qu’ils considéreront peut-être, dans un premier temps, comme une bizarrerie, et qu’à l’usage, ils y trouveront un certain intérêt.