A. -

"Tente (en partic. des Hébreux)" : Sisara en soy enfuyant vint en la tente Jahel (...) et Jahel s'en ala contre Sisara et li dist : "Viens a moy, mon seigneur, entre seurement et point ne te doubte". Le quel si entra en son tabernacle (FOUL., Policrat. B., VIII, 1372, 107). Ceuls ont esté nourris du lait De consolacion et fait, Dont pluseurs font pour le labour Mondain souffrir et a leur tour Menistrer et avoir la cure De leur famille, et couverture Sont com le voile au tabernacle, Qui lui font deffense et ostacle Contre les vens, contre la pluie. (DESCH., M.M., c.1385-1403, 204). ...et il s'apparut aussi a Abraham ou val de Mambre devant son tabernacle, et lui dist qu'il avroit un filz de Sarre sa france moullier, et avroit nom Ysac (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 60). Et pour ce dit il que ceulx qui ne veulent eslire se ilz n'ont avant toute euvre congnoissance de la nativité ressemblent a celui qui devoit commencier un grant chemin a faire, maiz pour ce qu'il ne peut avoir une selle doree ne un tabernacle aussy pour le couvrir et garder du Soloil, il lessa le cheval et comme fol s'en ala tout a pié. (EVR. CONTY, Harm. sphères H.P.-H., c.1400, 33). Se tu veuls, faisons prestement En ce lieu cy trois tabernacles, Car c'est lieu saint plain de miracles, L'un des tabernacles pour ty L'aultre sera pour Moysi, Et l'aultre sera pour Helye [Réf. à Luc 9, 33]. (MARCADÉ, Myst. Pass. Arras R., a.1440, 95).

Rem. FOUL., Policrat. B., V, 1372, gloss. ; Hist. prem. destruct. Troie R., c.1470-1480, gloss. ; Myst. process. Lille K., t.1, a.1485, 4/628 ; t.2, 15/545 ; t.4, 52/247...

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En partic. "Tente de l'arche d'alliance" : La nue est eslevée du tabernacle d'aliance, et les enfans d'Israel sont oultre passez (Mir. emp. Julien, 1351, 186). Moÿses fist .i. miroer et "labium [bassin] eneum" des miroers des femmes es quelz se lavoient les prestres a l'entree du tabernacle (JEAN GOLEIN, Rational B.D., c.1370-1372, 282). David, quant il remist l'arche ou tabernacle... (JEAN GOLEIN, Rational B.D., c.1370-1372, 302).

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[Dans l'Antiquité romaine]

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"Tente militaire" : Et lors ordonnerent il certains dons que li legat porteroient au roy, ce furent .ii. robes vermeilles couleur (...) et les armeures pour armer .ii. chevaux atout les haubergons, tentes et tabernacles et appareil d'estat chevalerex ["tentes et tablernacles" trad. lat. tabernaculum] (BERS., XXX.17, c.1354-1359, ms. Paris, B.N.F., fr. 263, f° 341d). Et aux tribunes – ce sont les maistres des chevaliers – l'en ordonne les tabernacles [trad. lat. tabernaculum] auxquelz ceulz de l'ost qui a ce sont deputez, administrent l'eaue, la busche et les vivres neccessaires (VEGECE, 1380, III.8). Tribule est aussi comme une garite ou un tabernacle a combatre fiché sur quatre pieulz, lequel, comment qu'il soit getté, il se tient sur .iii. piez, et le quart peil [sic] qui est esdrecié, est trop perilleux a ceulz qui en aprouchent ["une garite ou un tabernacle" trad. lat. propugnaculum chez Végèce, peut-être devenu tabernaculum dans le ms. utilisé par le traducteur] (VEGECE, 1380, III.24). Cellui, deffiant du salut de luy et des autres, tout desarmé sailli hors de son tabernacle [trad. lat. tabernaculum] pour le grant bruit (DUCHESNE, César, 1473, VII.15, f° 149d).

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"Tente où se font les prédictions" : ...il renoncerent a leur honeur par le comandement des augurs, pour ce quar il avoyt eu vice en leur creation en ce que C. Curacius, qui avoyt esté president en leur creacion, n'avoyt pas pris le tabernacle [trad. lat. tabernaculum] droytement ni a point (BERS., IV.7, c.1354-1359, ms. Paris, B.N.F., nouv. acq. fr. 27401, f° 251c).

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Tabernacle des lettres. "École élémentaire (sous une tente)" : Si vit la vierge venir en marché, c'est a la place, pour ce quar ilecquez fesoyt l'en certayns jeus en tabernaclez des lettrez, c'estoyt la ou li enffant aprenoyent [trad. lat. Virgini uenienti in forum - ibi namque in tabernaculis litterarum ludi erant ; le syntagme tabernaclez des lettrez provient d'une erreur d'analyse syntaxique de la part de Bersuire, qui a considéré que litterarum déterminait tabernaculis et non ludi] (BERS., III.44, c.1354-1359, ms. Paris, B.N.F., nouv. acq. fr. 27401, f° 235b).

