C.N.R.S.
 
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     TERRESTRE     
FEW XIII-1 terrestris
TERRESTRE, adj.
[T-L : terrestre ; GDC : terrestre ; FEW XIII-1, 262a : terrestris ; TLF : XVI, 131a : terrestre]

A. -

[Correspond à terre, p. oppos. au ciel] "De la Terre, qui appartient à la Terre, qui est propre à la Terre, qui a lieu sur la Terre" : ...li homme qui ne renonce A la possession terrestre Ne peut disciple de Dieu estre. (Tomb. Chartr. Trois contes S., c.1337-1339, 104). Cil qui ceste cause maintiennent Afferment pour voir et soustiennent Que la joie en est si parfaite Qu'estre n'en puet nulle si faite En trés tout ce monde terrestre, Et n'en porroit autrement estre, Et bien moustrent cause pourquoy. (MACH., D. Aler., a.1349, 298). Or voions nous sensiblement que une chose pesante de matiere terreste, pour la figure dont elle est composee, se tient sus l'eaue qui est moins pesante, si comme fet une nef ou un vaissel de metal, et autres choses dedens tel vaissel qui sont de tres pesante espece, si comme or et plun. (ORESME, C.M., c.1377, 400). Mes par aventure, aucun pourroit contre ce obicier, premierement car il n'est pas possible par nature que corps terrestre et pesant soit mis ou fait si haut comme sus tout l'aer (ORESME, C.M., c.1377, 402). Plus le desir que rien terrestre, Mais rien n'y vault, ce ne peut estre (CHR. PIZ., M.F., I, 1400-1403, 22). ...ilz se sentiront despouillez et desnuez de celle ignorance, rudece et pesanteur terrestre que avoir au monde souloient (CHR. PIZ., P.V.H., 1416-1418, 49). Maiz, à parler certainement, L'umain et noble entendement Si est exempt de ceste loy Par le plaisir du benoist Roy, Car il descent et prent son estre De plus hault povoir que terrestre (LA HAYE, P. peste, 1426, 69). Car toute la rondeur terrestre ne suffiroit pas pour habiter et labourer tous ensemble ceulx qui sont mors et vifz en la lignie de Juda (CHART., L. Esp., c.1429-1430, 108). Telz grans labeurs te font aparcevoir Tes faictz terrestes Variables et tout plains de tempestes (MESCHIN., Lun. princes M.-G., c.1461-1465, 82). Neccessité est de sçavoir En quel vertu est que tu montres Les grans signes que tu demonstres, S'ilz sont celestes ou terrestres. (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 597). ...et des autres esperes, ausquelles il imposa nom et aux estoilles et corps celestes, qui sont en grant et merveilleux nombre et plus que les autres choses, et bailla aussi nom aux quatre ellemens et choses terrestres (SIMON DE PHARES, Astrol., c.1494-1498, f° 11 r°).

 

-

Lieu terrestre/Paradis terrestre. "Lieu où Dieu plaça Adam et Ève ; éden" : ...quatre nobles vertuz Que no premiers péres Adam perdi Par son meffait et s'en demoura nuz, Quant hors du lieu terrestre fu jettez. (Mir. prev., 1352, 276). Vray Dieu, pére qui (...) le meis [homme] en si noble estre Conme est le paradis terrestre... (Mir. mère pape, c.1355, 375). Et quant dou quart de vostre amour puis estre Mis hors d'enfer en paradis terrestre, Se je ne l'ay, y ne me porroit nestre Doleur ne peinne Qui tant me fust oublique ne senestre, Car ce seroit pour l'onneur et le mestre Perdre dou tout, et la joie celestre Et la mondainne. (MACH., F. am., c.1361, 154). Le Flumaire est une riviere Belle, clere, seinne et legiere, Si douce comme yaue puet estre, Et keurt en Paradis terrestre. (MACH., P. Alex., p.1369, 190). Il fist le Paradis terrestre, Dont l'omme fu signeur et mestre, Et dedens le mist pour ouvrer ; Legierement le puis prouver. (MACH., P. Alex., p.1369, 191). Mais aussy es premiers parens, qui les chassa hors de paradis terrestre, qui leur bailla telle division en eulz et contre Dieu ? Tout [ce] je feis, Orgueil, parce que je leur feiz desirer avoir science semblable a Dieu (GERS., Noël, p.1404, 304). Et du bel et gracieulx estre Qu'on nomme paradis terrestre Lors fut bannis lui et sa femme De paradis a grant diffame Et envoies en grant misere En paine et en labeur sur terre. (MARCADÉ, Myst. Pass. Arras R., a.1440, 4). Pour communiquer sa bonté, Dieu Forma l'omme de pourriture, Et luy donna la couverture De purité et d'ignoscence, Et puis luy bailla demeurance Ou lieu terrestre paradis (Myst. st Adr. P., c.1450-1485, 93). Mon Createur, qui par nostre salvacion nasquites de la glorieuse Vierge Marie en Bethleem, comme bien je le croy, et de vostre naissance tout le monde fut enluminez, qui allastes par le monde et y fustes plus de trente et deux ans passés, et feistes au commencement Adam et Eve, desqueulx nous sumes venus et furent en paradis terrestre, lieu moult delictable (BAGNYON, Hist. Charlem. K., c.1465-1470, 56). ...par celle occasïon [Dieu] Ne leur devoit point pardonner Mais les va tantoust debuter Dehors de paradix terrestre (OUDIN, St Genis M.S., c.1490, 94).