B. -

P. anal.

1.

"Dais" : ...il y avoit sur l'autel une aumaire sy noble d'ouvraige que c'estoit merveille, car il y avoit pardessus ung tabernacle sy bien ouvré qu'on pouoit et luy estoit advis que ce fust tout de fin or. (Percef. I, R., t.1, c.1450 [c.1340], 345). ...Comme eulx disans estre plus asseurez D'estre sans plus dessoubz la sauvegarde Du roy françoys, s'il les prenoit en garde Contre Tuscans, marranes poiltronnailles, Que de cent portes ne de mille murailles. Leurs portes bas ainsi comme l'on voit, Hault au dessus ung tabernacle avoit, Aux piedz duquel furent deux elephans Et autre chose de quoy l'on se servoit Toutes dorees, voire qui s'ensuyvoit Estre en tous sens grans portaulx triumphans (LA VIGNE, V.N., p.1495, 224).

2.

"Réceptacle (sacré) ou demeure (sacrée, comme est sacrée la tente de l'arche d'alliance)"

a)

"Dans un lieu sacré (église, temple, cimetière...), niche, loge ou armoire (en partic. pour y abriter les objets sacrés)" : En la chasse et ou tabernacle De saint Mercure sont pour voir Ces armes (Mir. emp. Julien, 1351, 211). Et quant aucune chose faut a celui idole ou a son tabernacle refaire... (JEAN LE LONG, Voy. Odoric A.M., 1351, 25). En un temple riche, et moult bel Du dieu Appollin, son tumbel Lui ont ses amis appresté, Mais oncq si riche n'ot esté, Ne fu depuis, si com je treuve En escript, car, de moult riche oeuvre, Un tabernacle d'or macis, Richement ouvré firent cilz, De pierres precieuses tout Figuré et pourtrait about (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 109). Escharboucles luisans et beaulx Y ot et plusieurs columbeaulx, Tous de saphirs ou d'autre fine Pierre, la meilleur que l'en fine, Une chayere haulte et chiere, De moult honorable maniere, Assirent en ce tabernacle, Devant un precïeux oracle, A leur maniere, ou un autel Avoit (CHR. PIZ., M.F., III, 1400-1403, 109). ...desquelles six tombes en estoit l'une et la plus grande d'or pur desoubz le tabernacle d'argent fait en façon d'une petite chappelle ouverte des quatre coustez, et faicte a osteaulx artificielment moult merveilleusement et de tresgrant science faicte et acomplie (RENÉ D'ANJOU, Cuer am. espris W., 1457, 141). Joignant de celle tombe haulte et auctentique a merveilles, riche, belle et plaisant et faicte de grant estoffe, estoit celle de Machault, poethe renommé, laquelle estoit sans tabernacle nul, mais touteffoiz n'estoit pource moins qu'elle ne fust d'argent fin toute faicte, et a l'entour escripte d'esmail bleu, vert et violet, et ensise a chanczons bien notees, a virelaiz aussi, a servantoys, a laiz et a motez en diverses faczons faictes et composees (RENÉ D'ANJOU, Cuer am. espris W., 1457, 142).

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En partic. "Réceptacle où est placé le ciboire" : Monseigneur, vous qui estes lieutenant du Roy nostre sire, à gens d'eglise devez honneur et reverence, et l'Eglise, qui est espouse de Jhesus-Christ, mere des chrestiens, devez amer, frequenter, visiter et deffendre à l'exemple de Constantin, duquel est escript, ou premier livre, en l'Istoire tripartye, que, aprez qu'il fut baptisé, tant ayma Dieu et l'Eglise qu'il faisoit porter, en tous lieux où il alloit, ung tabernacle fait en la fourme d'une eglise, et emprez avoit prestres et clercs qui Dieu servoient très devotement. (BUEIL, II, 1461-1466, 68). Au costé senestre contre ung pillier quarré clos d'ung treillis de fer ens une armariole est le corps Jesucrist, car dela les mons par toutes les eglise n'y a point tabernacles au grant autel maiz le plus mettent le corps Nostre Segnieur en une ausmoire a costé senestre du ceur (BARBATRE, Voy. T.-C. P., 1480, 98). Estoit il donc mort ? Si estoit. Et comment cela ? Il parloit Quant il queroit ung tabernacle, Il est vray c'estoit ung miracle. Par les yeulx, vin rouge pissa .V. brocs entiers et une cruche Dont le jardin on arrousa.[Il était mort (cela est certain, car il ne parlait plus). Il parlait même quand il se rapprochait du tabernacle (pour communier) (?)] (Vig. Trib., c.1480, 234). ...Pour son devoir vers Dieu et luy parfaire, Le lendemain fist chanter son office Si solempnel de devot sacrifice Au grant moustier sur table et sur autel, Qu'omme n'en vit depuis cent ans ung tel. Ung tabernacle au grant cueur [de l']eglise Fut exposé comme l'on scet la guise, Avironné de mille luminaires ; Et par dessoubz en fiction requise Une grant fierte de couverture exquise Bien reparee avec les ordinaires Cerymonyes (LA VIGNE, V.N., p.1495, 192).