 

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[Par compar.] "Lieu idéal" : ...Dont mes ris, ma joie et mes chans Sont si feni, ne say pourquoy, Qu'il me couvient taire tout quoy, Se ce n'est pour ceste raison Que j'ay veüe la maison Qui trop plus belle est de tout estre, Que ne soit paradis terrestre. (MACH., R. Fort., c.1341, 114). Et quant tu avras en ce huis entré et passé, si enterraz en un preel bel et plaisant et raempli de tous bons fruis et de toutes bonnes odours, si qu'il n'est nulz qui soit en ce lieu a qui il ne soit advis qu'il soit en Paradis terrestre (Bérinus, I, c.1350-1370, 66). Nulle si plaisant ne puet nestre ; C'est uns drois paradis terrestre De li veïr Et oïr Et sentir. (MACH., Les lays, 1377, 436). Cy commence a parler du paradiz terrestre, des regions et principalles provinces qui sont es troiz parties du monde (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 137). Medee entre les autres tant fu joyeuse quant elle vey la lueur et flamboyance du veaurre, qu'il lui fu advis qu'elle entroit en paradis terrestre. (LEFÈVRE (R.), Hist. Jason P., c.1460, 209). Et fut vray que ledit an quarante cinq, environ la Sainct Michiel, ledit Galiot s'estoit party de son maistre le duc de Millan, tant pour voyaiger et pour veoir du monde comme pour faire armes de son corps, pour soy advancer en renommée, qui est et doit estre le paradis terrestre de josne noble couraige (LA MARCHE, Mém., II, c.1470, 64). Regarder a destre, a senestre, Ne fut james plus gente place ; C'est comme ung paradis terrestre Et aussi comme ung lieu de grace. (Myst. siège Orléans H., c.1480-1500, 179). Oncques ne fut si sumptueux demayne Pour voir autant de choses decorees, Grans escussons a fleurs de lis dorees Sur l'eschauffault a dextre et a senestre Gectans fumees de senteurs odorees : Somme, c'estoit ung paradis terrestre ! (LA VIGNE, V.N., p.1495, 169).

 

-

Mansion terrestre. V. mansion "La terre, séjour des humains"

 

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"Qui a la pesanteur des choses de la Terre" : Errer te voy, s'entre facteurs me comptes, Car mon engin est trop rude et terrestre (ROBERTET, Oeuvres Z., c.1450-1500, 102).

 

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[D'une pers.] "Qui est de ce monde" : ...j'ay de moy Presumé que ne pouoit estre Nulle si grant dame terrestre Con moy, pecherresse maloite (Mir. mère pape, c.1355, 368).

B. -

[Correspond à terre, p. oppos. à la mer] "Qui a lieu sur terre (p. oppos. à ce qui a lieu sur mer, p. oppos. à maritime)" : Vela comment par mer fut son armee Aval le vent introduyte et formee De grosses nefs et marine ustencille. (...) Ce point vuidé par gens de grant conseil Fut advisé de faire l'appareil Et le pourchaz de l'emprise terrestre (LA VIGNE, V.N., p.1495, 137).

C. -

[Correspond à terre au sens de "sol"]

 

1.

"De la terre, du sol" : Vela du venin pestifere Pour corrumpre en bien peu d'espace Trestoute la region basse De l'air, et infere les fleurs, Et les fruitz, et autres labeurs Terrestres ["résultats des travaux de la terre"] (Cene dieux, c.1492, 128).

 

2.

[D'une plante ; p. oppos. à grimpant] "Qui couvre le sol" : Item por le dolour de chief qui longement at dureit, R. une pongie de ruwe et une d'ierre terrestre a. tierche de fueilhez de lorrir et bangiez ichez chousez, cuisiez ensemble en aiwe et en vien, et de che ongies le chief. (...) Item R. evrone, sage, tercule yerre terrestre, destrenpreis tout ensemble en eawe caude, se les doneis a boire. (Méd. nam. H., c.1400-1500, 192). Item a celui qui ilh est avis que li chief fent, melle jus d'esdre terrestre avuec asil et oile, et en ongez les narinnes, et tantost cessera la dolour. (Méd. nam. H., c.1400-1500, 205).

 

-

Herbe terrestre. "Lierre" : Et lors print d'icelles herbes aumosniere et terrestre, que elle lya en un petit drapelet blanc, et, en les y lyant, seigna icelles herbes de sa main, en faisant croix et disant sa paternostre tout au lonc (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 329). ...pour la hoster des maulx, peines, et travaux, et courroux que elle veoit que ladite Marion disoit que elle souffroit pour sondit ami qui ce marioit, comme dit est, fist lors deux chapeaux d'erbe terreste et d'erbe aumosniere, et en la presence d'icelle Marion. (Reg. crim. Chât., I, 1389-1392, 355).

D. -

[Correspond à terre au sens de "substance couvrant le sol"]

 

1.

"Qui appartient à la terre comme élément (p. oppos. à l'eau, à l'air, au feu)" : Inde couleur seurmonte la perse en beauté et a plus de nature de l'air meslee avec les parties terrestres qui sont en [sa] complexion que n'a l'autre (CORBECHON, Couleurs S., 1372, 380). Mes par aventure, aucun pourroit contre ce obicier, premierement car il n'est pas possible par nature que corps terrestre et pesant soit mis ou fait si haut comme sus tout l'aer (ORESME, C.M., c.1377, 402). Mais par ce n'est pas dit quelle chose est simplement legiere et maintenant nous voions que feu est tousjours legier [ et tousjours ] est meu en haut, et terre et toutes choses terrestes sont meues en bas et au milieu (ORESME, C.M., c.1377, 662). Et pour ce on doit veoir que eaue bouillie donnee en maniere de beuvrage est meilleur, car en bouillant les parties de l'eaue se rarefient et ainsi les parties terrestres vont au font et puis soit coulee (GORDON, Prat., c.1450-1500, I, 7).

 

2.

[D'une substance] "Qui a la propriété de la terre, qui est consistant et épais" : Est assavoir que la Comète Est un feu, peu accoustumé À apparoir, fort allumé Hault en l'air en une matière Terrestre, visqueuse et légière, Dont la cause matériele Pourroit estre si grant et tele Qu'elle durroit aucunes foiz Par pluseurs jours, voire par moiz. (LA HAYE, P. peste, 1426, 54). Item les vins blans sont plus subtilz et aquatiques que les vermelx, et les vins noirs sont terrestres et de grosse substance. (LA HAYE, P. peste, 1426, 233-234). Le second inconvénient est exasperation de la gorge ou la voix rauocque font aulcuns vins de grande rougeur, a cause de leur secheresse et terrestrieté. Et icelluy inconvenient aussi font les vins, "Et potius verius de Brabant," a cause qu'il sont fort terrestre et vers. (Rég. santé corps C., 1480, 39). Et par especial quant les vins nommés sont meurs ilz font se second dommaige, et non pas le premier, car le moust de grande rougeur engendre fluy de ventre a cause de ses matieres fecales terrestres meslee avec luy, mordant les boyaulx de laquelle morsure s'engendre le fluy de ventre. (Rég. santé corps C., 1480, 40). En aprés dit que le vin noir fait l'omme pigre, endormy, a cause que le vin noir est plus gros et terestre que tous aultres vins, et pourtant les esperis de luy engendrés sont gros (Rég. santé corps C., 1480, 49). La tierce [propriété] est que le froumaige engendre grosses humeurs, car tout froumaige est fait de la plus grosse et plus terrestre partie du laict. (Rég. santé corps C., 1480, 84).
 

DMF 2020 - Synthèse Robert Martin

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