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P. méton.

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"Sanctuaire du Temple de Jérusalem" : ...a l'exemple de Marie qui fist les courtines qui avironnoient le tabernacle. (JEAN GOLEIN, Rational B.D., c.1370-1372, 418).

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"Église" : Je m'en voy vers l'archydyaque, Qui la prie en son tabernacle. (Myst. st Bern. Menth. L., c.1450, 122).

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P. métaph. : ...et toutevoye ceulx qui les tirannisent et destruisent ont embrasé vostre saintuaire, et en terre ont polu le tabernacle de vostre nom, car pour l'eglise, qui y estoit honnoree, et justice excercee, on l'apeloit France et royaulme tres crestien, et ilz ont tellement tout polu et embrasé qu'il n'y a eglise honnoree ne justice excercee, et se pert le nom de vous et de vostre seignorie (JUV. URS., Loquar, 1440, 369).

b)

"Lieu de séjour, demeure (de Dieu, des saints, des bienheureux...)" : Transibo in locum tabernaculi admirabilis usque ad domum Dei, je passeray par un tabernacle merveilleux jusques a la maison de Dieu. (Mir. march. larr., c.1349, 93). ..."vecy le tabernacle de Dieu avesques lez honmes, et habitera aveques eulx" ; et pour ce, mon tres redoubté Seigneur, que vous estes un dez plus nobles membres du tabernacle de Dieu en Crestianté, pour tant, je vous offre et presente, en ce tabernacle, ce que je puis dez labeurs de mon estude et ce Songe lequel j'ay songé, aucune foys suent et aultre foys tout tramblent, et le vous presente en ce tabernacle de l'Eglyse militant, afin que je puisse dire lez paroles qui sont escriptes Luce decimo quinto "(...) : afin que nous puissons desservir que nous soïons receüs ou tabernacle de Dieu, qui est pardurable" (Songe verg. S., t.2, 1378, 271). LUCIFERT. Or va, je t'am pry par amour, Car Dieu le Pere les a faix [les hommes] Pour se que nous submes meffaix, Qu'il en veult amplir les ostaiges, Qu'avons perdux par nous outraiges, De ce tresnoble tabernacle. (Pass. Semur D.M., c.1420 [1488], 15).

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[À propos du corps de Marie, où repose Jésus] : ...si conme mon filz le benoit Jhesus reposa en mon tabernacle singuliérement, et je aussi en son tabernacle ay reposé et repose semblablement. (Mir. march. larr., c.1349, 92). Le treshault, c'est Dieu, a saintiffié son tabernacle, c'est la vierge benoite (Mir. st J. Paulu, c.1372, 92).

c)

P. ext.

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"Réceptacle" : Si a a son col une chainture d'or et de pierres precieuses moult richement aournee, et sciet en un tabernacle d'or fin. (JEAN LE LONG, Voy. Odoric A.M., 1351, 24). Filz, quant tu sens en toy espandre de dessus desir de eternele beatitude, et tu couvoites issir du tabernacle de ton corps afin que tu peüsses sans umbre d'entrelaissement contempler ma clarté, dilate ton cuer et espan, et rechoy par tout desir ceste sainte inspiracion (Internele consol. P., 1447, 214).

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"Demeure" : De cheulx qui aiment le siecle dist le Psalmiste, asscavoir qui leurs tabernacles ont habondans et les celiers plains, "Leurs filles sont composees et aornees a la samblance du temple" (DAUDIN, De la erudition H., c.1360-1380, 372). O ! dames de souveraine dignité, lueurs des cieulx et enluminement de la terre, fontaines de paradis et la joye des beneurés, dont est venue a vostre haultesce telle humilité que daigné avez dessendre de vos pontifficaux sieges et resplandissans trosnes pour venir ou tabernacle troublé et obscur de la simple et ingnorent estudiente... (CHR. PIZ., Cité dames C., c.1404-1407, 638). Ly maufez (...) Jeté as par contrainte Hors de son tabernacle (Prières saints R., t.2, 1440,,, 239). Mes freres doncques je querray ; Ne sçay ou je les trouveray, En quel part n'en quel tabernacle, Se ce n'est au lieu du senacle Ouquel Jhesus la cene fist. (Myst. Pass. Troyes B., a.1482, 809). LUCIFFER. (...) Je ne sçay plus quel propos maintenir Se maintenant vous ne faictes miracle. BERITH. Te fault il poinct ung petit de triacle Pour te reffaire a poinct venir le cueur ? BURGIBUS. Dea, se tu rons ton villain tabernacle, Tantost a bas tu viendras, je suis seur. LUCIFFER. Si grant erreur me vient a contre cueur, Que teste et corps me creve de despit ! (LA VIGNE, S.M., 1496, 369).

Rem. GRÉBAN, Pass. J., c.1450, gloss.